Cette semaine dans La Victoire est en Elles, Alexandre Delpérier et Salim Ejnaïni reçoivent une Championne de Kitespeed : Armelle Courtois. Retour sur son parcours sportif et ses engagements environnementaux pour faire bouger les lignes et faire prendre conscience du changement climatique.
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00:00Générique
00:02...
00:14-"Parce qu'il y a les femmes, parce qu'il y a le sport",
00:17bienvenue dans La victoire est en elle,
00:20avec mon camarade Salim, que je salue.
00:22Bonjour, Salim.
00:23C'est une grande championne, une kitesurfeuse engagée,
00:26Armel Courtois, qui est avec nous.
00:28Bonjour, Armel.
00:29On est ravis de t'accueillir,
00:31d'abord parce qu'on aime tout ce que tu fais,
00:33tout ce que tu représentes, on va en parler.
00:36T'as un palmarès long comme le bras en kite,
00:38mais t'es une femme engagée.
00:40La défense de la planète, notre monde d'aujourd'hui et de demain
00:43sont une de tes principales préoccupations, j'imagine ?
00:46Oui, et surtout, sensibiliser autour de moi grâce au sport.
00:50Alors, on va faire un petit peu, on va rembobiner la pelote.
00:54Toi, t'es née à Toulouse.
00:55Je suis née au Havre, en Normandie.
00:57Ah ! T'es restée dans cette région jusqu'à...
01:00Jusqu'à l'âge de 7 ans.
01:01Après, direction ?
01:02La Polynésie.
01:03On est revenus à l'âge de... ?
01:05Au collège.
01:0611 ans ?
01:07Oui, voilà.
01:08Et là, on s'est installées où, avec la famille ?
01:11À Toulouse, dans le sud-ouest.
01:13Et j'y ai passé pas mal d'années, jusqu'à...
01:17J'ai fait deux ans de prépa à Paris,
01:19après, je suis revenue dans le sud-ouest,
01:21parce que ça me manquait trop.
01:23Je comprends. On comprend.
01:24On comprend.
01:25On est trois du sud-ouest.
01:27Aujourd'hui, je suis en itinérance pour toutes mes activités.
01:30On a besoin de comprendre tout ce que tu as fait.
01:33Le sport, à quel âge tu l'as découvert ?
01:36Comment, où, quoi ?
01:37En Polynésie, avant, après ?
01:39Pour ce qui est du sport, en général,
01:42très tôt,
01:43j'ai été attirée par deux sports,
01:45c'était l'équitation et le tennis.
01:48C'est les deux sports que j'ai fait.
01:50T'as visé juste, avec les deux.
01:52Chacun son sport.
01:53Voilà. En fait, c'est ce que j'ai pratiqué très tôt.
01:57L'équitation, j'ai dû commencer à 3-4 ans.
01:59Au niveau ?
02:00Au niveau poney, c'était modeste.
02:03Non, non.
02:04T'es montée jusqu'à quel niveau ?
02:06Je suis montée jusqu'au niveau amateur 1,
02:101,30 m,
02:12la limite avec les pros, on va dire.
02:14Et le tennis ?
02:15Le tennis a été plus modeste,
02:18parce qu'à un moment, on ne peut pas tout faire.
02:21Je faisais aussi de la musique, de l'alto.
02:23Donc, ma mère courait un petit peu partout
02:26et à un moment, il a fallu faire des choix.
02:29Surtout qu'à Toulouse,
02:30c'était plus compliqué d'allier toutes les activités,
02:33puisque les déplacements sont plus compliqués,
02:36avec la circulation, les adhérents d'une grande ville.
02:39Du coup, j'ai privilégié la musique et le cheval.
02:41Donc, le tennis, j'ai eu des petits classements
02:44que je ne connais plus, 15...
02:4615, c'est pas mal, déjà.
02:48Armel, t'as eu des titres, et on va en parler tout à l'heure,
02:52mais vice-championne du monde de kitespeed,
02:54vice-championne de France de kitesurf.
02:57Aujourd'hui, tu portes des projets passionnants,
02:59Riding to Explore, Sport for Future, One Degree,
03:02on verra des extraits.
03:03Comment le monde de la vitesse et de l'eau
03:06se sont imposés dans ta vie ?
03:07Malgré le fait que t'aies habité 4 ans en Polynésie,
03:10t'en as même pas parlé.
03:12Ce que j'ai oublié de dire, c'est que quand on était au Havre,
03:15mon père a toujours été passionné de bateaux, de nautisme.
03:19Donc, on a toujours...
03:20Moi, j'ai... Ma maman...
03:21Voile, moteur ?
