Avec Thierry Lalet, président de la Confédération des Chocolatiers et Confiseurs, Arnaud Larher, Meilleur ouvrier de France et pâtissier et chocolatier, Vincent Guerlais, pâtissier et chocolatier et président de Relais-Desserts International et Daniel Mercier, président de l'Association des Chocolatiers Engagés.
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00:00 10h11, Fergnaud fait le marché.
00:02 - Le Salon du chocolat est ouvert à Paris depuis hier,
00:06 et il se prolonge jusqu'à mercredi 1er novembre au soir.
00:09 Vous avez le temps d'aller faire même des achats pour Noël.
00:12 J'en connais qui stockent, parce que l'avantage du chocolat,
00:15 c'est que ça se conserve bien.
00:16 En tout cas, un mois et demi, ça c'est sans aucun problème,
00:19 si c'est pas trop chaud.
00:20 Mais en ce moment, il fait pas trop chaud, alors ça tombe bien.
00:23 J'étais avec Thierry Lallet, qui est toujours avec nous en studio,
00:26 le président de la Confédération des chocolatiers et confiseurs.
00:29 Chocolatier, confiseur et ?
00:32 - C'est tout. - C'est tout.
00:33 - Juge de France. - Hein ?
00:34 - Juge de France, et on est bon. - De France, on est pas mal.
00:38 Et il a été rejoint à l'instant par Vincent Guerlet.
00:41 Bonjour Vincent Guerlet.
00:42 Chocolatier nantais,
00:44 et également président de Relais Desserts International.
00:47 On va en parler dans un instant.
00:49 Un de ses membres éminents parisiens, mais venu de Bretagne,
00:53 Arnaud Larère. Bonjour Arnaud Larère.
00:55 - Bonjour Vincent.
00:56 - Meilleur ouvrier de France également dans la pâtisserie lui.
01:00 Mais bon, la chocolaterie c'est jamais très loin non plus.
01:02 C'est ce qu'on va expliquer pendant cette émission.
01:05 Pourquoi est-ce qu'il y a cette collusion ?
01:07 On le voit bien sur le Salon du chocolat.
01:09 Alors messieurs, on parlait avec Thierry du fait que la pâtisserie était un métier,
01:15 ça on le sait, artisanal.
01:16 La chocolaterie est devenue un métier,
01:20 alors que souvent c'était une diversification.
01:23 Ou alors ça rentrait dans le grand panier des produits sucrés.
01:28 Aujourd'hui c'est un métier à part entière.
01:29 Alors vous Vincent Guerley, vous vous définissez comme chocolatier avant tout ?
01:33 - Oui comme chocolatier, mais pâtissier aussi.
01:35 Moi j'ai fait une formation à la base de pâtissier,
01:37 et puis je suis venu à la chocolaterie comme beaucoup d'entre nous souvent.
01:42 Et c'est vrai que la chocolaterie est un métier différent.
01:47 Moi j'ai souvent l'habitude de dire que quand j'ai commencé la chocolaterie,
01:50 je faisais des chocolats de pâtissier.
01:52 Et puis après, petit à petit, j'ai appris à faire des chocolats de chocolatier.
01:55 - Et puis il ne faut pas oublier, puisqu'on le citait tout à l'heure,
01:58 on prenait l'exemple de Bordeaux et évidemment de l'Aquitaine,
02:02 dire que Nantes c'était aussi un grand port, enfin Nantes et Saint-Nazaire,
02:06 une grande fenêtre de la fève de cacao qui rentrait en France.
02:10 C'est important lorsqu'on est intéressé à la matière première,
02:15 quand on fait son sourcing, comme on dit,
02:17 il faut aller chercher la fève là où elle se trouve.
02:19 - Oui c'est ça, c'est vrai qu'on avait les bateaux qui venaient avec du cacao,
02:23 avec du rhum, avec du sucre à l'époque.
02:25 Et puis voilà, c'est pour ça que toute la région, on va dire, atlantique était...
02:32 - Favorisée un petit peu au cacao.
02:34 - Oui, pour l'importation.
02:36 Arnaud Larrère, aujourd'hui ça a bien changé.
02:39 Tous ceux qui font du chocolat vont maintenant voyager dans le monde.
02:43 C'est tous des gringos les chocolatiers.
02:45 Non mais c'est vrai !
02:46 Ils achètent largement quand même sur les marchés européens,
02:50 mais ils ont quand même cette tendance à aller vers les pays producteurs,
02:55 s'intéresser aux produits de base.
02:58 - Oui c'est une chance.
03:00 Quand on a démarré le métier, on recevait le chocolat,
03:02 mais on ne savait pas vraiment comment il était fait au départ,
03:07 comment était faite la culture.
03:09 Et grâce à nos métiers, on a pu voyager comme Vincent,
03:13 aller dans différents pays, que ce soit au Cameroun ou au Brésil,
03:17 pour voir un peu comment ça se passe.
03:19 Et c'est vrai que c'est enrichissant déjà, parce que ça permet de voir les choses.
03:23 Et en plus, on s'est aperçu aussi que quand on arrive là-bas,
03:26 les gens ne connaissent pas le chocolat.
03:29 Donc on leur a fait...
03:30 - Oui, ils connaissent le cacao, mais le produit final, le bout de la chaîne,
03:35 ils ne le connaissent pas.
03:35 - Donc on leur a fait goûter du chocolat.
03:37 - On en parlera tout à l'heure, on recevra Daniel Mercier,
03:39 le président de l'association des chocolatiers engagés.
03:42 Mais ça, pour l'instant, ce que je veux, c'est aller au cœur du salon, Thierry Lallet.
03:47 Alors ce salon du chocolat, d'abord, est-ce que c'est un événement important ?
03:51 Alors, il l'est pour le public,
03:52 est-ce que c'est un événement important pour la profession ?
03:55 - Oui, c'est un événement très important pour la profession,
03:58 parce qu'en fait, il réunit une grande partie des professionnels.
04:03 On pourrait dire que c'est la grande messe du chocolat.
04:05 - Alors, je ne veux pas faire le chagrin,
04:07 mais on voit qu'il y en a beaucoup qui ont abandonné aussi le salon du chocolat.
04:11 Il y a des grands chocolatiers, je pense à Jean-Paul Evain,
04:13 qui était un historique, par exemple, de ce salon,
04:15 ils n'y viennent plus.
04:16 - Oui, alors après, c'est des choix, je pense que...
04:20 Voilà, peut-être que...
04:22 Enfin, c'est aussi des nouvelles générations qui arrivent.
04:24 Il y a des piliers forts, et qui sont sur ton plateau d'ailleurs, aujourd'hui.
04:29 - Oui, Vincent Garelet, Kéla, Arnaud, tout ça,
04:31 ils sont plantés dans les pieds, plantés dedans.
04:34 - Et puis, il y en a de passage, qui tentent,
04:36 et puis il y en a qui, par des problèmes d'organisation...
