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Jeudi 13 février 2025, NEW ERA reçoit Laurent Lemarchand (Directeur Général, NATUP) , Julien Denormandie (Ancien Ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation) , Xavier Unkovic (CEO, Bonduelle) et Johann Fournil (Directeur de la communication, M2I)

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00:00Générique
00:12Bienvenue dans New Era, l'émission qui décrypte les grandes évolutions de notre monde.
00:17Aujourd'hui nous allons aborder un sujet central, essentiel pour notre pays,
00:21la souveraineté alimentaire et industrielle en France.
00:24Dans un contexte marqué par les crises géopolitiques, climatiques et sanitaires,
00:28la question de l'autonomie est plus que jamais sur la table.
00:31Comment garantir notre capacité à produire et transformer localement,
00:35tout en innovant pour relever les défis du XXIe siècle ?
00:38Quel rôle jouent nos agriculteurs, nos industriels et nos politiques publiques dans cette quête de résilience ?
00:44Pour en parler, nous avons le plaisir d'accueillir quatre invités exceptionnels,
00:48des acteurs majeurs de la souveraineté française.
00:50Julien Denormandie, ancien ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation,
00:54vous nous apporterez votre expertise sur les politiques agricoles françaises
00:57et les leviers d'action pour renforcer notre autonomie.
01:00Bonjour.
01:01Bonjour.
01:02Johan Fournil, directeur de la communication de M2i Life Science,
01:06pionnier dans les solutions de biocontrôle,
01:08une alternative durable aux intrants chimiques pour une agriculture résiliente.
01:12Bonjour.
01:13Bonjour.
01:14Xavier Unkovic, CEO de Bonduelle, leader mondial des légumes prêts à consommer,
01:18qui mise sur l'innovation et la production locale pour répondre aux attentes des consommateurs.
01:22Et aux attentes des défis climatiques également.
01:25Bonjour.
01:26Bonjour Fanny.
01:27Et Laurent Lemarchand, le DG de Natup, une coopérative agricole qui accompagne les producteurs
01:32dans leur transition vers des modèles plus autonomes et durables.
01:34Bonjour.
01:35Bonjour Fanny.
01:36Au programme état des lieux, défis, initiatives concrètes et vision pour l'avenir de la France,
01:42souveraine à la fois sur le plan alimentaire et industriel,
01:45préparez-vous pour 50 minutes de débat, d'échange et d'éclairage,
01:49sur un enjeu qui nous concerne tous.
01:51C'est parti.
01:52La souveraineté alimentaire et industrielle est devenue un enjeu stratégique dans notre pays
01:56entre crise climatique, géopolitique et exigence de transition écologique.
02:01Comment relever ce défi pour garantir notre autonomie ?
02:05Alors Julien de Normandie, je vais vous poser la question en tant qu'ancien ministre de l'agriculture.
02:09Vous avez piloté plusieurs réformes.
02:11Quels sont selon vous les points forts et les faiblesses de notre modèle agricole actuel ?
02:16C'est une question qui est incroyablement importante.
02:19Moi, je pense qu'il faut d'abord revenir à la vision.
02:23Vous l'avez dit, c'est d'ailleurs le titre de cette émission, la souveraineté alimentaire.
02:28Qu'est-ce qu'on entend par souveraineté alimentaire ?
02:31Et je crois que c'est ça la question fondamentale.
02:34Est-ce que la souveraineté, c'est une forme d'autonomie de production ?
02:38A l'évidence, oui.
02:39La première des souverainetés, c'est de pouvoir garantir à son propre peuple la capacité de le nourrir.
02:44Dans les moments de crise, on le voit aujourd'hui de manière tragique ce qui se passe à Mayotte.
02:55Et dans les moments de long terme, c'est-à-dire comment la France continue à avoir cette capacité de nourrir son propre peuple.
03:03Et là, sur ce volet de l'autonomie, de la souveraineté, à l'évidence, la France n'est plus souveraine.
03:08Elle l'est dans certaines filières.
03:10Je pense évidemment aux céréales.
03:12Elle ne l'est pas dans d'autres.
03:14Ou elle ne l'est plus dans d'autres.
03:16Comme par exemple les fruits et légumes.
03:19Xavier en parlera.
03:21Mais comme également dans un sujet qui moi m'a beaucoup beaucoup occupé quand j'étais ministre.
03:26La question des protéines végétales.
03:28La France a perdu sa souveraineté là-dessus.
03:31Pour plein de questions, il est important de revenir dessus.
03:34Parce que parfois, ce fut lié à des décisions politiques historiques qu'il nous faut aujourd'hui corriger.
03:40Et puis après, la souveraineté, au-delà de l'autonomie, c'est une question.
03:44Et Fanny, vous l'avez bien mis en avant dans l'introduction.
03:48Vous avez beaucoup parlé de géopolitique.
03:50Aujourd'hui, la souveraineté, elle emporte aussi ces questions géopolitiques.
03:54D'abord, la géopolitique liée au changement climatique.
03:58On voit que ce changement climatique vient percuter nos productions.
04:02On sait aussi que du fait du changement climatique,
04:05entre 8 à 10% des terres arables, c'est-à-dire des terres cultivables,
04:09ne le seront plus à l'échelle mondiale d'ici la fin du siècle.
04:13Ça va rebattre les cartes.
04:15Mais la géopolitique, c'est aussi l'arme alimentaire.
04:18Ce que la Russie a fait en Ukraine, c'est aussi de jouer sur l'arme alimentaire.
04:24Je vous donne juste un exemple très concret.
04:26Quatre mois après le début de la guerre russe en Ukraine,
04:31le ministre des Affaires étrangères russe, monsieur Lavrov, était accueilli en Égypte.
04:36Pourquoi il était accueilli en Égypte ?
04:38Parce que l'Égypte dépend dans ses importations de blé de la Russie,
04:43là où jusqu'à présent, c'était des partenariats avec l'Europe et les États-Unis d'Amérique.
04:47Ces derniers, d'ailleurs, les États-Unis d'Amérique,
04:50dès la fin de la Seconde Guerre mondiale,
04:53avaient conceptualisé ce qu'ils appelaient la servitude alimentaire
04:58en disant la plus grande des servitudes qu'on puisse créer, c'est celle à l'aliment.
05:02Parce que dans la vie, il y a deux personnes à qui vous parlez gentiment,
05:05dont vous dépendez, c'est celui qui constitue votre banquier et celui qui vous nourrit.
05:12Et ça, la Russie, les États-Unis l'ont bien compris.
05:15Et donc cette souveraineté, pour moi, c'est notre autonomie alimentaire dans les filières,
05:19comment on regagne et le défi est absolument majeur.
05:22Il y a plein de leviers, il y a plein de choix politiques,
05:25mais aussi le rôle qu'on joue face à ces défis géopolitiques et climatiques.
05:30Est-ce que l'Europe, au final, a une mission nourricière ?
05:33La France a une mission nourricière à travers le monde.
05:36Ça emporte aussi la question de la souveraineté et c'est un sujet complexe
05:40parce qu'on voit aussi dans le débat public certains qui disent
05:42qu'il faut produire pour nous-mêmes et ne pas exporter.
05:45Moi, je considère qu'il faut aussi avoir une agriculture qui exporte,
05:50du fait précisément de ces raisons-là au-delà de la création de valeurs qui existent.
05:55Donc voilà, pour moi, il faut d'abord poser les bases.
05:57Quelle est la vision ? Regagner en autonomie, jouer contre toutes ces luttes géopolitiques
06:04pour fixer le cap de cette souveraineté.
06:07Ensuite, les outils pour y arriver sont essentiels,
06:09mais quand vous avez la vision, c'est plus simple de définir les outils.
06:12Évidemment, évidemment.
06:13Xavier Hancovic, Bonduelle est un acteur mondial avec une forte empreinte française.
06:17Quelle est la place de la France dans votre chaîne de production
06:19et comment gérer la concurrence avec les pays à bas coût ?
06:22Ah, super question.
06:23Alors, il y a beaucoup de questions dans une seule question.
06:25Et oui, il y a beaucoup de questions dans une seule question.
06:27Alors, nous, on a beaucoup de chance parce que notre business model fait que
06:30nos unités de fabrication sont au cœur de nos champs, au milieu de nos champs.
06:34Donc en France.
06:35Puisqu'on a l'objectif d'apporter des légumes et des légumineuses de qualité,
06:39et donc très fraîches.
06:40Entre le moment où on récolte nos légumes et le moment où on les met dans un contenant
06:46qui va les préserver, on a entre deux et quatre heures.
06:48Donc, il faut absolument qu'on soit au cœur de nos champs.
06:51On peut dire un circuit court.
06:52Très court, effectivement.
06:53Effectivement, circuit court.
06:54Et ça, c'est la nature même de ce que l'on fait.
06:57Et donc, ça nous force à raison à être en France essentiellement.
07:02Et nous, nous produisons là où nous vendons.
07:07Donc, on a cette chance extraordinaire en termes de depuis 171 ans,
07:11on fait quasiment la même chose.
