• il y a 8 heures
Avec Gilles Kepel, géopolitologue et auteur de "Le Bouleversement du monde - L'après 7 Octobre" - Ed. Plon & Aurélie Pirillo, conseillère à la mairie de Paris

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##EN_TOUTE_VERITE-2025-01-19##

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Transcription
00:00En toute vérité, chaque dimanche, entre 11h et midi, sur Sud Radio Sécurité, Économie Numérique, Immigration, Écologie.
00:11Pendant une heure chaque semaine, nous débattons sans tabou des grands enjeux pour la France d'aujourd'hui et de demain.
00:16Et ce dimanche, nous aurons le plaisir, nous avons le plaisir de recevoir Gilles Kepel, géopolitologue,
00:21auteur de l'après 7 octobre, le bouleversement du monde aux éditions Plon et Aurélie Pirillo,
00:27conseillère de Paris et experte du Moyen-Orient. On parlera justement du Moyen-Orient après l'accord entre Israël et le Hamas.
00:34Est-ce un bon accord, l'arrivée de Trump à la Maison-Blanche ? Peut-elle changer la donne au Moyen-Orient ?
00:39La déflagration du 7 octobre, est-elle en train de bouleverser cette région du monde ?
00:44La chute de Bachar el-Assad en Syrie, est-elle vraiment une bonne nouvelle ?
00:47Le régime d'Emmola peut-il lui aussi tomber ?
00:50Tout de suite, les réponses de Gilles Kepel et d'Aurélie Pirillo, en toute vérité.
00:55En toute vérité, sur Sud Radio, Alexandre De Vecchio.
01:00Aurélie Pirillo, Gilles Kepel, bonjour.
01:02Bonjour.
01:03Ravi de vous recevoir dans cette émission. On va parler du Moyen-Orient, région pour le moins compliquée qui est en train de se recomposer.
01:13Mais je voulais commencer l'émission avec une autre question, enfin une question sur une autre région, Gilles Kepel,
01:20qui est, ce n'est pas une région, c'est un autre pays pour le coup, qui est l'Algérie.
01:24L'Algérie qui retient toujours Boalem-Sensal et qui est dans une campagne d'intimidation, on peut le dire comme ça, contre la France.
01:35Est-ce que la guerre d'Algérie n'est pas finie, Gilles Kepel ? Je sais que c'est aussi un sujet qui vous intéresse.
01:42Oui, elle se déroule en partie dans un certain nombre de territoires en France.
01:47Aujourd'hui, à Marseille, par exemple, le principal gang de narcotrafic s'appelle la DZ Mafia, c'est-à-dire, la DZ, ce sont les lettres de l'Algérie en arabe.
02:02Et je crois que c'est un des enjeux très important qui avait fait qu'Emmanuel Macron avait accompli ce voyage en Algérie en 2022.
02:13A l'époque, il y avait une grande réconciliation avec le président Tebboune, qui se traduisait réciproquement par un froid avec le Maroc.
02:22Parce qu'on espérait, justement, à l'Élysée que l'intervention de l'État algérien permettrait de fluidifier les relations avec une partie de la communauté algérienne en France,
02:38dont on avait l'impression qu'on avait perdu le contact avec elle.
02:43Et notamment dans les Bouches-du-Rhône et dans la région marseillaise.
02:48Alors ça s'est traduit par de grands espoirs.
02:51Le recteur de la mosquée de Paris a été fait promu officier de la Légion d'honneur par Emmanuel Macron lui-même à la mosquée à l'époque.
03:00On avait mis les plats dans les grands.
03:02Le voyage a été très chaleureux.
03:05On a été escorté au retour par deux soucouilles russes de l'armée de l'air algérienne.
03:10Et puis finalement, il n'y a pas eu véritablement de suivi.
03:14Il n'y a pas eu de suivi parce que, en réalité, le système algérien aujourd'hui continue à vivre de la rente mémorielle pour faire passer son mode de gouvernance,
03:30qui est basé essentiellement sur l'autre rente pétrolière, si vous voulez, et l'écrasement du mouvement du Hirak et autres.
03:38Donc il a besoin, pour son oxygène d'une certaine manière, de mettre en œuvre une rhétorique anti-française, anti-coloniale récurrente,
03:50qui est d'autant plus en décalage qu'aujourd'hui un grand nombre de ressortissants d'origine algérienne sont français, sont intégrés en France,
04:01gardent des liens avec leur pays de départ, etc. Bien sûr, mais en même temps...
04:05— Surtout que la colonisation est terminée depuis un bon moment.
04:09— Oui, ça fait un bon moment. Mais les flux sont toujours là. Et donc c'est ça qui est extrêmement dommageable.
04:17Et donc ça n'a pas fonctionné. Ça n'a pas fonctionné. Et il y a eu en même temps un certain nombre de pressions sur l'exécutif,
04:29notamment de la part des milieux économiques, qui étaient en train de dire qu'avec l'Algérie, il n'y a quasiment pas d'avenir économique.
04:38C'est un pays rentier qui ne se développe pas, alors qu'au contraire, le Maroc est un partenaire économique extrêmement important.
04:48Il y a des entreprises françaises qui sont là-bas. Il y a un véritable dynamisme marocain, salué pour d'autres raisons aussi par les États-Unis,
04:56notamment par rapport à l'Afrique, où la France n'a clairement plus les moyens, les capacités ou la volonté – je ne sais pas ce qu'il faut dire –
05:06d'intervenir elle-même. Et je crois qu'il y a eu là finalement un arbitrage qui a été rendu d'accompagner l'évolution du Maroc.
05:17Ça s'est traduit par encore un voyage présidentiel en grand tralala où il y avait outre les entreprises...
05:23– Vous n'étiez pas présent cette fois-ci. – Non, non, non, parce que c'était pour le show business. J'en fais pas partie.
05:30– Il y avait Yacine Bellatar. C'était moins classe. – Il y avait des stars de toutes sortes. Et là, ça a suscité une réaction furibarde de l'autre côté,
05:46ce qui fait qu'il reste malheureusement illusoire – les ouverts successifs ont essayé – d'équilibrer la relation marocaine et franco-algérienne,
05:59alors qu'évidemment, nous gérons d'une certaine façon les deux communautés.
06:04– Ça pourrait faire une émission entière. Effectivement, Boilem Sansa en paie le prix de cette guerre mémoriale livrée par l'Algérie à la France.
06:14– Il est otage. – Il est otage de l'Algérie. On pourrait en faire une émission entière. On vous réinvitera, Gilles Kepel.
06:21Mais on va parler du Moyen-Orient, notamment de cet accord entre Israël et le Hamas, avec cette très bonne nouvelle, la libération des otages, Aurélie Piriro.