04:40 Mais, n'empêche que, même si tu n'as pas de stand,
04:44 tu les vois passer.
04:45 Ils viennent, ils viennent.
04:46 C'est un moyen aussi de se revoir, parce qu'on est tous...
04:49 - C'est la famille.
04:50 - C'est la famille, on a tous la tête dans le guidon,
04:52 on n'a pas forcément...
04:52 - Non, dans la tempéreuse.
04:54 - Ou dans la tempéreuse, et on ressort chocolat.
04:58 Mais, voilà, donc ça reste un événement,
05:01 et il est, au-delà de l'événement national,
05:04 il est international.
05:06 Dans le sens où on voit des...
05:10 à la fois des consommateurs, mais des clients,
05:12 des choses du monde entier,
05:15 qui viennent pour cet événement-là.
05:16 Donc, c'est vrai que, très honnêtement,
05:18 je ne connais pas d'autres salons autour du chocolat
05:22 qui réunissent autant de personnes et de diversification.
05:25 - Il y en a des régionaux, il y a celui de Lyon,
05:27 je ne sais pas, il y a même un Bastia,
05:29 je veux dire, il y a des salons de chocolat partout.
05:30 - Bien sûr qu'il y a des salons de chocolat partout,
05:32 mais celui de Paris a ce côté un peu féerique aussi,
05:36 parce qu'il y a toutes ces animations...
05:40 Voilà, c'est le fameux défilé de robes en chocolat,
05:44 voilà la première fois que ça a été lancé au Salon du chocolat.
05:47 - On attend tous que ça fonde pour voir les filles qui sont en dessous,
05:50 c'est un peu ça l'histoire, non ?
05:52 Non, non, allez, je plaisante bien, on s'en débute.
05:54 - Vincent Guerlet, on va avoir des soucis !
05:57 - Votre association, les Relais Desserts Internationales,
06:01 eh bien, c'est une association qui regroupe
06:04 des pâtissiers et des chocolatiers,
06:06 c'est un peu, moi j'ai envie de dire souvent,
06:08 un peu le haut du panier, en tout cas,
06:09 vous vous co-optez entre vous pour avoir vraiment une qualité
06:13 qui soit vraiment optimale.
06:15 Quelle est l'importance du chocolat par rapport à la pâtisserie ?
06:18 Autant de chocolatiers que de pâtissiers dans l'association ?
06:21 - Oui, aujourd'hui, à la base, c'était une association de pâtissiers,
06:25 des relais desserts, qui était historiquement la mode d'or,
06:28 donc mode d'or pour le beurre.
06:29 - Ah, ça s'appelait...
06:30 - Oui, c'est pour ça que le Nantais s'y intéressait depuis longtemps !
06:34 Mais aujourd'hui, voilà, parmi tous les membres relais desserts,
06:39 tout le monde fait du chocolat.
06:40 Je ne connais pas un seul membre qui n'a pas une activité chocolat
06:44 dans son entreprise.
06:45 - Ce que vous dites, c'est que ça n'aurait pas de sens
06:46 pour un pâtissier aujourd'hui d'écarter le chocolat ?
06:49 - Bien sûr ! - Pourquoi ?
06:50 - Parce que le chocolat, comme tu disais tout à l'heure,
06:53 historiquement, il y avait quelques chocolatiers dans des grandes villes,
06:57 mais le chocolat était un produit qui était très peu accessible
07:00 au grand public.
07:01 Il y avait une certaine élite qui pouvait trouver ce chocolat.
07:03 - Ou alors de l'industriel, mais qui n'était pas à la hauteur
07:05 de ce qu'on attendait.
07:06 - Et puis après, on avait le chocolat à Pâques,
07:09 dans la boulangerie locale.
07:12 Et puis, petit à petit, la pâtisserie,
07:15 puisqu'on est quand même sur des métiers similaires,
07:17 on va dire qu'on est cousins très proches,
07:20 se sont mis à faire du chocolat de plus en plus.
07:22 Et puis, il y a eu de la demande de plus en plus forte aussi.
07:24 Parce qu'aujourd'hui, on vend du chocolat toute l'année, même l'été.
07:27 Nous, on est ouvert toute l'année,
07:28 et on vend très bien du chocolat au mois de juillet comme au mois d'août.
07:32 - Ah bah oui, il n'y a plus de saison pour le chocolat !
07:34 - Voilà. Donc c'est vrai qu'aujourd'hui,
07:36 les relais-desserts, c'est également la pâtisserie
07:39 et la chocolaterie ensemble.
07:41 - C'est très bien.
07:42 - Arnaud Larrère, est-ce que ça fait sens ?
07:44 Parce que moi, je comprends le point de vue du Nantais,
07:48 du Bordelais, de venir au Salon de Paris,
07:50 c'est un peu la vitrine de son activité.
07:52 Mais quand on a des boutiques à Paris,
07:54 est-ce que ça vaut quand même le coup de venir au Sandwich Chocolat ?
07:57 - Ah bah oui, comme on disait déjà, pour voir les copains,
08:02 voir aussi les gens de la profession.
08:04 - C'est un peu comme le Salon d'agriculture,
08:06 toute proportion gardée, on monte au salon,
08:08 et puis le soir, on se retourne, on boit un coup ensemble,
08:10 enfin, ça permet de parler.
08:11 - C'est commercial, mais c'est...
08:13 Bien sûr que c'est une opération commerciale, c'est important,
08:15 et puis ça fait la promotion du chocolat.
08:17 Mais c'est aussi bien d'échanger avec des gens du métier,
08:19 parce que ça nous permet aussi de grandir,
08:21 de voir aussi ce que chacun fait.
08:23 - Et puis tous les deux ans, il y a des concours.
08:26 Tous les deux ans, il y a des concours.
08:27 - Oui, oui, tous les deux ans, il y a des concours.
08:29 Donc ça fait aussi venir des gens qui ont peut-être envie de rentrer dans le métier,
08:34 parce qu'il y a aussi des jeunes, des futurs apprentis,
08:37 ou des fois des parents qui viennent nous parler,
08:39 pour savoir un peu comment se passe le métier.
08:41 Donc c'est aussi un lieu très convivial et d'échange,
08:43 et le fait qu'on soit à Paris, ça génère beaucoup de monde,
08:47 donc pour nous, c'est important.
08:49 - Vous, sur le Sandwich Chocolat, votre stand,
08:52 quelle est la part que vous laissez à la pâtisserie,
08:54 versus le chocolat, le bonbon de chocolat, comme on dit,
08:57 ou la tablette de chocolat, c'est-à-dire le pur chocolat ?
08:59 - Ce qu'on vend le plus sur le stand, c'est quand même les boîtes de bonbons au chocolat,
09:04 parce que même si je suis de Paris,
09:06 tout le monde ne le connaît pas à Paris.
09:09 - Tout le monde ne montre pas à Montmartre !
09:10 - Voilà, tout le monde ne montre pas à Montmartre,
09:12 donc on a aussi besoin de se faire connaître.
