À la tribune, Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat, a sonné la charge contre l’article 3 du projet de loi immigration, sur les régularisations dans les secteurs en tension. Le Vendéen refuse toute concession sur ce point du texte, pourtant soutenu par ses alliés centristes.
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NewsTranscription
00:00 -Monsieur le président, monsieur le ministre,
00:02 monsieur le président de la commission,
00:03 monsieur le rapporteur, chers collègues,
00:06 les désordres migratoires actuels
00:08 sont sans doute que les prémices de désordres plus violents,
00:13 de secousses téléuriques beaucoup plus violentes
00:15 qui sont à venir avec le dérèglement climatique,
00:18 je l'ai entendu tout à l'heure,
00:19 avec les dérèglements géopolitiques
00:22 et avec aussi les déséquilibres démographiques.
00:26 Et d'ailleurs, dans le monde occidental,
00:29 beaucoup de gouvernements, et de droite et de gauche,
00:31 durcissent considérablement leur législation nationale.
00:34 Le dernier en date, ça a été souligné, c'est l'Allemagne.
00:37 C'est M. Scholz qui a présenté un projet de loi.
00:40 Il a d'ailleurs eu une déclaration fracassante
00:42 que je cite au mot à mot
00:44 en indiquant qu'il fallait expulser à grande échelle
00:47 les gens qui n'ont pas le droit de rester en Allemagne.
00:50 Et Joe Biden vient de poursuivre l'oeuvre,
00:54 si j'ose dire, de M. Trump,
00:56 puisqu'il a décidé la continuation du mur
01:00 sur la frontière mexicaine.
01:01 Je rappelle simplement que M. Biden est démocrate
01:05 et que M. Olaf Scholz est social-démocrate.
01:09 Dans tous ces pays et dans tous les pays d'Occident,
01:11 en réalité, la demande de fermeté,
01:14 elle vient des classes populaires.
01:16 Elle ne vient pas des classes aisées
01:18 qui ont les moyens de se projeter
01:20 des conséquences du désordre migratoire
01:22 en mettant leurs enfants dans les bonnes écoles
01:25 et en habitant les beaux quartiers.
01:27 La réalité, elle est là.
01:28 M. le ministre, il y a quelques semaines,
01:29 vous aviez déclaré dans un journal du dimanche
01:32 que sur l'immigration, vous n'aviez aucun tabou.
01:35 Je ne demande qu'à vous croire sur parole,
01:37 mais j'ai quelques doutes.
01:38 Pourquoi autant d'atermoiements ?
01:40 Pourquoi un accouchement aussi difficile
01:42 avec un texte tant de fois promis
01:44 et un texte tant de fois remis ?
01:46 Je pense au contraire que pour votre majorité,
01:49 pour votre majorité, l'immigration reste un tabou.
01:53 Un tabou d'abord sur le plan politique,
01:56 c'est le en même temps qui débouche sur un double jeu.
01:59 Un tabou surtout sur le plan numérique,
02:01 la question du nombre qui est fondamentale,
02:03 et un tabou sur le plan du droit,
02:06 la question du droit qui est aussi absolument essentielle.
02:10 D'abord, le premier tabou, c'est la question du nombre.
02:13 Tout nous y ramène, absolument,
02:16 parce que l'échec de l'intégration
02:18 vient du fait qu'on peut intégrer
02:20 des petits nombres, des individus.
02:22 Mais comment intégrer des populations
02:25 qui souvent sont peu désireuses d'adhérer
02:28 à nos principes républicains et à nos modes de vie ?
02:31 Qui peut ici dire de façon sérieuse
02:36 qu'il n'y a pas de lien entre tous ces échecs,
02:38 entre tous ces échecs et l'insécurité ?
02:40 Qu'il n'y a pas de lien entre tous ces échecs
02:43 sur l'intégration et la multiplication
02:46 des territoires perdus de la République ?
02:49 Qu'elle soit légale ou illégale,
02:51 le problème de l'immigration bute sur la loi des grands nombres.
02:55 C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas
02:57 cet article 3 qui est devenu certes un peu totémique,
03:00 mais je voudrais y revenir quelques instants.
03:03 D'abord, parce qu'on ne peut pas à la fois prétendre dans un texte
03:07 lutter contre l'immigration illégale
03:10 et ouvrir une brèche à l'immigration illégale.
03:13 La fraude ne peut pas être une voie de régularisation,
03:17 parce qu'alors là, on ouvre encore une fois
03:20 une facilité qui va créer un appel d'air.
