• le mois dernier
Retrouvez L 'Affaire dans l'affaire, tous les samedis de 12h et 13h sur les ondes de Sud Radio, en partenariat avec la revue Affaire criminelle de McSkysz.

Avec Maître Frédéric Berna, avocat au barreau de Nancy / avocat des parties civiles et Me Takhedmit Lee, avocat de Frédéric Pechier.
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##L_AFFAIRE_DANS_L_AFFAIRE-2024-11-16##

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News
Transcription
00:00Bonjour, bienvenue pour votre rendez-vous avec l'actualité judiciaire, l'Affaire
00:09dans l'Affaire, une émission en partenariat avec la revue Affaire Criminel.
00:13Ensemble, nous allons revisiter les affaires qui ont marqué l'histoire du crime ou l'actualité.
00:17Chaque semaine avec Jean-Marie Bordry, bien sûr, Stéphane Simon, bonjour, et le complice
00:22Victor Lefebvre, rédacteur en chef de la revue Affaire Criminel, la revue de Max Keys,
00:27YouTubeur aux 2 millions d'abonnés.
00:29Elle arrive quand, cette revue, à propos, cher Victor ?
00:31Elle arrive court en décembre, elle sera livrée au pied du sapin pour Noël et on vous réserve
00:36quelques surprises.
00:37Bon, super.
00:38Aujourd'hui, nous allons vous parler de l'affaire du docteur Péchier et nous avons beaucoup
00:42de chance car nous serons avec les deux avocats principaux de ce dossier, Maître Frédéric
00:46Bernard et Lee Taquette-Meat, avocat de Frédéric Péchier, qui va être examiné par la cour
00:54d'assises du Doubs.
00:55L'affaire Péchier du nom du docteur de médecine anesthésiste réanimateur Frédéric Péchier,
01:01mis en examen et soupçonné d'empoisonnement avec préméditation pour des faits commis
01:06entre avril 2009 et janvier 2017 à la clinique Saint-Vincent et la polyclinique de Franche-Comté
01:12à Besançon.
01:13Ce médecin anesthésiste réanimateur sans antécédent se servait-il des patients de
01:17ses confrères pour régler des comptes ? Il est en tout cas renvoyé devant la cour d'assises
01:21du Doubs, je vous le disais.
01:22Le procès est annoncé pour 2025 sans que nous ne connaissions encore la date exacte,
01:27mais si vous le voulez bien, commençons par rappeler les faits.
01:30Nous sommes le 11 janvier 2017 à Besançon, à la clinique Saint-Vincent, une clinique
01:39imposante de plusieurs étages qui a ouvert ses portes en 1992, et jouit d'une bonne
01:45réputation.
01:46C'est pour cette raison que Sandra Simard, une jeune femme de 36 ans, en pleine santé
01:50et ne présentant aucun facteur de commodité, a décidé de s'y faire opérer de douleurs
01:56dans le dos.
01:57Elle va être opérée du rachis lombaire exactement, c'est le docteur Grégory Godefrein
02:01qui doit procéder à cette opération somme toute banale.
02:04Sandra Simard ne présente aucun risque particulier pour l'anesthésie, et pourtant ce jour-là,
02:10Sandra Simard ne se réveille pas normalement.
02:12Sur la table d'opération, elle fait un arrêt cardiaque qui nécessite un transfert
02:16d'urgence au CHU et une réanimation prolongée.
02:20Que s'est-il passé exactement ? Le médecin anesthésiste réanimateur responsable, le
02:26docteur Anne-Sophie Ballondolle, a-t-elle fauté ? Peu probable, c'est une professionnelle
02:31au parcours sans équivoque.
02:33A l'intérieur de la clinique Saint-Vincent de Besançon, c'est la stupéfaction.
02:37Car ce n'est pas la première fois qu'un événement de cette nature intervient.
02:40Dans le jargon hospitalier, on appelle ce type d'accident un EIG, comprenez, un événement
02:47indésirable grave.
02:49Le chef de service de réanimation, le docteur Pili Flory, interloqué, décide de ne pas
02:54en rester là.
02:55Il demande au médecin anesthésiste de récupérer tout ce qui a pu être administré à la patiente
03:00et d'envoyer tout cela pour des examens en laboratoire.
03:03Il cherche à comprendre, c'est l'événement indésirable de trop.
03:07Il y a déjà eu quatre autres patients ayant présenté des EIG à la clinique Saint-Vincent,
03:12quatre événements anormaux.
03:14Il faut savoir que dans les hôpitaux de France ou les cliniques, les événements de cette
03:17gravité sont tout à fait exceptionnels.
03:20Avant d'être endormi, un patient fait toujours l'objet d'un questionnement approfondi.
03:25Et Sandra Simard ne présentait aucun symptôme de cardiopathie sous-jacente.
03:29Il n'existe aucune pathologie de nature à engendrer un tel arrêt cardiaque.
03:34C'est donc un élément extérieur qui explique que le cœur se soit arrêté.
03:38Alors que Sandra Simard est toujours dans un état préoccupant, c'est le branle-bas
03:43de combat à la clinique Saint-Vincent.
03:45Les poches de soluté qui ont été utilisées en perfusion à la patiente sont réunies
03:50et envoyées au labo.
03:51Les déchets de la salle de surveillance sont également prélevés.
03:55Tout est envoyé au laboratoire CBM de la rue des Terres Rouges, un laboratoire moderne
03:59performant à la périphérie de la ville.
04:01Le 16 janvier, le laboratoire transmet les résultats.
04:04C'est une douche froide.