03:23Moteur, plutôt.
03:24Et voilà, maman était déjà dans un bateau
03:27quand elle était enceinte.
03:28Après, toute petite, moi, dès bébé, j'ai baigné là-dedans.
03:32Et après, quand on est partis en Polynésie,
03:34j'ai découvert la plongée,
03:37tout un autre monde fascinant.
03:39Sachant que c'est un des plus beaux endroits de la planète
03:42pour plonger.
03:43Si tu reviens au Havre, derrière, c'est plus le même.
03:46C'est pas la même ambiance, là-dessous,
03:49mais...
03:50Pardon, je t'interromps,
03:51mais peut-être que de découvrir si jeune,
03:54de 7 à 11 ans, les fonds sous-marins de la Polynésie,
03:57peut-être que, des années plus tard,
03:59toi qui défends l'environnement et tout ça,
04:02c'est ce que t'as vu à cette époque-là
04:04qui t'a sauté à la figure.
04:05Ce qui m'a sauté à la figure, c'est qu'effectivement,
04:09ce que j'ai vu et eu la chance de voir
04:11sur les barrières de corail incroyables
04:13des atolls polynésiens, etc.,
04:16on va dire qu'il y a eu du temps qui s'est écoulé
04:19où c'est pas tombé aux oubliettes, loin de là,
04:22parce que ça m'a marquée,
04:23mais je veux dire, voilà, il n'y avait pas de raison.
04:26Et après, tout d'un coup,
04:28les sujets environnementaux sont venus avec...
04:30Et j'ai vu des...
04:31J'ai vu des images des barrières de quoi ?
04:34De ce qu'elles sont devenues.
04:35Et ça n'avait plus rien à voir avec...
04:38Les couleurs, la végétation sous-marine,
04:40il n'y a plus rien.
04:41Donc, ma maman, qui a poursuivi sa carrière en Outre-mer,
04:45elle est partie à Mayotte, quand j'avais 20 ans,
04:47donc je suis allée la voir et j'ai plongé là-bas.
04:50Et j'ai...
04:51Pour moi, la barrière de corail n'avait rien à voir
04:54avec mes souvenirs d'une barrière de corail.
04:57Ca t'a fait quoi ? Ca t'a choqué, ça t'a outré,
04:59ça t'a fait pleurer, ça t'a mis en colère ?
05:02Non, je pense que ça m'a attristée profondément.
05:04Parce que...
05:07Voilà, c'était quelque chose qu'on perdait.
05:09Et la principale cause, j'en étais consciente,
05:12c'était nous.
05:14C'était pas uniquement...
05:16Une cause naturelle.
05:17Tu parles de conscience,
05:19ça t'a apporté peut-être la compréhension
05:21de ce que ça faisait.
05:23On nous parle tous les jours de petits gestes,
05:25de petites choses, de l'importance de modérer
05:28son empreinte carbone, etc.
05:30Je pense que tu as, en plus de tout le monde,
05:32de beaucoup de gens, en tout cas, monsieur et madame tout le monde,
05:36cette compréhension de ce que ça peut faire,
05:38de l'importance de tout ça.
05:40Ca, j'en suis très consciente,
05:42mais en même temps, je suis aussi un peu allée le chercher.
05:45Grâce au sport, justement.
05:47Parce qu'à la base, on en parlait,
05:49les Riding to Explore,
05:50qui est le nom du projet des expéditions en kitesurf
05:54sur les lacs de Haute-Montagne.
05:56À la base, je m'en tirais si c'était un projet
06:00qui était né de ma confiance environnementale.
06:04C'est un projet qui est né
06:06avec mon compagnon Martin Thomas,
06:08qui est aussi sportif de haut niveau, en canoë,
06:11aussi pratiquant de kitesurf et passionné de montagne.
06:14De défis de deux sportifs qui se sont dit
06:16on aime le kite, on aime la montagne,
06:18on va aller kiter en montagne.
06:20Et puis, comme on aime le challenge,
06:22on va aller le plus haut possible.
06:25Ca, c'est le point A.
06:27Et puis, en y allant, en cherchant, en cherchant des lacs,
06:30en cherchant des lacs plus hauts, d'abord dans les Alpes,
06:33on s'est dit, mais il y a quand même des choses un petit peu étranges.
06:38Là, on a une carte de repérage,
06:39et quand on va sur place...
06:41C'est pas pareil.
06:42Il y a un lac.
06:43Alors que sur la carte, c'est un glacier.
06:46Les glaciers fondent plus vite que la mise à jour des cartes IGN.
06:49Alors, on s'est dit, quand même, ça nous a interpellées.