06:31Ceci étant dit, est-ce que la question est réglée ? Est-ce que c'est un bon accord pour Israël, dans la mesure où cette libération des otages
06:41va quand même coûter une libération importante de terroristes en contrepartie ?
06:47– Effectivement, mais comme dans tout accord, il devrait y avoir des concessions de fait.
06:52Du côté israélien, je pense quand même qu'il s'agit d'un soulagement, notamment pour le retour des otages.
07:01L'ambassadeur d'Israël en France rappelait, mercredi dernier, lors d'une audition à la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale,
07:09qu'après le 7 octobre, quand ils intervenaient à Gaza, ils avaient trois grands objectifs.
07:15Le premier était de réduire la capacité militaire du Hamas, donc ces choses faites à 95% visiblement.
07:25C'était ensuite d'éviter que le Hamas puisse reprendre la gouvernance de Gaza, visiblement ces choses faites également.
07:35Et dernièrement, le troisième grand objectif était de ramener les otages.
07:40Je pense qu'on est désormais dans cette phase.
07:42Donc 33 otages sont en cours de libération à ce jour, on ne peut que s'en réjouir.
07:49Évidemment, ça nécessite des concessions, des meurtriers des terroristes vont être relâchés.
07:55J'imagine qu'ils resteront tout de même sous surveillance de la part de l'armée israélienne.
08:02Mais c'est un processus qui va dans la continuité des événements, c'est une évidence.
08:10Gilles Kepel, comment va se passer la suite ? Est-ce que d'abord le Hamas est aussi affaibli que ça ?
08:21C'est quand même une victoire militaire pour Israël.
08:25Et ensuite, est-ce qu'il sera possible ou pas pour Israël de faire son Hamas dans la banque de Gaza ?
08:31Aujourd'hui, le Hamas essaye de capitaliser en disant qu'il obtient par la négociation des concessions d'Israël
08:41dans la libération d'un certain nombre de ses membres et d'autres peut-être,
08:46en contrepartie de la libération des otages israéliens.
08:52Et alors on voit dans tel ou tel journaux des explications disant
08:57mais en réalité le Hamas sort vainqueur parce qu'il incarne la résistance, la souffrance du peuple palestinien.
09:07C'est quelque chose qui va peut-être un peu vite en besogne parce que,
09:11rétrospectivement quand même, du point de vue purement pratique,
09:17la radiapogromiste du 7 octobre que Sinoir a déclenché, autant qu'on le sache, de son propre chef,
09:26sans aval iranien, considérant que d'une certaine manière, par ce coup de force, l'Iran allait le soutenir.
09:34Or, ça a non seulement détruit complètement le Hamas,
09:38eu pour effet au moins 50 000 morts à Gaza, 100 000 blessés, 2 millions déplacés,
09:46c'est une Nakba qui veut dire catastrophe en arabe, c'est le même mot que Shoah en hébreu,
09:52qui est très supérieure à celle de 1948, de leur point de vue, c'est-à-dire la création de l'État d'Israël,
09:59mais également ça s'est traduit par un blanc-seing, d'une certaine manière, une opportunité pour Israël
10:06de détruire le Hezbollah et de faire tomber le système de Bachar el-Assad
10:12et d'infliger aux parrains iraniens aujourd'hui des dommages considérables.
10:18Donc, de ce point de vue-là, le bilan de Sinoir, qui a lui-même été liquidé par l'armée israélienne,
10:26après justement que l'échec du Hezbollah a donné l'impression qu'il n'y avait plus vraiment d'oxygène,
10:32le bilan est quand même extrêmement mauvais.
10:36Donc, même s'il y a des gens qui sont enthousiastes,
10:39ils sont obligés de se rendre compte qu'à quoi ça a servi le 7 octobre, pas à grand-chose.
10:44— À affaiblir tout de même le Hamas, du point de vue...
10:48— Non, mais du point de vue du Hamas.
10:50— J'ai bien compris, mais c'était pour conclure... Enfin, conclure.
10:54Pas totalement, puisqu'il reste encore trois parties dans cette émission.
10:58On se retrouve après une courte pause avec Aurélie Pirillot et Jules Kepel.
11:01On parle de la recomposition géopolitique du Moyen-Orient.
11:04À tout de suite sur Sud Radio, en toute vérité.
11:06En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio. Alexandre Desvecques.
11:10— Nous sommes de retour sur Sud Radio, en toute vérité.
11:13On parle ce matin de la recomposition géopolitique du Moyen-Orient,
11:18sur fond notamment d'accords entre Israël et le Hamas, avec la libération des otages.
11:25C'est tout de même la bonne nouvelle de cette semaine, notamment des otages français.
11:30Aurélie Pirillot, avant la pause, on parlait finalement du bilan de cette guerre,
11:36avec un bilan pour le Hamas, finalement, qui sort très affaibli.
11:41Est-ce que ça donne pas raison, finalement, à la politique de Benyamin Netanyahou,
11:47qui avait été très critiquée ? Certains exigeaient un cessez-le-feu
11:51quasiment trois semaines après le début des hostilités.
11:57Aujourd'hui, non seulement le Hamas est affaibli, mais le Hezbollah également.
12:03Donc est-ce qu'Israël sort pas plus puissant de cette guerre ?
12:09Est-ce que le côté dramatique et tragique de cette guerre,
12:14avec les dizaines de millions de morts, n'était pas nécessaire, rétrospectivement ?
12:20Si, évidemment. On peut dire qu'Israël, d'un point de vue militaire, d'un point de vue tactique,
12:29sort renforcé, on va dire, de cette guerre.
12:34Néanmoins, il y a quand même un bilan humain qui est assez lourd pour Israël,
12:39avec le 7 octobre. Est-ce qu'il en sort complètement renforcé ? Je ne sais pas.
12:46D'un point de vue, aussi, opinion internationale, c'est très difficile pour Israël,
12:52et notamment pour son premier ministre, Benyamin Netanyahou.
12:57Je pense que, comme toute guerre, il faut prendre beaucoup de précautions.
13:03Mais d'un point de vue tactiquement militaire, oui, effectivement, Israël en sort renforcé.
13:09Je pense qu'effectivement, une guerre ne se gagne pas en quelques jours.
13:14C'était, pour moi, une évidence que ça se prolonge sur plusieurs mois.
13:19On aurait même pu attendre plusieurs années.
13:23Je vous rappelle que, quand ça allait rentrer dans Gaza,
13:28on ne savait pas du tout à quoi s'attendre, avec la complexité des tunnels, etc.
13:33Finalement, ils ont progressé assez rapidement.
