La Victoire est en Elles - Domitille Kiger

  • il y a 4 mois
Cette semaine, Alexandre Delpérier et Salim Ejnaïni reçoivent la parachutiste Domitille Kiger. A 38 ans, elle est championne du monde et détentrice de plusieurs records du monde.

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Sport
Transcription
00:00♪ ♪ ♪
00:18Parce qu'il y a les femmes, parce qu'il y a le sport,
00:20soyez les bienvenus dans votre rendez-vous dédié aux femmes dans le sport.
00:23Bienvenue dans La Victoire est en elle,
00:25avec encore aujourd'hui une championne exceptionnelle
00:28que nous sommes ravis d'accueillir avec mon ami Salim.
00:31Interview en chute libre aujourd'hui avec Domitile Kiger, championne de freefly.
00:35C'est quoi ?
00:36Eh bien, à 38 ans, la française est une référence mondiale du parachutisme sportif.
00:41Toujours en quête de record, cette championne au plus de 9000 sauts
00:44nous parlera aussi de l'explosion de la discipline en soufflerie.
00:48Ma chère Domi, bonjour.
00:50Bonjour.
00:51Je te présente mon ami Salim.
00:53Bonjour Domitile.
00:54Salim, enchanté.
00:55Salim qui a l'habitude de piloter des avions
00:57et qui a même sauté une fois d'un avion.
00:59Oui, tout à fait.
01:00C'était où ?
01:01C'était, on en a parlé il n'y a pas dix minutes.
01:04À Soulac-sur-Mer.
01:05À Soulac-sur-Mer.
01:06Tout à fait, exactement.
01:07Dis donc, t'oublies tout toi.
01:08C'est aussi le sens de mes débuts.
01:09Eh bien, tu vois, il n'y a pas de hasard.
01:11On est ravis de t'accueillir, vraiment Domi,
01:13parce que c'est une discipline qui nous touche,
01:15c'est une discipline exceptionnelle.
01:17T'es venue avec ton matériel, avec ton sac, dans lequel il y a ta voile.
01:20Mes voiles, j'en ai deux.
01:22Ah oui, bien sûr.
01:23Oui, il vaut mieux.
01:24Il y a la salle de secours.
01:25Ça fait quoi, ça ?
01:26Dix kilos ?
01:27À peu près dix kilos, oui.
01:28Ton casque ?
01:29Le casque.
01:30Un de mes altissons.
01:31J'en ai un deuxième toujours à l'intérieur du casque.
01:33Ça, c'est ce qui nous permet d'avoir les altitudes,
01:35des billes de sonnerie pour les altitudes,
01:37pour la séparation, pour ouvrir son parachute.
01:39Et puis, mon altimètre, comme une grosse montre,
01:41que je porte au poignet gauche.
01:42Alors, il faut que vous sachiez qu'il y aura un avant et un après, Domi,
01:44puisque Domi est une légende dans sa discipline.
01:46Elle est multiple championne de France,
01:48multiple championne du monde, record woman du monde.
01:50Et je voudrais qu'on débute cette émission avec ces images exceptionnelles
01:53du dernier record du monde de 80 jeunes femmes
01:56qui ont réussi ce saut-là que vous découvrez.
01:58Alors là, c'est un vidéaste qui a sauté quelques secondes avant
02:01et qui voit toutes ces femmes sauter de cet avion.
02:03Là, on est à quoi, à 6000 mètres ?
02:05On part à 6000 mètres, absolument.
02:07C'était où, ce saut ?
02:08C'était à Illoy, en Arizona.
02:09C'est à peu près à une heure au sud de Phoenix.
02:11C'est traditionnellement là où s'organisent les records du monde féminin
02:14depuis une quinzaine d'années maintenant.
02:16Donc, vous êtes 80 jeunes femmes à sauter.
02:17Explique-moi ce qui se passe, là.
02:19Alors là, vous voyez l'approche.
02:21On a donc une espèce de ronde qu'on voit,
02:23qu'on commence à avoir au centre de la formation
02:25avec quatre cercles, un peu aux quatre pôles.
02:29Et à partir de cette base-là,
02:31toutes les femmes s'approchent de ce centre
02:33et viennent saisir avec leurs mains le bras
02:35des femmes qui sont arrivées avant elles
02:37et construire cette espèce de puzzle géant en plein ciel.
02:39Là, on voit que la figure est quasiment complète.
02:41Il ne reste plus que quelques personnes sur les extérieurs.
02:43Qui doivent arriver au bon moment, au bon endroit.
02:45Vous voyez, là, on a tout le monde.
02:47Donc là, le record est validé.
02:48On va le voler quelques secondes.
02:50Et là, ça commence à se séparer, exactement.
02:52Donc, on a d'abord les personnes sur l'extérieur
02:54qui font demi-tour et qui s'éloignent.
02:56Une deuxième vague.
02:57Et puis, la troisième vague de séparation.
02:59On en fait trois pour avoir plus d'espace en l'air.
03:02Et ça, c'est filmé de ton casque, avec ta GoPro.
03:05Exactement, c'est ma GoPro.
03:06C'est sur ma tête.
03:07Donc là, vous voyez ce cercle.
03:09Il faut expliquer que vous êtes bien tête en bas.
03:11On est tête en bas, exactement.
03:12La vitesse.
03:13Sur ma tête, on est à peu près à un peu moins de 300 km heure.
03:16Je dirais 280 km heure.
03:18Et là, j'entends Salim qui fait...
03:20Alors, Salim qui voit pas.
03:21Mais crois-moi, tu te régales et tu l'écoutes.
03:23Alors, vas-y.
03:24Donc là, on voit la structure qui se crée.
03:26Donc là, vous voyez ma main, en fait.
03:27Je suis donc accrochée sur cette base.
03:29Moi, je suis sortie d'un avion qui était à droite.
03:31Alors que la base sur laquelle moi, je suis accrochée,
03:34sortait de l'avion de tête.
03:35Donc, j'ai un petit peu plus de distance à parcourir.
03:38On voit mon ami Magali, qui est tout en rose, de l'autre côté.
03:42Qui a la même place que moi dans mon pod.
03:44Un pod, c'est une espèce de demi-cercle de 5 personnes.
03:48Et on en construit sur la base.
03:50On va en construire les uns sur les autres.
03:52La complexité, c'est quoi ?
03:53Parce que quand on regarde, on se dit...
03:54Ouais, c'est simple.
