• il y a 4 mois
Céline Alonzo et André Bercoff reçoivent JoeyStarr et Polo Labraise, auteurs du "Code pénal en Argot à l'usage des braqueurs, carambouilleurs et autres malfaisants" paru chez Fayard et Maître Jean-Yves Le Borgne, avocat au barreau de Paris qui signe la préface de ce livre.

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##LA_CULTURE_DANS_TOUS_SES_ETATS-2024-06-14##

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Transcription
00:00SUD RADIO LA CULTURE DANS TOUS SES ETATS ANDRÉ BERKOFF, CELINE ALLONZO
00:05Avec ma tête en éther, ma ganache de Négrero Toujours aussi réfractaire, à vouloir entrer dans le rang
00:11Avec vous je serai fort, fort possible, dans le rang impossible
00:15Votre morale au cri, qu'on me délaisse de mon égo
00:17Ça me rampe-cycle sur l'écran, ça me rampe-cycle dans mon flow
00:20Et là y'a plus d'idéaux, et donc je deviens un accro
00:22À la suffisance, la violence est là pour vous, braves gens
00:26N'est-ce pas « tchum tchum tchène » dans ta pince-mence-mence
00:28Qu'elle cacu-weng de mon passamodène-gène-gène
00:31N'est-ce pas « tchum tchum tchène » dans ta pince-mence
00:33Qu'elle cacu-weng de mon passamodène-gène-gène
00:36N'est-ce pas « tchum tchum tchène » dans ta pince-mence-mence
00:38Et oui, le joystar sur SUD RADIO, la légende de la culture urbaine, André Berkoff
00:43Il sera invité, notre invité dans un instant, avec le journaliste Paulo Labreze
00:47Ensemble, ils se sont amusés à traduire une partie du Code Pénal en Ergo
00:52et à le commenter André, avec la gouaille des années 60 et il faut reconnaître, c'est du brutal André.
00:59C'est du brutal et surtout c'est de l'actualité.
01:03L'argot, l'argot, mais c'est aussi vieux que la langue française. La langue française, il y a eu 1500 ans d'argot, 1500 ans de langue française,
01:09mais là ils l'ont renouvelé.
01:12Joey Starr et Paulo Lavraise, et effectivement sous la forme d'un dialogue,
01:18un dialogue parfait, entre l'avocat Didier Morville et le condamné victime Paulo Lavraise.
01:26Et il se passe des choses très fortes. Qu'est ce que ça veut dire ? Ça veut dire que cet argot, ils l'ont
01:31renouvelé, ils ont télétrouvé l'argot d'aujourd'hui et c'est quoi ça ? Par exemple, par exemple, je veux dire,
01:36salut à toi Truand que tu sois un perceur hors pair.
01:40Perceur hors pair, c'est quoi ? C'est cambrioleur spécialisé dans les canfres-forts.
01:43Un harangue de Pigalle, évidemment un souteneur. Un spécialiste des faux talbins, un billet de banque, une fausse monnaie,
01:50faux billet, ou de la carambouille,
01:52la magouille. Il faut te rendre à l'évidence, au cours de ta carrière, tu ne passeras pas au travers de certaines péripéties
01:59glandilleuses, très peu reluisantes, liées à la guerre que se livre à la maison Poulaga. La maison Poulaga, la police, toujours
02:06propice à se faire encrister. Encrister, c'est évidemment emprisonné. Ce qui est formidable quand même, c'est que justement on a
02:13oublié un peu l'argot. Il y avait, il y avait Léaudiard, il y avait
02:18Auguste Le Breton, tous ces gens-là, ces extraordinaires
02:22écrivains. Alphonse Boudard et puis beaucoup d'autres. Et puis là, eh bien,
02:28Joé Star et Paul Halabrès, ils ressuscitent cet argot
02:32dans un roman, je dirais un roman photo, un roman image, un roman mot, absolument passionnant.
02:39Céline. Et oui, ce qui est extraordinaire, c'est qu'à la fin du livre, effectivement, il y a ce qu'ils appellent une petite aide à la
02:44comprenette. Et là, on découvre, effectivement, tout le langage, une sorte d'abécédaire de l'argot. Alors, par exemple, on apprend que voyous, ça se dit
02:52apaches, escrocs, arrangeurs et allongés, morts. Qu'à vous verreux, on finira tous au boulevard
02:57des allongés. André, ce code pénal en argot est un ouvrage strictement interdit au CAV. On va tout vous expliquer dans un instant.
03:05Effectivement, avec nos deux invités, deux toqués de joutes verbales, Joé Star et Paul Halabrès. Alors, restez avec nous, on revient dans quelques instants sur Sud Radio.
03:16Sud Radio, la culture dans tous ses états. André Bercoff, Céline Alonso.
03:21En France, il y a 70.000 avocats pour le droit.
03:25Mais pour le tordu, il y a Maître Morville.
03:29J'ai rencontré la vie, celle des prédateurs par laquelle j'ai vu la mort.
03:34Et oui, Maître Morville du barreau de Saint-Denis, alias Joé Star, qui nous fait le plaisir d'être notre invité sur Sud Radio avec son client, un truand à l'ancienne, Paul Halabrès.
03:43Alors, bonjour à vous. Vous publiez chez Fayard le code pénal en argot à l'usage des braqueurs, carambouilleurs et autres malfaisants.
03:52C'est un livre dans lequel vous ressuscitez le langage fleuri, celui des malfrats.
03:57Et vous jouez donc les rôles respectifs d'avocat et de détenu.
04:01Alors, cher Maître Morville, comment avez-vous réussi à faire sortir de la ratière ce faisant, cet arrangeur qu'est M. Halabrès ? Racontez-nous.
04:10Par le biais de sa goye, en fait.
04:14Donc, mon personnage essaye de le faire sortir de prison, mais en fait, minote beaucoup, enfin, l'enfume beaucoup.
04:27Et puis finalement, il se rend compte que lui, il est sous le coup du système D à l'intérieur de la prison.
04:35Et il traduit le code pénal à deux jeunes détenus.
04:39Et donc, à travers ses échanges, il me raconte ça.
04:45Et j'ai cette fulgurance en lui disant, écoutez, je connais un éditeur.
04:49J'adore la manière dont vous traduisez ce code pénal.
04:53Et est-ce qu'on ne pourrait pas engranger une histoire où vous écrivez des articles avec votre bas goût ?
05:02Je propose ça à l'éditeur, comme ça, ça nous fera un peu de pécule.
05:06Vous et moi.
05:08Enfin, surtout lui.
05:10Et en fait, ça part de ça et on traduit les différents articles.
05:16Et oui. Et Polo Halabrès en argot, ça veut dire quoi exactement ?
05:19Alors, Polo, rien de spécial, mais Halabrès, en deux mots, ça veut dire l'argent.