09:14 Et donc c'est vrai que les gens, on leur explique
09:17 que quand ils ont besoin de, s'ils veulent vraiment connaître la maison,
09:21 un peu comme tous les chocolatiers, c'est de prendre un coffret assorti,
09:24 qui vous permet de connaître un peu les signatures chocolat de la maison.
09:27 - Parlons un petit peu technique, Vincent Guerlain,
09:30 on l'a dit, c'est deux métiers différents,
09:32 on a besoin d'un matériel.
09:35 Quand on fait de la chocolaterie, c'est pas le labo de pâtisserie.
09:38 Donc ça veut dire qu'il faut de la place, il faut du matériel, il faut des machines,
09:41 parce que la découpe, l'emballage, etc., c'est un investissement quand même.
09:45 - Oui, oui, c'est un investissement.
09:47 C'est vrai qu'on ne va pas travailler le chocolat dans le même environnement
09:51 où on fait les croissants, juste à côté,
09:53 ça c'est pas possible, on a des températures respectées,
09:56 des taux d'hygrométrie également.
09:58 - Donc on le disait, l'eau est l'ennemi du chocolat.
10:01 - Oui, totalement.
10:02 - Donc là, un jour pluvieux comme celui-ci à Paris,
10:05 on va pouvoir les manger à l'intérieur,
10:07 va bien falloir les emballer pour ceux qui partiront avec.
10:10 - Mais c'est vrai que, oui, ça demande de...
10:13 Mais hormis déjà, sans parler des locaux et du matériel,
10:17 c'est déjà aussi un savoir-faire qui est aussi différent.
10:21 On travaille les mêmes ingrédients,
10:23 principalement la crème, du sucre, le chocolat,
10:26 comme on peut le faire en pâtisserie,
10:27 sauf que là, on est sur un produit qui va rester à température ambiante
10:30 pendant un temps donné, comme tu le disais tout à l'heure.
10:32 Donc là, on travaille sur vraiment une autre technique,
10:35 sur l'activité de l'eau,
10:36 sur savoir comment on va pouvoir conserver ces produits,
10:38 normalement, qui se conservent froid.
10:40 - Bien sûr, qui ne sont pas recuits,
10:41 qui ne sont pas passés au-dessus de 100°C.
10:43 - C'est ça, et puis, c'est avec l'enrobage,
10:45 enfin, c'est toutes ces techniques de chocolatier
10:47 qui fait qu'on arrive à faire des chocolats
10:49 qui soient bons, moelleux,
10:51 et qui se gardent quand même un minimum de temps pour la dégustation.
10:53 - On va continuer à parler de cette activité de chocolatier
10:56 et de la formation, c'est très important,
10:58 avec Thierry Lallet, on va y revenir,
11:00 parce que si vous voulez être chocolatier,
11:02 il y a un petit parcours du combattant quand même à mener,
11:05 mais pour le meilleur, bien entendu.
11:07 Allez, on se retrouve dans quelques poignées de minutes.
11:10 Toujours avec les pointures du chocolat,
11:17 on est dans le labo de Sud Radio,
11:19 un labo de chocolatier, bien entendu,
11:21 puisqu'on parle du salon du chocolat qui se déroule à Paris
11:23 jusqu'à mercredi, et dans lequel vous venez extrêmement nombreux,
11:28 ça ne se dément pas d'année en année, évidemment,
11:30 comme si on avait une appétence,
11:33 comme si ça libérait des inhibitions.
11:35 En fait, en quelque sorte, Thierry Lallet,
11:37 qui est le président de la Confédération,
11:39 on dirait que tout est permis au salon du chocolat.
11:41 Je vois des gens repartir avec des quantités de chocolat hallucinantes !
11:44 Oui, je pense qu'il y en a qui font leur consommation annuelle
11:47 en un week-end.
11:49 C'est vrai que c'est hallucinant,
11:51 mais c'est bien, ça montre bien l'engouement pour cette matière.
11:54 Mais c'est la transgression aussi !
11:57 On dit "on y vient, on y est, on goûte tout, on y va".
12:01 Oui, on se fait plaisir, et puis c'est vrai que
12:03 tous ceux qui sont présents par leur stand,
12:05 ça donne envie, et le chocolat,
12:07 avant de le déguster, de le mettre en bouche,
12:10 on le voit avec les yeux, et il y a quand même,
12:12 qu'on le veuille ou non, un effort de présentation.
12:14 Bien sûr, c'est beau !
12:16 Et donc ça donne envie, et c'est le but.
12:18 Le client, il achète son chocolat,
12:21 d'abord avec ses yeux,
12:23 c'est sûr qu'il a envie de goûter,
12:25 mais si c'est attractif, si le packaging,
12:27 sans trop de packaging,
12:29 mais dès que le produit est visuel,
12:31 qu'il est brillant,
12:33 qu'il a ce côté gourmand,
12:35 les gens foncent dessus !
12:37 Ah, ça j'ai l'impression, on peut le dire !
12:39 On peut dire qu'hier, ils ont foncé dedans !
12:41 Les allées du salon du chocolat !
12:43 Vincent Guerlet,
12:45 président de l'association
12:47 Relais Desserts International,
12:49 est-ce qu'aujourd'hui,
12:51 l'industrie chocolatière,
12:53 un peu comme l'industrie biscuitière,
12:55 talonne l'artisanat ?
12:57 Je veux dire, en termes de qualité.
12:59 Est-ce qu'il y a un gap
13:01 qui a tendance à se réduire entre les deux ?
13:03 Alors, en fait,
13:05 il y a différentes choses.
13:07 L'industrie,
13:09 en fait, travaille beaucoup sur la tablette.
13:11 Donc après,
13:13 là on est sur vraiment une question
13:15 de goût.
13:17 Qu'est-ce qu'on va apporter ?
13:19 C'est à nous d'aller chercher
13:21 peut-être des choses beaucoup plus
13:23 précises, avec des
13:25 micro-lots dans des plantations.
13:27 Des origines, des choses où on va ressortir
13:29 un goût que l'industrie ne peut pas avoir.
13:31 Ou même ce qui rentre dans la tablette aussi !
13:33 Les différents
13:35 fruits,
13:37 les arômes...
13:39 L'industrie nous regarde, en fait.
13:41 On voit l'évolution des tablettes
13:43 depuis 10 ans. L'industrie
13:45 de plus en plus essaye
13:47 de se rapprocher. Après, tout ce qui est bonbons
13:49 de chocolat, là on a
13:51 une véritable avance,
13:53 mais technique, de façon technique.
13:55 Pourquoi ? Parce qu'un industriel va fabriquer
13:57 ses chocolats de Noël à partir
13:59 du mois de juin, peut-être voire même
14:01 avant. Nous, les chocolats
14:03 de Noël vont être faits vraiment
14:05 parce qu'on a une texture.
