L’été 2023 fut particulièrement chaud sur la planète, personne ne peut le nier et la presse alarmiste s’en est donné à cœur joie : "la plus grande sécheresse que le pays ait connu", "des incendies sans précédent", "des records de température jamais atteints", "la fonte des glaciers a un niveau inédit" a-t-on pu lire ici ou là, à la une de nos journaux tandis que Marion Cotillard et Guillaume Canet appellent à "sauver la planète"…. Mais justement cette planète a-t-elle vraiment besoin de nous ? Nous, pauvres petits homo sapiens, qui l’occupons depuis 250 000/300 000 ans environ, une virgule, une poussière à l’échelle de l’histoire terrestre. Depuis le paléolithique jusqu’à nos jours, l’homme s’est trouvé face à des changements climatiques majeurs, mégasécheresse, glaciations, inondations, tempêtes, et si ces événements ont pu faire chuter des civilisations, d’autres les ont remplacées, et les périodes dites "optimum" ont aussi favorisé notre développement.
Pour considérer le changement climatique auquel nous assistons, il faut donc le replacer dans une véritable perspective historique. Survol d’une histoire du climat avec Alban d’Arguin.
Pour considérer le changement climatique auquel nous assistons, il faut donc le replacer dans une véritable perspective historique. Survol d’une histoire du climat avec Alban d’Arguin.
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00:00 *Musique épique*
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00:06 *Musique épique*
00:35 Chers amis, téléspectateurs de TVL, bonjour !
00:38 Bienvenue dans "Passé-présent", votre émission historique
00:41 présentée en partenariat avec la revue d'histoire européenne.
00:45 Cet été fut particulièrement chaud sur la planète.
00:48 Personne ne peut le nier et la presse alarmiste s'en est donnée à cœur joie.
00:52 La plus grande sécheresse que le pays ait connue,
00:55 des incendies sans précédent, des records de température jamais atteints,
01:00 la fonte des glaciers à un niveau inédit a-t-on pu lire ici ou là à la une de nos journaux,
01:07 tandis que Marion Cotillard et Guillaume Canet appellent à sauver la planète.
01:11 Mais justement, cette planète a-t-elle vraiment besoin de nous ?
01:15 Nous, pauvres petits homo sapiens qui l'occupons depuis 250 000 ans à peu près ?
01:21 Une virgule que dis-je, une poussière à l'échelle de l'histoire terrestre.
01:25 Depuis le paléolithique jusqu'à nos jours,
01:28 l'Homme s'est trouvé face à des changements climatiques majeurs.
01:31 Méga sécheresse, glaciation, inondation, tempête.
01:35 Et si ces événements ont pu faire chuter des civilisations, d'autres les ont remplacées.
01:39 Si les périodes dites "optimum" ont favorisé notre développement,
01:44 les âges glaciaires, s'ils ont provoqué guerres et famines,
01:47 ont souvent permis des avancées technologiques, et ceci dès la préhistoire.
01:52 Revenons à nos manchettes anxiogènes de journaux.
01:55 Ce qui frappe, c'est l'absence totale de références historiques,
01:58 de simples points de repère, plus chauds, plus froids, plus humides,
02:01 par rapport à quand, à où ou à quoi.
02:04 En matière de climat, les journalistes ont la mémoire courte.
02:07 Or, il existe réellement une histoire du climat.
02:09 Et cette histoire permet de relativiser, sur les causes comme sur les effets,
02:14 à l'échelle de sapiens, le changement climatique que nous vivons.
02:17 C'est cette histoire qui s'étend sur des millions d'années
02:20 que nous allons survoler avec notre invité Alban Darguin.
02:23 – Bonjour. – Alban Darguin, bonjour.
02:25 Après "Éolienne, un scandale d'État",
02:28 paru aux éditions Synthèse Nationale en 2017,
02:31 vous vous êtes lancé dans une nouvelle enquête,
02:33 une enquête sur ce que vous appelez une manipulation mondiale,
02:37 celle du réchauffement climatique.
02:39 Elle a fait l'objet d'un livre paru chez Pardes en 2022.
02:44 Dans cette étude, vous consacrez une part importante
02:47 aux relations entre l'homme et le climat,
02:49 ce qui va être l'objet de notre émission,
02:52 qui est une émission historique,
02:54 donc on ne va pas parler de manipulation médiatique.
02:56 Vous en avez parlé, je crois, avec Martial Bild,
02:58 il y a presque un an, sur ce même plateau.
03:01 Donc la politique, celle de la médiation, vous l'avez déjà abordée.
03:05 Alors avant de rentrer dans le cœur du sujet,
03:07 je vais vous demander d'expliquer quelques termes,
03:10 les termes que nous allons employer au cours de cet entretien.
03:15 On voit en permanence dans vos lignes le terme de "optimum",
03:21 ou un optimum des optimas,
03:23 et puis le terme d'âge, qui est en général associé, lui, au froid.
03:27 – Et aux grands âges. – Et aux grands âges.
03:29 Donc je vous laisse expliquer.
03:31 – Alors ça, ce sont des termes qui ont été systémisés,
03:38 si j'ose dire, par les historiens,
03:41 et notamment par un français, un grand scientifique français,
03:43 un grand savant français, que tout le monde connaît en matière de climat,
03:46 qui s'appelle Emmanuel Leroy-Ladurie.
03:48 Alors on parle des optimas, c'est-à-dire au singulier un optimum.
03:53 Un optimum, ce sont, pour que tout le monde le comprenne bien et facilement,
03:58 ce sont les périodes de réchauffement.
04:00 Et puis, à l'inverse, les âges dits glaciaires,
04:03 là c'est plus facile à deviner, ce sont les périodes de refroidissement.
04:09 Et en fait, on s'aperçoit que dans l'histoire du monde,
04:13 il y a eu des grands optimas, immenses, de réchauffement,
04:17 des grands âges glaciaires, immenses, notamment dans la préhistoire.
04:21 – Alors quand vous dites "grand", on va essayer…
04:23 – Des milliers d'années, voire beaucoup plus dans la pré-préhistoire,
04:28 si j'ose dire.
04:29 – Sachant que l'homme, c'est entre 250 et 300 000 ans.
04:33 – Oui, oui.
04:35 Et l'homme de cette époque-là, il a souffert des réchauffements
04:43 largement supérieurs à ce qu'on connaît aujourd'hui,
04:46 et il a aussi souffert de périodes de glaciation épouvantables,
04:49 et sur des durées très longues.
04:51 Mais il s'en est sorti, la preuve.
04:52 – Oui, nous sommes là pour en parler.
04:54 Mais ces durées très longues,
04:56 elles ont tendance à se raccourcir depuis la préhistoire ?
04:59 C'est-à-dire qu'elles étaient très très longues à la préhistoire ?
05:01 – Elles étaient très longues dans toute la période de préhistoire,
05:04 sans rentrer dans le détail,
05:05 jusque à une période qu'on appelle le tardiglaciaire,
05:12 dont le lapsus est révélateur.
05:14 Le tardiglaciaire, c'est-à-dire la période de fin de glaciations
05:21 beaucoup plus fortes qu'aujourd'hui,
05:22 et qui s'approche de notre époque et de notre histoire moderne.
05:27 – Alors, au début d'Homo sapiens, il y a 300 000 ans,
05:32 quelle est l'influence du climat sur, j'allais dire,
05:37 la vie des premiers, de ces premiers hommes
05:40 qui sont répartis plus ou moins dans le monde,
05:44 on estime peut-être en Afrique ou ailleurs,
05:46 même si on trouve des foyers aujourd'hui à droite ou à gauche.
05:49 – On en trouve beaucoup en France,
05:50 d'ailleurs dans le sud-ouest de la France,
05:52 où il y a des foyers considérables.
05:53 – Est-ce que ça a provoqué les premières grandes migrations ?
05:56 – Oui, ça a provoqué des très grandes migrations.
05:59 J'allais dire, même sur le plan animal,
06:01 on a tous en tête la question des mammouths.
06:04 Il y avait des mammouths en France,
06:05 il y en avait en Suisse, il y en avait partout.
06:07 – Qui dit mammouth dit froid.
06:09 – Qui dit mammouth dit froid, oui.
06:13 Là aussi, je vais faire quelque chose d'un peu approximatif,
06:15 mais considérez que pour ceux qui ne connaissent pas le mammouth,
06:18 parce qu'ils n'en ont jamais vu,
06:20 le mammouth c'est une sorte d'éléphant et des grandes défenses,
06:23 mais avec une énorme fourrure.
