• l’année dernière
Yannick Favennec- Bécot, député apparenté au groupe "Horizons et apparentés" de Mayenne.

En 5 mandats, il a appartenu à 5 groupes politiques différents, sans pour autant renier ses valeurs. Yannick Favennec est engagé un giscardien revendiqué depuis presque 50 ans. Un centriste un peu rebelle, voire insoumis!

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 En cinq mandats, il a navigué dans cinq groupes politiques différents
00:04 sans pour autant renier ses valeurs.
00:06 Mon invité est engagé au centre depuis presque 50 ans,
00:09 un centriste un peu rebelle, voire insoumis.
00:12 Vous allez voir.
00:13 Musique de tension
00:16 ...
00:27 -Bonjour, Yannick Levenec-Beco. -Bonjour.
00:30 -Dans les années 70, un lycéen qui s'intéressait
00:33 un peu à la politique était encore souvent attiré
00:36 par une figure comme Che Guevara.
00:38 Vous, votre Che Guevara, il avait pas les cheveux longs,
00:42 il était chauve, il parlait avec un phrasé un peu en poulet,
00:45 c'était Valéry Giscard d'Estaing.
00:48 Pour lui, vous étiez prêt à tout
00:50 jusqu'à vous faire exclure de votre lycée.
00:53 -Oui, c'est vrai que je me suis engagé,
00:55 j'avais 16 ans, j'étais au lycée,
00:57 j'étais d'ailleurs dans un lycée
00:59 entouré par beaucoup de gens de gauche,
01:02 et moi, j'étais pourtant venu d'un milieu modeste,
01:06 j'étais le seul Giscardo giscardien,
01:08 et effectivement, j'ai fait la campagne
01:11 du président Giscard d'Estaing, du candidat Giscard d'Estaing,
01:14 en 1974.
01:15 J'étais un peu seul au lycée, mais je l'ai fait,
01:18 et je peux vous dire qu'aujourd'hui,
01:20 je ne le regrette pas. -Et vous vous êtes fait exclure
01:23 du lycée... -De l'internat.
01:25 -Oui, parce que j'avais imité la signature de ma grand-mère
01:28 pour m'autoriser à sortir pour aller assister
01:31 à un meeting du président Giscard d'Estaing,
01:33 du candidat Giscard d'Estaing, à Nantes,
01:36 et comme je suis un mauvais imitateur,
01:38 en tout cas, en écriture, je me suis fait choper
01:41 et je me suis fait virer de l'internat.
01:43 -Vous êtes passionné pour Giscard,
01:45 vous avez même créé et présidé l'antenne locale
01:48 des jeunes giscardiens à Saint-Nazaire.
01:50 C'est une ville profondément ancrée à gauche.
01:53 -Depuis l'éternité.
01:54 -Qu'est-ce qui, dans la figure de Giscard,
01:57 a pu susciter un tel enthousiasme chez le jeune homme de 16 ans,
02:00 alors 18 ans, je crois, sur la photo,
02:02 mais 16 ans au moment de la campagne présidentielle ?
02:05 -D'abord, parce que Giscard, c'était la modernité.
02:08 On sortait des années De Gaulle, Pompidou.
02:11 Pour moi, Giscard a fait passer la Ve République
02:13 du noir et blanc à la couleur.
02:15 C'était la modernité.
02:17 C'était le seul candidat qui s'adressait à la jeunesse,
02:20 avec des idées modernes,
02:22 avec un projet de réforme, avec des projets de réforme,
02:25 qu'il a réalisés, lui.
02:26 C'est pas uniquement un programme,
02:28 puis on passe à autre chose.
02:30 Il a réalisé son projet des réformes,
02:32 comme l'abaissement de la majorité de 21 à 18 ans,
02:35 entre autres, mais aussi l'interruption volontaire
02:38 de grossesse, mais aussi le divorce par consentement mutuel.
02:42 Bref, beaucoup de réformes de société
02:45 qui, aujourd'hui encore, marquent notre pays.
02:48 -Cette passion Giscard
02:50 est éteinte avec le temps.
02:52 On vous a vu le recevoir dans votre circonscription,
02:55 c'était en 2016, pour célébrer les 40 ans de son élection
02:59 à la présidence de la République.
03:01 Vous avez même racheté sa dernière voiture,
03:04 c'était une Smart.
03:05 Vous avez fait votre dernière campagne législative
03:08 au volant de la Smart de Valérie Giscard d'Estaing.