06:52On était sensibles au sujet, mais pas avec cette prise de conscience.
06:56Finalement, c'est ce projet-là qui a participé
06:59à vraiment l'élaboration de cette prise de conscience
07:04et de cette démarche, après, qui va en être
07:06dans tous les mois et les années qui ont suivi.
07:08On va revenir sur tout cet aspect environnemental
07:11et votre engagement, que je trouve magnifique.
07:13On s'arrête sur ce qui t'a amené là, le kite.
07:16Le kite, tu l'as découvert quand ?
07:18Réexplique-nous de quoi il s'agit,
07:20ce qu'il est nécessaire d'avoir, les outils, le matériel.
07:24Le kite, si on veut résumer, beaucoup de gens connaissent le wake.
07:28On peut dire que c'est l'équivalent, à la base,
07:30le kite tel qu'il est né, une planche de wake,
07:33mais tirée par un cerf-volant auquel on est attaché,
07:36via un harnais.
07:37C'est la force du vent qui te tracte.
07:39Exactement.
07:40Aujourd'hui, il y a une évolution, notamment l'évolution olympique,
07:44qui est d'avoir une planche surélevée sur un mât avec une aile,
07:48mais cette fois, une aile dans l'eau, qui est donc un foil.
07:51On connaît aussi ces trimarans, ces imocas qui font le Vendée Globe.
07:55Là, c'est pareil, on est surélevés au-dessus de l'eau.
07:58Les images qu'on peut voir là, ce sont des...
08:01C'est de la vitesse.
08:02C'est de la vitesse.
08:03Là, on est vraiment sur du vent off,
08:06c'est-à-dire qui part de la mer...
08:09Enfin, part de la terre en direction de la mer
08:12pour avoir l'eau au bord la plus flatte possible
08:16et pouvoir naviguer le plus proche du bord,
08:19sachant que si on perd le contrôle, on est expulsés vers la mer
08:23et pas vers la terre, d'où l'intérêt du vent off.
08:25Sachant qu'on est à plus de 100 km heure et que l'eau, c'est du béton,
08:29il vaut mieux pas tomber.
08:30Non, il vaut mieux pas tomber.
08:32Explique-nous à quel âge tu découvres le kite,
08:35ce que tu te dis à ce moment-là.
08:37Je...
08:38Si je refouille un peu dans ma mémoire,
08:40on va dire que c'est plutôt aux alentours du lycée.
08:44Je découvre le kite sur la Méditerranée.
08:47Et en fait, à l'époque, on est quand même sur quelque chose de...
08:51Les pionniers du kite, il fallait être bien accroché.
08:54Il l'était un peu trop.
08:56Tu pouvais pas larguer si t'avais un problème.
08:58Il y a eu beaucoup d'accidents,
09:00d'où est née la mauvaise réputation du kite.
09:02C'était des choses incroyables.
09:05Des grandes planches, au départ, des cerfs volants à la main,
09:08puis attachés, tu pouvais pas larguer.
09:10C'était des deux-fils, c'était très chaotique.
09:12Donc, j'ai ajourné un petit peu cette attirance que j'avais
09:15pour ce sport, parce qu'effectivement,
09:18c'était vraiment accidentogène à ses débuts.
09:20Et puis, quand les évolutions se sont succédées
09:23et que j'ai eu l'opportunité...
09:25De réessayer.
09:26De réessayer avec un matériel qui avait nettement évolué,
09:29là, je me suis lancée.
09:30Par contre, là, je suis tombée raide de ce sport.
09:34A l'époque, je faisais de l'équitation,
09:36j'ai commencé à faire les deux.
09:37Je pouvais plus faire les deux, j'ai fait que du kite.
09:40Sauf que c'est la picouze qui va vite arriver.
09:43Ca va prendre, tu vas performer, tu vas faire des compètes.
09:46Explique-nous.
09:47Au début, j'ai fait des compètes,
09:49ce qu'on a appelées de longues distances.
09:52Par exemple, on rejoignait
09:55Bénaudet aux îles des Glénans.
09:58C'est combien d'heures ou de kilomètres ?
10:00Je me rends pas du tout compte.
10:02Dans mon souvenir, c'est pas si...
10:04En heures, alors ?
10:05Ca doit faire une heure et demie, quelque chose comme ça.
10:09Mais c'était surtout ça.
10:11Après, j'ai rencontré quelqu'un qui a été clé dans mon parcours,
10:14Sylvain Housséini,
10:16qui a été un des plus grands challengers
10:18dans le monde de la vitesse en kite,
10:22d'Alex Keyser, qu'on connaît bien,
10:24puisqu'il détient le record du monde de vitesse.