04:05Dans les poches de soluté, il existe une concentration anormale de chlorure de potassium,
04:11environ 100 fois supérieure à la concentration attendue.
04:15En apprenant les résultats, la directrice de la clinique Saint-Vincent décide de transmettre
04:20les informations à la justice.
04:22Le 19 janvier 2017, le procureur de la République est informé.
04:25Sans attente, le directeur de l'inspection des contrôles et d'audit de l'Agence Régionale
04:30de Santé de Bourgogne, Franche-Comté, signale par mail au procureur de la République des
04:35éléments complémentaires.
04:36La concentration correspond à l'ajout probable de 6 ampoules de 10 ml de chlorure de potassium,
04:43concentrées à 20%.
04:44Dans ce mail, il est clairement indiqué qu'à ce stade de l'évaluation, il est improbable
04:48qu'une erreur soit la cause de l'accident.
04:50En conséquence, il ne peut être exclu qu'il s'agisse d'une tentative d'assassinat.
04:55Dès le lendemain, les enquêteurs de police judiciaire sont envoyés pour saisir les poches
05:00de perfusion qui ont servi à l'opération.
05:02Sur place, l'affaire tourne au tragique.
05:04À peine arrivés, les enquêteurs sont témoins d'une scène surréaliste.
05:07La directrice de la clinique est appelée en urgence par une infirmière, chef de bloc,
05:12car le docteur Frédéric Péchier, un autre médecin anesthésiste réanimateur de sa
05:16spécialité lui aussi, a trouvé des poches de paracétamol percées dans sa table d'anesthésie.
05:21Il pense être victime lui aussi de l'empoisonneur.
05:24Ces poches sont découvertes alors que dans la salle d'à côté, un patient du nom de
05:28Jean-Claude Gandon est opéré par le docteur Bailly.
05:31Il est donc sous anesthésie générale.
05:34Le patient est alors sur la table d'opération et présente bientôt un trouble cardiaque.
05:38Les enquêteurs placent immédiatement sous scellé l'ensemble des dispositifs médicaux
05:42ainsi que les poches trouvées au sein du bloc opératoire.
05:46Contrairement à ses collègues, c'est la première fois que le docteur Péchier se
05:50dit victime d'un acte de malveillance.
05:52Et cela intervient le jour de l'intervention de la police, ce 20 janvier 2017.
05:57Une curieuse coïncidence néanmoins.
05:59La police judiciaire prend cette affaire très au sérieux.
06:03Elle leur demande l'ensemble des accidents cardiaques et des EIG survenus dans les hôpitaux
06:07et cliniques de Besançon et alentours sont remontés.
06:10Les recoupements finiront par parler.
06:12Le 23 janvier, les policiers apprennent qu'il y a déjà eu un précédent, une enquête
06:17déjà diligentée au sein de la polyclinique de Franche-Comté.
06:19C'était en 2009.
06:21Les 7, 27 avril, puis le 22 juin 2009, ce sont trois accidents cardiaques qui sont survenus
06:27sur les tables d'opération à la suite d'anesthésie.
06:29Les enquêtes n'avaient pas permis d'élucider le mystère de ces accidents cardiaques, mais
06:34une analyse des poches solutées faite à cette occasion avait également montré une
06:38concentration de potassium anormale.
06:40Cette affaire non élucidée avait pourtant permis à l'époque aussi de faire un rapprochement
06:45avec une autre information judiciaire en cours pour homicide involontaire sur la personne
06:49d'un homme décédé d'un arrêt cardiaque, lui aussi inexpliqué, le 10 octobre 2008,
06:53à la clinique Saint-Vincent aussi.
06:56Les prélèvements post-mortem réalisés lors de l'autopsie avaient alors mis en évidence
07:00un surdosage en lidocaine, un puissant anesthésique local.
07:03La dose mesurée correspondait à dix fois la valeur supérieure à la dose attendue.
07:08Ce décès qui remonte à 2008 et qui est demeuré inexpliqué, tout comme les trois
07:13EIG au sein de la polyclinique de Franche-Comté, a en permis à l'époque tout de même de
07:18noter qu'un seul nom apparaissait.
07:20Comme étant présent le 10 octobre 2008 ainsi que le 7 avril 2009, il s'agit du docteur
07:27Frédéric Péchier.
07:28Comme le docteur anesthésiste n'était pas présent les 27 avril et 22 juin, la curiosité
07:35des enquêteurs en était restée là.
07:36Et puis le docteur Péchier avait montré le 7 avril un comportement exemplaire alors
07:41que la patiente, âgée de 41, qui subissait une colioscopie, manifestait un dysfonctionnement
07:47cardiaque qui allait la conduire au CHU, il était intervenu et avait pratiqué des
07:51soins et lui avait administré le bon antidote.
07:54A l'époque, l'enquête n'avait pu conclure qu'à des incidents inexpliqués.
07:59En l'absence d'explication, une des mesures prises avait consisté à retirer toutes les
08:04ampoules de chlorure de potassium et on en était resté là.
08:07Et puis à la polyclinique de Franche-Comté, depuis les choses étaient rentrées dans l'ordre
08:11et aucun autre fait grave ne s'était produit.
08:14En 2017, les enquêteurs n'ont pas l'intention, eux, de baisser les bras aussi facilement.
08:20Ils remarquent que la situation est redevenue normale quand le docteur Péchier a quitté
08:24la polyclinique justement.
08:26Tiens.
08:27Et par ailleurs, une personne est systématiquement présente à l'entour lors des IEG, des EIG
08:33à la Clinique Saint-Vincent, il s'agit du docteur Frédéric Péchier.
