Arménie : silence, on tue ! - L'Heure libre avec Michel Onfray et Stéphane Simon

  • l’année dernière
Avec Michel Onfray, Stéphane Simon, Maxime Le Nagard, rédacteur en chef de la revue Front Populaire, et Jean-Christophe Buisson, directeur-adjoint au Figaro Magazine.

Retrouvez L'heure libre, en partenariat avec Front Populaire La Revue (https://frontpopulaire.fr/) avec Michel Onfray et Stéphane Simon, tous les samedis de 10h à 11h sur les ondes de Sud Radio.
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##L_HEURE_LIBRE-2023-09-23##

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Transcript
00:00 Sud Radio, l'heure libre, 10h-11h, Stéphane Simon, Michel Onfray.
00:06 Bonjour à tous, bienvenue dans l'heure libre.
00:08 Votre rendez-vous avec Michel Onfray et l'équipe de Front Populaire,
00:11 une émission qui vous explique l'actualité autrement,
00:13 d'un point de vue souverainiste, en se posant toujours la question de la France en priorité.
00:18 Aujourd'hui, nous avions prévu de vous parler des régions,
00:20 et de la nécessité de les mettre à l'honneur, de sortir du modèle jirondin,
00:24 pour repenser, du modèle jacobin, pardon, pour repenser la France.
00:28 Michel Onfray a écrit d'ailleurs un ouvrage que je vous signale sur le sujet,
00:31 intitulé "Décoloniser les provinces",
00:33 mais l'actualité de la semaine nous a fendus le cœur, disons-le franchement.
00:37 Et nous avons choisi de parler de ce qui se passe sur le territoire arménien du Haut-Karabakh,
00:42 qui subit une nouvelle attaque de l'Azerbaïdjan, des morts, des centaines de blessés déjà,
00:46 dans l'indifférence générale, ce qui nous conduit à nous interroger sur la voie de la France,
00:50 son poids dans le nouvel ordre mondial.
00:52 Nous sommes accompagnés donc de Michel Onfray, qui rentre d'Israël,
00:56 et que je remercie d'être avec nous.
00:58 Nous retrouvons Maxime Lenagar, rédacteur en chef de Front Populaire,
01:01 la revue est frontpopulaire.fr, et nous accueillons Jean-Christophe Buisson,
01:05 directeur de la rédaction du Figaro Magazine,
01:07 que, on peut dire, vous suivez l'actualité comme personne sur ce qui se passe en Arménie et au Karabakh.
01:14 Merci d'être là à tous.
01:16 Jean-Christophe Buisson, commençons avec vous.
01:18 Est-ce que vous pouvez nous résumer ce qui s'est passé cette semaine ?
01:22 C'est un drame qui se joue là-bas depuis un moment déjà,
01:25 et dans l'indifférence générale.
01:27 Oui, alors vous savez qu'en 2020, l'Azerbaïdjan a attaqué l'Ardsar,
01:32 qui est le nom arménien du Haut-Karabakh,
01:34 peuplé quasiment exclusivement d'Arméniens depuis plus de 2500 ans,
01:40 et a conquis les deux tiers de ce petit territoire, de cette enclave qui est arménienne,
01:45 mais qui avait été rattachée artificiellement à l'Azerbaïdjan en 1923 par Staline,
01:49 et qui, lorsqu'elle a demandé son indépendance en 1991, lorsque l'URSS s'est affondrée,
01:54 s'est heurtée au refus de la République d'Azerbaïdjan,
01:58 qui a considéré que cette région devait rester en son sein.
02:01 Une guerre a été déclenchée à cette époque, les Arméniens l'ont emportée,
02:05 donc on gardait cette espèce de République qui n'est pas une dépendance de la République d'Arménie,
02:10 qui est reconnue par pas grand monde, même pas par l'Arménie,
02:13 et qui a cette situation a perduré pendant 30 ans,
02:15 et depuis 30 ans l'Azerbaïdjan s'arme, profitant de sa main pétrolière et gazière,
02:19 et n'a qu'un objectif, c'est de récupérer ce territoire que lui a octroyé Staline,
02:22 encore une fois, il y a un siècle,
02:24 en dépit du fait que ce territoire est peuplé d'Arméniens depuis, je le répète, 2 millénaires et demi.
02:29 Et en 2020, elle a déclenché une grande attaque, dans l'indifférence générale,
02:33 parce que le monde était occupé par les élections américaines, par le Brexit, par la pandémie.
02:38 Elle a récupéré 2/3 de ce territoire, et il ne restait plus qu'un peu moins de 3000 km²,
02:43 c'est quand même pas grand chose, c'est pas un département français, c'est le Rhône, si vous voulez,
02:47 c'est un département toujours peuplé d'Arméniens, mais vivant depuis 3 ans sous l'angoisse,
02:52 et l'angoisse certaine que l'Azerbaïdjan ne s'arrêterait pas là,
02:55 parce que son dictateur de président qui s'appelle Aliyev a dit "nous chasserons les Arméniens comme des chiens de cette région",
03:01 et cette semaine il a mis sa promesse, si je puis dire, à exécution,
03:04 puisque mardi 19 septembre il a lancé à nouveau ses troupes à l'assaut de cette région arménienne.
03:13 Ça a duré 24 heures, 200 morts, 400 blessés, 10 000 réfugiés, en 24 heures.
03:18 Je pense que même en Ukraine, on n'a pas ce taux-là en une seule journée.
03:23 Et les massacres ne sont pas terminés alors ?
03:25 Les massacres ne sont pas terminés, puisque tout se passe à huis clos.
03:28 Moi j'ai réussi à aller en Artsakh il y a 2 ans, l'année dernière, depuis l'année dernière, c'est absolument impossible,
03:33 et même depuis décembre 2022, personne n'entre et ne sort en Artsakh, sauf parfois les malades,
03:38 sous la protection de la Croix-Rouge, et des Russes qui sont supposés faire régner la paix dans cette région.
03:43 Donc ce qui se passe en ce moment là-bas, on ne le sait, moi j'ai des amis qui sont par téléphone ou par vidéo,
03:49 lorsqu'ils ont un peu d'électricité, les gens meurent de faim depuis 9 mois,
03:52 donc pour se défendre contre la taxe, c'est pour ça que les autorités d'Artsakh ont très vite baissé les armes,
03:57 ils n'avaient pas les moyens, même physiques et encore moins militaires, de se défendre.
04:01 Et depuis on est dans une situation étrange, l'ONU a dénié se réunir jeudi pour discuter de tout ça,
04:06 avec les Azéries, avec les Arméniens, avec les Brésiliens, avec les Français, avec les Américains, avec les Russes,
04:11 pour conclure, pas grand chose.
04:13 Alors Michel, on se souvient que vous êtes allé vous aussi en Arsar en 2020, on était ensemble d'ailleurs,
04:20 alors que la guerre des 44 jours venait de se terminer, vous aviez alerté en expliquant que là-bas se jouait un génocide à bas bruit,
04:28 vous avez eu vous aussi alerté, comme Jean-Christophe, rien ne se passe.
04:34 Moi je ne dirais pas que rien ne se passe, je pense que tout se passe, comme les grandes puissances ont souhaité que ça se passe,
04:40 c'est-à-dire qu'il y a vraiment un plan, et on voit bien d'ailleurs que la France ne compte plus pour rien dans cette aventure,
04:46 je ne sais même pas si, enfin j'irais jusque-là, je ne sais même pas si Macron sait où se trouve l'Arsakh,
04:51 ce qui se passe véritablement, enfin on finit par en douter, il dit tellement tout et le contraire du tout sur tous les sujets,
04:56 que la politique de la France est absolument illisible.
04:58 Or, vous avez raison de dire que je rentre d'Israël, il se fait qu'Israël est l'allié de l'Azerbaïdjan,
05:02 c'est quand même étonnant que l'état juif soit l'allié de l'Azerbaïdjan qui est chiite,
05:06 et que la Turquie soit aussi l'allié de tout ce monde-là qui est les sunnites,
05:11 pendant qu'en face on a l'Iran qui lui est chiite, qui est du côté des chrétiens qui sont arméniens.
05:16 Donc on s'aperçoit qu'il y a une vraie guerre de civilisation qui se joue dans cette aventure,
05:20 et que les israéliens jouent leur survie, leur ennemi principal c'est l'Iran,
05:25 il se fait que l'Azerbaïdjan leur permet d'être une espèce d'avant-poste
05:30 pour pouvoir mener des opérations militaires le cas échéant,
05:34 et que donc s'il faut payer ça du prix du sacrifice de l'Arménie, on le paye.
