Cette semaine, Alexande Delpérier et Salim Ejnaïni reçoivent la judokate Julia Tolofua. A 25 ans, elle vient de remporter sa troisième médaille au Paris Grand Slam.
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00:00...
00:17-"Parce qu'il y a les femmes, parce qu'il y a le sport",
00:20soyez les bienvenus dans votre rendez-vous.
00:22Bienvenue dans la victoire éternelle avec encore aujourd'hui,
00:26comme toutes les semaines, auprès de Salim,
00:28une invitée exceptionnelle.
00:30Elle fait partie des meilleurs poids lourds au monde.
00:33A 25 ans, la judocate Julia Tolofoie
00:36veut s'imposer comme la référence dans sa catégorie.
00:39Retour avec elle sur son parcours de la Corse à l'INSEP
00:41en retraçant ses plus belles performances.
00:44Et puis, évidemment, on parlera des mondiaux,
00:47de Doha, qui auront lieu au mois de mai, si je ne m'abuse,
00:50parce qu'on sera à un peu plus d'un an des Jeux olympiques de Paris.
00:53Et il n'y aura qu'une seule place dans sa catégorie.
00:56Bonjour, ma chère Julia.
00:57Bonjour.
00:58Ça te fait quoi d'avoir un poids lourd comme Salim à côté de toi ?
01:01Impressionnant, très impressionnant.
01:03Il commence, ça y est.
01:05Salim, qui, et c'est important, a pratiqué le judo.
01:08Important, je ne sais pas. Je ne sais pas si on peut le dire comme ça.
01:11J'ai passé ma ceinture jaune en deux fois, par demi-ceinture.
01:14Voilà.
01:15Donc oui, c'est plutôt à moi d'être impressionné, effectivement,
01:18quand on sait ce que c'est que de pratiquer le judo à ce niveau
01:22et de performer et d'aller aussi loin que toi.
01:24En tout cas, on a hâte de découvrir tout ça.
01:26Et on va revenir sur ce parcours.
01:28Je veux juste rappeler que tu as été championne de France
01:31en 2017-2019, championne d'Europe par équipe mixte en 2022,
01:34médaille de bronze au Mondiaux 2022,
01:36médaillée de bronze au Paris Grand Slam en 2021,
01:3822 et 23, il y a quelques semaines à peine.
01:41On est ravis de t'accueillir. Ça nous fait vraiment plaisir.
01:43Je voudrais qu'on retrace un peu ton parcours.
01:45Toi, tu es né à Nice.
01:47Et puis, à peine sorti, direction la Guyane.
01:49C'est ça.
01:50C'est ça, c'est mon père.
01:52Il était légionnaire.
01:53Du coup, on est partis, il a été muté là-bas, à Kourou.
01:55Et du coup, après, muté à l'âge de mes 2 ans en Corse, à Calvi.
02:00Du coup, j'ai grandi jusqu'à l'âge de mes 16 ans.
02:03Et on voit une photo avec ton papa.
02:05Vous êtes d'une famille de sportifs,
02:07parce qu'un légionnaire, c'est toujours un sportif.
02:09Oui, oui, oui.
02:10Une très grande famille de sportifs chez les Thauviaux-Fureurs.
02:12Salim.
02:14Le sport, la discipline aussi, j'imagine ?
02:16La rigueur ?
02:17Oui, oui, complètement, complètement.
02:19Qu'est-ce que tu as testé au début comme sport ?
02:22Ça s'est traduit comment, tout ça ?
02:23On m'a mise dans le judo, j'avais 4 ans.
02:26Donc, vraiment, il n'y avait pas énormément de sport dans la petite ville.
02:31Et vraiment, le seul sport mixte qu'il y avait, c'était le judo.
02:34Mes parents ont décidé de me mettre dedans.
02:35Et du coup, je n'ai jamais trop abandonné ce sport-là.
02:39J'ai failli, à l'âge de mes 12 ans, partir dans le Hand.
02:41Et mon entraîneur de club m'a dit,
02:44hop, hop, hop, je t'envoie en Pôle espoir avec Jean-Yvan Daréli,
02:48qui a été, du coup, vraiment un papa-poule,
02:51un peu pour les Sernieto aussi, et moi.
02:55On a évolué après à Marseille et après encore à Paris.
03:01OK, là, tu vas un peu trop vite pour nous.
03:03J'ai besoin de comprendre,
03:05est-ce que tu avais des prédispositions physiques pour le judo ?
03:09Et si oui, qu'est-ce qu'il faut ?
03:10Franchement...
03:12Parce qu'on voit tout type de morphologie dans le judo.
03:15Oui, c'est pour ça, il y a plusieurs catégories, on a 7.