08:37C'est donc l'homme, le seul, qui est présent à la fois à la Clinique Saint-Vincent quand
08:41les accidents cardiaques se multiplient et également à la polyclinique de Franche-Comté
08:45quand les mêmes accidents se produisent.
08:47Et c'est le seul praticien qui a navigué entre les deux établissements.
08:51Qui est ce docteur anesthésiste ? Frédéric Péchier est né le 22 janvier 1972 à Angoulême.
08:58Il est l'aîné d'une fratrie de quatre enfants.
09:00Il est issu d'une lignée de médecins, un élève moyen mais qui s'est investi réellement
09:05dans les études à la faculté de médecine de Poitiers, après l'obtention de son diplôme
09:09de docteur en médecine en octobre 2000.
09:11Il se spécialise en tant qu'anesthésiste réanimateur.
09:14Depuis, il a exercé une première fois à la Clinique Saint-Vincent, puis en est parti
09:19pour la polyclinique de Franche-Comté avant de revenir à la Clinique Saint-Vincent.
09:24Côté vie privée, pas grand chose d'original.
09:27Il a connu sa femme pendant l'internat, son épouse est médecin, cardiologue et ils ont
09:32eu ensemble trois enfants.
09:33Dans le milieu médical assez secret par nature, une audition va éclairer d'un jour particulier
09:39les enquêteurs.
09:40Appelons-la le « docteur N ». Le 16 février 2017, elle relate que lors d'une anesthésie
09:46générale où le patient réagissait mal, elle avait remarqué la présence du docteur
09:50Péchier à la porte du bloc opératoire.
09:52Elle raconte encore que le docteur Péchier se serait vanté de lui avoir prêté secours
09:56alors qu'elle ne lui demandait rien.
09:58Et puis elle explique que le docteur Péchier l'horripile quelque peu car il se prend pour
10:02Zorro et qu'il considère comme étant bien meilleur que les autres.
10:07Le 14 février 2017, la direction de la Clinique Saint-Vincent transmet un listing aux enquêteurs
10:12qui concerne les EIG survenus, cette fois entre 2008 et 2017.
10:16Le fichier fait apparaître alors des chiffres incroyablement élevés.
10:2042 problèmes cardiaques, 20 décès.
10:22A la Clinique Saint-Vincent, une moyenne de 7,6 EIG par an alors que la moyenne nationale
10:28est de 3,3.
10:29L'analyse approfondie des listings du personnel et de la polyclinique de Franche-Comté et
10:34de la Clinique Saint-Vincent établit que seul le docteur Péchier était présent à
10:38la fois à la Clinique Saint-Vincent, à la polyclinique, aux périodes où les accidents
10:42cardiaques ont lieu.
10:43C'est la seule personne sur un total de 1514 personnes.
10:47Voilà qui finit par convaincre les enquêteurs de la PJ de Besançon.
10:50Ils tiennent un suspect.
10:52Le docteur Péchier est placé en garde à vue.
10:55Les policiers ont bien l'intention de l'interroger sur ces drôles de pratiques qu'ils ont pu
10:59noter.
11:00Avant chaque anesthésie de patient, pour lequel le docteur Péchier n'est pas nécessairement
11:04en charge, ils ont remarqué par exemple que celui-ci se prépare.
11:07Il a souvent un coup d'avance, dans sa trousse de secours, du matériel, des produits qui
11:10se révèlent parfois le bon antidote au bon moment.
11:13Et le docteur Péchier ne se démonte pas.
11:16Il explique que ça fait partie de ses habitudes qu'il a toujours fait ainsi et que sans doute
11:20beaucoup de ses confrères faisaient comme ça avant, du temps où il y avait de bons
11:23médecins.
11:24Et sur la présence de nombreux produits comme la lidocaine dans sa trousse de secours, il
11:28explique que cela fait également partie de ses habitudes lorsqu'il voyage.
11:31Il a réponse à tout.
11:33Les enquêteurs remarquent au fil des semaines et des interrogatoires que le docteur Péchier
11:37a régulièrement des conflits avec ses collègues, qu'il aime bien s'en ouvrir avec la direction,
11:42souvent par mail, et qu'il fuit en revanche les discussions d'homme à homme avec ses
11:45collègues.
11:46Il fait souvent des mails pour se plaindre du planning ou suggérer ceci ou cela.
11:50Bref, il adore se faire mousser et se donner de l'importance.
11:53Il y a quelque chose d'autre que les policiers remarquent.
11:56Les enquêteurs trouvent une vraie contradiction à l'envie du docteur Péchier de se dégager
12:00du temps libre pour passer plus de temps au sein de son couple avec sa très grande disponibilité
12:05pour l'hôpital.
12:06Pour la clinique, il confirme être toujours le premier arrivé le matin au sein du bloc
12:10opératoire.
12:11Toujours le premier arrivé, toujours le dernier parti.
12:14Comme si la clinique avait besoin de lui en permanence, ou plus exactement comme s'il
12:19se sentait indispensable à la vie de la clinique.
12:22À ce stade de l'enquête, les policiers se penchent désormais sur des éléments
12:25de présomption d'empoisonnement dans 17 accidents survenus à la clinique Saint-Vincent
12:30ou la polyclinique de Franche-Comté.
12:32À la décharge du docteur Péchier, les écoutes téléphoniques auxquelles la justice a donné
12:37son feu vert démontrent que les collègues du docteur Péchier ne l'accablent jamais.
12:41En vérité, aucun d'entre eux ne soupçonne à ce stade le bon docteur Péchier de s'être
12:45livré à des empoisonnements.