03:23 La deuxième raison,
03:25 c'est que c'est une formidable capitulation
03:29 que d'aller chercher une main-d'oeuvre bon marché.
03:32 Quand en France, il nous faut encore mobiliser
03:35 une réserve extraordinaire de travail qu'on ne mobilise pas,
03:38 au moment où je vous parle, il y a plus de 560 000 étrangers
03:40 qui, eux, sont en situation régulière et qui sont au chômage.
03:44 Au moment où je vous parle, il y a plus d'un million de jeunes
03:47 qui ne sont ni en emploi ni à l'école.
03:49 1 900 000 Français qui sont au RSA
03:51 et 3 millions qui sont au chômage.
03:53 Qu'est-ce qu'on en fait ? Qu'est-ce qu'on en fait ?
03:55 Et j'ajoute et je termine rapidement sur cet article 3.
03:59 Le travail, l'activité professionnelle
04:01 n'est absolument pas une condition
04:04 qui permet d'éviter une radicalisation.
04:06 Je voudrais citer l'attentat, symboliquement,
04:08 de celui qui avait été perpétré à Rambouillet,
04:12 Jamel Gorshen.
04:14 Il était en situation de travail.
04:16 Il était chauffeur-livreur.
04:18 Ce que nous voulons, nous,
04:20 c'est que le pouvoir discrétionnaire du préfet
04:22 contrôle, bien sûr, l'activité réelle professionnelle,
04:25 mais qu'on contrôle, dans ce pouvoir discrétionnaire,
04:29 aussi la capacité des individus à intégrer nos propres valeurs.
04:33 C'est ce qui est fondamental et c'est ce qui nous distingue
04:36 de ce fameux article 3.
04:38 Il y a aussi le tabou, je le disais, du droit,
04:40 parce que nous avons, depuis des années et des années,
04:43 abandonné les instruments juridiques
04:46 qui nous permettent de réguler l'immigration.
04:49 Et tout ça débouche sur une impuissance extraordinaire,
04:52 une impuissance coupable,
04:53 que les Français constatent à chaque fait divers
04:57 qui n'en sont plus des faits divers, bien évidemment.
05:00 Cette impuissance, elle était organisée d'abord par le législateur,
05:04 qui a multiplié les protections, les exceptions à la règle.
05:08 Et les exceptions ont tué la règle.
05:10 Et la règle peut tuer des Français.
05:11 On l'a vu à Arras, bien sûr.
05:15 Si cet individu caucasien avait été expulsé,
05:17 le professeur Dominique Bernard serait toujours en vie,
05:20 bien évidemment. Et qu'importe s'il est arrivé en France
05:24 avant son âge, avant l'âge de 13 ans.
05:27 Nous, ce que nous voulons, ce n'est pas multiplier
05:30 les exceptions aux exceptions, ce que vous nous proposez.
05:32 Ce que nous voulons, nous, c'est anéantir les exceptions
05:36 pour qu'il y ait la règle vis-à-vis des expulsions
05:40 et vis-à-vis des EQTF, et que, enfin,
05:43 on puisse aussi rétablir ce que Hollande avait défait,
05:46 c'est-à-dire le délu pour séjour irrégulier,
05:50 pour bien marquer qu'un pays, une nation,
05:52 une communauté nationale, un corps politique,
05:54 c'est un dedans et un dehors, tout simplement.
05:58 Pour ce qui concerne cette impuissance,
05:59 je voudrais revenir un instant sur un certain nombre
06:01 de jurisprudences qui sont choquantes,
06:03 surtout lorsqu'elles font systématiquement,
06:05 en tout cas, parfois, prévaloir les droits individuels,
06:09 la protection des droits individuels
06:11 sur l'intérêt général, sur un cadre collectif,
06:13 sur le besoin d'un peuple de se protéger.
06:17 Je pourrais prendre plein d'exemples.
06:18 Je vais prendre des exemples que vous connaissez bien,
06:21 la condamnation par la CEDH de la France
06:22 à la suite de l'expulsion de 2 Tchétchènes,
06:25 radicalisée, comme vous le savez, et dangereuse.
06:28 Et là, nous sommes condamnés
06:30 parce que l'expulsion de ces individus,
06:33 encore une fois dangereux,
06:35 ne permettait pas d'avoir une garantie suffisante
06:38 qu'ils aient, dans leur propre pays d'origine,
06:41 un procès équitable.
06:42 Mais qu'est-ce qu'il fallait faire ? Protéger les Français ?
06:46 Ou protéger ces individus dangereux ?
06:48 Vous avez répondu, d'ailleurs.