05:37 On paye du prix du sacrifice de l'Arménie, voilà.
05:39 Par ailleurs, il y a une espèce d'islamophobie qui se joue sur le terrain...
05:46 Enfin, c'est une dialectique islamophobie-islamophilie,
05:49 enfin tout ce qui fait qu'on laisse faire l'islam.
05:51 Et l'islam a dit depuis très longtemps que ces chrétiens-là les gênaient.
05:56 Moi je le dis depuis toujours, ça fait très longtemps que je fais savoir
05:59 que ce qui s'est passé avec le génocide arménien met en jeu des musulmans
06:03 qui ont décidé d'exterminer des chrétiens.
06:05 Et on me fait savoir que je me trompe, que je suis obsessionnel,
06:08 qu'avec ma théorie du choc des civilisations, celle d'Huntington, que je refais mienne,
06:12 je me trompe, et que ça n'est pas ceci, que c'est une affaire de nationalisme, etc.
06:16 Et puis on voit bien que, effectivement, la religion mène le bal dans cette aventure,
06:20 qu'il s'agit d'unifier, effectivement, une espèce d'islam dans cette partie du globe,
06:26 et que cette présence, je ne vais même pas dire résistance,
06:30 mais cette présence arménienne est gênante.
06:32 Il s'agit juste de continuer, effectivement, le génocide en disant
06:35 "Nous occupons physiquement et militairement,
06:37 et puis après il y aura probablement quelque chose du genre une épuration ethnique,
06:40 alors soit elle se fera violemment, soit elle se fera parce que les gens diront
06:43 "Mais nous on n'a pas envie de vivre sous ce genre de régime,
06:46 et ils quitteront cet endroit-là".
06:48 Et effectivement, la France ne dit rien, l'Europe ne dit rien,
06:51 d'autant que Poutine a laissé faire.
06:53 Il faut savoir que dans cette aventure, Poutine peut aussi se venger en disant
06:57 "Je protégeais, je ne protège plus, faites ce que vous voulez désormais,
06:59 j'ai autre chose à faire avec l'Ukraine,
07:01 puisque l'Occident m'a déclaré une espèce de guerre généralisée,
07:04 je ne soutiendrai plus rien de ce qui ressemble à l'Occident,
07:06 et allons-y, je vais me faire aussi des alliés du côté des islamistes".
07:10 On sait d'ailleurs que l'islam et Poutine sont du même côté
07:14 pour lutter contre l'Ukraine, et pour le coup contre l'Arménie également.
07:17 - Oui, alors c'est un peu comme si finalement,
07:20 enfin pardon, je vais être un peu brutal,
07:22 mais s'il y avait eu 120 000 chiens à sauver dans cette région,
07:25 je pense que les antispécistes de tout poil seraient montés au créneau,
07:32 et là, 120 000 Arméniens à sauver, on ne voit personne Jean-Christophe.
07:37 - Oui, et c'est pour ça d'ailleurs, j'aurais un tout petit amendement,
07:39 si vous le permettez Michel, à ce que vous avez dit à propos de la religion.
07:42 Les Arméniens sont chrétiens, et sont les cibles des Azéries,
07:47 non pas parce qu'ils sont chrétiens, mais parce qu'ils sont arméniens.
07:50 Or, tous les Arméniens sont chrétiens,
07:52 même ceux qui ne croient pas en Dieu d'une certaine manière,
07:54 parce que c'est presque plus culturel que spirituel ou religieux réellement,
07:57 et parce que la foi chrétienne leur a permis de résister à toutes les invasions,
08:00 toutes les conquêtes pendant des millénaires.
08:02 Donc l'arménophobie des Azéries est d'abord dictée par le fait que,
08:09 puisque le symbole de l'Arménie, de l'Arménien,
08:12 c'est une église, c'est un monastère, c'est un rachkar,
08:15 on détruit les églises, les monastères, les rachkars.
08:17 Mais ce n'est pas tellement par haine de la religion chrétienne en tant que telle,
08:20 moi je pense que le vrai combat religieux existe, c'est une partie de ce combat,
08:26 mais le vrai combat, c'est le combat de l'espace turc contre le reste.
08:30 Le vrai projet, ce n'est pas un projet islamiste à mon sens,
08:33 sinon on ne verrait pas des chiites et des sunnites s'entendre,
08:35 puisque je rappelle qu'il y a des mercenaires syriens totalement sunnites,
08:38 qui sont passés par Gadzantep, donc la Turquie,
08:41 pour rejoindre les Azéries chiites et combattre les Arméniens,
08:44 donc il y a un mélange qu'on ne comprend pas très bien,
08:45 par parenthèse ça prouve bien que parfois les islams se réunissent
08:48 quand il s'agit de taper sur des chrétiens, ça je suis d'accord avec vous,
08:51 mais en l'occurrence le vrai danger, le vrai impérialisme qui est en oeuvre en ce moment,
08:56 c'est l'impérialisme turc.
08:58 Le pan-turquisme.
08:59 Le pan-turquisme, c'est l'idée qu'on va rejoindre Istanbul jusqu'à Urmsi
09:03 et dans le Xinjiang en Chine,
09:04 et relier tous les états turcophones ou turcs d'Asie centrale jusqu'en Turquie,
09:11 et le seul problème c'est que le lien se fait, à une exception près,
09:14 le sud de l'Arménie, où il y a un petit bouchon,
09:16 un petit bouchon qu'il faut faire sauter pour faire ce fameux corridor que revendique Alief,
09:21 ce qui nous permet aussi de dire que l'Arzar n'est qu'une étape
09:24 dans la conquête que Alief veut faire de cette région,
09:27 c'est-à-dire que l'étape suivante, je peux déjà vous l'annoncer,
09:29 et Michel vous le savez aussi bien que moi, puisque vous êtes allé aussi dans le Sunniq,
09:32 c'est le Sunniq parce que le Sunniq c'est le petit bouchon
09:35 qui empêche l'Azerbaïdjan d'être relié à son esclave
09:38 qui s'appelle le Narhichevan à l'ouest de l'Arménie,
09:41 une fois que ces deux sont reliés,
09:42 comme le Narhichevan est lui-même relié de quelques kilomètres avec la Turquie,
09:45 ça y est, on a le corridor turc, effectivement musulman,
09:49 parce que la plupart sont musulmans,
09:51 mais encore une fois je crois que c'est un tout petit peu en dessous du pan-turquisme,
09:55 l'islamisme dans cette affaire.
09:57 - Alors moi je voudrais vous aussi...
09:58 - Juste deux mots, si c'est possible...
10:00 - Oui Michel, mais je voudrais vous donner plus que deux mots,
10:03 si ça ne vous embête pas,
10:04 parce que je crois que ça mérite d'être continué cette discussion.
10:07 Je voudrais signaler le documentaire que vous aviez fait
10:10 et qui est visible sur le site de la Web TV michel-enfray.com
10:13 et après une courte pause,
10:16 on va se demander aussi pourquoi il y a des guerres dont on parle
10:18 et celles dont on ne parle pas.
10:19 On continue à parler d'Arménie, d'Ukraine,
10:21 dans quelques instants sur Sud Radio.
10:23 - Sud Radio, l'heure libre, 10h-11h, Stéphane Simon, Michel Enfray.
10:28 - De retour dans l'heure libre, un partenariat Front Populaire/La Revue,
10:31 Sud Radio, et on parle de la situation ce matin au Haut-Karabakh,
10:35 de l'Arménie, de l'indifférence générale
10:38 et de l'absence de poids politique de la France.
10:40 Nous sommes toujours en compagnie de Michel Enfray,
10:42 de Maxime Le Naga, rédacteur en chef de Front Populaire/La Revue
10:45 et notre invité est Jean-Christophe Buisson,
10:47 directeur de la rédaction du FIYARO Magazine.
10:50 Eh bien, juste il y a quelques instants,
10:53 Michel Enfray voulait répondre brièvement à Jean-Christophe Buisson
10:58 sur l'aspect guerre de religion qui se joue là-bas.
11:02 - Oui, parce qu'on ne peut pas penser en démocrate laïque,
11:05 en pensant que tout le monde pense en démocrate laïque,
11:07 en disant qu'il y a la laïcité qui permet de mettre la religion d'un côté
11:11 et puis de mettre la politique de l'autre.
11:13 Tous ces pays-là sont dans des logiques théocratiques.