03:11 Quand on voit ça, ça va au-delà de la politique.
03:14 Vous êtes un pur fan.
03:15 -Je crois que c'est important d'avoir des repères
03:18 quand on fait de la politique.
03:20 Je trouvais que c'était, là aussi,
03:22 une marque d'affection et d'attachement
03:24 au président Giscard d'Estaing que de racheter sa dernière voiture.
03:28 -Giscard est à l'origine de votre engagement
03:31 dans la famille centriste, mais c'est François Léotard
03:34 qui vous a mis le pied à l'étrier.
03:36 -Oui, en tous les cas, je crois que ma collaboration
03:39 avec François Léotard, comme assistant parlementaire
03:42 et à son cabinet,
03:43 ça a été pour moi le vrai démarrage de ma vie politique,
03:46 parce que j'étais d'abord en province,
03:49 je faisais de la politique en province,
03:51 et là, j'arrivais à Paris, un peu comme Rastignac,
03:53 j'allais dire "à nous deux, Paris, à nous deux, la politique",
03:57 et je dois beaucoup à François Léotard,
03:59 parce qu'il m'a mis le pied à l'étrier,
04:01 il m'a appris énormément de choses,
04:04 et j'ai beaucoup d'affection pour lui.
04:06 -Vous êtes attaché aux valeurs centristes,
04:08 mais visiblement un peu moins attaché
04:10 aux partis ou aux groupes politiques de l'Assemblée.
04:13 Depuis votre première élection, en 2002,
04:16 vous avez été associé aux groupes UMP, UDI, Modem,
04:19 Liberté et Territoire, à nouveau UDI,
04:21 aujourd'hui, Horizon, le parti d'Edouard Philippe,
04:24 vous avez un peu la bougeotte ?
04:26 -Non, pas du tout.
04:27 Mes valeurs, elles sont toujours les mêmes,
04:30 libéral, social, européen, humaniste.
04:33 Maintenant, les partis politiques,
04:35 ils ont beaucoup changé en 30 ou 40 ans.
04:37 Ils ont changé d'alliance, ils ont changé de nom.
04:40 -Et vous, vous avez pas changé. -Mais moi, j'ai pas changé.
04:43 -Vous savez, les groupes parlementaires,
04:45 ce sont des outils pour travailler à l'Assemblée nationale,
04:49 mais ce ne sont pas forcément des ancrages de convictions.
04:53 Mes convictions sont les mêmes.
04:54 Je suis resté au centre-droit et je ne varierai pas
04:57 de cet ancrage.
04:59 -En basculant dans la majorité présidentielle,
05:01 sur la dernière législative. -Oui, parce qu'en fait,
05:04 je me disais qu'en 2022,
05:07 entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron,
05:09 pour moi, il n'y avait pas d'option possible.
05:12 Je suis dans la majorité présidentielle,
05:14 je suis loyal, mais je suis libre.
05:16 -Ah, mais écoutez, vous me tendez une perche,
05:19 parce que j'allais vous parler de votre compte Twitter,
05:22 où vous affichez ce qui ressemble à une devise,
05:25 "loyal, mais libre".
05:26 Je me mets dans la tête d'un président de groupe
05:29 à l'Assemblée qui vous voit toquer à sa porte.
05:31 En voyant ça, il doit se dire, Yannick Favnek,
05:34 "loyal, mais libre", il doit pas être très fiable.
05:37 -Je ne dois de comptes qu'à mes électeurs.
05:39 Je ne dois de comptes qu'à celles et ceux
05:42 qui, depuis presque 25 ans,
05:44 cinq mandats, dont le dernier,
05:46 je rappelle que j'étais le seul député de la majorité
05:49 élu ou réélu dès le premier tour.
05:51 Je ne dois de comptes qu'à ceux qui m'ont fait confiance.
05:54 -Quand vous dites ça, mettez-vous à la place
05:57 d'un président de groupe.
05:58 "Quand il y aura de la tempête, je vais pouvoir compter sur lui."
06:02 -Quand il y a de la tempête, je suis fidèle à mes convictions.
06:06 -Vous voyez à quoi je fais référence ?
06:08 -Aux réformes des retraites. -Oui.
06:10 -Quand vous annoncez publiquement que vous votez contre
06:13 la réforme des retraites. -Je n'ai jamais dévié
06:16 de mes convictions. Ma campagne législative,
06:18 je l'ai faite en partie sur la nécessité
06:21 de faire une réforme des retraites,
06:23 mais non pas en faisant de l'âge le totem de la réforme,
06:26 mais en disant qu'il faut prendre en compte
06:28 le nombre de trimestres cotisés.