14:07 Parce que plus un chocolat, quand vous
14:09 le mangez, un praliné, une ganache, va être
14:11 moelleuse, va être fondante, c'est
14:13 parce qu'il y a un équilibre entre l'eau
14:15 qui est contenue dans la matière grasse, dans la
14:17 crème, et le chocolat, qui fait qu'on a ce fondant.
14:19 Si vous voulez des chocolats qui se conservent
14:21 très longtemps, alors déjà
14:23 on peut mettre des conservateurs, on est d'accord, ce qui
14:25 n'est pas dans l'artisanat, mais aussi, il va falloir
14:27 mettre beaucoup plus de matière sèche que de matière
14:29 humide
14:31 pour la conservation. Donc,
14:33 on va avoir un chocolat qui va être totalement
14:35 différent de ce qu'on peut trouver chez un artisan chocolatier.
14:37 Donc, dans ce côté-là,
14:39 il faut... - Et même dans une tablette !
14:41 - Et même dans une tablette de chocolat !
14:43 - C'est vraiment très parlant, entre une
14:45 très bonne tablette industrielle et...
14:47 - Aujourd'hui, tu as des très bonnes
14:49 tablettes industrielles qui commencent à avoir...
14:51 Mais on reste sur la
14:53 tablette. - Oui, d'accord. Parce que dès qu'on
14:55 parle bonbon de chocolat, c'est autre chose.
14:57 Alors, d'ailleurs, on le disait, Arnaud Larère,
14:59 le travail du chocolatier,
15:01 outre la conservation,
15:03 c'est évidemment l'expression
15:05 des arômes, des arômes
15:07 à la fois du chocolat et des intrants,
15:09 que ça peut être du praliné, des ganaches,
15:11 avec des fruits, etc.
15:13 Donc, c'est un travail de
15:15 juxtaposition de saveurs,
15:17 c'est un travail de cuisine,
15:19 enfin, j'ai envie de dire de cuisine au sens large.
15:21 - C'est un travail
15:23 de... comment dire ?
15:25 de créativité et de précision.
15:27 Comme disait Vincent,
15:29 la colonne vertébrale,
15:31 c'est aussi
15:33 le produit qui se garde pendant un mois,
15:35 qui ne s'abîme pas. - À température.
15:37 - À température ambiante. - Oui.
15:39 Excusez-moi, je vais dire un gros mot,
15:41 est-ce que les chocolats sont surgelés
15:43 avant de les
15:45 servir ou est-ce que c'est un produit
15:47 qui reste frais tempéré ? - Oui, frais tempéré
15:49 chez moi. - Frais tempéré, ça dépend.
15:51 On peut... Les deux se battent.
15:53 - Les deux, il y a différentes techniques, bien sûr.
15:55 - On sait qu'aujourd'hui,
15:57 excusez-moi, mais tous les pâtissiers
15:59 surgèlent. Enfin, il n'y a plus de
16:01 pâtisserie fraîche,
16:03 à la marge, mais en tout cas,
16:05 la surgélation permet de figer le goût au moment
16:07 où ça a été fait et de le resservir dans les meilleures
16:09 conditions. Et c'est pareil pour le chocolat ?
16:11 - Oui, en fait, le chocolat,
16:13 c'est des choix de chaque entreprise,
16:15 tu peux utiliser en effet la congélation
16:17 pour conserver tes chocolats
16:19 parce que ta production
16:21 est à un moment dans l'année
16:23 en contre-année, parce qu'elle est anticipée
16:25 et que tu sais qu'il y a une forte demande et que tu n'as pas
16:27 forcément la main d'oeuvre
16:29 pour produire,
16:31 mais aussi, tu peux, il y a d'autres techniques
16:33 fabriquées au fur et à mesure,
16:35 suivant... En fait, c'est un peu
16:37 libre à chacun. - En flux tendu.
16:39 - En flux tendu.
16:41 Mais le consommateur le comprendra
16:43 aussi que chez l'artisan,
16:45 si tu arrives le 24 décembre,
16:47 t'es pas forcément
16:49 le panel de bonbons de chocolat
16:51 parce qu'il fait
16:53 de son mieux,
16:55 c'est pareil dans les gâteaux. - Bien sûr.
16:57 On ne va pas engager une équipe 10 fois
16:59 supérieure au moment des fêtes, donc on travaille
17:01 avec les mêmes personnes que l'année.
17:03 - Après, la congélation ou surgélation,
17:05 qu'elle soit en pâtisserie
17:07 ou en chocolaterie, n'est pas négative.
17:09 - Non ! Enfin si, en froid, c'est un froid négatif.
17:11 - C'est pas péjoratif,
17:13 ce que je veux dire, c'est que ça
17:15 peut être un moyen de conservation
17:17 pour répondre à un moment donné
17:19 dans son process de fabrication.
17:21 Mais voilà, y'a pas de...
17:23 - C'est une technique.
17:25 - Ça fait partie des techniques. - Si la matière première
17:27 est bonne, si ce qu'on met dedans est bon,
17:29 c'est comme la conserve, au résultat, c'est bon.
17:31 C'est le produit qui fait la différence.
17:33 - La congélation va pas améliorer ton produit.
17:35 Elle va juste l'arrêter
17:37 de vivre pendant un temps
17:39 pour qu'il dure dans le temps. - Absolument.
17:41 - C'est tout. Maintenant, si au départ,
17:43 c'est pas bon,
17:45 ça restera pas bon, en fait.
17:47 Mais si c'est pas bon sans le congeler,
17:49 ça sera non plus pas bon.
17:51 - On est bien d'accord. - Donc on en revient toujours
17:53 à ces histoires de sourcing, d'aller chercher
17:55 les bons ingrédients et de mettre en oeuvre
17:57 des recettes équilibrées qui permettent
17:59 de sortir un bon chocolat comme un bon gâteau.
18:01 - Thierry Lallet,
18:03 je vais changer de sujet parce que
18:05 on va recevoir, je le vois
18:07 arriver à la borde des studios
18:09 Daniel Mercier pour parler un petit peu
18:11 d'engagement en chocolaterie.
18:13 Ça existe aussi, c'est même important.
18:15 Un mot sur la formation.
18:17 Parce que beaucoup de jeunes qui passent
18:19 - moi je vois beaucoup d'enfants évidemment
18:21 au Salon du chocolat - c'est une vitrine
18:23 extraordinaire, notamment pour le métier.
18:25 Et comment on se forme
18:27 être chocolatier ? Est-ce qu'il faut passer
18:29 par un CAP de pâtisserie ou est-ce qu'on va
18:31 directement à la chocolaterie ? - Aujourd'hui,
18:33 on a le choix. C'est vrai que pendant très très
18:35 longtemps, encore même si c'est la majorité,
18:37 souvent, la première formation,
18:39 c'est le CAP de pâtissier.