06:26 Et en fait, dans les périodes de grands optimas,
06:29 peu à peu, ils ont été chassés vers le nord,
06:32 et puis ils n'y ont plus trouvé leur compte,
06:34 jusqu'à la Sibérie, et les derniers sont morts en Sibérie,
06:36 on a encore des traces de squelettes, mais ça remonte à très longtemps.
06:41 – Et donc concernant Sapiens,
06:44 est-ce qu'on peut estimer que le peuplement de certaines parties du monde,
06:50 du nord de l'équateur, est dû à ces réchauffements climatiques ?
06:55 – Oui, très probablement, et même on l'assure.
06:59 C'est-à-dire qu'on voit que la démographie,
07:01 je n'ai plus en tête les chiffres,
07:03 mais le nombre d'humains sur la Terre il y a 15 ou 20 000 ans,
07:09 il était très faible.
07:11 Et au final, avec le réchauffement,
07:14 on commence à avoir même une fracture qui va se faire
07:17 entre ce qu'était l'homo sapiens du début, c'est-à-dire un chasseur,
07:22 qui poursuivait les reines,
07:25 parce qu'à l'époque il y en avait partout aussi,
07:27 qui essayait de se nourrir, qui ont des outils déjà,
07:30 les fameux lanceurs pour leur lance, pour tuer,
07:35 et leur procurer la viande dont ils avaient besoin,
07:38 parce que c'était essentiellement des carnivores à l'époque,
07:40 pratiquement un petit peu de fruits, etc.
07:42 Et puis on va passer après, dans une rupture qui nous rapproche vraiment de nous,
07:47 c'est le moment où ils se mettent à devenir de chasseurs-cultivateurs.
07:52 – On arrive au Néolithique.
07:54 – Exactement, on arrive au Néolithique,
07:56 et à ce moment-là, on commence à avoir d'abord une démographie
08:01 qui est très corrélée au réchauffement climatique,
08:05 et puis la culture, les défrichements, etc.
08:08 qui vont se poursuivre après, pendant toute l'époque moderne.
08:11 – Est-ce qu'on a une idée des températures de l'époque du Néolithique ?
08:14 Est-ce que c'est grosso modo les mêmes que nous connaissons aujourd'hui ?
08:17 – Alors il y a eu des températures beaucoup plus chaudes qu'aujourd'hui,
08:23 quasiment d'amplitude de 10° moyen de plus que ce qu'on peut vivre aujourd'hui.
08:29 Donc il y a eu des périodes très très chaudes,
08:31 et qui se sont révélées aussi très prospères,
08:33 et qui ont aidé justement à toutes ces transitions vers la culture, vers…
08:37 – Oui, mais la chaleur ne veut pas forcément dire sécheresse.
08:39 – La chaleur ne veut pas dire sécheresse.
08:41 Et là, j'allais dire, il faut essayer de décorréler l'instant
08:47 et reprendre une vision du temps,
08:49 parce que quand on nous parle de sécheresse apocalyptique,
08:52 qui actuellement, qu'on nous dit certains jours,
08:55 ou même dans des bulletins météo,
08:56 "on n'a jamais vu ça, la planète n'a jamais connu ça", etc.
09:00 Mais il faut que nos présentateurs reviennent à leurs études
09:04 et regardent un petit peu, même en météorologie,
09:06 pour ce qu'on connaît, les bases du climat,
09:09 on sait très bien qu'il y a eu des périodes beaucoup plus chaudes
09:12 que celles qu'on vit actuellement.
09:14 – Alors, donc un optimum au Néolithique,
09:18 et ensuite un autre optimum, qui est l'optimum de l'âge de bronze.
09:23 – Oui.
09:23 – Donc là, on peut le situer, quelle année ?
09:25 – Alors là, on rentre quasiment dans l'histoire, exactement.
09:30 En fait, on peut le situer entre, le petit optimum de l'âge de bronze,
09:35 c'est entre 1500 à 1000 avant Jésus-Christ.
09:38 – Voilà.
09:39 – Donc ça, ce sont les bandes que les historiens donnent.
09:43 Les effets ont été très difficiles à analyser
09:45 parce qu'on avait quand même une faible population de cultivateurs,
09:48 je parle d'un point de vue humain,
09:50 mais on voit bien que ça a entraîné quand même…
09:54 Alors, pourquoi est-ce qu'ils sont difficiles à analyser ?
09:57 Pour une raison simple, c'est qu'on a des populations
09:59 qui sont très dispersées encore,
10:02 et donc les historiens n'ont pas de traces absolues
10:06 des effets bénéfiques de ce petit optimum de l'âge du bronze.
10:11 – On est quand même dans l'époque des premières grandes cités-États,
10:15 des premières grandes civilisations.
10:17 – Ah non, enfin oui, les premières civilisations, pardon, oui, tout à fait.
10:20 Oui, mais au final…
10:23 – C'est quoi ? C'est Géricault, c'est la Mésopotamie ?
10:25 – Voilà, tout à fait, c'est tout le bassin méditerranéen
10:29 qui est un peu le bassin de notre culture.
10:32 – Donc là, est-ce qu'on peut relier ce petit optimum
10:36 à la naissance de ces grandes civilisations florissantes ?
10:39 – Je n'ai pas vu d'historien qui le disait, qui concluait de cette façon-là
10:44 parce que la plupart des textes qui ont été écrits,
10:47 mais c'est peut-être un très bon sujet de thèse
10:49 pour quelqu'un qui voudrait se pencher là-dessus,
10:52 mais ce qu'on dit de façon plus systémique,
10:55 et on le verra avec les autres optima,
10:57 c'est que chaque fois qu'il y a eu réchauffement,
11:00 à partir d'un moment où on commence à en voir les traces
11:03 et pouvoir les analyser, on constate des effets de prospérité,
11:07 ce qu'on verra après avec le petit optimum romain, etc.
11:11 Et là, on corrèle bien les phases d'expansion de la civilisation
11:15 avec le réchauffement climatique.
11:18 – Justement, on arrive au petit optimum romain
11:22 qui, lui, s'étend de quelle période à quelle période ?
11:24 – Alors lui, il va de…
11:26 Alors attendez, entre les deux, il y a un petit tas de glacière quand même.
11:29 – Oui, c'est toujours une alternance entre…
11:32 – Des fluctuations.
11:32 – Exactement, les fluctuations, c'est vraiment entre des périodes de chaud,
11:37 des périodes de froid, et pour eux, là c'est vraiment très synthétique,
11:41 mais pour l'après-histoire, on va avoir des très grandes périodes de froid,
11:44 des très grandes périodes de chaud, et dans l'époque moderne,
11:47 et dans nos époques, on a plutôt des petites périodes.
11:50 Mais ça ne veut pas dire que ça ne changera pas,
11:52 parce que tout ça, sans faire une digression trop…
11:54 – Encore une fois, petite période, ça peut être 500 ans.
11:58 – Oui, bien sûr, oui, tout à fait, 500 ans, c'est d'ailleurs un peu la moyenne,
12:03 mais ce n'est pas une certitude, puisque tout ça procède,
12:07 je le dis juste pour les personnes qui ne sont pas familières avec ces sujets-là,
12:10 ça procède aussi de quoi ? Pourquoi le climat bouge ?
12:13 Le climat bouge en fonction d'une mécanique que les scientifiques connaissent bien,
12:18 mais que les historiens aussi connaissent bien,
12:20 qui est simplement la Terre qui tourne sur elle-même,
12:24 un peu comme une toupie, penchée, et qui tournerait comme ça,
12:27 comme on a la frais jouée sur une table,
12:30 et qui tourne autour du Soleil dans une ellipse, un orbe on dirait,
12:35 où elle se rapproche énormément du Soleil à certains moments,
12:38 et elle s'en éloigne beaucoup.
12:40 Tout ça pour dire que dans une journée,
12:43 la Terre a tourné sur elle-même complètement,
12:45 et que sur une année en gros, il y a des hivers et des étés,
12:49 selon qu'on est plus près ou pas.
12:51 Sauf que, contrairement à ce qu'on pense,
12:53 la Terre n'a absolument pas un parcours linéaire, elle bouge, elle bouge beaucoup.