13:36Évidemment, le bilan humain est lourd, donc on ne peut jamais s'en contenter.
13:41Mais oui, je pense qu'Israël sort globalement renforcé.
13:46Et la question, c'est surtout quelle était l'utilité du Hamas, finalement, de cette attaque,
13:55qui, pour le coup, en ressort très, très, très affaiblie.
13:59Et pas que le Hamas, mais tous leurs proxys.
14:03Évidemment, l'Iran, mais aussi le Hezbollah.
14:06On va justement en parler, puisque le livre de Gilles Kepel, c'est le bouleversement du monde,
14:12et donc les conséquences collatérales de tout cela.
14:15Le bouleversement du monde, l'après-sept octobre et non l'inverse,
14:18que j'ai dit tout à l'heure, c'est aux éditions Plon, on le rappelle à nos auditeurs.
14:22Est-ce que vous avez compris, Aurélie Pirillo,
14:25la position de la France dans cette affaire qui a beaucoup varié ?
14:30On est passé d'une coalition internationale contre le Hamas,
14:33qu'Israël ne demandait pas, aujourd'hui à un président de la République
14:37qui est parfois assez dur contre Israël.
14:41Dans son dernier tweet, il parle de calvaire injustifiable à propos de cette guerre.
14:49Est-ce que la position française est lisible ?
14:53Ça a toujours été l'ambiguïté des positions diplomatiques françaises
14:58dans ce Moyen-Orient si complexe.
15:01Tantôt du côté des Palestiniens, mais d'un autre côté quand même
15:08avec une lecture de réal politique, où évidemment il faut faire avec Israël
15:15militairement, économiquement.
15:17Donc l'ambiguïté du président et de la diplomatie française ne me surprend pas.
15:25Je pense qu'il y avait un gros enjeu aussi pour la France au Liban
15:29qui découlait directement de cette guerre,
15:32qui est quand même une des chasses gardées du président français.
15:36Président qui est aujourd'hui même au Liban.
15:43Je pense que les choses vont se normaliser très prochainement.
15:48On va retourner à une diplomatie normale avec Israël,
15:55même s'il y a des mots qui ont été très durs,
15:58qui ont été prononcés envers Benyamin Netanyahou.
16:01Mais de toute façon la France devra faire avec Israël, quoi qu'il arrive.
16:06Gilles Kepel, est-ce que ça laissera des traces ?
16:09Je vous pose la même question sur la diplomatie française.
16:13Je sais que vous la connaissez de près,
16:15que vous connaissez même le président de la République personnellement.
16:18Mais j'ai presque envie de vous poser la question autrement.
16:21Vous nous avez parlé tout à l'heure de l'Algérie.
16:24Vous avez dit qu'au début du quinquennat d'Emmanuel Macron,
16:28on a été séduire les Algériens quasiment pour des questions de politique interne à la France,
16:34parce qu'on avait un problème, disons-le,
16:36avec une partie de la communauté des franco-algériens en France.
16:41Est-ce que certaines positions du président de la République
16:44sur ce conflit israélo-palestinien
16:46ne sont pas dictées tout simplement par des préoccupations internes ?
16:51En partie.
16:52Mais je voulais d'abord revenir un petit peu sur la question que vous aviez posée tout à l'heure
16:59à propos d'Israël.
17:01Je crois que l'Israël de Bibi Netanyahou
17:06a remporté des succès militaires tactiques, indéniablement.
17:11Mais la question, c'est de savoir dans quelle mesure
17:15il est capable de transformer ses succès militaires tactiques en victoire politique.
17:19Et là, il arrive dans une collision, si j'ose dire,
17:24avec les ambitions de l'équipe Trump,
17:28qui veut d'abord et avant tout faire une sorte de remake,
17:33si j'ose dire, des accords d'Abraham,
17:35c'est-à-dire de paix israélo-arabe
17:39avec objectif essentiellement économique,
17:42dans les accords plus-plus ou XXL, si vous préférez,
17:46puisque c'est la saison des soldes.
17:48Dans lesquels l'Arabie Saoudite est impliquée,
17:52et peut-être, demain ou après-demain,
17:55l'Iran qui ne serait plus la république islamique,
17:58puisqu'elle est quand même en train de tanguer assez fort.
18:00On va en parler, oui.
18:01Et cela, ça veut dire qu'il y a une reconnaissance
18:07d'un État palestinien.
18:10C'est l'exigence saoudienne,
18:13non pas que la monarchie saoudienne est un amour absolu
18:18pour l'OLP et encore moins pour le Hamas,
18:20mais c'est une question de légitimité
18:23pour les dirigeants arabes du Moyen-Orient aujourd'hui.
18:26Et vous voyez, parmi tous les Palestiniens
18:30qui vont être libérés,
18:32vous avez l'un et l'autre parlé de meurtriers, de terroristes,
18:35mais celui dont on n'entend pas de nouvelles,
18:37c'est sans doute le seul qui peut incarner
18:40demain un État palestinien,
18:43c'est une identification assez large,
18:45c'est Marwan Badrouti,
18:47que Netanyahou n'a jamais fait libérer.
18:49Il l'a fait libérer, il n'y a rien sinoir,
18:51pour l'envoyer à Gaza tel le Kaiser
18:53en voyant Lénine en train de blinder
18:55à Saint-Pétersbourg pendant la Première Guerre mondiale
18:58pour faire exploser le système.
18:59Et pour dire, vous voyez,
19:00où l'État palestinien, d'un côté,
19:02il y a le corrompu Mahmoud Abbas,
19:04de l'autre, il y a le fou furieux djihadiste,
19:06avec qui voulez-vous que je traite.
19:08Donc ça, c'est la grande question aujourd'hui,
19:10c'est dans quelle mesure
19:12Israël va être obligé
19:14d'aller de l'avant politiquement.
19:16Là, je pense qu'ils n'ont pas la main,
19:18ils se sont fait,
19:20si je peux continuer cette métaphore,
19:22tordre le bras par Donald Trump.
19:24C'est surprenant,
19:26mais ça nécessite une explication,
19:28puisque a priori,
19:30Benyamin Netanyahou et Donald Trump
19:32sont plutôt alliés.
19:34On a eu le sentiment
19:36qu'ils préféraient Donald Trump à Kamala Harris.
19:38L'autre jour,
19:40Donald Trump, sur son réseau Truth Social,
19:42a diffusé
19:44deux minutes
19:46d'un universitaire américain
19:48qui vilipendait
19:50Benyamin Netanyahou en disant
19:52qu'il faisait faire des guerres
19:54aux Etats-Unis pour ses propres intérêts.
19:56Et il l'a traité, en anglais,
19:58de « deep dark son of a bitch ».