18:41 Et puis, ils peuvent faire soit en un an
18:43 un CAP de chocolatier, mais on a
18:45 de plus en plus de jeunes qui arrivent directement
18:47 en CAP chocolatier et qui
18:49 vont spécialiser. Après, soit
18:51 ils vont rester en chocolaterie, ils vont faire
18:53 un brevet technique des métiers en chocolaterie
18:55 ou vont repartir vers la pâtisserie
18:57 sur un brevet technique aussi
18:59 de pâtisserie. Le Salon
19:01 est aussi un moyen d'expliquer
19:03 les formations qu'on a dans nos deux métiers.
19:05 C'est aussi pour ça que
19:07 la Confédération des pâtissiers et la Confédération
19:09 des chocolatiers se sont unis
19:11 sur le Salon du chocolat pour pouvoir répondre
19:13 à la demande de tous les jeunes.
19:15 Hier, on a remis le titre du meilleur
19:17 apprenti de France chocolatier
19:19 sur le Salon du chocolat.
19:21 C'est une jeune fille qui a gagné devant
19:23 dix autres candidats. - Vous vous souvenez de son nom ?
19:25 - Oui, Justine Guenet.
19:27 Voilà. - Et ben bravo Justine !
19:29 - Voilà.
19:31 Donc, oui,
19:33 bien évidemment que
19:35 les professionnels qui sont sur leur stand
19:37 répondent aussi à la demande des jeunes
19:39 qui veulent savoir parce que
19:41 c'est tellement attractif de voir tous ces produits
19:43 que, ben oui, ça donne envie d'aller
19:45 dans ce métier. - Vous avez des demandes,
19:47 Vincent Guerley, sur le Salon, de gens qui
19:49 spontanément font acte de candidature ?
19:51 - Oui, bien sûr. On a des demandes, on a des CV,
19:53 on a des demandes de
19:55 gens qui se disent "Tiens, voilà, justement,
19:57 l'accès ici
19:59 leur permet de dire "Tiens, on aimerait bien,
20:01 on voudrait faire une formation chocolaterie
20:03 directement ou on est pas si mal."
20:05 - Vous avez de la chance parce que vous avez de la descendance.
20:07 - Oui. - Dans la maison, hein.
20:09 - Oui, oui. Mais c'est vrai
20:11 qu'aujourd'hui, on a la chance d'avoir un métier
20:13 attractif. - Oui, bien sûr.
20:15 - Les métiers du sucré sont attractifs.
20:17 Et puis, avec une évolution... - C'est mieux que conducteur
20:19 de bus, hein. J'ai rien contre les conducteurs de bus
20:21 mais, enfin, ça fait plus rêver, quoi.
20:23 - Avec, depuis de nombreuses années,
20:25 maintenant, une amélioration aussi des
20:27 conditions de travail.
20:29 Aujourd'hui, les gens qui viennent travailler chez nous
20:31 ont des horaires... Nous, on est depuis
20:33 5 ans en semaine de 4 jours
20:35 et ça se passe très bien. Et donc, on a
20:37 nos personnels qui ont des week-ends
20:39 récurrents. - Ça redevient possible.
20:41 - C'est une organisation qui,
20:43 aujourd'hui, s'est adaptée
20:45 sur les mêmes bases
20:47 que tout autre métier. Donc, ça ouvre
20:49 aussi des perspectives. On a de plus en plus,
20:51 nous, dans nos labos, de personnels
20:53 féminins parce qu'en fait,
20:55 on est sur des organisations
20:57 avec, aujourd'hui, le métier de chocolatier
20:59 et de pâtissier est ouvert à...
21:01 - Elles sont souvent plus attentives,
21:03 délicates,
21:05 on va dire, avec un oeil...
21:07 - Non mais c'est vrai, les femmes ont un...
21:09 - Je dirais, elles ont un autre regard.
21:11 - Elles ont un autre regard.
21:13 - Mais par contre, je trouve que cette mixité
21:15 dans les laboratoires est très importante aussi
21:17 parce qu'en fait, moi,
21:19 je ne le vois pas en tant que, tiens,
21:21 c'est un ensemble
21:23 et puis, les uns
21:25 font avancer les autres
21:27 et je trouve que ce mélange et cette complexité,
21:29 justement,
21:31 personnels féminins,
21:33 personnels masculins, est un avantage
21:35 pour notre métier. - Et puis, on le voit dans tous les groupes
21:37 humains, sans faire de stéréotypes de genre,
21:39 dès qu'il y a une femme au milieu des hommes, elle les calme.
21:41 Il y a un côté,
21:43 on se tient un petit peu mieux
21:45 devant les femmes
21:47 qu'entre mecs.
21:49 C'est valable dans tous les corps de métier.
21:51 - Chez moi, ma...
21:53 ma chef, c'est ma chef chocolatière,
21:55 elle a fait aussi une robe
21:57 en chocolat pour le salon,
21:59 j'ai pas eu besoin de l'assister,
22:01 j'ai la robe en chocolat, elle l'a fait toute seule.
22:03 - J'espère, dites-donc, si c'est votre chef !
22:05 - Bah oui, mais c'est surtout
22:07 qu'il y a aussi son côté féminin
22:09 ce qui fait que, par rapport à
22:11 un chocolatier qui m'aurait peut-être demandé
22:13 certaines choses, elle l'a fait toute seule
22:15 et elle l'a très bien faite. - C'est génial.
22:17 Moi, je suis ravi de voir les chocolatières
22:19 parce qu'il y en a évidemment beaucoup de talent
22:21 et notamment des patronnes aussi,
22:23 sur le salon.
22:25 À Bordeaux, vous avez Asna...
22:27 - Oui, tout à fait.
22:29 - Au sein de Chocolatier Engagé,
22:31 il y en a une aussi en région bordelaise,
22:33 on voit vraiment
22:35 une féminisation du métier,
22:37 et c'est tant mieux. Mais on le voit y arriver
22:39 parce que déjà, il y a
22:41 10 ans,
22:43 on voit y arriver en formation
22:45 de plus en plus de jeunes filles.
22:47 Donc voilà, 10 ans,
22:49 elles sont formées au moins 2 à 4 ans
22:51 et puis elles sont tournées
22:53 dans des maisons,
22:55 et au bout de 10 ans, oui, elles commencent à s'installer,
22:57 on en voit de plus en plus et c'est très bien.
22:59 - Vous allez voir, dans 2 ans,
23:01 ce ne sera pas ce studio
23:03 d'hommes que nous aurons,
23:05 elles auront pris la place de tous ces messieurs
23:07 et ce sera très bien pour la profession,
23:09 vous le savez.
23:11 On va se retrouver dans une minute
23:13 pour parler d'engagement justement.
23:15 On y était, on était sur un engagement féministe
23:17 et dans le bon sens du terme,
23:19 et on va parler des Chocolatier Engagé
23:21 avec Daniel Mercier qui va nous rejoindre
23:23 parce que ça, c'est une association
23:25 qui ne s'occupe pas que des chocolatiers
23:27 mais aussi des planteurs,
23:29 parce qu'on les oublie un petit peu dans la tablette.