07:13Julien de Normandie nous disait tout à l'heure, on parlait des fruits et légumes,
07:16en disant qu'en France, par exemple, 50% des fruits consommés,
07:18des légumes consommés en France sont importés.
07:21C'est une source du ministère de l'Agriculture 2022.
07:23Oui, alors, quand on parle de légumes, je crois que Julien a parlé de légumineuses également.
07:29Alors, il faut savoir que la filière légumineuse n'existe pas en France.
07:32On a la chance de la travailler avec la coopérative Euralis.
07:37Et on est les premiers avec Euralis à vraiment développer cette filière
07:40parce qu'elle est essentielle.
07:41Elle est très importante.
07:43On parle de source de protéines, même s'il y a un peu de protéines dans les petits pois.
07:47Ce n'est pas la majorité des légumineuses.
07:50Et donc, cette capacité à apporter de la transparence aussi.
07:53Moi, j'aime beaucoup la souveraineté et la transparence.
07:56Aujourd'hui, il y a très peu de transparence sur la provenance des légumes et des légumineuses
08:00offertes aux consommateurs.
08:02En fait, on ne force pas la transparence ou on n'incite pas la transparence.
08:07Nous, sur nos étiquettes, sur nos produits, on marque d'où vient le produit.
08:11Ce n'est pas une norme en Europe, malheureusement.
08:15Mais je crois qu'on peut fabriquer…
08:17Les produits peuvent venir d'ailleurs, mais une fois qu'ils sont mis ensemble en France,
08:21on peut dire qu'ils sont français.
08:23C'est ça, enfin.
08:24Je m'exprime mal.
08:25En fait, Fanny, ce que vous pouvez trouver, c'est des produits sur des étalages…
08:30Qui viennent de l'étranger.
08:31Qui viennent de l'étranger sans savoir qu'ils viennent de l'étranger.
08:33Voilà.
08:34Et il y a marqué « fabriqué en France ».
08:35Il n'y a même pas marqué « fabriqué en France »
08:37puisque le lieu de fabrication n'est même pas au lieu de fabrication.
08:39Et pourquoi il n'y a pas une obligation légale là-dessus ?
08:41On y travaillait beaucoup avec le gouvernement précédent.
08:44Et Julien peut en parler parce qu'on était très favorables à ça.
08:48Il y a eu des volets correctifs.
08:51En effet, l'exemple qui consiste à dire…
08:54C'était très flagrant et c'est pour ça qu'on a modifié les réglementations sur la viande importée.
08:59Vous aviez de la viande qui était mise en barquette.
09:01Et comme la mise en barquette se faisait en Europe ou sur le territoire français,
09:05vous mettiez le drapeau européen ou le drapeau français
09:08alors que l'origine de la viande n'était évidemment ni française ni européenne.
09:13Ça, la réglementation a changé.
09:15Mais ce que dit Xavier sur la transparence, c'est absolument essentiel.
09:18La façon de retrouver une souveraineté, c'est de regagner un lien avec nos propres territoires.
09:22Et donc, c'est de savoir d'où vient notre alimentation.
09:25Et ça, c'est important quand on veut être en compétition,
09:28pour répondre à votre troisième question dans la première question.
09:31Comment on est en compétition ?
09:35En fait, c'est d'offrir aussi le choix au consommateur en termes de prix,
09:38de savoir s'il va acheter du maïs doux qui vient de Chine,
09:41tout en étant sponsorisé par le gouvernement chinois,
09:44à travers un réseau de distribution qui est plus ou moins européen,
09:47ou un maïs qui est cultivé dans le sud-ouest de la France,
09:50avec des personnes qui ont une autre appréhension de la façon dans laquelle on cultive.
09:56On protège cette relation avec nos agriculteurs et on offre un produit français.
10:01C'est une question de choix.
10:02Les consommateurs ont des nouvelles attentes aujourd'hui ?
10:04Oui.
10:05Pour avoir des produits plus locaux, plus durables.
10:08Comment Bonduelle s'adapte ?
10:10Pour nous, c'est essentiel de bien comprendre la façon dans laquelle les gens consomment.
10:14Parce que je pense que la façon dans laquelle ma grand-mère m'offrait,
10:18quand j'étais petit, des légumes à déjeuner en disant
10:21« c'est bon pour toi », c'était une certaine façon de consommer.
10:23Aujourd'hui, on va consommer quand on prend son train,
10:26on va consommer entre milliers d'œufs, sachant qu'on cuisine de moins en moins.
10:30Donc il faut que nous, on puisse s'adapter en termes de plats complets,
10:34avec des niveaux de prix qui sont très abordables.
10:36On a d'ailleurs un produit, ce n'est pas de la pub,
10:39mais qui s'appelle « Lunchbowl » qui est rempli de bonnes choses,
10:42légumes, légumineuses, pour moins de 3,50 €.
10:44Je vous mets au défi à Paris, mais même en région,
10:47de trouver un repas à moins de 3,50 €.
10:49Et ça, c'est des produits, c'est des légumes qui viennent de France,
10:52qui sont cultivés en France avec des agriculteurs français et qui sont hyper bons.
10:58J'ai une question pour Julien de Normandie.
11:00Est-ce que ça coûte cher de bien manger, Julien ?
11:03Oui, et il faut l'assumer.
11:06Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas travailler avec grande force
11:11pour gagner en compétitivité dans notre agriculture,
11:14parce que l'un des sujets de la souveraineté et de l'autonomie,
11:17c'est d'avoir une agriculture qui soit compétitive.
11:20Mais il y a un immense défi dans notre société,
11:23c'est de redonner de la valeur à l'alimentation.
11:25Et ça, pour moi, c'est un combat qui est immense.
11:29Pourquoi je dis ça ?
11:31Parce que si on perd notre lien avec l'alimentation,
11:34si on perd la valeur associée à cette alimentation,
11:39à ce moment-là, on sera dans une incapacité totale
11:43de bien rémunérer nos agriculteurs et donc d'asseoir notre souveraineté,
11:47parce que la première de nos souverainetés,
11:49c'est de faire en sorte que nous ayons toujours des agriculteurs dans notre pays.
11:53Songez qu'entre 2010 et 2020,
11:55100 000 exploitations agricoles ont disparu dans notre pays,
11:59100 000 sur 500 000, il n'en reste plus que 400 000.
12:02Et donc, il faut redonner de la valeur à l'alimentation.
12:06Et là, sur ce sujet, on a écrit un livre avec Eric Orsona
12:10qui s'appelle Nourrir sans dévaster,
12:12un voyage dans la complexité de ce sujet.
12:16Et dans ce voyage, on part notamment aux Etats-Unis.
12:19Et aux Etats-Unis, qu'est-ce qu'on voit ?
12:21On voit des programmes de logements
12:23où dans ces logements, il n'y a plus de cuisine.
12:26Pourquoi il n'y a plus de cuisine ?
12:27Parce qu'à quoi bon avoir une cuisine
12:29quand vous pouvez tous les jours vous faire commander
12:33et vous faire livrer par des dark kitchens ?
12:37Autre exemple, vous voyez les cordons bleus.
12:40Le cordon bleu, qui est une histoire incroyable dans notre pays.
12:43Le cordon bleu, auparavant, c'était la plus haute distinction,
12:46c'était l'ancêtre de la Légion d'honneur.
12:49Les cordons bleus, au milieu des années 90,
12:51il y avait une marque qui avait fait une pub,
12:53vous vous souvenez, avec le loup de Tex Avery
12:56qui tombait fou amoureux non pas de Betty Boop,
12:59mais du cordon bleu.
13:01Une pub qui a entre guillemets bercé mon enfance.
13:03La publicité commençait par ces termes
13:06pour que papa et maman n'aient plus de temps à perdre
13:09avec la cuisine traditionnelle.
13:12Et ce que je veux dire par là,
13:13c'est que notre rapport à l'alimentation,
13:15si on n'arrive pas par l'école, par la santé,
13:18le premier des médicaments est notre alimentation,
13:21disait Hippocrate.
13:23371 ans avant Jésus Christ.
13:25Exactement.
13:26Et donc, si on n'arrive pas à retrouver ce lien
13:28avec l'alimentation, qu'est-ce qui se passe ?
13:30A la fin, on se dit un poulet brésilien
13:33bourré aux antibiotiques de croissance,
13:35c'est pareil qu'un poulet français.
13:37Non, ce n'est pas pareil.
13:39Un fruit de saison, c'est pareil qu'un fruit
13:41qui n'est pas de saison.
13:43Non, la valeur nutritive d'un fruit, d'un légume,
13:46c'est lié, c'est associé à la saison.
13:49La valeur d'une exploitation qui est faite...
13:51Oui, puis ça joue sur l'écologie aussi.
13:53C'était mon dernier point.
13:55La valeur d'une exploitation qui est fondée
13:57sur, par exemple, des solutions proposées
13:59par M2I ou autres,
14:02ça n'a pas la même valeur environnementale.
14:05Et donc, comment on redonne cette valeur
14:07à l'alimentation ?
14:08Et cette valeur, elle a forcément, à la fin, un prix.