10:26Sylvain, ça a été son plus grand challenger.
10:29C'est vraiment à son contact, en le rencontrant,
10:31qu'il m'a dit, vas-y, essaye ça.
10:34Sylvain est devenu ton entraîneur,
10:35le premier à avoir dépassé la barre des 100 km.
10:38C'est ça.
10:39Pour placer le truc.
10:41Et qui, malheureusement, a eu un grave accident
10:44lors d'une tentative où il allait battre le record d'Alex.
10:48Record du monde.
10:49Voilà, et il est tombé dans les derniers mètres
10:52de ce qu'on appelle un run.
10:53Il s'est fracturé très gravement en Namibie,
10:56sur le spot de vitesse qui a été fait un peu exprès
10:59pour le kite en Afrique du Sud, en Namibie.
11:02Donc un très grave accident
11:03qui a mis fin à sa carrière de vitesse.
11:06En tout cas, il en fait toujours, il est toujours performant,
11:09mais il peut moins prendre de risques.
11:11Il ne peut plus aller tutoyer les records
11:13qu'il aurait, sans doute, explosé à un moment donné.
11:16Mais c'est lui qui m'a dit, tu navigues vite,
11:18j'aime bien comment tu navigues, viens tester.
11:21Et si tu fais tant de kilomètres heure en twin tip,
11:24c'est la planche de base,
11:25je te file un gun et on va faire l'échantillon.
11:28OK, donc là, tu fais combien ?
11:30Et là, j'ai fait 28 nœuds en twin tip.
11:33Il m'avait dit qu'il fallait faire 26.
11:3628 nœuds, c'est... On multiplie par un peu moins de deux,
11:39donc on est à peu près...
11:4250 ?
11:44Un peu moins, non.
11:45On va dire 55 km heure.
11:48Et du coup, on est partis à Oman.
11:49Quand tu fais les 50 km heure, tu ressens quoi ?
11:52Je parle de la sensation, je ne parle pas du plaisir.
11:55Est-ce que 50 km heure tractée par un serre-volant
11:58ou sur une planche, est-ce qu'on se dit wow ?
12:00On se dit, ça commence à aller vite,
12:02mais on a la stabilité, le contrôle du twin tip.
12:05Après, on commence à vraiment tutoyer le fait
12:07que c'est très technique d'arriver dans un run,
12:09de placer son aile, etc., un mois avant,
12:11de faire ça.
12:13Non, en fait, il y a vraiment des...
12:15Et tu sens encore plus le vent dans chaque partie de ton corps
12:18parce que tu dois gérer la planche comme si, poser la planche.
12:21Et ça, c'est incroyable, c'est très grisant.
12:23Tu as un point commun avec le cheval, avec le saut d'obstacle.
12:27C'est le réflexe, la concentration.
12:30En peu de temps, un parcours, je ne sais pas si c'est pas toi,
12:33mais un parcours me semble parfois durer 10 minutes,
12:36tellement tu es hyper concentrée sur un run.
12:39Il y a plein de points communs et ça,
12:42notamment un de mes prépas physiques récents,
12:45a trouvé qu'en fait, finalement, il y avait plein de points communs
12:49et qui se retrouvaient dans la façon dont j'appréhendais
12:52l'inévitabilité aujourd'hui.
12:54J'ai toujours fait des efforts d'équilibre.
12:56Que ce soit le cheval ou le kite,
12:58tu conditionnes ton corps à ne pas tomber,
13:01à être dans l'équilibre.
13:02Je vais donner quelques chiffres, quelques notions
13:05sur les types de pratiques avec le kite et les records.
13:08La plus haute vague, 19 mètres,
13:10par Nuno Figueiredo en 2017.
13:12La plus longue distance parcourue en une seule session,
13:15862 kilomètres.
13:19Courage.
13:20Qui a fait ça ?
13:21Francisco Luffinia en 2015.
13:23800 bandes sur sa planche.
13:26La vitesse la plus rapide, c'est Alexandre Kézerg, le Français.
13:29On est à 107,36 km sur 500 mètres, ce qui est juste extraordinaire.
13:33Donc, t'as ta première étape, ils te disent,
13:36si tu fais plus de 28, je t'emmène et je te file du bon matos.
13:39Tu l'as fait. Et là ?
13:40Là, on est parti à Oman, un truc fou.
13:42On a rencontré plein d'autres riders.
13:44Il y avait Alex Kézerg.
13:46Après, il y avait plusieurs nations des Anglais.
13:49Il y avait Anna Whitley,
13:50qui est une...
13:51On te file le bon matos.
13:53Là, tu fais combien, grosso modo ?
13:54Tu te souviens peut-être de la vitesse ?
13:56La vitesse, j'ai fait 42,5 nœuds.
13:59Donc, t'as plus de 80 km heure.
14:01Tu passes de 50 à 80.
14:02Oui, voilà. Ah bah...
14:04En fonction des conditions, déjà, et puis de la planche.
14:08Bien sûr. Et là, tu te dis quoi ?
14:10Là, c'est assez fou.
14:11Avant de rentrer sur le run, t'as les tripes qui te...
14:15Il y a eu des moments où je me suis dit, mais qu'est-ce que tu...
14:18Je voudrais qu'on revoie des images
14:19et qu'on se rende compte de ce que c'est,
14:22sachant que t'es en équilibre, tenue par une aile,
14:25et que t'es au ras de l'eau, au ras du sable,
14:29de 80 km heure.
14:30Chaque micro-erreur...
14:32Et là, je vais beaucoup moins vite, ça, c'est aux Etats-Unis.
14:35Euh...
14:36Vas-y, chaque micro-erreur.
14:38Chaque micro-erreur, c'est fatal.
14:40Et...
14:42J'ai une vidéo, mais de trop mauvaise qualité,
14:44d'une chute aux Etats-Unis.
14:46En fait, je ricoche sur l'eau, mais comme un bout de bois,
14:50comme ça.
14:51Il y a les cervicales qui...
14:53Enfin, vraiment, c'est...
14:55C'est-à-dire que l'eau, là, n'est pas...
14:57C'est du béton.
14:58Non, rien.
14:59Tu tapes, quoi.
15:00Alors, il faut essayer de tomber entre les fesses sur...
15:03Mais tu choisis pas forcément.
15:05Et quand t'es amenée par une rafale,
15:07il faut toujours que tu sois à la limite.
15:09Pour aller le plus vite possible, il faut que tu sois à la limite,
15:12même si après, chacun a des tactiques...
15:14Il y en a qui vont privilégier plus de contrôle
15:17avec une plus petite aile,
15:18qui vont pouvoir aller vraiment mettre dans ses retranchements.
15:21Il y en a qui vont prendre une grosse aile pour être bâchées,
15:24mais qui vont avoir moins de contrôle,
15:26donc qui vont déraper.
15:27C'est des tactiques de course.
15:29Je voudrais qu'on regarde une vidéo, ça s'appelle One Degree.
15:32Projetée le 23 novembre 2023 à Toulouse.
15:34La beauté des images qui donne envie d'agir.
15:37On regarde et on en parle juste après.
15:39Musique d'ambiance
15:41...
15:43Le projet de qualité à plus de 5 000 m d'altitude,
15:48c'est assez incongru, quand même.
15:50Notre objectif, c'est pas 4 000 m, c'est pas 4 300 m,
15:53c'est pas 4 500 m, c'est d'aller au-delà des 5 000 m.
15:56...
16:05Il y a l'altitude, puis ensuite, il y a le froid.
16:07...
16:12Il y a tout du chassement, en fait.
16:14C'est forcément des conditions extrêmes.
16:17Pour moi, je suis pas dans mon élément
16:21d'être dans mon canoë tous les jours sur une rivière que je connais.
16:25Pour moi, c'est vraiment extrême.
16:27Des attentions.
16:29Plus tôt, les glaciers étaient plus beaux,
16:32plus jolis, plus sympathiques.
16:35Maintenant, s'il y a un réchauffement global,
16:39les glaciers se dégraderont rapidement.
16:42...
16:45L'eau est la vie, et l'eau est la mort.
16:48...
16:57Parfois, les gens disent que l'altitude augmente pour rien.
17:01Mais cette altitude a beaucoup changé.
17:04...
17:26Les Andes, l'Himalaya,
17:29tout ça pour dire, et on revient à nos propos initials,
17:31que le changement climatique, les températures,
17:34la fonte des glaciers font que des glaciers deviennent des lacs.
17:38J'aimerais, pour bien comprendre,
17:40vous étiez à quelle altitude, quelle était la température ?
17:43On a fait trois étapes.
17:44Dans les Alpes, on est monté jusqu'à 2 000 m.
17:50Ensuite, on a été dans les Andes.
17:52On a fait le record du monde de kites en altitude à 5 025 m.
17:56Après, on est monté à 5 400 m,
17:58vraiment au pied de la calotte glaciaire du Calcaillat,
18:03la plus grosse calotte tropicale au monde.
18:06Là, on n'a pas eu de vent,
18:07donc on n'a pas pu monter sur un kite, mais on y a été.
18:11Ensuite, on est parti en Himalaya, au Ladakh.