03:55Ça n'a pas l'air si difficile.
03:56Ça, c'est parce qu'on vole super bien.
03:58Oui, c'est vrai.
04:00Je n'avais pas pensé à ça.
04:01C'est vrai que vous, vous maîtrisez parfaitement tout.
04:03C'est énormément d'entraînement.
04:04Et on était vraiment très, très fiers de toutes les filles
04:07qui ont participé à ce projet.
04:09Il s'appelait Project 19.
04:10Project 19, parce qu'à la base, on devait le réaliser en 2020
04:13pour célébrer les 100 ans du 19e amendement de la Constitution américaine
04:17qui a accordé le droit de vote aux femmes.
04:19Tout un symbole.
04:20Exactement.
04:21Symboliquement, on voulait faire un 100.
04:23Le Covid nous a empêchés de nous retrouver en 2020.
04:262021, pareil, aller aux États-Unis, pour beaucoup de gens,
04:28ce n'était pas encore très facile.
04:30Donc, on a reporté à 2022.
04:32On a commencé des tentatives à 72 qu'on a réalisées.
04:36On est passé à 80 qu'on a réalisées.
04:38Et le dernier jour, on a fait plusieurs tentatives à 100.
04:40Et on a réussi à avoir 97 personnes accrochées.
04:43Mais ça ne compte pas.
04:44Puisque les 100 ne sont pas là.
04:45Exactement.
04:46Il y en a trois qui ne sont pas arrivées.
04:47Pour qu'un record soit validé, vous devez réaliser dans le ciel
04:49exactement la figure que vous avez soumise au juge.
04:52Donc, c'est un dessin avec le positionnement de chacune dans cette formation.
04:56Et vous devez monter dans les avions avec le nombre exact de participants
05:00et réaliser précisément la figure
05:02que les juges puissent comparer le dessin que vous avez soumis
05:04avec la photo que le vidéomane va ramener au sol.
05:06Qu'est-ce qu'il a manqué ?
05:08Alors, ce n'est pas un reproche.
05:09Pourquoi vous n'êtes restée qu'à 97 ?
05:11Il n'a manqué pas grand-chose.
05:13Les jeunes femmes n'étaient vraiment pas très loin de leur place.
05:16Alors, il a manqué un peu de rapidité peut-être pour elles.
05:19Ou alors, on pourrait arguer qu'il a manqué peut-être 4 secondes de chute libre en plus.
05:22Mais malheureusement, pour la sécurité,
05:24il faut évidemment qu'on reste à certaines altitudes de séparation.
05:27Parce qu'on peut tricher et se faire un petit kiff en disant
05:29« Ok, on ne bouge pas, on reste 5 secondes de plus et on y arrive. »
05:31Alors, il y a une blague assez récurrente dans le milieu du big way.
05:34En anglais, quand on veut faire une approximation sur un chiffre,
05:36on dit « ish », « nine ish », « neuf » et « à peu près neuf ».
05:40Et quand on fait les répétitions au sol avant d'aller faire les sauts,
05:44on annonce les altitudes de séparation pour que les filles répètent la séparation au sol.
05:50Et généralement, quand on arrive vers la fin d'une semaine de record,
05:53il y a du « ish » qui apparaît au niveau des séparations pour dire
05:56« Si vous vous envoyez une qui n'est pas très loin, restez une petite seconde de plus. »
05:59Mais bon, c'est plus une plaisanterie qu'une réalité.
06:02Karim, Salim, il y a du mal à comprendre aujourd'hui.
06:06Pas très grave.
06:08Qu'est-ce qu'il faut savoir ?
06:10Quelles sont les bases de ta discipline ?
06:13Tout à l'heure, tu nous répondais que tu voles très bien,
06:16c'est pour ça que ça a l'air facile.
06:18Qu'est-ce que ça veut dire voler très bien ?
06:19C'est quoi les bases ?
06:209000 sauts, on rappelle.
06:22Pour voler correctement, c'est un sport qui finalement est plus mental que physique.
06:28Il faut un minimum de conditions si vous le pratiquez à très haut niveau.
06:32Par rapport à beaucoup d'autres sports où vraiment la capacité physique,
06:36cardiaque ou musculaire va vraiment faire la différence entre une performance parfaite,
06:41réussie et une qu'il n'est pas, dans notre sport, ce n'est pas le cas.
06:44Vous n'allez jamais vous poser d'un saut en vous disant
06:46« J'étais un peu short niveau cardio, je n'ai pas réussi. »
06:49Ça va toujours être votre capacité à rester présent mentalement
06:52et à maîtriser parfaitement vos mouvements.
06:56La partie physique, évidemment, compte.
06:59Ce sont des schémas moteurs nouveaux à apprendre.
07:01Les humains, ça ne fait pas très longtemps qu'ils volent,
07:02donc ce n'est pas quelque chose de très instinctif.
07:04Oui, on ne vole que quand on est en l'air et maintenant en soufflerie aussi.
07:07Maintenant en soufflerie, oui.
07:08C'est un peu de proprioception, un peu d'équilibre, un peu de gainage,
07:12mais ça reste physiquement vraiment très accessible.
07:15C'est pour ça que vous avez un profil, une variété d'âges, de profils physiques dans ce sport
07:21qui est beaucoup plus large, même à haut niveau, que dans beaucoup d'autres disciplines.
07:25Explique-nous.
07:26On peut sauter jusque longtemps.
07:28Si tu as une tranche d'âge élargie, étendue.
07:32Je crois que dans ce record-là, la plus jeune devait avoir une vingtaine d'années
07:36et la plus âgée pas loin des soixante.
07:38Mais on peut sauter jusqu'à plus de 80 ans, non ?
07:40On peut sauter jusqu'à 80 ans, bien sûr.
07:43Explique-nous, et après on va retracer ton parcours,
07:46comment, quand vous êtes en formation ou quand tu es en chute libre,
07:50comment l'inclinaison d'une main de quelques degrés va tout changer ?
07:55Effectivement, les attitudes qu'on va adopter,
07:58les positions dans lesquelles on va plus ou moins se figer,
08:01c'est une façon de présenter son corps au vent
08:04qui va induire des déplacements, des freinages, des accélérations.
08:07C'est pour ça qu'il faut un petit peu de gainage, un petit peu de résistance.
08:10Contrairement à l'idée reçue qu'ont beaucoup de gens sur le parachutisme,
08:13on n'a pas du tout l'impression de tomber dans le vide.