05:25C'est un nom qui est prédestiné pour un malfaisant, qui est le personnage en question.
05:32Et tu as le regard qui va avec, en plus, je trouve.
05:35Il a un regard de braise.
05:37Alors, Joe Estar, l'argot, cette langue des voyous avec laquelle vous avez réécrit 33 articles du très sérieux Pavé Rouge,
05:44qu'est-ce qui vous a vraiment motivé à le faire ?
05:48Déjà, on est plutôt jeunes, monsieur et moi, donc on arrive de cet endroit, en fait.
05:54Moi, j'ai grandi dans un Saint-Denis, dans le 93, où la joute verbale était, on va dire, le sport national.
06:03Et après, vers mes 16 ans, j'ai encore poussé vers l'adulte Montmartre.
06:09Mais c'était déjà l'argot.
06:11C'était l'argot, c'était aussi ce qu'on appelle aujourd'hui les punchlines.
06:15Mais ces analogies, ces phrases fleuries, et puis cette posture de gaillard, enfin, voilà.
06:23D'accord.
06:24Et vous, vous avez été très grandi dans l'argot ?
06:29Oui, étant de la même génération, c'est-à-dire né dans les années 60, comme mon compère,
06:36on a été élevé avec les auteurs que vous avez indiqués tout à l'heure, Auguste Le Breton, Albert Simonin et autres, d'une part.
06:44Et les oeuvres cinématographiques qui vont avec, que tout le monde connaît, qui ont été dialoguées par Michel Audiard.
06:50Et donc, c'est quelque chose qui, évidemment, nous a beaucoup influencé.
06:53Et justement, est-ce qu'à votre avis, par exemple, si je dis, combien de gens qui ont moins de 30 ans,
06:58si je dis, touchez-moi au Grisby, pour ceux qui savent ce que c'est que Grisby ?
07:02Alors, j'ai deux réponses.
07:05La première, c'est que si vous verrez sur la quatrième de couverture du livre,
07:09on a adopté la signalétique de la télévision, en bas à droite, pour dire que c'est interdit aux moins de 40 ans.
07:16Interdit, alors je montre le livre, voilà, interdit aux moins de 40 ans.
07:22Mais je vais vous dire, les moins de 40 ans, vous pouvez le lire.
07:24Vous vous emmerdez pas, je vous assure.
07:26Ça, c'est la première chose.
07:28Et après, cette phrase-là, en particulier, elle est tirée des tontons-flingueurs
07:32que le service public reprogramme avec une régularité d'horloge chaque année.
07:36Il fait entre 3 millions et 8 millions de téléspectateurs les bonnes et les mauvaises années.
07:42Donc, je pense qu'il y a quand même quelques personnes qui sont au courant.
07:45Qui savent ce que c'est.
07:46Et oui, alors vous parliez d'Odiard.
07:48André Pouce a été l'un des acteurs fétiches d'Odiard.
07:51Alors, je vous propose d'écouter tout de suite, sur Sud Radio,
07:53quelques répliques, effectivement cultes, de certains de ses films.
07:57Je pense que quand on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner.
08:01Les cons, ça ose tout.
08:03Et c'est même à ça qu'on les reconnaît.
08:05Est-ce qu'il y a une différence entre un con et un voleur ?
08:07Non.
08:08Un voleur, de temps en temps, ça se repose.
08:11La connerie à ce point-là, moi, je dis que ça devient gênant.
08:15La notoriété, le prestige.
08:18Mais je vais vous dire, la plus belle d'Odiard,
08:21qu'on ne dit pas souvent parce qu'elle est un peu spéciale,
08:23elle dit, parler avec un con, essayer de le convaincre,
08:26c'est comme se masturber avec une râpe à fromage.
08:29Beaucoup de souffrance pour peu de résultat.
08:31C'est exact.
08:34Alors, Blondin, j'imagine que c'est aussi un personnage qui vous a inspiré,
08:37Paulo Labrèze, Joey ?
08:39Oui, tout à fait.
08:41Moi, j'ai lu, outre le...
08:47Ses articles sur le Tour de France, j'imagine.
08:49J'ai lu ses articles sur le Tour de France.
08:50Il a aussi écrit des articles sur le rugby, si je me rappelle bien.
08:53Et puis, évidemment, j'ai lu Un singe en hiver,
08:56et j'ai vu l'adaptation très réussie qu'en avait été faite avec Jean Gabin.
09:01Et oui, Blondin qui se décrivait comme un buveur qui écrit,
09:04et non pas comme un écrivain qui boit, André Bercoff.
09:08Je ne vais pas parler de Gabin, je l'ai connu,
09:11ça c'est les moins de...
09:13Je l'ai connu dans les dernières années de sa vie,
09:15et juste un mot, ça va vous plaire,
09:17vous savez qu'il faisait les fabuleux, il était dans l'équipe,
09:20et à chaque Tour de France, il faisait les chroniques du Tour de France,
09:22pendant 15 jours.
09:24Et un soir, je vous raconte ça parce que c'est légendaire,
09:28et ils mangeaient tous ensemble,
09:30Félix Lévitin, Jacques Godet et compagnie.
09:32Premier soir, on leur sert de la soupe de pintade.
09:34Second soir, du ragout de pintade.
09:36Troisième soir, du brochet de pintade.
09:38Et quatrième soir, des ailes de pintade.
09:40Et à ce moment-là, Blondin qui dit,
09:42Monsieur Lévitin, il dit, qu'est-ce qu'il y a Antoine ?
09:44Il dit, si la pintade doit faire le Tour de France,
09:46qu'on lui donne un dossard.
09:50Et on a une bonne à son sujet aussi,
09:52c'est donc après son décès,
09:54la cérémonie à l'église,
09:56je crois que c'était François qui avait titré,
09:58même l'église était bourrée.
10:00Ah, extraordinaire !
10:02Alors, qu'est-ce que l'argot ?
10:04Ecoutons André Pousse qui nous explique
10:06et qui nous donne sa propre définition.
10:08Quand vous parlez argot,
10:10il y a très peu de gens qui parlent un vrai argot.
10:12Il y avait Audiard qui parlait un vrai argot,
10:14et qui n'écrivait pas vraiment un argot,
10:16contrairement à tout ce qu'on a pu dire,
10:18parce qu'il disait toujours, méfiez-vous,
10:20parce qu'à Valenciennes, ils ne vont pas comprendre.
10:22Et il avait raison,
10:24il y a des mots d'argot qui ne...
10:26L'argot, en fait,
10:28c'est le patois des Parisiens,
10:30l'argot.
10:32C'est vrai, c'est un peu ça.
10:34L'argot, c'était fait,
10:36évidemment, pour que les caves
10:38ne comprennent pas.
10:40Et alors, quand les voyous ont vu
10:42que les caves comprenaient,
10:44ils ont multiplié la difficulté
10:46en parlant verlan.
10:48Par exemple ?
