Cette semaine, Alexandre Delpérier reçoit la championne d'Europe junior de skeleton, Agathe Bessard.
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00:00...
00:17-"Parce qu'il y a les femmes, parce qu'il y a le sport",
00:20soyez les bienvenus dans votre rendez-vous.
00:23Bienvenue dans La victoire est en elle,
00:25avec encore une invitée exceptionnelle aujourd'hui.
00:28Avec nous, depuis La Plagne, la championne de skélétons Agathe Bessart.
00:32À 24 ans, la Française est la tête d'affiche de sa discipline
00:35et compte déjà de nombreux titres internationaux,
00:38rencontre sur la glace, à plus de 139 km heure,
00:41parce que c'est son record personnel.
00:44Bonjour, ma chère Agathe.
00:46Bonjour.
00:46Je suis ravi de t'accueillir, ça me fait plaisir,
00:48parce qu'on ne parle pas assez de cette discipline
00:50qui est pourtant hyper, hyper spectaculaire.
00:53Deux mois d'abord sur ton palmarès en 2016,
00:55t'as été médaillée de bronze au JO de la jeunesse.
00:58T'as été vice-championne d'Europe junior en 2019 et 2020,
01:01championne d'Europe junior 2022.
01:04T'as basculé chez les très grands maintenant et tu continues de performer.
01:07Je voudrais qu'on regarde une petite vidéo
01:09qui dure un petit peu plus de 20 minutes.
01:11C'est la descente de La Plagne, où tu habites, où tu résides,
01:14où ton papa travaille ou travaillait.
01:16Tu travailles toujours là-bas, papa ?
01:18Non, pas vraiment, moins.
01:20OK, et je voudrais que tu nous commentes ça en une minute.
01:24C'est parti.
01:26Il y a la première phase où on voit qu'on pousse.
01:30C'est la phase qui va nous lancer.
01:32Ensuite, on embarque sur notre squelette.
01:34La descente commence, donc il y a une succession de virages
01:37qui va se faire jusqu'à l'arrivée.
01:40On enjambe de la vitesse tout au long de notre descente.
01:43On va bien voir que ça accélère au fur et à mesure de la descente.
01:48Il y a des virages qui sont plus grands que d'autres.
01:50Il y a des virages où il y a plus de pression que d'autres.
01:53C'est toi qui guide, hein ?
01:55Oui, c'est ça. J'ai différents moyens de pilotage.
01:58On voit que ma tête bouge dans les virages,
02:01donc ça m'aide à piloter.
02:03Et après, j'ai une autre façon de piloter qu'on ne voit pas,
02:05mais c'est avec mes épaules et mes genoux encroisés sur mon squelette,
02:09ce qui me permet de tourner mon châssis
02:12et donc de faire tourner mon squelette.
02:14Là, on est à plus de 130 km heure.
02:18À peu près à 125 km heure à la plagne, oui.
02:21Ce qui est complètement fou. Je trouve ça assez exceptionnel.
02:26Ta tête, elle a combien de centimètres du sol, de la glace, donc ?
02:30Trois centimètres.
02:32Ah oui, quand même.
02:35Et combien pèse le squelettone ?
02:38Ça dépend du poids de l'athlète.
02:40On est limité en compétition à un poids maximal combiné
02:44athlète et engin à 102 kg.
02:46D'accord.
02:47Donc ça dépend du poids de l'athlète.
02:48C'est environ, je dirais, entre 25 et 35 kg chez les filles.
02:51J'aimerais qu'on parle de jets.
02:53Ces fameux jets, on compare souvent à la Formule 1,
02:562, 3, 4, 5 jets.
02:57Vous prenez combien, là ?
03:00C'est pareil, ça dépend des pistes.
03:02Mais la piste de la plagne, c'est une des pistes
03:04où on a le plus de pression sur le circuit
03:06et on arrive à prendre 3, 4 jets.
03:08Donc, c'est-à-dire qu'on multiplie le poids de notre corps par 3 ou 4.
03:12C'est ouf.
03:13C'est tellement spectaculaire. Ça va tellement vite.
03:16J'imagine que tout se joue à des millimètres.
03:20On a globalement un schéma idéal qu'on a appris avant les descentes.
03:25Ensuite, on a des plans, je dirais, abaissés pour chaque virage.
03:29Donc, si on ne rentre pas dans la trajectoire idéale,
03:32pour essayer de corriger le plus rapidement possible
03:34pour perdre le moins de temps possible.