08:15On est au contraire, tout de suite, dès la sortie d'avion,
08:18on rentre dans le vent relatif, qui est un terme qui décrit le vent
08:21subi par un objet en mouvement.
08:23L'avion avançant, quand vous en sautez, vous êtes dans le vent relatif de l'avion
08:26et puis au bout de 4-5 secondes, une phase qu'on appelle la projection,
08:29on se retrouve dans le vent relatif de sa propre chute.
08:31Donc là, vous êtes vraiment dans un élément qui a une texture.
08:34C'est un peu comme quand vous mettez votre main en dehors de la voiture,
08:36sur l'autoroute, vous sentez la résistance.
08:38Sauf qu'on n'est pas à 300 kilomètres par heure.
08:39Voilà, sauf si vous faites des très grosses fêtes de vitesse.
08:41Mais à 300, il y en a peu qui vous disent
08:43« Attends, ne bouge pas, je vais tester ! »
08:45Vous voyez cette sensation quand même.
08:47Et en fait, là, on a ça sur tout notre corps.
08:48Et effectivement, des toutes petites modifications de position
08:52vont induire potentiellement des déplacements rapides,
08:54encore plus quand on est tête en bas,
08:56parce qu'on a beaucoup plus de vitesse.
08:58Et plus on a de vitesse, plus l'air devient dense autour de soi
09:01et donc plus c'est réactif.
09:02Et du coup, est-ce que tout le monde a la même position
09:05ou chacun a ses repères ?
09:07Alors, on a tous, dans un saut comme ça,
09:10on a tous à peu près la même position en termes d'orientation,
09:13de comment sont présentés nos bras, nos jambes.
09:15Alors, avec des petites différences, par exemple,
09:17pour ce genre de saut sur les jambes,
09:19on va en avoir une plutôt devant, une plutôt derrière,
09:21une position qui s'appelle un daffy.
09:23Et puis, il y en a un peu comme en skateboard,
09:25il y en a qui sont bouffiers, il y en a qui sont régulaires.
09:27Il y en a qui vont préférer voler avec la jambe droite devant,
09:29l'autre avec la jambe gauche.
09:30On n'appelle pas ça comme ça.
09:31Et du coup, nous, en tant qu'organisatrice,
09:33c'est une information qu'on veut connaître
09:35parce qu'en fonction de ça,
09:36on va placer les jambes de façon différente.
09:38On va essayer de ne pas placer deux personnes
09:39qui ont des jambes opposées juste côte à côte
09:41parce qu'elles ont plus de chances
09:43que les jambes éventuellement se touchent ou se superposent.
09:46Et donc là, quand il y a une superposition en l'air
09:48à ces vitesses-là, ça crée une dévente
09:49et potentiellement, ça peut faire que
09:51les jambes glissent sur des pots de bananes
09:52et sont éjectées du saut.
09:54Multiple championne de France,
09:55multiple championne du monde,
09:56record woman du monde avec ce saut
10:00avec 80 jeunes femmes réalisées aux États-Unis
10:02en novembre dernier.
10:03Tu es aussi une femme d'affaires, on va en parler.
10:05Je voudrais qu'on essaie de retracer un peu ton parcours.
10:07Toi, tu viens de la région parisienne.
10:08Gamine, tu faisais de l'équitation.
10:10Oui, tout à fait.
10:11Et puis, l'été de mes 12 ans,
10:13je passais tous mes étés sur le bassin d'Arcachon.
10:15J'avais un parrain qui avait une maison là-bas,
10:16ce qui nous a attirés dans le quartier.
10:18On a passé absolument toutes mes vacances d'enfance.
10:20Et l'été de mes 12 ans...
10:21Ah, le sud-ouest.
10:22Ah, le sud-ouest.
10:23Oui, oui.
10:24Attendez, comment ça ?
10:25Vous n'êtes pas du sud-ouest ?
10:26Vous n'avez pas d'attache ?
10:27Non, vous ne connaissez pas la ville.
10:28Il se passe un truc.
10:29Vas-y, raconte.
10:30Et donc cet été-là, j'avais...
10:31Donc moi, je faisais beaucoup d'équitation.
10:3312 ans.
10:34J'avais 12 ans, j'adorais l'équitation.
10:35Et donc, j'avais l'impression d'avoir un sport de terre,
10:38un ancrage sur la terre.
10:39Et je ne sais plus vraiment pourquoi,
10:41parce que ça commence à dater,
10:42mais 12 ans, je me souviens avoir demandé à ma maman
10:44si je pouvais essayer d'aller faire un baptême de plongée
10:46et un baptême de parachutisme.
10:48En fait, j'avais envie de faire quelque chose dans l'eau
10:50et de faire quelque chose dans l'air.
10:52Dans quel feu, quoi ?
10:53Oui, je n'ai toujours pas trouvé ça, d'ailleurs,
10:55vraiment, en termes d'activité sportive.
10:57Et donc la plongée, ça a été possible,
10:59parce qu'à 12 ans, on peut faire...
11:00Dans le système PADI,
11:01on peut faire ses premiers brevets de plongée.
11:03Par contre, le parachutisme,
11:04ma maman a quand même été gentille,
11:05elle m'a emmenée sur un paraclub,
11:06mais là, ils m'ont regardée,
11:07ils m'ont dit, tu es trop petite,
11:08reviens dans trois ans.
11:09Ce qui ne m'arrangeait pas du tout comme réponse à l'époque.
11:12Parce que là, on peut sauter à 15 ans ?
11:13On peut sauter à 15 ans, oui.
11:14Ah oui, moi, c'était 17.
11:16On peut faire un tandem et la PAC derrière,
11:18il faut une autorisation parentale,
11:19si vous n'avez pas 18 ans.
11:20PAC, progression, accélérant, chute.
11:21Progression, accompagnant, chute.
11:22Accompagnant.
11:23Ce qui est donc la formation de base.
11:26Moi, j'ai fait à 16 ans.
11:27À 15 ans...
11:28Donc, à 12 ans, tu t'es fait retoquer.
11:29À 12 ans, je me suis fait recaler.
11:30Ils m'ont dit, reviens plus tard.
11:31Donc, du coup, j'ai attendu...
11:32C'est gardé dans ta tête, ça ?
11:33Ah, ça ne m'a pas lâchée, mais ça m'a...
11:35Ça a été pire que tout, même, d'être refusée, non ?
11:37Oui, probablement, oui.
