• il y a 3 jours
Une édition spéciale de "ça vous regarde", avec un reportage long format et un débat consacré à un thème unique de " la décarbonation", l'un des grands défis des décennies à venir.
L'industrie française représente en effet 20% des émissions de CO2. La France s'est donc fixé un cap : diviser par 2 les émissions de carbone d'ici 2030 et atteindre la neutralité en 2050.
Mais comment produire sans GAZ, sans CHARBON, sans PÉTROLE?Peut-on réellement garder une industrie compétitive sur notre territoire tout en la décarbonant?
Pour en débattre, après la diffusion d'un reportage de 26 minutes consacré au site de Fos sur mer, l'un des plus polluants de France mais aussi l'un des pionniers en matière de décarbonation,
Clément Méric reçoit :
- ROLAND LESCURE, ancien ministre de l'industrie, aujourd'hui député Ensemble pour la république,
- PATRICE VERGRIETE, maire de Dunkerque,
- NICOLAS MAT, secrétaire général de l'association Piicto qui réunit les industriels de Fos-sur-mer,
- MATTHIEU QUIRET, chef du service industrie au journal Les Echos.

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Transcription
00:00Générique
00:02...
00:10Bonsoir à tous et bienvenue dans Savourgarde.
00:13On s'intéresse au défi de la décarbonation
00:15de notre industrie.
00:17C'est un enjeu de souveraineté, d'emploi et bien sûr d'écologie.
00:21L'industrie française représente à peu près 20 %
00:24de nos émissions de CO2.
00:25L'objectif est de réduire ces émissions de moitié
00:28d'ici à 2030 et d'atteindre le zéro émission,
00:31donc la neutralité carbone, en 2050.
00:34Comment produire sans gaz, sans charbon et sans pétrole ?
00:38Les solutions techniques existent,
00:40mais à quel prix peut-on garder une industrie compétitive
00:43sur notre territoire tout en la décarbonant ?
00:46On va en débattre ce soir avec nos invités,
00:49Roland Lescure. Bonsoir.
00:50Vous êtes ancien ministre de l'Industrie,
00:53aujourd'hui député Ensemble pour la République.
00:55Patrice Vergrit, bonsoir. Vous êtes le maire de Dunkerque.
00:59Nicolas Matt, bonsoir.
01:01Vous représentez les industriels de Fos-sur-Mer,
01:03qu'on va voir dans le reportage.
01:05Vous les représentez au sein d'une association
01:08qui s'appelle PICTO.
01:09Enfin, Mathieu Quiré, bonsoir.
01:11Vous êtes le chef du service industrie
01:13au journal Les Echos.
01:14Mais dans un premier temps, on va voir que cette décarbonation
01:18est déjà une réalité, notamment dans la zone industrielle
01:21de Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône,
01:23avec électrification, hydrogène vert et méthane de synthèse.
01:27C'est un reportage réalisé par Marion Becker,
01:29avec Pierre-Yves Dedeninck et Maxime Rioux.
01:35Fos-sur-Mer, à 50 km à l'ouest de Marseille,
01:39un village provençal,
01:41cerné par l'une des plus grandes zones industrielles
01:44au portuaire de France
01:45et l'une des plus grandes sources de pollution.
01:49Ici, 18 millions de tonnes de CO2
01:52sont émises chaque année.
01:53Là, vous avez la torche qui émet fortement de pollution,
01:58fortement de CO2,
02:00et c'est pour ça qu'il faut véritablement rentrer
02:03dans la décarbonation.
02:04L'Etat a fixé un objectif ambitieux,
02:08atteindre la neutralité carbone en 2050.
02:11L'industrie est en pleine mutation.
02:14Décarboner, c'est pour être là demain,
02:17c'est une condition de survie.
02:19En quelques années,
02:21Fos est devenu le laboratoire de la décarbonation.
02:25L'hydrogène et le méthane de synthèse,
02:27c'est une des briques à la disposition des industriels
02:30pour pouvoir demain se décarboner.
02:32Décarboner, mais à quel prix ?
02:35Certains projets suscitent l'inquiétude des habitants.
02:38Personne n'a expliqué qu'on recouvrait les étangs,
02:41qu'on mettait une usine à tel endroit, qu'on clôturait.
02:44On ne peut pas s'être battus pendant 20 ans contre les pollutions
02:48et ne pas accompagner le mouvement qui nous amène à zéro émission.
02:51La réindustrialisation est en marche
02:55pour libérer l'industrie des énergies fossiles.
02:58Un chantier titanesque.
03:18Musique rythmée
03:21...
03:24René Raymondi est le maire de Fos-sur-Mer.
03:27Enfant du pays, il a vu les industriels
03:30s'installer sur ces terres, aux portes de la Camargue.
03:35J'avais 10, 11 ans, quand ESO a commencé à se construire
03:38et Arcelor dans la continuité.
03:41Tout ça n'était que du marécage, dans le passé.
03:44Musique rythmée
03:45Dans les années 60, l'Etat décide de créer un nouveau port
03:49et d'implanter des usines.
03:51Le complexe industriel aux portuaires sort de terre.
03:55Musique rythmée
03:58Ici, Eugène Cullman est seul maire.
04:01L'acidérurgie, c'est-à-dire les hauts fourneaux et l'acide.
04:05Musique rythmée
04:06À côté, la chimie, l'air liquide, ICI, Péchinay,
04:10et puis tous les grands du pétrole,
04:12déjà concentrés sur les bords de l'étang de Berre,
04:15mais un peu à l'étroit.
04:16Musique rythmée
04:20Musique rythmée
04:23Musique rythmée
04:26Musique rythmée
04:28On voit là-bas les grandes éoliennes, les portiques du grand port maritime.
04:32Bien évidemment, on contrepoint, au fond, ArcelorMittal,
04:36dépôt pétrolier de fosses, qui est un hub essence.
04:41La raffinerie, ESO.
04:44Aujourd'hui, le géant industriel est en nous.
04:46Le 3,4 des habitants ont travaillé dans ces usines
04:50ou ont travaillé directement pour la ville.
04:52Si l'industrie fait vivre les habitants,
04:55pendant des décennies,
04:57elle a émis des polluants dangereux pour la santé
04:59et rejeté des millions de tonnes de carbone dans l'atmosphère.
05:04Aujourd'hui, la zone industrielle
05:06veut devenir la pionnière de l'industrie décarbonée,
05:09un modèle, après avoir longtemps été pointé du doigt.
05:14Les pollutions qu'on connaissait il y a 20 ans,
05:17qui ont créé de graves soucis sanitaires,
05:19on les a de moins en moins aujourd'hui.
05:22Et la décarbonation qui est devant nous
05:24devrait, au fil du temps,
05:27en 2030, 2035,
05:29faire disparaître la grande majorité des émissions,
05:33et en particulier celle du carbone.
05:35Quand on prend Fosses, Le Havre et Dunkerque,
05:39c'est 50 % des émissions de gaz carbonique de toute la France.
05:43Donc il y a véritablement de quoi faire.
05:46Il y a un magnifique chantier devant nous.
05:49Et moi, je suis fier parce que, quelque part,
05:53ce ne sont pas nos combats contre la pollution,
05:55mais c'est la prise de conscience planétaire
05:58que le réchauffement climatique est là
06:00et qu'il faut agir très vite.
06:02Et que Fosses soit au cœur de ce mécanisme de survie,
06:09ça me rend quelque part un peu fier.
06:12Et c'est pour ça qu'aujourd'hui,
06:13de combattant de cette pollution,
06:17je suis devenu le promoteur de cette industrie de domaine,
06:22de cette transition énergétique
06:24et de cette décarbonation en particulier.
06:27Un pari à plus de 11 milliards d'euros d'investissement.
06:31Et le temps presse.
06:33D'ici 2030, les industriels devront diviser par deux
06:36leurs émissions de CO2
06:38avant d'atteindre la neutralité en 2050.
06:41Alors, ils ont entamé leur mutation,
06:45à l'image de Petro-Ineos,
06:47le plus gros site pétrochimique et de raffinage
06:50du sud de la France.
06:52La raffinerie traite chaque année
06:5510 millions de tonnes de pétrole brut,
06:58cette énergie fossile dont il faudrait se passer.
07:01Le site de la Vera émet chaque année
07:041,6 million de tonnes de CO2.
07:07Là, on arrive sur la partie des trois agrocomplexes
07:11où on a un complexe hydrocraqueur, que vous voyez là,
07:14avec une unité principalement orientée
07:17vers la production de diesel.
07:20Comment décarboner quand on raffine du pétrole ?