11:16 C'est-à-dire que quand on parle du pan-turquisme,
11:18 on ne peut pas faire l'économie du fait que la Turquie soit musulmane,
11:21 que la Turquie, quand il s'agit de transformer l'église Sainte-Sophie en mosquée,
11:24 elle dit très précisément qu'elle est de son obsession politique
11:27 et on ne peut pas, sur le papier, dire "non, non, c'est la Turquie,
11:31 c'est un projet pan-turc et ça n'a rien à voir avec le fait que ce soit des musulmans".
11:35 - Non, je n'ai pas dit que ça n'avait rien à voir.
11:37 Je pense que le pan-turquisme est supérieur à la motivation musulmane
11:40 mais comme l'islam fait partie du pan-turquisme,
11:42 je vous rejoins de ce point de vue-là.
11:44 - Non, je ne dirais pas que c'est supérieur,
11:46 c'est coïncident, c'est comme un amalgame.
11:49 On ne peut pas faire la part des choses
11:51 parce qu'il n'y a pas une priorité qui serait pan-turc ou une priorité qui serait musulmane.
11:55 Le pan-turquisme procède de cet islamisme qui lui-même procède d'un djihadisme.
12:00 C'est un djihadisme de civilisation.
12:02 - Oui mais non Michel, parce que l'Azerbaïdjan n'est pas un pays islamiste.
12:05 Il y a une façade laïque qui est réelle en Azerbaïdjan.
12:08 Donc on ne veut pas dire que l'Azerbaïdjan c'est une théocratie
12:10 sur le modèle de la Turquie ou d'autres pays musulmans qui sont vraiment des théocraties.
12:15 - Bon, je vais vous dire, du point de vue de la vie des Arméniens...
12:19 - Ce ne sont pas des démocraties.
12:21 Les chefs d'État sont musulmans.
12:23 Et les gouvernements sont autoritaires.
12:25 Donc on pigne la haït sur du vocabulaire je crois.
12:28 - Oui, alors il y a en tout cas aussi une autre chose qui est certaine.
12:32 C'est qu'il y a, si on veut faire une comparaison,
12:35 une différence de traitement avec ce qui se joue en Ukraine et le conflit avec la Russie.
12:40 Tous les jours on parle de l'Ukraine qui bénéficie d'un soutien massif des Américains
12:44 on le sait, mais également de l'Union Européenne.
12:47 L'Union Européenne, à cause de son embargo sur le gaz russe,
12:50 a décidé d'un partenariat énergétique avec l'Azerbaïdjan,
12:53 qui est une dictature, comme la Russie je le rappelle.
12:56 Et depuis, l'Union Européenne ferme littéralement les yeux
12:59 sur les atrocités commises au Haut-Karabakh.
13:02 Est-ce qu'il y a une forme de cynisme de l'Union Européenne ?
13:06 - Je crois que la réponse, elle tient en deux mots, qui s'appelle gaz et pétrole.
13:10 L'Union Européenne, à partir du moment où elle a décidé de sanctionner la Russie
13:13 de ne plus importer du gaz russe, notamment,
13:16 il fallait chercher d'autres fournisseurs de gaz, ça tombe bien,
13:19 il y a ce petit pays l'Azerbaïdjan, qui en a beaucoup, beaucoup.
13:22 Un peu moins qu'elle ne le prétend, mais qui en a beaucoup.
13:25 - Oui, parce qu'il y a beaucoup de gens, qui disent que,
13:28 notamment des sénateurs que j'ai rencontrés, qui disent qu'on achète
13:31 du gaz russe qui transite par l'Azerbaïdjan.
13:34 L'Union Européenne achète simplement le fait qu'on dise que ce n'est pas du gaz russe.
13:39 - Mais ça c'est une certitude. La veille de l'attaque de la Russie sur l'Ukraine,
13:42 il y a un accord qui a été signé entre la Russie et l'Azerbaïdjan.
13:45 L'Azerbaïdjan, parce qu'elle commence à avoir ses ressources fondre en mer Caspienne,
13:51 importe du gaz russe, elle met un coup de tampon en gaz azérie,
13:55 et nous le revend à l'Union Européenne. Plus cher en plus que si on l'avait acheté directement à la Russie.
13:58 Donc non seulement on l'achète plus cher, mais en plus on achète quand même
14:01 du gaz russe, directement ou indirectement, parce que ce sont des compagnies russes
14:04 comme Lukoy, où les Russes sont majoritaires,
14:07 qui exploitent le gaz azérie, avec des oligarques russes qui en font partie.
14:13 Beaucoup d'oligarques russes sont proches de l'Azerbaïdjan, des amis de Poutine.
14:17 Donc tout ça est d'une hypocrisie totale.
14:20 On voit bien que c'est l'économie qui mène le monde et qui est supérieure à la politique.
14:24 Et lorsque vous avez un Macron qui vaguement...
14:26 Moi, la chose que je reprocherais le plus à Macron dans cette histoire,
14:29 contrairement à ce que vous dites Michel, il connaît très bien la situation.
14:32 Je l'ai rencontré, on en a parlé longuement pendant une heure avec Sylvain Tesson et Pascal Ruckner.
14:35 Mais oui, c'est encore pire, parce qu'il la connaît la situation.
14:38 S'il ne la connaissait pas, on pourrait dire que c'est de l'ignorance.
14:40 Mais il la sait et il donne l'impression qu'il va faire quelque chose, qu'il peut faire quelque chose,
14:44 avec ses petits bras, il va tordre le bras de l'Europe, il va tordre le bras des Américains
14:48 pour venir au secours des Arméniens qui, je le cite, "que nous n'abandonnerons jamais".
14:52 Et bien si, il a abandonné les Arméniens parce qu'il n'a pas les moyens de ses prétentions.
14:56 Mais à ce moment-là, il ne faut pas faire croire qu'on va aider les Arméniens,
14:59 à l'avance, soit qu'on ne le pourra pas, soit qu'on ne le voudra pas.
15:02 Je voudrais entendre Michel sur ce cynisme de l'Union Européenne,
15:05 qui devrait quand même... Pardon, mais Richard Michel, le Premier ministre belge
15:09 et président du Conseil Européen, devrait raser les murs.
15:12 Entre le fait d'acheter du gaz russe estampillé à Azerbaïdjan
15:16 et le fait d'avoir totalement fermé les yeux sur les meurtres, c'est sidérant, Michel.
15:21 Non, je pense que Macron est informé parce qu'on lui fait des fiches
15:25 et que c'est un garçon intelligent et il est capable d'avoir des fiches sur ce sujet-là,
15:29 il est capable d'avoir des fiches sur le sujet suivant,
15:32 et puis encore d'avoir des fiches sur le sujet suivant après.
15:35 Simplement, je crois qu'il ne sait pas quoi faire.
15:38 Enfin, il pourrait éventuellement savoir quoi faire s'il était souverain, autonome
15:41 et qu'il ait vraiment une politique étrangère ou extérieure.
15:44 Simplement, il est pieds et poings liés, effectivement, à l'Europe,
15:46 qui, elle, a décidé ce genre de choses, elle a décidé de ce qui se passait.
15:49 C'est-à-dire, quand on dit "il ne se passe rien", mais si, il se passe ce qu'on laisse faire,
15:53 exactement comme avec l'Europe.
15:55 C'est-à-dire, quand on parle de l'Empedouzat, on dit "mais l'Europe ne fait rien,
15:58 mais ne rien faire, c'est faire quelque chose, c'est justement laisser faire".
16:01 Ça fait partie du projet.
16:02 Alors, moi, je persiste à croire, effectivement, qu'il y a ce projet idéologique
16:06 qui suppose un projet politique, qui suppose, évidemment, de l'économie.
16:09 Bien sûr, tout le monde vend, tout le monde achète.
16:11 On ne sait pas qui achète des armes, la plupart du temps,
16:14 vous avez des pays écrans, on se retrouve à vendre des armes
16:17 à des pays qui en vendent à d'autres pays, qui eux-mêmes revendent à d'autres pays,
16:20 et puis on trouve des pays armés, étrangement, par la France,
16:23 qui n'aurait pas vendu directement des armes.
16:25 Donc ça, ça n'est jamais que la politique politicienne.
16:27 Et je pense que c'est l'Europe qui prend la main sur ce sujet-là,
16:30 et que je persiste à dire qu'effectivement, ça fait partie de son projet,
16:34 que de ne pas voir ce qui se passe de ce côté-là.
16:36 De fait, on a LCI qui est devenue une chaîne entièrement consacrée à la question ukrainienne.
16:41 Ça dépasse mon entendement, cette idée qu'une chaîne d'information générale
16:44 puisse devenir une chaîne d'information plus que particulière
16:47 et ne traitant que de ce sujet-là.