10:50Les gens croient que j'ai parlé en français,
10:52ils se disent, tiens, j'ai pas bien compris,
10:54ils n'entendent pas des mots d'argot.
10:56Ça veut dire quoi ?
10:58Ça veut dire, planquez les putes et foulez à Rimes.
11:00Joéstar, juste,
11:02en Seine-Saint-Denis, quand vous avez grandi,
11:04il y avait une autre forme d'argot,
11:06justement, quand on ne voulait pas que les caves comprennent.
11:08Comment vous parliez entre vous ?
11:10Est-ce que c'était une langue spécifique
11:12ou pas spécialement ?
11:14Moi, j'arrive à une espèce de jonction,
11:16en fait, où d'un seul coup,
11:18comme aujourd'hui, on pratique l'anglicisme,
11:20l'anglicisme
11:22et la contraction.
11:24Moi, à mon époque,
11:26c'était, on était
11:28à l'image de la société,
11:30vachement cosmopolite,
11:32donc il y avait de l'arabe,
11:34enfin, c'est...
11:36De l'arabe, de l'anglais, un peu de tout, c'est ça ?
11:38Un peu moins d'anglais, justement, non.
11:40Plutôt arabe, espagnol, des mots
11:42qui, voilà, s'amusaient de cette façon-là.
11:44D'accord.
11:46Et est-ce que l'idée,
11:48d'André Pouces, entre vous,
11:50je parle de la génération, vous vouliez ne pas
11:52vous faire comprendre ?
11:54C'était, oui, ne pas se faire comprendre des autres,
11:56effectivement, des flics,
11:58oui, effectivement,
12:00on créait notre chape
12:02pour créer notre microcosme,
12:04effectivement.
12:06En fait, l'argot était une langue de protection, quelque part.
12:08Exactement. De défense, d'autodéfense,
12:10un peu ça. Tout à fait.
12:12Alors, il y a deux choses. Déjà,
12:14on a eu la chance, avec Joey Starr,
12:16de connaître André Pouces.
12:18Ah ouais, c'est comme ça qu'on s'est rencontrés ?
12:20C'est comme ça qu'on s'est rencontrés, il y a 25 ans.
12:22En allant interviewer André Pouces,
12:24Vous étiez allé à son restaurant, le Napoléon Echec ?
12:26Le Napoléon Echec, rue Ballard,
12:28dans le 15ème arrondissement de Paris, absolument.
12:30Ah, vous vous êtes connus comme ça ?
12:32On s'est connus comme ça, on avait passé une soirée mémorable,
12:34d'une part, et d'autre part,
12:36alors, l'argot, c'est vrai,
12:38ce qu'il dit, le vrai argot,
12:40est pratiquement incompréhensible
12:42pour le commun des mortels, et nous, évidemment,
12:44on s'est attachés à ne pas faire
12:46un livre incompréhensible,
12:48donc on emploie des mots d'argot,
12:50mais qui sont à chaque fois au milieu de phrases
12:52et d'un contexte qui permettent
12:54aux lecteurs de le comprendre, et au cas
12:56où ils ne le comprennent pas, il y a ce
12:58glossaire à la fin qu'on a baptisé « Aide à la comprenette »
13:00et auquel les gens
13:02peuvent se référer pour comprendre
13:04l'entièreté de l'histoire.
13:06Alors, votre livre est préfacé par
13:08Maître Jean-Yves Le Baogne, avocat au
13:10barreau de Paris, qui vient de nous rejoindre sur Sud Radio.
13:12Bonjour à vous, Maître.
13:14Bonjour.
13:16Alors, vous avez préfacé effectivement ce code pénal
13:18en argot. Est-il concevable
13:20de le réécrire et de le commenter ? Quel est
13:22votre avis ? Racontez-nous.
13:24Écoutez, je trouve qu'on pourrait
13:26considérer que cette initiative
13:28est un amusement,
13:30un clin d'œil,
13:32quelque chose qui est finalement
13:34sans grande portée,
13:36mais je crois qu'on se tromperait,
13:38car en fait,
13:40mettre à la portée
13:42de tous un
13:44certain nombre de règles,
13:46de notions qui sont
13:48exprimées dans une langue
13:50qui finit peu à peu
13:52par ne plus être accessible
13:54à tout le monde,
13:56c'est un problème social.
13:58Et le traduire
14:00de manière à ce qu'il soit
14:02à la portée de tous,
14:04je crois que c'est une œuvre
14:06tout à fait qu'il faut saluer.
14:08Mon cher maître
14:10Jean-Yves Le Born, bonjour, c'est André Bercoff.
14:12Bonjour André.
14:14Mon cher Jean-Yves Le Born,
14:16mon cher maître, ce qui est intéressant,
14:18c'est que vous, en tout cas, vous n'avez pas prononcé un mot
14:20d'argot depuis 5 secondes,
14:22ce qui est quand même un hommage.
14:24Et pourtant, vous le dites
14:26dans votre préface, et pourtant
14:28vous le dites que les voyous...
14:30Mes clients
14:32parlaient argot.
14:34Ah bon ? Et ils se sont très vite rendus
14:36compte que je ne comprenais rien.
14:38Et ils m'ont appris.
14:40Ce qui fait que peu à peu,
14:42à défaut de pouvoir vraiment
14:44parler la langue, je la
14:46comprenais. Et vous savez,
14:48la langue
14:50peut être un fossé
14:52entre les personnes. Bien sûr.
14:54Je rappelle dans le livre
14:56quelque chose qui m'a
14:58marqué. Un président d'Assise
15:00qui s'adressait à un accusé
15:02dans un français
15:04absolument impeccable.
15:06Mais l'accusé ne comprenait rien.
15:08Et le regarder avec des yeux
15:10ébahis, n'étant
15:12incapable de répondre à une question
15:14dont il n'avait pas compris le son.
15:16C'est pas mal ça.
15:18Il a fallu que je la lui traduise
15:20à voix basse, dans l'oreille, car on n'osait
15:22pas s'exprimer en argot
15:24d'une manière officielle.
15:26Et le président vous a remercié de votre entremise.
15:28Mais oui.
15:30Eh bien écoutez, maître,
15:32merci, merci, vous avez été
15:34cet intercesseur
15:36interclasse. Et c'est ça
15:38qui fait votre grandeur aussi. Merci
15:40Jean-Hugo Le Bornier. Merci.
15:42Merci maître d'avoir été avec nous sur
15:44Sud Radio. Joe Estard, Paulo Labrèze.
15:46Eh bien, dans un instant sur Sud Radio,
15:48nous allons continuer de parler de votre
15:50amour des mots et de la langue française.
15:52Joe Estard, aujourd'hui,
15:54c'est dans un rôle de professeur sur TF1
15:56que vous excellez dans une série à succès.
15:58On va en parler dans un instant sur Sud Radio.