12:47Pour se faire une opinion plus claire, les enquêteurs vont décider de reprendre cas par
12:51cas.
12:52Pendant des semaines, l'ensemble des EIJ est survenu pendant près de 10 ans, un travail
12:57de fourmi.
12:58Dans la plupart des cas, expertise toxicologique et médico-légale à l'appui.
13:02Il en ressort avec la conviction que les patients ont subi un empoisonnement avant d'être
13:09endormi.
13:10De son côté, à mesure qu'il est auditionné, le docteur Péchier répond de moins en moins
13:15aux questions des enquêteurs et fait valoir de plus en plus souvent son droit au silence.
13:20Dans leur travail de fourmi, il apparaît également clair pour les enquêteurs que
13:24les EIJ interviennent à chaque fois dans des contextes de relations professionnelles
13:27difficiles où le docteur Péchier rencontre des difficultés de planning ou relationnelles
13:32avec certains de ses confrères.
13:33A la suite d'un interminable travail d'expertise médico-légale, d'examen toxicologique,
13:39d'audition des collègues du docteur Péchier, ce dernier va être mis en examen.
13:45In fine, 30 événements sont retenus par les policiers comme le résultat d'une intoxication
13:50médicamenteuse avec 12 décès de patients qui n'auraient pas dû mourir.
13:55Une perquisition réalisée au domicile sur le lieu de travail du docteur Péchier va
14:01aussi mettre en évidence qu'il possède un nombre très important de produits et
14:06traitements pour lesquels la possession n'apparaît pas très justifiée.
14:10Ainsi, dans son véhicule, le docteur Péchier dispose d'une trousse de secours qui contient
14:14des kits de perfusion.
14:15Curieux.
14:16Interrogé à ce sujet, il expliquera que c'est une dotation normale du véhicule de
14:21Marco Di.
14:22Alors que c'est faux.
14:23Il se contredit.
14:24A la clinique, dans son casier, les enquêteurs retrouvent des ampoules de susfontanil, à
14:29Woodgard, des produits morphiniques également qu'il ne devrait pas posséder, des boîtes
14:33dentalgiques.
14:34A son domicile, les enquêteurs retrouvent des poches de perfusion de paracétamol également.
14:39Il reconnaît en garde à vue détenir des produits anesthésiques et du matériel provenant
14:43de la clinique Saint-Vincent.
14:44Mais évidemment, le docteur Péchier a une explication.
14:46Il évoque les douleurs régulières rencontrées par sa fille aînée et déclare la perfuser
14:51lui-même pour soulager ses douleurs.
14:53Cependant, sa fille Juliette, il ne se souvient pas d'avoir été perfusée par son père.
15:00Les enquêteurs estiment bientôt que les manipulations visant à polluer les poches de perfusion
15:04auraient très bien pu être réalisées à son domicile.
15:08Et puis, l'étude de la vidéosurveillance de la clinique permet d'établir que le docteur
15:13Péchier est toujours arrivé à la clinique vers 6h30, bien avant le début des consultations,
15:18et personne ne sait pourquoi il vient si tôt.
15:20Autre élément troublant, le docteur Péchier, le jour de l'arrivée des enquêteurs à la
15:24clinique Saint-Vincent, n'a cessé de changer sa version des faits.
15:28Certes, il se dit victime lui aussi d'un empoisonnement avec des poches de soluté
15:31qui auraient été gavées de paracétamol, mais il modifie ses déclarations tout au
15:36long des auditions.
15:37Et curieusement, c'est la première fois qu'un EIG a lieu dans une salle où de nombreuses
15:41poches sont ainsi grossièrement polluées, faciles à identifier, comme ayant été souillées.
15:47Tous les autres accidents ont eu lieu avec une minutie et une discrétion qui a rendu
15:51parfaitement indétectables les intoxications.
15:54Évidemment, le docteur Péchier conteste l'ensemble des faits reprochés avec la plus grande fermeté.
16:00Pour lui, sa désignation comme suspect n'est qu'une construction intellectuelle avec de
16:04nombreuses approximations et inexactitudes.
16:07Quand on lui fait remarquer que certaines fois, il a curieusement eu un coup d'avance
16:11et été capable de poser le bon diagnostic, capable d'administrer des thérapies et antidotes
16:16idoines, y compris pour des patients qui n'étaient pas les siens, il dira que ce n'est que dans
16:20un nombre très faible de cas qu'il a eu des intuitions qui reposent essentiellement
16:24sur sa grande expérience de médecin anesthésiste réanimateur.
16:29Des propos qui n'ont pas suffi à convaincre les juges d'instruction et le parquet, qui
16:35a décidé de son renvoi devant la cour d'assises du Doubs et son maintien sous contrôle judiciaire
16:40en attendant le procès qui aura lieu en 2025.
16:44Il devra répondre alors d'avoir attenté à la vie de nombreux patients par l'emploi
16:50ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort.
16:55Dans un instant, nous allons retrouver les deux avocats qui se retrouveront face à face
17:02dans quelques mois en 2025 aux assises du Doubs, Maitre Lee Thakedmit et l'avocat Frédéric
17:11Bénard, avocat des partis civils.
17:14Qui est véritablement le docteur Péchier ? A-t-il empoisonné ses victimes ? Pourquoi
17:20serait-il victime d'une construction intellectuelle des enquêteurs ? Que pourrait révéler le
17:24procès ? C'est tout de suite sur Sud Radio.
17:54Frédéric Bénard est avec nous, Maitre Frédéric Bénard et Maitre Lee Thakedmit,
18:00avocat du docteur Péchier, est avec nous également, bonjour à tous les deux.