11:38Ça a probablement dû allumer le feu
11:41sous ce désir-là.
11:43Et donc, du coup, mes parents m'ont offert un tandem
11:45pour mes 15 ans,
11:46que j'ai été faire à Mimisan,
11:48via un ami d'ami, pas très loin d'Arcachon.
11:51Et puis, l'année d'après,
11:52j'ai été bosser dans la pizzeria de la mère d'un copain
11:54pendant tout le mois de juillet, à Arcachon,
11:56pour aller me payer ma Pâques au mois d'août.
11:58Et puis ensuite, je ne suis jamais repartie.
12:00Tu te souviens de ces premiers sauts ?
12:02Oui, je me souviens très bien de mon premier saut,
12:04le tandem.
12:05Et alors, je me souviens à la fois de...
12:08Dans l'avion, plus que de la peur,
12:10c'était de l'impatience et de la curiosité.
12:12Alors, quand la porte s'est ouverte
12:13et que les gens qui me faisaient des sourires
12:15depuis un quart d'heure, tout d'un coup,
12:16sont tombés de l'avion,
12:17je me suis quand même pris une bonne petite boule au ventre.
12:19Ah, sans moi seule.
12:21Oui, oui.
12:22Et par contre, dès l'instant où j'ai été dans le ciel,
12:24la peur disparaît complètement.
12:26Bon, généralement, un premier saut,
12:27vous ne vous rappelez pas de grand-chose.
12:29Le cerveau, il est tellement...
12:30Ça va vite.
12:31Il est tellement de stimuli nouveaux et différents
12:33qu'on ne capte pas grand-chose.
12:34C'est pour ça que c'est bien de prendre des vidéos.
12:36Ça vous permet de vous rappeler a posteriori.
12:38Mais ce qui m'a le plus touchée, marquée
12:41et je pense le plus capturée à ce moment-là,
12:43ça n'a même pas tant été l'activité en elle-même
12:46que l'environnement que j'ai découvert.
12:48J'arrivais, donc j'avais 16 ans,
12:49j'avais déjà des grosses vélités d'indépendance,
12:51même si j'avais une très bonne relation avec mes parents.
12:53Quand j'étais petite,
12:54j'avais très envie d'être grande
12:55pour faire un peu comme j'avais envie.
12:56Et là, j'arrivais dans un environnement
12:58où déjà tout le monde était plus vieux que moi,
13:00où tout le monde dégageait une énergie,
13:03une joie, des sourires, une complicité
13:05qui me paraissait super belle.
13:07Surtout que moi, à l'école,
13:08je n'étais pas super populaire,
13:09je n'avais pas plus de copains que ça.
13:11Donc j'avais vraiment envie de ça.
13:13Et ça ne s'est jamais démenti
13:15dans toute ma vie de parafutiste.
13:16Et je pense que c'est aussi une des raisons
13:18pour laquelle j'ai fait ma vie dans ce monde-là.
13:20C'est parce que la communauté
13:21à laquelle ça m'a donné accès,
13:23la vie à laquelle ça m'a donné accès,
13:25était absolument merveilleuse.
13:27Et ça reste toujours très vrai.
13:29Tu oublies de me dire un truc,
13:30c'est qu'en fait, tu avais envie de liberté.
13:32Et voler, c'est la liberté.
13:33C'était de la liberté en dose énorme d'un coup.
13:37C'était génial.
13:38Et puis c'est responsabilisant.
13:40Il y a quelque chose aussi
13:41qui est venu assez vite, si je ne me trompe pas.
13:44C'est la compétition.
13:45Pas si vite que ça.
13:47Parce que j'ai fait mon premier saut,
13:49ma PAC, j'ai commencé d'un point de vue sportif à 16 ans.
13:53Sauf qu'à 16 ans, j'étais au lycée encore.
13:55Et puis ça coûte cher.
13:56Donc voilà, je n'avais pas de sous.
13:58Du coup, je ne sautais pas l'année,
13:59je ne sautais que l'été.
14:00Dès l'été d'après, je me suis fait embaucher.
14:01Du coup, je n'ai plus été faire des pizzas.
14:02Je me suis fait embaucher sur le centre de parafutisme.
14:04Les premières saisons, je faisais les sandwichs
14:08et je servais les cocas.
14:09Et puis au bout de 2-3 saisons,
14:10je piliais les parachutes des autres.
14:12C'est le parcours un peu classique
14:14pour un jeune dans le parachutisme.
14:16Donc du coup, juillet-août, je sautais beaucoup.
14:18Par contre, tout le reste de l'année, je ne sautais pas.
14:20Et c'était long ces 10 mois ?
14:22Et c'était long ces 10 mois, oui.
14:24En plus, je n'avais pas le permis.
14:25En bonnes parisiennes qui se respectent.
14:26Donc je n'allais nulle part.
14:30Mais ça devenait un point phare de ma vie sociale,
14:35de ma vie de jeune adulte.
14:38Clairement, j'avais très envie de ça.
14:40Et la suite ?
14:41Pendant toutes mes études,
14:43je commençais à sauter un peu dans l'année
14:46sur certains événements,
14:48même si c'était principalement cerné sur l'été.
14:51Et puis en 2008,
14:54ça faisait déjà 7 ans que je pratiquais.
14:57Donc j'avais à peu près 650 sauts à ce moment-là.
15:02Un coup d'été bien acharné.
15:05Pardon, je t'interromps.
15:07À partir de combien de sauts, on dit
15:09que c'est un parachutiste chevronné ?
15:11100 ? 200 ?
15:12Alors en fait, ça, ça va vraiment dépendre.
15:14Moi, quand j'avais 50 sauts,
15:15je trouvais que quelqu'un avec 100 sauts,
15:16c'était un sky-god.
15:17Et puis quand j'ai eu 100 sauts,
15:18je trouvais que quelqu'un avec 1 000 sauts,
15:19c'était incroyable.
15:20Et puis quand j'ai eu 1 000 sauts,
15:21ça me paraissait banal.
15:22C'était quelqu'un avec 10 000 sauts.
15:23Bon ben là, je m'en approche.
15:24Je suis sûre que quand j'y serai,
15:25ça me paraîtra plus long que ça.
15:28Non mais tu as répondu.
15:29Je comprends.
15:30Et donc je t'interromps.
15:31Donc en 2008,
15:33là, je suis partie 3 mois à Illinois,
15:35en Arizona,
15:36donc l'endroit dont on a vu
15:37les images tout à l'heure,
15:38qui est un endroit très important pour moi
15:39parce que ça a vraiment été
15:40un moment complètement charnière dans ma vie.