07:24Si Petro-Ineos continue de produire des carburants,
07:27la raffinerie cherche à moins polluer.
07:30Elle a mis en place un projet de décarbonation
07:33dénommé Blue Sky.
07:34Damien François est ingénieur sur ce projet.
07:39Je vais essayer de passer, mais il y a des travaux de partout.
07:44Pour moins polluer, il faut d'abord moins consommer
07:47et utiliser une énergie plus propre
07:49pour faire fonctionner ces machines,
07:52passer au tout électrique.
07:54L'électricité doit remplacer le gaz et le pétrole.
07:59Comme vous pouvez le constater,
08:01il y a des travaux qui sont en train d'être menés
08:04parce qu'on a un projet d'électrification
08:06de notre raffinerie.
08:08D'ici fin 2025, on devrait avoir doublé la capacité de la raffinerie
08:13en termes de disponibilité électrique.
08:16Ça a commencé déjà en 2014,
08:18pour ce four-là, qui fonctionnait avec du fioul liquide,
08:20qui émettait beaucoup de CO2, du soufre.
08:22On a remplacé les brûleurs de ce four pour les passer à des brûleurs gaz.
08:26Donc, effectivement, ça fait partie
08:28de notre amélioration d'efficacité énergétique,
08:30mais aussi de notre décarbonation,
08:32puisqu'on a réduit l'impact de CO2
08:33grâce aux changements de combustible sur ce four.
08:37Ces projets ont permis de réduire de 70 % les émissions polluantes
08:42et de 8 % les émissions de CO2.
08:44A terme, la raffinerie aimerait ne plus utiliser d'énergie fossile
08:49dans ses procédés de fabrication.
08:52On peut travailler dans l'industrie,
08:54faire tout ce qui est possible
08:56et être sensible aux questions environnementales ?
08:59Oui, ça en va d'une part pour l'image de marque de notre société.
09:03L'objectif d'une société comme la nôtre, c'est pas de polluer.
09:06C'est par contre répondre à un besoin,
09:07le besoin de produire des carburants pour chacun,
09:10pour la mobilité, pour la vie de tous les jours.
09:13Mais c'est aussi pour nous, en tant que citoyens,
09:16comme je disais, c'est important,
09:17parce qu'on vit aussi aux alentours pour la plupart.
09:21L'objectif, c'est pas non plus d'avoir un environnement dégradé
09:24lorsqu'on quitte l'usine.
09:26Donc, c'est... Voilà, c'est important
09:29et on est très sensibles à ces points-là.
09:32Au-delà des attentes de la société et de l'image pour l'industriel,
09:37c'est un enjeu stratégique pour l'avenir de la raffinerie,
09:41car la France aimerait se passer du pétrole.
09:44En 2035, il n'y aura plus de nouveaux moteurs thermiques,
09:48la demande de carburants pourrait chuter.
09:51Alors, Petro Ineos doit anticiper sa conversion
09:54pour produire des énergies plus propres.
09:56Le directeur suit de près l'évolution du projet Blue Sky.
10:00On les prend un par un, puis on va plus dans le détail.
10:04Oui, très bien.
10:05Sur le projet Blue Sky,
10:07alors, toute la fresque des projets d'optimisation énergétique,
10:12celle-ci, elle est bien avancée.
10:15Sur les projets d'électrification,
10:19on est en train de...
10:20On finalise la courbe d'augmentation de nos consommations électriques.
10:25C'est parfait.
10:26L'avenir d'une raffinerie dans un monde décarboné,
10:29dans le futur, c'est quoi ?
10:31C'est devenir une plateforme...
10:33Ça sera une plateforme multi-énergie.
10:36Ça sera donner des e-fuels,
10:38des carburants qui seront verts.
10:42Ça sera fabriquer ces carburants avec de l'hydrogène renouvelable.
10:46Ça sera donner accès à de la mobilité par l'hydrogène.
10:50L'électricité renouvelable,
10:53c'est un concept qui n'est pas forcément...
10:56On travaille dessus, mais qui est en cours d'élaboration.
11:00Cet hydrogène, un de nos projets,
11:03est de remplacer cet hydrogène fossile
11:06par de l'hydrogène renouvelable
11:08qui a été produit par électrolyse de l'eau,
11:10à partir d'électricité renouvelable.
11:14Donc, emprunt de carbone, zéro.
11:16Donc, c'est un vrai levier pour nous
11:19pour réduire nos émissions de CO2 directes.
11:21C'est un avantage stratégique si on arrive à être parmi les premiers.
11:25C'est pour ça qu'on travaille dessus.
11:27Pour avoir une proposition de carburant
11:30avec cette composante verte.
11:33Le plus tôt possible.
11:34Exactement.
11:35Pour cette plateforme du futur,
11:38Petro Ineos devra investir 1,6 milliard d'euros.
11:43Des investissements colossaux
11:45pour développer l'énergie du futur,
11:47l'hydrogène.
11:48Ici, à Fos, elle suscite de grands espoirs.
11:53C'est ici, justement, que GRT Gazes et ses partenaires
11:56ont développé le premier démonstrateur de production d'hydrogène
12:00à échelle industrielle,
12:03Jupiter 1000.
12:08Là, on est sur un électrolyseur PEM, nouvelle technologie.
12:11C'est le seul électrolyseur PEM construit par McPhee
12:14pour le projet.
12:16500 kW de puissance.
12:17Il va produire environ 90 normaux mètres cubeurs d'hydrogène.
12:21La réaction se passe dans les stacks qui sont devant vous,
12:24les petits réservoirs.
12:27L'électricité, produite à partir d'énergies renouvelables,
12:31est plongée dans ces réservoirs d'eau.
12:34Le courant électrique casse alors les molécules d'eau
12:37en séparant la molécule d'oxygène de celle d'hydrogène.
12:42L'hydrogène ainsi obtenu
12:43peut être intégré dans le réseau de gaz
12:46où il se mélange au gaz naturel.
12:49Sur ce site, on va s'attacher à tester
12:53vraiment ces équipements et à les pousser un peu
12:56au bout de leur capacité pour être en mesure
12:59de produire en relativement grande quantité
13:01l'hydrogène dont on va avoir besoin pour décarboner l'industrie.
13:07Pour aller plus loin dans la décarbonation,
13:09Jupiter 1000 capte et utilise la pollution de l'usine voisine
13:14pour produire du méthane de synthèse,
13:17un système prometteur.
13:20Donc là, le principe, on va rentrer du CO2 et de l'hydrogène,
13:24donc l'hydrogène qu'on a fabriqué chez nous
13:27et le CO2 qu'on a capté sur l'usine qui est à côté
13:29pour la décarboner.
13:32Et en fait, on va mélanger notre hydrogène et notre CO2.
13:35On va les faire passer à travers un réacteur
13:37avec une poudre catalytique,
13:40avec un catalyseur plutôt à l'intérieur.
13:41Et la réaction, on va créer du coup un e-gas,
13:45donc du e-méthane qu'on va après injecter
13:48directement dans le réseau de gaz naturel existant.
13:51Là, on va arriver sur la phase vraiment de production
13:54où on va tester à pleine charge le process.
13:57Super.
13:59L'idée derrière, quand on sera en production plus industrielle,
14:04ce sera que ce e-méthane, ce méthane de synthèse,
14:07finalement, il puisse être utilisé
14:10en substitution du gaz naturel fossile
14:12pour derrière décarboner les usages
14:15qui seront les plus compliqués à décarboner
14:18au niveau des usages de gaz.
14:21Ces gaz de synthèse pourraient devenir le carburant
14:24du transport routier ou des transports maritimes et aériens,
14:28les plus difficiles à remplacer aujourd'hui.
14:33La décarbonation de l'industrie, aujourd'hui,
14:35elle ne pourra pas se faire sans l'hydrogène ou le méthane ?
14:39L'hydrogène et le méthane de synthèse, ou le biométhane,
14:43sont des composantes
14:46qui vont permettre de décarboner l'industrie.
14:48Il n'y a pas de solution universelle et miracle,
14:51sinon on l'aurait déjà appliquée, je vous garantis.
14:54C'est une des briques qui sera à la disposition des industriels
14:58pour pouvoir demain se décarboner.
15:01Les industriels misent déjà sur la précieuse molécule.
15:05Deux projets d'envergure devraient voir le jour.
15:08Gravity sera la première usine française
15:11de production par hydrogène de fer bas carbone.
15:16Une usine de production d'hydrogène,
15:18elle, fabriquera dès 2026
15:20des carburants de synthèse pour l'aviation.
15:23Elle se nomme H2V.