18:05Je voudrais vous demander, Maitre Frédéric Bénard, vous représentez les partis civils
18:10et évidemment le docteur Péchier est encore présumé innocent, mais de votre côté,
18:15tout porte à croire, vous estimez que tout porte à croire qu'il est sérieusement impliqué
18:18dans ces empoisonnements ?
18:20Oui, très clairement.
18:23D'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est que je suis le tout premier intervenant, en
18:29tant qu'avocat, dans cette affaire pour Mme Simard, dont vous avez cité le nom, et je
18:34me rappellerai toujours la première audience où il était question de la mise en détention
18:39du docteur Péchier.
18:40Ma cliente me dit, je ne veux pas qu'il aille en détention parce qu'à ce stade, je n'ai
18:46pas la certitude que ce soit lui qui m'ait empoisonné et il a une famille, des enfants
18:51et je ne veux pas que ça arrive.
18:52Je me rappellerai toujours.
18:53Et donc moi, à la première audience, j'avais plaidé que je pensais qu'un contrôle judiciaire
18:59nous permettant d'avoir les garanties de la manifestation de la vérité était suffisant.
19:05Et cette enquête, qui a été, j'allais dire, amplement critiquée par la Défense,
19:12alors pour moi, à tort, mais en tout cas, la Défense fait son travail, elle a largement
19:18démontré, et votre rapport à l'instant me paraît assez intéressant sur ce point,
19:26l'enquête qui a été longue, minutieuse et compliquée, a largement démontré que
19:31le docteur Péchier était manifestement l'auteur de ses empoisonnements.
19:35Et pour l'ensemble des clients que je représente aujourd'hui, nous n'avons pas de doute
19:40et pas de scrupules à dire, voilà, nous avons la certitude aujourd'hui que le docteur Péchier
19:48est un empoisonneur et c'est lui qui nous a empoisonnés.
19:51Alors, Maître Litac-Metbit, vous êtes avocat de Frédéric Péchier justement,
19:55vous êtes avocat de la Défense, vous récusez totalement son implication dans ses empoisonnements.
20:00Je vous écoute.
20:03Et le docteur Péchier a été aussi clair qu'on peut l'être dans la situation dans laquelle
20:08il s'est retrouvé, c'est-à-dire accusé d'une manière tellement forte avec une telle acuité
20:19et une telle répétition dans les actes d'accusation qui sont tombés contre lui.
20:26Et pourtant, depuis le départ, il est très clair sur le fait qu'il n'a rien à se reprocher.
20:30Moi aussi, j'ai trouvé assez intéressant la manière dont vous avez pu évoquer cette histoire
20:36parce qu'il est vrai que la construction intellectuelle que nous on reproche finalement à l'accusation
20:42finit comme une sorte de scénario, comme une histoire.
20:46Et ce qui est intéressant, c'est de comprendre que dès le départ, puisque vous évoquiez le cas Simard
20:51et mon gros frère en parlait il y a un instant,
20:53dès le départ, il est indiqué qu'il est rigoureusement inimaginable
20:59que la concentration qui est retrouvée dans les poches de soluté incriminée
21:06puisse être d'une origine accidentelle.
21:09Et c'est ça finalement qui va sceller le sort du docteur Péchier,
21:12c'est que dès le départ, on ne se pose pas réellement la question de savoir
21:16si le cas Simard peut être un accident ou pas un accident.
21:19Et puis, ça va engendrer dans le cadre de cette procédure et de cette instruction
21:26une espèce de manière de fonctionner qui, systématiquement, va faire en sorte que
21:32dès qu'il y a la moindre possibilité d'imaginer que quelque chose peut être reproché au docteur Péchier,
21:37il est condamné par avance.
21:39Mais si ce n'est, alors pardonnez-moi, mais s'il doit être mis hors de cause,
21:42est-ce que ça veut dire que l'enquête est totalement à côté de la plaque
21:45et qui pourrait avoir été à l'origine de tel sabotage ?
21:49Alors, c'est bien la difficulté, puisqu'on est maintenant des années après le début de l'enquête,
21:55vous avez rappelé que tout cela démarre en 2017,
21:57donc ça fait 7 années que la justice est chargée de ces questions.
22:01Et certains faits remontent à 2008.
22:03Par ailleurs, mais l'enquête elle-même dure depuis maintenant 7 années,
22:087 années pendant lesquelles, comme je le disais à l'instant,
22:12les enquêteurs, le procureur de la République, le ou les juges d'instruction,
22:16n'ont eu de cesse que de construire une accusation contre le docteur Péchier,
22:23enquête à charge.
22:25Elle est non seulement à charge, mais en plus, même si c'est des choses
22:29qu'on retrouve assez fréquemment dans un certain nombre de dossiers,
22:32elle prend le problème à l'envers, c'est-à-dire que,
22:34plutôt que d'essayer de réunir tous les éléments qui pourraient
22:37permettre de répondre à la question très intéressante que vous venez de poser,
22:40c'est-à-dire qui peut être à l'origine des quelques cas
22:43dont il n'est pas réellement discuté, qu'ils sont malveillants.
22:47Je vous propose qu'on y revienne...
22:50D'accord, je vous propose qu'on y revienne dans un instant,
22:52on demandera à Frédéric Bernard son avis.
22:54Nous allons revenir aussi sur la personnalité du docteur Frédéric Péchier.
22:58Qui est-il vraiment ? Est-ce qu'il y a ses troubles dépressifs ?
23:02Pourrait-il avoir altéré sa lucidité ?