14:11Donc, il ne faut pas faire croire,
14:13ce serait trop facile, presque du populisme,
14:15de dire à tout le monde,
14:17ne vous inquiétez pas, le prix de l'alimentation
14:19ne va faire que baisser.
14:20On ne peut pas, d'un côté, baisser ces prix
14:22et, de l'autre côté, demander toujours plus
14:24en valeur nutritive environnementale
14:26à notre alimentation.
14:27Et donc, il faut qu'on remette les choses
14:29droit là-dessus, d'avoir le courage
14:31et, en même temps, d'avoir des politiques sociales.
14:33Je terminerai par ça,
14:34parce que si on doit accepter que l'alimentation
14:36a un coût, une valeur,
14:38il faut, en parallèle, avoir des politiques sociales
14:40pour accompagner les plus fragiles entre nous
14:42et leur donner accès à cette alimentation.
14:44Tout à fait, on va parler tout de suite
14:45avec Johan Fournil.
14:46M2i, vous travaillez sur des alternatives
14:48durables aux pesticides, avec le biocontrôle.
14:50Quel rôle joue l'innovation
14:52dans la souveraineté alimentaire pour vous ?
14:54Un rôle clé,
14:56et je pense que
14:58Julien et Xavier l'ont bien dit,
15:00la première des souverainetés alimentaires,
15:02c'est d'avoir une filière agricole stable,
15:04solide et pérenne.
15:06Et donc ça, ça passe par deux choses,
15:08un revenu agricole
15:10satisfaisant pour les producteurs
15:12de denrées alimentaires, mais également
15:14leur apporter des solutions
15:16nouvelles pour faire face aux défis
15:18environnementaux, sociétaux,
15:20et aux attentes des consommateurs.
15:22L'alimentation comme première base
15:24de la santé, on vient de le dire, c'est évident.
15:26À ça s'ajoute
15:28une demande des consommateurs français
15:30et européens pour une agriculture
15:32et des denrées alimentaires
15:34sans résidus. Et donc ça, ça passe
15:36par des produits qui vont
15:38venir aider les producteurs
15:40à avoir
15:42peut-être pas à coût égal, parce que
15:44vous l'avez dit, la qualité a un prix,
15:46mais en tout cas, à prix contenu,
15:48à prix raisonné, des solutions
15:50sans résidus et efficaces.
15:52Le biocontrôle, c'est pas une vue
15:54de l'esprit, c'est pas
15:56une martingale d'illuminés,
15:58c'est des vraies solutions, techniques,
16:00très riches en innovation,
16:02avec beaucoup de contenus scientifiques
16:04qui vont permettre aux agriculteurs
16:06en réduisant,
16:08en simplifiant, on va dire,
16:10leur adoption, c'est-à-dire,
16:12leur permettre d'accéder à ces nouvelles techniques
16:14d'agriculture de précision, sans pour autant
16:16changer radicalement leurs habitudes.
16:18Mais c'est également
16:20garantir
16:22une différence de prix qui soit
16:24raisonnable
16:26et qui soit visible
16:28pour le producteur comme le consommateur.
16:30Si un producteur va produire
16:32des aliments biologiques
16:34ou raisonnés sans résidus,
16:36il faut que, quand ils le vendent à un consommateur
16:38ou à un distributeur
16:40transformateur, il faut qu'il s'y retrouve.
16:42Et la France est armée
16:44pour cela. M2i, donc, on fabrique
16:46des, en deux mots, des phéromones,
16:48donc ce sont des solutions biologiques
16:50de protection des cultures et des plantes
16:52contre l'invisible. Il s'agit des odeurs
16:54qui sont émises par les insectes, donc c'est une
16:56démarche biomimétique. Pas que par les insectes,
16:58les autres humains aussi.
17:00Les animaux aussi.
17:02Et donc ce sont
17:04ces odeurs que nous reproduisons
17:06et que nous utilisons pour
17:08leurrer les insectes nuisibles
17:10et limiter leur prolifération.
17:12Donc c'est des solutions qui existent
17:14avec une filière française
17:16de l'innovation qui est robuste, qui est très
17:18active, qui est dynamique. Et donc effectivement
17:20le rôle de l'innovation et du
17:22biocontrôle est clé pour servir
17:24les agriculteurs et les transformateurs.
17:26Et je vais peut-être
17:28conclure sur une note positive,
17:30c'est que le biocontrôle français
17:32est très dynamique. On a
17:34une agriculture forte, même si elle doit faire
17:36face à des challenges importants,
17:38mais la filière du biocontrôle
17:40et de l'innovation du biocontrôle, il y a un écosystème
17:42extrêmement dynamique, parmi les plus dynamiques
17:44au monde. Et donc il y a
17:46des raisons d'espérer
17:48et des ressources techniques
17:50et économiques pour que ça soit
17:52un vrai challenge gagné. On reviendra sur vos
17:54solutions tout à l'heure, Johan.
17:56On va parler maintenant un petit peu avec Laurent Lemarchand,
17:58le directeur général de
18:00Natup, qui est une coopérative profondément
18:02ancrée dans les territoires.
18:04Quels sont les principaux besoins exprimés par les agriculteurs
18:06pour renforcer leur autonomie aujourd'hui ?
18:08Alors aujourd'hui, on compte environ
18:10400 000 exploitations agricoles
18:12en France chaque année, mais
18:1415 000 fermes disparaissent tous les ans.
18:16Ce qui est quand même énorme comme chiffre.
18:18Alors en général, c'est les petites exploitations
18:20qui sont les plus touchées. Est-ce que vous pouvez
18:22nous en dire deux mots, enfin quelques mots ?
18:24Quand on parle de...
18:26Enfin, pour répondre un peu à tout ce qui a été
18:28dit et à votre question, il y a un enjeu
18:30aussi de compétitivité des exploitations
18:32agricoles.
18:34Et il y a des enjeux aussi sociaux
18:36autour de la souveraineté alimentaire. C'est
18:38qu'est-ce qu'on veut effectivement
18:40offrir au consommateur ? Déjà, qu'est-ce que le consommateur
18:42veut ? Qu'est-ce qu'on veut lui offrir ?
18:44Et quel est le modèle social et environnemental
18:46qu'on veut associer à tout ça ?
18:48Quand on parle d'une baisse du nombre d'exploitations
18:50agricoles, c'est parce qu'il y a
18:52aussi un accroissement de la taille
18:54des fermes. Et cet accroissement de la taille
18:56des fermes, il faut savoir
18:58si on le veut ou si on ne le veut pas.
19:00Et vous pensez que c'est une bonne chose ou pas ?
19:02Ça dépend des modèles
19:04de culture. Pour certains modèles de culture,
19:06oui, c'est nécessaire parce que
19:08quand on parle d'investir dans de la mécanisation
19:10pour aller chercher de la compétitivité,
19:12quand on parle d'investir dans des solutions
19:14d'agriculture de précision, tout ça à un coup,
19:16il faut être capable de l'amortir à l'échelle d'une exploitation.
19:18Et aujourd'hui, oui,
19:20l'accroissement ou la taille de la ferme
19:22est un levier de compétitivité.
19:24Le deuxième levier de compétitivité, c'est la capacité
19:26des exploitations agricoles
19:28à aller chercher de la valeur ajoutée vers l'aval.
19:30Et alors, il y a des exploitations
19:32qui sont capables de le faire en autonomie,
19:34mais ça demande des moyens financiers importants,
19:36ça demande une capacité de l'agriculteur
19:38à faire différents métiers. Je
19:40produis, je transforme, je
19:42vends, je distribue.
19:44Et tous les agriculteurs n'ont pas cette capacité-là,
19:46avec pas forcément la surface financière pour
19:48le faire. Et c'est là où le modèle
19:50des coopératives agricoles, qui est un modèle
19:52c'est pas spécifique à la France,
19:54mais en tout cas, il est très ancré
19:56en France, où on met
19:58en commun pour des exploitations agricoles
20:00des moyens pour effectivement
20:02transformer, enfin déjà leur fournir
20:04tout ce dont ils ont besoin pour produire,
20:06ensuite transformer, commercialiser
20:08et distribuer avec
20:10un modèle intégré, du coup,
20:12pseudo intégré, qui permet d'avoir une juste
20:14redistribution de la création de valeur
20:16pour permettre de rémunérer et les investissements
20:18et le temps, là où
20:20effectivement, il est consommé.
20:22Donc moi, je suis convaincu, je veux une note
20:24d'optimisme dans tout ça. On a des leviers
20:26encore formidables sur lesquels on peut capitaliser.
20:28Faut juste pas opposer les modèles
20:30entre des modèles d'exploitation
20:32un peu plus grands, où en fait,
20:34on accepte que ça répond à un enjeu
20:36pour certaines filières ou pour certains
20:38marchés alimentaires. Et il faut qu'on
20:40accepte effectivement aussi,
20:42parfois, de mettre un peu de contraintes parce que
20:44il y a un peu plus de moyens sur certaines filières
20:46ou dans certains types d'exploitation.
20:48Et là, effectivement, on peut potentiellement mieux faire
20:50et c'est tout ça qu'il faut arriver à
20:52encadrer.