15:26Elles s'installeront ici, à France,
15:28sur les terres du Grand port maritime de Marseille,
15:322e port de France et 3e de Méditerranée.
15:36Le port, ce ne sont pas que des quais pour accueillir les bateaux.
15:39Il a décidé de mettre à disposition une partie de ces terrains libres
15:43pour développer l'énergie du futur.
15:46L'endroit où on est, ici, très précisément,
15:49c'est le futur terminal sur lequel on souhaite
15:51que soient développées des éoliennes mises au large en Méditerranée.
15:58Elle se situe exactement là.
16:00Ce qu'il faut imaginer, c'est un grand terre-plan
16:03avec des énormes flotteurs dessus,
16:04avec 2 terrains de foot en acier ou en béton.
16:08Et à côté, des éléments d'éoliennes, eux aussi, assez importants en taille.
16:12Et surtout, une immense grue,
16:15une des plus grandes grues du monde,
16:16puisqu'elle est capable de porter 2 à 320 à une hauteur de 200 m.
16:20C'est vraiment une énorme grue
16:22qui va soulever les éléments pour intégrer, pour construire l'éolienne.
16:26Et puis, devant le terre-plan, il y aura un quai.
16:28Et sur ce quai, avec des flotteurs qui seront en flottaison,
16:32des éoliennes en préparation,
16:34et puis les amener en mer pour les stocker
16:36en attendant qu'elles partent au large.
16:39Le port veut devenir le hub de l'éolien offshore en Méditerranée.
16:45Les énergies renouvelables et l'hydrogène joueront un rôle majeur
16:49pour tenir les objectifs de décarbonation.
16:51Mais à quel prix ?
16:53Si les projets de la zone industrielle au portuaire
16:56sont bien accueillis par les habitants,
16:58un autre projet, situé à quelques kilomètres
17:02de l'autre côté de la ville de Fos, les inquiète.
17:10Du site, c'est bien qu'on voit des dames, des randonneuses.
17:12Bonjour, mesdames.
17:15Bonjour, mesdames.
17:17Vous êtes au courant du projet qu'ils veulent faire ici ?
17:20Moi, je suis contre.
17:22Nous aussi, nous sommes contre.
17:23Qu'est-ce qu'ils veulent faire ?
17:25Ici, ils veulent recouvrir les étangs de 500 hectares de panneaux solaires.
17:29Ils ne serviront pas ?
17:30Si, ils vont servir,
17:31mais ils vont servir à faire fonctionner
17:33une partie d'une usine à hydrogène qu'ils vont mettre sur le plan d'Eros.
17:38Au revoir, mesdames.
17:40Avec ce projet, dénommé Ivance,
17:43l'entreprise Géoselle espère produire ici,
17:46sur ses étangs d'eau salée, de l'hydrogène bas carbone
17:50dont auront besoin les industriels de la zone.
17:54Dès qu'il a été informé de ce plan,
17:56Jean-Louis Sagnal a monté un collectif pour préserver ces étangs.
18:00Ah, j'appelle quelqu'un.
18:02La population, on leur a dit qu'on allait décarboner la planète,
18:06que FOSS allait être pionnier dans le monde
18:09et qu'on allait sauver tout le monde.
18:12Et donc, il est difficile d'être contre cette idée-là.
18:17Mais personne n'a expliqué qu'on allait recouvrir les étangs,
18:21mettre une usine à tel endroit, clôturer.
18:24On prévoit une nouvelle ligne haute tension de 125 000 volts
18:28et puis recouvrir ce lac, ça veut dire,
18:31là, pour le coup, condamner toute vie, évidemment,
18:35dans le lac et autour.
18:38C'est une zone de survol des oiseaux.
18:53Les industries, on les a acceptées tant qu'elles sont à l'intérieur
18:56qu'il leur a été dédié, spécifiquement délimité pour elles.
19:02Et d'ailleurs, nous, ça fait 20 ans qu'on existe
19:04et ça fait 20 ans qu'on suit toutes les industries,
19:07on fait partie de toutes les commissions de suivi de sites,
19:10on a élaboré les plans de prévention des risques technologiques
19:13avec les industriels,
19:14on entretient des rapports qui sont cordiaux avec les industriels,
19:17parce que cette activité nous fait vivre.
19:21Nous ne sommes pas du tout contre la technologie photovoltaïque.
19:26On n'est pas du tout contre le développement industriel de fosses.
19:29On n'est pas du tout contre les énergies renouvelables.
19:32Nous sommes contre l'implantation de ce projet
19:35sur certes parties est de la ville,
19:37qui nous semblent totalement déraisonnables.
19:41Le soir même, les habitants ont rendez-vous à la maison de la maire.
19:46Géoselle va tenter de les convaincre.
19:50Car désormais, toutes les nouvelles installations
19:52qui ont un impact sur l'environnement
19:55doivent faire l'objet d'une concertation et d'un débat public.
19:58Plus question d'imposer les usines, comme dans les années 60.
20:03Les dirigeants de Géoselle le savent,
20:05une partie de la ville est hostile au projet.
20:08La séance s'annonce houleuse.
20:12Bonsoir à tous.
20:13Je suis très heureux de vous voir aussi nombreux aujourd'hui
20:16pour ouvrir cette concertation.
20:19Alors, moi, j'ai bien entendu les questions
20:22et les oppositions de certains
20:24concernant le projet que nous portons aujourd'hui.
20:27Mais nous sommes là ce soir,
20:29comme nous serons présents à chaque moment de la concertation,
20:32pour déjà vous écouter, vous répondre,
20:36et j'espère débattre,
20:38parce que ce mot, pour moi, est quand même très important,
20:41et avoir un échange ouvert et constructif.
20:45Le projet, c'est tout d'abord une ferme solaire
20:49qui permet de produire de l'énergie, de l'électricité décarbonée,
20:53puisque c'est de l'énergie solaire.
20:56Ca correspond, en décarbonation,
20:58à éviter d'émettre 105 000 tonnes de CO2 par an.
21:04105 000 tonnes, c'est la moitié du bilan carbone de la ville de Marseille.
21:09Et à l'échelle d'une année, le projet sera autonome en énergie,
21:12c'est-à-dire qu'il apportera autant d'énergie
21:15qu'il n'en a besoin pour produire de l'hydrogène.
21:19Il y a madame ici,
21:21il y a monsieur en vert là,
21:23il y a monsieur là-bas ici,
21:25il y a monsieur qui est là-bas, il y a monsieur ici, ici.
21:28Écoutez, moi, je me demande pourquoi on veut absolument détruire
21:31ces deux étages, c'est le seul poumon de vie qui nous reste un petit peu,
21:34le seul poumon de l'Auberge des Hauts,
21:36alors qu'on en a, du côté ouest, une zone industrielle.
21:40Où cette zone industrielle, il n'y a plus rien.
21:43Il n'y a plus d'arbres, les marais sont en train de mourir.
21:47Et donc, pourquoi ne pas l'installer là ?
21:52Mais en fait, on ne prévoit pas de détruire les étangs.
21:55On vient superposer des panneaux photovoltaïques.
21:59Vous avez effectivement mentionné d'autres zones
22:02pour implanter ces 500 hectares de panneaux photovoltaïques.
22:05Aujourd'hui, trouver un foncier sans déboiser,
22:09sans détruire la nature,
22:11pour mettre 500 hectares de panneaux photovoltaïques,
22:14c'est quasiment impossible dans la région.
22:17Je dis ici, si on vous pose ça dans l'enfer,
22:19si on vous pose ça dans l'enfer...
22:22T'as compris ?
22:23S'il vous plaît, attendez. Voilà, merci.
22:26Si vous voulez en parler, vous pouvez.
22:28C'est un petit repos.
22:29On continue.
22:31Le projet tel qu'il est présenté actuellement
22:35est vraiment une dégradation impensable et désastreuse pour la ville.
22:40Donc, je disais, il faudrait renoncer à ce projet
22:45pour permettre aux habitants de respirer un peu mieux.
22:49Applaudissements
22:51...
22:55Alors, posez-vous la question.
22:57Est-ce que vous voulez continuer à avoir des cancers dans la région ?
23:01Est-ce que vous voulez continuer à subir cette pollution ?
23:05Ou vous voulez vivre avec une énergie renouvelable ?
23:08C'est la question qu'il faut se poser.
23:10On est pour ou on est contre, mais posez-vous cette question.
23:14Monsieur le maire, vous avez la parole.
23:17Pour le maire de Fos, soutien du projet...
23:20Oh, non, non, on va vous donner un micro.
23:22...les réticences des habitants ne seront pas sans conséquence
23:26sur leur avenir.
23:27Que direz-vous à vos enfants dans 40 ans ?