16:00Et bien entendu, on va continuer
16:02de parler argot avec vous deux.
16:04A tout de suite.
16:06Sud Radio, la culture
16:08dans tous ses états. André Bercoff,
16:10Céline Alonso.
16:12Je suis votre nouveau prof de français.
16:14Il recrute des SDF maintenant.
16:16Alors c'est toi.
16:18C'est moi quoi ? La tête de con, il y en a toujours une au boulot.
16:22Ce lieu là, c'est un endroit d'échange
16:24et de respect. Tu crois que j'ai peur de toi ?
16:26Pareil que je dois vous noter.
16:28Alors aide-moi, combien je te mets ?
16:30Si vous pensez gagner le respect des élèves,
16:32c'est raté. Je veux juste changer quelques méthodes, c'est tout.
16:34Tu ne parles pas comme ça.
16:36Le remplaçant,
16:38Joe Estard, vous êtes le héros
16:40de cette série à succès qui est disponible actuellement
16:42en replay sur TF1+.
16:44Vous jouez donc le rôle d'un prof de français
16:46atypique qui fait tout pour motiver
16:48ses élèves à l'apprentissage du français
16:50et pour les aider surtout à trouver leur voix.
16:52C'est vous qui avez eu
16:54l'idée de cette série
16:56qui a rassemblé plus de 10 millions
16:58de spectateurs,
17:00téléspectateurs sur TF1.
17:02Pour vous qui venez de l'école NTM,
17:04c'est quand même une sacrée revanche, Joe Estard.
17:06Oui, oui.
17:08J'en ris à l'intérieur.
17:10Au départ,
17:12quand ils m'ont approché,
17:14je n'y croyais pas vraiment.
17:16Ils ne m'avaient pas approché
17:18pour ce genre de projet là.
17:20Ils voulaient plus un truc un peu thriller,
17:22de toute façon, ils avaient ça en tête.
17:24En fait,
17:26moi qui regarde beaucoup la télé,
17:28j'avoue,
17:30je leur ai répondu,
17:32c'est un peu déjà vu tout ça,
17:34déjà fait, faire des adaptations d'oeil,
17:36et ainsi de suite.
17:38J'ai eu une fulgurance par rapport
17:40à l'actu du moment,
17:42qui était l'éducation nationale recrute,
17:44parce qu'on connaît
17:46les problèmes
17:48de l'éducation nationale.
17:50Donc, j'ai rebondi sur ça
17:52en leur disant, mais pourquoi
17:54on n'aurait pas un prof qui arrive,
17:56qui a eu son bac, on ne sait pas d'où il arrive,
17:58on ne sait pas qui il est,
18:00mais il a ce truc
18:02où il peut enseigner dans le temple
18:04du savoir, parce qu'à l'époque,
18:06en fait l'actu c'était,
18:08ils sont en manque de poste,
18:10donc,
18:12il suffisait d'avoir le bac,
18:14un cursus,
18:16sous couvert d'un stage,
18:18et il se retrouvait enseigné.
18:20C'est quelle classe ?
18:24Au départ,
18:26on était sur des gens qui
18:28passaient le bac à la fin de l'année,
18:30et puis,
18:32au départ, on est là-dessus,
18:34et puis, en fait, nous, le personnage,
18:36on l'a fait bouger, il se retrouve dans un lycée pro.
18:38En fait, le français
18:40et l'alibi qui fait la raison,
18:42lui, il a
18:44juste ce truc où il a envie de
18:46réveiller le désir et la passion
18:48chez ses élèves,
18:50chez ses collègues,
18:52voilà, il vient m'enfoncer
18:54des portes,
18:56enfin, voilà.
18:58Moi, d'ailleurs, dans mes refs,
19:00quand je leur avais proposé le truc,
19:02j'avais Mel Gibson, Larmes Fatales,
19:04par exemple, voilà,
19:06il y avait, bien sûr, le Cercle des Poètes
19:08disparus, entre autres,
19:10mais c'était quelqu'un qui arrive et qui se
19:12confronte au fait que, en plus,
19:14ce que j'avais en tête au départ,
19:16c'est qu'il est...
19:18ça s'est resté, il arrive de l'étranger,
19:20donc il est confronté au
19:22français parlé par les jeunes
19:24d'aujourd'hui,
19:26qui ne le connaît pas vraiment.
19:28Donc, voilà,
19:30c'était l'idée de départ.
19:32Alors, vous, l'école, Joey Starr, vous l'avez
19:34arrêtée très tôt.
19:36En troisième, qu'est-ce qui fait que
19:38vous avez décroché si tôt ?
19:40Ben,
19:42écoutez, moi j'ai des enfants aujourd'hui,
19:44avec leur mère, on a réussi à leur faire
19:46comprendre qu'ils y allaient pour eux.
19:48Moi, en fait, j'y allais
19:50pour que mon père sache où je suis.
19:52En fait, vous voyez,
19:54j'ai pas eu le bon mode d'emploi
19:56à l'époque. Aujourd'hui, moi, mes
19:58enfants, même celui qui a 9 ans sait qu'il va à l'école
20:00pour lui, et que ça va lui servir derrière,
20:02d'acquis, et ainsi de suite.
20:04À l'époque, nous, on avait,
20:06enfin, on avait des gens en face
20:08qui faisaient leur taf,
20:10mais au niveau parental,
20:12moi, mon père, en fait,
20:14il fallait aller à l'école parce que mon père vivait dans l'œil
20:16de l'autre, parce que tout le monde va à l'école, donc
20:18tu vas à l'école. Mais il y a pas
20:20tout ce truc d'accompagnement
20:22où on explique...
20:24avoir des enfants, c'est ça, on les accompagne,
20:26on leur explique le pourquoi d'eux, et ainsi de suite,
20:28à tout moment. Moi, j'ai pas eu ça.
20:30Voilà pourquoi j'ai décroché.
20:32Et vous dites, effectivement, clairement dans les interviews
20:34j'étais vraiment un cancre.
20:36Est-ce que vous avez souffert ?
20:38Comment vous l'avez vécu ? Parce que c'est difficile.
20:40Quand on n'est pas au rythme,
20:42forcément, bien sûr qu'on en souffre,
20:44surtout à cette époque
20:46de nos vies.
20:48Un enfant, c'est
20:50au seuil de tout,
20:52il s'imprègne
20:54de tout, et puis surtout,
20:56l'école,
20:58c'est ta première confrontation avec
21:00ce que sera le monde plus tard.
21:02Donc oui, bien sûr que j'en ai souffert à mort.
21:04Et qu'est-ce qui fait justement que vous en êtes
21:06sorti, que vous avez surmonté, effectivement,
21:08cet échec, en quelque sorte ?
21:10Je dirais...
21:12Je sais pas...
21:14La génétique...
21:16Enfin voilà, non, mais je sais...
21:18Je...