20:00Pour ceux qui ne connaissent pas l'anglais,
20:02ça veut dire espèce de
20:04fils de pute.
20:06Et donc ça,
20:08ça a suscité une réaction estomaquée,
20:10si j'ose dire, de Bibi,
20:12qui a dit « je boude, je n'irai pas à l'inauguration ».
20:14Ça m'étonnerait qu'ils puissent le permettre.
20:16Et le lendemain...
20:18La cérémonie d'investiture
20:20qui aura lieu demain.
20:22Et le lendemain,
20:24l'envoyé spécial de Trump
20:26pour la paix au Moyen-Orient,
20:28qui est un promoteur immobilier
20:30de New York, Steve Witkoff,
20:32neutre, parce que le BTP est un énorme enjeu,
20:34il y a toute la reconstruction,
20:36ça va faire très lourd comme enjeu,
20:38a appelé Bibi
20:40depuis Doha
20:42en lui disant « rendez-vous demain matin,
20:44samedi,
20:46pour régler cette affaire,
20:48c'est fini cette histoire ».
20:50Et on lui a répondu « mais c'est le Shabbat,
20:52j'en ai rien à... ».
20:54À Arez, le langage était en anglais,
20:56ils ont dit « salty », c'est-à-dire « vert »,
20:58si je puis dire.
21:00Et c'est les rude moeurs de l'immobilier
21:02et il lui a tordu le bras
21:04pour s'engager dans cette négociation
21:06avant
21:08le 20 janvier.
21:10Parce que sinon, Trump aurait été
21:12pris en flagrant délit de bluff.
21:14Et il y a toutes sortes d'autres...
21:16Est-ce que les otages
21:18soient libérés avant même son investiture ?
21:20Il avait promis,
21:22on va faire beaucoup d'anglais dans cette séance,
21:24« there will be hell to pay »,
21:26l'enfer va s'abattre sur votre tête.
21:28Et si
21:30rien ne s'était produit,
21:32il a d'autres dossiers.
21:34L'Ukraine, même au Moyen-Orient,
21:36la rencontre ce vendredi
21:3817
21:40entre Pézéchkiens,
21:42le président irakien, et Poutine
21:44à Moscou,
21:46dont les Iraniens attendent
21:48une aide pour avoir l'arme nucléaire.
21:50Et puis la question
21:52ukrainienne, la question chinoise.
21:54Donc si Trump apparaît
21:56comme étant simplement un matamor
21:58qui fait des rodomontades
22:00sur ce dossier, il perd d'emblée
22:02tout crédit. Donc il a mis la barre très haut
22:04et il n'est pas question que Bibi Netanyahou
22:06mette un grain de sable
22:08dans son roige. C'est pourquoi aussi bien,
22:10autant, pardon,
22:12Trump est très
22:14virulemment pro-israélien.
22:16Vous l'avez rappelé,
22:18Madame,
22:20il a nommé un ambassadeur
22:22qui est pour la colonisation
22:24qui dit je ne sais pas ce que c'est
22:26qu'un palestinien, l'ancien gouverneur
22:28de l'Arkansas, Mike Huckabee,
22:30qui est un évangéliste fanatique. Mais
22:32je ne pense pas qu'il voit
22:34dans Netanyahou nécessairement
22:36le Premier ministre
22:38de son cœur. Parce que Netanyahou joue
22:40ses intérêts personnels. Aujourd'hui,
22:42pourquoi Netanyahou voulait tellement
22:44procrastiner pour la paix ? Parce que dès que la
22:46guerre est finie, Netanyahou
22:48retrouve les tribunaux les siens,
22:50et il a déjà été
22:52interrogé le 10 décembre pendant 3 jours.
22:54Et il est
22:56mis en cause par la Cour
22:58pénale internationale.
23:00Et donc la situation, à mon sens,
23:02est assez compliquée pour lui. Et je crois
23:04que la fin des otages,
23:06le nouveau
23:08Moyen-Orient, Netanyahou, a tout
23:10à fait le sentiment que ça va se faire sans
23:12lui, dans une situation qui n'est pas
23:14très favorable. On parle du nouveau Moyen-Orient
23:16après une courte pause sur Sud Radio.
23:18En toute vérité, toujours avec Aurélie Pirillot
23:20et Gilles Kepel.
23:22En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio,
23:24Alexandre Devecchio. Nous sommes de retour
23:26sur Sud Radio. En toute vérité,
23:28on parle de la recomposition géopolitique
23:30du Moyen-Orient,
23:32notamment avec
23:34Gilles Kepel, l'auteur
23:36de Le bouleversement du monde.
23:38La presse, 7 octobre, c'est aux éditions
23:40Plon. C'est passionnant,
23:42on vous le conseille. Et Aurélie
23:44Pirillot, conseillère de Paris,
23:46experte du Moyen-Orient.
23:48Aurélie Pirillot, on va continuer
23:50à parler notamment des conséquences
23:52collatérales,
23:54des bouleversements liés
23:56au 7 octobre,
23:58mais je voulais évoquer avec vous
24:00une autre question qui, je sais,
24:02vous tient à cœur.
24:04En ce moment même
24:06a lieu le procès des anciens
24:08dirigeants d'Artsac,
24:10accusés de terrorisme,
24:12de séparatisme et de crimes de guerre.
24:14C'est ouvert vendredi
24:16à Bakou, en Azerbaïdjan.
24:18C'est l'occasion
24:20de parler d'un autre conflit
24:22dont personne ne parle plus.
24:24Celui
24:26de l'Arménie.
24:28Pourquoi ce conflit est oublié
24:30à ce point-là ? Et est-ce qu'il est
24:32aussi négligeable que cela ?
24:34Pour être oublié,
24:36faut-il déjà avoir existé
24:38dans les médias ?
24:40Et depuis le début de ce conflit,
24:42malheureusement, on voit bien le désintérêt des médias
24:44français, mais pas que des médias,
24:46aussi de notre diplomatie
24:48et de l'opinion publique
24:50sur ce sujet. Alors, bonne question.
24:52Pourquoi ça n'intéresse pas
24:54les Français ?
24:56Est-ce que c'est les Français ou c'est les journalistes
24:58que ça n'intéresse pas ? C'est pas tout à fait la même chose.
25:00Sûrement les deux, et encore moins
25:02les politiciens, évidemment.
25:04Et les filles et Mélenchon
25:06ne peuvent pas,
25:08on va dire, faire
25:10un terreau électoral
25:12de ce malheur.
25:14En revanche, ce qui est déplorable,
25:16c'est qu'il y a eu
25:18120 000
25:20chrétiens, peut-être que c'est le sujet aussi,
25:22peut-être que finalement
25:24les questions
25:26de génocide chrétien
25:28intéressent moins.