20:54Quelles sont les conséquences à long terme de notre
20:56dépendance actuelle aux intrants
20:58et aux marchés étrangers, d'après vous ?
21:00Là, on a...
21:02C'est la question à tous les deux.
21:04Je pense que dans le sujet, quand on parle
21:06de sujets de souveraineté alimentaire,
21:08il y a la production, puis il y a tout ce qui est nécessaire à la production
21:10agricole.
21:12Et le véritable enjeu aujourd'hui
21:14pour l'agriculture française
21:16ou un des véritables enjeux, c'est
21:18l'accès aux intrants et en particulier aux engrais.
21:20Et donc là, ça pose
21:22toute une...
21:24Il y a de la géopolitique derrière que je maîtrise
21:26bien moins bien que
21:28Julien, même si j'ai travaillé dans les engrais.
21:30Il faut accepter, effectivement,
21:32soit de produire différemment
21:34avec des sources d'engrais plus verts,
21:36mais ça coûte effectivement plus cher,
21:38ou il faudrait avoir une
21:40grande planification, je pense, à l'échelle
21:42nationale. Pour faire des
21:44engrais, en particulier des engrais azotés, il faut une source
21:46d'énergie. L'énergie, historiquement,
21:48c'était des énergies fossiles. Est-ce qu'on
21:50accepterait demain d'avoir des engrais fabriqués
21:52avec de l'énergie nucléaire,
21:54par exemple, puisque en France,
21:56on a cet atout-là ?
21:58Maintenant, ça prend du temps, ça demande énormément
22:00d'investissement. Il faut encadrer
22:02les choses et surtout faire en sorte
22:04que tout le monde travaille dans la même direction.
22:06Donc ça, c'est un vrai sujet
22:08sur les produits
22:10de protection des cultures. Là aussi,
22:12un message d'optimisme. On est en train de
22:14redécouvrir l'agronomie.
22:16Et là-dessus, il y a des leviers qui sont encore
22:18formidables. Remettre de la matière organique
22:20dans les sols, ça participera à long terme
22:22à la résilience des modèles
22:24agricoles, à la résilience par rapport
22:26aux ravageurs.
22:28La diversification des cultures,
22:30c'est des leviers formidables.
22:32La réintroduction de cultures
22:34qui n'existaient plus sur des territoires.
22:36J'entendais effectivement
22:38Bonduelle qui travaille avec Euralis.
22:40Bonduelle, demain, il sera capable
22:42de travailler aussi avec Natob dans le nord de la France
22:44parce qu'on a aussi une volonté de relocaliser des cultures
22:46qui n'y sont plus depuis
22:48des années. Et la diversité
22:50des rotations, c'est aussi
22:52des leviers formidables. Et aujourd'hui,
22:54ils ne sont pas encore pleinement exploités.
22:56Aussi, parce qu'il y a
22:58des enjeux industriels. Et quand on investit à un endroit,
23:00on essaye d'aller chercher les effets d'échelle.
23:02On a besoin de volume, on a besoin de proximité.
23:04C'est une équation assez
23:06complexe, mais c'est en travaillant
23:08de manière collégiale qu'on arrivera
23:10à répondre. Mais il y a des solutions.
23:12Tant mieux.
23:14Je vais me tourner vers Johan Fournil.
23:16On va parler de vos solutions de biocontrôle. Comment ça fonctionne
23:18exactement ? Je l'ai résumé
23:20un peu boyevement tout à l'heure.
23:22Les phéromones sont des odeurs qui sont naturellement émises
23:24par les insectes pour communiquer
23:26entre eux. C'est leur moyen de communication.
23:28Il s'agit d'odeurs, de molécules volatiles,
23:30mais en d'autres termes plus simplifiées,
23:32des odeurs. Et ces odeurs,
23:34selon des procédés biomimétiques, on les reproduit
23:36en laboratoire. C'est de la chimie
23:38relativement complexe qui exige
23:40un niveau de maîtrise proche de celui
23:42de la chimie pharma, par exemple.
23:44On va reconstituer
23:46ces molécules et ensuite on va les utiliser
23:48pour juguler
23:50les insectes ravageurs dans les plantes et les cultures.
23:52Je dis bien juguler, on ne parle pas
23:54de destruction, on parle de rééquilibrer
23:56les mécanismes naturels.
23:58On va rééquilibrer les populations et réduire
24:00les espèces invasives pour éviter
24:02que les dégâts soient
24:04incontrôlés et les ramener à un seuil
24:06acceptable pour l'agriculteur.
24:08Comment ça fonctionne ?
24:10D'abord cette molécule est synthétisée,
24:12puis formulée et enfin
24:14elle est appliquée en champ. Elle peut être appliquée
24:16par la manière la plus simple qui consiste
24:18à mettre un diffuseur de cette odeur
24:20dans un piège et de piéger
24:22l'insecte ravageur
24:24ou de diffuser sur la parcelle à protéger
24:26l'odeur de la phéromone
24:28actuelle de l'insecte et on va ensuite
24:30désorienter les insectes qui vont être
24:32incapables de se localiser pour se reproduire
24:34et donc pas de localisation,
24:36pas de reproduction,
24:38pas de larves, pas de dégâts
24:40et pas de prolifération.
24:42C'est vraiment une protection de la biodiversité quelque part ?
24:44Tout à fait, c'est une solution sélective
24:46qui n'a pas d'impact sur
24:48ni la santé des sols, ni les résidus
24:50sur les denrées alimentaires, ni aucun
24:52impact sur les pollinisateurs et sur
24:54la santé humaine a fortiori.
24:56C'est une solution qui
24:58représente un grand nombre d'avantages
25:00qui, on l'a parlé d'agriculture
25:02de précision, qui en plus
25:04est pensée
25:06en tout cas chez M2i pour être
25:08simple à adopter. On parle beaucoup
25:10de transition agroécologique, un des leviers
25:12pour cette souveraineté alimentaire
25:14dont on parle depuis le début, c'est la transition
25:16agroécologique, comment continuer
25:18à produire plus, produire mieux
25:20et produire de manière autonome.
25:22Ça passe aussi par des solutions biologiques
25:24qui répondent aux attentes des clients et des transformateurs
25:26mais qui vont être simples
25:28à prendre en main par les agriculteurs.
25:30Il faut que ça soit évidemment efficace, ça c'est
25:32le contrat de base. Il faut également que cela
25:34soit simple et économique.
25:36Donc un surcoût peut-être
25:38mais il faut
25:40que, in fine, ça soit
25:42relativement abordable
25:44pour l'agriculteur. Quel retour vous avez
25:46justement sur le terrain en termes de rendement et d'efficacité ?
25:48Alors en termes d'efficacité, c'est le contrat de base.
25:50Si vous n'êtes pas efficace,
25:52vous n'êtes pas sur le marché.
25:54En termes d'efficacité, les solutions que nous proposons
25:56sur la vigne ou en verger
25:58en France et à travers le monde
26:00ont des retours d'efficacité
26:02supérieurs à 80 à 90%.
26:04C'est-à-dire très largement au-dessus
26:06des seuils de dégâts acceptables.
26:08Et en termes de rendement,
26:10on peut avoir des
26:12très bons résultats
26:14pour une raison simple. Vous avez parlé tout à l'heure
26:16de ne pas opposer deux modèles
26:18d'agriculture. L'agriculture,
26:20les tailles d'exploitation,
26:22les petites tailles et les grandes tailles. Il y a également
26:24deux modèles agricoles qu'il ne faut pas opposer.
26:26C'est l'agriculture bio et l'agriculture
26:28traditionnelle ou conventionnelle.
26:30Il y a
26:32entre ces deux extrêmes, ou en tout cas
26:34ces deux parties, il y a une grande
26:36majorité des agriculteurs qui travaillent
26:38en agriculture raisonnée et qui vont
26:40en fonction des contextes
26:42utiliser soit des produits
26:44biologiques, soit des produits conventionnels.
26:46Et donc les solutions de biocontrôle
26:48telles qu'on les pense GM2I,
26:50elles ne visent pas à opposer ces deux modèles
26:52d'agriculture, mais au contraire
26:54à les réunir autour d'un modèle
26:56d'agriculture combinée, d'agriculture raisonnée
26:58où on va conserver un certain
27:00nombre d'usages
27:02d'insecticides conventionnels quand
27:04les conditions sanitaires sont critiques
27:06et l'exigent, mais favoriser
27:08l'inclusion dans les itinéraires
27:10techniques des agriculteurs, l'usage
27:12de solutions biologiques.
27:14Ça passe par quoi ? Ça passe par des solutions de phéromones
27:16par exemple pour nous très simples à utiliser
27:18pulvérisables, qu'on va appliquer
27:20avec les mêmes outillages habituels
27:22le même calendrier habituel
27:24et donc convertir cette agriculture dite de
27:26précision à une agriculture assez
27:28spontanée, assez naturelle. On va juste
27:30remplacer un bidon existant dans une solution
27:32conventionnelle par une solution de biocontrôle
27:34phéromonale et à ce titre
27:36on va conserver
27:38des méthodes, des habitudes
27:40à moindre coût avec une meilleure
27:42efficacité. Et je termine par le rendement
27:44on a des solutions, alors c'est
27:46pas en France qu'on a des solutions
27:48contre les ravageurs du
27:50maïs, parce que l'exemple que je vais prendre
27:52concerne un ravageur qui n'existe pas en France
27:54Dieu merci, le maïs
27:56doux produit par Euralys pour
27:58Xavier et Mondwell n'est pas
28:00touché par ce ravageur là
28:02et donc
28:04on a des exemples
28:06de gains de rendement jusqu'à 500 dollars
28:08par saison. Comment ?