12:59 Et donc il y a des variations en plus,
13:03 dont on ne connaît pas trop la raison, la cause pour le moment.
13:08 Mais ça c'était juste pour replacer en perspective,
13:09 pour expliquer pourquoi il y a des cycles comme ça.
13:11 – Pourquoi il y a des fluctuations, pourquoi il y a des cycles.
13:13 Donc on arrive au petit âge romain.
13:15 – On arrive au petit âge, au petit optimum romain,
13:18 et là on est entre -200 et 200 après Jésus-Christ, en gros.
13:23 – Donc c'est très court.
13:24 – 400 ans.
13:26 Et donc dans cette période-là, comme disaient les historiens,
13:30 c'est le plus beau siècle de la République et de l'Empire romain.
13:33 On le voit bien, même Jules César qui conquille la Gaule en son temps.
13:38 C'est quoi ? C'est -40 et quelques avant Jésus-Christ.
13:41 Donc dans toute cette période-là, il y a une prospérité très forte.
13:44 On voit des choses dans ce petit optimum qui touchent aussi la culture.
13:49 Donc la prospérité c'est quand il n'y a pas de disette,
13:51 c'est quand il n'y a pas de famine, etc.
13:53 – Alors justement, les cultures, quand on pense à l'Italie,
13:58 quand on pense à Mitterrand, on pense aux oliviers par exemple.
14:01 – On pense aux oliviers.
14:02 – Vous rêvez des oliviers jusqu'où ?
14:03 – Alors ça, à cette époque-là, c'est encore limité jusqu'au haut de l'Italie
14:09 et au bas de la France, de la Gaule de l'époque.
14:13 Cette très belle colonie, comme disait César, il avait eu l'intuition,
14:17 je crois que c'est Marie-Badelaine Martin dans un livre d'histoire,
14:20 "L'histoire de l'unité française", historienne qui disait,
14:23 qui prenait cette phrase de César, ou qui avait trouvé cette phrase de César,
14:26 qui intuitait que vraiment la Gaule serait une colonie formidable
14:32 par toutes les ressources qu'elle pouvait avoir et son climat justement.
14:34 – Son climat.
14:36 – Et donc on a des oliviers…
14:38 – Alors on a des oliviers sur le sud, le tour, le pourtour méditerranéen,
14:43 sur le sud de la France aussi, de la Gaule de l'époque,
14:48 et ces oliviers, on va les voir monter beaucoup plus loin après,
14:52 dans un autre optimum, c'est le petit optimum médiéval.
14:56 – Mais entre temps, après le petit optimum romain,
15:01 il y a encore une période de glaciation.
15:03 – D'accord, qui correspond à la chute de l'empire romain ?
15:07 – Alors…
15:08 – C'est ça qui est intéressant, c'est de redire la courbe de température,
15:10 finalement la courbe des situations de glaciation.
15:12 – Bon là, le petit tas de glacière, il va jusqu'à 600 à peu près après Jésus-Christ,
15:17 de 270, 300, disent les historiens.
15:20 Il faut savoir que quand des historiens affichent des chiffres comme ça,
15:24 c'est qu'ils ont des marqueurs, juste pour que tout le monde comprenne bien,
15:30 et les marqueurs en l'occurrence, un des grands marqueurs utilisés,
15:33 il y en a beaucoup plus maintenant,
15:35 mais un des grands marqueurs utilisés c'était la fonte des glaciers,
15:39 et la rétractation ou l'avancée des glaciers.
15:42 En période chaude, les glaciers remontent vers le sommet,
15:45 en période froide, ils s'étendent et ils descendent dans les vallées.
15:48 – On reviendra aux glaciers sur un autre optimum.
15:53 Et donc on arrive, donc refroidissement et de nouveau…
15:56 – Le petit tas de glaciers de cette époque-là, dont on parle,
15:59 c'est celui dans lequel on a connu toutes les invasions germaniques,
16:03 venues de l'Est, etc.
16:06 Donc c'est bien qu'il y avait aussi des mouvements de population
16:09 qui cherchaient un peu de prospérité, parce qu'ils avaient froid aussi.
16:14 – Et alors, de nouveau un optimum, qui lui sera le petit optimum médiéval,
16:21 qui s'étend de… – 900 à 1300 à peu près, on va dire.
16:26 – Donc là c'est l'âge d'or du Moyen-Âge ?
16:30 – Oui, absolument.
16:32 – Et alors les…
16:34 – Là, les historiens l'appliquent aussi au gothique, à tous les forts…
16:40 – Oui, ça ressemble, l'architecture, le monde de l'architecture,
16:43 même en Asie, en revanche en Europe,
16:47 ça se concrétise par rapport à aujourd'hui, qu'est-ce qu'il y a de très différent ?
16:53 – Ça se concrétise par une période, j'allais dire frénétique,
16:56 c'est pas le bon mot, mais une période intense de défrichement,
16:59 de bataille contre la forêt, donc la culture,
17:06 les cultures, les champs cultivés augmentent de façon considérable.
17:10 Si on prend la France, la Gaule, on le voit bien,
17:14 et là on a des véritables colonies agraires qui se créent,
17:19 alors les moines sont souvent aussi à l'origine de ça
17:21 au moment de cette période-là, mais après…
17:24 – Mais si on défrie, c'est que ça pousse.
17:26 – C'est que ça pousse, exactement.
17:27 Donc ça veut dire qu'à partir du moment où il fait plus chaud,
17:30 la terre est plus facilement cultivable, il y a malgré tout de l'eau,
17:34 parce qu'il ne faut pas non plus que les gens pensent que,
17:37 toujours dans cette mémoire de l'instant actuelle,
17:40 que ça se fait en 5 minutes, non, bien sûr,
17:42 quand on parle d'optimum médiéval,
17:45 on parle de quelques degrés en moyenne d'augmentation,
17:49 et donc les hivers sont plus doux, les printemps sont frais,
17:55 mais ils sont tout à fait propices à la culture,
17:57 ce qui permet de semer à temps.
17:59 Un des gros inconvénients des périodes de glaciations,
18:03 c'est que les gens mourraient de faim, pourquoi ?
18:06 Parce qu'ils avaient beau semer, même à l'époque des cultures,
18:08 ils avaient beau semer du blé, ils poussaient pas,
18:10 ou ils gelaient au printemps, etc.
18:12 Alors que là, du coup, c'est la prospérité.
18:14 – Est-ce que, on le sait, dans les périodes de transition,
18:17 dans les fluctuations, est-ce que c'est toujours un peu chaotique à un moment ?
18:21 – Oui, il n'y a rien de linéaire, rien n'est linéaire,
18:24 donc on a des moments où on peut avoir aussi du froid,
18:27 et des hivers très froids,
18:29 on le voit d'ailleurs même dans les époques modernes,
18:33 si on considérait que nous sommes dans un petit optimum de réchauffement,
18:38 pour le moment petit, on ne sait pas après tout,
18:40 mais en supposant que ça suive les cycles actuellement,
18:43 on voit bien qu'il y a aussi des hivers glaciaux,
18:47 et qu'il y a des étés certes très chauds,
18:49 mais il y a aussi des étés plus vieux et froids,
18:52 "frais" comme dirait Emmanuel Le Roy-Landry.
18:54 – Donc finalement, le visage de l'Europe,
18:57 à l'époque de ce petit optimum médiéval,
19:01 est un petit peu différent d'ailleurs de ce qu'on connaît aujourd'hui,
19:03 par exemple, je prends l'exemple du Groenland,
19:05 le Groenland qui veut dire la terre verte.
19:09 – La terre verte.
19:10 – Alors qu'aujourd'hui c'est plutôt la terre blanche.
19:12 – Voilà, le Groenland, aujourd'hui c'est la terre blanche.
19:16 Il faut quand même savoir…
19:17 – Même si ça commence un peu d'ailleurs à fond.
19:18 – Oui, ça fond, et sur le Groenland,
19:22 il y a quand même une anecdote amusante, politique,
19:25 celle-là, et contemporaine,
19:27 c'est que quand il était au pouvoir,
19:29 Donald Trump avait fait une proposition au Danemark
19:33 de lui racheter le Groenland.
19:35 Ce qui n'était pas innocent.
19:36 – Alors comment était le Groenland justement à l'époque ?
19:39 – Alors à l'époque des Vikings,
19:41 les Vikings sillonnaient un peu toutes les régions,
19:43 ils sont même descendus en France jusqu'à Noirmoutier
19:46 où ils avaient une base d'invasions etc.