25:30Il y a des victimes qui sont moins
25:32présentables que d'autres.
25:34On peut se poser la question.
25:36Mais c'est sûr
25:38que malheureusement, il y a quand même
25:40120 000 Arméniens du
25:42Haut-Karabagh qui ont dû fuir
25:44et qui se retrouvent
25:46aujourd'hui apatrides.
25:48Et personne ne s'en soucie,
25:50y compris au niveau
25:52de l'ONU. On a du mal à faire
25:54intervenir le Conseil de sécurité
25:56de l'ONU sur ces questions.
25:58Donc Bakou, évidemment,
26:00est un pays,
26:02enfin, est une ville
26:04qui appartient à un pays qui a énormément
26:06d'argent, qui
26:08peut se révéler aussi utile
26:10dans cette guerre
26:12entre l'Ukraine et la Russie
26:14pour l'Europe, puisque
26:16on se fournit
26:18certaines matières premières
26:20en Azerbaïdjan. Donc oui,
26:22toutes ces questions nous interrogent
26:24pour le plus grand
26:26malheur des Arméniens du Haut-Karabagh.
26:28On a eu une pensée
26:30pour eux ce matin. Gilles Kepel,
26:32on reprend sur
26:34le bouleversement du monde.
26:36L'après-7 octobre,
26:38vous nous expliquez d'ailleurs que
26:40ça jouerait pas forcément avec
26:42Benjamin Netanyahou.
26:44On a beaucoup parlé de la question
26:46du Hamas. Cette guerre a eu
26:48aussi pour conséquence
26:50d'affaiblir
26:52l'ESBOLA,
26:54l'Ibanais, mais surtout d'affaiblir
26:56l'Iran. Est-ce que
26:58c'est pas ça le grand bouleversement du monde
27:00que vous décrivez d'ailleurs fort bien
27:02dans votre livre ? – Merci beaucoup. Oui, et aussi
27:04dans l'histoire de Trump, parce que ça fait partie
27:06de ceci cela. Le succès de Trump
27:08est également
27:10le résultat d'une mobilisation
27:12de la société américaine
27:14face aux excès du
27:16wokisme et également
27:18face au sentiment que
27:20dans l'affaire israélienne,
27:22Biden était branché à l'Hamas,
27:24si vous me passez l'expression, puisque
27:26le leadership américain avait disparu.
27:28Biden donnait à Bibi
27:30toutes les armes qu'il voulait,
27:32faisant attention à ce que l'aile gauche du Parti
27:34démocrate occupait les campus
27:36en disant
27:38« abat la politique israélienne
27:40de Biden ».
27:42Et donc il y avait cette dimension-là.
27:44Je voudrais juste revenir un instant sur le génocide
27:46arménien et le génocide
27:48aussi des assyro-chaldéens
27:50par les ottomans au début
27:52du XXe siècle. On sait trop
27:54peu que c'est à ce moment-là
27:56que la notion, le concept de génocide
27:58a été créé par
28:00un juriste juif
28:02de la ville de Lemberg,
28:04aujourd'hui Lwów,
28:06à l'époque c'était en Pologne, qui s'appelait Raphael Lemkin,
28:08et qui pense la notion
28:10de génocide à partir de l'exemple
28:12arménien et de l'exemple assyro-chaldéen.
28:14Ce n'est que le plus tard que lui-même,
28:16juif ayant fui son pays
28:18pour arriver aux États-Unis, à l'université
28:20Columbia, là encore, va
28:22appliquer le terme à la solution
28:24finale des nazis en Europe. Donc si vous voulez,
28:26tout ça en fait est assez lié
28:28à la question arménienne,
28:30la question des juifs,
28:32et ce qui est assez frappant
28:34aussi, c'est par exemple que
28:36les israéliens ne veulent pas trop
28:38entendre parler du génocide arménien,
28:40puisque le génocide...
28:42Absolument, et du reste,
28:44Israël
28:46est un grand soutien
28:48de l'Azerbaïdjan,
28:50puisque l'Azerbaïdjan était
28:52opposé à l'Iran, et
28:54ils ont fourni à l'Azerbaïdjan
28:56un certain nombre de drones
28:58qui ont joué un rôle important dans la guerre du Karabakh.
29:00Je reviens à votre question,
29:02mais il faut que vous me la rappeliez rapidement.
29:04Je crois que j'en avais
29:06une autre.
29:08Oui, l'affaiblissement de l'Iran,
29:10mais j'en avais presque une autre.
29:12Peut-être avant,
29:14parce que ce que vous disiez sur l'Azerbaïdjan
29:16était intéressant,
29:18et ça montre vraiment qu'on est dans l'orient compliqué,
29:20et ça me faisait
29:22penser à la question de la Syrie,
29:24parce qu'effectivement, je vous ai dit,
29:26le Hezbollah libanais affaibli,
29:28et la chute de Bachar el-Assad,
29:30et la chute de Bachar el-Assad,
29:32et question un peu provocatrice,
29:34est-ce que c'est une
29:36bonne nouvelle ? Vous allez peut-être me dire
29:38ça dépend pour qui, mais...
29:40Déjà, ce qui est intéressant, c'est la chute de Bachar el-Assad.
29:42De même que
29:44Sinoir
29:46n'avait pas prévu
29:48que le 7 octobre aboutirait
29:50à effondrer lui-même
29:52et tous ses amis et ses alliés,
29:54je ne suis pas sûr
29:56que Netanyahou
29:58ait pensé que
30:00les bombardements systématiques
30:02qu'il faisait sur la Syrie,
30:04parce qu'il était le maillon le plus faible
30:06de l'axe de la résistance,
30:08à partir du moment
30:10où il y a le 7 octobre,
30:12il y a deux offensives
30:14qui sont menées. L'une par Israël,
30:16l'une sur Gaza,
30:18contre les Palestiniens,
30:20et une offensive
30:22qui les prend au dépourvu
30:24militairement, parce qu'ils n'arrivent pas,
30:26il y a trop de tunnels, ils ont sous-estimé
30:28complètement Gaza, Bibi qui en apporte
30:30la responsabilité, qui va devoir s'expliquer
30:32là-dessus, sur la surprise
30:34du 7 octobre pour le Mossad.
30:36Et donc,
30:38ils font une guerre qui est
30:40complètement en décalage par rapport
30:42aux capacités du Mossad, etc.
30:44Et ils aboutissent
30:46à ce qui est plus de 50 000 morts,
30:48un effet désastreux
30:50dans le monde entier, sur l'image d'Israël,
30:52etc. Mais en même temps,
30:54il y a une autre guerre, beaucoup plus efficace,
30:56dont on ne parle pas, qui est
30:58le ciblage de la Syrie, et le ciblage
31:00des passe-d'aran iraniens, qui sont
31:02les généraux qui contrôlent et font fonctionner
31:04l'armée de Bachar al-Assad.