15:43Un tournant.
15:44Je n'avais pas encore tout à fait
15:45fini mes études.
15:46À ce moment-là,
15:47j'étais entre ma licence et mon master.
15:48De ?
15:49Une licence d'histoire à la Sorbonne
15:51et un master en audiovisuel à l'ESRA,
15:53en écriture, documentaire.
15:55Je ne me suis pas beaucoup servie après.
15:57Et j'ai pris une année de césure
15:59entre ces deux diplômes-là.
16:01Mes grands-parents étaient décédés.
16:02Ils m'avaient laissé un peu de sous.
16:03Et de façon extrêmement raisonnable,
16:04j'ai décidé que la façon
16:05la plus intelligente de les dépenser,
16:07c'était de partir en Arizona 3 mois
16:09pour faire plein de sauts
16:10et plein de souffleries.
16:11J'avais jamais fait de souffleries
16:13à ce moment-là.
16:14Ce n'était pas encore très répandu.
16:15On n'avait quasiment pas en Europe.
16:16On va avoir des images de souffleries.
16:17Oui.
16:18Ça, c'est génial aussi.
16:19Ça a changé la vie des parachutistes.
16:21Ça a changé le sport.
16:22Vraiment.
16:23Et donc je suis partie
16:24passer 3 mois là-bas
16:25où j'ai fait 300 sauts,
16:2610 heures de souffleries,
16:27ce qui était beaucoup à l'époque,
16:28avec le projet de monter
16:29une équipe de freefly
16:30en rentrant en France.
16:31J'avais déjà deux copains
16:32avec qui on avait ce projet-là.
16:33Ils avaient, eux,
16:34un petit peu plus de sauts que moi.
16:35Donc l'idée, c'était que j'avais
16:36de faire mes devoirs
16:37et rattraper un peu
16:38leur nombre de sauts
16:39et qu'on commençait.
16:40Et donc on a fait
16:41notre première saison de compétition
16:42cet été-là en 2008.
16:43Et on a gagné la Coupe de France
16:44et les Championnats de France
16:45en National 2.
16:46Donc on était des piu-piu,
16:47mais bon,
16:48on s'était donné les moyens.
16:49Donc dans notre catégorie,
16:50on a gagné
16:51et on a eu vraiment de la chance
16:52en termes de timing
16:53parce que cette année-là,
16:54les deux équipes de France,
16:55dont une qui était champion
16:56du monde cette année-là
16:57et l'autre qui avait fait quatrième,
16:58avaient décidé d'arrêter,
16:59de prendre leur retraite.
17:00Donc nous, on s'est retrouvés
17:01les petits nouveaux
17:02à des années-lumières
17:03du niveau des équipes de France
17:04qui étaient là cette année-là,
17:05mais les premiers de cordée,
17:06quoi, pour la relève.
17:07Donc on est rentrés...
17:08L'entraîneur national
17:09est venu nous demander
17:10à l'issue des Championnats de France
17:11si ça nous intéressait
17:12de rentrer d'abord en espoir.
17:13Nous, évidemment,
17:14on a sauté de joie
17:15et on a dit oui.
17:16Tu m'étonnes !
17:17Et ensuite,
17:18on est rentrés
17:19dans le système français
17:20qui est bien plus avantageux
17:21que beaucoup d'autres pays.
17:22En France,
17:23on a quand même la chance
17:24d'avoir du soutien,
17:25on va dire gouvernemental,
17:26quel que soit le sport
17:27et quelle que soit
17:28la notoriété de votre sport.
17:29Le parachutisme,
17:30ce n'est quand même pas
17:31un sport très connu.
17:32Et donc, du coup,
17:33j'ai eu la chance
17:34d'être encadrée.
17:35Là, j'ai fait cinq saisons
17:36en équipe de France,
17:37donc avec un coach,
17:38avec de la préparation
17:39et tout ça.
17:40Et donc,
17:41on est rentrés
17:42dans le système français
17:43qui est bien plus avantageux
17:44que beaucoup d'autres pays.
17:45Là, j'ai fait cinq saisons
17:46en équipe de France,
17:47donc avec un coach,
17:48avec de la préparation mentale,
17:49j'ai découvert
17:50un autre univers.
17:51Donc, j'ai poussivement
17:52terminé mon master
17:53et puis quand j'ai terminé,
17:54je me suis dit,
17:55je vais me concentrer
17:56sur la compétition
17:57pendant quelques années.
17:58Alors, c'est quoi ces images-là ?
17:59Alors, ça, c'est Dubaï.
18:00C'est à Dubaï ?
18:01Exactement, en 2012.
18:02C'est ma dernière grosse compétition.
18:03C'est la compétition
18:04sur laquelle j'ai pris
18:05ma retraite de Free Fly
18:06et on a gagné
18:07les championnats du monde
18:08avec ça.
18:09Donc, ça,
18:11je suis performeuse.
18:12Là, je suis à gauche de l'écran,
18:13à droite maintenant.
18:14Alors, en compétition,
18:15ça se pratique en sept manches.
18:16Il y a sept sauts à réaliser,
18:17des sauts de libre,
18:18ceux-là,
18:19on en a cinq à faire
18:20et des sauts d'imposé.
18:21C'est un peu
18:22comme en patinage artistique.
18:23Et les sauts d'imposé,
18:24toutes les équipes
18:25doivent faire les mêmes moves
18:26et on est noté
18:27sur la qualité
18:28de ces moves-là.
18:29Et on est toujours
18:30à plus de 250 km heure.
18:31À peu près, oui.
18:32Ça, c'est quoi ?
18:33Alors, ça,
18:34c'est un saut
18:35avec mon équipe Joyrider.
18:36Ça, c'était
18:38à Iloïe aussi, décidément,
18:39après le record
18:40du monde féminin.
18:41Donc, quand j'ai eu
18:42terminé la compétition
18:43en Freefly,
18:44donc en équipe de France.
18:45Là, c'est filmé
18:46avec ton casque
18:47ou c'est un vidéaste ?
18:48Alors, non.
18:49Moi, c'est un ami à nous
18:50qui s'appelle Greg Creusier
18:51qui filme,
18:52qui orbite autour de nous.
18:53Et donc là,
18:54c'est mon équipe Joyrider.
18:55Donc, on est un collectif
18:56de nanas.
18:57On est huit.
18:58On vient de huit pays différents
18:59et on organise
19:00des événements ensemble.
19:01On s'entraîne ensemble.
19:02C'est incroyable ces images.
19:03On promeut.
19:04C'est incroyable.
19:05On a l'impression
19:06que c'est la terre
19:07qui tourne autour de vous.
19:08Oui.
19:09Alors que pas du tout.
19:10Ça, c'est incroyable.
19:11Ça fait quoi
19:12quand on devient
19:13championne du monde ?
19:14Alors, c'est...
19:15La première fois.
19:16C'est forcément
19:17une sacrée explosion
19:18de sentiments.
19:19C'était à la fois
19:20une grande joie,
19:21une sorte de soulagement
19:22parce qu'il faut être
19:23un peu monomaniaque
19:24pour être championne
19:25du monde
19:26de quoi que ce soit.
19:27Et puis,
19:28c'est vraiment
19:29une grande joie
19:30et une sorte
19:31de soulagement
19:32parce que ça,
19:33il faut être un peu monomaniaque
19:34pour être championne du monde
19:35de quoi que ce soit.
19:36Donc, ça se fait un peu
19:37au détriment
19:38d'absolument tout le reste
19:39de votre vie.
19:40Donc, c'est forcément
19:41des sacrifices
19:42en vie personnelle,
19:43en vie professionnelle
19:44à côté de ça.
19:45Et donc, quand le...
19:46Oui, parce qu'il y a un coût
19:47et puis il y a du temps.
19:48C'est ça.
19:49C'est-à-dire que nous,
19:50on avait la chance
19:51en équipe de France
19:52que nos sauts
19:53soient pris en charge.
19:54Donc, c'était déjà
19:55un énorme avantage
19:56sur beaucoup d'autres équipes.
19:57Parce que si moi,
19:58je voulais sauter
19:59à la Ferté,
20:00ça existe toujours ?
20:01À la Ferté,
20:03si je veux la sauter
20:04à Dubaï.
20:05Dubaï, c'est bon.
20:06Ça coûte combien un saut ?
20:07Alors, un saut en tandem,
20:09si vous n'avez jamais sauté
20:10et que vous voulez
20:11vous faire accompagner,
20:12ça doit être entre
20:13250 et 300 euros.
20:14Je ne veux pas dire de bêtises
20:15parce que ce n'est pas
20:16mon cœur de métier.
20:17Une PAC, ça doit être
20:18dans les 1 200 euros.
20:19Et c'est combien de sauts,
20:20la PAC ?
20:217 sauts.
20:22Et ça dure à peu près
20:23une semaine à peu près.
20:24Et ensuite,
20:25le saut à l'unité,
20:26quand vous pouvez sauter seul,
20:27c'est aujourd'hui
20:28à peu près 30 euros.
20:29Ah oui.
20:30Donc, oui,
20:31il y a un cap entre
20:32l'avant,
20:33le jour où tu peux sauter
20:34et sauter,
20:35c'est compliqué ?
20:36Alors,
20:37ce n'est pas compliqué.
20:38Il y a combien de centres
20:39aujourd'hui en France ?
20:40Il y a beaucoup de centres
20:41en France.
20:42Vous pouvez aller sur le site
20:43de la Fédération française
20:44de parachutisme.
20:45Il y a un petit onglet
20:46avec où pratiquer.
20:47Et là, ça vous donnera
20:48absolument tous les centres
20:49affiliés à FFP.
20:50Donc, pour pratiquer
20:51en tant que sport,
20:52il y en a encore plus
20:53qui ne font que du tandem
20:54qui, eux, sont affiliés
20:55au ministère des Transports
20:56plutôt qu'au ministère du Sport.
20:57D'accord.
20:58Donc, il y a vraiment
20:59beaucoup d'endroits
21:00où on peut pratiquer
21:01le sport.
21:02C'est assez simple.
21:03Aux Etats-Unis,
21:04tu découvres la soufflerie.
21:05Oui.
21:06Et là, on va regarder
21:07les images et explique-nous
21:08en quoi ça révolutionne
21:09ce sport.
21:10Alors, évidemment,
21:11on n'a plus besoin
21:12de monter dans un avion.
21:13Exactement.
21:14Donc là, ce qu'on va voir,
21:15c'est dans ton centre à toi.
21:16Alors, je ne crois pas.
21:17Les images que je vous ai données,
21:18ce sont des images
21:19de compétition
21:20avec une de mes anciennes coéquipes.
21:21Ah bah si, ça c'est chez moi
21:22effectivement.
21:23Tout à fait.
21:24Donc, ça c'est où ?
21:25À Poitiers ?
21:26Alors, ça c'est à Poitiers.
21:28Ces images-là,
21:29c'est un workshop
21:30qu'on a organisé
21:31pour développer
21:32notre discipline.
21:33On se retrouve régulièrement
21:34avec des gens
21:35d'un peu partout dans le monde
21:36pour faire évoluer les règles,
21:37pour essayer des nouvelles choses
21:39et essayer d'utiliser
21:41un peu l'intelligence collective
21:42pour développer notre activité.
21:45Donc, il y a de la répétition.
21:46On le voit sur le sol.
21:47Exactement.
21:48Et après, on s'enferme
21:49dans l'espèce de pot
21:50de saucisson en plexiglas.
21:51Et après, on rentre
21:52dans l'aquarium
21:53et on va faire la même chose.
21:54Ah, tu vois,
21:55mon pot de saucisson.
21:56Tu vois les objets du sud-ouest.
21:57Oui.
21:58Alors, moi, j'ai vu des…
21:59Alors, je n'ai pas fait encore,
22:00mais j'ai vu des compétitions.
22:01J'ai vu les championnats de France
22:02à Bordeaux, d'ailleurs,
22:03il n'y a pas très longtemps.
22:04Oui.
22:05Et je me disais,
22:06mais…
22:07Alors, d'abord,
22:08c'est un souffle régulier, constant.
22:09Bien sûr.
22:10Je me disais,
22:11mais à quel moment
22:12ils vont aller percuter le plexi
22:13et se faire mal ?
22:14Alors, ça peut arriver.
22:15Alors, quand vous venez
22:16pour faire un baptême,
22:17ça ne vous arrivera pas
22:18parce que vous restez à plat,
22:19il y a moins de vent
22:20et puis surtout,
22:21vous avez un moniteur
22:22qui vous tient dans le métier
22:23de faire en sorte
22:24que, finalement,
22:25vous ne vous rentrez pas
22:26dans le plexi.