03:19Vraiment, moi, je pense que je ne pouvais pas être
03:21dans la catégorie des Jervis Matai et le gabarit de toute ma famille
03:25si j'étais vraiment prédisposée à être dans la catégorie des plus 78 kg
03:29et avoir cette espèce de poids, de musculature.
03:32On a une espèce de stature assez grosse aussi dans les îles.
03:37Donc non, j'étais vraiment partie pour aller dans les plus 78 kg
03:41et vraiment être galpée comme ça.
03:44Parce que vous êtes originaire de Wallis et Futuna ?
03:46C'est ça, mon père est né à Nouvelle-Calédonie
03:48et originaire de Wallis.
03:50Quand on dit que la famille est très sportive,
03:51il faut savoir qu'elle a deux cousins, Julia,
03:54qui sont pros en rugby à Toulon, au Stade Toulousain.
03:56C'est ça, c'est ça.
03:57Et il y en a un autre qui suit, là, il est en train de monter en puissance.
04:02C'est encore mon petit cousin, c'est leur frère aussi.
04:05C'est une fratrie de cinq.
04:06Dont tu es très proche ?
04:07Dont je suis très proche, oui.
04:09Vraiment, dès qu'ils ont un match, s'ils jouent à Paris ou quoi,
04:11si je peux aller les voir, je vais les voir.
04:13Quand je descends dans le sud, si je peux aller voir Toulon ou Toulouse,
04:15je vais voir.
04:16Et eux viennent te voir ?
04:17C'est plus compliqué, ils jouent beaucoup.
04:20Donc non, c'est pas la même chose.
04:21Après, ils me suivent de loin.
04:23J'ai la femme de mon cousin, j'ai les petits qui sont...
04:25Enfin, j'ai mon petit neveu qui est dans le judo.
04:29Donc ils me suivent via la télé.
04:32Il y a une émulation familiale ?
04:36C'est... Comment dire ?
04:41Est-ce que vous stimulez ?
04:43Oui, non, on est vraiment là
04:46à se soutenir les uns les autres.
04:47On se pousse vraiment derrière.
04:48On est là, vraiment.
04:50Vraiment, on est là...
04:52Pour la famille.
04:53Pour la famille, c'est ça.
04:54Salim.
04:54Il y a quelque chose de commun que tu trouves
04:56entre l'esprit du judo et l'esprit du rugby ?
04:58Je te la lance un peu au hasard, celle-là.
05:00Je pense que c'est un très gros sport de contact,
05:04autant le rugby que le judo.
05:06Et puis les valeurs et le respect aussi,
05:09on se rend dedans pendant les combats ou les matchs.
05:12Et après, par contre, c'est vraiment...
05:14Chez le rugby, c'est la troisième mi-temps.
05:16Et puis au judo, on va se boire une bière après.
05:20Pas très judo, c'est la bière après.
05:22Non, non, non.
05:23Une seule, ça va.
05:24Une seule, ça va.
05:25En même temps, il y a des grands verres.
05:26Parfois, tu peux mettre 4 litres.
05:28Dis-moi, Julia, à quel moment tu t'es dit
05:31que ça, ça peut être ma vie ?
05:35Franchement, j'ai mis du temps à réaliser
05:38que j'allais faire de ce sport
05:40vraiment une très grande carrière, on dira.
05:44Quand je suis montée sur Paris Games,
05:45je ne savais même pas ce qu'était l'INSEP,
05:48je ne savais pas ce qu'était l'école des champions,
05:49les Jeux olympiques, c'était très loin.
05:50Parce que tu es arrivée à l'INSEP à quel âge ?
05:52J'avais 18 ans.
05:53OK. Donc à ce moment-là,
05:54tu sors du Pôle espoir de Marseille,
05:56tu as passé ton bac là-bas.
05:57Pôle France Marseille.
05:58Pôle France, pardon.
05:59Oui.
06:00Et tu ne te dis pas quand tu arrives à l'INSEP,
06:02ça sera peut-être ça mon métier et ma vie ?
06:04Non, non, non.
06:04J'y vais parce que je suis performante,
06:06je suis jeune, j'arrive à sortir de grosses perfs
06:09et vraiment, je ne me dis pas...
06:12Bon, voilà, il y a les Jeux, tout ça.
06:14Je me dis, il y a les championnats du monde,
06:16les championnats d'Europe,
06:17mais les Jeux, c'était très loin pour moi.
06:19Et finalement, quand on voit que c'est de plus en plus important,
06:23que je rentre de plus en plus dans cette espèce de carrière,
06:26qu'il y a les grands slams qui sont des compétitions
06:30très importantes, là, je me dis,
06:32ah oui, c'est quand même important.
06:33Et en fait, avec l'âge et la maturité que j'ai pu prendre,
06:38là, je me suis dit, OK, les Jeux, c'est vraiment mon objectif.
06:41Salim.
06:42Autour de cette période-là, justement, 18, 19 ans,
06:44tu nous parlais tout à l'heure en coulisse de ta blessure.
06:48Qu'est-ce qui fait que tu...
06:49Alors déjà, tu t'es fait les croisés, c'est ça ?
06:52C'est ça.
06:52Le croisé antérieur, qui est assez fréquent.
06:55C'est assez long, il y a une opération,
06:56il y a un retour, il y a une rééducation.
06:58Tu t'es accroché à quoi, du coup,
06:59si tu ne te disais pas que tu en ferais ta vie à ce moment-là ?
07:01Comment est-ce que tu te bagarres pour revenir ?
07:03J'ai eu déjà ma famille, mes amis qui m'ont aidée,
07:07j'ai eu ma coach, à ce moment-là,
07:09j'étais dans le club de la CS Peugeot Mulhouse,
07:12qui était Céline Lebrun.
07:13Ah oui.
07:14Donc, très grande dame, je le rappelle.
07:17C'est quelqu'un qui m'a beaucoup poussé
07:20et vraiment, on venait à se prendre la tête,
07:23mais elle m'a toujours bien encadré,
07:26vraiment beaucoup accompagné,
07:29et c'est ça qui m'a donné envie, en fait, d'aller plus loin.
07:33J'avais envie de la rendre fière,
07:34j'avais envie de se rendre fière de mes proches,
07:35parce que c'était plus...
07:36Mais tu te souviens d'un déclic ?
07:38Euh... Franchement...
07:40Un titre, une compète, ou battre quelqu'un
07:42qui te semblait incroyable, ou...
07:442017, vraiment, mon titre de championne de France,
07:48c'était vraiment la plus belle des victoires pour moi.
07:51Vraiment, je reviens d'un croisé, c'était très difficile,
07:54j'ai eu ma période très dure de dépression,
07:59tout ça, de revenir sur le tapis...
08:00Attends, attends, attends, pardon.
08:02Dépression, raconte-nous.
08:04J'ai eu une très grosse dépression,
08:05parce que je me fais le croisé, du coup, plus de sport,
08:08je prends un poids ignoble, et ça va vraiment pas bien,
08:13je l'ai caché, après, j'ai eu le temps d'en parler
08:16dans l'esprit du judo, aussi, à un moment donné,
08:18et ça a été très dur, très compliqué.
08:20Tu t'es sentie soutenue ?
08:22Je me suis sentie soutenue, oui,
08:24mais vraiment, c'était vraiment à l'intérieur de moi,
08:27j'allais pas du tout bien, en fait,
08:30je me suis dit, je commence à faire un grand slam,
08:32je devais faire le grand slam d'Abu Dhabi,
08:34finalement, je peux pas le faire,
08:36parce que je me fais le croisé une semaine avant,
08:38j'apprends ça, j'ai un médecin, je sais plus qui,
08:43qui m'a annoncé ça, comme si c'était une bonne nouvelle,
08:46donc je suis sortie, j'étais en pleurs,
08:48c'était vraiment pas bien, et vraiment, la dépression,
08:50elle est tombée vraiment une semaine après,
08:51où j'ai pris du poids, je me suis fait opérer.
08:53Combien de temps ça a duré ?
08:55J'ai bien déprimé un bon mois et demi, deux mois.
08:59Ce qui est à la fois long et court.
09:03Oui, très long, parce que finalement,
09:07j'ai vraiment perdu 23 kilos,
09:09j'étais monté à 130, je suis peut-être descendu à 107
09:12avant les championnats de France en 2017,
09:14et c'est là, c'est pour ça que je dis
09:16que c'est une de mes plus belles victoires,
09:17parce que j'ai surmonté ça,
09:19j'ai eu vraiment cet espèce de soutien
09:23de ma famille, mes amis et de ma coach,
09:25et c'est vraiment ça qui m'a marqué, le plus marqué.
09:28Salim, c'est important que tu...
09:29Alors, ta famille, tes amis, on sent qu'ils sont présents,
09:32mais c'est important que tu parles aussi de ta coach,
09:34c'est très beau de savoir que même dans ce moment-là,
09:38où tu n'étais plus nécessairement en condition optimale,
09:41tu avais malgré tout ton équipe sportive pour te suivre.
09:45Tu sens ça toujours aujourd'hui,
09:47et est-ce que tu sens une évolution dans la famille judo
09:51aujourd'hui, en 2023, par rapport à 2017 ?
09:54Clairement, oui, on apprend à avoir une espèce de deuxième famille.
09:59Le judo, c'est quand même une deuxième famille,
10:01une très grande famille.
10:02J'ai mes amis les plus proches qui sont là pour moi,
10:05qui ont toujours été là.
10:06Qui sont des judocates ?
10:07Qui sont des judocates.
10:09Qui sont des judocates et un peu en extérieur aussi,
10:12enfin, qui font d'autres sports maintenant,
10:14mais c'est surtout le judo qui a été vraiment très présent pour moi.
10:19Et non, ça, par contre, je ne l'oublierai jamais.
10:22On est comme ça, on est là à se soutenir,
10:24autant dans les bons que les mauvais moments,
10:27on est là les unes pour les autres.
10:29Moi, il y a une chose qui me touche dans ce que tu dis,
10:31c'est qu'il y a cette dépression, il y a ce retour
10:35et il y a probablement une prise de conscience
10:37que la blessure fait partie intégrante
10:39d'une carrière de sportif ou de sportif de haut niveau.
10:43Et surtout dans le judo,
10:45je ne pense pas que le terme violent corresponde,
10:48mais on pousse tellement fort,
10:50on demande tellement de puissance au corps
10:53qu'évidemment, parfois, ça lâche.
10:54Est-ce que, du coup, tu as intégré ça ?
10:56C'est que la blessure, et là, aujourd'hui,
10:57tu es blessé à l'épaule et tu continues.
10:59Est-ce que ça a changé ton approche et ton regard sur ça ?
11:03Assez, oui.
11:04En fait, c'est vrai que quand on est jeune,
11:06on se dit qu'on est blessé, on va faire attention,
11:08on se met un peu sur le côté,
11:09on regarde les autres faire de l'extérieur.
11:12Et c'est vrai que quand on apprend...
11:14Comme j'ai eu le croisé, j'ai appris,
11:16j'ai eu des petits pets, j'ai appris aussi.
11:18Et là, je me dis, en fait, tu peux apprendre à faire avec.
11:22Il ne faut pas que ce soit non plus une énorme blessure.
11:26Mais c'est vrai qu'on apprend à faire avec les blessures.
11:29On est là, puis on est bien suivi.
11:31On a les kinés, on a les entraîneurs...
11:33Oui, un service médical fantastique.
11:34Oui, clairement.
11:35Et du coup, tout ça réuni, franchement, on ne peut que réussir.
11:39Après, c'est vrai que quand je dis,
11:40on ne va pas se sortir un orteil où là, c'est plus compliqué,
11:44ou une vraie luxation de l'épaule où là, il nécessite vraiment opération.
11:48Mais quand on a vraiment un très gros suivi,
11:50autant dans le kiné qu'avec les entraîneurs nationaux
11:53qui sont là pour te dire,
11:54bon, là, cette semaine, tu vas faire beaucoup de kinés,
11:56cette semaine, tu vas faire...
11:58Tu sais que t'entres de bonnes mains.
11:59Oui, là, on n'est pas... Ils ne nous lâchent pas.
12:03Salim.
12:04Tu sais qu'ils essayent surtout de te maintenir sur le fil du rasoir,
12:07parce qu'il y a des cas,
12:08et tu le connais très bien avec ton épaule notamment,
12:11où tu peux maintenir, tu peux continuer.
12:14Si tu forces un poil un peu trop, tu peux abîmer un peu plus,
12:18et reculer, perdre du temps.
12:19Et au contraire, pour réparer pleinement,
12:21il faut s'arrêter et perdre du temps aussi.
12:23C'est dur pour toi d'avoir un équilibre
12:27entre le temps perdu et le temps gagné, là-dessus ?
12:29Oui, clairement, c'est vrai que c'est dur.
12:32C'est qu'il faut vraiment doser cette douleur aussi.
12:36Il ne faut pas aller jusqu'à le fait de souffrir.
12:39Tu rentres chez toi et tu n'es vraiment pas bien,
12:41tu es en pleurs.
12:42On dose.
12:44Si ça ne va pas cette semaine, on se calme dessus,
12:48on fait des soins.
12:49Si ça va, si on sent qu'il y a une petite gêne encore,
12:52ce n'est pas très grave.
12:54Pour moi, je réfléchis comme ça.
12:55Si j'ai une petite gêne, ce n'est pas très grave.
12:57Si je peux le faire, je le fais.
12:58Si je sens que...
12:59De toute façon, la moindre petite gêne,
13:00tu le signales aux médecins.
13:01Oui, je le dis.
13:02Ils savent.
13:04Oui, je le dis.
13:05Il y a cette dépression, juste avant ce titre de 2017,
13:08et puis il y aura un nouveau titre en 2019.
13:11Est-ce que ça t'assoie dans ta tête,
13:13mentalement, psychologiquement ?
13:15C'est, oh, les filles, vous avez vu, je suis là.
13:18Ce n'était pas juste un retour de flamme 2017.
13:20Non, je suis bien installé.
13:21Oui, oui.
13:22Quand on fait championne de France plusieurs fois,
13:27c'est vrai qu'on se dit, non, ça va, je suis bien,
13:30j'arrive à prendre mes marques.
13:33Je n'ai pas trop de soucis, entre guillemets, à me faire.
13:37Mais bon, on reste quand même sur ses gardes,
13:40parce qu'il y a la jeunesse qui arrive quand même.
13:42Même si j'ai 25 ans, derrière, ça monte.
13:44Et on se dit, bon, il faut aller chercher en portant plus haut,
13:49plus loin, et non, il ne faut pas traîner.
13:51Salim.
13:52À quelle différence se joue, justement,
13:55le fait d'être sélectionné, sélectionnable,
13:58sur les échéances, comme Tokyo, par exemple,
14:01comme, là, on va penser à Paris, bien sûr.
14:05Quelles sont tes forces là-dessus ?
14:07Qu'est-ce que tu peux mettre sur la table ?
14:09Et à quoi ça va se jouer, en termes de différence,
14:11par rapport à tes collègues ?
14:13Alors, si on parle de physique,
14:16ce que j'ai un peu en plus, je pense, par rapport aux autres lourdes,
14:19c'est le cardio.
14:21J'ai pas mal de cardio.
14:22Après, le mental, je suis en train de le travailler avec quelqu'un d'autre,
14:25parce qu'on a quand même une préparation mentale un peu à avoir.
14:28Avec qui, c'est quoi, c'est comment ?
14:30Moi, je fais avec un entraîneur national,
14:33parce que j'en ai besoin de temps en temps,
14:36du coup, je vais le voir.
14:37Pas tout le temps, mais quand je sens que j'en ai besoin, je vais le voir.
14:41Et sinon, pour ce qui est sur le temps et sur le sport,
14:47on a une ranking liste mondiale et olympique.
14:52C'est là où, sur les grands slams, les championnats d'Europe,
14:55les championnats du monde, on prend des points.
14:58Et tous ces points-là, cumulés,
15:00ça nous met haut dans la ranking liste
15:02et est potentiellement sélectionnable aux Jeux olympiques.
15:06Oui, parce que la grande complexité, ta grande difficulté,
15:09c'est qu'il y a une copine qui s'appelle Romane Dicot.
15:11C'est ça.
15:12Et que, par exemple, au Jeu de Paris, il n'y aura qu'une place.
15:14C'est ça.
15:16Ou toi, ou elle.
15:17Comme ça a été le cas au Jeu de Tokyo, où ça a été elle.
15:21Comment tu as pris ça ?
15:23Quand elle a été sélectionnée, je ne me faisais pas de fausses idées.
15:27Elle a fait une année juste incroyable
15:30et je ne pouvais pas prétendre à avoir cette place-là.
15:33J'ai fait mes performances.
15:35Excuse-moi, Julia.
15:36Une année incroyable, ça veut dire qu'elle avait quoi de plus que toi ?
15:39Et à quel moment on doit accepter, entre guillemets ?
15:42Elle a eu, on dirait, plus de victoires que moi sur les grands slams.
15:47Elle fait beaucoup de premières places.
15:49Et donc, je suis un peu derrière.
15:52Donc, je lui colle au train,
15:54mais ça reste quand même une fille qui monte en puissance.
15:58Et là, depuis la dernière année où j'arrive à faire beaucoup de podiums,
16:03j'ai fait dix sorties, dix médailles.
16:05Je suis vraiment là.
16:07On est vraiment au coude à coude et après, c'est mon amie.
16:11Ce que je disais tout à l'heure, c'est que sur le tapis, on se fait la guerre.
16:14On a quatre minutes de match à faire.
16:16Et par contre, en dehors, on s'entend très bien.
16:18On a une concurrence très saine.
16:19Et voilà, on sait qu'il n'y aura qu'une seule place pour Paris
16:23et que s'il faut qu'on se fasse la guerre sur le tapis,
16:25on se fera la guerre sur le tapis.
16:26Explique-moi une chose, c'est quoi les mots que vous vous dites,
16:28les copines, avant et après ?
16:31Ben, franchement...
16:32Moi, ça se jouera entre Salim et moi.
16:35Je l'insulterai avant et je le consolerai après.
16:39Mais tu vois, j'aurai des mots très forts et très tendres.
16:41Ça se passe comme ça ?
16:43Non, franchement, on se dit bonne chance ou on se dit merde
16:46et puis on se retrouve à la sortie, on se fait un gâté, un câlin.
16:51On est contentes.
16:52Il n'y a pas de mots ?
16:54Ah, merde, tu m'as encore pour vous...
16:55Non, on se remercie parce qu'on a une forme de respect entre nous.
17:01On se remercie, merci pour ce combat, parce qu'on s'est vraiment donné.
17:04On n'a rien lâché.
17:05Quand on se prend, c'est vraiment un combat de titans.
17:07On ressort, on a les bras engorgés.
17:08Non, c'est des très gros combats qu'on a avec Roman et on ne se lâche pas.
17:14Salim, tu progresses à chaque fois sur ce genre de combat, justement ?
17:18Je progresse, oui.
17:20De toute façon, tous les combats sont bons à prendre.
17:22On prend de chacun et on est vraiment là à augmenter son potentiel.
17:30Vraiment, ça nous fait prendre autant,
17:34même sur l'aspect technico-tactique que mental.
17:38C'est vraiment... On prend.
17:40Un mot sur ce Paris Grand Slam que tu aimes bien.
17:42À chaque fois, tu as pris des médailles.
17:44Oui.
17:45Les Jeux seront à Paris aussi.
17:46Oui.
17:47On va regarder quelques images des Paris Grand Slam.
17:50Est-ce qu'être à Paris, c'est pour toi une force, une pression,
17:55une attente, une... Je ne sais pas.
17:57Alors, c'est autant une force qu'une pression.
17:59On sait qu'il y a beaucoup de monde qui nous attend.
18:02On voit les images de 2022 en même temps.
18:04On a vraiment cette pression.
18:07On a les gens qui sont là derrière nous, qui nous poussent.
18:10Du coup, ça nous fait un peu baisser la pression.
18:13L'atmosphère est juste hyper intense et on a juste envie d'un truc,
18:16c'est d'exploser et de vraiment ramener cette médaille.
18:20C'est...
18:21Quand on a des salles comme ça où il y a 10 000, 15 000 personnes,
18:24ça fait quoi ?
18:25C'est ouf.
18:26Franchement, quand ils disent France, pour la France,
18:30que Julien Tolofia et qu'on entend hurler dans l'aréna,
18:35c'est juste incroyable.
18:36Et là, cette année encore plus, c'est en février,
18:39où on était 13 000, où ça faisait longtemps
18:41qu'on n'avait pas été autant à l'aréna, 13 000 personnes.
18:45C'est juste... C'est juste énorme.
18:47Je voudrais qu'on nous montre les images du podium de cette année.
18:50Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là ?
18:53Tu fais bronze ?
18:54Je fais bronze, oui.
18:55Qu'est-ce qui se passe dans ta tête à ce moment-là ?
18:57Je suis très contente, parce que je ramène quand même la médaille.
19:01Ça a été quand même une grosse journée.
19:03En plus de ça, j'ai été blessée.
19:05C'est... Non, franchement, ça fait juste trop plaisir.
19:08Avec Romane ?
19:09Avec Romane, avec Romane, toujours.
19:11Elle est emmerdante, celle-là.
19:13Rires
19:15Non, mais c'est...
19:17Voilà, j'aurais préféré aller plus loin.
19:19En plus, on se prenait pas du tout en demi.
19:21Je manquais de...
19:23Là, vu que c'était sur ma reprise,
19:25j'avais pas assez de cardio judo, je manquais un peu de cardio,
19:27sur mon randonnée contre la japonaise,
19:30j'avais un peu... Je les avais un peu là, quoi.
19:33En fait, moi, de ce que je sens,
19:36c'est que t'as eu une carrière à différentes vitesses
19:39et que là, aujourd'hui, je te sens tellement forte dans la tête.
19:43On a l'impression que...
19:44Alors, je sais pas à quoi c'est dû,
19:46mais que l'écart n'a jamais été aussi faible
19:50entre toi et Romane, mais j'imagine aussi avec les autres,
19:53et que t'as franchi un vrai palier mental.
19:55Ouais. Non, clairement, j'ai...
19:57En fait, j'ai appris à être fier un peu de moi et de ce que je fais.
20:01Et vraiment, quand on se dit ça,
20:03fais-le pour toi, régale-toi, fais-toi plaisir, lâche rien.
20:07En fait, en plus de ça, avec...
20:10L'épaule, c'est un peu emmerdant.
20:13On est là, on se dit, en fait, t'as rien à perdre.
20:15Donc, fais-toi plaisir, va chercher cette médaille,
20:19va chercher la plus belle des médailles, c'est le mieux.
20:21Mais à partir du moment où on est sur le podium,
20:23ça fait du bien.
20:25En fait, on se dit, à partir du moment où commence la journée,
20:28on a hâte que la journée se commence.
20:29Même quand on arrive sur le lieu du pays,
20:34on se dit, j'ai hâte que cette compétition...
20:37On l'a pas commencé, mais on a hâte que ça se termine.
20:40Parce qu'en fait, on a une espèce de pression, mais c'est...
20:43Enfin, moi, je suis pas quelqu'un de stressé.
20:45De base, je suis quelqu'un de très tranquille,
20:47mais j'ai juste hâte, dans le sens où j'ai hâte d'avoir ma médaille
20:50et laissez-moi rentrer chez moi.
20:52Salim.
20:54Là, aujourd'hui, rentrer chez toi, justement,
20:56pour les prochains championnats et Paris 2024, bien sûr.
21:00Tu seras déjà chez toi.
21:02Est-ce que ça a un sens particulier ?
21:04J'imagine que oui.
21:05Qu'est-ce que ça signifie pour toi, ces Jeux ?
21:08Et qu'est-ce que ça signifierait d'être qualifié ?
21:10Déjà, rien que de pouvoir être qualifié, c'est vraiment...
21:14Je me dis que c'est vraiment l'objectif numéro un.
21:17Je veux vraiment... Paris, c'est vraiment l'objectif de base.
21:20Même en soi, sans qu'on soit chez nous...
21:22J'ai l'impression que c'est la vraie difficulté, c'est la qualif.
21:24Derrière, aller choper une médaille, tu le feras.
21:27Ce qu'il faut, c'est cette fameuse place, et il n'y en a qu'une.
21:29C'est ça.
21:30À partir du moment où cette place sera prise,
21:32tout le stress redescendra.
21:34Et franchement, ce ne sera que du bon.
21:37Après, pour la suite, on se dit...
21:40Normalement, les sélections se font en février.
21:42Après février, on se dit, là, tu peux souffler.
21:45Pas trop, parce qu'on n'a pas trop le temps.
21:48Mais souffle, tu as ta place.
21:49Maintenant, concentre-toi sur les Jeux.
21:52Alors, il y a une étape qui va être primordiale,
21:54c'est les mondiaux de Doha, au mois de mai.
21:56Oui.
21:57Où il y aura toujours Romane sur ton chemin.
21:59Oui.
22:00J'imagine que là, l'objectif, il est clair,
22:02c'est d'être devant elle et d'aller chercher l'or.
22:04Oui, l'objectif, c'est vraiment d'aller chercher l'or
22:07et ce dossard rouge.
22:09Ce serait vraiment, vraiment bien.
22:10C'est une satisfaction.
22:12C'est la première fois de ta vie que tu y crois autant ?
22:15L'année dernière, j'y croyais aussi.
22:17En octobre.
22:18Mais là, vraiment,
22:19je n'ai pas du tout envie de lâcher le morceau.
22:22Vraiment, c'est vraiment une envie...
22:25Tous les jours, je me dis, OK, là, j'ai été sélectionnée,
22:27là, je veux la médaille.
22:29Tu en parles avec Romane ?
22:30Non, on n'en parle pas de ça, mais on le sait.
22:33Même que ce soit elle ou moi,
22:35on sait que c'est ce titre qu'il nous faut.
22:38Bien sûr.
22:39Et là, vraiment, c'est...
22:40J'aimerais vraiment pouvoir être tranquille...
22:43Assez tôt.
22:44Voilà.
22:45Objectivement, sur la scène mondiale,
22:47une fois que tu seras sélectionnée, tu arrives à te situer ?
22:49Je veux dire, la médaille, pour toi, serait vraiment prenable ?
22:53Là, à Doha ?
22:55À Doha, puis éventuellement au Jeux,
22:57par rapport à tout milieu audio.
22:58Où est-ce que tu te situes, en fait ?
23:00Doha, je me suis...
23:02Un, deux, trois.
23:03Je me situe un peu devant.
23:05Non, vraiment, c'est...
23:06J'ai vraiment cette espèce de hargne et de rage,
23:11cette boule au ventre
23:12où il y a envie de vraiment sortir, d'exploser
23:14et de pouvoir ramener la médaille d'or à la maison.
23:16Il y a quand même cette épaule qui te fait mal ?
23:18Oui, il y a quand même... Il faut la prendre en conséquence.
23:22Il y a quand même cette épaule qui me fait mal,
23:23mais je suis quand même là, faire de la kiné,
23:25et ce sera ça jusqu'à vraiment la fin,
23:27et je ne me ferai pas opérer jusqu'à ça.
23:29C'est vraiment pas le but.
23:32Vraiment, le but, c'est de créer une espèce d'armure
23:34autour de cette épaule et de ne pas y penser,
23:36et juste d'aller en avant.
23:40Et c'est là où tu te dis que ta rupture des croisés, en 2017,
23:42ça t'aide, j'imagine ?
23:43Oui, c'est ça que je me dis.
23:45C'est beaucoup trop long.
23:47C'est beaucoup trop long, on n'a pas du tout envie d'attendre.
23:51Je parle à mon corps, oui.
23:53On parle à son corps souvent,
23:55et je ne veux pas... Je dis, allez, tiens, tu vas tenir.
23:59Fais la compét', après, tu te reposes.
24:01J'ai une question sur ce sujet, justement,
24:03en parlant de ce qui est un peu abîmé,
24:05ce qui est un peu hommagé.
24:06Le judo est un des sports exemplaires
24:09en termes d'inclusion, notamment.
24:11Il y a des règles que je connais très bien,
24:12puisqu'elles s'adressent aux malvoyants, aux non-voyants,
24:14dans les compétitions valides.
24:16La règle du départ au contact, la règle du jogging, par exemple.
24:18Il y en a quelques autres que je peux te citer.
24:20Est-ce que tu ressens, toi, cette proximité
24:22entre les athlètes paras et les athlètes valides ?
24:26On a autant d'athlètes paras
24:29qui viennent s'entraîner avec les athlètes valides.
24:31Je trouve que, vraiment, c'est très bien,
24:33autant pour eux que pour les autres,
24:35qu'ils puissent savoir comment ils combattent eux aussi.
24:39Après, c'est vrai que, quand il y a les Jeux,
24:42autant paras que valides,
24:45on a aussi cette envie de voir comment ça se passe pour eux,
24:50et on sera autant là à les soutenir
24:53qu'eux, ils nous soutiennent.
24:54Donc, franchement, pour moi, il y a aussi ce genre de respect
24:58à avoir entre les non-valides et les valides.
25:02Une petite question qui n'a rien à voir avec le judo,
25:04mais qui me taraude, quand même, depuis le début.
25:06Ta couleur de cheveux, je l'explique à Salim,
25:08elle est moitié blonde, moitié brune.
25:10Ça vient d'où ? Il y a une signification ?
25:12Il y a un message ?
25:13Non, pas du tout.
25:15C'était avec ma petite sœur pendant les vacances de Noël.
25:18Heureusement que c'est elle qui a les photos
25:21et que c'est pas sur mon Instagram.
25:23Elle s'était éteint les sourcils en blond,
25:28et moi, j'en avais fait un.
25:29Du coup, je me suis dit, je vais faire la moitié d'une tête,
25:32et ça faisait genre vraiment comme ça.
25:34De travers.
25:35Après, je me suis dit, le sourcil, c'est trop bizarre.
25:37Je me suis recoloré le sourcil et j'ai laissé la moitié.
25:40Je trouve que ça tirait bien, Salim.
25:42Ce qui est génial, c'est que tu vas au bout de tes idées.
25:45Même là-dessus.
25:46C'est vrai, c'est très assumé, t'as raison.
25:49C'est dingue. Bravo.
25:50Merci.
25:51Julia, ta carrière, tu penses la pousser jusqu'à quel âge ?
25:54T'as que 25 ans, aujourd'hui.
25:56J'ai 25 ans.
25:57Là, j'ai Paris.
25:59Paris, c'est vraiment l'objectif principal.
26:00Donc, t'auras 26 ans et demi.
26:0326 ans.
26:04Oui, 26, 27.
26:0527, même.
26:07Oui.
26:08Non, je pense que je vais pousser deux ans après les Jeux
26:12et voir comment ça se passe aussi, mon corps.
26:15Déjà, en entier, comment il va tenir.
26:18Et après, comme on le dit, l'après-Jeux,
26:20c'est jamais une période très facile.
26:22Je ne le dis pas parce que je l'ai entendu.
26:26Je ne l'ai pas vécu parce que voilà.
26:27Mais je l'ai entendu et apparemment,
26:31c'est une période assez difficile.
26:33On verra déjà après les Jeux.
26:35Je sais que je compte pousser plus de deux ans après
26:37et j'ai aussi les études à côté en parallèle.
26:40C'est quoi, tes études ?
26:42Je suis en kiné.
26:43Génial.
26:44Très bon choix. Bravo.
26:46Donc, tu comprends mieux ton épaule.
26:48Un peu.
26:49Là, je suis plus concentrée sur le membranfe.
26:51On fait en deux ans puisque c'est quand même très prenant.
26:54Rien qu'une année en deux ans, même, c'est assez difficile.
26:58Mais bon, on s'accroche comme on peut.
27:00Pour terminer, il y a écrit quoi sur ton bras ?
27:03C'est en italien ?
27:05Ca veut dire quoi ?
27:06Seul Dieu peut me...
27:08Juger.
27:09Peut me juger.
27:10En tout cas, nous, on va te juger, si on peut se permettre,
27:13mais en te disant bravo et qu'on a passé un super moment.
27:16Merci beaucoup.
27:17Merci à toi.
27:18Merci, Salim.
27:19Merci, Alexandre et merci, Julien.
27:21Retrouve ton kimono.
27:22Merci à vous pour votre fidélité. A très bientôt.
27:34Sous-titrage ST' 501