06:30 Je n'ai pas changé par rapport à ça.
06:33 Je suis resté fidèle à mes convictions.
06:35 -Vous l'avez fait payer, ça, en interne ?
06:38 -Le silence. -Le silence.
06:39 -Joker.
06:40 Oui, on me l'a fait payer.
06:42 On me le fait encore payer aujourd'hui.
06:44 Peu importe. J'ai des convictions, je reste fidèle.
06:47 -On vous l'a fait payer.
06:49 Visiblement, vos électeurs, eux, non.
06:51 Vous l'avez dit.
06:52 Vous avez été réélu cinq fois d'affilé,
06:55 trois fois sur vos cinq victoires, élu au premier tour.
06:59 Quand vous dites que vous ne devez votre élection
07:02 qu'à vos électeurs, est-ce que c'est prétentieux ?
07:05 -Je sais pas. Si je suis élu...
07:07 -Vous avez une investiture. -C'est des hommes qui m'ont fait confiance.
07:10 -Le soutien d'un parti politique...
07:13 -Je suis élu ou réélu sur mon nom,
07:15 sur ce que je défends.
07:16 -C'est sur votre ancrage territorial.
07:19 -Mon ancrage territorial, absolument.
07:21 C'est le fait que je suis présent sur le terrain
07:24 du lundi matin au dimanche soir, ou presque,
07:26 parce qu'il y a le mardi, mercredi, le jeudi,
07:29 qui est réservé au travail ici, à l'Assemblée.
07:32 Je suis en permanence présent sur le terrain.
07:34 Je crois que les électeurs me reconnaissent.
07:37 -On va justement revoir un extrait d'un reportage
07:40 tourné par ma collègue Maïté Frémont,
07:42 qui vous a suivi sur le terrain,
07:44 dans ce combat que vous menez pour votre territoire
07:47 et le département de la Mayenne,
07:49 qui est concerné par la problématique...
07:51 -Pour 87 % du territoire national, un désert médical.
07:54 -Qui est concerné par ce désert médical.
07:57 -Bonjour, je suis Guillaume Garraud,
07:59 député de la 1re circonscription de la Mayenne.
08:02 -Bonjour, je suis Yannick Favénèque,
08:04 député de la 3e circonscription de la Mayenne.
08:07 -Et ensemble, nous nous battons... -Contre les déserts médicaux.
08:11 -Alors, à tout de suite. -A tout de suite.
08:13 -J'ai choisi cet extrait, c'est le tout début du reportage
08:16 sur LCP, que vous pouvez revoir sur notre chaîne.
08:19 J'ai choisi cet extrait, parce que Guillaume Garraud
08:22 n'est pas de votre bord politique, il est député socialiste,
08:25 et vous partagez ensemble ce même combat
08:28 pour votre territoire.
08:30 Quand on défend son territoire, la notion de droite, de gauche,
08:33 ça n'a plus lieu d'être.
08:35 -L'accès aux soins, c'est l'intérêt général.
08:37 -Les réponses peuvent être de gauche ou de droite.
08:40 -Les réponses sont dans l'intérêt général.
08:43 Les Français, l'an dernier,
08:44 n'ont pas donné de majorité absolue au président de la République.
08:48 Ils ont dit "débrouillez-vous, majorité relative,
08:51 "apprenez à travailler ensemble, à co-construire ensemble,
08:54 "parlez-vous enfin".
08:56 Avec Guillaume Garraud, c'est ce qu'on fait
08:58 dans les Maïennes. Je peux vous dire une chose,
09:01 les Maïennais apprécient beaucoup notre collaboration,
09:04 car ils savent qu'on a un objectif,
09:06 c'est d'essayer de faire en sorte que l'accès aux soins
09:09 se fasse de façon plus égale sur le territoire national,
09:12 notamment en Maïenne, qui est un des trois départements
09:15 les plus impactés par cette difficulté d'avoir un médecin.
09:19 -Avant de passer à notre quiz, je voulais revenir
09:22 sur un épisode de votre vie politique
09:24 qui vous a blessé. Votre femme a été
09:26 la démoratrice parlementaire à l'Assemblée.
09:29 -Je suis fier qu'elle l'ait été, car elle travaillait.