23:31 - Sud Radio. - Je rends direct ce matin
23:33 pour parler du Salon du chocolat
23:35 qui se tient à Paris avec
23:37 les vedettes, les vedettes, c'est les chocolatiers,
23:39 on s'en doute, mais pas seulement.
23:41 Leur préparation, leur merveille
23:43 que l'on trouve dans leur stand aussi.
23:45 Alors, mes amis, ce matin,
23:47 ça a commencé déjà
23:49 à failliter à coups de chocolat,
23:51 ils se balancent des palais,
23:53 des petits Napolitains, des Madeleines
23:55 qui volent dans le studio, mais c'est bien,
23:57 c'est l'ambiance du salon aussi.
23:59 Oui, si, si, absolument.
24:01 Vous ne saviez pas que c'était l'ambiance du salon,
24:03 vous n'avez qu'à aller voir, parce que hier,
24:05 je peux vous dire que dans les allées, c'était pas triste,
24:07 et surtout après les fermetures.
24:09 Mais enfin, je n'ai rien dit.
24:11 Ce matin, Thierry Lallet est avec nous,
24:13 c'est le président de la Confédération des chocolatiers
24:15 et confiseurs, parce que c'est le même métier,
24:17 Vincent Guerlet,
24:19 chocolatier à Nantes, chocolatier pâtissier à Nantes,
24:21 et surtout président de Relais Desserts International,
24:23 qui est une belle association,
24:25 vice-président aujourd'hui,
24:27 - Pierre Hermé.
24:29 - Ah oui, je le connais, oui, c'est pour être sûr.
24:31 En face de lui,
24:33 Arnaud Larère, meilleur ouvrier de France,
24:35 pâtissier, mais chocolatier également,
24:37 est présent sur le salon du chocolat cette année,
24:39 et nous a rejoint en studio
24:41 un homme engagé, figurez-vous,
24:43 chocolatier de métier,
24:45 Daniel Mercier. Bonjour Daniel.
24:47 - Bonjour, bonjour à tous.
24:49 - Vous vous êtes fait venir, Daniel, parce que
24:51 vous aussi, évidemment, vous êtes un chocolatier
24:53 émérite, et pour autant,
24:55 vous vous êtes dit à un moment de votre vie,
24:57 on ne peut pas laisser de côté
24:59 la production de cacao.
25:03 Très longtemps, on a un peu
25:05 fermé les yeux sur l'origine,
25:07 c'est-à-dire sur les planteurs,
25:09 il y a eu une tension sur le marché énorme,
25:11 à un moment, tout le monde s'en était ému
25:13 en disant "Oh, on ne va peut-être plus avoir de cacao",
25:15 et tout d'un coup, les gens se sont rendus compte
25:17 qu'il ne faudrait peut-être pas étrangler
25:19 les planteurs comme on le fait parfois
25:21 avec nos paysans en France.
25:23 - Moi, j'aimerais raconter que mon grand-père,
25:25 en 1912, fabriquait du chocolat.
25:27 C'était du noir ou du lait, mais il ne savait pas d'où ça venait.
25:29 Papa travaillait le chocolat,
25:31 c'était du 65, du 70%,
25:33 mais il ne savait pas à quel été...
25:35 - C'est comme si on faisait du vin rouge ou du vin blanc,
25:37 sans rien dire de plus. - Il ne connaissait pas la provenance.
25:39 Nous, maintenant, moi,
25:41 il y a 20 ans, j'entends "On va manquer
25:43 de cacao si les Chinois se mettent à manger
25:45 du chocolat, on va manquer de cacao
25:47 dans le monde". Donc, quand tu es chocolatier, moi, je suis chocolatier pur.
25:49 - Pur en origine. - C'est ta matière
25:53 première, donc, clairement, tu ne peux pas
25:55 t'en passer. Donc, on a acquis
25:57 des premières terres au Mexique, on a monté
25:59 une ferme là-bas, et là, mes enfants
26:01 m'ont dit "C'est bien, papa, on a notre ferme,
26:03 on a notre approvisionnement, mais on fait quoi pour les planteurs ?"
26:05 Et c'est là, au sein
26:07 de la Confédération, avec Thierry, avec
26:09 quelques autres copains... - Oui, à l'origine, c'est la Confédération
26:11 qui a été un peu le... - Nous sommes
26:13 tous élus de la Confédération, moi, je suis le vice-président
26:15 de M. Thierry Lalet.
26:17 - Et je suis son vice-président pour chocolatier
26:19 engagé, par contre. - Ça sent le
26:21 népoptisme !
26:23 - Un grand choix de bon amour !
26:25 - S'il vous plaît, s'il vous plaît.
26:27 - Et là, on s'est dit "Comment est-ce qu'on peut créer
26:29 une aspérité pour les chocolatiers ?
26:31 Et comment est-ce qu'on peut faire pour aider
26:33 les planteurs et comprendre
26:35 leurs problématiques que le circuit course ?"
26:37 Ce que disait Arnaud, tout à l'heure, on ne peut plus ignorer
26:39 les planteurs. Et là, nous sommes
26:41 rendus dans différents pays,
26:43 dont le Cameroun, et là, on a rencontré
26:45 des planteurs, on s'est rendu compte que ces gens
26:47 vivaient une véritable misère. C'est-à-dire, ils touchaient
26:49 moins d'un dollar le kilo. Là où nous,
26:51 on vend nos chocolats
26:53 près de 100 euros le kilo,
26:55 vous l'avez vu hier au Salon du chocolat,
26:57 moins d'un pour cent de la valeur
26:59 est perçue par les planteurs. Et tout ça,
27:01 pourquoi ? Parce que c'est en gros
27:03 deux à trois intermédiaires
27:05 qui achètent 70% et 80%
27:07 du cacao dans le monde. Si je vous cite, par exemple,
27:09 Olam, vous ne connaissez pas, mais c'est un des
27:11 plus gros acteurs du cacao dans le monde.
27:13 Le deuxième, c'est Cargill, que le
27:15 grand public ne connaît pas non plus. - Cargill, on connaît,
27:17 parce qu'ils ne font pas que du chocolat.
27:19 - Mais ce sont des
27:21 grands acteurs de l'importation,
27:23 et donc, on ne connaît pas la traçabilité,
27:25 on n'a aucune traçabilité là-dessus
27:27 sur la provenance du cacao. Donc nous,
27:29 on s'est dit, comment est-ce qu'on peut rapprocher
27:31 les chocolatiers des planteurs ?
27:33 Donc, c'est là où le
27:35 travail s'est effectué sur le terrain.
27:37 - Mais Daniel, les
27:39 grands acheteurs que vous citez, ils travaillent aussi
27:41 pour des grands faiseurs. - Bien sûr.
27:43 - Ceux qui vont fournir Nestlé, ceux qui vont
27:45 fournir Mars, qui vont fournir
27:47 les grands groupes. - Bien sûr, évidemment.