22:27Là, on voit des images
22:28de compétitions.
22:29Vas-y, continue.
22:30Alors, ça, c'est une image
22:31de compétition avec Cathy Bouette
22:32qui est la première femme
22:33à être devenue championne du monde
22:34de free fly.
22:35Avec toi ?
22:36Non, quelques années avant moi.
22:37Elle est…
22:382008,
22:39elle a gagné
22:40les championnats du monde
22:41et moi, 2012.
22:42C'est exceptionnel
22:43la façon que vous avez
22:44de remonter,
22:45donc de subir un peu l'air,
22:46d'arrêter, de redescendre,
22:47de rien toucher.
22:48Enfin, moi, je trouve ça magique.
22:50Comme l'air est constant,
22:51vos positions vont vous faire
22:52monter ou descendre
22:53à l'inverse du parachutisme
22:54où vous allez freiner
22:55ou accélérer,
22:56mais vous allez quand même
22:57toujours descendre.
22:58Et c'est vrai que la soufflerie
22:59a vraiment révolutionné
23:00notre pratique
23:01parce que vous pouvez
23:02déjà voler,
23:03qu'il pleuve,
23:04qu'il neige,
23:05qu'il vente.
23:06Enfin, vous n'êtes pas du tout
23:07tributaire des aliments,
23:08ce qui n'est pas du tout
23:09le cas en parachutisme.
23:10Vous passez quand même
23:11un sacré paquet de temps
23:12au sol à regarder
23:13les nuages passer.
23:14Et surtout, la durée
23:15que vous pouvez passer
23:16dans le vent
23:17parce qu'un saut en parachute,
23:18vraiment de pratique pure,
23:19surtout en free-fly,
23:20on va pouvoir passer
23:2145 secondes de travail
23:22à tout casser.
23:23Et même dans mes gros années
23:24d'entraînement
23:25en équipe de France
23:26où on pouvait faire
23:27entre 12 et 15 sauts par jour
23:28et ça vous prend
23:29du lever du soleil
23:30au coucher du soleil,
23:31vous n'avez fait même pas
23:3215 minutes d'entraînement
23:33de votre discipline.
23:34Alors qu'en soufflerie,
23:35vous pouvez voler
23:36une heure et demie par jour,
23:37deux heures même.
23:38Là, pour le coup,
23:39il faut de la condition physique.
23:40Et de l'argent.
23:41Et de l'argent
23:42pour avoir des sponsors.
23:43Sans compter l'avion-largeur,
23:44le pilote, le machin,
23:45tout ce qu'ils font.
23:46Il y a beaucoup moins
23:47de contraintes.
23:48Et surtout,
23:49vous pouvez passer
23:50beaucoup plus de temps
23:51dans l'élément.
23:52Mais les sensations
23:53sont les mêmes ?
23:54Exactement la même chose.
23:55Donc là,
23:56quand vous faites vos figures,
23:57c'est comme si vous étiez
23:58à 280 kilomètres en train
23:59de descendre.
24:00Les différences,
24:01alors micro différences
24:02de sensations,
24:03on n'a pas de parachute
24:04dans le dos,
24:05donc on peut sentir
24:06le vent sur son dos
24:07alors que dans le ciel,
24:08on ne le sent pas sur son dos
24:09vu qu'on a le parachute.
24:10Et puis,
24:11le fait d'avoir des références.
24:12Parce que là,
24:13dans la soufflerie,
24:14il y a évidemment les vitres,
24:15il y a un filet,
24:16il y a des choses autour.
24:17Vous avez beaucoup
24:18de références visuelles.
24:19Dans le ciel,
24:20vous n'en avez pas.
24:21Vous avez les uns les autres.
24:22Donc vous volez en relation
24:23les uns avec les autres.
24:24Mais là,
24:25dans la soufflerie,
24:26quand vous apprenez
24:27à tenir un équilibre,
24:28par exemple,
24:29apprendre à voler tête en bas,
24:30si vous vous déplacez
24:31d'un mètre,
24:32vous vous en rendez compte
24:33immédiatement,
24:34vous êtes dans une vitre
24:35ou dans un instructeur
24:36qui vous fait un câlin
24:37dans un saut d'avion.
24:38Vous pouvez passer
24:39tout un saut
24:40en vous disant
24:41je suis nickel,
24:42je vole bien tête en bas.
24:43Alors qu'en fait,
24:44vous étiez en train
24:45de repeindre le ciel
24:46et vous ne vous en rendez pas compte
24:47parce qu'il n'y a pas
24:48de repère visuel.
24:49Donc c'est aussi
24:50un des avantages
24:51de la soufflerie,
24:52c'est de pouvoir vous rendre compte
24:53des conséquences
24:54de vos déplacements
24:55de façon très réelle,
24:56très concrète et très rapide.
24:57Et ça vous permet
24:58donc d'être plus précis.
24:59Aujourd'hui,
25:00tu as créé ta structure,
25:01tu as cette soufflerie
25:02à Poitiers au Futuroscope.
25:03Il y en a beaucoup
25:04d'autres en France ?
25:05Alors il y en a en France
25:06des souffleries
25:07qui permettent
25:08l'entraînement sportif.
25:09Une à Marseille,
25:10une à Lyon,
25:11deux à Paris,
25:12une à Lille,
25:13une à Bordeaux,
25:14nous,
25:15une à Gap.
25:16Une bonne dizaine,
25:17une petite dizaine.
25:18Voilà,
25:19à peu près une dizaine.
25:20Après,
25:21il y en a quelques-unes
25:22supplémentaires
25:23qui sont des plus petits formats,
25:24qui sont un peu mobiles,
25:25qui permettent de faire
25:26un baptême
25:27mais qui ne permettent
25:28pas vraiment
25:29l'entraînement sportif.
25:30En quoi tu préfères
25:31la soufflerie
25:32ou inversement,
25:33en quoi tu préfères
25:34les sauts
25:35avec les Dubaï,
25:38la montagne,
25:39ou ce que tu veux ?
25:40C'est une question
25:41qu'on me pose souvent
25:42et ça m'a toujours fait penser
25:43au « Tu préfères ? »
25:44Je ne sais plus
25:45quel humoriste
25:46faisait ça.
25:47Alors,
25:48ce que j'aime
25:49dans la soufflerie,
25:50c'est la capacité
25:51à voler longtemps.