28:10On améliore l'efficacité en réduisant
28:12le passage d'un insecticide traditionnel
28:14donc on va remplacer 4 ou 5 passages
28:16il y avait 10 passages d'insecticides traditionnels
28:18dans l'année, on va diviser par 2 ces passages
28:20d'insecticides traditionnels
28:22en rajoutant 1 ou 2 passages de phéromones
28:24vous avez la même efficacité
28:26vous éliminez
28:28les problématiques de résistance
28:30et vous avez une efficacité constante
28:32avec un gain, à la fois
28:34un gain parce que vous avez moins de main d'oeuvre
28:36moins de produits utilisés et vous vendez votre
28:38votre denrées alimentaires sans résidus plus
28:40chers au marché.
28:42Si je peux me permettre, Fanny, M2I
28:44est une entreprise absolument géniale
28:46l'innovation
28:48elle est vraiment impérieuse
28:50dans le cadre de cette souveraineté
28:52Laurent l'a dit, pour moi, quels sont les
28:54personnages de la souveraineté ? C'est d'abord
28:56les agriculteurs, il ne faut jamais l'oublier
28:58c'est d'abord les agriculteurs et ce qu'on
29:00appelle le renouvellement des générations
29:02il y a un deuxième personnage qui est un inconnu
29:04dans nos sociétés qui est le sol
29:06moi je suis ingénieur agronome
29:08je suis partie d'une génération d'ingénieurs qui ont été
29:12formés à ce qu'on appelle l'agriculture
29:14de conservation des sols, c'est-à-dire
29:16on pense seul, on respire seul
29:18le personnage qui est le
29:20sol et qui est un inconnu
29:22le sol
29:24et donc toute l'agroécologie
29:26et justement cette agriculture
29:28qui protège le sol
29:30ces deux personnages, sans eux, on ne pourra pas
29:32faire de la souveraineté. Mais l'innovation
29:34qu'indique M2I, ça permet
29:36par exemple de protéger
29:38le sol, ça permet d'améliorer
29:40les conditions des agriculteurs
29:42et il y a parfois aussi
29:44uniquement grâce à cela qu'on arrive
29:46à lutter contre des impasses
29:48Est-ce que vous vous souvenez de la crise de la moutarde ?
29:50Oui bien sûr, c'était pendant le Covid
29:52en pleine crise du Covid
29:54On se battait tous pour réussir à avoir
29:56un pot de moutarde et on n'avait plus de moutarde
29:58Pourquoi on n'avait plus de moutarde ?
30:00Parce qu'elle était produite au Canada je crois
30:02Et pourquoi elle était
30:04produite au Canada ?
30:06Parce qu'on a vendu
30:08Je ne sais pas
30:10Allez-y
30:12Parce qu'en France
30:14on a interdit
30:16une molécule chimique
30:18qui était utilisée pour lutter contre
30:20un ravageur contre les pieds de moutarde
30:22et que ce faisant
30:24les agriculteurs se sont
30:26retrouvés dans une impasse de production
30:28à la fois
30:30impasse de production et à la fois
30:32impasse vis-à-vis de la compétitivité économique
30:34tant et si bien que
30:3680% des grains de moutarde
30:38sont aujourd'hui
30:40y compris de la moutarde de Dijon
30:42sont aujourd'hui importés du Canada
30:44Et à l'époque, je me souviens très bien
30:46Pourquoi ils peuvent mettre sur les boîtes
30:48de moutarde de Dijon
30:50on connait bien cette marque
30:52on va la citer en mail, c'est pas très grave
30:54Parce qu'il y a
30:56le savoir-faire, parce que la moutarde
30:58les grains de moutarde sont absolument essentiels
31:00mais c'est aussi le savoir-faire
31:02de la recette, de la fabrication
31:04etc.
31:06C'est comme l'escargot de Bourgogne, qui vient pas de Bourgogne
31:08Bah oui, mais c'est un peu mentir
31:10au consommateur quelque part
31:12Mais ce que je veux dire par là, c'est que cette innovation
31:14elle est absolument nécessaire
31:16parce que
31:18c'est d'ailleurs flagrant
31:20notre discussion sur cette moutarde
31:22parce que souvent on s'imagine
31:24en fait, on n'a pas de grains de moutarde
31:26parce qu'on a volontairement délocalisé
31:28ou parce qu'on a vendu
31:30des entreprises
31:32aurait vendu, etc. Pas du tout
31:34c'est parce qu'on s'est retrouvé dans une impasse
31:36de production, et les Canadiens
31:38eux, utilisent
31:40à outrance le produit que nous-mêmes
31:42avons interdit
31:44Alors justement, on l'a interdit
31:46mais par contre, une fois que le produit est fait
31:48on peut le vendre sur le sol français
31:50donc ça pose quand même un problème, c'est-à-dire qu'on interdit
31:52un produit en France, et après
31:54on peut quand même vendre ce produit
31:56qui est fabriqué ailleurs, où on utilise
31:58ces pesticides là, et on peut
32:00le vendre sur le sol français. Donc finalement, quelque part
32:02ça se mord la queue.
32:04Bien sûr, c'est une aberration, c'est pour ça qu'au niveau européen
32:06moi j'avais mené un
32:08très grand combat, parce que je suis un anti-poulet
32:10brésilien primaire. D'accord
32:12C'est un beau combat
32:14Moi je suis un anti-maïs chinois primaire
32:16Est-ce que vous en avez d'autres ?
32:18Et
32:20pourquoi je suis un anti-poulet brésilien primaire
32:22c'est une histoire personnelle que j'ai
32:24souvent racontée. Il s'avère
32:26que j'habite en Égypte, et en Égypte
32:28j'ai, je suis père de 4 enfants
32:30aujourd'hui, j'ai ma fille aînée qui a alors un an
32:32qui tombe malade, je vais chez le pédiatre
32:34au CAIR, et le pédiatre me dit
32:36votre fille a besoin d'antibiotiques, je reviens
32:38à la maison, il y a à ce moment-là
32:40des doutes sur les origines des antibiotiques, bon
32:42bref, au CAIR, et donc je demande à la nounou
32:44de ma fille, où est-ce que je peux trouver cette antibiotique ?
32:46Dans quelle pharmacie ? Et la nounou
32:48de ma fille, tout ça est véridique, me répond
32:50aller au supermarché. C'est à quoi je lui dis
32:52il n'y a pas d'antibiotiques au supermarché, j'y vais
32:54et elle me dit, mais non, votre fille a besoin de poulet
32:56et pourquoi ? Parce que c'est du poulet
32:58brésilien, bourré aux antibiotiques
33:00de croissance, et donc vous aviez
33:02pour le même prix, protéines et amoxycylines
33:0450%
33:06du poulet consommé dans la restauration
33:08hors domicile en Europe, aujourd'hui
33:10est du poulet brésilien
33:12d'Europe de l'Est ou d'Asie du Sud-Est
33:14utilisant ces antibiotiques de croissance
33:16tant et si bien qu'on est parti, enfin moi je suis
33:18vraiment parti en croisade au niveau européen
33:20pour mettre en place ces fameuses
33:22close miroirs, ne pas importer
33:24ce que nous n'avons pas le droit de produire
33:26et c'est ça tout l'équilibre
33:28c'est à dire qu'il faut commercer
33:30exporter
33:32ce libéralisme économique est
33:34très important, mais il faut mettre des règles
33:36et des règles, certains disent que c'est du protectionnisme
33:38moi j'appelle ça du bon sens
33:40de ne pas pouvoir
33:42importer ce que nous n'avons pas le droit
33:44Il faut savoir qu'aux Etats-Unis
33:46l'origine de production
33:48est une obligation
33:50en Europe, ce n'est pas le cas
33:52Alors je veux juste être rassurée sur une chose
33:54si je vais chez mon boucher, j'ai un poulet
33:56il y a marqué poulet fermier
33:58ça serait un poulet fermier ?