16:49 Je pense qu'il y a des intérêts idéologiques pour l'Europe également,
16:52 à fermer les yeux sur ce qui se passe en Arménie,
16:55 parce que ça procède d'un vrai projet politique.
16:58 Quand on dit que Macron dit tout et le contraire de tout, c'est vrai.
17:00 Simplement, il ne fait pas tout et le contraire de tout.
17:02 Il fait toujours ce qu'il faut pour agir en fonction de l'Europe maastrichtienne,
17:05 et surtout pas en fonction de la France.
17:07 Nous avions une politique de tradition arménophile, je dirais.
17:11 Tout ça a disparu.
17:12 Absolument. On va y revenir dans un instant.
17:14 Mais Maxime Le Naga, justement, vous êtes penché sur cette totale disparité médiatique
17:18 dans le traitement réservé aux Ukrainiens et aux Arméniens.
17:21 Oui, c'est assez flagrant Stéphane, même si cette disparité diffère selon les médias.
17:25 Alors bien sûr, il y a l'effet boule de neige.
17:27 Plus un sujet est traité, plus il a tendance à être traité.
17:29 Et le mimétisme journalistique n'arrange rien.
17:31 Sans même rentrer dans le détail du nombre de sujets et des temps de traitement,
17:34 vous vous souvenez que durant de longues semaines,
17:36 certains médias arboraient carrément le drapeau ukrainien en page d'accueil de leur support numérique.
17:39 Il était même sur l'application TousAntiCovid, à un moment, rappelez-vous.
17:42 On revient du dossier spécial de L'Express, titré "L'Ukraine doit vaincre",
17:45 dossier réalisé en partenariat avec France Info, le service public.
17:48 La question qu'on peut se poser légitimement, c'est
17:50 "Est-ce que le service public est autant engagé pour la victoire de l'Arménie ?"
17:53 J'ai retrouvé en 2020, dans un entretien sur le traitement éditorial et médiatique du conflit au Karabakh,
17:57 le directeur de la rédaction internationale de Radio France, Jean-Marc Flour,
18:01 expliquait que les mots "agresseur" et "agressé", pour parler des Azéries et des Arméniens,
18:05 je le cite "éditorialise un peu", fin de citation, donc il ne faut pas tellement les utiliser.
18:09 Il continue ainsi "J'ajouterais que dans une certaine manière, de l'autre côté,
18:13 l'Azerbaïdjan pourrait se plaindre d'un déficit de couverture éditoriale de la part des médias occidentaux",
18:17 fin de citation, donc remplacer Azerbaijan par Russie, par exemple, pour voir ce que ça donne.
18:21 Et alors qu'Emmanuel Davieh, la médiatrice des antennes de Radio France,
18:25 l'interroge sur le parti pris potentiel des journalistes dans ce conflit,
18:27 Jean-Marc Flour de répondre "Non, je ne pense pas que ce soit le rôle des journalistes que de condamner",
18:32 fin de citation, incroyable !
18:34 Évidemment, quand on met ça en balance avec le conflit ukrainien, ça fait sourire.
18:36 Et puis on le sait, Michel l'a rappelé à l'instant, la chaîne LCI a intégralement repensé sa programmation
18:40 pour suivre le conflit ukrainien au jour le jour, avec une ligne ultra pro-ukrainienne.
18:44 Je ne sais pas d'ailleurs si le groupe Bouygues a des intérêts dans les pays concernés,
18:47 mais LCI n'a pas beaucoup parlé de l'Arménie depuis le début,
18:50 je crois à peu près une heure de sujet depuis la reprise des conflits en 2020.
18:53 C'est en tout cas un sentiment qu'on a en tant qu'observateur des médias,
18:56 peut-être que Jean-Christophe Buisson nous donnera son sentiment.
18:58 - Jean-Christophe, il est là, il va nous le dire.
19:00 - Ce qui est le plus incroyable, c'est que...
19:02 - Comme Front populaire, on a consacré du temps, de l'espace à l'Arménie.
19:06 - Et de l'énergie, mais je vais vous donner un exemple très concret qui s'est passé il y a deux jours,
19:09 qui est beaucoup plus récent que ce que vous venez de dire.
19:11 Mais avant, je veux dire, les langages employés, c'est incroyable.
19:15 "Agresseurs agressés", bah oui, la réalité c'est agresseurs agressés.
19:17 Aujourd'hui, quand vous voyez une dépêche AFP, reprise par tout le monde, c'est les séparatistes arméniens.
19:22 Déjà le mot "séparatisme", il est chargé, évidemment, d'un côté...
19:26 - Terroristes ?
19:27 - Bah c'est des gens qui sont... Bah ils séparatisent de quoi ? De Staline ?
19:30 Ça fait 2500 ans qu'ils habitent là, ils se sont traités de séparatistes,
19:33 et les journaux reprennent cette expression de séparatisme, ça c'est un scandale.
19:36 - J'ai oublié de dire que le bureau de l'AFP à Bakou soumettait, de toute façon, à approbation,
19:40 les communiqués qui viennent de l'AFP. Donc c'est quand même incroyable.
19:44 - Ça je l'ignore, mais moi je vais vous donner un exemple concret qui s'est passé il y a deux jours.
19:48 Le représentant de l'Arzar, donc du Haut-Karabagh arménien en France,
19:51 qui s'appelle Omanes Guevorkian, est invité sur le plateau de TV5Monde
19:54 pour dire ce qui est en train de se passer.
19:56 Je rappelle, 200 morts, 400 blessés, 10 000 déplacés, réfugiés en 24 heures.
20:01 Quelques minutes avant d'arriver sur le plateau, on lui dit "Ah, on est très embêtés,
20:05 parce qu'on vous avait invité aussi avec l'ambassadrice d'Azerbaïdjan en France
20:08 pour faire un petit débat contre la victoire, et elle ne veut pas débattre avec vous.
20:11 Mais que croyez-vous qu'il arriva ? Eh bien on a décommandé Omanes Guevorkian,
20:16 représentant les victimes dans cette affaire, et on a laissé la parole à la seule ambassadrice d'Azerbaïdjan en France
20:22 qui a expliqué que non, non, c'est une action antiterroriste,
20:25 que l'Azerbaïdjan reprenait la position sur son propre territoire.
20:30 Voilà un exemple concret, TV5Monde, je vous rappelle que TV5Monde, c'est une chaîne d'État français.
20:35 Voilà ce que c'est.
20:37 Et c'est d'autant plus rageant à propos de l'UE en deux mots,
20:40 c'est que les valeurs de l'Europe pour lesquelles on s'engage en Ukraine,
20:43 c'est quoi ? C'est la démocratie, c'est des civils qui se font taper par des...
20:47 C'est exactement ce qui se passe pour les Arméniens.
20:49 L'Arménie est le seul pays un peu démocratique dans cette région,
20:52 la seule république entourée de l'Iran, je le rappelle, de l'Azerbaïdjan, de la Turquie,
20:56 qui comme l'a dit Michel sont des régimes autoritaires, voire des dictatures.
20:59 Et on ne va pas se battre pour cette petite démocratie-là,
21:01 mais peut-être que son seul grand défaut, effectivement, c'est d'être chrétienne.
21:04 Et là je rejoins un peu Michel, autant sur place, j'en suis moins sûr,
21:08 mais autant sous traitement de l'Arménie, je pense que le fait que ce soit un peuple chrétien
21:12 et pas un peuple supposément racisé, colonisé, opprimé depuis des siècles,
21:17 comme pourraient l'être des peuples musulmans, joue beaucoup en sa défaveur.
21:20 Michel, vous comprenez ce déséquilibre total du traitement médiatique ?
21:25 Oui, parce qu'on sait comment fonctionnent les médias.
21:28 Je veux dire que les médias d'État défendent l'idéologie d'État,
21:32 qui est l'idéologie de l'Europe astricienne,
21:34 et tous ceux qui ne pensent pas comme ça sont criminalisés.
21:37 Quiconque commence à poser la question de l'Ukraine autrement qu'en termes de morale,
21:41 en disant "c'est bien, c'est pas bien, je suis d'accord ou je suis pas d'accord avec l'Ukraine,
21:44 je suis du côté de l'Ukraine ou je ne suis pas de l'Ukraine", est criminalisé.
21:47 Si on dit "mais est-ce qu'on peut pas faire un peu de généalogie, comment en est-on arrivé là ?"
21:51 Plutôt que d'être dans la moraline, juste poser la question de la généalogie
21:54 en disant "peut-être c'est un travail qu'on pourrait faire immédiatement", on est criminalisé.