23:04L'Affaire dans l'Affaire revient tout de suite sur Sud Radio.
23:12Retour dans l'Affaire dans l'Affaire, une émission en partenariat
23:14avec la revue Affaire Criminel.
23:17Aujourd'hui, nous parlons de l'affaire du docteur Péchier.
23:20Mise en examen, soupçonnée de 30 empoisonnements avec préméditation,
23:24dont 12 mortels pour des faits commis entre avril 2009 et janvier 2017
23:29à la clinique Saint-Vincent, à la polyclinique de Franche-Comté,
23:32toutes les deux de Besançon.
23:34Maître Frédéric Bernard, avocat des Partis Civils, est avec nous,
23:38ainsi que Maître Lee Taquet-Demit, avocat de Frédéric Péchier,
23:41et merci à tous les deux d'être avec nous.
23:44Alors, je voulais vous demander, Maître Frédéric Bernard,
23:47est-ce que comme votre confrère, j'imagine que vous n'êtes pas du tout d'accord,
23:50l'enquête pourrait être passée complètement à côté
23:54et être une enquête simplement à charge ?
23:57Est-ce que c'est bien raisonnable comme théorie ?
24:03Écoutez, la problématique, c'est que la position du docteur Péchier,
24:08c'est un peu toujours la tarte à la crème des dossiers criminels,
24:11c'est-à-dire que c'est toujours une enquête à charge,
24:14la justice a décidé de…
24:17J'avoue que je n'ai toujours pas compris
24:19quel serait l'intérêt de la justice d'accabler le docteur Péchier.
24:25Vraiment, je n'ai pas compris.
24:27Je ne vois pas en quoi le docteur Péchier, particulièrement,
24:31ce n'est pas un homme politique en vue, ce n'est pas un notable,
24:34ce n'est pas quelqu'un qui présentait un danger quelconque.
24:38C'est-à-dire que la théorie du complot, si vous voulez, c'est intéressant,
24:42mais c'est un peu la tarte à la crème permanente
24:45quand on clame son innocence contre un dossier qui, quand même, était taillé.
24:48Alors, je ne vais pas vous dire que c'est un dossier facile
24:53dans la mesure où on n'a pas trouvé quelqu'un,
24:57encore qu'il y a des éléments, mais avec la main dans un pot de confiture,
25:01parce que c'est beaucoup plus complexe que ça et tout le monde l'a compris,
25:04sinon on ne parlerait pas de ce dossier.
25:06Et puis le docteur Péchier est quelqu'un d'extrêmement intelligent
25:08qui a passé des années à maîtriser sa science
25:12et à faire ses empoisonnements de façon extrêmement complexe.
25:18Néanmoins, ce qui est avéré, c'est qu'il y a un empoisonneur.
25:24Ce qui est avéré par l'enquête, c'est que cet empoisonneur
25:27est forcément un professionnel médical, notamment de l'anesthésie.
25:31Et ce qui est avéré, c'est qu'il n'y a qu'un seul dénominateur commun
25:36à tous ces empoisonnements, c'est le docteur Péchier.
25:39Alors, encore une fois, on peut tout envisager.
25:43Et puis je vais vous dire, moi je vais respecter en tant qu'avocat
25:46la présomption d'innocence du docteur Péchier,
25:48même si je l'ai affirmé, avocat des parties civiles,
25:52en tant que client, nous sommes convaincus de sa culpabilité.
25:55Néanmoins, il est officiellement présumé innocent.
25:57La cour d'assises va statuer.
25:59Et j'ai peine à croire qu'on arrivera à tenir 4 mois
26:04à nous démontrer qu'une enquête aussi fouillée est totalement vide
26:07et que ce dossier est vide, voire achat.
26:10Ça me paraît invraisemblable.
26:11Question pour vous, maître Bernat.
26:13Vous avez dit qu'au tout début, votre cliente avait un doute
26:16sur la responsabilité du docteur Péchier.
26:18Est-ce qu'elle a toujours ce doute aujourd'hui ou pas ?
26:21Plus du tout. C'est ce que je vous expliquais tout à l'heure.
26:25Écoutez-moi, vous avez quelqu'un, je parle de Mme Simard,
26:30qui est exemplaire dans sa dignité d'ailleurs.
26:32Mme Simard...
26:33Comment va-t-elle d'ailleurs, Mme Simard ?
26:35Comment va-t-elle aujourd'hui ?
26:38Elle ne va pas bien.
26:40Elle a des troubles neurologiques permanents
26:43qui sont la résultante de la longue période de coma
26:47qu'elle a eu à subir.
26:48Et puis, ça fait sept ans d'information judiciaire
26:54où elle essaye de comprendre.
26:56C'est quelqu'un d'absolument honnête,
26:58c'est ce que je vous disais tout à l'heure.
27:00Et pour en revenir et pour faire le lien
27:02avec la question que vous m'avez posée,
27:04Mme Simard, au départ, elle dit
27:06« Moi, je ne veux pas qu'un père de famille
27:08qui serait innocent et qui serait accusé à tort
27:11puisse voir sa vie gâchée. »
27:13Et puis, elle a laissé la justice faire son travail.
27:17Et si au départ, et je vous l'ai dit,
27:19au départ, Sandra Simard me dit
27:21« Moi, je ne suis pas sûre que c'est lui. »
27:23Parce qu'il faut bien comprendre,
27:25cette femme, elle vit avec l'idée
27:27qu'elle a été victime d'un accident médical.
27:29Ça dure quelques années.