23:32Que vous vous êtes battus contre des projets ?
23:35Oui, oui, oui, que vous vous êtes battus contre des projets ?
23:40Attendez, c'est comme ça, la concertation ?
23:42Bravo, les démocrates !
23:45Il n'y a pas de choix, c'est comme ça.
23:47Parce que sinon, les panneaux et l'hydrogène,
23:50on les fera en Espagne,
23:51les panneaux et l'hydrogène, on les fera au Maroc,
23:54on les fera bien ailleurs.
23:55Et effectivement, on se retrouvera sans industrie,
24:00sans électricité et sans tout le reste.
24:08La concertation s'est achevée au début de l'été.
24:12Le rapport issu des réunions publiques
24:13soulève le clivage au sein des participants,
24:16la défiance des opposants
24:18et le rejet d'une lieu d'implantation d'Ivance.
24:21Un avis consultatif.
24:24Romuald de Meunier et Jean-Louis Sagnal
24:27ont le sentiment d'avoir réussi à faire bouger les lignes.
24:31On s'est fait entendre, c'est certain.
24:34C'est certain, on s'est fait entendre.
24:36Est-ce qu'on a réussi à arrêter le projet ?
24:41Ca ne l'est pas.
24:42On s'est fait entendre.
24:45Ca a permis aux gens, et notamment aux décideurs,
24:48de changer leur regard sur la chose.
24:52C'est ça qui est important.
24:53Nous restons, bien sûr, demandeurs et optimistes
24:57pour l'abandon complet du projet sur cette zone.
25:03Ils ont remporté une première victoire.
25:05Face à l'opposition, désormais,
25:08le maire demande lui aussi le retrait du projet.
25:12Géoselle a pris acte des inquiétudes
25:14exprimées lors de la concertation.
25:16Ivance ne verra pas le jour tel qu'il a été présenté.
25:20Depuis son siège,
25:21la directrice du projet travaille à une alternative.
25:26On a entendu des oppositions pendant la concertation,
25:29mais on n'a pas entendu d'opposition
25:31contre le principe de notre projet.
25:33C'est-à-dire, ça, c'est un point qu'on a noté,
25:36c'est-à-dire qu'on n'a trouvé personne qui nous dise
25:40que notre projet n'a pas de sens,
25:41c'est-à-dire de décarboner.
25:43Ce n'est pas ça qui a été remis en cause.
25:45Parmi les oppositions,
25:48il y a des questions de sécurité
25:52autour de l'usine d'hydrogène
25:56et également des questions d'impact paysager.
26:01On va revoir le projet en profondeur.
26:04On ne va pas le faire tel qu'il avait été présenté au départ.
26:08Maintenant, un projet d'une telle ampleur,
26:09la revue d'un projet d'une telle ampleur, ça prend du temps.
26:13Malgré les réserves, Géoselle n'abandonne pas le projet.
26:19La zone industrielle au portuaire n'a pas d'autre choix
26:22que de décarboner, développer de nouvelles énergies
26:26et une industrie plus propre.
26:29L'opportunité d'un renouveau économique
26:31pour la ville et ses habitants.
26:33Quand vous annoncez panneaux photovoltaïques,
26:36hydrogène, SAF, e-carburant,
26:39ce qui va se faire, c'est énorme.
26:44Au moment de la construction, c'est peut-être 30 000 emplois.
26:47Comment les acheminer sur les chantiers ?
26:49Ça va être un sacré aventurant.
26:51Un autre défi attend fausse,
26:54celui des infrastructures.
26:56La départementale qui mène aux ports et aux industries
26:59est déjà saturée.
27:01Tous les jours, la même file de camions s'étire.
27:04Malheureusement, rien n'est adapté,
27:07que ce soit le réseau routier,
27:09qui, effectivement, est le même depuis 50 ans.
27:15On n'a pas mesuré l'importance de ce qui se passe ici.
27:19Mais il nous faut, comme les autres,
27:22les outils nécessaires.
27:23J'ai beau prendre mon bâton de pèlerin
27:26et monter sur Paris pour essayer d'expliquer tout ça,
27:29chaque fois, effectivement, j'ai des oreilles attentives,
27:32des oreilles intéressées,
27:34mais au bout du bout, pas grand-chose qui se passe.
27:39Fos attend des investissements publics
27:41à la hauteur des enjeux
27:43et du chantier colossal entrepris par les industriels.
27:48L'enjeu est stratégique pour atteindre l'objectif
27:51de neutralité carbone fixée par l'Etat pour 2050.
27:59Voilà donc pour ce reportage réalisé par Marion Becker
28:02avec Pierre-Yves Dening.
28:03Pour débattre de cette décarbonation
28:05de notre industrie, nous sommes avec Nicolas Matt.
28:08Bonsoir.
28:09Vous êtes un des acteurs de la décarbonation à Fos-sur-Mer
28:13puisque vous coordonnez les efforts de tous les groupes industriels
28:16qui sont présents sur place.
28:18Vous le faites à travers l'association PICTO,
28:21dont vous êtes le secrétaire général.
28:23Patrice Verghride, bonsoir. Vous êtes le maire de Dunkerque,
28:26mais vous présidez aussi la communauté urbaine
28:29et le pôle métropolitain, ce qui fait de vous un acteur clé
28:32de la décarbonation à Dunkerque.
28:34Roland Lescure, bonsoir.
28:36C'est vous qui avez lancé
28:37ce qu'on appelle les contrats de transition écologique
28:40qui concernent les 50 sites industriels
28:43les plus polluants en France, dont font partie Fos-sur-Mer
28:46et Dunkerque. Vous étiez à l'époque
28:48ministre de l'Industrie. Vous êtes député ensemble
28:51pour la République et vice-président de l'Assemblée.
28:54Mathieu Quiré, bonsoir.
28:55Vous êtes le chef du service industrie
28:58au journal Les Echos.
28:59On va commencer par vous, Nicolas Matt.
29:01On a vu dans ce reportage que les solutions techniques existent.
29:05Une partie du chemin est déjà réalisée.
29:07Dans quel état d'esprit sont les industriels de Fos-sur-Mer ?
29:10Est-ce qu'il y a des sujets d'inquiétude ?
29:12Et si oui, lesquels ?
29:14Alors, effectivement, nos travaux ont mis en évidence
29:17toute une série de leviers pour la décarbonation
29:20au niveau du territoire de la zippe de Fos-sur-Mer
29:22et le porto de l'Étand-de-Berre,
29:24qui sont des plateformes intimement dépendantes
29:27les unes des autres en termes d'échanges de flux
29:29et d'énergie.
29:31Les scénarios que l'on a établis nous permettent
29:33de montrer une série de leviers.
29:35On pourra les préciser par la suite.
29:37Ils sont évoqués dans le reportage.
29:39Mais, effectivement, aujourd'hui,
29:41les industriels peuvent être dans une forme de paradoxe.
29:44Ils sont déterminés.
29:46Ils ont des projets concrets à pouvoir mettre en place
29:49dans les prochaines années, donc à court, moyen, long terme,
29:52pour une décarbonation profonde du tissu industriel,
29:55mais ce qui suppose, malgré tout,
29:57de lever un certain nombre d'incertitudes.
29:59Et qui sont ?
30:01Lesquelles ?
30:02Le coût d'accès à l'électricité dans la durée,
30:05les mécanismes de protection aux frontières de l'Europe
30:08par rapport à des produits importés
30:10qui, aujourd'hui, ne sont pas tout à fait considérés
30:13de la même manière en termes de contenu carbone
30:15que ce que nous pourrions produire en termes d'acier.
30:18Ils ne sont pas produits dans des conditions idéales.
30:21Exactement. Et puis, un point que l'on a mis aussi en évidence,
30:25c'est le fait que, certes,
30:26les sites industriels disposent de leviers de décarbonation
30:29au sein de leurs sites,
30:31mais tout l'atout de nos démarches territoriales,
30:34c'est de montrer aussi qu'une logique de symbiose
30:36peut leur permettre d'aller plus loin et encore plus vite.
30:39Par exemple, sur l'hydrogène vert qu'on voit dans ce reportage,
30:43est-ce que les industriels sont prêts à se lancer
30:45tête baissée là-dedans, sachant que ça demande beaucoup
30:49d'électricité et que ça coûte beaucoup plus cher à produire
30:52que l'hydrogène gris, fabriqué à partir d'énergies fossiles ?
30:56Alors, effectivement, encore une fois,
30:59dans nos simulations, on ne met pas en concurrence
31:03l'hydrogène vert et les outils...