21:57 Donc on devient... Moi je me suis retrouvé défendant la ligne de Poutine, par exemple,
22:02 dans le journal de L'Express. L'Express disait que je défendais la ligne de Poutine,
22:06 alors que j'avais expressément dit que c'était un régime fasciste, autoritaire, impérialiste, conquérant,
22:11 et qu'il était inadmissible d'envoyer des bombes sur des populations civiles.
22:14 J'avais simplement dit "mais il faudrait expliquer pourquoi on en est arrivé là".
22:17 Donc on a des chaînes idéologiques, ça me paraît évident.
22:20 Je ne vais pas dire que je souscrisse ce que dit Jean-Christophe,
22:23 puisque je disais que c'était mes thèses, mais je pense qu'il y a effectivement cette idée
22:27 d'une espèce de christianophobie dans les médias dominants,
22:32 et que s'il s'agit de pop, de curés orthodoxes, là-bas il y a des églises, il y a des croix,
22:37 il y a tout ça, on laisse passer parce que ça c'est pas très intéressant.
22:39 S'il s'agissait de défendre des villes dans lesquelles il se trouve des minarets ou des mosquées,
22:44 là on aurait effectivement eu des couvertures nettement plus intéressantes.
22:48 Donc oui, il y a un traitement idéologique, comme il y a un traitement idéologique de toutes les questions,
22:52 et oui il est christianophobe, et oui il est islamophile, c'est sûr.
22:55 Dans un instant on va parler de l'incapacité de la France à avoir une voix originale dans le monde,
22:59 depuis qu'elle a intégré aussi le commandement de l'ONU,
23:02 et s'est fondue dans l'Union Européenne. A tout de suite sur Sud Radio.
23:05 Sud Radio, l'heure libre, 10h-11h, Stéphane Simaud, Michel Enfray.
23:10 De retour dans l'heure libre, votre rendez-vous avec Front Populaire, La Revue et Sud Radio.
23:15 Alors aujourd'hui on parle de la situation au Karabakh, de l'Arménie, de l'indifférence générale,
23:20 et nous allons venir à l'absence de poids politique de la France,
23:24 depuis qu'elle a intégré le commandement, réintégré le commandement de l'ONU,
23:28 et puis s'est dissout dans l'Union Européenne.
23:33 Nous sommes toujours en compagnie de Michel Enfray, de Maxime Lennagar,
23:36 et notre invité Jean-Christophe Buisson, directeur de la rédaction du Figaro Magazine.
23:41 Alors devant les événements au Karabakh, la France a publié un communiqué que je vais vous lire,
23:47 il est assez court.
23:48 "La France condamne avec la plus grande fermeté le lancement par l'Azerbaïdjan d'une opération militaire au Karabakh,
23:53 avec l'utilisation d'armements lourds, y compris contre des zones habitées.
23:58 Aucun prétexte ne peut justifier une telle action unilatérale qui menace des milliers de civils,
24:03 déjà affectés par des mois de blocus.
24:05 La France appelle l'Azerbaïdjan à cesser immédiatement son offensive
24:09 et à revenir au respect du droit international.
24:11 La France demande la convocation d'urgence d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies.
24:17 Elle se concerte étroitement avec ses partenaires européens et américains,
24:20 afin qu'une réponse forte soit apportée à cette offensive inacceptable,
24:24 à la hauteur des risques qu'elle fait peser sur la sécurité de la région.
24:27 Et pourtant, rien ne se passe.
24:30 Comme quoi la concertation n'avance pas, Jean-Christophe Buisson.
24:33 La seule réponse forte, immédiate, urgente qu'il y aura à avoir,
24:37 parce qu'il y a un drame humanitaire,
24:39 à très court terme, aujourd'hui, c'est des gens qui meurent.
24:41 Qui ne meurent pas seulement par le conflit, parce qu'ils ont été blessés.
24:44 Il y a des gens qui ont été blessés pendant les combats,
24:46 qui sont à 10, 20, 50, 100 kilomètres de Stépanakert,
24:49 et qui ne peuvent pas être soignés parce que les routes sont fermées,
24:52 parce qu'il n'y a pas d'essence, etc.
24:53 Donc il y a un drame humanitaire qui se joue.
24:55 Donc l'urgence, c'est de régler ce drame humanitaire.
24:58 Et donc le seul moyen de le faire, c'est qu'il y ait une résolution
25:01 qui dise que les casques bleus peuvent venir sur place,
25:03 puisque les casques bleus russes ne font pas leur travail.
25:06 C'est ça le seul...
25:07 Donc on peut faire tous les discours qu'on veut,
25:09 les condamnations, qui sont quand même rares,
25:11 depuis 9 mois que le pays est complètement fermé,
25:14 et que les gens sont enfermés à ciel ouvert,
25:16 dans un immense camp de concentration, depuis 9 mois.
25:18 C'est le sort des Arméniens depuis 9 mois, où il ne s'est rien passé.
25:20 Où la communauté internationale ne fait rien,
25:22 par peur des Turcs, par peur des Russes,
25:24 peu importe.
25:25 La vérité, c'est qu'aujourd'hui, il y a un drame humanitaire
25:28 qui relève des mêmes drames qu'on a vus, par exemple,
25:30 en Exil au Vienne au Savigny, il y a 30 ans,
25:32 où la réaction était beaucoup plus rapide,
25:34 et qu'il ne se passe rien,
25:35 et qu'aujourd'hui, à très court terme, pour sauver ces gens,
25:38 c'est une intervention des casques bleus.
25:40 Il n'y a que ça qui peut régler.
25:42 Sinon, on peut faire tous les discours du monde,
25:43 et la France peut monter au créneau et dire
25:45 "c'est scandaleux ce qui se passe", ça ne sert à rien.
25:47 À un moment, il faut agir.
25:48 Les intentions, c'est magnifique.
25:50 Les actes, c'est quand même mieux pour sauver des vies humaines.
25:52 Est-ce qu'on peut dire que la voix de la France n'est plus écoutée ?
25:55 On a consacré une émission d'une heure la dernière fois
25:58 pour voir que sur le continent africain,
26:00 la France était non seulement de moins en moins désirée,
26:04 mais régulièrement chassée.
26:06 7 putschs ont eu lieu récemment,
26:08 et dans ces 7 putschs, c'est à chaque fois
26:10 un désaveu cinglant pour la France.
26:12 La France recule donc sur la scène internationale
26:14 de façon spectaculaire en ce moment.
26:16 Oui, parce qu'il n'y a pas de lisibilité
26:18 de la politique étrangère de Macron.
26:20 La politique étrangère de la France,
26:22 elle se fait avec Ursula von der Leyen qui décide.
26:26 Quand il a fallu prendre position sur la question ukrainienne,
26:29 elle a décidé, sans consulter grand monde d'ailleurs,
26:32 sûrement pas en consultant les peuples,
26:34 je pense que cette façon de décider d'une guerre
26:36 en disant "je suis Ursula von der Leyen,
26:38 pas du tout élue, mais simplement je pilote l'Europe
26:40 et c'est moi qui décide que nous allons faire cette guerre
26:43 et le peuple français subit cette guerre",
26:45 c'est-à-dire qu'on ne met pas en relation aujourd'hui
26:47 l'augmentation du prix de la vie, le prix de l'essence,
26:50 l'inflation, mais pas du tout ces choses-là
26:53 en relation avec les décisions qui sont prises là-bas.
26:56 Je trouve ça inadmissible.
26:58 C'est-à-dire que ça n'est pas une démocratie,
27:00 qu'il n'y a pas une façon de faire fonctionner une démocratie
27:02 que d'imaginer qu'une personne plus une dizaine
27:05 d'une espèce de soviets de suprême dont on ne sait
27:07 ce qu'il est véritablement, décide de ce qui est bon
27:09 pour l'Europe maastrichtienne et font savoir à la France,
27:12 donc au chef de l'État, qu'il va falloir décider
27:14 de ceci ou de cela, dire ceci ou dire cela,
27:16 c'est-à-dire s'engager, donner de l'argent
27:18 et se trouver très militant pour la cause ukrainienne
27:21 et puis de dire sur l'Arménie, on laisse faire.
27:24 Donc effectivement, quelques papiers de temps en temps,
27:27 des petites décisions entre diplomates
27:30 pour nous dire, c'est comme Darmanin
27:32 quand il y a un assassinat, ça ne peut pas durer,
27:34 ça va être, on va faire une enquête,
27:37 ça va être très durement réprimé,
27:39 nous allons retrouver les coupables et puis rien du tout.
27:41 Donc les gens ne sont pas dupes,
27:43 la politique étrangère de la France est menée
27:45 par Herschel, Wanderlinden, Tutsen
27:47 et les Français paient les pots cassés.