27:31Et puis, du jour au lendemain,
27:33on l'appelle, on lui dit
27:34« Madame, vous avez été empoisonnée
27:36par un membre du personnel médical. »
27:38Mais c'est une abîme pour ces gens-là.
27:40Et pour tous ceux qui ont été appelés,
27:42ça a été un truc complètement hallucinant.
27:44Et aujourd'hui, elle a pris le temps
27:46et Dieu sait qu'elle l'a eu
27:48de suivre cette enquête judiciaire.
27:50Elle a lu, avec moi,
27:52l'ensemble des éléments techniques,
27:54scientifiques, des éléments d'enquête
27:56qui ont été recoupés.
27:57Et aujourd'hui, elle n'a plus de doute.
27:59Et elle, elle dit
28:00« Moi, je sais que j'ai été empoisonnée
28:02par Frédéric Péchy. »
28:03Entendu. Alors, on va entendre
28:05Maître Lys Tachmédite.
28:07On va lui demander s'il pense
28:09que le docteur Péchy est fait un coupable parfait.
28:11Mais je voudrais que Victor Lefebvre
28:13nous donne quelques éléments
28:15qui permettent de comprendre
28:17la personnalité du docteur Péchy.
28:19Est-ce que vous pouvez nous faire
28:21un portrait rapide
28:23de l'homme et du docteur ?
28:25Oui, en quelques mots, Frédéric Péchy
28:27était issu d'une lignée de médecins.
28:29Son père était anesthésiste au CHU de Poitiers.
28:31Son grand-père était médecin généraliste.
28:33Sa mère était cadre infirmier.
28:35Il grandit dans un milieu familial
28:37tout assez classique, assez aisé,
28:39avec une mère présente, affectueuse.
28:41Son père, en revanche, est très occupé
28:43dans la vie de famille.
28:45Les relations père-fils sont assez compliquées.
28:47Dans l'enquête de personnalité
28:49qui est donnée par les proches
28:51de Frédéric Péchy, il y a une face
28:53plutôt lumineuse et une face sombre.
28:55La face lumineuse est donnée par ses proches.
28:57Il est question d'un homme doux,
28:59attentionné, bienveillant, affectueux
29:01avec sa famille, passionné par son métier.
29:03Une face plus sombre
29:05est peut-être donnée par les proches
29:07du second cercle, les amis de la famille,
29:09les collègues, qui décrivent eux
29:11un homme plutôt replié
29:13sur son cocon familial,
29:15parfois même condescendant, prétentieux
29:17selon certains collègues.
29:19C'est un détail qui ne préjuge en rien
29:21sur une culpabilité
29:23ou une innocence. Il était aussi
29:25réputé très mauvais joueur au golf
29:27jusqu'à être tricheur.
29:29Il obtient son diplôme
29:31de docteur en médecine spécialisé
29:33d'anesthésiologie et de réanimation chirurgicale
29:35en 2000. Il passe la majeure partie
29:37de sa carrière professionnelle, vous l'avez dit,
29:39à Saint-Vincent-de-Besançon, avec un passage de quelques mois
29:41en 2009 à la polyclinique
29:43de Franche-Comté. Voilà un peu pour quelques éléments
29:45de contexte biographique sur Frédéric Péchier.
29:47Alors, maître-lit, taquet de mythe,
29:49est-ce que vous pensez
29:51que le docteur Péchier fait un coupable parfait ?
29:53Écoutez, je ne sais pas
29:55s'il y a un coupable
29:57parfait, si ça existe,
29:59mais moi je trouve que lui fait plutôt
30:01un excellent innocent, en réalité.
30:03C'est-à-dire que, voilà,
30:05un homme, somme toute parfaitement
30:07extraordinaire. Écoutez avec attention
30:09ce qu'a évoqué votre collègue
30:11comme portrait
30:13chinois très rapide.
30:15Oui, c'est vrai que ce n'est pas accablant.
30:17Ce n'est pas du tout accablant.
30:19Je veux dire, c'est vraiment
30:21la chronique d'une vie ordinaire.
30:23Voilà cet homme qui fait des études très longues
30:25pour devenir médecin, qui réussit plutôt pas mal
30:27dans sa branche, et puis qui,
30:29par ailleurs, comme souvent,
30:31lorsqu'on est médecin,
30:33pour ce que j'en connais, se met à pratiquer
30:35au golf,
30:37et puis soudain, on fait de lui un coupable
30:39dans une affaire criminelle d'envergure,
30:41et on vient nous expliquer que les traits de personnalité
30:43qui le caractériseraient comme criminel
30:45seraient sa propension à tricher au golf.
30:47Moi je trouve que cette histoire
30:49est parfaitement symptomatique
30:51de la manière dont on a traité cet homme
30:53depuis le départ, c'est-à-dire qu'on n'a pas
30:55grand-chose à lui reprocher
30:57de sérieux,
30:59mais pour autant, on fait vote tout droit.
31:01Cette histoire de golf est ridicule
31:03dans une dimension
31:05qui me dépasse depuis le départ.
31:07Je ne suis pas tout à fait étonné de vous entendre la reprendre
31:09parce que ça traîne, ça sourde un peu dans le dossier,
31:11mais c'est extraordinaire.
31:13Moi je fais ça...
31:15Nous on n'invente rien, on répète.
31:17Ce que vous dites est absolument conforme
31:19à ce qu'il y a dans le dossier.
31:21Depuis 20 ans et quelques dizaines d'affaires criminelles,
31:23je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi
31:25anecdotique repris
31:27pour essayer de caractériser une personnalité problématique.