31:06Ils vont systématiquement tuer les uns
31:08après les autres, à tel point que l'Iran
31:10est obligé d'attaquer Israël
31:12pour dire que ça suffit comme ça.
31:14Ensuite, quand le Hezbollah
31:16est liquidé, et la liquidation
31:18du Hezbollah avec l'opération des
31:20bipers qui sera renseignée pendant des
31:22siècles dans les écoles de renseignement,
31:24les bipers piégés, indiquent
31:26pourquoi aussi Israël
31:28s'est si peu méfié
31:30de ce qui se passait à Gaza,
31:32parce que le Mossad a investi toute son énergie
31:34pour la liquidation du Hezbollah,
31:36parce que ça représentait un danger
31:38beaucoup plus important. Ils étaient beaucoup mieux armés
31:40par l'Iran que le Mossad.
31:42A partir de ce moment-là, on a l'effondrement
31:44de l'armée d'Assad,
31:46parce qu'il n'y a plus de généraux de passe d'Aran,
31:48il n'y a plus de lieutenants et capitains du Hezbollah
31:50dont les mains et les yeux ont été
31:52arrachés par les explosions.
31:54Les autres milices chiites sont parties faire du business
31:56chez eux, et l'armée de Bachar el-Assad
31:58est complètement clochardisée.
32:00Là-dessus, les Russes, les Iraniens
32:02et les Turcs s'entendent,
32:04si j'ose dire, comme la ronze en foire,
32:06pour faire en sorte qu'il y ait l'offensive,
32:08le blitzkrieg, si j'ose dire,
32:10et Damas tombe,
32:12certains de ce groupe,
32:14qui sont des anciens djihadistes,
32:16entre guillemets,
32:18déradicalisés, en tout cas,
32:20ils sont passés du kalachnikov kéfié
32:22au costume cravate.
32:24Est-ce que c'est un critère de déradicalisation ?
32:26Vous qui connaissez bien les frères musulmans,
32:28je pense que vous êtes bien.
32:30Effectivement,
32:32on est dans une logique frérisse.
32:34Est-ce qu'Israël avait prévu,
32:36plutôt que d'avoir
32:38un ennemi qu'il connaissait,
32:40d'avoir à gérer
32:42un autre groupe qui est
32:44aujourd'hui assez lié
32:46à l'axe turco-qatari,
32:48mais que
32:50tous les acteurs
32:52de la région s'efforcent de courtiser ?
32:54Les Syriens sont allés
32:56en Arabie Saoudite,
32:58avec une réunion
33:00arabo-européenne
33:02où les Turcs n'étaient pas présents,
33:04et les Saoudiens ont clairement mis
33:06les choses en main, ont réinvesti dans la région,
33:08au Liban d'abord.
33:10Le Liban, si vous avez des investissements à faire,
33:12je crois que vous pouvez mettre un peu d'argent au Liban,
33:14acheter un restaurant.
33:16Je n'en serai pas là.
33:18Les banques sont sécurisées.
33:20Je n'ai pas vendu autant de livres que vous,
33:22j'ai le KPF.
33:24Si on fait un livre d'entretien par exemple.
33:26Et donc,
33:28également en Syrie,
33:30les Saoudiens
33:32regardent avec un peu de méfiance
33:34la perspective qu'un axe
33:36frériste reconstitue.
33:38Mais il n'est pas du tout sûr que Netanyahou
33:40ait anticipé cela.
33:42C'est ça qui est extraordinaire
33:44quand nous sommes en train de dire,
33:46on est en train de faire
33:48de la géopolitique
33:50pas de café du commerce,
33:52mais au moment où elle se produit,
33:54et avec une telle quantité
33:56de variables
33:58que les paramètres bougent
34:00dans tous les sens.
34:02C'est ça qui est tout à fait extraordinaire.
34:04La victoire de Trump
34:06est l'un des effets induits
34:08pas le seul, mais l'un des effets induits
34:10de la situation Moyenne-Orientale
34:12et lui-même s'appuie
34:14sur celle-ci
34:16pour justifier son boulevardement du monde
34:18transactionnel.
34:20Il n'y a plus de relation, on n'est plus dans le monde
34:22Westphalien, on est dans le monde
34:24des GAFA. C'est à travers
34:26X qu'il fait
34:28insulter Netanyahou en piquant
34:30deux minutes de
34:32quelqu'un qui en parle,
34:34c'est à travers X que M. Musk
34:36fait la promotion
34:38de la patronne de la FT,
34:40l'extrême droite, Mme Weidel, en Allemagne,
34:42etc. Et donc on est dans un monde
34:44complètement transformé dont
34:46d'une certaine manière
34:48le chaos Moyenne-Orientale
34:50est un peu le banc d'essai.
34:52Aurélie Pirillo,
34:54sur cette question de la Syrie,
34:56vous vous êtes très impliquée
34:58sur la question des chrétiens d'Orient,
35:00vous parlez tout à l'heure
35:02du malheur des
35:04Arméniens notamment.
35:06La chute de Bachar el-Assad,
35:08certes c'était un dictateur sanguinaire,
35:10mais est-ce que c'est une bonne nouvelle
35:12pour les chrétiens d'Orient ?
35:14Est-ce que vous croyez
35:16effectivement que Mohamed
35:18Al-Joulani, le nouvel homme fort,
35:20est vraiment
35:22un islamiste modéré ? On se souvient
35:24de Le Drian parlant
35:26de talibans inclusifs,
35:28je crois.
35:30Est-ce qu'il n'y a pas une part
35:32de naïveté de la communauté internationale
35:34à le présenter
35:36finalement comme quelqu'un
35:38de présentable ?
35:40Avant cela, si vous me le permettez,
35:42je veux juste revenir sur votre question précédente.
35:44Vous évoquiez
35:46le 7 octobre comme
35:48des conséquences de la chute
35:50du régime de Bachar el-Assad.
35:52Mais on oublie qu'une des conséquences
35:54très importantes
35:56c'est la guerre en Ukraine.
35:58Avant la guerre en Ukraine,
36:00il y avait quand même
36:025000 soldats russes
36:04en Syrie qui faisaient quand même
36:06tenir le régime.
36:08Il y a eu à la fois le départ du Hezbollah et à la fois
36:10le départ de l'armée russe.
36:12Mais c'est surtout l'armée russe qui tenait.
36:14Et 30 avions.