27:49 Non mais attendez, moi je ne veux pas
27:51 créer de conflits
27:53 entre l'industrie
27:55 et l'artisanat.
27:57 Ce que disait Vincent tout à l'heure,
27:59 l'industrie a très fortement progressé.
28:01 C'est de mieux en mieux.
28:03 Sauf que nous, à un moment donné, on se dit
28:05 le cours du cacao
28:07 ne nous intéresse pas.
28:09 C'est le prix de revient du cacao qui nous intéresse.
28:11 Récemment, on a fait
28:13 une conférence de presse au Cameroun.
28:15 Les journalistes là-bas
28:17 nous disent "mais vous êtes tombés amoureux du Cameroun,
28:19 des Camerounais, des choses comme ça". Non, non.
28:21 Les Camerounais sont plus heureux
28:23 à Yaoundé que porte de la chapelle à Paris.
28:25 Ce n'est pas politiquement correct de dire ça. Mais quand on
28:27 parle d'immigration, les gens veulent juste vivre dignement
28:29 leur métier. Donc qu'est-ce que nous avons fait ?
28:31 Chocolatier engagé, nous sommes intéressés
28:33 aux prix de revient. Quelles étaient
28:35 les façons culturales ? Quels sont les prix de revient ?
28:37 Les prix de revient, par exemple, si je prends
28:39 le Cameroun, sur une ferme
28:41 dont le modèle économique doit être de 3 hectares,
28:43 c'est le modèle rentable,
28:45 avec une production moyenne de 800 kilos
28:47 par hectare, le prix
28:49 de revient est de 950 francs CFA.
28:51 1,30€ à peu près.
28:53 Or, les cours, jusqu'à maintenant,
28:55 étaient entre 600 et 700 francs CFA.
28:57 C'est-à-dire 70 à 80 centimes
28:59 le kilo. - Vous êtes en train de dire qu'on
29:01 pomme du blé sur chaque kilo de cacao.
29:03 - On pomme du blé, mais il y en a d'autres. En France,
29:05 c'est pas mieux pour certains de nos agriculteurs.
29:07 - Mais ils ont des aides ici.
29:09 - Et s'ils ont des aides là-bas, ils n'en ont pas. - Il n'y a rien.
29:11 - Ce qui explique que 85% des planteurs
29:13 vivent en dessous du seuil de pauvreté
29:15 ou au seuil de pauvreté. Est-ce que c'est tolérable ?
29:17 Est-ce que c'est acceptable ? Est-ce que c'est durable ?
29:19 - Daniel Mercier ? - Nous, nous avons dit non.
29:21 - C'est bien de dire non.
29:23 Pour autant, vous me parlez du Cameroun.
29:25 Le grand pays producteur,
29:27 ça reste la Côte d'Ivoire. - Ça reste la Côte d'Ivoire et le Ghana.
29:29 - Le Ghana, c'est-à-dire vraiment l'Afrique de l'Ouest.
29:31 - Bien sûr. - Sur l'Atlantique.
29:33 Est-ce que, eux aussi,
29:35 vous travaillez chez eux ?
29:37 - Alors on est en train de... Attendez, si vous voulez, Choco a été engagé.
29:39 L'idée, ça a été de
29:41 mettre les fondements. Donc,
29:43 Vincent, Thierry, Arnaud sont venus là-bas.
29:45 Moi, je repars l'insemble du prochain.
29:47 - Vous les améliorez, tous les trois, là, au Cameroun ?
29:49 - Oui, oui, oui. Il faut bien les emmener.
29:51 - Il faut bien les sortir. - Il faut montrer.
29:53 - Non, parce que,
29:55 ce qui est important à savoir, c'est que,
29:57 il y a 10 ans, 99%
29:59 des chocolatiers n'avaient jamais vu un champ
30:01 de cacao. Et dans le même temps,
30:03 99% des planteurs de cacao
30:05 n'ont jamais mangé un carré de chocolat.
30:07 Donc, le décalage n'est pas que chez les planteurs,
30:09 il était aussi chez les chocolatiers.
30:11 - C'est carrément un schisme. Il y a un rift
30:13 entre le producteur de cacao et le chocolatier.
30:15 - C'est important de montrer
30:17 les plantations,
30:19 d'expliquer comment est-ce que c'est produit,
30:21 d'emmener justement les chocolatiers
30:23 pour qu'ils prennent conscience de cela. Et de leur dire,
30:25 ben voilà. Donc, on a démarré par le Cameroun,
30:27 parce que c'était ça ta question, Vincent,
30:29 on a démarré par le Cameroun, on a
30:31 exploré également avec une autre bande
30:33 qui sont pas autour de cette table
30:35 aujourd'hui, mais des Alain Chartier
30:37 et des Pierre Mirgallet, que tu dois connaître.
30:39 - Alors, Alain Chartier, glacier, en Bretagne,
30:41 Pierre Mirgallet, ex-président
30:43 de la Confédération des Pâtissiers,
30:45 qui est lui aussi un Aquitain.
30:47 - Et nous, nous sommes allés
30:49 aux Libéria, nous avons fait aussi
30:51 une exploration au Togo, au
30:53 Bénin, en Bolivie,
30:55 en Colombie,
30:57 en République Dominicaine.
30:59 - Vous avez encore le temps de faire du chocolat, vous, tout ça ?
31:01 - Absolument.
31:03 - Non, mais je vous le demande, parce que
31:05 vous parlez tellement de pays, vous passez la moitié de l'année sur le...
31:07 - Je suis 4 à 5 mois par an
31:09 sur les plantations de cacao,
31:11 en tant que bénévole, bien évidemment, mais c'est
31:13 essentiel pour aller chercher justement ce cacao.
31:15 J'ai la chance d'avoir une très très belle brigade
31:17 avec moi, mon fils également
31:19 et ma fille, qui sont... Moi aussi,
31:21 j'ai une belle descendance, donc qui assure
31:23 les choses, et j'ai surtout
31:25 la chance d'avoir une compagne qui est très
31:27 tolérante avec moi.
31:29 - Merci Hélène. - Merci à elle.
31:31 - Thierry Lallet, moi je me pose
31:33 une question, et écoutez ce que nous dit Daniel Mercier,
31:35 je connais la réponse,
31:37 mais j'ai le sentiment
31:39 à avoir vu comment les gens
31:41 achètent, qu'ils sont de plus en plus sensibles
31:43 évidemment à une...