31:05Vous pensez qu'il y aura un marché spécifique
31:07propre à cet hydrogène vert pour certains clients ?
31:11Avec un démarrage qui va se faire sous format notamment d'import
31:14d'hydrogène sous format ammoniaque.
31:17C'est le cas avec des projets sur la zone de fosses sur mer.
31:20Mais ça ne vient pas complètement en concurrence
31:23avec la production qui est déjà locale d'électrochimistes
31:26ou à partir de craquages de gaz naturels,
31:28moyennant le fait qu'on décarbone le gaz à l'entrée de ces outils
31:32et qu'on capte le CO2 à la sortie.
31:34Patrice Vergrit, à Dunkerque, ces dernières semaines,
31:37il y a plusieurs gros projets qui ont été mis en pause.
31:40Il y a l'usine de recyclage de batteries d'Eramet
31:43et le projet d'Arcelor pour produire de l'acier décarboné
31:46dans les hauts fourneaux de Dunkerque.
31:48L'investissement s'est élevé à 1,8 milliard d'euros,
31:51et en aide publique, on pensait que c'était acquis.
31:54Pourquoi Arcelor a suspendu ce projet pour l'instant ?
31:57C'est vrai qu'à Dunkerque,
31:58on a deux piliers qui sont liés à la décarbonation.
32:01A la fois, les nouvelles industries de la décarbonation
32:04sur les batteries.
32:05Aujourd'hui, la filière batterie à Dunkerque fonctionne bien,
32:09Vercor étant une dynamique d'avancée forte du projet.
32:11Vercor, c'est une gigafactory, comme on dit,
32:14qui va produire des batteries d'ici combien de temps ?
32:17D'ici la fin de l'année 2025, pour Renault en particulier.
32:20Du côté de la batterie,
32:22globalement, on voit l'avenir positivement,
32:24en voyant le chemin inéluctable
32:26vers la voiture électrique et la mobilité électrique,
32:29donc il y a une forme de confiance.
32:31La question posée, c'est la question du calendrier,
32:34la question du timing,
32:36est-ce qu'on est dans le bon timing par rapport à la demande ?
32:39L'inquiétude est plus grande,
32:41vous l'avez dit, du côté de la sidérurgie,
32:43parce que cette crise de l'automobile
32:45affecte beaucoup la sidérurgie et ArcelorMittal Dunkerque.
32:48Ce qui est attendu aujourd'hui par les sidérurgistes,
32:51c'est de savoir si, à l'échelle européenne,
32:54on considère que l'acier est un bien souverain.
32:56Et donc, mon voisin l'évoquait,
32:58il y a une attente très forte de la Commission européenne
33:01sur la close de sauvegarde.
33:03On va t'expliquer en quelques mois...
33:05Il permet de protéger l'acier européen,
33:07de considérer qu'en Europe,
33:09nous avons besoin de produire de l'acier
33:11et que c'est un bien stratégique.
33:13Le protéger à travers des barrières douanières ?
33:16Tout à fait. La close de sauvegarde,
33:18c'est une limitation des importations
33:20avec une taxe quand on est au-delà d'un quota d'importation.
33:23Ca demande à être activé.
33:24Différents pays européens se sont exprimés en faveur.
33:27Il faut que la Commission avance.
33:29L'autre dimension que vous avez évoquée,
33:32c'est le prix de l'électricité.
33:34Il faut que ça avance dans les discussions
33:36entre le gouvernement et EDF.
33:38Roland Lescure, vous avez été aux manettes,
33:40si l'on peut dire, au ministère de l'Industrie.
33:43Quand vous entendez à la fois Nicolas Matt,
33:45tous ces points de blocage,
33:47vous restez optimiste, malgré tout ?
33:49Oui, d'abord, parce que si vous n'êtes pas optimiste,
33:52vous ne savez pas ce que je fais,
33:54mais surtout parce que ces deux exemples sont exceptionnels.
33:58Votre documentaire, bravo, il est super,
34:00parce qu'on voit, malgré les petits défis d'acceptabilité,
34:03qu'il y a un vrai alignement des élus, des industriels
34:06et des équipementiers, le port notamment,
34:09pour vraiment opérer cette révolution industrielle.
34:13Il y a Dunkerque, que je connais bien,
34:15on a eu l'occasion de s'y voir plusieurs fois,
34:18c'est pareil. On a, je le dis devant lui,
34:20parce qu'il est modeste, un élu absolument exceptionnel
34:23qui a piloté ça depuis longtemps, qui a rassemblé tout le monde.
34:27J'ai eu l'occasion, quand j'étais ministre,
34:29d'annoncer les zones industrielles bas carbone,
34:32Dunkerque en est une, Fos en est une,
34:34Saint-Nazaire-le-Havre, qui rassemblent tout le monde
34:37en vue de cet objectif stratégique
34:39qui est de décarboner l'industrie.
34:41Avec ce que Patrice a dit,
34:43il faut à la fois décarboner l'industrie traditionnelle,
34:46c'est compliqué, mais inéluctable si on veut garder de l'industrie,
34:50et en profiter pour développer l'industrie de demain,
34:53l'hydrogène notamment. Aujourd'hui, c'est difficile,
34:56parce qu'on fait face à un choc conjoncturel.
34:59Il y a un ralentissement industriel indéniable dans le monde,
35:03notamment en Europe, avec des entreprises
35:05qui s'investissent à très long terme,
35:07qui ont besoin de visibilité, mais qui font face à des chocs.
35:11Là où la Chine a clairement fait le choix de la décarbonation,
35:15je dirais à la chinoise, donc très pilotée et très subventionnée,
35:19là où les Etats-Unis l'ont fait un peu à l'américaine,
35:22l'Ira, inflation redonctionnale,
35:24on met beaucoup d'argent et on fait du protectionnisme,
35:27nous, on est encore trop ouverts aux 80 ans.
35:30Je rejoins Patrice.
35:31On est en une révolution industrielle.
35:33Dans 10, 15, 20 ans, on n'aura plus besoin de ces barrières.
35:37D'abord, parce qu'on sera en avance,
35:39on sera décarboné avant tout le monde
35:41et on sera devenu compétitif.
35:42Mais au moment où on lance les nouveaux produits,
35:45c'était le cas dans le chemin de fer à la fin du 19e siècle,
35:49dans l'automobile après la Seconde Guerre mondiale,
35:52c'est le cas de ces industries,
35:53il faut protéger pour développer,
35:56pas protéger pour s'enfermer.
35:57Pourquoi pas d'action immédiate, rapide,
36:00de la Commission européenne ?
36:01Il y a eu déjà beaucoup d'actions,
36:03mais ça prend du temps en Europe, 27 pays à mettre d'accord.
36:07La fameuse MACF, la taxe carbone aux frontières.
36:09On a mis en place des subventions,
36:11ce que vous disiez tout à l'heure d'Arcelor.
36:14On va financer plus d'un tiers de la décarbonation
36:17à Dunkerque et à Fosse, d'ailleurs.
36:19On a annoncé 1,6 milliard de plus dans un budget
36:22qui, j'espère, sera voté pour décarboner les industries.
36:25Tout ça, c'est en place, mais il faut continuer.
36:28En Europe, ça prend un peu de temps.
36:30Les Allemands et les Italiens sont d'accord.
36:32Il y a une nouvelle commission, en place dès le début janvier.
36:36On attendra pour remettre un coup de pression.
36:38Le gouvernement, quel qu'il soit, va le faire.
36:41Il y a la question européenne, mais aussi la question franco-française
36:45de l'instabilité politique, qui peut aussi inquiéter
36:48les industriels. Ils ont besoin de se projeter dans l'avenir.
36:51Vous l'avez évoqué, il y a 1,6 milliard qui était en jeu,
36:54que vous aviez défendu dans le cadre du débat budgétaire.
36:58On sait pas s'ils sont là.
36:59Je prends un pas d'encule.
37:01Dans le budget, il y avait 50 millions
37:03pour la décarbonation de l'industrie.
37:06J'ai fait signer une tribune, avec des élus de tous bords,
37:09des maires, des présidents de régions,
37:12des députés, communistes, écologistes,
37:14parce que même les écologistes achètent ça,
37:17la décarbonation de l'industrie, du Bloc central, des LR,
37:20des socialistes. L'industrie, ça rassemble tout le monde.
37:23Grâce à cette tribune, le gouvernement, de l'époque,
37:27a décidé de mettre 1,6 milliard.
37:29Sauf qu'on sait pas ce qu'ils vont devenir.
37:32Ils vont forcément revenir.
37:34Parce que...
37:35Les industriels ont besoin d'une assurance.
37:38Et d'une visibilité.