36:16Ils ont dû rapatrier les deux tiers
36:18de l'autre côté, ils n'ont plus pu bombarder.
36:20C'est surtout les russes
36:22qui tenaient
36:24quand même à distance
36:26Daesh et Al Nostra.
36:28Moi, à l'époque, quand j'avais vu les russes
36:30partir de Syrie,
36:32je m'étais dit, d'ici deux ans,
36:34parce qu'on savait
36:36que l'idéologie était encore là,
36:38on savait que les milices étaient encore présentes,
36:40elles étaient dispersées, mais elles étaient
36:42toujours sur le terrain. Je savais que d'ici
36:44deux ans, ils reprendraient
36:46très certainement le pouvoir de la Syrie
36:48et que par ailleurs, des attentats
36:50en Europe recommenceraient.
36:52Bon, donc ça ne m'a pas tellement étonnée
36:54au-delà du 7 octobre. Évidemment,
36:56je partage votre opinion,
36:58Gilles Kepel, je pense
37:00qu'Israël n'avait pas mesuré
37:02toute la
37:04difficulté
37:06de la gestion syrienne.
37:08En revanche, évidemment,
37:10la question qui se pose
37:12aujourd'hui, c'est
37:14on sait ce qu'on a perdu, un dictateur
37:16sanguinaire, mais
37:18est-ce qu'on sait réellement
37:20ce qui va arriver ?
37:22On ne peut pas oublier le passé
37:24d'Al-Djoulani,
37:26d'Al-Nostra, etc., qui a combattu auprès
37:28de Daesh et de tous
37:30ses milices islamiques.
37:32On peut, d'ailleurs, on le voit
37:34dans son entourage, avec le nouveau
37:36ministre de la Justice
37:38qui a, à Ibyl,
37:40condamné des femmes à mort, soi-disant,
37:42pour prostitution. Mais alors, comme les femmes,
37:44là-bas, sont condamnées pour un oui, pour un non,
37:46on s'interroge. Alors, d'ailleurs,
37:48le régime,
37:50en parlant, puisque, évidemment,
37:52la population syrienne a protesté
37:54contre
37:56ce nouveau ministre de la Justice
37:58qui a dit, oui, mais c'est un autre temps
38:00et c'est une autre région,
38:02une région où s'applique la sharia.
38:04La question maintenant qui se pose, c'est
38:06vont-ils appliquer la sharia en Syrie ?
38:08Il y a
38:10quand même beaucoup à craindre
38:12pour qu'ils le fassent et ils nous ont donné
38:14quelques preuves.
38:16Merci Aurélie Pirillo, merci Gilles Kepel.
38:18On se retrouve après une courte pause
38:20pour la dernière partie de cette émission.
38:22On continue à parler
38:24de ce basculement du monde. On parlera
38:26notamment de la question de
38:28l'Iran, puisque c'est peut-être
38:30l'enjeu le plus important
38:32du futur. A tout de suite sur Sud Radio
38:34En Toute Vérité.
38:36En Toute Vérité, 11h30 sur Sud Radio
38:38Alexandre Devecchio. Nous sommes de retour
38:40sur Sud Radio En Toute Vérité
38:42avec Gilles Kepel, auteur
38:44de Le bouleversement du monde
38:46l'après 7 octobre, c'est aux éditions
38:48Plon. Et Aurélie Pirillo,
38:50experte du
38:52Moyen-Orient, conseillère
38:54de Paris. Avant la pause,
38:56je vous ai... La pause
38:58nous a interrompues malheureusement, mais on parlait
39:00de la situation en
39:02Syrie, de Mohamed
39:04Aljoulani,
39:06pardon, c'est difficile
39:08à prononcer, qui n'était
39:10vous nous expliquiez que
39:12il allait sans doute
39:14appliquer la charia, mais vous
39:16voulez nous dire ce qui se passait
39:18maintenant en Syrie. Les nouvelles sont très mauvaises.
39:20Les nouvelles sont très mauvaises.
39:22La nuit dernière,
39:24il y a eu de nombreux échanges de
39:26tirs dans Damas.
39:28Il y a de
39:30nombreuses milices terroristes,
39:32elles sont d'ailleurs
39:34innombrables, et on ne sait même pas
39:36qui fait quoi. C'est le grand problème.
39:38Ce qui est sûr, c'est que HTS,
39:40le nouveau régime d'Aljoulani,
39:42n'arrive pas à les maîtriser.
39:44Dans toutes les rues,
39:46des quartiers chrétiens, que ce soit
39:48à Damas, à Alep, à Homs,
39:50vous avez des
39:52initiatives individuelles
39:54où des
39:56hommes, dont on ne sait pas
39:58quelle fraction d'ailleurs,
40:00brandissent des hijabs
40:02et demandent aux femmes de se couvrir la tête.
40:04Une
40:06avocate syrienne me disait
40:08qu'elle ne pouvait plus désormais
40:10exercer sans le hijab.
40:12Des
40:14groupes de Tchétchènes
40:16sont dans les rues des quartiers
40:18chrétiens et offrent
40:20des hijabs aux femmes
40:22et des livres coraniques aux enfants.
40:24Pendant la nuit,
40:26ils mettent partout,
40:28ils collent de la
40:30propagande islamique,
40:32en joignant les chrétiens à se
40:34convertir et les femmes à porter
40:36le hijab. Il y a eu
40:38aussi récemment, dans une
40:40université chrétienne, l'arrivée
40:42de dizaines
40:44d'autres, on va dire,
40:46étudiants musulmans,
40:48qui venaient prêcher
40:50la parole
40:52de Dieu et précisément
40:54celle de Daesh.
40:56Donc, il y a
40:58beaucoup d'actes
41:00d'intimidation qui sont faits. HTS
41:02n'arrive pas à les maîtriser, on ne sait pas d'ailleurs
41:04s'il y a une volonté de les maîtriser ou non.
41:06On m'a fait passer récemment
41:08la nouvelle
41:10fiche de route
41:12douanière
41:14où tous les produits
41:16sont taxés et
41:18il manquait deux produits, l'alcool
41:20et la viande porcine. Donc ça laisse
41:22quand même beaucoup d'interrogations.
41:24Il y a eu cette
41:26tentative aussi de réforme de
41:28l'éducation nationale qui a échoué
41:30sous la contestation
41:32de la population syrienne mais qui prévoyait
41:34non seulement de revoir
41:36l'histoire de la Syrie
41:38en enlevant évidemment
41:40toutes les références
41:42à Bachar al-Assad, au régime de Bachar al-Assad
41:44et au régime basse en général
41:46mais pas qu'il y avait aussi
41:48une volonté de retirer
41:50l'enseignement scientifique. Et on sait très bien
41:52que le terreau des fondamentalistes
41:54c'est quand même
41:56l'obscurantisme. Donc
41:58combien de temps ça va tenir,
42:00on ne sait pas. Moi ce que j'ai
42:02très peur c'est qu'on a une diplomatie qui
42:04à mon avis s'est un peu précipitée.