21:20J'ai cette sensation...
21:22Pardon ? J'ai cette sensation...
21:24Moi, la privation, en fait,
21:26m'a donné du recul,
21:28m'a donné envie.
21:30Enfin, la privation,
21:32le jour où j'ai pu,
21:34le fait que j'habite au rez-de-chaussée
21:36aussi, c'est-à-dire que je pouvais sortir
21:38par la fenêtre le soir,
21:40sans que mon père s'en rende compte,
21:42donc j'allais visiter le monde
21:44et je me construisais déjà tout seul,
21:46enfin voilà.
21:48Le fait que je me sois pas inscrit
21:50un peu aussi dans la dynamique
21:52de... Vous savez, mes parents sont issus
21:54du Boumydome. Boumydome, c'est un mouvement
21:56de masse des Antilles
21:58à la France. Vous savez, après
22:00une dizaine d'années, après la Seconde Guerre mondiale,
22:02on avait promis aux Antillais
22:04qu'on avait besoin de leur bras pour
22:06reconstruire le pays, puis finalement, arriver ici,
22:08ça a été plutôt du larbinisme
22:10et ainsi de suite, donc le fait de me mettre
22:12écarté aussi peut-être de cette voie-là,
22:14mon père a voulu
22:16que je sois plus intégré
22:18que le français, et j'ai fini
22:20par m'appeler nid de ta mère.
22:22Voilà, des choses comme ça, en fait.
22:24Est-ce qu'il est fier aujourd'hui, votre papa,
22:26de votre réussite ? Lui qui vous disait, enfant,
22:28que vous n'arriveriez à rien.
22:30Pas du tout.
22:32Non, pas du tout.
22:34Pourquoi vous n'avez pas de contact
22:36avec lui ?
22:38Si, j'en ai eu au début
22:40des choses comme
22:42avec l'éducation que je t'ai donnée, je comprends pas ce que
22:44tu fais, enfin machin,
22:46moi j'ai les enfants aujourd'hui, ce qui m'intéresse
22:48c'est la manière dont ils s'inscrivent dans ce monde
22:50et la manière dont ils réussissent, eux,
22:52la manière dont ils s'inscrivent dans leur
22:54légende personnelle.
22:56C'est pas vous qui plaquiez sur eux ?
22:58Mes fils ne sont pas des harengs,
23:00comme on en parle dans le livre,
23:02ils sont pas souteneurs ou autre,
23:04ils sont pas dans une voie...
23:06Non, non, mais
23:08je veille à ce qu'ils soient
23:10le plus alertes possible,
23:12qu'ils soient heureux, en fait,
23:14dans ce qu'ils font,
23:16et qu'ils connaissent...
23:18C'est-à-dire qu'en fait, artiste, pour mon père,
23:20ça voulait dire, t'as une servate,
23:22t'as valeur de poule.
23:24Voilà, exactement.
23:26Quand tu t'appelles nique-ta-mère, en plus !
23:28Juste un mot,
23:30comment vous avez choisi nique-ta-mère ?
23:32Ça nous vient du graffiti,
23:34ça nous vient de cette envie
23:36de...
23:38On arrive comme tout banlieusards,
23:40même jeunes,
23:42on a envie d'exister,
23:44on a envie...
23:46On a envie d'exister, donc en fait...
23:48On a vu ça et on dit, allez, on va faire ça.
23:50Et puis surtout,
23:52j'en reviens à Largot, c'était Largot du moment aussi,
23:54voilà, nique-ta-mère
23:56égalait
23:58flûte, zut.
24:00Voilà, tac,
24:02c'était un truc qu'on disait toute la journée,
24:04et comme à l'époque on faisait du graffiti,
24:06qu'on traînait avec des gens qui n'avaient
24:08pour la plupart des noms
24:10très américanisés,
24:12et ainsi de suite,
24:14nous on a choisi ça en fait.
24:16Il y avait nique-ta-mère, il y avait les 93 MC
24:18qui voulaient dire 93 mes couilles.
24:20C'est-à-dire qu'en fait,
24:23il y a un philosophe de proximité
24:25qui s'appelle Koolshen qui a dit,
24:27quand on n'a pas grand-chose, représenter les siens,
24:29c'est déjà quelque chose, et ben voilà,
24:31c'était pas le plus important pour nous, le nom,
24:33c'était ce qu'on était.
24:35Juste un mot,
24:37qui était le partenaire
24:39évidemment de
24:41NTM, juste un mot.
24:43Ce qui est intéressant,
24:45dans la, pas mutation,
24:47dans l'évolution de Largot.
24:49Je veux dire, entre Largot,
24:52etc, etc, etc,
24:54et Largot, employé aujourd'hui,
24:56où je ne sais pas si on peut l'appeler en Largot,
24:58mais il y a un langage,
25:00dont on parlait de Joey Starr,
25:02dont c'est emparé beaucoup de gens du rap,
25:04et autres, enfin je veux dire, il y a un langage nouveau.
25:06Est-ce qu'il y a quand même une continuité,
25:08ou c'est vraiment totalement différent ?
25:10Générationnellement.
25:12Moi je pense que ça s'est,
25:14alors, je pense que ça s'est appauvri.
25:17Très sincèrement, ça fait un peu vieux con de dire ça.
25:19On sait que ça s'est appauvri.
25:21Je pense que ça s'est appauvri.
25:23J'avais lu il y a quelques années,
25:25il n'y a pas très longtemps, un genre de recueil
25:27d'Argo, c'était juste
25:29un glossaire en fait en soi,
25:31le livre, et il n'y avait
25:33pas grand chose qui me faisait rire.
25:35Je me rappelle d'une expression,
25:37c'était une voiture
25:39avec cinq flics dedans, ils appelaient ça
25:41un chicken McNugget, parce qu'il y avait cinq poulets
25:43à l'intérieur. C'était vraiment le seul truc qui m'avait
25:45fait rire et qui était moderne,
25:47qui était marqué de nos jours.
25:49Le reste, c'était du verlan ressucé,
25:51c'était des choses comme ça.
25:53Pour moi, c'est que mon
25:55avis, je trouve que ça s'est un peu appauvri.
25:57Alors Joe Estar, parlons à présent
25:59d'un spectacle Black Label
26:01que vous avez conçu et mis en scène
26:03avec David Bobé, dans lequel vous
26:05vous emparez des plus grands écrits
26:07de la littérature antiraciste.
26:09Parmi ceux qui l'ont vu,
26:11certains spectateurs en sont vraiment
26:13sortis les larmes aux yeux.
26:15Vous êtes poignant dans ce spectacle,
26:17écoutons un extrait.
26:19Nous les gueux,
26:21nous les peux,
26:23nous les riens,
26:25nous les chiens,
26:27nous les maigres, nous les nègres,
26:29qu'attendons-nous ?
26:31Qu'attendons-nous ?