18:14Là, on a ridé à 4 900 m.
18:18C'est incroyable.
18:19Les images, bien sûr, le propos est très, très fort.
18:22À la fin, ce monsieur dit,
18:24pour tout le monde, un degré, ça ne peut signifier rien du tout.
18:27C'est vrai que ça peut être trompeur, de parler d'un degré.
18:30Dans nos vies domestiques, on s'en accommode très bien.
18:33On se rend compte que c'est un équilibre assez fragile
18:36qui est en train d'être détruit. Vous avez dû le prendre de plein fouet.
18:40Et puis, souvent, nous, on a choisi aussi cet emblème des glaciers
18:44parce que c'est à la fois assez majestueux
18:47pour impressionner, faire des belles images,
18:50donner envie de se battre pour eux,
18:52et en même temps, assez significatif.
18:55C'est concret.
18:56– Oui, c'est visuel.
18:57– C'est très visuel.
18:59Et aussi parce que souvent, quand on parle de glaciers,
19:01les gens pensent qu'on parle de réchauffement climatique en montagne.
19:04Alors, en fait, les glaciers, ce sont une clé de voûte du climat.
19:08Les glaciers, ça comprend les glaciers en montagne
19:10et les calottes glaciaires au pôle.
19:13Et en fait, si les glaciers fondent,
19:16c'est incroyable tout ce que ça perturbe.
19:18C'est vraiment une clé de voûte.
19:20Évidemment, ça perturbe le cycle de l'eau.
19:22Les Alpes, aujourd'hui, nous, les glaciers,
19:23c'est le château d'eau de l'Europe.
19:25On ne s'en rend peut-être pas assez compte.
19:27– Oui, mais le jour où il n'y aura plus, il n'y aura plus.
19:29– Mais quand il n'y aura plus, il n'y aura plus.
19:30Et puis, il n'y aura plus de rivières, il n'y aura plus… voilà.
19:33– Ça te fait peur, ce monde-là, cette vision-là ?
19:34– Oui, assez.
19:36Assez, mais…
19:37Enfin, il faut en avoir peur, en fait.
19:40Ça me fait peur, mais après, ça me fait peur dans le bon sens du terme.
19:44Dans le sens, il faut se battre pour.
19:49Et par contre, je ne suis pas du tout défaitiste.
19:51Je pense que, voilà, même s'il y a certaines choses qui sont perdues
19:56dans le sens où elles sont irréversibles, il y en a d'autres, voilà.
19:59Et il ne faut pas sous-estimer le pouvoir de régénération de la nature,
20:04qui est quand même incroyable et qui nous survivra de toute façon.
20:07Donc après, c'est plus, même pour nous,
20:10parce que même si nous, on ne fait rien, c'est nous qui allons en bâtir.
20:13Et puis après, la nature, elle, un jour ou l'autre, elle reprendra ses droits.
20:16– Salim, tu parlais de ces projets, notamment Ride to Explore,
20:18qui t'a amené un peu cette compréhension, cette révélation,
20:23si je ne dis pas de bêtises, sur ce lien qu'il peut y avoir entre le sport,
20:27entre l'éveil un peu de l'urgence climatique.
20:31Quelles sont pour toi les étapes et, j'ai envie de te dire,
20:35les méthodes qui fonctionnent pour éveiller les consciences là-dessus,
20:41pour expliquer à la population que chacun peut agir sur tout ?
20:46– Moi, ma méthode, c'est d'essayer de sortir, en tout cas,
20:50de l'écologie punitive, du dialogue éco-anxieux,
20:56parce que ça, en fait, je pense qu'on perd plus ou au moins autant de monde
21:00qu'on en gagne et qu'on ne le fait pas pour les bonnes raisons.
21:03C'est pour ça que, nous, notre credo, ça a été de vraiment être
21:06dans une démarche d'approche positive, de donner envie,
21:10de jouer sur l'émotionnel, parce que finalement, il y a deux choses.
21:13Une, c'est qu'on ne protège jamais aussi bien les choses
21:18que quand on les connaît.
21:20Quand on ne connaît pas, c'est difficile de protéger, en fait.
21:22Les gens aussi, et moi la première, avant de faire ces projets,
21:26je n'avais aucune conscience des enjeux de ce que représentait un glacier
21:32pour l'équilibre du climat.
21:35Voilà, ça, c'est la première chose.
21:38Et la deuxième chose, c'est que l'émotionnel,
21:42c'est ce qui fait avancer le monde, dans tous les secteurs.
21:46Donc, ce n'est pas avec des normes, des obligations, des machins,
21:49qu'on va y arriver.