42:06Donc
42:08on va voir. Mais avant
42:10de sortir le
42:12carnet de chèques, j'aimerais que notre diplomatie
42:14s'assure du traitement
42:16qui sera réservé aux minorités
42:18en Syrie et pas que, surtout
42:20du sort qui sera réservé aux femmes syriennes.
42:22Moi j'ai beaucoup de femmes syriennes
42:24qui sont très inquiètes
42:26à l'idée de savoir si elles pourront continuer à exercer
42:28en tant que, comme je vous le disais,
42:30avocate, mais aussi en tant que médecin.
42:32Et ce n'est pas évident. Il y a beaucoup
42:34d'interrogations, mais ça part très très mal.
42:36Si déjà en quelques semaines, il y a déjà tous ces actes
42:38qui sont
42:40perpétrés
42:42et dont
42:44HTS ne réprime pas.
42:46Donc
42:48il laisse quand même à craindre
42:50qu'il y ait un...
42:52Un moment d'islamisation
42:54du pays.
42:56On a vu en Afghanistan que ça pouvait
42:58aller très très vite
43:00et qu'on était très loin des talibans
43:02inclusifs. Gilles Kepel,
43:04on pourrait continuer à parler
43:06de la Syrie parce que c'est un sujet
43:08passionnant, mais on essaye de faire
43:10le tour
43:12de ce Moyen-Orient compliqué.
43:14Et
43:16vous êtes... Vous avez écrit un livre
43:18qui s'appelle Prophètes dans son pays
43:20et vous prophétisez
43:22en quelque sorte la chute
43:24du régime
43:26d'Emmola. Qu'est-ce qui vous fait
43:28dire cela et est-ce que ce serait
43:30pour le coup un bouleversement
43:32du monde dont tout pourrait, d'ailleurs,
43:34se réjouir ?
43:36Remerciez de lier tous les livres. En réalité,
43:38c'est un clin d'œil nul, les Prophètes en son pays
43:40comme vous le savez.
43:42Un mot très vite sur la Syrie.
43:44En effet, les troupes
43:46de HTS, c'est très très peu de monde.
43:48Ils ont bénéficié surtout
43:50de l'effondrement du système de l'armée
43:52clochardisé de Bachar.
43:54On en a parlé tout à l'heure
43:56du départ des Iraniens, des
43:58Hezbollahs, etc.
44:00En auraient-ils les moyens ? Ils n'ont pas
44:02la capacité aujourd'hui d'affronter les
44:04différentes milices. Et du reste, les
44:06Alaouites sont dans leur montagne, les Kurdes
44:08dans leur montagne. Le Sud,
44:10il y a une milice autonome. Donc, effectivement,
44:12la question aujourd'hui, ça va être déjà
44:14la capacité d'un pouvoir
44:16central à assurer l'ordre. Et on a déjà vu
44:18ce que ça donnait dans le passé. Donc, il y a une véritable
44:20inquiétude, en effet. Sur l'Iran,
44:22alors,
44:24l'Iran,
44:26aujourd'hui, est à bout de souffle.
44:28L'axe de la résistance est dans
44:30les choux. Les derniers
44:32qui tenaient encore à côté,
44:34c'était l'Irak. Or, aujourd'hui,
44:36l'Irak, voyant l'affaiblissement de l'Iran,
44:38le président
44:40irakien, qui tient quand même à avoir de bons
44:42rapports avec les États-Unis, a réussi à empêcher
44:44les milices chiites
44:46irakiennes de continuer à tirer sur
44:48Israël. Il ne leur reste plus que les outils.
44:50Les outils qui
44:52tirent sur Israël, sur lesquels
44:54on ne peut pas faire grand-chose, parce que
44:56la société yéménite vit
44:58dans un état assez frustre.
45:00Il n'y a pas d'infrastructures,
45:02internet, etc. Elles sont habituées à vivre
45:04dans une économie de subsistance.
45:06Et donc, la manière dont on fait la guerre
45:08en détruisant
45:10les infrastructures ne les touche
45:12pas beaucoup. Les saoudiens
45:14ont fait une guerre gigantesque
45:16contre les outils, qui ne représentent rien
45:18en termes de
45:20financiers, et ils n'ont pas
45:22gagné. Alors,
45:24aujourd'hui, l'Iran
45:26attend beaucoup
45:28de la perspective que la Russie
45:30l'aide à franchir le pas vers
45:32l'arme nucléaire. Et
45:34c'est le sens de la rencontre
45:36ce vendredi à
45:38Moscou, entre Pézéchkian,
45:40le président, et Poutine.
45:42Et c'est évidemment un test
45:44pour les occidentaux et
45:46pour Donald Trump. Parce que
45:48si jamais on donnait
45:50une thèse d'oxygène nucléaire,
45:52si je puis dire, à l'Iran, la donne
45:54serait changée. Je ne pense pas que ça
45:56va se faire. Je pense que
45:58il va s'inscrire dans un autre
46:00deal, c'est-à-dire la question
46:02de l'Ukraine
46:04et de la manière
46:06dont Poutine et
46:08Trump peuvent trouver un
46:10arrangement sur cette situation.
46:12Aujourd'hui, globalement,
46:14les Ukrainiens ont fait leur deuil
46:16des provinces russophones, à comprendre
46:18ce que disait Lenski. La question
46:20c'est dans quelle mesure la guerre
46:22s'arrête. Est-ce que l'Ukraine qui
46:24restera va entrer ou non dans l'OTAN ?
46:26Donc ce sont, si vous voulez, le
46:28Moyen-Orient, si j'ose citer
46:30un livre dont vous avez parlé, est vraiment au cœur
46:32aujourd'hui du bouleversement
46:34du monde. Et je crois
46:36que l'émission doit s'arrêter.
46:38Vous êtes vraiment très très fort
46:40en promo, Gilles Kepel.
46:42Vous avez réussi à citer votre
46:44livre avant la fin.
46:46Je le rappelle, le bouleversement du monde.
46:48La presse est octobre, c'est aux éditions Plon.
46:50Merci d'avoir été avec nous, Gilles Kepel.
46:52Merci Aurélie Pierello. Je sais, c'est
46:54frustrant. On pourrait faire
46:56plusieurs émissions, mais vous serez
46:58invités tous les deux. On se retrouve
47:00la semaine prochaine pour un nouveau numéro.
47:02Dans toute vérité, à bientôt !

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