09:32 Les Maïennais s'en souviennent. -Vous avez dû la licencier
09:35 à la suite de l'affaire Fillon pour respecter la loi
09:38 sur la moralisation de la vie publique.
09:40 Vous vous dites que cette loi, c'est une mauvaise loi
09:43 ou est-ce que c'est le prix à payer
09:45 pour éviter les abus réels qui ont pu exister ?
09:48 -Peut-être. Je pense qu'effectivement,
09:50 beaucoup, parce qu'elle n'était pas la seule,
09:53 mon épouse a été engagée par son mari,
09:55 en tous les cas, travaillant avec un parent.
09:59 Je pense qu'on a payé
10:01 pour ce qu'une minorité a fait ou n'a pas fait, justement.
10:06 Et mon épouse, elle a des compétences.
10:08 Je suis fier qu'elle ait collaboré avec moi
10:10 pendant toutes ces années. Je regrette qu'effectivement,
10:14 pour une minorité qui a mal agi,
10:16 une majorité qui travaillait,
10:18 elle s'est retrouvée pénalisée
10:20 il y a six ans de ça, maintenant.
10:23 -On passe à notre quiz, à présent, si vous le voulez bien.
10:26 Je vous rappelle le principe.
10:28 Je vais commencer des phrases, vous allez les compléter.
10:31 On y va.
10:32 Si Giscard avait présidé la France aujourd'hui ?
10:35 -La France irait certainement beaucoup mieux.
10:38 D'abord, les réformes, elles auraient été faites.
10:41 Ensuite, on aurait certainement...
10:43 -C'est un coup porté à Emmanuel Macron ?
10:45 -Aujourd'hui, on est incapable de réformer ce pays.
10:48 C'est pas la faute du président de la République.
10:51 Le français a aussi probablement beaucoup changé.
10:53 Mais oui, je crois que la France serait entrée
10:56 encore plus fortement dans la modernité,
10:59 dans le XXIe siècle, et que les réformes auraient été faites.
11:02 -Après plus de 20 ans à l'Assemblée,
11:04 je me dis parfois...
11:06 -Je me dis parfois que ça a beaucoup changé.
11:10 -Qu'est-ce qui a le plus changé ?
11:12 -Je pense qu'on est passés dans un autre mode de fonctionnement.
11:17 D'abord, il y a pas de respect,
11:19 il y a plus...
11:20 Certaines valeurs existaient il y a un peu plus de 20 ans,
11:23 quand j'ai été élu pour la première fois.
11:25 Je le regrette, car c'est important
11:27 que nous ayons une Assemblée nationale,
11:30 le temple de la démocratie,
11:31 qui fonctionne dans les meilleures conditions.
11:34 -Ma plus grande satisfaction en tant que député ?
11:37 -Ah, ma plus grande satisfaction, c'est...
11:39 Il y a tellement de choses que je pourrais vous dire.
11:43 Tiens, par exemple, cette semaine est entrée en vigueur
11:46 une proposition de loi pour laquelle je me suis battu
11:49 avec d'autres, c'est la déconjugalisation
11:51 de l'allocation adultes handicapés,
11:53 très importante, très attendue par les personnes concernées.
11:56 Ca montre quoi ? Ca montre qu'on peut agir concrètement,
11:59 quand on fait de la politique, pour le quotidien
12:02 et pour le bien des gens.
12:04 -Une dernière question.
12:05 En plus de 20 ans, à l'Assemblée,
12:07 vous n'avez pas réussi à faire adopter
12:10 une seule proposition de loi à votre nom.
12:12 -Est-ce que c'est l'objectif ?
12:14 -Est-ce que c'est pas le prix de votre liberté,
12:17 de votre indépendance revendiquée ?
12:19 -D'abord, je vous parlais tout à l'heure
12:21 de l'allocation adultes handicapés, j'y ai beaucoup contribué.
12:25 Et puis, vous savez, laisser sa trace
12:27 sur une proposition de loi, c'est pas forcément un but en soi.
12:30 On peut faire avancer les choses par le biais des amendements,
12:34 qu'on peut faire adopter, Dieu merci.
12:36 Et puis, il y a tellement de lois dans notre pays
12:39 qu'avoir une loi au nom de Favé Nekbéko,
12:41 je suis pas convaincu que ce soit...
12:43 C'est pas mon objectif numéro un.
12:46 C'est d'être au plus près des préoccupations
12:48 de mes concitoyens. -Merci, Yannick Favé Nekbéko,
12:51 d'être venu dans "La Politique et moi".
12:53 ...

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