19:48 et tout l'Ouest, la Normandie.
19:50 Mais donc les Vikings s'installent sur le Groenland
19:55 et ce n'est pas une petite installation temporaire.
19:58 Au départ ils chassaient le morse,
20:00 ils pêchaient les morses et les chassaient pour l'ivoire
20:02 et pour aussi la viande.
20:04 Et ensuite, comme c'était aussi des grands agriculteurs,
20:08 des éleveurs etc.,
20:10 ils ont installé des grandes fermes,
20:12 d'immenses fermes avec des laiteries,
20:16 avec toute une organisation
20:17 et ils se sont implantés comme des colons sur la terre verte.
20:21 Le Groenland c'est la terre verte en effet.
20:23 Et là on a vu autour de Nuuk,
20:25 qui est d'ailleurs l'actuelle capitale
20:27 mais qui existait déjà comme un gros village à l'époque,
20:30 où ils ont le centre de la colonie,
20:33 on a tout un peuplement de colons qui élèvent des vaches,
20:38 qui font de l'élevage de la viande
20:40 et qui font également du lait, beaucoup de lait,
20:42 surtout que les gens du nord boivent beaucoup de lait.
20:44 Et toutes les cultures traditionnelles
20:50 qu'on pouvait trouver beaucoup plus bas avant.
20:53 – Il y a aussi la culture,
20:56 parce que tu as un bon marqueur également,
20:57 c'est la culture de la vigne.
20:58 – Absolument.
20:59 – Et on voit que par exemple en Grande Bretagne,
21:05 en Isle-Britannique, on y cultive…
21:08 – Le vin rouge, bien sûr.
21:09 Et on cultive la vigne parce que les Anglais
21:12 aiment bien le clarette, comme ils le disent,
21:14 c'est-à-dire le petit vin rouge de Bordeaux et de la région.
21:17 Et donc parce que c'était possible,
21:22 ils ont commencé à expérimenter des vignes
21:24 et à l'époque ils faisaient leur vin.
21:26 Et ça, plus personne n'en parle aujourd'hui.
21:29 – Je ne suis pas sûr.
21:30 – Sauf qu'aujourd'hui ça revient,
21:31 on recommence à faire du vin en Cornouailles.
21:32 – Oui, justement c'était…
21:34 – Ils font des vins effervescents,
21:35 qui sont pas mauvais.
21:36 – Oui, ça c'est peut-être à la mode.
21:37 – Et qui sont à la même latitude que le champagne.
21:40 – Bien sûr, bien sûr.
21:41 Alors les questions de latitude c'est compliqué
21:43 parce que quand vous prenez l'Allemagne,
21:45 le milieu de l'Allemagne qui est à peu près
21:48 à la latitude du Canada,
21:49 on n'en est pas encore à faire de la vigne au Canada.
21:52 – Non, non, après il y a les questions de courant qui importent.
21:56 – Absolument.
21:57 – Donc on avait du vin anglais.
21:59 – Oui, la vigne progresse partout,
22:02 y compris sur la Bourgogne il y avait de la vigne,
22:04 mais là ça remonte parce qu'elle datait des Romains,
22:06 mais elle remonte encore,
22:07 probablement du petit Optimum d'ailleurs Romain,
22:11 mais elle remonte encore plus haut.
22:12 Et puis on a la culture des oliviers,
22:15 qui suit la vallée du Rhône et qui remonte également
22:18 au point qu'il y avait des oliviers
22:20 et que du coup il en est resté quelques implantations
22:23 qui ont souffert un peu après du petit âge de la sierre.
22:27 – Et alors vous citez, on a quand même des périodes de grande chaleur
22:31 parce que les rivières n'étaient pas des moindres,
22:33 comme la Sarthe par exemple, sur laquelle vous parlez.
22:36 – La Sarthe est une rivière qui,
22:37 alors ça c'est une information qui est intéressante
22:39 parce qu'elle est très tardive,
22:40 la Sarthe est une rivière qui normalement ne tarit jamais.
22:44 Et c'est sous Louis XIV,
22:46 Louis XIV avait demandé, fait demander une enquête
22:49 aux intendants de France,
22:51 dans toutes leurs provinces,
22:53 pour avoir un état complet du réseau de rivières et d'eau.
22:59 – Du réseau hydrographique.
23:00 – Voilà, hydrographique du royaume.
23:04 Et dans cette enquête, on a découvert,
23:07 parce que du coup les intendants ont fait chercher
23:09 dans les archives des tas d'informations,
23:11 ils ont fait le travail des historiens d'une certaine façon,
23:14 et on a découvert que la Sarthe en fait,
23:17 dont on disait qu'elle n'avait jamais tarit,
23:19 avait tarit trois fois dans l'histoire.
23:22 Et la dernière fois étant quand même un peu symbolique
23:26 puisque elle s'est asséchée une demi-heure.
23:29 – Oui c'est ce que j'ai lu, c'est quand même très surprenant,
23:30 c'est-à-dire qu'une demi-heure il n'y a plus eu d'eau.
23:31 – Il n'y a plus eu d'eau, exactement,
23:33 à la source ça ne sortait plus.
23:34 – Et on a d'autres anecdotes comme ça
23:36 qui sont révélatrices de ces grandes chaleurs ?
23:40 – Alors sur celle-là, ça c'est la chance d'avoir cette enquête
23:45 sur le réseau hydrographique, c'est sûr,
23:47 mais sur les marqueurs, on a des marqueurs comme les glaciers,
23:51 bien évidemment, pendant le petit optimum médiéval,
23:53 les glaciers se rétractent énormément,
23:56 ils remontent donc très haut, comme aujourd'hui,
23:59 parce que les glaciers fondent, il n'y a pas de secret,
24:02 et ça remonte, et il y a un marqueur qui est intéressant
24:04 par rapport à notre époque,
24:06 je ne sais pas si je digresse par rapport à notre sujet,
24:08 mais je ne vais pas me faire comme ça.
24:09 C'est un marqueur qui a été découvert par des historiens,
24:16 c'est un canal d'irrigation du bétail dans les Alpes,
24:22 sur le glacier Danesh qui est en Suisse,
24:25 et en fait, sur ce glacier, les hommes de l'époque médiévale,
24:32 avec la fonte des glaces, ont découvert une source
24:37 qui était oblitérée sous le glacier, et qui du coup s'est révélée,
24:41 et là ils l'ont façonnée.
24:44 – Ah oui, il y avait une autre source au moment de l'Optimum médiéval,
24:46 donc le glacier a fondu.
24:47 – Le glacier a fondu, mettant à jour cette source,
24:50 et du coup les gens de l'époque, les paysans de cette époque médiévale,
24:55 ils ont façonné la source, ils l'ont entourée,
24:59 et ils ont fait des canaux maçonnés pour descendre,
25:02 alimenter les abreuvoirs pendant les estives,
25:05 puisque dès cette époque-là, il y avait aussi les estives,
25:07 c'est-à-dire que l'été, on mettait le bétail,
25:09 on sortait le bétail, c'est une vieille tradition,
25:11 et il allait dans les paquages où d'ailleurs l'herbe était de très grande qualité,
25:17 dans les Alpes il y a une très bonne herbe qui pousse en cause de la chaleur.
25:22 – Donc aujourd'hui lorsqu'on crie à l'horreur aujourd'hui
25:25 parce que les glaciers fondent, en réalité ces glaciers sont très récents,
25:30 enfin du moins au futur.
25:31 – En fait les glaciers se rétractent, il n'y a pas de sujet là-dessus,
25:35 c'est évident, mais les glaciers se rétractent,
25:37 mais l'Aubéry-le-Rhin lui n'est pas encore, voilà, mais en plus,
25:42 mais aujourd'hui dans notre époque,
25:44 la source de l'Aubéry-le-Rhin est toujours prise dans les glaces,
25:50 ça veut dire que le glacier n'est pas encore remonté
25:53 au niveau où il était au Moyen-Âge pour que les paysans puissent le façonner,
25:57 le maçonner et le faire descendre vers les abreuvoirs.
25:59 Donc ça c'est une information intéressante.
26:01 Je crois que c'est Emmanuel Macron avec un membre du GIEC, Jean Jouzel,
26:06 qui sont allés il y a un an et demi ou deux ans,
26:09 voir justement constater la rétractation des glaciers pour s'en rendre compte
26:15 et ils sont allés devant la mer de glace.