26:33Les gueux, les peux, les riens,
26:35les chiens, les maigres, les nègres,
26:37pour jouer au four,
26:39pousser un coup,
26:41tout à l'envie,
26:43la vie stupide et bête
26:45qui nous est faite.
26:47Ah, nous les gueux,
26:49nous les peux, nous les riens,
26:51nous les chiens,
26:53nous les maigres,
26:55nous les nègres.
26:57Léo Gontrandama, c'est ça.
26:59Eh oui, nous les gueux, effectivement.
27:01Alors sur scène, vous déclamez aussi des textes
27:03de James Baldwin, Malcolm X
27:05et Aimé Césaire, Joey Stark.
27:07Césaire, pardon.
27:09Césaire, pardon. Que raconte ce spectacle, effectivement,
27:11avec lequel vous serez en tournée
27:13dans toute la France en 2025, Joey ?
27:15Eh bien,
27:17comme vous l'avez dit,
27:19c'est déjà une lecture
27:21contre le racisme,
27:23des lectures
27:25qui font corps
27:27et c'est surtout un spectacle
27:29en trois strates
27:31où on démarre
27:33de l'esclavagisme,
27:35ça démarre en 1221 au Mali,
27:37au Manden, exactement.
27:39Et de là,
27:41la deuxième strate parle
27:43de la colonisation et l'industrialisation
27:45et la troisième,
27:47c'est le tissu social
27:49qui réside de tout ça encore de nos jours.
27:51Voilà. Et on fait un spectacle,
27:53alors ça peut, ça peut,
27:55ça peut peut-être,
27:57comment dire,
27:59on en a fait un spectacle, voilà.
28:01Donc on est quatre sur scène,
28:03il y a de la musique, de la vidéo,
28:05du chant et de la danse
28:07et on, voilà,
28:09on fait défiler ça, ça s'appelle Black Label
28:11parce que ça part au départ d'échanges
28:13entre
28:15David Bobé et moi-même.
28:17David Bobé, c'est le directeur du Conservatoire de Lille
28:19et du théâtre du Nord à Lille.
28:21Voilà, c'est un cadeau qu'il me fait
28:23parce que c'est ma deuxième mise en scène de théâtre.
28:25Et en fait,
28:27il m'avait offert un bouquin
28:29de Léon Gontrand Damas
28:31qui s'appelle Black Label
28:33et à partir de ça,
28:35d'entretiens qu'on a eu tous les deux,
28:37on a extrapolé tout ça
28:39et on s'est dit, tiens,
28:41on a eu envie
28:43de ça, quoi.
28:45C'est pas,
28:47on n'est pas
28:49dans le ludique, mais en revanche,
28:51ce qui est intéressant, c'est que
28:53c'est très parlant,
28:55ça raconte surtout que
28:57cette histoire d'esclavagisme
28:59en fait concerne tout le monde, quoi.
29:01On est tous concernés par ça, c'est vraiment
29:03un pan de l'histoire du monde.
29:05Voilà, donc...
29:07C'est donc des poèmes, c'est des extraits de textes...
29:09C'est des poèmes, c'est des
29:11extraits de livres,
29:13voilà, tac,
29:15de jandières et d'aujourd'hui,
29:17d'afro-descendants,
29:19il y a des caribéens,
29:21il y a des africains,
29:23enfin, voilà.
29:25On sent que la lecture de ces textes
29:27vous transporte dans un ailleurs, Joe Esta.
29:29J'ai eu le plaisir de vous voir
29:31quand vous êtes produit sur scène.
29:33Est-ce que cette lecture
29:35vous a amené à vous questionner
29:37davantage sur vos propres origines ?
29:39Ah ben, oui, tout bêtement,
29:41mais vous savez, tout à l'heure, on parlait du remplaçant,
29:43je dirais la même chose de ce spectacle,
29:45je dirais même la même chose
29:47du code pénal.
29:49J'ai la chance de faire des choses, en fait,
29:51je suis encore en construction à mon âge,
29:53à 57 ans, et je ne fais que des choses.
29:55Dans nos échanges
29:57avec Paul,
29:59j'apprends encore plein de choses tous les jours,
30:01et waouh, qu'est-ce que c'est bon !
30:03Voilà, mais effectivement, oui, oui,
30:05pour en parler de Black Label,
30:07oui, j'ai découvert plein de textes, mais vous savez,
30:09quand j'ai commencé, moi j'ai rencontré le théâtre il n'y a pas très longtemps,
30:11j'ai commencé par
30:13une pièce,
30:15une lecture qui s'appelait Éloquence à l'Assemblée,
30:17où je lisais, en fait,
30:19des textes de gens
30:21qui ont été artistes
30:23et qui ont eu des hautes fonctions,
30:25donc ça m'a réconcilié
30:27avec Victor Hugo, la Martine,
30:29entre autres, et ainsi de suite,
30:31donc oui, ça me parle
30:33dans tous les sens.
30:35Moi qui ai arrêté l'école après la troisième, je le redis,
30:37comme vous l'avez dit tout à l'heure.
30:39Alors, d'où je viens, c'est la question
30:41que pose une chanson que vous venez
30:43de faire avec le groupe
30:45Vilain Coeur,
30:47écoutons-la tout de suite.
30:49M'emmène voir ailleurs
30:53De quelle couleur
30:55On a repeint l'enfer
30:57Mais je suis qu'un enfant
30:59Si nulle part
31:01Me fait peur
31:03Dans vos présents
31:05Moi j'espère
31:07Je voudrais revoir
31:09Mon frère
31:11Je voudrais revoir mon frère
31:13Je voudrais revoir mon frère
31:15Je voudrais revoir
31:17Mon frère
31:19Je voudrais revoir mon frère
31:21Et oui, d'où je viens,
31:23sur celui de Radio où je vais, j'emporte mes fantômes,
31:25Joey Starr, c'est ce que raconte ce titre
31:27qui parle d'exil
31:29et d'enfance déracinée.
31:31En l'écoutant, effectivement,
31:33ça pousse à la réflexion
31:35cette chanson ?
31:37Moi j'aime, je prétends faire
31:39ce que j'ai, donc si ça pousse à la réflexion
31:41que demande le peuple,
31:43je suis un, je pense
31:45être un citoyen
31:47du monde, un humain,
31:49donc comme, contrairement
31:51à ce que peuvent penser certaines personnes,
31:53je m'intéresse beaucoup aux autres pour savoir
31:55dans quel monde je vis, donc si ce que je fais
31:57pousse à la réflexion, wow,
31:59que demande le peuple.
32:01Alors au début de votre spectacle Black Label,
32:03on vient d'en parler il y a quelques instants sur celui de Radio,
32:05il est dit que la poésie est une arme
32:07de construction massive.
32:09Vous, quels sont les poètes qui vous ont construit ?
32:11Wow.
32:13Surtout.