31:45 on va dire à un comportement éthique
31:47 des chocolatiers,
31:49 ils sont de plus en plus sensibles, évidemment
31:51 à la sauvegarde de la planète,
31:53 donc savoir comment il cacao derrière
31:55 le chocolat, mais surtout comment on traite
31:57 les planteurs. - Oui, il y a
31:59 une prise de conscience, en fait cette prise de conscience
32:01 elle est générale, je pense qu'aujourd'hui
32:03 c'est un mouvement
32:05 qui s'est créé, il est venu
32:07 aussi des professionnels,
32:09 parce qu'on faisait la traçabilité
32:11 de nos noisettes, de nos amandes, on racontait
32:13 des belles histoires sur les producteurs avec lesquels on
32:15 travaillait, sur les amandes, pourquoi le chocolat on ne pouvait
32:17 pas le mettre, et tout ça, à force de l'exposer
32:19 en fait aux clients,
32:21 à un moment il fallait bien aussi qu'on
32:23 justifie notre chocolat, parce qu'ils
32:25 entendaient "ah ben ça y est,
32:27 le chocolat c'est pas bon pour la planète,
32:29 attendez, si, c'est peut-être pas...
32:31 - Le travail des enfants, la déforestation... - Les choses comme ça,
32:33 donc il a fallu aussi prendre nous
32:35 en tant que professionnels, le problème
32:37 à bras le corps, et
32:39 à un moment, c'est pas suffisant
32:41 d'avoir un beau dialogue, il faut pouvoir le justifier.
32:43 Et avec Chocolatier
32:45 Engagé, et des partenaires
32:47 comme les Relais Desserts,
32:49 et d'autres professionnels,
32:51 ou la Confédération des pâtissiers, des choses comme ça,
32:53 c'est de se dire "ben attention, maintenant,
32:55 voilà, on veut du chocolat,
32:57 mais on veut que ce chocolat
32:59 on puisse justifier que... - Qu'on en ait pas honte,
33:01 quoi, en quelque sorte. - Qu'on en ait pas honte, en fait,
33:03 et qu'on se dise pas... - Qu'on a tué
33:05 des populations pour plaire
33:07 à notre Occident, quoi. - Ouais, mais moi je vois
33:09 aussi avec tous les initiatives qu'on fait dans l'artisanat,
33:11 justement, comme tu dis, d'avoir le sourcing
33:13 sur les produits, les fruits secs,
33:15 les fruits, les purées... - Vous voulez dire, en haut l'arrière,
33:17 qu'il faudrait être aussi pâtissier engagé,
33:19 il faudrait être aussi cuisinier engagé ? - Non, mais ce que
33:21 je vois, c'est, comme Vincent disait
33:23 tout à l'heure, c'est que derrière, les industriels, ça les
33:25 secoue un petit peu aussi. - Ouais. - Voilà. Parce que avant,
33:27 comme disait, c'était une plaque chocolat noir,
33:29 lait, choisissez votre couleur,
33:31 et terminé. Nous, on
33:33 secoue un peu le panier, et on voit que derrière,
33:35 les industriels commencent maintenant à avoir aussi
33:37 des... - Bah parce que c'est la demande du public !
33:39 - Voilà, et puis ce qu'il faut voir, c'est que nous,
33:41 chocolatiers, on est...
33:43 une petite goutte dans cet
33:45 océan. Donc, en fait,
33:47 le problème, il faut le montrer,
33:49 voilà, il faut lancer l'alerte,
33:51 pour que derrière, la
33:53 grosse majorité du chocolat qui est acheté
33:55 dans le monde par l'industrie, bah, suivent
33:57 aussi ces critères
33:59 qui vont pouvoir amener
34:01 à une quiétude et quelque chose de
34:03 mieux pour les planteurs et les plantations.
34:05 - Oui, ça serait pas mal, oui, tirer la lettre ?
34:07 - Non, non, juste cette petite goutte, en fait,
34:09 comme dit Vincent, au Cameroun,
34:11 ça a été un raz-de-marée.
34:13 Pour le Cameroun, pour les planteurs... - Pour le Cameroun,
34:15 ça a changé la situation ? - Ah mais ça a complètement changé
34:17 la situation ! - Bien sûr, le cacao du Cameroun,
34:19 jusqu'à maintenant, était décoté sur la place
34:21 internationale, par rapport au cacao
34:23 du Ghana, par exemple, qui subissait une surcote.
34:25 - Pourquoi ? Parce qu'il y avait une
34:27 antériorité du Ghana et de la Côte d'Ivoire ? - Oui, parce que c'était un cacao de
34:29 beurre, c'est un cacao de beurre qui
34:31 n'avait aucune réputation. - De quoi ?
34:33 - De beurre que sert pour faire de l'assemblage,
34:35 pour faire du tournant,
34:37 - Ah oui, du bled quoi, pour faire des M&M's.
34:39 - C'est comme la tablette la moins chère du marché.
34:41 - C'est comme la vanille rouge de Madagascar,
34:43 par rapport à la noire fondue, c'est du
34:45 produit industriel. - Depuis
34:47 le 2
34:49 juillet de cette année,
34:51 le cacao du Cameroun
34:53 est devenu,
34:55 est été classé "Flying Fever", donc dans les 5%
34:57 - Et c'est grâce à vous, ça ? - des meilleurs cacaos du monde.
34:59 C'est pas forcément grâce à nous, mais
35:01 c'est un ensemble. - Parce qu'on a parlé du cacao du Cameroun,
35:03 parce qu'on a dit qu'on était d'accord
35:05 de payer le cacao plus cher, de doubler
35:07 le prix du cacao, à condition
35:09 qu'il subisse un traitement post-récolte,
35:11 bien séché, bien fermenté,
35:13 et ça, ça a permis d'élever le niveau.
35:15 - Voilà, si vous voulez apporter
35:17 votre savoir, ou même vos subsides
35:19 à l'association des chocolatiers
35:21 engagés, ça doit être faisable, parce que
35:23 il y a beaucoup d'amis de l'association,
35:25 on n'est pas obligé d'être un professionnel de la chocolaterie.
35:27 - Exactement. - Les professionnels,
35:29 ils étaient ici avec vous ce matin,
35:31 Thierry Lallet, merci encore,
35:33 le président de la Confédération, Vincent Guerlet,
35:35 président de la Relais de Dessert International,
35:37 Arnaud Larère, chocolatier pâtissier,
35:39 meilleur ouvrier de France, et Daniel Mercier, le président
35:41 des chocolatiers engagés, vous avez vu,
35:43 un beau tuyau, on n'a pas
35:45 osé encore taper dans la tablette,
35:47 mais ça va venir, croyez-moi, parce qu'ils ne sont pas venus les mains vides
35:49 et ils ne savent pas faire les chocolatiers. Voilà, mes amis,
35:51 vous avez jusqu'à mercredi soir pour visiter
35:53 le Salon du Chocolat à la Porte de Versailles,
35:55 à Paris, et si vous étiez déjà
35:57 au moment de l'émission, pas de soucis,
35:59 vous pourrez écouter tout cela en podcast
36:01 sur notre site sudradio.fr.
36:03 Je vous laisse avec les infos de 11h.
36:05 Après, vous retrouvez comme d'habitude Alexandre
36:07 de Vécu, en toute vérité,
36:09 je sais qu'il aime le chocolat, Alexandre de Vécu,
36:11 je vais lui en garder un petit ballotin, tiens.
36:13 Je vous souhaite un beau dimanche chocolaté,