26:17 Et c'est vrai que la mer de glace elle se rétracte, elle remonte,
26:20 il n'y a pas de doute là-dessus, il n'y a pas d'ambiguïté.
26:24 Par contre ils ne sont pas allés voir le glacier d'Aleche,
26:27 ils sont restés en France.
26:29 Mais s'ils étaient allés de l'autre côté, sur la Suisse, ils l'auraient vu.
26:32 Et ils auraient vu qu'il était toujours encore sous le prix de son glace.
26:36 – On a le marqueur des glaciers, on a d'autres sources,
26:38 d'autres sources sur l'état du climat.
26:41 – Oui, il y a d'autres sources, il y en a une qui est connue
26:46 et qui est notamment utile pour les régions
26:48 où on n'avait pas trop d'histoire et d'historique,
26:51 c'est la dendroclimatologie, c'est-à-dire l'analyse du bois
26:59 et l'analyse des troncs d'arbres notamment.
27:02 Alors vous en avez partout, il faut aussi décorréler un certain nombre de choses
27:05 parce que vous avez des troncs d'arbres qu'on a pu retrouver très anciens,
27:10 pris dans le pergélisol dans les zones arctiques, etc.
27:14 ou bien des bois encore relativement frais mais qu'on coupe
27:19 et dont on analyse la croissance.
27:22 En fait, tout le monde sait, n'importe quelle personne
27:25 qui a assisté à un coupage de bois dans un tronc d'arbre,
27:28 en se promenant en forêt, en regardant, on voit qu'il y a des rots,
27:32 des stris, ce qu'on appelle des stris,
27:34 mais ces stris parlent, d'abord elles parlent parce qu'il y a une stris par an,
27:38 donc on sait à peu près l'âge d'un arbre,
27:42 mais ensuite, quand on analyse les stris, elles-mêmes,
27:46 leur épaisseur et leur couleur vont permettre de déterminer
27:51 ce qui s'est passé cette année-là.
27:52 Et donc on voit notamment le "stress hydrique",
27:56 c'est-à-dire quand un arbre a été soumis à un stress hydrique
27:58 parce qu'il a fait très chaud, la stris est beaucoup moins épaisse
28:03 et elle a une couleur moins nette que celle où l'arbre a bénéficié de pluie,
28:11 de froid, parce qu'il faut aussi un peu de froid.
28:13 Contrairement à ce qu'on pense, on ne va pas dire froid,
28:16 mais on va dire du frais, la fraisseur, pour assurer la croissance.
28:20 – Oui, en termes de sources, il y a d'autres documents intéressants,
28:24 ce sont les documents qui ont trait au vendange.
28:27 – Oui, absolument.
28:29 Ça, ça a été une source très intéressante et très riche pour savoir,
28:35 alors pour l'expliquer clairement, les vendanges étaient réglementés
28:38 dans un certain nombre de villages par des "bans".
28:42 Les "bans", c'est la communauté villageoise.
28:44 – "Ban" B-A-N, c'est ça ?
28:45 – Oui, B-A-N, oui.
28:48 La communauté, c'est quand on parlait des banalités.
28:51 Aujourd'hui, on dirait banalité, c'est autre chose,
28:54 mais ça avait un sens tout à fait différent au Moyen-Âge.
28:56 On parlait du four banal, le pressoir était banal aussi, etc.
29:01 Ça veut dire quoi ?
29:02 Ça veut dire que dans une collectivité, les gens se réunissaient
29:05 et il y avait en quelque sorte un maître,
29:07 ou on dirait un régisseur aujourd'hui,
29:10 qui était chargé pour tout le "ban" avec quelques sapiteurs,
29:15 comme on dirait aujourd'hui, c'est-à-dire quelques experts
29:18 en matière de mûrissement de la vigne, du raisin, etc.
29:23 Il décidait, dans une assemblée, le jour où auraient lieu les vendanges.
29:28 Et ça, c'était acté, et là, toute la collectivité
29:32 changeait d'activité pour faire les vendanges.
29:36 Et ça nous a donné, comme il y a des archives très importantes,
29:39 ça a donné aux historiens des éléments très importants
29:43 pour voir les fluctuations dans les dates des vendanges.
29:48 À certains moments, on voit des vendanges qui commencent en août.
29:52 Et après, dans les périodes plus froides,
29:55 elles vont jusqu'à fin septembre, voire octobre.
29:59 Donc, on voit bien, à travers ces "bans" dont vous parliez,
30:02 on voit vraiment bien, là aussi, une source qui nous montre
30:06 les périodes de réchauffement, le petit optimum,
30:08 comme le petit optimum médiéval,
30:10 et les périodes de refroidissement en fonction des dates des vendanges.
30:14 – Et donc, toutes ces sources nous permettent maintenant
30:17 d'arriver au petit hache glaciaire.
30:19 Donc, le petit hache glaciaire qui commence au 14ème siècle ?
30:24 – 14ème siècle, à peu près, oui.
30:26 Le petit hache glaciaire, et là, on va y rentrer
30:29 pour une longue période aussi.
30:31 Pour nous, on dirait longue période.
30:33 – Oui, donc, la laisselle de l'histoire de l'Europe qui s'éloigne.
30:36 – Et alors là, le petit hache glaciaire, c'est un changement.
30:40 Surtout que personne ne pense qu'il y a des ruptures qui sont instantanées.
30:46 Bien sûr, il y a des marqueurs, et les marqueurs,
30:49 ce sont les éléments comme les glaciers, comme les bancs,
30:52 tout un tas d'indicateurs que les historiens ont trouvés,
30:55 mais sur la réalité, les gens n'ont pas senti instantanément
30:59 quand on fait démarrer le petit hache glaciaire,
31:02 qu'on rentrait dans un petit hache glaciaire.
31:04 Et après, peu à peu, les témoignages affluent,
31:07 et on peut arriver à trouver les sources qui démontrent
31:11 que le temps a totalement changé.
31:12 – Qu'est-ce qu'on a comme témoignages ?
31:13 – Les témoignages, on a d'abord les faits,
31:17 les faits c'est des hivers plus froids,
31:19 et surtout aussi des printemps très frais,
31:23 comme disent certains historiens, je le dis avec un petit sourire
31:25 parce que c'est une expression qu'utilisait beaucoup Emmanuel Le Roy-Lazuri,
31:29 en disant "oui, vraiment là le temps est frais, il est très frais".
31:33 "Frais" dit par lui, ça voulait dire que c'était quasiment froid.
31:37 Voilà, donc on a une fraîcheur qui s'installe,
31:40 du coup avec des effets aussi sur les cultures,
31:43 donc mauvaise récolte, etc.
31:46 Et puis on a des témoignages, on en a des amusants,
31:48 par exemple, Madame de Sévigné, dans ses lettres,
31:53 les fameuses lettres de Madame de Sévigné,
31:55 elle écrit à sa fille, Madame de Grignan,
31:57 donc Grignan, parce qu'elle avait épousé un seigneur de Grignan
32:00 qui vivait dans la vallée du Rhône,
32:02 Grignan c'est une région pas très loin d'Avignon, etc.
32:06 sur la vallée du Rhône,
32:07 et bien elle lui dit "mais comment faites-vous pour survivre ici,
32:12 nous avons un froid", elle écrit le 25 juin,
32:16 "nous avons un froid épouvantable, on est couverts,
32:19 on a refait du feu dans les cheminées,
32:21 et vous me dites que votre vent épouvantable de Provence,
32:24 lui aussi, fait que vous faites du feu,
32:26 et qu'il fait horriblement froid, etc."
32:30 à 25 juin.
32:31 – Et donc ce petit alcacier, lui, dure jusqu'en moitié du 19ème siècle ?
32:36 – Il va se terminer à la moitié du 19ème siècle.
32:38 – Alors j'imagine avec des phases plus ou moins…
32:40 – Bien sûr, c'est toujours, là en l'occurrence,
32:42 ça serait plutôt au descendant,
32:44 mais c'est toujours des températures qui malgré tout montent et descendent.
32:48 Sans les historiens et sans une bonne compréhension avec des marqueurs
32:51 comme les glaciers, comme l'anandroclimatologie
32:54 dont on a parlé pour les arbres,
32:55 et tout un tas d'autres indicateurs,
32:57 on ne comprendrait pas le tendanciel de tout ça.