06:49 Vous avez dit "Je préfère payer l'amende".
06:51 Et vous avez bien fait, monsieur le ministre.
06:52 Vous voyez ?
06:54 Ce que je veux dire par là, c'est qu'il faut trouver,
06:56 monsieur le rapporteur, un juste équilibre
06:58 entre l'État de droit, qui respecte les textes,
07:01 qui n'interprète pas, dans des interprétations
07:03 très créatives, les traités,
07:06 et la démocratie, la souveraineté populaire,
07:09 retourner les droits individuels systématiquement
07:11 contre la souveraineté populaire.
07:12 Ce n'est pas l'État de droit.
07:13 Ce n'est plus l'État de droit, évidemment.
07:15 C'est la raison pour laquelle nous voulons ce référendum,
07:18 une révision de la Constitution pour rendre aux Français
07:21 cette capacité à décider par eux-mêmes
07:24 la politique migratoire française.
07:27 Le président de la République a fait un pas.
07:30 Il y a loin de la coupe aux lèvres.
07:33 On n'est pas des perdants de l'année.
07:35 Le président du Sénat n'est plus là.
07:36 En tout cas, moi, je ne suis plus un perdant de l'année.
07:39 Et nous attendrons de voir ce qu'il advient
07:41 de cette révision constitutionnelle.
07:43 Le tabou politique, un mot simplement sur le "en même temps".
07:47 Je disais que c'était un double jeu,
07:49 parce qu'il y a un non-dit dans ce texte.
07:52 C'est le contexte de son élaboration.
07:54 Il a fallu que vous soyez écartelés entre une aile droite et une aile gauche.
07:58 Le problème, c'est que le "en même temps" en matière migratoire,
08:00 ça ne marche pas, parce que les signaux que vous allez envoyer
08:02 au monde entier et que vont très bien percevoir les filières,
08:06 ce doit être un signal de grande fermeté.
08:08 Tout laxisme sera interprété comme un appel d'air.
08:11 Et vous savez qu'en France, nous avons des appels d'air.
08:14 On aura l'occasion d'y revenir.
08:16 En matière de regroupement familial, etc.,
08:20 un ouvrage a été rédigé par quelqu'un qui connaît très bien ces choses-là
08:25 et qui s'appelle Didier Leschi,
08:27 et qui ne vient pas d'ailleurs d'une succursale de la droite.
08:31 Pour terminer, pour conclure, monsieur le ministre,
08:35 pour terminer et conclure,
08:38 je crois que, et je pense que l'heure est grave,
08:41 parce qu'on voit bien que jamais les risques,
08:44 les menaces de partition,
08:48 que les menaces de fragmentation communautaire
08:52 n'ont autant fragilisé l'unité française.
08:55 Et nous en sommes parfaitement conscients.
08:57 C'est la raison pour laquelle nous ne nous abandonnerons ni aux postures
09:01 de ceux qui pourraient se contenter du "Y'a qu'à faucon"
09:05 ou alors d'expédients, de slogans.
09:08 Mais on ne se contentera pas non plus de l'imposture,
09:11 de ceux qui appellent l'ambiguïté, qui appellent les demi-mesures,
09:15 qui appellent finalement le "en même temps".
09:17 Nous voulons un texte efficace et nous voulons un texte utile.
09:21 On verra, on commence l'examen de ce texte.
09:24 Ou bien ce texte donne les conditions et nous ferons des propositions,
09:27 des nombreuses propositions d'amendement.
09:29 Ou bien ces propositions sont reprises, ou bien on durcit le texte,
09:32 ou bien on a la conviction intime d'aller dans le sens supérieur de la nation,
09:37 parce que les Français demandent cette fermeté.
09:39 Et les Français d'abord, encore une fois, d'en bas, pas les Français d'en haut.
09:43 Bien. Et alors nous pourrons voter le texte.
09:45 Si en revanche, nous sommes persuadés
09:49 qu'il y a une ambiguïté qui subsiste, nous ne tricherons pas.
09:53 Nous ne jouerons pas les faux semblants et nous nous opposons à ce texte.
09:57 Voilà notre position.
09:59 Elle est claire, elle est très, très simple.
10:02 Elle consiste à dire la vérité aux Français.
10:04 Et je pense que cet enjeu, il est énorme.
10:06 Il est finalement, si je devais le réduire en quelques mots,
10:08 de faire en sorte que demain,
10:10 la République soit partout chez elle en France.
10:14 Merci de votre attention.
10:15 (Applaudissements)
10:17 (Générique)