34:00Aujourd'hui le principe, aujourd'hui pour répondre
34:02à Xavier
34:04non non pour répondre à Xavier
34:06Je ne suis pas un spécialiste du poulet, je suis un spécialiste des légumes
34:08Mais pour répondre à Xavier, aujourd'hui
34:10il y a une réglementation
34:12qui impose par exemple
34:14où que vous soyez dans un restaurant, dans la cantine
34:16des écoles de vos enfants
34:18il y a une réglementation qui impose
34:20d'indiquer l'origine, elle n'est pas toujours respectée
34:22c'est souvent le problème, des lois, des réglementations
34:24existent et elles ne sont pas toujours
34:26respectées ou mises en oeuvre, en l'occurrence
34:28sur cette question là
34:30le décret est passé, c'est moi qui l'ai signé
34:32et force est de constater qu'aujourd'hui
34:34peu sont ceux à le respecter
34:36et donc il faut que les pouvoirs de contrôle
34:38agissent sur
34:40les états, la viande à la découpe
34:42ou les morceaux
34:44de blanc de poulet
34:46ou les poulets que vous achetez chez votre boucher
34:48ou même dans les supermarchés, la plupart du temps
34:50eux sont de production européenne
34:52le problème c'est dans tous les produits transformés
34:54ou dans la restauration hors domicile
34:56et c'est là où l'origine est absolument
34:58importante
35:00ce qui est vrai dans le poulet est tout à fait vrai dans les légumes
35:02que Xavier mentionnait
35:04Très bien, on va rester là dessus
35:06on va parler un peu de Natop maintenant
35:08Natop mise sur une transition agroécologique
35:10et les circuits courts, quelles innovations
35:12et nouveaux modèles économiques
35:14observez-vous aujourd'hui pour renforcer
35:16la résilience des agriculteurs ?
35:18Pour renforcer
35:20la résilience, le circuit court c'est aussi
35:22une solution
35:24ça permet effectivement de
35:26réduire l'ensemble des coûts sur l'aval
35:28de la chaîne de valeur
35:30l'expérience historique
35:32des circuits courts, en tout cas
35:34dans la tête du consommateur
35:36qui dit circuit court dit que c'est plus cher parce que
35:38effectivement
35:40dans certains cas
35:42c'est faux, ça dépend des modèles
35:44de production agricole, ça dépend des modèles
35:46de transformation industrielle
35:48qui sont derrière
35:50il y a effectivement des effets
35:52d'échelle, nous par exemple
35:54on a investi dans une
35:56marque, un circuit de distribution
35:58qu'on trouve absolument génial, ça s'appelle
36:00les éleveurs de la Charenton, où on arrive
36:02à centraliser
36:04la découpe de viande
36:06et la distribution de viande en direct
36:08depuis les exploitations
36:10de nos éleveurs, donc on est en
36:12circuit court mais on a atteint une certaine taille
36:14critique qui nous permet d'être
36:16hyper compétitif pour le
36:18consommateur, tout en assurant
36:20à l'éleveur
36:22la meilleure rémunération qu'il puisse
36:24trouver, et ça c'est permis par quoi ?
36:26C'est permis par un modèle
36:28social où on
36:30arrive à regrouper de la compétence pour éviter
36:32effectivement d'avoir
36:34des surcoûts de main d'oeuvre
36:36c'est permis par la mutualisation logistique
36:38parce que dans les circuits courts et même dans l'alimentation
36:40en général la logistique nous coûte
36:42très cher
36:44et donc en fait c'est
36:46la recherche de la compétitivité
36:48sur l'ensemble de la chaîne
36:50de valeur, et quand on maîtrise
36:52tout, de la ferme
36:54jusqu'au magasin ou
36:56demain jusqu'au circuit de distribution
36:58c'est là où on arrive à être
37:00compétitif, et donc il ne faut pas opposer
37:02circuit court et
37:04entre guillemets, cherté du
37:06produit. On est convaincu que
37:08ça peut marcher.
37:10A toutes les échelles, je prends un autre exemple qui nous tient
37:12à cœur, c'est on essaye de réinvestir
37:14dans des outils industriels pour transformer
37:16localement des productions agricoles.
37:18Alors Bonduelle est un bon exemple,
37:20historiquement ils ont des usines au cœur de bassins
37:22de production, une des
37:24filières importantes sur lesquelles nous on est présent
37:26et qui aujourd'hui fonctionne plutôt bien
37:28parce qu'il y a de la demande, c'est la pomme de terre.
37:30On voit des méga investissements
37:32aux frontières de la France
37:34pour faire des frites surgelées
37:36avec l'objectif de les exporter
37:38vers l'Asie, et la
37:40France aujourd'hui sur pas mal de marchés
37:42on exporte
37:44nos pommes de terre, on les fait transformer
37:46en dehors de nos frontières, on les ramène
37:48dans nos assiettes ou dans
37:50les assiettes des cantines de
37:52nos enfants. Il faut qu'on soit aussi capable
37:54on va dire le secteur agricole
37:56et industriel de réinvestir dans des
37:58outils de production au cœur
38:00de bassins de production et au cœur de bassins
38:02de consommation, on raccourcit les circuits
38:04alors je ne sais pas si on peut parler de circuits courts dans ce cas là
38:06pas forcément, mais si on raccourcit les circuits
38:08si on investit, si on est
38:10convaincu qu'il n'y a pas de raison qu'on soit moins bon
38:12en France qu'à l'étranger sur
38:14des métiers industriels ou sur des métiers de distribution
38:16on saura entre guillemets raccourcir
38:18les circuits et faire en sorte que
38:20ce ne soit pas plus cher.
38:22Evidemment,
38:24c'est une bonne solution. On va parler de
38:26Monduel qui investit aussi dans des projets de relocalisation
38:28de la production
38:30en France. Quels résultats avez-vous obtenus
38:32jusqu'à présent et quelles sont les prochaines étapes ?
38:34On est ravi des résultats, mais c'est
38:36qu'un début, donc pour nous
38:38ce qui est aussi important c'est d'arriver à
38:40convaincre le consommateur qu'une super
38:42source de protéines c'est aussi végétal
38:44à travers les légumineuses.
38:46Aujourd'hui on apporte beaucoup, on parlait
38:48d'importation du Canada,
38:50d'Amérique du Nord, toutes ces légumineuses
38:52et on est ravi du partenariat qu'on a
38:54su développer avec nos partenaires
38:56opératifs pour
38:58faire une production locale,
39:00pour amener une différence culinaire
39:02aussi autour des légumineuses, parce que là aussi
39:04c'est important. On parle de
39:06nourriture quand même, il faut que ça soit bon
39:08pour la santé, mais que ça soit bon
39:10pour le palais.
39:12Vous connaissez bien
39:14le fameux adage
39:16de Bon Noël, quand c'est bon c'est Bon Noël, c'est hyper
39:18important, mais c'est tout bête. Mais aujourd'hui les légumineuses
39:20ont perdu un tout petit peu
39:22les légumes de cette envie.
39:24Est-ce qu'il y a des difficultés justement dans le processus ?
39:26Aucune, aucune. On est
39:28très fiers du niveau
39:30d'engagement qu'on a avec nos partenaires
39:32agriculteurs, avec nos coopératifs.
39:34Il faut savoir qu'aujourd'hui on est même
39:36impressionné par cet
39:38engouement
39:40de durabilité qu'ont nos partenaires
39:42agricoles. J'ai été très inspiré
39:44d'un agriculteur, d'un jeune agriculteur
39:46que j'ai rencontré au tout début de mon mandat
39:48chez Bon Noël, il y a à peu près un an et sept mois,
39:50qui m'a dit
39:52« Désolé, on se doit
39:54de réapprendre à devenir
39:56des agriculteurs. » Et en fait,
39:58on parlait, je crois que c'est toi qui en parlais.
40:00C'est un métier qui se transforme aussi. C'est un métier qui se transforme
40:02parce qu'en fait on avait pris des habitudes
40:04d'utiliser des engrais,
40:06des produits chimiques pour résoudre tous les problèmes.
40:08Aujourd'hui il y a une vraie proximité
40:10de plus en plus de l'agriculteur vis-à-vis
40:12de son sol. Nous on est,
40:14on souhaite que
40:16l'agriculture régénératrice
40:18devienne une norme pour la durabilité
40:20du sol, mais aussi pour la bonne santé des personnes
40:22qui vont
40:24être au quotidien dans les champs.
40:26Il faut savoir qu'il faut
40:28prendre soin de la santé de nos agriculteurs
40:30comme la santé de nos consommateurs.
40:32Donc la durabilité des sols, la régénération
40:34des sols, la capacité
40:36de ces sols à lutter contre le
40:38dérèglement climatique, on n'en voit
40:40pas suffisamment. Et puis,
40:42n'oublions pas que ces sols, ils ont un rôle
40:44essentiel dans la décarbonisation
40:46aussi, donc
40:48le rôle de capturer du carbone c'est hyper important.
40:50Donc quelque part,
40:52on a un peu le même
40:54cheval de bataille. Nous on a 171
40:56ans d'histoire,
40:58le mandat de la famille c'est continuons
41:00pour 171
41:02ans additionnels
41:04et on a un peu cette même
41:06relation avec nos partenaires agricoles qui sont
41:08en relation avec nous depuis
41:102-3 générations pour continuer
41:12cette belle aventure d'un sol en pleine
41:14santé, avec de la
41:16biodiversité, protégeant
41:18les consommateurs
41:20et les exploitants eux-mêmes.
41:22Vous mettez tout le monde d'accord un peu près sur le plateau
41:24finalement Xavier, mais j'ai
41:26une question. Oui parce qu'en fait,
41:28en France, on a des vrais
41:30talents, aussi bien
41:32des coopératives
41:34qui rassemblent très très bien
41:36les agriculteurs dans un but commun,
41:38des entreprises qui
41:40vont aider les agriculteurs à faire un meilleur job
41:42et je pense qu'on a
41:44tout simplement un peu
41:46besoin d'une
41:48union européenne un peu plus
41:50quelque part
41:52proche de ces...