33:00 Alors que je pense que les contemporains,
33:03 ils avaient froid mais ils ne comprenaient pas.
33:05 Alors on pourrait faire une parenthèse,
33:07 avant de rentrer dans l'âge glaciaire,
33:08 c'est sur… enfin dans la fin de l'âge glaciaire,
33:11 du petit âge glaciaire, c'est sur l'action du soleil.
33:14 Parce qu'on a découvert, grâce à l'astronomie
33:19 et au progrès de l'astronomie,
33:21 des lunettes beaucoup plus fortes, sous Louis XIV,
33:23 et qui ont permis de constater que le soleil
33:27 avait des périodes d'activité ou très fortes ou pas assez fortes,
33:32 ou pas fortes, on ne porte pas de jugement là-dessus,
33:35 et notamment par les tâches solaires.
33:37 C'est sous Louis XIV qu'on a découvert,
33:39 que les astronomes ont découvert les tâches solaires,
33:42 et ces tâches solaires, ce sont les tâches qui vont nous permettre après
33:45 de voir l'activité solaire, et notamment éruptive,
33:48 puisque le soleil n'est qu'une boule de feu,
33:51 d'hydrogène principalement et de quelques autres gaz,
33:53 qui est en éruption permanente.
33:55 – Et puis, on va passer très rapidement sur le sujet,
33:58 mais il s'ajoute des phénomènes, des catastrophes,
34:01 on pourrait appeler des catastrophes naturelles,
34:02 qui sont des éruptions volcaniques importantes,
34:04 à l'autre côté de la planète,
34:06 mais qui vont masquer le soleil pendant plusieurs décennies.
34:09 – Oui, ça c'est des accidents, des accidents de parcours,
34:13 si j'ose dire, mais qui ont coûté cher à la planète à plusieurs reprises.
34:17 On a plusieurs exemples, on a notamment l'exemple d'un volcan en 1815,
34:25 au printemps 1815, le Tambora, qui est un volcan d'Indonésie,
34:29 qui va exploser littéralement en faisant 30 ou 40 000 morts à l'époque,
34:36 donc ce n'était pas la même population qu'aujourd'hui,
34:38 il y en avait moins à l'époque,
34:41 dans l'Indonésie et toutes les îles de ce coin-là,
34:43 et en fait, l'effet de ce volcan,
34:47 tout ce qu'il a rejeté dans l'atmosphère,
34:49 a créé un effacement de saison sur l'année qui a suivi.
34:55 Et en 1816, toute l'Europe grelotte en plein mois d'août,
35:01 et il n'y a pas eu d'été, et les gens ne comprenaient pas pourquoi.
35:06 Ça s'est su après, ça s'est compris après,
35:08 parce que tout était nuageux, le soleil était masqué,
35:12 et donc il ne donnait pas le réchauffement attendu,
35:15 parce que sans réchauffement solaire,
35:17 si on n'a plus de soleil pour nous chauffer,
35:21 eh bien, avis aux amateurs,
35:23 si ils veulent rentrer dans les grottes et essayer de se chauffer.
35:28 – Alors, ce petit hache glaciaire prend fin au milieu du 19ème,
35:34 et donc là, on insiste depuis maintenant à peu près 200 ans,
35:39 à un réchauffement qu'on peut qualifier d'optimum,
35:43 mais on ne sait pas encore s'il est petit ou pas.
35:45 – Moi, je propose une appellation au petit optimum contemporain,
35:48 – Qui est provisoire.
35:50 – Qui est provisoire, parce que peut-être que s'il dure 5000 ans,
35:53 on dira que c'est le grand optimum contemporain.
35:57 – Et d'ailleurs, tout à l'heure, je parlais de chaos,
36:01 on voit bien, est-ce qu'il y a des grandes tempêtes,
36:06 des rales marées qui apparaissent dans cette période ?
36:08 – Oui, dans cette période-là, il y a des phénomènes,
36:11 alors, rien n'est linéaire, on l'a déjà dit,
36:13 mais donc il y a des phénomènes étonnants.
36:16 Il y a eu notamment deux rats de marée qu'on a oubliés, au 19ème siècle,
36:23 il y a eu un rat de marée au sable de Lonne,
36:28 qui a envahi tout le remblai, ce qu'on appelle le remblai au sable de Lonne,
36:32 pour ceux qui connaissent un peu la région,
36:34 et puis de la même façon, à Saint-Malo, la digue, c'est Rochebonne je crois,
36:40 a été totalement submergée par un rat de marée également,
36:43 donc ça c'est des effets, j'allais dire, des effets naturels,
36:50 mais qui sont provoqués par des changements aussi,
36:53 probablement de courant marin,
36:55 en lien avec l'atmosphère et l'évolution de l'atmosphère.
36:57 – On a vu pendant la guerre de 14-18 également, des hivers extrêmement…
37:02 – Extrêmement rudes, notamment 16-17,
37:05 qui sont, ou là, déjà c'était pas drôle d'être dans les tranchées,
37:09 et au combat, dans cette boucherie,
37:13 et là véritablement, les "poilus" comme on les appelait, ont souffert énormément.
37:19 – C'est pour ça, je parlais dans ma introduction des titres de la presse aujourd'hui,
37:24 par exemple on oublie de dire, je crois que c'est en 1921,
37:27 le 14 juillet, le défilé du 14 juillet est annulé, parce qu'il fait trop chaud.
37:30 – Il fait trop chaud oui.
37:32 [Rires]
37:34 – Parce que finalement, c'est quoi aujourd'hui notre problème par rapport au climat ?
37:38 C'est ce que je disais, on ne se réfère plus du tout au passé,
37:41 on est dans l'émotion instantanée ?
37:44 – Oui, il y a un mélange des deux,
37:46 c'est-à-dire, je pense que l'homme moderne est un homme qui a tendance à couper ses racines,
37:51 et à ne plus regarder que l'instant en même temps,
37:55 qui en même temps est intéressant, mais je ne l'ai pas fait exprès.
37:59 Et donc finalement, les gens n'ont plus que cette culture de l'instant,
38:05 et ils sont marqués par ça, puisque notre environnement fait que,
38:09 environnement humain, fait qu'aujourd'hui on a l'impression
38:14 que ce qui est important c'est le sensationnalisme, c'est l'instant,
38:17 et puis trois jours après, ou une semaine après, tout le monde aura tout oublié,
38:20 et puis on va refaire les choses.
38:22 C'est intéressant ce que vous dites là-dessus,
38:23 parce que à travers cette notion d'instant et de manipulation,
38:29 en quelque sorte, de l'opinion sur l'instant,
38:31 on voit bien qu'on perd toute perspective historique,
38:37 et on a du mal à juger aussi du futur.
38:40 – Ça c'est vrai, on n'arrive pas à analyser…
38:43 – On n'anticipe plus, on ne peut pas anticiper,
38:46 et puis en plus, entre guillemets, la grande dissipation,
38:48 c'est-à-dire le fait qu'aujourd'hui on a énormément d'informations.
38:51 C'est vrai que l'information autrefois circulait de façon différente,
38:55 et ça, je n'ai pas de jugement de valeur, c'est un fait et c'est bien en soi.
39:01 Après, l'usage qui en est fait pour des questions assez mercantiles,
39:04 lui, peut travestir véritablement les choses et entraîner des manipulations.
39:10 – Oui, donc c'est le sujet de votre livre "Réchauffement climatique,
39:13 enquête sur une manipulation mondiale",
39:15 avec une grosse partie consacrée à l'histoire que nous venons d'évoquer,
39:19 parue aux éditions Pardes.
39:21 Et je voulais signaler également un autre petit ouvraille,
39:24 d'Olivier Postel-Vinay, "Sapiens et le climat",
39:28 une histoire bien chahutée et ça paraît chez Lattesse.
39:32 Alban Darguin, merci infiniment.
39:34 – Merci à vous.
39:35 – Je rappelle votre livre parue chez Pardes,
39:36 et également "Éolienne, un scandale d'État",
39:39 aux éditions Synthèse Nationale.
39:41 Vous allez retrouver maintenant Christopher Lanne et "La petite histoire",
39:45 mais avant, n'oubliez pas de cliquer sur le pouce levé sous la vidéo
39:48 et de vous abonner à notre chaîne YouTube.
39:50 Merci et à bientôt.
39:52 – Merci à vous.