37:39Donc, évidemment, oui, la censure est arrivée,
37:42la censure, c'est un coût, ça introduit de l'incertitude.
37:46Mais si on veut que ça se passe,
37:48il faut donner de la visibilité aux industriels.
37:51Il faut le faire.
37:52Mathieu Kyré, votre regard ?
37:54Ce qu'on voit en contact permanent avec les industriels
37:57depuis des mois, c'est qu'ils sont pris d'une fébrilité incroyable.
38:01Ils étaient dans une dynamique, après la pandémie,
38:04de décarbonation.
38:06C'était une tendance mondiale, européenne, française.
38:09Il y avait beaucoup de moteurs allumés.
38:11Là, ils sont rattrapés par un tas de freins.
38:14Il y a évidemment les questions d'incertitude politique.
38:18On a vu que, par exemple, dans le budget 2024,
38:21dans celui de 2025, il y a des centaines de millions d'euros
38:24qui étaient prévus sur l'hydrogène, sur la décarbonation,
38:27qui ne sont pas au rendez-vous, parce que les caisses sont vides.
38:32On voit, au niveau européen,
38:34les incertitudes avec le grand frère allemand,
38:37qui était quand même le grand frère de l'industrie européenne,
38:40qui est pris complètement de paralysie sur un tas de sujets,
38:44avec des monstres comme ThyssenKrupp,
38:46qui sont paumés au niveau de la décarbonation,
38:49mais à plein d'autres niveaux.
38:51Et puis, au niveau mondial, on voit quand même
38:54un phénomène géopolitique et économique
38:57sur des surcapacités qui se construisent partout dans le monde.
39:01On a parlé de la sidérurgie, mais il n'y a pas que la sidérurgie
39:04qui a un souci, la chimie, les surcapacités
39:07qui se construisent dans le monde, dans le Sud-Est asiatique,
39:10sur l'acier, la chimie, sur les batteries automobiles.
39:13Il y a quand même beaucoup de signaux
39:15qui sont très inquiétants pour les industriels.
39:18Garder le cap dans ces conditions, chapeau.
39:20L'Europe y parvient, chapeau.
39:22En deux mots, ce que vous dites est vrai,
39:26et du coup, il est indispensable qu'on garde ce cap
39:29et que la puissance publique européenne et nationale le fassent,
39:32que les élus locaux continuent leur boulot fantastique.
39:35Enfin, c'est un maire communiste.
39:37Vergreith n'est pas tout à fait communiste.
39:40Ils pensent la même chose, tous les deux,
39:42parce qu'ils savent que pour leur territoire,
39:45il y a un enjeu clé en termes d'emploi.
39:47Ca turbulle, mais dans ces moments-là,
39:49c'est là que vous vous retrouvez et que vous reconnaissez
39:52des vrais leaders.
39:53Il y a un consensus politique assez nouveau.
39:56Il y a un peu de sujets sur lesquels on est tous d'accord.
39:59Il y a une chose marquante dans ce reportage,
40:01c'est à quel point l'électricité va être cruciale
40:04pour pouvoir décarboner l'industrie.
40:06Il y en a besoin partout, notamment dans la raffinerie Petro et Ineos,
40:10mais aussi pour le groupe de chimique M1.
40:12Il y en a besoin pour produire l'hydrogène vert
40:15et le méthane de synthèse qu'on a vu dans le reportage.
40:18Arcelor va aussi en avoir besoin.
40:19Vous, à Fossurmer, avez sécurisé votre approvisionnement,
40:23à la fois sur des volumes d'électricité
40:25et sur des prix sur 10, 15, 20 ans,
40:29parce que c'est ce dont ont besoin nos industriels.
40:31Les prix, on ne peut pas les sécuriser
40:33à Fossurmer, bien évidemment.
40:35Par contre, l'approvisionnement et le renforcement
40:38de l'alimentation électrique de la zone
40:40est un challenge d'aujourd'hui.
40:42Ca fait partie des projets de territoire
40:44sur lesquels il faut arriver à trouver un consensus
40:47et des éléments de sortie positive,
40:50parce que, vous l'avez dit, le besoin est très important.
40:53Aujourd'hui, une région comme la région PACA,
40:56c'est environ 5 gigawatts d'appel de puissance,
40:58ça pourrait être amené à doubler
41:00dans les 10, 15 ans qui viennent.
41:02Il y a un enjeu sur une ligne à très haute tension
41:05qui ne plaît pas à tout le monde.
41:07Personne n'a envie d'avoir une ligne à haute tension
41:10qui passe sous ses fenêtres.
41:11Bien évidemment, et en l'occurrence,
41:13le gestionnaire de réseau, RTE,
41:15qui est le maître d'ouvrage avec l'Etat sur ce projet-là,
41:18questionne finalement les besoins électriques au plus juste
41:21de manière à se rendre compte,
41:23sur des plages de temps de 2025-2030 et au-delà de 2030,
41:27qu'est-ce qui peut être raisonnablement fait
41:29pour le renforcement de l'alimentation électrique,
41:32qui, in fine, vous l'avez dit, va servir à la décarbonation.
41:35Or, ce qu'on voit dans nos trajectoires,
41:38qu'elles soient de tendancielles jusqu'à ambitieuses,
41:41c'est que tous les scénarios montés y sont plausibles.
41:44On peut réussir une décarbonation ambitieuse
41:46avec à la clé une création d'environ 5 000 emplois directs,
41:49de l'industrie, avec tout ce que ça peut avoir
41:52comme effet de conséquence sur un territoire.
41:54On peut aussi être dans un scénario tendanciel
41:57où on détruirait de l'emploi dans les mêmes proportions.
42:00Tout est plausible aujourd'hui.
42:02C'est effectivement un vrai challenge.
42:04Sur les prix de l'électricité, c'est quand même...
42:07Deux choses.
42:08Non, mais juste pour qu'on comprenne bien,
42:10il n'y a pas aujourd'hui de visibilité
42:12pour les industriels.
42:14Ils vont devoir investir des sommes énormes,
42:17on parle de 11 milliards d'euros, rien que pour fosses sur mer,
42:20et ils savent pas combien coûtera l'électricité à l'avenir
42:24alors que ça va être le carburant de la décarbonation.
42:27On le voit bien dans votre reportage,
42:29parce que ça démarre au démarrage de fosses.
42:31Il y a des dizaines d'années,
42:33quelques visionnaires ont décidé de créer de l'industrie là-bas.
42:36A l'époque, ça a créé des débats énormes
42:39et l'enjeu de l'électricité était déjà important.
42:42Quelques-uns ont décidé de lancer les réacteurs nucléaires.
42:45de l'électricité nucléaire, des EPR.
42:47Il faut, et là-dessus, je vais être un peu sévère et un peu solennel,
42:51que EDF fasse le boulot
42:54pour prioriser le développement de l'industrie
42:58dans les tarifs que doivent payer les industriels
43:01dans la décarbonation,
43:03sur l'utilisation des réacteurs existants.
43:06C'est-à-dire avoir un tarif préférentiel ?
43:08C'est déjà le cas.
43:09Il y a des négociations en cours,
43:11je vais pas rentrer dans le détail,
43:13pour sécuriser des volumes et des prix,
43:16mais il faut qu'EDF fasse plus d'efforts là-dessus.
43:18Quand j'étais ministre de l'Industrie et de l'Énergie,
43:22je trouvais bien que les deux soient ensemble
43:24car ça permettait de mettre de la pression sur les uns les autres
43:28pour que la négociation aboutisse.
43:30Je pense qu'EDF peut faire plus, peut faire mieux.
43:33Je comprends EDF, ils ont tellement de projets.
43:35Il faut qu'on leur dise comment financer les EPR,
43:38qu'on sécurise les barrages, mais ce point-là est essentiel
43:41car si on n'a pas d'électricité,
43:43Gravity, qui est un projet chez vous,
43:45ils vont produire de l'acier décarboné en 2030.
43:48C'est demain 2030.
43:49Pour ça, l'électricité, pas cher.
43:51Il faut les virer.
43:52Il y a un débat quand même parce qu'EDF,
43:55ou une partie du gouvernement, des ministres,
43:57expliquent que les industriels ne se ruent pas
44:00pour sécuriser des contrats à long terme
44:02car les prix actuels sont bas
44:04et c'est difficile de s'engager à long terme.
44:07C'est vrai pour les industriels de taille moyenne.
44:09D'ailleurs, EDF a bien fait le boulot
44:11pour faire des contrats de moyen terme
44:14pour les entreprises de taille pas trop grosse.
44:16Pour les très gros projets, à eux deux,
44:18ils représentent 35 % des émissions de gaz à effet de serre
44:22de l'industrie française.
44:23Fos-sur-mer, Dunkerque, c'est 35 %.
44:25Donc, si vous décarbonez Fos et Dunkerque,
44:28vous faites un tiers du boulot.
44:30Ca va coûter beaucoup d'argent, mais ça vaut le coup.
44:33On sera, mais, uniques au monde si on fait ça.
44:37Il faut le faire.
44:38Sur cet enjeu du prix de l'électricité,
44:40il y a des négociations en cours.
44:42J'ai lu dans la presse, on parle de 70 euros
44:44du mégawatt-heure d'électricité.
44:46Je crois qu'un mégawatt-heure de gaz,
44:48en Europe, est autour de 40 euros.
44:50Aux Etats-Unis, il est autour de 10 euros.
44:53Comment un industriel peut décider de décarboner en France
44:56quand il voit ça aux Etats-Unis ?
44:58Les négociations se font actuellement
45:00sur un autre prix que 70 euros,
45:02mais Roland a raison.
45:04Je pense que les grands groupes, aujourd'hui,
45:07industriels, sont prêts à signer avec EDF
45:09une visibilité à long terme.
45:11Chez moi, c'est le cas.
45:12Il faut avancer sur cette question du prix.
45:15C'est ce que je disais tout à l'heure.
45:17La question de la souveraineté à l'échelle européenne,
45:20éviter le dumping environnemental,
45:22et le prix de l'électricité.
45:24Je voudrais revenir sur le volume,
45:26parce qu'on est passé un peu vite.
45:28C'est un très bel enjeu, le volume.
45:30Dunkerque, c'est déjà une centrale nucléaire
45:33de 5,4 gigawatts.
45:35On est en train... On a un projet de deux EPR.
45:38Quand tu étais ministre de l'Industrie,
45:40tu as largement développé ça, et c'est très important,
45:43et Roland a eu raison là-dessus.
45:45On rajoute 3,2 gigawatts.
45:47On a un champ éolien offshore de 600 mégawatts.
45:50C'est pas des petits projets.
45:52Et quand on regarde l'enveloppe,
45:55on parlait d'un 1,8 milliard pour la décarbode arsénal-hormitale.
45:58On est au même niveau pour le champ éolien offshore
46:01et pour l'extension du réseau électrique.
46:03On est autour de 1,5 milliard d'investissements à chaque fois.
46:07On voit à quel point cette question du volume,
46:10de la production d'électricité, est importante.
46:13Pour tous les téléspectateurs qui nous suivent,
46:15quand on enlève le pétrole, le gaz et le charbon,
46:18on doit le remplacer par de l'électricité.
46:20Il faut produire de l'électricité.
46:22Vous avez vu le reportage.
46:24Quand il faut produire du solaire, de l'éolien
46:27ou même du nucléaire, il y a des gros enjeux derrière.
46:30On a entendu le patron d'EDF dire très clairement
46:33que c'est l'enfer d'investir en France.
46:35Ca prend trop de temps.
46:36Et c'est très important qu'on arrive aussi
46:39à une production en volume d'électricité.
46:41Il y a un enjeu aussi de souveraineté majeure.
46:44Même si cet enjeu, ça m'intéresse de vous entendre là-dessus,
46:47il a un peu baissé ces derniers mois.
46:50Il y a une révision, quand même,
46:52qui se fait un peu partout dans les Etats-majors
46:55des grands groupes de l'énergie
46:57sur les volumes qui seront consommés
47:00dans les années à venir.
47:01Et comme la voiture électrique démarre moins vite que prévu,
47:05comme l'industrie, la réindustrialisation,
47:07ralentit, il y a quand même moins d'inquiétudes
47:10sur la disponibilité de l'électricité.
47:12C'est ce qu'on entend chez EDF.
47:14C'est ce qu'on entend ailleurs.
47:17Il n'y a que RTE qui est encore un peu...
47:19Il faut choisir entre la tendance et l'ambition.
47:22On a un certain nombre de scénarios.
47:24Je veux être ambitieux.
47:26Il faut travailler sur tous les leviers.
47:28L'Allemagne a décidé d'arrêter le bonus automobile.
47:31Si vous achetez...
47:32-...un bonus européen.
47:33-...en Allemagne, vous achetez un véhicule électrique,
47:36vous avez zéro. En France, vous avez 4000 euros,
47:39au moins, et réservé aux véhicules faits en Europe.
47:42Résultat, vous avez 17 % de part de marché
47:44des véhicules électriques en France
47:46et la part de marché de la Chine a été divisée par 4
47:49depuis qu'on a réservé le bonus aux véhicules européens.
47:52Les ventes en France ont chuté sur 12 mois.
47:54On est d'accord.
47:56Mais on a une très forte hausse de la vente des véhicules européens.
47:59Je veux qu'on roule électrique, mais qu'on roule électrique européen.
48:03Il faut travailler sur la demande, sur l'offre.
48:06Il faut amener tout le monde vers un scénario ambitieux.
48:09L'Etat fait son rôle, les élus locaux jouent son rôle.
48:12Il faut que la Commission européenne,
48:14le rapport Draghi qui dit 800 milliards d'investissement,
48:18il faut le mettre en oeuvre.
48:19Je pense qu'il faut être extrêmement déterminé,
48:22parce que c'est pas seulement un projet économique,
48:25c'est un projet de société.
48:26Faire de la France une nation de production,
48:29qui, plus est, écologiste.
48:31On a passé 30 ans à transformer la France
48:33en une nation de producteurs et de consommateurs.
48:36On a construit des ronds-points, des centres commerciaux.
48:39Il faut construire des usines.
48:41Dans l'industrie, c'est 20 000 emplois autour.
48:43A Dunkerque, ça représente quoi en enjeu territorial ?
48:46Il y a trois poumons économiques à Dunkerque,
48:49qui sont maintenant les batteries, l'énergie et l'acidérurgie.
48:53C'est trois poumons industriels, évidemment.
48:56C'est le poumon.
48:57On a d'autres dimensions que l'industrie,
48:59mais c'est l'élément majeur.
49:01Je voudrais reprendre ce qu'a dit Roland
49:03sur les véhicules électriques.
49:05J'ai été ministre de Transport un petit temps
49:07et j'ai voulu réfléchir à la relance
49:10de la demande de véhicules électriques en France.
49:12On avait commencé à travailler sur des solutions.
49:15J'avais proposé l'idée d'un plan d'épargne véhicule électrique
49:18comme on fait un plan d'épargne logement,
49:20avec de l'épargne bonifiée, des prêts bonifiés.
49:23J'avais proposé les formules d'intracting.
49:25Vous savez ce que c'est ?
49:27C'est que le gain que vous faites quand vous faites un plein,
49:30notamment chez vous, pour les gens qui peuvent charger chez eux,
49:33soit intégré dans le prix d'acquisition d'un véhicule.
49:36Ça ramenait le prix des véhicules électriques
49:39au prix des véhicules thermiques.
49:41C'est très important ce qu'a dit Roland.
49:43Il faut voir ce qu'on veut faire demain.
49:45Pourquoi Dunkerque, ça marche ?
49:47On s'est dit, voilà le cap à 10 ans, voilà le cap à 15 ans.
49:50On s'est tenus avec les industriels, avec le même cap.
49:53C'est pareil au niveau national.
49:55Il y a un cap, il est évoqué par Roland,
49:57et c'est important de garder le cap, surtout pas changer.
50:00Si on veut voir des bonnes nouvelles,
50:03il faut le dire, il y a un changement de logiciel
50:05au niveau européen pour davantage protéger la production européenne.
50:09Sur la voiture électrique, ces nouveaux outils
50:12pour favoriser, ou en tout cas pour ralentir
50:14l'offensive chinoise, ils fonctionnent.
50:16On voit bien que l'offensive de BYD n'a pas fonctionné pour l'instant.
50:20Il y a quand même des bonnes nouvelles.
50:22Il faut qu'ils produisent en France.
50:25Toyota est venu il y a plus de 20 ans en France.
50:28À l'époque, il y avait délevé le bouclier.
50:30C'est le premier véhicule, l'usine de Toyota à Valenciennes,
50:33c'est la plus grande usine d'auto made in France,
50:36en France, et donc ça marche.
50:38BYD, ils n'ont qu'à venir produire ici.
50:40La question, c'est s'ils vont produire en Europe de l'Est
50:43ou en France.
50:44Il faut qu'on soit compétitifs.
50:46Il y a un point important qu'on n'a pas évoqué,
50:49c'est la question des synergies.