03:35Il y a de la reconnaissance dans une compétition avant chaque piste.
03:40Comment ça se passe ?
03:41Avant d'arriver sur une piste, on l'apprend à l'aide de vidéos,
03:46par exemple, comme celle-là,
03:47ou des vidéos embarquées d'autres athlètes.
03:49On apprend la piste.
03:50Donc, avant d'arriver, on connaît par cœur la piste,
03:53dans quel sens ça va tourner,
03:55quand c'est qu'il y a des lignes droites,
03:56si c'est des petits, des grands virages, etc.
03:58Et on apprend également tout notre programme de pilotage
04:02pour que, quand on fasse nos premières descentes,
04:04on ne soit pas complètement perdus et que tout ne nous arrive pas trop vite.
04:07En Formule 1, Agathe, on dit que le virage conditionne la vitesse
04:10que l'on aura dans la ligne droite suivante.
04:12C'est le même cas, là, en skeleton ?
04:15Oui, complètement.
04:16Si on sort mal d'un virage,
04:18on n'engendrera pas la vitesse optimale qu'on aurait souhaitée.
04:21Si, en sortie d'un virage, on va taper dans un muret à droite ou à gauche,
04:25on perd de la vitesse.
04:27Si on a mal piloté dans le virage,
04:29on doit corriger dans les lignes droites,
04:31c'est aussi de la perte de vitesse.
04:32Agathe, j'ai besoin de comprendre comment on arrive à faire du skeleton,
04:34parce que moi, natif de Bergerac, en Dordogne,
04:36j'aurais voulu en faire, je n'aurais jamais réussi.
04:38Il se trouve que toi, tu as 24 ans.
04:39Il y a 24 ans, tu es née où ?
04:42À Albertville.
04:43Et tes parents habitaient où, à ce moment-là ?
04:45À La Plagne.
04:47Parce que papa bossait à La Plagne.
04:49Il faisait quoi, exactement ?
04:51Il a été directeur technique de la piste de bob de La Plagne.
04:57Jusqu'à il y a deux ans.
04:58Ça veut dire que, toi, tu l'as toujours connue, là-bas, sur cette piste ?
05:03Oui.
05:04La piste de bob et la piste de skeleton sont différentes ?
05:07Non, c'est les mêmes.
05:09OK. J'ai envie de te dire, tu ne savais pas marcher,
05:12mais tu savais déjà ce que c'était qu'une piste de bob ou de skeleton.
05:16Oui, c'est un peu…
05:18J'habite dans le contexte qui fait que…
05:21Oui, bien sûr.
05:23Une chose, tes premiers souvenirs de cette piste,
05:25ça remonte à quoi ou à quel âge ?
05:27Et tu te disais quoi, à ce moment-là ?
05:31À quel âge, je ne sais pas,
05:32mais les premiers souvenirs que j'ai vraiment de cette piste,
05:36c'est…
05:38J'ai passé énormément de temps, au départ,
05:40par Bob, à faire des descentes en bob raft.
05:42C'est du bob pour les touristes.
05:45J'attendais dans les vestiaires qu'il y ait un trou dans un bob
05:48pour faire des descentes.
05:50Et quand j'ai fait ma première descente,
05:51je devais avoir, je pense, à peu près six ans,
05:54avec mon papa derrière moi.
05:56Je me rappelle être arrivée en bas et lui avoir dit,
05:58plus jamais je ne ferai ça.
06:01Mais tu avais quel âge, à ce moment-là ?
06:03Je devais avoir six ans, à peu près.
06:05Ça veut dire qu'à six ans, papa t'a amenée sur un bob
06:07où vous n'avez peut-être pas pris 140 km heure,
06:09mais vous étiez déjà à plus de 100 ?
06:11Non, c'est… Oui, c'est du 70, à peu près.
06:14C'est le bob raft, ça s'appelle, oui.
06:16Ça veut dire que ces sensations t'avaient effrayé,
06:18t'avais pris conscience du danger ?
06:21Conscience du danger, je ne sais pas,
06:22mais je me rappelle que je n'arrivais pas du tout à tenir ma tête,
06:25qu'au milieu de la descente, il avait dû attraper mon casque
06:27et tenir ma tête et j'avais dit, plus jamais je ne ferai ça.
06:30Et au final, ben voilà.
06:32J'imagine que quand on habite à La Plagne,
06:33on commence par être au club de ski et faire du ski ?
06:36Oui.
06:37En compète ?
06:38Oui, tout à fait.
06:38En compète ?
06:39Oui.
06:40Tu performais bien ?
06:43Bien, je n'en aurais pas fait une carrière de haut niveau,
06:45mais je me faisais plaisir à faire des compétitions, oui.
06:48Et la luge ou le bob, ça s'est fait comment ?
06:53À partir de quel âge ? En parallèle, en plus,
06:55ou t'as arrêté l'un pour l'autre ?
06:57Non, alors j'ai commencé…
06:59Il y a une saison où j'étais blessée en ski,
07:02donc je ne pouvais pas skier, donc j'ai fait une saison de luge
07:05où je me suis amusée, mais je n'ai pas accroché plus que ça à la luge.
07:09Et après, à 14 ans, donc c'était l'âge légal
07:12quand j'ai commencé pour faire du skeleton,
07:14j'ai continué à skier pendant encore deux ans
07:16et ensuite j'ai arrêté le ski.
07:17Donc, ça veut dire qu'il y a ces deux saisons
07:19où tu faisais vraiment les deux ?
07:21Oui.
07:22Et est-ce que tu te disais…
07:23Tu avais quel âge, pardon, à ce moment-là ?
07:2414 ans ?
07:25J'avais 14 ans, oui.
07:27Est-ce qu'à ce moment-là, tu te disais, ma vie,
07:28ça sera l'un des deux ?
07:32Je savais que ma vie, ce ne serait pas le ski de haut niveau.
07:34D'accord.
07:35Je ne savais pas trop où j'allais vraiment au skeleton.
07:39C'était vraiment le tout début de ma carrière.
07:42Il y avait plein d'inconnus, etc.
07:44Donc, je me faisais énormément plaisir dans ce que je faisais.
07:47Donc, j'essayais plutôt d'en profiter à ce moment-là.
07:49D'accord.
07:50Quand tu arrêtes le ski, tu passes directement au skeleton ?
07:54Oui.
07:55J'ai fait deux ans, du coup, les deux en parallèle
07:57et après, je n'ai fait que du skeleton.
07:59OK.
08:00Papa est derrière dans cette prise de décision,
08:02dans le fait que, je ne sais pas,
08:03tu as du potentiel ou des choses comme ça ?
08:07Non.
08:07Mes deux parents, que ce soit autant papa que maman,
08:10ils me soutiennent vraiment à 100 % dans mes choix,
08:12dans mes décisions de carrière, etc.
08:14Mais ils ne m'ont jamais poussé.
08:16Ça a toujours été mes choix personnels.
08:18Il faut expliquer aussi une chose,
08:20c'est qu'il y a combien de virages dans cette descente de la Plagne ?
08:2319.
08:24OK.
08:24Selon les âges, on ne part pas toujours du haut, c'est ça ?
08:28Il y a un nombre limité de virages ?
08:30Oui, c'est ça.
08:31Alors, quand on fait nos toutes premières descentes en skeleton,
08:33on va partir du virage 12.
08:35Oui.
08:36Donc, ça va doucement, on fait à peu près du 70 km heure.
08:41Donc, de 12 à 19 ?
08:43Oui, c'est ça.
08:45Ensuite ?
08:45On ne reste vraiment pas longtemps à ce départ.
08:47Ensuite, on monte au virage 6.
08:50Oui.
08:51Ou d'ici, on fait du 110 km heure à peu près.
08:55Oui.
08:55Entre 105 et 110.
08:57Et ensuite, quand ça se passe bien du virage 6,
09:00on part du départ Bob,
09:01de notre départ officiel de compétition.
09:03Et ici, on fait du 125 km à peu près à la Plagne.
09:05Et ça, tu l'as fait quand, ces fameux 19 virages ?
09:11À la fin de ma première saison.
09:13Au milieu de ma première saison.
09:14Et il se passe quoi à ce moment-là ?
09:18Pas grand-chose.
09:21Du coup, j'ai fait mes premières descentes du virage 12.
09:23Ensuite, je suis partie du virage 6,
09:25où j'ai fait à peu près une demi-saison.
09:27Oui.
09:28Et ensuite, le club, la piste, la fédération et mes parents
09:32ont fait une dérogation pour que j'aie le droit de partir du départ Bob,
09:35comme j'étais trop jeune.
09:36J'avais que 15 ans et normalement, on devait avoir 16 ans.
09:40Et j'ai fait mes premières descentes du départ Bob et...
09:45Il n'y a rien qui m'a trop perturbée,
09:48qui m'a fait peur ou quoi que ce soit.
09:49Perturbée, non.
09:50Mais moi, je pensais plutôt à satisfaction,
09:54joie, sensation.
09:56Tu vois, parce que moi, derrière mon bureau à Paris,
09:58c'est sûr que moi, tout me fait peur.
10:00Mais toi, j'imagine, ça devait t'en kiffer, non ?
10:05J'étais vraiment super contente d'avoir enfin le droit
10:07de partir du départ Bob,
10:08parce que j'ai attendu ça un petit moment quand même.
10:11Et de voir que tout se passait bien, que ça allait vite,
10:14qu'on prenait vachement de sensations et tout,
10:16c'était vraiment cool.
10:18Les Jeux olympiques de la jeunesse, tu as quel âge ?
10:2217 ans.
10:2317 ans, donc là, on est juste après ça, ou quasiment.
10:26Oui.
10:27Cette médaille de bronze, c'est ça ?
10:29Oui.
10:30Elle signifie…
10:31Ah, voilà !
10:33Elle signifie quoi, cette médaille ?
10:34Quand je vois ton sourire, j'imagine déjà la réponse,
10:36alors que c'était il y a 6 ans, 7 ans.
10:38Oui, ça fait longtemps.
10:40Elle signifie énormément.
10:41Ça a vraiment marqué le début de ma carrière.
10:43Ça m'a prouvé que les choix que j'avais faits jusque-là,
10:45ils étaient payants,
10:47que j'avais ma place internationale dans ce sport
10:49et que je n'étais pas arrivée ici pour rien.
10:52Tu es surclassée quand tu fais cette médaille de bronze ?
10:57Non, je n'étais qu'avec des gens de mon âge.
10:59Donc, aujourd'hui, on a tous moins de 18 ans, oui.
11:03À quel moment tu t'es dit, Agathe,
11:06c'est ma vie, c'est ça que je veux faire ?
11:10Quand j'ai commencé à faire mes premières courses internationales,
11:13j'ai pris énormément de plaisir.
11:15Je pense que le sport de tennis,
11:16c'est vraiment une école de la vie qui est très particulière,
11:20mais qui nous apporte énormément de choses.
11:21On découvre tellement de cultures différentes.
11:23On rencontre des personnes qu'on n'aurait jamais rencontrées
11:27dans une vie normale, je dirais.
11:29Et ça nous apporte des souvenirs que je n'oublierai jamais.
11:32J'imagine bien.
11:34Tu n'as pas de statut professionnel ?
11:37Non.
11:38Tu vis de quoi aujourd'hui ? Tu as 24 ans.
11:41De mes parents.
11:46Quand on gagne ou quand on performe, il y a des…
11:50D'abord, est-ce que tu as des sponsors qui te rémunèrent un peu ?
11:53Est-ce qu'on a des dotations lorsqu'on gagne,
11:55lorsqu'on fait une médaille aux Jeux olympiques de la jeunesse ?
11:57J'ai des doutes, mais…
11:59Non.
12:01J'ai des sponsors, heureusement, je dirais.
12:04Il y a beaucoup d'entreprises locales qui me soutiennent
12:07et j'en suis vraiment très reconnaissante.
12:09J'ai la chance aussi d'avoir le club et la station de la Plagne
12:11qui me soutiennent énormément.
12:13Du coup, tout ce soutien que je reçois de leur part,
12:16il m'aide à payer la part de ma saison que la fédération prend en charge.
12:20Ça veut dire, pour qu'on ait un ordre d'idée,
12:23toutes ces dotations, ça représente combien d'euros ?
12:27Par an.
12:29Oui, entre le club et les sponsors et la station de la Plagne,
12:35je dois arriver autour de 20 000 euros, 25 000 euros.
12:40Et il y a une saison à financer autour de ça ?
12:43Oui, qui coûte environ, entraîneur compris, entre 90 et 100 000 euros.
12:48Voilà, vous avez compris la problématique.
12:52En France, on n'a qu'une piste de squelettone.
12:54Oui.
12:56Est-ce que tu considères...
12:58Il se trouve que toi, t'es née là-bas, mais n'empêche qu'il n'y en a qu'une.
13:01Est-ce que toute l'année, pour s'entraîner,
13:02il faut être programmé à la minute près ?
13:04Parce qu'il y a la queue derrière.
13:05Il y a, je ne sais pas...
13:06J'imagine d'autres champions, d'autres championnes,
13:08mais peut-être même d'autres nations qui viennent s'entraîner là.
13:12Oui, alors il y a beaucoup de monde qui vient en fin de saison à la Plagne
13:15parce qu'on a la chance d'avoir une piste qui est ouverte tard dans l'année.
13:19Donc, il ne va fermer que fin mars, début avril.
13:21Donc, du coup, il y a beaucoup de monde qui vient s'entraîner en fin de saison.
13:24Après, nous, on a la chance d'avoir des créneaux avec notre club.
13:28Donc, du coup, on a toujours au moins des descentes trois fois par semaine.
13:33T'aimerais plus ?
13:35Alors, avec la Fédération, je peux en demander plus.
13:38Oui.
13:40Après, on n'est vraiment pas souvent à la Plagne,
13:41à part vraiment cette fin de saison,
13:44sauf si vraiment on a des tests d'équipement à faire ou des choses comme ça.
13:47Sinon, trois fois par semaine, ça fait déjà...
13:51C'est déjà bien.
13:52Justement, Agathe, il faut que je comprenne.
13:53Comment on s'entraîne ?
13:54Alors, j'imagine qu'il y a une prépa physique, une prépa mentale, qu'il y a tout ça.
13:58Mais les pistes, vous vous entraînez sur toutes les pistes du monde
14:02ou du circuit toute l'année ?
14:03Comment ça se passe ?
14:05Oui. Alors, il y a des pistes qui ouvrent plus tôt dans la saison que d'autres.
14:08Donc, les premières pistes, elles vont ouvrir fin septembre, début octobre.
14:11C'est où, par exemple ?
14:13Du coup, on va partir...
14:14Ça dépend.
14:15Sigulda, en lettonie, elle ouvre souvent très tôt.
14:17Haltenberg, en Allemagne, elle ouvre très tôt.
14:19Donc, on a différentes pistes comme ça
14:21qui, tous les ans, on sait qu'elles vont ouvrir assez tôt.
14:23Donc, c'est nos pistes d'entraînement de début de saison.
14:26Donc, on va là-bas en début de saison.
14:28On fait nos premières descentes de la saison.
14:30On fait des tests matériels,
14:31si on a des tests matériels à faire, etc.
14:34Et ensuite, quand on arrive sur les semaines de course,
14:36on passe une semaine au même endroit
14:38où on a deux jours d'entraînement et un jour de course dans la semaine.
14:43L'amélioration, c'est le ressenti du...
14:47On dit quoi ? On dit un pilote ?
14:49Oui.
14:50C'est le ressenti du pilote,
14:51mais j'imagine qu'il y a aussi un aspect technique,
14:54un aspect matériel.
14:55Qu'est-ce qu'on peut optimiser ?
14:57Quand je vois ton casque, par exemple,
14:59ce n'est pas des trucs ultra profilés,
15:01alors qu'il y a plein de disciplines
15:02ou quand on va chercher de la vitesse.
15:03Vous avez le droit de travailler quoi
15:05et vous n'avez pas le droit de travailler quoi ?
15:08Alors, on n'a pas le droit de travailler nos casques,
15:09on n'a pas le droit de travailler nos combinaisons,
15:11donc on est très réglementés là-dessus.
15:14Après, on a le droit de choisir les patins qu'on veut.
15:17Alors, ils sont tous faits du même matériel
15:20qui est réglementé par la Fédération internationale,
15:24mais on a différentes sortes de patins, si je peux dire.
15:28Les patins du squelettone.
15:31C'est ce qu'on voit en dessous sur la photo.
15:34Alors, cette photo, elle est juste magnifique.
15:37Cette photo, elle est juste magnifique
15:38et elle suggère chez moi quelques réflexions
15:41ou quelques questions.
15:42D'abord, la première, c'est un clin d'œil.
15:44C'est quoi ce petit animal sur le casque ?
15:48Je souhaitais faire un casque l'année des Jeux, l'année dernière,
15:53qui représentait ma station, d'où je viens, mon enfance, etc.
15:58Et j'ai soumis à un peintre de casque, si je peux dire,
16:04qui habite à la frontière franco-suisse.
16:07Je lui ai dit, voilà, j'aimerais avoir une marmotte sur mon casque.
16:10Ça représente quand même vraiment bien la station de la Plagne, etc.
16:13Fais ce que tu veux.
16:14Et donc, il est ressorti avec ce casque.
16:16Qui est génial.
16:18Oui.
16:19Quand on voit aussi cette photo,
16:21on se rend compte à quel point l'impulsion est importante.
16:24Là, tu viens de terminer la phase où je cours, je pousse
16:27et je propulse à la fois le squelettone et toi,
16:32et c'est le moment où ton corps va venir se reposer sur le squelettone.
16:35Il y a combien de mètres de course, d'impulsion ?
16:40C'est pareil, ça dépend un peu des pistes.
16:42Il y a des pistes où la phase de poussée va être plus longue que d'autres,
16:47mais c'est globalement entre 15 et 30 mètres maximum.
16:50Là, il faut tout donner parce que ça, ça conditionne tout.
16:54Oui.
16:55Comment on travaille ça ?
16:57Toute notre préparation physique de l'été est globalement basée là-dessus.
17:03On va alterner entre des séances de musculation et des séances d'athlète
17:08pour construire de la vitesse et de la puissance.
17:11L'été, on a également accès à des pistes de poussée.
17:14Ce sont des endroits où on ne fait que de la poussée sur notre squelettone,
17:18tout pareil que l'hiver.
17:20On les as soit sur tartan, sur rail,
17:23soit il y a certains endroits où on les trouve sur glace.
17:26C'est comme dans un frigo.
17:28On peut faire de la poussée sur glace aussi et du coup, ça conditionne tout notre été.
17:32Il manque une phase là.
17:33C'est quand tu cours et que tu as ton squelettone,
17:37avant de te projeter vers l'avant,
17:39il y a une phase où on court complètement debout ?
17:42Non.
17:43Je cours toujours avec une main appuyée sur mon squelettone.
17:47Mon squelettone, il est déjà posé sur la piste
17:49dans une des traces qu'on voit sur la photo.
17:53Je cours avec ma main droite appuyée sur ma poignée gauche.
17:59Ensuite, je change de main et je me retrouve comme sur la photo.
18:03Oui, cette photo est très spectaculaire.
18:05Voilà, comme ça.
18:06Mais c'est hyper, qu'est-ce que je pourrais dire, déséquilibrant.
18:13C'est une position qui est assez particulière en course
18:16parce qu'on n'a pas beaucoup de place pour passer nos jambes en dessous de notre corps.
18:20C'est beaucoup de travail l'été justement pour trouver la position idéale
18:24par rapport à notre morphologie, mais aussi ce qui est le plus efficace.
18:29Je comprends, c'est extrêmement complexe.
18:31Cette course, tu peux atteindre quelle vitesse ?
18:33Tu vas me dire selon les 15 ou 30 mètres, évidemment.
18:37Mais tu as une pointe de vitesse particulière ?
18:39Je n'en sais rien.
18:41Est-ce que tu es reconnue pour être…
18:42Waouh, Agathe, elle envoie grave.
18:45La poussée d'Agathe, elle est référente.
18:46Non, Agathe, elle n'envoie pas trop à la poussée.
18:49Elle est plutôt réputée pour être une bonne pilote.
18:53Bonne pilote, c'est quoi ? Bonne glisseuse ?
18:56Oui, c'est le temps que je perds au départ,
18:59j'arrive à le rattraper dans la piste.
19:03Parle-moi des sensations.
19:05Qu'est-ce qu'on ressent dans tout ce tunnel
19:09avec ces vitesses, 139 km heure, ton record et tout ?
19:13Est-ce qu'on a le temps de prendre du plaisir ?
19:18Il y a des endroits où on a plus le temps que d'autres.
19:22Il y a des pistes où on se fait plus plaisir que d'autres,
19:24mais globalement, je dirais que dans l'ensemble,
19:27la sensation principale, c'est quand même vraiment la vitesse.
19:31On ne se rend pas compte qu'on va…
19:34139 km heure, ça paraît énorme,
19:36mais en fait, on ne s'en rend pas vraiment compte.
19:38Oui, ça dépend qui est dessus.
19:44Est-ce que parfois, on se fait peur ?
19:47Oui, des fois, si on rentre vraiment mal dans un virage
19:51et qu'on sait qu'on peut chuter à la sortie,
19:53des fois, on serre un peu les fesses, oui.
19:55Tu chutes combien de fois par an ?
19:59Pas trop, je vais toucher du bois.
20:02Je n'ai pas beaucoup de chutes à mon actif.
20:04Après, souvent, quand on chute,
20:07on fait ce qu'on appelle un peu crêpe en sortie du virage,
20:09c'est qu'on est trop haut et en fait, ça nous retourne juste.