39:53 [Générique]
40:07 En 1968-69, en pleine transition politique et culturelle,
40:11 mai 68, tout ça, tout ça,
40:13 la France doit faire face à une nouvelle menace,
40:16 10 ans après la grippe asiatique
40:18 et 50 ans après la terrible grippe espagnole.
40:20 Venue du Hong Kong, ce nouveau virus va faire 1 million de morts dans le monde,
40:24 dont plus de 30 000 en France.
40:26 Baptisée la grippe de Hong Kong,
40:27 la maladie se propage rapidement du fait des transports aériens,
40:31 fait inédit, ce qui en fait le premier grand fléau de l'ère moderne.
40:34 Et pourtant en France, malgré les victimes nombreuses,
40:37 malgré les perturbations dans les transports,
40:39 malgré les écoles fermées,
40:40 malgré les gens qui se font vacciner à même le trottoir,
40:43 cette épidémie passe quasiment inaperçue.
40:45 Aujourd'hui encore, même les plus grands boomers ne s'en souviennent que vaguement.
40:48 Alors, comment expliquer ce silence ?
40:50 Cette amnésie aussi,
40:51 et surtout le contraste frappant avec la situation actuelle
40:54 qui voit le coronavirus au centre de toutes les préoccupations médiatico-politiques.
40:59 Allez, on y va !
41:00 [Générique]
41:15 Dans le dernier épisode de La Petite Histoire, qui a très bien fonctionné,
41:18 d'ailleurs ça doit être grâce à vos encouragements,
41:20 à vos likes, que je vous invite à renouveler,
41:22 eh bien on a parlé de la grippe espagnole de 1918.
41:26 Et vous, vous vous souvenez à quel point c'était terrible ?
41:29 Elle a été terrible et meurtrière, plus de 50 millions de morts.
41:31 Ça, c'était la première grande pandémie.
41:33 Ensuite, en 1957, nouvelle épidémie,
41:37 moins grave celle-ci que la grippe espagnole,
41:38 mais elle fait quand même 2 millions de morts,
41:40 dont plus de 10 000 en France.
41:42 On l'appelle la grippe asiatique.
41:44 Et déjà à cette époque,
41:45 l'ORTF, comme les journaux de l'époque,
41:48 en parle à peine et minimise la situation.
41:50 Et enfin, en 1968, 1969 et jusqu'à janvier 1970 même,
41:55 troisième et dernière grande épidémie du XXe siècle,
41:59 la grippe de Hong Kong.
42:00 Je parle d'épidémie de grippe.
42:01 C'est elle qui va nous intéresser dans cet épisode,
42:04 parce que malgré les 31 000 morts et même plus qu'elle a fait en France,
42:08 malgré, comme je l'ai dit, la fermeture de certaines écoles,
42:11 les queues devant les pharmacies,
42:13 enfin une rupture de la normalité totale,
42:15 les hôpitaux débordés,
42:16 les vaccinations à même le trottoir, comme je l'ai rappelé,
42:19 eh bien peu de gens en ont un souvenir.
42:21 Au mieux, un vague souvenir.
42:22 Alors c'est quand même étrange,
42:23 parce que si on regarde,
42:25 si on compare à la situation actuelle avec le coronavirus
42:28 et tout le foin médiatique qu'on en fait au quotidien,
42:31 je ne dis pas que c'est injustifié,
42:32 d'autant qu'on n'a pas encore le recul nécessaire sur le Covid-19,
42:35 mais il y a quand même une grosse et flagrante différence de traitement.
42:38 Parce qu'à l'époque, comme avec la grippe asiatique,
42:41 les médias, c'est-à-dire les journaux,
42:43 puis la télé et la radio publique,
42:45 personne ou presque n'en parle.
42:46 Alors que nous, avec le Covid-19,
42:49 le décompte des morts tous les jours,
42:50 le confinement, tout ça,
42:51 eh bien il aura beau faire moins de 30 000 morts,
42:54 peut-être, eh bien on va s'en souvenir.
42:56 Alors pourquoi, et c'est là toute la question,
42:58 pourquoi les boomers ne s'en souviennent presque pas,
43:01 et donc pourquoi les médias de l'époque l'ont passé sous silence,
43:05 malgré l'évidente gravité de la situation ?
43:07 Avant de répondre à cette question,
43:08 tout d'abord je vais vous faire une brève chronologie des faits.
43:10 Cette épidémie, on l'appelle "grippe de Hong Kong",
43:13 mais à l'origine, elle vient du centre de la Chine,
43:16 comme aujourd'hui et comme souvent d'ailleurs.
43:18 C'est là que les premiers cas sont apparus,
43:20 avant qu'elle éclate dans la ville portuaire
43:22 surpeuplée de Hong Kong,
43:23 qui était une colonie britannique.
43:25 On dénombre rapidement 500 000 cas à Hong Kong,
43:27 donc c'est quand même assez virulent,
43:29 puis la maladie s'étend au Japon,
43:31 en Asie du Sud-Est, en Australie,
43:33 puis aux États-Unis,
43:34 c'est les États-Unis qui sont touchés,
43:36 avec les Marines de retour du Vietnam en juillet 1968.
43:41 Elle fera plus de 50 000 morts en 3 mois,
43:43 d'ailleurs aux États-Unis,
43:44 mais c'est à l'automne 1969
43:47 qu'elle arrive en Europe, et donc en France.
43:49 Mais pour l'instant, le virus ne fait que peu de ravages,
43:52 et l'épidémie semble même rapidement terminer.
43:55 En octobre 1979,
43:57 lorsque l'OMS est réunie à Atlanta
43:59 pour une conférence internationale sur la grippe de Hong Kong,
44:02 les scientifiques estiment que la pandémie est bel et bien finie.
44:05 Puis, c'est la douche froide.
44:07 À partir de décembre 1969,
44:09 la grippe de Hong Kong fait son grand retour
44:12 et frappe la France,
44:13 violemment cette fois.
44:14 Ça va durer jusqu'en janvier,
44:16 et selon un décompte récent
44:18 entrepris par le statisticien Antoine Flau
44:21 et l'épidémiologiste Alain Jacques Valéron,
44:23 la grippe de Hong Kong a fait,
44:25 en 2 mois en France,
44:27 31 226 morts,
44:29 dont plus de 25 000 pour le seul mois de décembre.
44:32 Donc plus de 31 000 morts,
44:33 autant vous dire du moins pour le mois de décembre,
44:35 que c'était quand même une énorme surmortalité,
44:38 et pourtant à l'époque, ça va passer totalement inaperçu.
44:41 Pas de gros titres,
44:42 pas de décomptes macabres tous les jours,
44:45 pas de déchaînement médiatique.
44:47 Pourquoi ?
44:47 Ça m'amène donc au sujet principal de cette vidéo,
44:49 le silence médiatique de l'époque
44:51 et l'amnésie totale des gens qui ont vécu ça en 69,
44:55 ce qui va évidemment de pair.
44:57 Je vous l'ai dit, en décembre 69,
44:59 en France,
45:00 il y a eu un énorme pic,
45:01 21 068 morts
45:03 liés à la grippe de Hong Kong.
45:04 C'est quand même énorme,
45:06 surtout comparé à la mortalité actuelle en France
45:09 et même d'ailleurs en Italie.
45:10 Je le répète,
45:10 on n'a pas encore le recul nécessaire pour le Covid-19,
45:13 mais tout de même,
45:14 France et Italie cumulées,
45:16 même si on faisait ça,
45:17 on est loin des 25 000 morts en un mois de l'époque.
45:21 Et pourtant, c'est ça qui est très intéressant,
45:23 à l'époque, les médias n'en parlent quasiment pas,
45:25 alors que nous,
45:26 on en a pour notre compte dans les médias.
45:28 Je dis les médias pour l'époque,
45:29 mais c'était sans commune mesure avec aujourd'hui
45:31 où on a Internet,
45:32 et puis surtout,
45:33 surtout les chaînes d'infos
45:35 ont continu,
45:36 car c'est elles qui entretiennent,
45:37 à tort ou à raison,
45:39 souvent à tort la plupart du temps,
45:40 mais là, on ne sait pas encore,
45:41 la psychose actuelle
45:43 avec un décompte des morts
45:45 chaque jour et même chaque heure.
45:46 En 69, c'est simple,
45:47 il n'y avait qu'une chaîne de télé,
45:49 la radio,
45:50 enfin c'était le RTF, la télé publique,
45:51 la radio et les journaux nationaux.