27:49 - Alors, dans un instant, je vous passe la parole,
27:51 Jean-Christophe Buisson, mais je voulais voir
27:53 et entendre surtout Michel réagir
27:55 à ce grand dîner d'État qui s'est tenu à Versailles
27:58 avec Charles III
28:01 et ça aurait pu être l'occasion de faire un discours
28:04 de politique internationale avec le roi d'Angleterre, Michel.
28:07 - Oui, ça c'est sûr que ce truc a été vraiment,
28:10 c'est honteux. - C'est mal tombé, vraiment.
28:13 - C'est bien tombé pour qu'on sache comment ça marche.
28:16 C'est-à-dire que, de manière planétaire,
28:18 la France, ce sont des voitures retournées,
28:20 des racailles qui défoncent les vitrines
28:23 et qui piquent dans les magasins.
28:25 Ce sont des émeutes, ce sont des bus incendiés
28:28 et puis ce sont aussi des chefs d'État,
28:31 enfin un chef d'État qui reçoit un roi
28:33 et qui reçoit la France d'en haut.
28:35 C'est-à-dire des gens du cinéma, des gens de la littérature,
28:38 des gens des idées, des gens du business
28:40 en nous disant "Regardez, on boit des vins à 3000€ la bouteille
28:44 et on lance cette image au monde entier".
28:47 C'est pas comme ça qu'on fait de la politique.
28:49 On n'a pas besoin de faire des grands dîners à Versailles
28:51 pour faire de la politique.
28:53 D'ailleurs, quelle politique décide le roi Charles ?
28:56 Je pense qu'il ne décide pas grand-chose.
28:58 Il inaugure les chrysanthèmes.
29:00 Donc on a eu droit à une espèce de grand discours très
29:03 "Il faut sauver la planète, l'écologie c'est formidable,
29:06 soyons gentils plutôt que méchants,
29:08 on est nettement mieux que la guerre,
29:10 on se fait applaudir au Sénat en tenant un discours comme celui-ci".
29:13 Mais ça montre la vacuité de la politique extérieure française.
29:17 On ne sait pas du tout ce qu'il en est
29:20 de ce que Macron aurait pu faire avec, j'allais dire le prince Charles,
29:25 mais le roi qui, de toute façon, n'a aucun pouvoir en Angleterre.
29:30 Ce sont donc des effets médiatiques, il n'y a pas d'effet de politique.
29:34 Vous êtes d'accord, Maxime, c'était une visite d'Etat pour pas grand-chose.
29:38 Pour pas grand-chose, en effet.
29:39 Si on prend en compte l'image diplomatique et celle de la France dans le monde,
29:42 c'est difficile d'y voir un sans faute.
29:44 L'événement a été évidemment très suivi outre-Manche.
29:46 Et si l'épisode du dîner fastueux dans la Galerie des Glaces a fait grincer des dents,
29:50 les commentateurs britanniques ont surtout relevé la familiarité du président français
29:54 qui a posé sa main, on l'a vu à plusieurs reprises, sur le roi d'Angleterre,
29:57 un peu à la sauce Trump, ce qui n'est quand même pas une référence en termes d'élégance.
30:00 Notons quand même qu'Emmanuel Macron n'est pas le premier à commettre ce genre d'impair.
30:03 En 2004, Jacques Chirac avait posé sa main sur les épaules de la reine Elisabeth II.
30:07 Or, dans la tradition britannique, ces gestes familiers sont considérés
30:10 comme des manques de respect envers sa majesté.
30:12 Alors, on entend aussi que le protocole s'assouplit de génération en génération.
30:16 Et il est vrai que si vous allez sur le site officiel de la Molarchie britannique,
30:19 il n'y a pas de code de conduite obligatoire pour rencontrer la famille royale.
30:22 Disons qu'en théorie, la loi non écrite de la bienséance et de la tenue suffise,
30:26 quand on est bien élevé notamment.
30:28 Pour rappel, et on en avait parlé d'ailleurs à cette antenne,
30:30 nous avons quand même un président français qui en 2017, en pleine rencontre officielle,
30:33 avait dit à son homologue du Burkina Faso, vous vous en souvenez Stéphane,
30:36 d'aller réparer la clim' ce qui nous avait déjà averti sur sa façon de concevoir la diplomatie.
30:41 - Jean-Christophe Buisson, par rapport à cette visite,
30:43 ça aurait pu être l'occasion d'une déclaration internationale.
30:46 - De parler de l'Arménie, puisque c'était le sujet du jour.
30:48 Mais le problème c'est, qu'est-ce qu'il pouvait bien dire sur l'Arménie, ces deux-là,
30:52 puisque le Royaume-Uni et la France font partie de l'OTAN, comme la Turquie,
30:57 et donc on n'avait pas fâché notre ami Erdogan,
31:00 surtout pas en ce moment avec ses problèmes de migrants.
31:02 Et puis par ailleurs, l'Angleterre joue un jeu assez trouble dans le Caucase.
31:07 Vous savez que, ou vous ne savez pas d'ailleurs,
31:09 que l'Angleterre a acheté à l'Azerbaïdjan des mines
31:13 qui se trouvent aujourd'hui dans le territoire de l'Arsar arménien.
31:16 C'est-à-dire des mines qui sont gérées par des Arméniens,
31:18 mais l'Azerbaïdjan, considérant que cette région, encore une fois, depuis toujours lui appartient,
31:22 a vendu des mines qui ne lui appartiennent pas à des compagnies anglaises.
31:26 Et les compagnies anglaises, depuis des mois, disent
31:28 "Dis donc, on vous a acheté des mines il y a quelques années, on ne peut pas les exploiter,
31:31 donc il s'agirait de nous donner les moyens de les exploiter."
31:34 Ce n'est pas l'explication totale de l'invasion de l'Arsar ces derniers jours,
31:37 mais ça peut y participer.
31:39 En tout cas, l'Azerbaïdjan savait que ce n'est pas l'Angleterre,
31:41 ce n'est pas le Royaume-Uni, ce n'est pas la Grande-Bretagne
31:43 qui allait lui chercher des poux dans la tête
31:45 si jamais elle venait envahir l'Arsar, ce qui est arrivé.
31:49 Et vous verrez que, lorsque l'Arsar sera totalement intégré à l'Azerbaïdjan,
31:53 et que les 120 000 habitants, soit auront été massacrés, soit auront été obligés de fuir en Arménie,
31:57 eh bien vous allez voir plein de compagnies anglaises qui vont surgir dans la région
32:01 pour gérer ces mines d'or, ces mines de cuivre,
32:04 les rares richesses d'Arsar, voire les lacs et les ressources fluviales de cette région.
32:14 Donc il y a encore une fois ce cynisme dont on parlait,
32:17 à la fois de l'Union Européenne et des pays.
32:19 Et puis le dernier mot peut-être à dire, il me semble que c'est un drame presque ontologique,
32:23 c'est que la démocratie, que ce soit la France ou d'autres,
32:26 est bien démunie lorsqu'elle a affaire en face d'elle à des régimes qui utilisent la force.
32:32 Elle ne sait pas faire.
32:33 Munich c'était ça aussi quand même, c'était qu'est-ce qu'on fait contre des pays qui utilisent la force ?
32:37 Soit on utilise la force, mais alors ce n'est pas très démocratique d'utiliser la force,
32:41 soit on laisse faire, et c'est ce qui se passe aujourd'hui,
32:43 on laisse les Azériques qui sont forts, écrabouillés, massacrés, tués, épurés, génocidés,
32:48 les Arméniens qui n'ont pas les moyens de se défendre,
32:50 et à qui les démocraties n'osent pas apporter des moyens de se défendre,
32:53 au risque de ne plus être considérés comme des démocraties.
32:55 C'est un vrai sujet.
32:56 C'est un vrai sujet, et pourtant Michel vous aviez écrit et dit en 2020, à votre retour d'Arsar,
33:02 que c'était que les Arméniens constituaient un grand petit peuple,
33:06 et dans votre bouche ça veut dire beaucoup de choses.
33:09 Oui, je persiste et signe, on voit simplement l'histoire se réaliser,
33:15 c'est-à-dire que ce pays se fait écraser, je pense même que son gouvernement n'était pas terrible,
33:19 n'était sûrement pas à la hauteur non plus,
33:21 moi j'avais gardé quelques contacts avec des Arméniens lors de mon passage,
33:24 et j'ai vu régulièrement leur souffrance, leur douleur de se voir abandonné.
33:29 Donc il y a un moment donné où on commence par l'Arménie, puis on continue, on continue, etc.