20:12Ce ne sont pas des chutes qui font mal,
20:14ça brûle un peu, mais elles ne font pas mal.
20:17Oui, ça doit brûler un peu beaucoup même quand même.
20:21Nos combinaisons, elles sont faites dans un matériau
20:24qui est quand même assez résistant, donc ça ne brûle pas trop.
20:26Oui, mais quand on tombe, il faut quand même se dire
20:29qu'il faut qu'on continue de glisser.
20:30On n'est pas là pour s'arrêter.
20:32De toute façon, ça s'arrêtera tout seul.
20:34Oui, mais ce que je veux dire, c'est que si tu essaies
20:35de t'arrêter trop vite, tu peux partir en roulet-boulet,
20:38alors qu'il vaut mieux rester…
20:40Oui, quand tu chutes, tu fais un peu comme tu peux.
20:44Et tu nous emmerdes avec tes questions.
20:46Ok, j'ai compris.
20:47Non, mais c'est vrai, ça dépend vraiment de la chute.
20:51Oui, j'imagine.
20:52Revenons à ton parcours.
20:53Donc, il y a ces Jeux olympiques de la jeunesse en 2016
20:55où il y a sa médaille de bronze.
20:57Tu considères que c'est un exploit, ce jour-là ?
20:59C'est la première victoire.
21:01C'est le premier podium français à l'international
21:04sur une grosse compétition.
21:06C'est le premier podium olympique français en squelette.
21:08Ça marque l'histoire de mon sport et ça, j'en suis très fière.
21:13Ça restera partout.
21:15J'aurais été la première à avoir une médaille
21:17aux Jeux olympiques, même si c'est ceux de la jeunesse.
21:20Ça reste pour moi une grande première et j'en suis fière.
21:23Évidemment, c'est une énorme satisfaction.
21:25En 2019, tu deviens vice-championne d'Europe junior.
21:27Il y a eu un grand défi.
21:28Tu deviens vice-championne d'Europe junior, idem en 2020.
21:31Là, tu t'assoies et tu te dis
21:32« Oh, les cocos, il faudra compter sur moi. »
21:35Oui, alors nous, on est junior jusqu'à 23 ans.
21:38Oui.
21:40Du coup, c'est vraiment deux titres qui me font énormément plaisir.
21:45Comme on m'a dit, c'est des titres qu'on ne m'enlèvera jamais.
21:47C'est des titres qui prouvent que j'avais mon statut chez les juniors,
21:51qui étaient complètement assumés
21:53et que j'étais prête à les conquérir chez les grandes.
21:56Entre-temps, tu intègres le circuit de la Coupe du monde.
21:59Ça aussi, on sent tout de suite que c'est un gap supplémentaire ?
22:02Oui, les filles en Coupe du monde,
22:05on sent qu'elles ne sont pas là pour rigoler du tout.
22:07Elles sont là que pour la gagne.
22:10Même s'il y a toujours cet esprit très familial
22:13où ils connaissent tout le monde, on s'entend tous très bien, etc.
22:17On sent que les filles, par rapport par exemple à la Coupe d'Europe,
22:20les filles sont des professionnelles.
22:23À ce moment-là, tu avais l'objectif de Pékin 2022,
22:25j'imagine, dans le viseur.
22:27Et puis, ça ne s'est pas passé comme prévu.
22:30Non.
22:31Explique-nous.
22:34Du coup, je débloque mon quota international de l'IBSF.
22:38J'avais ma place pour aller aux Jeux à Pékin en 2022.
22:43Mais il me manquait un résultat que la fédération m'avait mis
22:49pour m'autoriser à partir aux Jeux.
22:51Il me manquait un top 12 en Coupe du monde,
22:53que je n'ai pas fait cette saison-là.
22:54Et donc, ils ont refusé mon quota pour les Jeux.
22:56Tu prends quoi à ce moment-là dans la tête ?
23:00Énormément de choses.
23:01J'étais à Eagles, au championnat du monde junior.
23:05La première chose qui m'est passée par la tête,
23:07c'est je ne cours pas ce week-end, je rentre à la maison et j'arrête tout.
23:11Après, je me suis dit, non, tu es là,
23:12tu prends quand même le départ de la course ce week-end, etc.
23:15On s'en fout, tu cours juste pour le plaisir, etc.
23:17Donc, je n'ai couru vraiment que pour le plaisir.