41:54La PAC ne suffit pas la politique agricole
41:56commune ?
41:58Pourquoi vous rigolez ?
42:00Je vais demander à Julien,
42:02mais je pense qu'on a
42:04avec Julien un très
42:06grand allié, il faut continuer dans ce sens-là,
42:08il faut que l'Europe se responsabilise
42:10et n'ait pas honte de...
42:12Je ne parle pas de protectionnisme
42:14mais de transparence,
42:16parce que je pense qu'aux Etats-Unis, ils le font très bien
42:18et nous on a à apprendre des Etats-Unis pour une fois
42:20sur la façon dans laquelle il y a des choses
42:22qui doivent
42:24se passer chez nous en Europe.
42:26Je ne sais pas ce que Julien en pense, mais...
42:28Xavier, on a
42:30un combat en commun avec Xavier que sont
42:32les légumineuses. Il s'avère
42:34que les légumineuses, c'est d'abord une plante absolument
42:36incroyable. Pourquoi c'est une
42:38plante incroyable ? Parce que c'est des plantes qui
42:40captent de l'azote. Ce que disait
42:42Laurent tout à l'heure, quand il disait très
42:44rapidement que le sujet de la matière
42:46organique était un sujet absolument essentiel,
42:48la matière organique, ça va être un sujet crucial
42:50de souveraineté.
42:52Et il parlait de cultures
42:54intermédiaires ou autres cultures qui pouvaient
42:56être mises en place dans les
42:58assolements, c'est-à-dire la façon que les agriculteurs
43:00ont de gérer leur plan
43:02de culture. Et c'est
43:04vrai que les légumineuses ont cet atout
43:06d'apporter de l'azote
43:08qu'elles fixent et donc de nourrir les cultures
43:10suivantes. Mais ces légumineuses,
43:12aujourd'hui, la réalité
43:14c'est qu'elles sont incroyablement bonnes
43:16pour notre santé et qu'on n'en mange pas suffisamment
43:18assez. Je prends un exemple,
43:20c'est les lentilles. Il faut donner des lentilles
43:22à nos enfants.
43:24C'est merveilleux.
43:26Et puis, il y a un deuxième volet,
43:28c'est qu'il y a aussi
43:30des protéines
43:32qui, elles,
43:34protéines végétales
43:36sur lesquelles
43:38on a créé une totale dépendance, notamment
43:40vis-à-vis des Etats-Unis d'Amérique
43:42et plus généralement du continent américain.
43:44Cette dépendance, elle a un visage,
43:46c'est le fameux soja, le soja
43:48américain ou le soja brésilien,
43:50issu de la déforestation,
43:52issu de productions
43:54avec OGM,
43:56des OGM pour quoi ? Des OGM
43:58pour qu'on puisse pulvériser
44:00depuis le ciel avec des avions,
44:02des produits chimiques qui viennent tuer toutes les mauvaises
44:04plantes, sauf le soja lui-même.
44:06Songez qu'aux Etats-Unis, il y a
44:084000 avions, au Brésil, il y a plus de 2200
44:10avions, etc.
44:12Et pourquoi je dis ça ? Parce que
44:14cette dépendance, et on est totalement
44:16dépendants, elle a été orchestrée.
44:18Au sortir de la
44:20seconde guerre mondiale, on se souvient tous, le fameux
44:22plan Marshall, etc., l'Europe
44:24a faim, et l'Europe dit, on va créer
44:26la politique agricole commune.
44:28Formidable construction européenne.
44:30Les Etats-Unis d'Amérique,
44:32à ce moment-là, disent aux Européens,
44:34OK, faites votre truc, créez votre politique
44:36agricole commune, à une condition,
44:38c'est que vous restez dépendants de nos
44:40protéines végétales.
44:42Et là, on est à la fin des années 50, début des années
44:4460. En 1992,
44:46l'Europe se réveille en disant,
44:48on ne peut pas être dépendants
44:50des protéines américaines, du continent
44:52américain, on va développer
44:54nos propres protéines.
44:56Le lendemain, les Etats-Unis vont
44:58à l'OMC, déposent un dossier, ça s'appelle
45:00la guerre du soja.
45:02Le surlendemain, les Européens
45:04prient les Etats-Unis de bien vouloir les excuser,
45:06d'avoir osé les déranger.
45:08Quand je suis ministre,
45:10ces protéines,
45:12c'était d'ailleurs un engagement du président de la République
45:14dès 2017, on prend
45:16à bras-le-corps le dossier, on fait un plan
45:18protéines de 100 millions d'euros à l'échelle nationale,
45:20et on met le dossier au niveau européen.
45:22C'est très technique pour faire ce qu'on appelle
45:24des aides couplées protéiques
45:26dans le cadre de la politique agricole commune.
45:28Ça a été
45:30un parcours du combattant. On a eu
45:32gain de cause, on a ouvert la boîte de Pandore.
45:34Un tel parcours du combattant que la France
45:36agricole, journal de référence, à l'époque avait
45:38titré la France en croisade
45:40sur les protéines au niveau européen.
45:42Parce que tout le monde avait en tête cela.
45:44Ce que je veux dire par ça, c'est ce que
45:46disait Xavier tout à l'heure, c'est que
45:48l'Europe, elle doit...
45:50Aujourd'hui, elle est cocue
45:52sur... Pardon du terme, mais elle est cocue
45:54et elle paye la chambre sur
45:56la question des protéines
45:58et des légumineuses.
46:00Elle doit sortir de ça.
46:02Elle doit sortir de ça. Justement, comment
46:04elle peut sortir de ça ?
46:06En faisant deux choses.
46:08La première, c'est d'accompagner
46:10ces cultures. Ce qu'on a ouvert avec
46:12ces aides dédiées aux légumineuses
46:14et aux protéines, c'est-à-dire
46:16relocaliser des
46:18cultures, des filières,
46:20que ce soit le soja, que ce soit
46:22les légumineuses.
46:24Des investissements. Et ça, c'est le premier point.
46:26Il faut savoir que ces légumineuses sont très peu consommatrices
46:28d'eau. Donc, des cultures...
46:30On est en train d'ouvrir des cultures
46:32dans la région de Toulouse,
46:34qui n'étaient pas du tout utilisées.
46:36Donc, il y a vraiment une possibilité
46:38d'enrichir le monde agricole
46:40dans son ensemble. Donc ça, c'est le premier pilier.
46:42Le deuxième pilier, c'est de se protéger.
46:44Laurent est un petit peu...
46:46pas tout à fait d'accord
46:48avec ce que dit Xavier. Je pense qu'il y a
46:50la volonté politique, la volonté de tout le monde
46:52de produire nos propres légumineuses.
46:54Elle est là. Il y a encore une fois... Désolé, je prends ma casquette
46:56d'agriculteur. Il y a une question
46:58de compétitivité de ces cultures-là dans
47:00les assolements des agriculteurs.
47:02Et si on ne fait pas de soja, et si on ne fait pas
47:04assez de lentilles, et si on ne fait pas assez de pois,
47:06c'est aussi parce que c'est des cultures
47:08qui ne sont pas rémunératrices. Et pourquoi elles sont pas
47:10rémunératrices ? Parce qu'on n'a pas les moyens
47:12de lutte nécessaires contre
47:14certains ravageurs du sol,
47:16ou certains insectes.
47:18Numéro 1. Et numéro 2,
47:20pardon, mais le soja, c'est quand même hyper consommateur
47:22d'eau. Et en France, la question de l'eau,
47:24je ne reviens pas sur l'actualité des
47:26dernières années, c'est un vrai sujet.
47:28En fait, c'est une question de cohérence globale
47:30de ce qu'on veut. Et après,
47:32deuxièmement, c'est une question aussi
47:34de mode de consommation. On n'a pas
47:36beaucoup parlé du consommateur. Aujourd'hui,
47:38le consommateur, il préfère encore un steak
47:40que de la lentille. Et donc, c'est de l'éducation...
47:42Ça a changé déjà. Ça a un petit peu changé.
47:44On mange de moins en moins de viande.
47:46C'est faux. La consommation
47:48de viande rouge, elle diminue si peu que pas.
47:50Et la consommation de poulet ou de viande
47:52blanche, elle est en train d'exploser.
47:54Ça diminue un peu, mais
47:56la réalité, comme dit Laurent,
47:58c'est que...
48:00Ce que dit Laurent est tout à fait vrai,
48:02mais moi, je pense qu'il faut... On ne peut pas
48:04se limiter à ça. C'est-à-dire qu'on ne peut pas
48:06se dire simplement, comme on n'est pas
48:08compétitif, on va continuer à importer. Oui, sinon
48:10on ferait... Il faut investir. Non, non, non,
48:12mais je ne dis pas ça. Je dis juste qu'il faudrait avoir
48:14une politique agricole et nationale qui soit hyper
48:16cohérente. Et justement, comment
48:18elle pourrait être cohérente et qu'est-ce qu'il faudrait
48:20mettre en place, Laurent, d'après vous ?