32:15Moi ça a commencé
32:17par
32:19Kundera par exemple,
32:21pour moi c'était une poésie dans le sens où
32:23il y avait des choses
32:25dans lesquelles je me retrouvais,
32:27enfin c'est mes premières lectures,
32:29après ça a été des gens comme Linton Cozy Johnson
32:31qui est un anglais,
32:33Césaire,
32:35entre autres, on parlait
32:37de Léon Gontrand Damas, il a aussi
32:39écrit un recueil qui s'appelle Stigmat
32:41qui est surtout axé
32:43sur, pendant la seconde guerre mondiale,
32:45il y a beaucoup d'antillais
32:47qui étaient des petites mains pour construire
32:49des obus, des balles,
32:51on ira par là.
32:53Antonin Artaud fait partie
32:55des poètes qui vous ont inspiré aussi ?
32:57J'ai failli l'oublier, oui c'est vrai.
32:59Antonin Artaud qui a écrit le plus beau bouquin
33:01sur un peintre, Van Gogh,
33:03ou le suicide de la société.
33:05Et vous, Paul Lalabraise,
33:07vos poètes,
33:09ou vos inspirations ?
33:11Moi j'ai,
33:13sur la forme,
33:15j'aimais bien
33:17les poèmes, je crois que c'est du 16ème,
33:19je ne vais pas dire de bêtises, genre Ronsard
33:21et Dubélé, parce que j'aimais bien
33:23la forme du sonnet,
33:25ça m'a
33:27beaucoup plu, ça m'a inspiré.
33:29Puis,
33:31plus tard,
33:33je n'ai pas un poète
33:35préféré que je pourrais citer.
33:37J'en ai un autre que je pourrais citer,
33:39c'est Koolshen aussi.
33:41Je trouvais que c'était un bon poète.
33:43Alors Joe, c'est à vous qui aimez
33:45les poètes, il y a une citation
33:47de Prévert qui va vous parler, il a dit
33:49« Dieu chassa Adam à coups de
33:51canne à sucre et ce fut le premier
33:53homme sur la terre ».
33:55Je ne savais pas ça.
33:57Vous savez qu'en plus
33:59je sors un roman graphique
34:01en fin d'année,
34:03qui parle
34:05d'étilisme, où l'angle,
34:07on prend des faits de société,
34:09des faits d'histoire, des faits historiques
34:11justement, qui ont
34:13tous un lien, parce qu'ils sont liés
34:15à l'alcool et l'étilisme,
34:17qu'on envoie, on fait des analogies,
34:19qu'on envoie en
34:21vadrouille, donc ça il me la faut
34:23cette phrase-là avant de partir.
34:25En tout cas, le rhum
34:27est l'une de vos tisanes préférées,
34:29Joe, tisane
34:31veut dire bien entendu en argot
34:33boisson alcoolisée,
34:35et avec cette brûlante eau de vie
34:37qui plonge dans le délire des ligues
34:39de tempérance, comme le disait
34:41Ambrose Bierce, eh bien vous avez créé
34:43votre propre marque, on va en parler dans un instant
34:45sur Sud Radio, et on parlera un peu
34:47argot avec vous, Polo, à tout de suite.
35:07Il t'aimera,
35:09il y a des filles sur le port
35:11Georges Moustaki, le merveilleux
35:13Georges Moustaki. Et oui, donne du rhum à ton homme,
35:15Joey Starr, et tu verras comme il t'aimera, c'est un peu
35:17votre devise aussi, ou
35:19voilà, dites-nous. Alors oui, bon,
35:21oui, oui, bien sûr, mais
35:23voilà.
35:25Je vais pas parler de modération
35:27ou autre, je dis voilà,
35:29puisque moi-même, je fais
35:31aujourd'hui des assemblages
35:33de mélasse qu'on fait vieillir sur les tropiques
35:35et ainsi de suite, voilà, donc
35:37je ne promotionne pas
35:39mais j'adore ça !
35:41Alors effectivement,
35:43vous avez créé votre propre
35:45marque de rhum, Carnival Sanjus,
35:47Carnival Sanjus,
35:49et donc vous avez créé trois cuvées,
35:51qu'est-ce qui les caractérise
35:53ces cuvées, dites-nous ?
35:55En fait, l'idée, en fait,
35:57moi ce qui m'a plu, quand
35:59il y a un sourcier qui est venu à moi, qui a commencé
36:01à me raconter des trucs, vous savez, j'avais
36:03fait une émission pour
36:05une chaîne qui s'appelait Vice, qui s'appelait
36:07La Route de la Soif, et en fait
36:09à l'époque,
36:11l'idée c'était d'aller
36:13faire le tour des distilleries
36:15agricoles, pour raconter
36:17en fait que le rhum n'est pas juste
36:19un alcool, mais c'est surtout
36:21une histoire humaine, voilà,
36:23différents savoir-faire, et que comme
36:25le raisin, la canne est différente
36:27selon les endroits, et ainsi de suite,
36:29et en fait, les gens me prenaient pour
36:31une sommité au départ, alors que, bon,
36:33j'étais ce qu'on appelle un super tanker,
36:35c'est-à-dire que je ne rentre pas dans le port
36:37et de manger de la contenance, c'est les bateaux qui viennent à moi,
36:39vous voyez, voilà, c'était plutôt ça,
36:41et à force
36:43d'écoutes, d'histoires, dans tous les
36:45sens, et bien
36:47j'ai eu envie d'en être,
36:49voilà, aujourd'hui je ne suis pas remié,
36:51je fais des assemblages de gilmets-là,
36:53ce qu'on fait vieillir sous les tropiques, donc
36:55ils nous arrivent d'aller voir, d'aller goûter,
36:57prendre un avion, et...
36:59Maurice, on a des choses
37:01qui vieillissent en Afrique du Sud,
37:03il y a des choses qu'on
37:05devrait aller voir en Asie aussi, parce que
37:07de la canne, il y en a partout, il y a des maîtres chais
37:09qui sont partis des Caraïbes
37:11et qui sont un peu
37:13à les mettre leur nez partout,
37:15et du coup, aujourd'hui
37:17on a des choses super intéressantes
37:19un peu partout sur le globe, voilà, et
37:21comme je le disais, moi je ne suis pas remié,
37:23donc nous, on fait de l'assemblage avec
37:25du jus de mélasse qu'on fait vieillir sous les tropiques,
37:27dans des fûts de bourbon,
37:29enfin, il y a tout un
37:31principe, voilà, tout un process.
37:33Et on vous les vendait depuis quand ?
37:35C'est sorti en août dernier,
37:37et ça répond bien.
37:39Ben voilà, c'est un immense jus.
37:41Voilà, au vu de l'époque
37:43grinçante, les gens ont besoin de...
37:45Ah ben ça c'est clair.