45:53 Eh bien malgré tout,
45:54 en décembre 69,
45:56 donc pic de l'épidémie,
45:58 Le Monde écrit le 18 décembre,
46:00 je cite,
46:01 que l'épidémie paraît régresser.
46:03 Le Figaro, pareil,
46:04 18 décembre,
46:05 alors qu'on est en plein dedans,
46:06 il écrit que l'épidémie,
46:07 je cite,
46:08 "reste stationnaire".
46:09 Et alors que François,
46:11 durant la même période,
46:12 avance le chiffre de 12 millions de malades,
46:14 le même quotidien,
46:15 François estime en décembre,
46:17 toujours,
46:18 que cette histoire de grippe
46:19 n'est qu'un marronnier d'hiver.
46:21 Là, je cite François,
46:22 un marronnier d'hiver.
46:23 Un chroniqueur du Monde nous dit même,
46:25 je cite,
46:26 "l'épidémie de grippe n'est ni grave,
46:28 ni nouvelle,
46:29 est-il bien utile
46:30 d'ajouter à ces mots
46:32 les risques d'une psychose collective ?"
46:34 Et pendant ce temps,
46:35 pendant ce temps,
46:36 au-delà des morts qui sont nombreux,
46:38 les hôpitaux sont submergés.
46:40 En réanimation,
46:41 on entasse les morts
46:42 dans une pièce spéciale
46:43 à défaut de pouvoir tous
46:45 les évacuer efficacement.
46:47 Beaucoup de gens sont malades
46:48 et donc l'économie est impactée.
46:50 Des trains sont annulés,
46:51 faute de cheminots.
46:52 Des boutiques sont fermées,
46:53 faute de commerçants.
46:55 Des écoles,
46:56 faute d'enseignants.
46:57 Les gens font la queue
46:58 devant les pharmacies
46:59 et se font vacciner
47:00 à même le trottoir
47:02 par des étudiants en médecine
47:03 faute de médecins.
47:04 Bref, c'est visible,
47:06 palpable même, au quotidien.
47:07 D'autant que, petit mot
47:08 sur le vaccin en question,
47:10 je vous ai dit qu'il y avait
47:11 des queues pour se faire vacciner.
47:12 Il a été développé par l'Institut Pasteur
47:14 à la Hath à l'époque
47:15 et il s'est avéré très peu efficace,
47:17 médiocre même,
47:18 30% d'efficacité.
47:20 C'est très mauvais,
47:21 car la nouvelle souche du virus
47:22 n'y avait même pas été intégrée.
47:24 Tout au mieux, les journaux
47:25 y consacrent quelques
47:26 tout petits articles secondaires
47:28 et encore, c'était limite
47:29 des articles People
47:30 qui faisaient la liste des personnalités
47:32 en France comme au Royaume-Uni
47:34 qui étaient alités.
47:35 C'était vraiment pas glorieux.
47:37 Voilà pourquoi les personnes
47:38 qui ont vécu cet événement
47:39 à l'époque ne s'en souviennent pas
47:41 ou très peu.
47:42 Tout simplement car il n'a pas été traité
47:45 sérieusement par les médias
47:47 comme par les politiques.
47:48 Mais alors, comment expliquer
47:49 ce silence, cette légèreté
47:51 alors que 30 000 personnes
47:52 vont mourir ?
47:53 Ils vont mourir d'hémorragie pulmonaire,
47:55 le visage gris, les lèvres bleues
47:57 des personnes âgées,
47:58 mais aussi des jeunes gens
48:00 de 20, 30, 40 ans.
48:02 Le tout en un temps très court.
48:03 La réponse est simple.
48:05 À l'époque, cette information
48:07 anxiogène n'intéresse personne.
48:10 Et l'agenda politico-médiatique
48:11 est très chargé.
48:13 L'homme vient de poser le pied sur la Lune.
48:15 Oui, on a bien été sur la Lune.
48:16 Désolé pour les complotistes.
48:18 Puis écoutez, si ça vous choque,
48:18 vous avez le cas, vous organisez
48:20 un petit apéro confiné
48:21 avec les platistes et les antivax.
48:22 Tout le monde sera très content.
48:24 Donc, l'homme vient de conquérir la Lune.
48:26 On est en 69.
48:27 La guerre du Vietnam s'enlise.
48:29 Georges Pompidou s'installe à l'Elysée.
48:32 Et on est juste après mai 68,
48:34 dans une période de transformation politique,
48:36 culturelle, sociétale.
48:37 Bref, à ce moment-là, la grippe est loin.
48:40 Très loin dans la liste des sujets
48:42 qui intéressent les Français,
48:43 qui en plus, étaient à ce moment-là
48:44 une population plutôt optimiste
48:46 en cette période de 30 glorieuses.
48:48 C'est d'ailleurs ce que dit Schneiderman
48:50 dans un article de l'Ibée.
48:52 Quoi ? Non, je ne lis pas l'Ibée.
48:54 Non, je ne lis pas l'Ibée.
48:55 Je suis tombé dessus en faisant mes recherches.
48:57 S'il vous plaît.
48:57 Donc, Schneiderman nous dit dans l'Ibée,
48:59 je m'en excuse très sincèrement,
49:00 il nous dit que les épidémies
49:02 ne sont pas des histoires glorieuses
49:04 et que les journaux n'ont aucun intérêt
49:06 ni intellectuel, ni financier,
49:08 à faire flipper les lecteurs.
49:10 Alors, quand j'ai lu ça,
49:11 j'ai sauté au plafond,
49:12 parce que la peur,
49:13 c'est quand même le fond de commerce
49:14 principal des médias.
49:16 Mais là où il a raison, en revanche,
49:18 c'est que là, on parle de l'époque des médias
49:20 des années 60-70,
49:21 l'époque des 30 glorieuses.
49:23 Donc, en effet, à ce moment-là,
49:24 ce qui faisait vendre
49:25 était totalement différent de notre époque
49:28 de déclin où la peur fait vendre
49:30 et où les chaînes d'info en continu
49:31 entretiennent une psychose 24 heures sur 24
49:34 pour prospérer.
49:35 Pour toutes ces raisons,
49:36 la grippe de Hong Kong n'était à l'époque
49:38 qu'un fait divers, secondaire,
49:40 people même parfois,
49:41 et même les années suivantes,
49:42 les médias et les politiques
49:44 n'ont eu aucun intérêt à y revenir,
49:46 car concrètement, ça a été un fiasco collectif.
49:49 Les médias ont traité la question
49:51 avec légèreté,
49:52 tout comme les politiques.
49:54 Les autorités sanitaires
49:55 ont sous-estimé la menace
49:57 et le vaccin était tout pourri.
49:58 Voilà, donc on n'a aucun intérêt
50:00 d'un côté comme de l'autre
50:02 à mettre ce grand raté sous le tapis.
50:06 Il y a beaucoup de similitudes
50:08 avec la situation actuelle pourtant
50:10 sur la nature du virus, etc.,
50:12 la manière dont il se transmet
50:13 grâce aux lignes aériennes,
50:15 à la mondialisation,
50:16 mais dans certains domaines,
50:17 on vit l'extrême inverse.
50:19 Aujourd'hui, par exemple,
50:20 la psychose est partout dans les médias.
50:22 Les décomptes macabres
50:25 sont diffusés toute la journée.
50:27 Les politiques surréagissent
50:29 alors qu'ils n'ont même pas de moyens.
50:30 Bref, on vit l'inverse sur ce plan.
50:32 Mais par contre, aujourd'hui,
50:33 comme en 69,
50:35 le virus vient percuter de plein fouet
50:37 un système médical et hospitalier
50:39 à la ramasse.
50:40 Et évidemment,
50:41 dans cette situation,
50:42 la responsabilité politique
50:44 est énorme à l'époque comme aujourd'hui.
50:46 Quoi qu'il en soit,
50:47 si nos aînés ne s'en souviennent
50:48 que très peu
50:49 de cette grippe de Hong Kong,
50:50 malgré son évidente gravité,
50:52 même en France,
50:53 eh bien nous,
50:53 ce Covid-19,
50:55 qu'il soit plus ou moins grave
50:57 que la grippe de Hong Kong,
50:58 d'ailleurs c'est ça le paradoxe,
51:00 eh bien on va s'en souvenir,
51:01 croyez-moi.
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