21:51Il faut arriver à toucher l'émotionnel,
21:53l'émotionnel pour varier chez chacun.
21:55Il faut montrer les images, comme vous l'avez fait.
21:57Il faut cette exemplarité.
21:59J'aimerais que tu nous parles d'ailleurs de Sport for the Future,
22:02For Future, pardon, qui sont les sportifs engagés ?
22:06On voit des images là.
22:08Que faites-vous ? Qu'allez-vous faire ?
22:09Quel est le sens de tout ça, même si on l'a bien compris ?
22:12Au lendemain des expéditions, on s'est dit,
22:15nous, ça a été un choc, ça a été une révélation,
22:18et on a envie aussi d'oeuvrer dans le sport,
22:21parce qu'il faut que chacun puisse travailler dans sa spécialité,
22:24et nous, c'est le sport,
22:26donc pour aussi penser au sport de demain,
22:28parce que le sport est à la fois une victime
22:30et un acteur du changement climatique.
22:33On s'est dit, quoi faire ?
22:35Toujours pareil, ce créneau, l'émotionnel.
22:38Embarquer des copains.
22:39On va embarquer des copains, des sportifs de haut niveau,
22:42sur les glaciers.
22:44On ne va pas les mettre devant un Powerpoint dans un bureau,
22:46ça ne servira à rien.
22:48Là, on va les amener sur le glacier, et c'est eux qui...
22:50Voilà. En marchant sur le glacier,
22:52en voyant le glacier fondre entre leurs mains sur l'escalade de glace,
22:55sous leurs crampons, ils se disent, c'est chaud.
22:58Et c'est eux qui disent après, OK, qu'est-ce qu'on fait ?
23:01Et là, nous, on amène les scientifiques,
23:03parce qu'il faut aussi ramener le scientifique
23:05beaucoup plus proche du grand public,
23:08beaucoup plus proche de tout un chacun.
23:10Ils font des rapports formidables,
23:12ils dédient leur vie à travailler sur des sujets,
23:14et en fait, au mieux, on parle d'eux,
23:16mais avec toujours cet écran, parfois, de fumée, des médias,
23:20et malgré tout, ils restent assez loin du grand public.
23:24Il faut à la fois leur donner de la visibilité
23:27et le savant mélange des champions et d'eux
23:29fait que d'abord, vous comprenez,
23:31vous êtes là pour la même raison ou la même cause.
23:34Il y a deux aspects.
23:35On amène les scientifiques au contact direct des athlètes
23:38pour qu'ils aient une info en direct.
23:40Question, réponse, c'est direct.
23:42Il n'y a pas d'écran, il n'y a pas de temps perdu,
23:44on ne doit pas aller chercher, l'info est là et c'est la bonne.
23:48Le deuxième point, c'est que les scientifiques ont besoin
23:51d'accéder au grand public de manière beaucoup plus...
23:54Il faut qu'ils sortent de leur tour d'ivoire.
23:56Du coup, les sportifs, c'est super.
23:58Les sportifs, c'est...
24:00C'est deux familles complémentaires.
24:02C'est universel, c'est positif.
24:03S'il y a une aura, les sportifs vont être des passerelles
24:07du message des scientifiques.
24:08C'est ça qui est beau dans la création,
24:10dans le fait de véhiculer ce message,
24:13de créer quelque chose où les sportifs qui ont l'admiration,
24:16même on va étendre la chose aux...
24:18Je sais pas, à des personnes qui ont la visibilité,
24:21des créateurs de contenu.
24:22Là, tu vois la liste, il y a Kylian Jornet,
24:25Chloé Trépeuch, Nicolas Fleury, champion du monde de BMX,
24:28Émilie Morier, cycliste et triathlète.
24:30Enfin, t'as du gros poisson, là.
24:32C'est génial que des personnes comme ça,
24:34qui ont l'admiration du public, puissent se faire l'exemple
24:38de tout ça. C'est vrai qu'en ça, c'est un projet
24:40qui peut faire le lien, comme tu le dis,
24:43avec une parole scientifique, parfois compliquée.
24:46C'est pointu, c'est compliqué.
24:47Est-ce qu'il est compliqué, les gens ?
24:49J'ai une question importante, c'est comment on trouve les fonds,
24:53comment on choisit les partenaires ?
24:55Il y a des boîtes qui ont des convictions,
24:57puis des boîtes qui sont là par opportunisme.
25:00C'est très compliqué, et surtout en cours d'Olympiade...
25:04Oui.
25:05Les gros partenaires misent sur les JO et délaissent,
25:08malheureusement.