50:51C'est aussi un enjeu clé pour la décarbonation.
50:53Comment ça fonctionne à fosse sur mer
50:55entre les différents groupes industriels,
50:58ces questions de synergie ?
50:59Très généralement, on appelle une synergie
51:02un échange de flux de matière et d'énergie,
51:04la chaleur fatale d'un acteur réutilisé par un acteur voisin
51:07ou la revalorisation d'un coproduit.
51:10Dans le contexte de la décarbonation,
51:12on le voit,
51:13l'alignement entre élus, décideurs privés,
51:16populations locales qui doivent comprendre
51:18ce que sont ces mutations et ces transformations.
51:21C'est pas tout de le faire à une échelle de connaisseurs,
51:24mais de le faire avec l'adhésion.
51:26On ne parle pas d'acceptabilité, mais d'adhésion.
51:29Ce qui est intéressant, c'est qu'on va aller
51:31vers des infrastructures qui vont nous permettre
51:34de transporter, de stocker, de distribuer,
51:36demain, de l'hydrogène, du CO2, etc.,
51:38de ce qu'on faisait déjà sur des énergies fossiles
51:41ou des produits raffinés.
51:43Là, ce pourraient être de nouvelles synergies
51:45qui se mettent en oeuvre,
51:47soit entre industriels,
51:48soit entre industriels et collectivités.
51:51C'est le cas avec l'énergie fatale,
51:53qui est revalorisée...
51:54La chaleur produite par les usines
51:56est réutilisée par la ville dans son réseau de chauffage urbain.
52:00Et par d'autres industriels.
52:01C'est un réseau de chaleur urbain sur Dunkerque.
52:05Il peut y avoir des connexions
52:07qu'on ne pense moins spontanément,
52:09qu'on pense moins spontanément entre le secteur agricole,
52:12qui a des coproduits à revaloriser,
52:14et des outils industriels qui peuvent permettre de la biomasse.
52:18Et ces interconnections, ces interactions fonctionnelles
52:21entre urbain, agricole, industriel,
52:24ça fait territoire, ça fait société, entre autres.
52:27On arrive bientôt au débat.
52:29Il y a une question qui se pose,
52:30celle du modèle économique d'une industrie décarbonée.
52:34Mathieu Quiré, j'aimerais vous entendre.
52:36Est-ce que cette industrie décarbonée est viable, rentable
52:39ou est-ce qu'elle est vouée à vivre sous perfusion d'aides publiques ?
52:43Aujourd'hui, c'est un peu ça.
52:45Il faut quand même une étincelle à l'image.
52:47C'est certain que la subvention publique est importante.
52:50On voit bien que sur des projets de décarbonation
52:53comme à Dunkerque, ça peut aller jusqu'à 50 % de l'investissement,
52:57la subvention.
52:58Tous les pays le font, ça paraît indispensable.
53:01Après, il y a un vrai débat autour de la durabilité
53:04des protections de l'industrie européenne.
53:07Est-ce que ça va suffire à protéger, pendant un moment,
53:10comme vous le disiez, les industries européennes décarbonées ?
53:13Est-ce que ça permettra d'être plus compétitif
53:16dans les offensives commerciales à l'étranger ?
53:20C'est assez compliqué d'y voir clair.
53:22L'acier vert, par exemple, c'est, dans le meilleur des cas,
53:25quand c'est produit au nord de la Suède
53:27avec de l'électricité pas chère, c'est plus 20-25 %.
53:30Pour aller convaincre un constructeur automobile
53:33de payer cette surprime,
53:35pour l'instant, c'est compliqué.
53:37Dans 15 ans...
53:38Il n'y a pas encore un marché pour ça.
53:40Les consommateurs ne sont pas prêts à payer 25 % plus cher
53:43pour avoir un acier.
53:45Il y a quelques marchés qui émergent.
53:47Le mat des éoliennes, ArcelorMittal explique
53:49qu'il commence à y avoir un intérêt pour de l'acier vert.
53:52Mais la construction automobile, pour l'instant, pas du tout.
53:56Donc, il faut certainement y aller,
53:58monsieur Lescoeur a raison,
54:00pour l'intérêt de tout le monde, il faut y aller.
54:02Nicolas Matt, là-dessus, vous voulez y réagir ?
54:05On parle beaucoup de coût de la décarbonation.
54:07Certes, nous, ça peut être 10, 13 milliards, etc.
54:10Est-ce que c'est un coût ou est-ce que c'est un investissement ?
54:14C'est tout complètement différent en termes de paradigme.
54:17Un investissement, ça supporte de le mettre en face.
54:20Par contre, ce qui est un coût,
54:22c'est l'inaction ou la non-décision,
54:24ou le report de décision.
54:25Mais ça, par contre, ça peut coûter, très clairement.
54:29C'est marrant, les industriels ne posent pas la question comme ça.
54:32Ils ont bien compris qu'ils n'avaient pas le choix.
54:35De toute façon, le monde...
54:37C'est inéluctable, il n'y a pas de marche arrière.
54:39C'est pas la question que posent les sidérurgistes.
54:42Ils posent la question de la concurrence avec la Chine,
54:45ils posent pas la question de la décarbonation.
54:48La décarbonation, elle est indispensable.
54:50Elle est indispensable.
54:52Il n'y a pas d'avenir sans décarbonation.
54:54Chez moi, ils ne posent pas la question de la décarbonation.
54:57Ils posent la question des conditions de la concurrence
55:00avec ceux qui ne feront pas la décarbonation.
55:03C'est très différent. Ils veulent jouer à armes égales.
55:06À un moment donné, la question, c'est qu'on leur donne
55:09la possibilité de jouer à armes égales.
55:11Mais tout le monde a intégré que, de toute façon,
55:14l'industrie de demain, elle sera décarbonée.
55:16Après, qu'on discute sur les modalités,
55:18sur le timing, sur la façon dont on doit y arriver,
55:21sur, justement, la logique de la concurrence,
55:24comment on se protège dans un moment
55:26où on a besoin de monter en puissance.
55:28Toutes ces questions sont sur la table.
55:30Mais le monde serait décarboné. C'est un projet de société.
55:33On est à la croisée des chemins.
55:35C'est maintenant que tout se décide.
55:37Mathieu Kyré dit qu'il y a des industriels
55:40qui se posent la question d'arrêter.
55:42Vous êtes dans une tempête.
55:43Il y a du brouillard politique. Il y a des risques économiques.
55:47Il faut garder le cap.
55:48Mais il ne faut pas oublier qu'aujourd'hui,
55:51Arcelor, Gravity, Total,
55:53s'ils veulent recruter des ingénieurs,
55:55ils ont intérêt à leur raconter qu'ils vont décarboner,
55:58sinon ils n'en auront pas.
56:00S'ils veulent garder des investisseurs,
56:02ils ont intérêt à leur raconter qu'ils vont décarboner,
56:05sinon, eux, ne les financeront pas.
56:07Vous avez raison, le sujet, c'est le client.
56:10Est-ce qu'on va avoir une demande pour de l'acier vert ?
56:13Mais si on dit que les voitures doivent être vertes
56:16ou ne seront pas, on en aura aussi.
56:18Il faut vraiment tout rassembler.
56:19Mais aujourd'hui, les planètes sont alignées.
56:22Il faut juste nettoyer les nuages
56:24et regarder au loin, et on y arrivera.
56:26Mathieu Kyré, le mot de la fin, peut-être,
56:28sur ces questionnements.
56:30Il y a des hommes et des femmes à la tête de ces industriels.
56:33J'ai été très marqué par des déclarations récentes
56:36de Carlos Tavares, qui n'est plus chez Stellantis,
56:39mais lui, son credo, c'est de dire
56:41qu'il a envie d'être du bon côté de l'histoire.
56:43Il veut... Il voulait mener cette entreprise
56:46vers les décarbonations parce qu'il ne voulait pas
56:49avoir à répondre de la non-action dans 20, 30 ans.
56:54Ca peut peser aussi, quand même, dans certaines décisions,
56:57les humains qui sont à la tête de ces entreprises.
57:00C'est vrai.
57:01Merci à tous les quatre d'être venus débattre
57:03sur le plateau de Savourgarde,
57:05de cet enjeu de la décarbonation de l'industrie.
57:08J'espère que ça a permis à chacun de mieux saisir
57:10ce qui est en jeu. Pour ceux qui voudraient revoir
57:13le reportage de Marion Becker, il est en ligne sur notre site
57:17et bien évidemment sur notre chaîne YouTube.
57:19Merci à tous d'être venus et bonne soirée à l'écoute d'LCP.
57:23SOUS-TITRAGE ST' 501

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