33:34 C'est-à-dire que nous n'avons pas de plan alternatif, au plan, je persiste à le dire,
33:39 au plan d'un islam qui lui se veut conquérant,
33:42 c'est-à-dire que c'est comme ça que l'Occident s'est trouvé conquis,
33:45 et la France d'ailleurs jusqu'à Poitiers.
33:48 Et il y a une façon d'avancer les pièces qui fait qu'on a en face une absence de réponse,
33:53 on n'a rien, c'est-à-dire que l'Occident ne répond pas,
33:55 que la France ne répond pas, que l'Europe ne répond pas, et qu'on laisse faire.
33:58 C'est-à-dire que quand on aura le temps de l'histoire, c'est-à-dire la possibilité du recul,
34:02 on dira "ah oui, il y a eu un moment donné où effectivement on a effacé l'Arménie de la carte,
34:06 et puis ensuite il y a eu un moment donné où on a fait ceci, puis on a fait cela, puis on s'est dit
34:09 "ah bah tiens c'est drôle, quand on prend la carte, elle s'est totalement islamisée de ce côté-là,
34:13 dans cette partie-là du monde".
34:15 Mais bon, c'est ainsi, quand nous sommes morts, nous ne pouvons guère être plus vivants
34:20 que nous le sommes actuellement.
34:22 Absolument. Alors dans un instant, on va parler de l'Union Européenne encore,
34:25 et de l'OTAN qui nous embarque dans des aventures non consenties,
34:28 et qui vont contre nos intérêts et nos amitiés historiques.
34:31 On va rappeler que l'Arménie est un État qui avant d'être une démocratie,
34:36 était une monarchie il y a longtemps, et qui avait déjà des liens historiques avec la France.
34:41 A tout de suite sur Sud Radio.
34:42 Sud Radio, l'heure libre, 10h-11h, Stéphane Simon, Michel Onfray.
34:48 De retour dans l'heure libre, une émission conçue par Front Populaire, la Revue,
34:52 en partenariat avec Sud Radio. Nous sommes toujours avec Michel Onfray bien sûr,
34:55 et Maxime Lenagar, notre invité, et Jean-Christophe Buisson, directeur de la rédaction du Figaro Magazine.
35:00 Je voudrais, Maxime Lenagar, que vous nous rappeliez les liens historiques millénaires
35:05 entre la France et l'Arménie, il y a des choses à dire.
35:08 Oui, millénaires, c'est le mot Stéphane, car les relations entre l'Arménie et la France
35:12 existent depuis les temps reculés des Capétiens et du royaume arménien de Cilici.
35:16 A l'époque des croisades où des réfugiés arméniens fuyaient l'invasion turc-seljukide,
35:20 les réfugiés arméniens avaient été soutenus par les croisés, c'était au XIIe siècle.
35:24 Il faut dire que le royaume d'Arménie, fondé en 190 av. J.-C., a été le premier royaume chrétien,
35:28 on le sait peu, sous l'impulsion de Théridade IV, qui s'est converti au christianisme de Grégoire Ier,
35:33 l'illuminateur, le saint qui a évangélisé l'Arménie.
35:36 Rappelons par ailleurs que l'Arménie vit depuis le VIIIe siècle,
35:39 avec la propagation de l'islam dans un environnement régional majoritairement musulman.
35:43 Ces relations entre la France et l'Arménie n'ont jamais vraiment cessé,
35:46 si elles sont devenues officielles diplomatiquement en 92, après la dislocation de l'URSS.
35:50 Les historiens nous apprennent par exemple que la langue arménienne comporte beaucoup d'empreintes,
35:53 fait à l'ancien français, qui date du XIVe siècle,
35:56 qu'il y avait des marchands arméniens dans le port de Marseille au XVe siècle,
35:59 et c'est d'ailleurs à Marseille que beaucoup d'arméniens ont débarqué en France après le génocide de 1915,
36:03 pour former ce qu'on appelle la diaspora arménienne,
36:05 qui compte environ 500 000 compatriotes et qui vivent en France aujourd'hui.
36:08 Alors justement, j'aimerais entendre Michel sur un point,
36:11 il y a 700 000 français d'origine arménienne,
36:15 qui ne font jamais parler d'eux d'ailleurs,
36:18 et en Allemagne, il y a, de l'autre côté du Rhin,
36:22 il y a plusieurs millions de citoyens d'origine turque.
36:26 Les turcs sont ceux qui ont génocidé les arméniens en 1915,
36:30 et qui continuent à nier d'ailleurs le génocide arménien.
36:33 Comment peut-on croire à une diplomatie commune, franco-allemande dans ces conditions ?
36:38 Encore une fois, je pense plutôt que la France est obligée de regarder ses chaussures, Michel.
36:42 La France a laissé tomber ses arméniens, ça me paraît évident.
36:46 Et un prix de parti que je signale depuis le début de cette émission,
36:50 je ne vois pas autrement qu'on puisse penser autrement,
36:55 en plus de ça, il faut voir que le peuple arménien est tout à fait particulier,
36:59 c'est-à-dire qu'il ne revendique pas, il n'est pas dans la culture géniarde,
37:03 qui lui permettrait de se plaindre en permanence en disant "nous avons été des victimes, nous avons été des victimes",
37:07 en ayant une espèce de culture de la victime, en disant "nous avons des droits, nous voulons des réparations",
37:12 en faisant des lobbys, des pressions, etc.
37:15 Ce n'est pas du tout le genre de la maison, ce n'est pas du tout le genre chrétien, pour le coup.
37:18 Il y a une façon de supporter la douleur et la souffrance qui est toute à la...
37:22 - À la gloire, oui.
37:25 - À la gloire, je dirais, du peuple arménien.
37:28 Alors après, ça pose le problème de tous les Dasporins,
37:31 c'est-à-dire que ça marche aussi avec le Liban, ça marche aussi avec Israël,
37:34 ça marche aussi avec l'Arménie, c'est-à-dire que peut le peuple de l'extérieur ?
37:39 C'est facile, après, quand on ne vit pas en Arménie, quand on n'y est pas,
37:43 quand on descend éventuellement de parents arméniens ou de grands-parents arméniens,
37:47 de se dire arménien et puis de faire quoi ?
37:50 De faire des pétitions et d'agir comment ? De quelle manière ?
37:54 Bon, on sait aujourd'hui qu'on peut revenir au pays, faire des armées, combattre, porter l'uniforme.
38:01 Alors ça, pour le coup, ça a de la gueule, c'est-à-dire que, appelez-vous le général de Gaulle,
38:05 la France libre, cette façon de dire "on constitue une armée"
38:08 et puis de l'extérieur, on va constituer une armée qui va permettre à l'Arménie de se défendre.
38:13 Si effectivement l'armée de l'intérieur, l'armée arménienne n'existe pas ici,
38:17 en plus de ça, la diaspora se contente de ne pas être d'accord et point la ligne,
38:22 il est bien évident que ce petit peuple va se faire totalement laminer.
38:26 C'est un petit peu comme si la France n'avait pas eu le général de Gaulle en 1940.
38:30 Jean-Christophe Buisson, vous croyez à cette diplomatie commune franco-allemande ou vous n'y croyez plus ?
38:35 Pas du tout, sur ce sujet encore moins que sur d'autres, mais Michel a raison.
38:40 Il y a vraiment un problème au sein des Arméniens, d'abord entre les Arméniens d'Arzhar,
38:46 les Arméniens d'Arménie et les Arméniens de la diaspora.
38:49 Vous avez raison que beaucoup d'Arméniens de la diaspora se donnent bonne conscience
38:52 en envoyant de l'argent, en signant des pétitions, et puis cet argent, au moins ils se disent
38:55 "on garde le lien avec le pays" mais que devient cet argent ?
38:58 C'était le grand problème de l'Arménie dans les années 90-2000, cet argent était détourné,
39:01 et notamment en théorie pour aller aider à construire des routes en l'Arzhar,
39:05 mais cet argent était détourné, c'est pour ça que Pachinian est arrivé au pouvoir
39:09 et aujourd'hui Pachinian a décidé de se séparer de l'Arzhar, de faire deux politiques communes
39:13 en disant "c'est un boulet, c'est leur Algérie de pieds noirs,
39:17 c'est un boulet économique, c'est un boulet politique, c'est un boulet moral d'une certaine manière
39:22 parce que beaucoup d'argent est détourné", donc Pachinian a pris cette option de dire
39:26 "finalement l'Arzhar, s'il n'y a plus le problème de l'Arzhar, on va pouvoir faire la paix
39:30 avec la Turquie et l'Azerbaïdjan". Moi je fais partie de ceux qui pensent que c'est une erreur,
39:33 mais je conçois qu'il ait pris cette stratégie, c'est pour ça qu'aujourd'hui l'Arménie n'a pas voulu
39:38 ces derniers jours intervenir dans le conflit et courir au secours des Arméniens d'Arzhar,
39:44 raison pour laquelle aussi d'ailleurs hier vendredi il y avait d'énormes manifestations hier évent,
39:48 de gens qui disent "mais il faut aller aider nos frères d'Arzhar", donc il y a un risque de guerre civile
39:52 réelle entre Arméniens et encore une fois les Arméniens ne s'en sortiront qu'avec une aide extérieure
39:57 et ils vivent le même traumatisme que vivaient les Polonais en 1848
40:01 qui espéraient que la France vienne les aider contre la répression russe,
40:05 le problème c'est que Dieu est trop haut et la France est trop loin.