37:47En tout cas, dans votre code pénal en argot,
37:49Joe Estare, et pour le La Bresse, vous n'avez pas traduit
37:51l'article qui concerne l'ivresse sur la voie
37:53publique, hein ? Ah non, ça vous avez oublié ?
37:55Non, il est plus classe,
37:57il est un petit peu plus classe,
37:59le polo, donc, non, ça il n'a pas eu.
38:01Alors, en tout cas, sur la
38:03quatrième de couverture, il est indiqué
38:05une chose bien particulière, c'est-à-dire
38:07qu'il a été publié sans l'approbation
38:09de l'implacable
38:11Anastasie Faucheuse, Sensitivity
38:13Reader, aux éditions Bayard.
38:15Donc, il n'y a eu aucune relecture.
38:17Avouez-le !
38:19Il n'y a eu que des relectures, mais expliquez
38:21qui est Anastasie Faucheuse.
38:24Anastasie Faucheuse,
38:26comme son nom l'indique, est
38:28une spécialiste de la censure,
38:30un personnage imaginaire, cela va s'en dire.
38:32Imaginaire,
38:34pas tellement en ce moment.
38:36Qui, en ce moment,
38:38a, comment dire,
38:40sévit dans beaucoup d'endroits.
38:42Et à beaucoup d'endroits.
38:44Oui, et à beaucoup d'endroits.
38:46Et nous,
38:48on a créé ce personnage un petit peu
38:50par dérision par rapport à l'époque.
38:53Parce qu'on a décidé
38:55de s'affranchir
38:57des codes
38:59de notre époque, des codes de 2024.
39:01Parce qu'on a ressuscité
39:03un argot et des personnages
39:05qui sont plutôt datés de la deuxième partie
39:07du XXe siècle.
39:09Et ça n'aurait pas eu de sens
39:11que les dialogues,
39:13que les personnages du livre
39:15parlent comme
39:17on le fait aujourd'hui.
39:19Ça aurait complètement dénaturé le livre.
39:21On l'écrit dans le langage des années 50,
39:2360, 70, etc.
39:25Mais elle a quand même sorti
39:27ses grands ciseaux à trois reprises
39:29dans votre livre.
39:31Ton veut dire femme laid en argot.
39:33Elle dit quitte à écrire de façon vulgaire,
39:35les auteurs auraient dû choisir
39:37la forme féminine, à savoir tonne.
39:39Oui, pourquoi pas.
39:41Valeur signifie fesse des femmes.
39:43Et ce terme, elle le trouve dégradant
39:45pour la condition féminine.
39:47Peut-on imaginer un homme déconstruit
39:49Qui emploie l'expression de l'homme déconstruit ?
39:51Sandrine Rousseau.
39:53Que j'aime ma Sandrine Rousseau.
39:55Allô la Terre ?
39:57Et autre vocable
39:59qu'elle censure,
40:01vaseliner, qui veut dire homosexuel masculin.
40:03Selon elle, c'est une manifestation
40:05odieuse d'homophobie
40:07à effacer de toute urgence.
40:09Qu'avez-vous à lui répondre, Joe et Polo ?
40:11Oui, je dis oui.
40:13Mais je ne dis pas oui
40:15parce que je vis dans l'œil de l'autre.
40:17Le monde bouge et voilà.
40:19Moi, ce que je voudrais dire
40:21c'est que s'il y a des gens
40:23qui sont sensibles
40:25aujourd'hui et qui
40:27marchent dans la combine
40:29du wokisme
40:31ou du politiquement correct poussé à l'extrême,
40:33le conseil que j'aurais à leur donner
40:35c'est de ne pas acheter le bouquin.
40:37Parce qu'il ne faut pas être masochiste dans la vie.
40:39Et voilà, on sait,
40:41on a entendu tout à l'heure les extraits
40:43d'André Pousse quand il parle, etc.
40:45Ce n'est pas le politiquement correct
40:47d'aujourd'hui.
40:49Si je peux me permettre, au contraire,
40:51je trouve que vous aurez conseillé d'arrêter le bouquin
40:53parce qu'il est temps, il y a beaucoup de malades qu'il faut soigner.
40:55Et les malades, les wokistes,
40:57les cancellistes, les soucis,
40:59sont incapables de réfléchir en dehors de leurs étiquettes.
41:01Faut sortir de là, quand même.
41:03Alors vous me donnez une idée, on va essayer de le faire rembourser
41:05par la Sécurité Sociale.
41:07Voilà, ce que je vais vous dire, à mon avis, ça marchera
41:09très bien.
41:11Vous, Joe, et votre avis sur ce monde wok ?
41:13J'ai dit que
41:15pour construire
41:17le...
41:19Le problème, c'est que pour construire
41:21le présent, l'avenir,
41:23on a quand même besoin de savoir
41:25tabler sur le passé.
41:27Donc,
41:29c'est très compliqué, cette histoire.
41:31Moi, je...
41:33Je ne... Comment dire ?
41:35Je ne loupe jamais
41:37une occasion d'expliquer à mes enfants
41:39le pourquoi de, même quand il est compliqué.
41:41Pour parler du présent,
41:43il faut connaître le passé.
41:45Tout simplement. Merci.
41:47Il ne faut pas parler du présent sans connaître...
41:49Il ne faut pas juger le présent
41:51avec les critères du passé.
41:53Et puis surtout, après, le point de vue diffère
41:55d'une génération,
41:57d'une décennie à une autre.
41:59Le point de vue des gens diffère, donc
42:01c'est dur de...
42:03C'est dur de...
42:05De marcher droit avec tout ça.
42:07Et si Michael Jackson
42:09était toujours des nôtres, il dirait qu'il préfère
42:11le moonwalk au mondwalk.
42:13Ah, c'est joli, ça.
42:15Qu'est-ce que t'es bon, toi ?
42:17It ain't better if you're black and white.
42:19C'était aussi le truc de Michael Jackson,
42:21effectivement.
42:23Ah, putain.
42:25Enfin, c'est bien, c'est bien
42:27de lutter contre la connerie elle-même, quand même.
42:29C'était mieux avant, Joey, Star ?
42:31C'était bien avant.
42:33Mais...
42:35Si on...
42:37Si on est vigilant,
42:39ça peut être bien maintenant.
42:41Mais si on est vigilant,
42:43au vu de ce qui se passe en ce moment,
42:45la vigilance
42:47est obligatoire.
42:49Joey Star et Polo Labresse,
42:51merci d'être venus sur Sud Radio.
42:53Je rappelle que votre livre,
42:55Codes pénales en argots, à l'usage des braqueurs,
42:57car embouilleurs et autres malfaisants,
42:59est paru aux éditions Fayard.
43:01Merci à vous. Vous revenez quand vous voulez
43:03sur Sud Radio. Tout de suite,
43:05Brigitte Lahaye va vous la retrouver
43:07sur Sud Radio.
43:09Merci.

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