23:20Ensuite, il m'a fallu un très, très long moment pour accepter tout ça.
23:24Ça a été très dur.
23:25Je n'ai quasiment pas suivi les Jeux.
23:28Je n'ai regardé que le Bob à quatre
23:30parce que mon copain était au Jeux en Bob à quatre.
23:33Donc, je me suis levée au milieu de la nuit
23:35et regardais les courses, mais c'est les seules courses que j'ai regardées.
23:39Donc, forcément, j'ai suivi les courses en squelette,
23:41mais c'était différent.
23:42J'ai fait autre chose pendant ces semaines-là.
23:45Il m'a fallu beaucoup de temps pour dégérer le fait.
23:49Et quand ça a été fait, je me suis dit qu'il fallait que je m'en serve
23:52pour rebondir et repartir.
23:54Et voilà, c'est ce que j'ai fait.
23:55Et tu poursuis ta carrière.
23:56Cette saison, tu es repartie sur les Coupes du Monde.
23:58Tu termines à chaque fois dans le top 20.
24:00Donc, là, ça te conforte sur le fait que ta place est bien là ?
24:04Oui, j'ai vraiment fait une super saison
24:07où on a fait des bons résultats.
24:09Je dirais que c'est ma plus belle saison en Coupe du Monde
24:11depuis que je fais des saisons complètes sur ce circuit.
24:14On a fait beaucoup de progrès avec mon entraîneur, l'LD,
24:16sur tout ce qui est pilotage, matériel, etc.
24:19Donc, c'était vraiment une bonne saison.
24:20Oui, et puis finalement, il y a les Championnats du Monde
24:23à Saint-Maurice, en Suisse, et là, tu te blesses.
24:26Explique-nous comment ça se passe.
24:27Tu as un problème au tendon d'Achille.
24:28J'aimerais comprendre le détail de ça.
24:30C'est entre deux manches ?
24:33Oui, c'est ça.
24:34Du coup, je fais la première manche qui se passe
24:37plutôt pas de la meilleure des manières,
24:40mais je dirais qu'il n'était pas trop mal.
24:41J'avais les possibilités de remonter des places
24:44sur les trois manches qui suivaient.
24:46Parce qu'au Championnat du Monde, on court sur deux jours et quatre manches.
24:50Sauf que juste avant la deuxième manche,
24:52je suis complètement équipée.
24:54Dans les vestiaires, je fais un saut juste avant de sortir
24:57et je me roule le tendon d'Achille.
24:59C'est incroyable, ça.
25:00Froide ?
25:01Comment on l'explique ?
25:02Ça veut dire qu'il y avait déjà une fragilité, j'imagine ?
25:05Non.
25:07Les docteurs m'ont dit que les ruptures de tendon d'Achille,
25:09ça ne s'explique pas trop.
25:10Je n'avais pas de signe avant-coureur,
25:12je n'avais pas de douleur ni rien.
25:14Ça a vraiment cassé comme ça.
25:16Donc, c'était fin janvier au Championnat du Monde.
25:17La saison est terminée.
25:20Tu as été opérée ?
25:22Oui.
25:23C'est quoi le programme de reprise ?
25:26C'est long, très long.
25:28J'ai 45 jours où je suis plâtrée,
25:30où je n'ai absolument pas d'appui sur mon pied, etc.
25:34Et ensuite, la rééducation pourra commencer.
25:39Donc, ça va être très long.
25:40Le chirurgien m'a dit au moins six à huit mois pour revenir.
25:45Il y a une belle échéance, ça s'appelle les Jeux olympiques.
25:46C'est en 2026. Tu regardes ça ?
25:50Oui, forcément.
25:51J'ai ça un peu dans la ligne de mire.
25:54Donc, j'espère que les réunions qu'on aura avec la fédération
25:58et la nouvelle équipe en fin de saison
26:00vont nous apporter des bonnes nouvelles
26:02et qu'on pourra monter un gros projet jusqu'au Jeu de 2026
26:06et arriver au Jeu de 2026 en étant une équipe forte.
26:09On te le souhaite.
26:10Merci mille fois d'avoir été avec nous, Agathe.
26:11Bon rétablissement.
26:12Fais gaffe à ton pied dans le plat, mais au moins tu cours pas vite.
26:15Ah oui, non, là, je vais pas bien vite, non.
26:17À bientôt. Salut, bon courage.
26:18Merci beaucoup.
26:23Je vous donne rendez-vous très bientôt.
26:24Salut à tous. Merci.