40:08 Les Arméniens vivent le même drame, Dieu est trop haut et la France est trop loin,
40:12 et en plus un peu indifférente à tout ça. La seule chose que nous Français aujourd'hui
40:16 on peut peut-être apporter aux Arméniens c'est de parler d'eux, c'est de parler de leur tragédie,
40:21 de parler de leur drame, de donner mauvaise conscience à nos gouvernants,
40:24 que tout ça ne passe pas par pertes et profits en disant "bon, cette affaire est classée,
40:28 ça y est les Arméniens ont récupéré, on passe à autre chose". Non, parce que d'abord,
40:32 après l'Artsakh, encore une fois, ça sera l'Ostunique, ça sera l'Arménie qui sera visée,
40:36 et ensuite, comme le disait très bien Elie Wiesel, les Arméniens ne craignent pas la mort,
40:40 ils craignent l'oubli. Eh bien, ne serait-ce que pour cette raison-là,
40:43 il faut parler de l'Arménie, il faut parler des Arméniens dès qu'on peut,
40:46 et d'ailleurs, Front Populaire, vous le faites remarquablement, Sud Radio,
40:49 le Figaro Magazine, on essaie de maintenir cette petite flamme,
40:52 cette petite flamme sous cette casserole dramatique et celle de l'Arménie,
40:56 et je pense que ce sont des petites choses, mais au moins nous aurons donné
40:59 mauvaise conscience à nos gouvernants qui ont effectivement abandonné les Arméniens.
41:03 Michel, c'est le seul conseil qu'on puisse donner aux Arméniens d'être un peu plus bruyant
41:09 sur le plan médiatique et sur le plan intérieur ?
41:15 Enfin, comparaison n'est pas raison, et puis je ne vais pas donner des leçons
41:19 à ce peuple déjà tellement maltraité, mais je veux dire que si le général de Gaulle
41:23 s'était contenté de Radio Londres en donnant des messages, ça n'aurait pas donné grand-chose.
41:28 Donc on peut continuer effectivement à manifester, à écrire dans des revues,
41:32 à faire des émissions, mais si vraiment on a l'Arménie au cœur,
41:35 et qu'on a l'impression vraiment que c'est une chose essentielle,
41:38 à ce moment-là, on crée une armée de libération, on a un général de Gaulle,
41:41 puis on y va et on y met sa peau. Pas que ça devienne non plus l'occasion
41:44 de conflits médiatiques qui permettent de se donner bonne conscience à peu de frais
41:48 en sacrifiant le peuple arménien. Ce serait une façon de tuer deux fois ce peuple-là.
41:52 Jean-Christophe Buisson, j'ai souvenir qu'en 2020, il y avait eu des volontaires,
41:56 quelques volontaires français, à aller se battre en Arménie.
42:00 Oui, je crois qu'ils n'aient pas réussi à entrer vraiment en Artsarm,
42:05 ils étaient venus apporter effectivement leur aide à l'armée arménienne,
42:10 mais qu'ils s'étaient beaucoup méfiés parce que justement, comme en face,
42:13 les Asiérés utilisaient beaucoup de mercenaires et de mercenaires djihadistes,
42:16 ils savaient très bien que si on apprenait que des Français venaient combattre
42:19 aux côtés des Arméniens, ça serait utilisé dans la propagande.
42:22 Et aujourd'hui, je vous rappelle que le mercenariat est supposé être interdit
42:25 et par la loi, y compris par la loi française.
42:29 C'est pas simple.
42:31 De toute façon, c'est pas ça qui aurait suffi pour combattre l'Azerbaïdjan,
42:34 qui combattait avec des drones, avec des satellites, avec des chars,
42:37 des drones AROP, ce qu'on appelle des drones kamikazes,
42:41 dont d'ailleurs, je signalais quelques jours avant l'invasion,
42:43 qu'ils venaient d'être fournis sur les rapports de Ganja en Azerbaïdjan,
42:46 huit jours avant l'attaque.
42:48 Il y avait des mouvements de véhicules et de troupes
42:52 qui laissaient l'impression que l'invasion allait avoir lieu.
42:55 - Alors, est-ce que si cette voie est sans issue,
42:58 est-ce qu'il pourrait y avoir une menace de vote politique,
43:02 de vote sanction ?
43:03 700 000 Arméniens en France, ça fait déjà un certain point politique.
43:08 Mais Michel, est-ce que les Arméniens seraient inspirés
43:12 de voter contre leurs représentants en ce moment ?
43:15 - Qui défendrait leur position ? Quel homme politique aujourd'hui ?
43:20 Quel parti politique a pris fait et cause en faveur de l'Arménie ?
43:24 Je ne sache pas qu'il y ait un parti.
43:26 Du moins, s'il y a un micro-parti, c'est sûrement pas un parti
43:29 qui est susceptible de parvenir aux affaires.
43:31 Et de toute façon, parvenant aux affaires,
43:33 on voit bien comment ça fonctionne avec Mélanie,
43:35 c'est l'Europe qui fait la loi.
43:36 Et pour le coup, ce ne serait pas l'Arménie qui ferait la loi.
43:39 Quand je disais tout à l'heure qu'il faudrait un général de Gaulle,
43:42 il est bien évident que ça ne peut pas être un général de Gaulle
43:45 qui ne soit pas arménien.
43:46 Il faut qu'éventuellement un arménien constitue
43:49 ce que le général de Gaulle avait fait en son temps,
43:51 c'est-à-dire aller voir des chefs d'État, mobiliser des peuples.
43:55 À l'époque, il était question de lutter contre Hitler
43:59 qui lui avait des avions en réaction, travaillait à une bombe atomique
44:01 et avait une armée extrêmement puissante.
44:03 Le général de Gaulle n'a pas dit "ils sont tellement armés,
44:05 tellement puissants qu'on ne pourra rien faire".
44:07 Il y a cru, il y est allé, il a mobilisé,
44:09 il a fait un travail extraordinaire,
44:10 il a réussi à faire les forces françaises de l'intérieur,
44:12 la France libre, etc.
44:14 Enfin, on connaît l'histoire.
44:15 Mais pour ce faire, il faudrait que des gens aient l'âme chevillée au corps,
44:20 la défense de l'Arménie chevillée au corps,
44:22 au point de dire "on y va, on rentre dans l'histoire et on fait l'histoire".
44:25 Je pense que c'est beaucoup plus confortable aujourd'hui
44:27 d'être dans les pétitions de principe et dans les discours.
44:29 - Bien, en tout cas, ce n'est pas une note très optimiste pour conclure,
44:33 mais en tout cas, je voudrais vous remercier tous
44:35 d'avoir consacré une heure de votre temps pour l'Arménie,
44:38 pour le Haut-Karabagh.
44:39 Merci Jean-Christophe Bisson, merci Michel.
44:42 Dans un instant, on parle auto sur Sud Radio avec Jean-Luc Moreau et Laurence Perrault.
44:46 Vous le savez aussi, Sud Radio, c'est LA radio de la Coupe du monde de rugby.
44:50 Et vous avez rendez-vous à partir de 16h pour les matchs du jour.
44:53 Alors, en direct du village des Marques de Naïu, près de Toulouse,
44:56 toute l'équipe du rugby vous y retrouve.
44:59 Et puis, il y aura le match Angleterre-Chilie à suivre sur cette même antenne.
45:03 Rendez-vous avec nous sur les réseaux sociaux de Sud Radio
45:06 et sur la chaîne YouTube pour réécouter l'heure libre.
45:09 Tout de suite, c'est On parle auto avec Jean-Luc Moreau et Laurence Perrault.
45:13 Merci à tous, bonne journée.
45:15 Sud Radio, l'heure libre. Stéphane Simon, Michel Onfray.
45:19 ♪ ♪ ♪

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