25:09Tous les feux sont tournés vers les JO,
25:12mais pendant qu'on brûle un peu nos cartouches,
25:14et qu'il plus est...
25:16Et que le temps passe.
25:17Mais malgré tout, il y a quand même des partenaires
25:20qui s'engagent. Nous, on a des partenaires
25:22qui sont engagés sur les expéditions,
25:25qui continuent à nous suivre, comme Nirova Fondation.
25:27Il y a quand même des gens qui veulent changer le monde,
25:32si on veut.
25:33Je voudrais donner un exemple.
25:35Il y a le kite au jeu.
25:37Tu as décidé de ne pas y aller, de ne pas le faire,
25:39pour continuer ta mission ?
25:41Oui, ça a été un sujet il y a quelques années maintenant.
25:44Sortir de la vitesse, le kite a été adopté au jeu
25:48avec le principe de la régate et du foil.
25:51Là-dessus, je suis partie expérimenter le format régate
25:56auquel je n'étais pas habituée.
25:57Et là, j'aurais pu persévérer dans cette voie.
26:02En plus, au niveau fédéral, ils cherchaient à entraîner les filles,
26:05car il y avait très peu de filles qui faisaient du foil.
26:08Donc là, on a été sollicité pour créer le collectif des filles
26:12en vue de préparer les Jeux.
26:14Et là-dessus, il y a eu le Covid.
26:16J'étais plutôt partante pour ce projet-là,
26:19ce projet sportif, puis il y a eu le Covid.
26:21Pendant le Covid, avec Martin, on a travaillé sur ces projets.
26:24Au sortir du Covid, il y a eu les deux chemins qui se sont présentés.
26:29Je me suis sincèrement questionnée et j'ai pris l'option,
26:34en tout cas dans un enjeu important, d'aller vers ça.
26:38Mais après, du coup, m'étant engagée dans cette voie,
26:41j'ai dû faire une croix sur ma carrière olympique.
26:44Aujourd'hui, on n'est pas en adéquation
26:47avec les enjeux environnementaux dans le sport.
26:49C'est ce qu'on essaie de faire bouger en s'associant à d'autres collectifs.
26:53Là, alors, on se voit,
26:56on est en train d'animer avec Maël Besson,
27:00qui est intervenu au ministère des Sports,
27:02avec Xavier Thévenard, Thomas Michaud,
27:05avec tout un collectif de sportifs.
27:08Là, on anime des ateliers de travail pour essayer de repenser le sport
27:12pour qu'il puisse s'adapter.
27:14Pardon, et on terminera là-dessus,
27:16mais ce qui fait la magie du sport,
27:17c'est d'avoir des champions qui viennent de partout.
27:20Il y a des compétitions partout,
27:21donc ça veut dire qu'on prend l'avion.
27:23Si demain, il faut remettre ça en cause, c'est difficile.
27:27À moins de dire, tous les ans, il y a des Jeux olympiques,
27:30et on ne fait qu'un truc, et tout le monde vit au même endroit.
27:32Malgré tout, il faut y venir.
27:34On sera obligés de modifier les systèmes qu'on connaît.
27:37Plus tu réfléchis dessus, plus tu vois qu'il y a des solutions.
27:40Après, c'est plus nos modèles qu'il faut changer,
27:42et aussi le modèle économique, parce que la vie des sportifs...
27:45Moi, aujourd'hui, par ces choix,
27:47je me suis coupée d'une partie du modèle économique du sport.
27:52Aujourd'hui, il faut aussi que tout le monde du sponsoring,
27:55tout le monde du financement du sport
27:57soit aussi prêt à accompagner la transition des athlètes,
28:00soit prêt aussi à soutenir les athlètes
28:02pour leurs démarches et pour leur engagement,
28:04et à penser aussi à avoir, pour une fois,
28:07essayer d'avoir un temps d'avance,
28:09même si on a déjà un temps de retard, à mon sens,
28:11mais enfin, essayer de, malgré tout,
28:14se projeter dans l'avenir du sport,
28:16et pas juste attendre que ça s'effondre.
28:17Oui, en accompagnant une transition douce
28:19plutôt que d'en subir une plus violente et plus subie.
28:22Exactement. Merci à vous, c'était passionnant.
28:24Bravo, Armel Courtois, des choix très courageux
28:26et des images exceptionnelles.
28:27Bravo, continue, continue avec toute ta grande famille.
28:30Merci, Salim. Merci à vous tous d'avoir été avec nous aujourd'hui.
28:34Merci à toute l'équipe derrière en régie.
28:37Et puis, je vous dis à très bientôt avec encore de nouvelles championnes.
28:40Salut.
28:49Sous-titrage ST' 501