31:29Moins anecdotique,
31:31je voudrais vous demander, vous qui l'avez approché,
31:33évidemment,
31:35est-ce qu'il a de l'empathie
31:37pour ses patients,
31:39ou est-ce que je me trompe si je dis
31:41quand même qu'il a une espèce de
31:43regard assez lointain,
31:45assez désincarné de ses patients ?
31:47Alors, il a un regard de médecin,
31:49comme je vous l'ai dit tout à l'heure,
31:51c'est un médecin qui a été formé
31:53pour effectuer un métier qui est difficile.
31:55Celui d'anesthésiste réanimateur
31:57l'est particulièrement.
31:59Il faut garder la tête froide,
32:01il faut avoir une certaine capacité de distanciation,
32:03et ce qui paraît être une qualité
32:05chez un médecin
32:07devient tout de suite chez un suspect,
32:09puisque c'est de la casquette
32:11numéro 1 à la casquette numéro 2
32:13qu'est passée le docteur Péchier,
32:15devient effectivement problématique
32:17parce qu'il serait froid et distant.
32:19Il n'est pas froid et distant,
32:21c'est quelqu'un qui est formé pour
32:23prendre ses distances avec un certain nombre
32:25de choses qui nous sont parfois difficiles à gérer,
32:27que ce soit la mort
32:29ou
32:31des situations d'urgence
32:33à traiter
32:35avec professionnalisme. C'est tout.
32:37Pour le reste, très honnêtement,
32:39évidemment que comme médecin, il se soucie de ce qui peut arriver
32:41à ses patients. On est dans un dossier
32:43dans lequel, de mon point de vue, il y a énormément,
32:45une immense majorité d'accidents médicaux
32:47et chaque médecin
32:49que j'ai rencontré
32:51dans ma vie professionnelle et personnelle
32:53en réalité est évidemment
32:55sensible
32:57à ce que deviennent ses patients.
32:59Mais il se doit de garder la tête droite.
33:01On va vous retrouver dans un instant
33:03et Victor Lefebvre également.
33:05On va parler des problèmes de santé
33:07qui auraient pu affecter
33:09le docteur Péchier.
33:11On parlera aussi peut-être
33:13de ses tristesses personnelles.
33:15Dans un instant,
33:17on revient avec nos invités.
33:19On continue à évoquer
33:21l'affaire Péchier tout de suite sur Sud Radio.
33:25L'affaire dans l'affaire,
33:27Stéphane Simon.
33:29Retour dans votre rendez-vous
33:31de la mi-journée ce samedi
33:33avec la revue
33:35Affaires criminelles. Nous parlons
33:37aujourd'hui de l'affaire Péchier.
33:39L'affaire Péchier du nom de ce docteur
33:41médecin anesthésiste réanimateur
33:43mis en examen soupçonné de 30
33:45empoisonnements avec préméditation
33:47dont 12 mortels. Nous sommes avec
33:49les deux avocats essentiels
33:51dans ce dossier, l'avocat des parties civiles,
33:53M. Frédéric Bernat, et l'avocat
33:55de Frédéric Péchier, M. Lee Takedmit.
33:57Merci à tous les deux d'être là.
33:59Nous étions en train de brosser
34:01le portrait aussi exhaustivement que possible
34:03de l'homme mais aussi du médecin.
34:05Victor Lefebvre, je voudrais que
34:07vous nous parliez.
34:09On dit que le docteur Péchier a eu
34:11des problèmes de santé, ou plus exactement
34:13peut-être de déprime. Qu'en est-il ?
34:15En 2014, bien avant sa mise en cause
34:17qui intervient en 2017, il réalise
34:19une première tentative de suicide par médicament
34:21possiblement en raison d'un surmenage
34:23professionnel. Frédéric Péchier a été suivi
34:25par un psychologue pour des troubles dépressifs
34:27sévères. Je précise que
34:29les experts psychiatriques qui l'examinent
34:31dans le cadre de l'information judiciaire
34:33ne lui diagnostiquent toutefois aucune
34:35pathologie mentale. Il précise même
34:37je cite là encore
34:39qu'il ne voit dans la personnalité du docteur Péchier
34:41de caractère narcissique, de recherche
34:43de gloire ou de grandiosité.
34:45Et le 30 septembre 2021, en détresse
34:47psychologique et fortement alcoolisée,
34:49Frédéric Péchier tente de mettre
34:51fin à ses jours une nouvelle fois en se défenestrant
34:53du premier étage de la maison de ses parents
34:55près de Poitiers où il réside depuis son contrôle
34:57judiciaire qui lui interdit de paraître dans le doux.
34:59Son pronostic vital a été
35:01un temps engagé et il l'avait
35:03écrit quelques jours plus tôt à sa mère dans une lettre
35:05« Je veux que cette vie s'arrête, je veux mourir
35:07innocent ». Alors Frédéric
35:09Bernard et Maître Littac admettent
35:11je voudrais vous demander
35:13à l'un puis à l'autre, peut-être
35:15commençons par Maître Bernard
35:17si ses problèmes de santé
35:19peuvent avoir altéré
35:21son empathie, avoir
35:23je dirais eu
35:25un impact fort sur sa
35:27vie professionnelle.
35:29Maître Bernard.
35:31Moi je vais vous livrer un sentiment
35:33qui vaut ce qui vaut.
35:35J'ai été amené à croiser
35:37le docteur Péchier au détour d'un certain nombre
35:39d'audiences dans lesquelles nous avons
35:41plaidé, où il était présent.
35:43Et très clairement, et il faut le dire,
35:45son empathie
35:47pour les victimes potentielles
35:49est inexistante. