• il y a 4 ans
Serge Rachmaninoff. Un nom francisé à l'orthographe que le compositeur avait lui-même choisi, vu qu'à l'époque le français était la langue internationale de référence, et que sa propre fille s'était établie à Paris. Triste situation que celle de la Guerre arriva alors qu'ils'était installé aux Etats Unis : il est resté séparé de sa fille Tatiana sans jamais pouvoir la revoir, emporté par la maladie en 1943. Ce malheur, ainsi que la nostalgie de son pays d'origine, la Russie, empreignent sa musique dans les moindres recoins de mesures.

Situé dans la succession des romantiques (à l'époque, le "moderne" était déjà bien en place avec Debussy et Ravel), ce post-romantique poursuivait la pensée picturale et technique pianistique de Liszt. Ses mains, gigantesques et puissantes, ont littéralement détruit les marteaux et cordes de nombreux pianos, et il était coutume de prévoir un piano supplémentaire d'urgence dans les coulisses lorsque Rachmaninoff jouait ses oeuvres sur scène. Mais tout comme Liszt, il était aussi capable d'une finesse et légèreté étonnantes, forçant le pianiste à explorer des nuances proche de l'imperceptible.

Les couleurs que Rachmaninoff déploie dans ses oeuvres intimistes me le font le considérer comme le Radiohead de son époque. L'ambiance douce et lourde à la fois, trouble et agréable, nostalgique et dérangeante, rendent ses oeuvres étranges et profondes à la fois. Ses mélodies, alors plus clairement en relief, deviennent des complaintes spectrales. Parmi les oeuvre spécifiquement représentatives de son style, de nombreuses variations qu'il a écrites sur un thème de Corelli. Seule oeuvre française de Rachmaninoff, cette succession de 20 courtes oeuvres a été composée au "Pavillon", villa de Clairefontaine-en-Yvelines dans la foret de Rambouillet.

Serge Rachmaninoff aura avoué ne jamais avoir joué l'ensemble des variations à la suite en concert. Se servant de l'humeur et bruits que faisait le public comme d'un baromètre de sa lassitude, il sautait les variations jusqu'à captiver de nouveau le public. Il admettra être allé jusqu'à ne jouer que la moitié des variations dans un petit village, tant la toux du public se faisait entendre. De mon côté, je n’interpréterai que 4 d'entre-elles (en plus du thème d'origine, de Corelli, sur l'air des Folies d'Espagne). Un russe, naturalisé américain, composant en France des variations sur un thème espagnol mis en avant par un italien. La musique ne souffre d'aucune frontière !

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