25:52J'adore,
25:53surtout chez moi maintenant,
25:54me faire des sessions
25:55de 15 minutes.
25:56Je mets 15 minutes
25:57et puis je vole
25:58pendant 15 minutes non-stop.
25:59Gol !
26:00C'est un oiseau !
26:01C'est vraiment génial.
26:02C'est vraiment génial.
26:03Et ça,
26:04on ne peut pas le faire
26:05en parachutisme.
26:06À côté de ça,
26:07évidemment,
26:08vous retrouvez
26:09voir la terre vue du ciel,
26:10surtout en fonction
26:11des endroits
26:12où vous sautez.
26:13C'est d'une magnificence
26:14inégalée.
26:15Vous retrouverez ça
26:16dans une soufflerie.
26:17Même si la mienne
26:18est très très belle
26:19par rapport à beaucoup d'autres.
26:20L'environnement visuel,
26:21les objets…
26:22Ça, c'est quoi là ?
26:23Ça, c'est un projet
26:24toujours dans le Sud-Ouest.
26:25Décris-le
26:26pour notre ami Salim.
26:27Je suis en train
26:28de porter une robe
26:29haute couture
26:30d'une couturière
26:31qui s'appelle Iris van Erpen
26:32qui est une couturière
26:33néerlandaise
26:34qui est assez réputée
26:35pour son esprit avant-gardiste.
26:36Pendant le Covid,
26:37comme il ne pouvait plus
26:38faire de défilé
26:39pendant les Fashion Week,
26:40elle a eu ce projet
26:41de créer une robe
26:42dont la présentation
26:43se ferait en vidéo.
26:44Ce n'est pas un wingsuit.
26:45Ah non,
26:46ce n'est pas un wingsuit.
26:47C'est vraiment
26:48une robe haute couture
26:49qui a été faite
26:50spécifiquement…
26:51On voit le bassin d'Arcachon
26:52et l'océan.
26:53C'est superbe.
26:54C'est un bel endroit
26:55pour faire ça.
26:56Ça a pris…
26:57On a passé au moins
26:584 ou 5 mois
26:59de préparation.
27:00J'ai d'abord testé
27:01certains matériaux
27:02en soufflerie,
27:03des premiers prototypes
27:04en soufflerie
27:05jusqu'à ce projet-là
27:06où on a été directement
27:07dans le ciel à Arcachon.
27:08C'est fou.
27:09Je saute avec
27:10le même parachute
27:11que j'utilise
27:12pour faire de la wingsuit.
27:13Le bandarguin.
27:14Le bandarguin.
27:15La maison.
27:16C'est ça.
27:17Pour la petite histoire,
27:18la coiffure que j'ai aussi,
27:19ils ont mis
27:20deux heures à la faire.
27:21Il devait y avoir
27:22un paquet de gel.
27:23Ils m'ont mis
27:24de la colle à perruque
27:25et ça a tenu.
27:26Je n'y croyais pas
27:27et je n'arrêtais pas
27:28de dire au pauvre
27:29gentil coiffeur
27:30qui était envoyé
27:31par son patron
27:32que j'étais désolée
27:33mais que probablement
27:34au bout d'un saut,
27:35ça allait être détruit
27:36et il était stressé
27:37comme pas permis.
27:38Je pense qu'il était
27:39plus stressé que moi
27:40quand je suis partie
27:41faire le saut.
27:42Finalement,
27:43il a vraiment fait
27:44un bon job
27:45parce que ça n'a pas
27:46bougé d'un poil.
27:47Dernière question.
27:48Ton record le plus fou
27:49que tu n'as pas osé tenter,
27:50c'est quoi ?
27:51Parce que je ne peux pas
27:52imaginer.
27:53Que tu t'entraines un jour,
27:54certainement.
27:55Ça.
27:56Vu que vous repoussez
27:57les barrières,
27:58il y a bien des trucs.
27:59Parfois,
28:00on n'y arrive pas.
28:01Le record du monde mixte,
28:02le dernier date de 2015,
28:03c'était un 138.
28:04En 2018 et en 2022,
28:05on a à nouveau fait
28:06des tentatives à 200
28:07et nous avons échoué
28:08les deux fois.
28:09Entre 135 et 200,
28:10il y a un peu de marge.
28:11Vous êtes gourmand.
28:12175, pardon.
28:13Entre 135 et 175,
28:14c'était combien d'avions ?
28:1510 avions.
28:16Toujours largués à 6 000.
28:17Toujours largués à 6 000.
28:18On ne peut pas monter
28:19plus haut que 6 000
28:20parce que c'est ça la solution.
28:21C'est compliqué.
28:22Donc,
28:23c'est un peu
28:24le défi.
28:25C'est le défi
28:26de la vie.
28:27C'est le défi
28:28de la vie.
28:30Déjà,
28:31pour ces sauts-là
28:32de record,
28:33on utilise de l'oxygène
28:34pendant la montée d'avion,
28:35mais pas pendant le saut.
28:36Alors,
28:37ce serait possible
28:38d'aller plus haut
28:39avec tout le monde
28:40équipé.
28:41Comme Boggartner.
28:42Félix Boggartner.
28:43Ce sont déjà
28:44des logistiques
28:45qui sont complexes,
28:46lourdes et chères
28:47à mettre en place
28:48et à un moment donné,
28:49on…
28:50Bon,
28:51réfléchis la prochaine fois
28:52et tu nous diras
28:53le truc le plus dingue
28:54que tu veux faire.
28:55Le truc le plus dingue
28:56que je n'ai pas encore osé faire.
28:57Merci mille fois,
28:58Domi.
28:59T'as kiffé un peu ?
29:00Ah ben carrément.
29:01On va y aller
29:02dans sa soufflerie à Poitiers ?
29:03Je vous emmène voler.
29:04Promis ?
29:05Avec grand plaisir.
29:06Promis.
29:07Par contre,
29:08pas des sauts d'une minute.
29:09Moi,
29:10j'ai entendu 15,
29:11j'en veux 3.
29:12Deal.
29:13Salut Domi,
29:14deal.
29:15Au revoir.
29:16Merci beaucoup.
29:17Merci à vous toutes
29:18et à vous tous
29:19pour votre fidélité.
29:20A très bientôt.
29:21C'était une fois de plus
29:22passionnant
29:23et très inspirant.
29:24Salut.
29:28Sous-titrage Société Radio-Canada

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