48:22Alors, je ne suis pas... Je n'ai pas fait de politique
48:24et je n'en ferai pas, mais quand on parle
48:26de l'APAC, l'APAC, aujourd'hui,
48:28elle est assez homogène, quelles que soient
48:30les cultures. Je pense qu'on pourrait être un peu plus
48:32incitatif sur les cultures qu'on veut
48:34promouvoir. Il ne faut pas de surtransposition
48:36sur, en particulier,
48:38ces filières comme les légumineuses.
48:40Les légumineuses, elles sont formidables pour la
48:42santé humaine, pour la santé
48:44des sols. C'est un magnifique
48:46moyen de décarbonation, en tout cas de réduction
48:48des émissions de gaz à effet de serre
48:50de l'agriculture. C'est des très bons précédents
48:52pour les cultures suivantes. Donc, ça permet
48:54en plus d'augmenter la productivité
48:56qui suit. C'est des cultures
48:58de printemps. Ça permet de casser les cycles
49:00des cultures d'hiver et donc de réduire la dépendance
49:02aux produits phytosanitaires. Donc, en fait,
49:04c'est tout ça qu'il faut
49:06qu'on arrive à mettre en avant. Les coopératives
49:08agricoles ont un rôle à jouer pour faire de la
49:10pédagogie auprès des agriculteurs. Quand on parle
49:12de formation dans les écoles d'ingénieurs
49:14ou dans les écoles agricoles,
49:16il faut qu'on soit capable de réexpliquer ça.
49:18Il faut faire de la pédagogie auprès du consommateur
49:20sur tous les bénéfices de
49:22ces cultures-là.
49:24Moi, je pense qu'on va y arriver.
49:26Au cours des
49:28cinq dernières années, on a relocalisé la lentille aussi
49:30en Normandie. On est capable d'en produire.
49:32On est plus qu'autosuffisant.
49:34On y vient petit à petit.
49:36Il y a la question de ce que vous disiez, Laurent. Il y a la question du prix
49:38à la fin. Faire du soja en France
49:40restera plus cher que de faire
49:42du soja au Brésil.
49:44Plus d'importer du soja. Exactement.
49:46Il y a une question là encore de
49:48oui ou non on accepte de
49:50relocaliser la valeur et de
49:52retranscrire cette valeur dans le prix final.
49:54C'est une question essentielle. Ce que disait
49:56Laurent sur le rôle du consommateur
49:58au-delà de la responsabilité des politiques
50:00est évidemment important.
50:02Il nous reste six minutes
50:04d'émission. Je vais
50:06passer à vous, Johan. Vous êtes un acteur
50:08dans l'innovation agricole avec M2i.
50:10Quels partenariats publics ou privés
50:12sont essentiels pour accélérer la transition
50:14et faire des solutions durables d'après vous ?
50:16Je pense que
50:18je vais faire comme Laurent. Je vais être
50:20optimiste.
50:22Je pense que
50:24je crois que déjà il y a
50:26un momentum, il y a une dynamique
50:28et on le voit sur ce plateau
50:30avec un consensus sur
50:32la nécessité
50:34d'aider la filière agricole française
50:36avec des produits innovants
50:38et des produits bénéfiques
50:40pour la protection de l'environnement
50:42et la protection des cultures
50:44unis dans un seul objectif.
50:46Les politiques privées
50:48et publiques, je pense que d'abord
50:50il y a les politiques publiques.
50:52Il y a ce qui a été évoqué par
50:54Julien tout à l'heure sur les
50:56close-miroirs. Je pense que si on est capable
50:58d'une économie mondialisée, évidemment,
51:00M2i exporte
51:0270% de notre
51:04activité en dehors de nos frontières françaises.
51:06Néanmoins, il faut que les règles soient les mêmes
51:08pour tous et pour les agriculteurs en premier chef.
51:10C'est plus
51:12simple lorsque les agriculteurs ont les mêmes
51:14armes et les mêmes
51:16solutions et les mêmes outils que
51:18leurs concurrents étrangers.
51:20La politique publique
51:22d'aide à l'innovation et d'incitation au
51:24biocontrôle, elle existe. Elle a été
51:26d'ailleurs,
51:28Julien l'a porté
51:30quand il était ministre
51:32de l'agriculture.
51:34C'est une nécessité.
51:36Il existe de nombreux guichets
51:38d'aide publique qui viennent inciter
51:40à la fois l'écosystème
51:42des acteurs de l'innovation
51:44du biocontrôle et puis
51:46elle aide également les agriculteurs à favoriser cette adoption.
51:48Les aides privées,
51:50c'est des synergies
51:52entre les coopérateurs,
51:54les transformateurs
51:56de la filière
51:58et des acteurs comme nous qui sommes
52:00des concepteurs
52:02et des metteurs au marché de produits,
52:04de traitements des cultures innovants.
52:06C'est avec
52:08Laval
52:10qui peut être prescripteur,
52:12recommander des solutions plus raisonnables
52:14et made in France à
52:16son écosystème de producteurs
52:18porté par les coopératives.
52:20Il y a ces synergies-là
52:22qui sont vraiment indispensables.
52:24On croit beaucoup à la nécessité de se rapprocher
52:26des acteurs de l'agroalimentaire, les transformateurs,
52:28pour que les solutions
52:30biologiques, notamment les nôtres
52:32et même d'autres de l'écosystème du biocontrôle
52:34made in France, puissent être
52:36recommandées et encouragées
52:38auprès des agriculteurs.
52:40Si vous aviez une mesure aujourd'hui
52:42pour renforcer
52:44immédiatement la souveraineté alimentaire et industrielle
52:46en France, ce serait laquelle ?
52:48Rapidement.
52:50Ce serait celle dédiée
52:52aux jeunes agriculteurs.
52:54Je pense que le principal défi,
52:56on ne fera jamais d'agriculture sans agriculteurs
52:58et comment on arrive à
53:00convaincre les jeunes agriculteurs de se lancer,
53:02c'est la question de leur rémunération.
53:04Premièrement, tous les sujets
53:06dont on a beaucoup parlé ces derniers temps
53:08comme les lois EGalim, etc.,
53:10préserver leur rémunération.
53:12Et le deuxième volet,
53:14on l'a dit, on le voit entre
53:16Laurent et Johan, c'est toute cette
53:18formidable dynamique liée à l'innovation
53:20parce qu'on a envie aussi de se lancer dans l'agriculture
53:22qui est un monde incroyablement innovant
53:24contrairement à ce qu'on pense.
53:26C'est l'innovation sur le numérique,
53:28la robotique, la génétique,
53:30le biocontrôle, que moi j'avais qualifié
53:32de troisième révolution agricole.
53:34Je crois que ce
53:36volet-là, c'est-à-dire tourner vers les jeunes agriculteurs
53:38est, à mes yeux, le plus important.
53:40Xavier Hancovic, un mot sur le rôle des entreprises
53:42dans la souveraineté alimentaire aujourd'hui ?
53:44Rapide. Je pense qu'il est essentiel
53:46au niveau de la transparence. Très bien.
53:48Alors Johan Fournil, un mot sur l'innovation
53:50agricole de demain ? Qu'est-ce qu'il va falloir faire ?
53:52Je crois qu'il va falloir
53:54comme je le disais tout à l'heure,
53:56plein de choses !
53:58Je crois qu'il va falloir
54:00utiliser une boîte à outils
54:02de produits de traitement et de protection des cultures
54:04qui conservera probablement
54:06des solutions conventionnelles
54:08pour les cas extrêmes, mais qui va
54:10adopter et utiliser massivement
54:12des solutions de biocontrôle. Et faire ensemble.
54:14Et faire ensemble. Et faire le
54:16sang résidu.
54:18Évidemment.
54:20Laurent Lemarchand, un mot
54:22sur les coopératives du futur, de demain
54:24et le terrain ? Parce que c'est quand même vous qui êtes
54:26le plus proche du terrain. Moi j'ai coutume de dire
54:28que les coopératives c'est un modèle vintage
54:30d'après-guerre, mais qui n'a jamais été aussi moderne.
54:32Puisqu'on redistribue vraiment
54:34toute la valeur aux agriculteurs, que ce soit sur le
54:36court terme à travers la redistribution ou sur le
54:38long terme à travers des réinvestissements.
54:40Et les coopératives ont un rôle
54:42essentiel dans l'agriculture de demain.
54:44Merci à tous d'être venus sur le plateau
54:46de New Era. C'était un plaisir
54:48de vous avoir. Une chose est sûre, relever
54:50le défi de la souveraineté alimentaire et industrielle
54:52ne dépend pas seulement des politiques ou des innovations.
54:54Nous avons tous
54:56un rôle à jouer en tant que citoyens,
54:58entreprises et acteurs publics.
55:00Merci à nos invités. Merci à vous de nous suivre
55:02dans ce New Era. A très bientôt
55:04pour un nouvel épisode où nous décrypterons
55:06ensemble les grandes évolutions
55:08de notre monde. Au revoir.

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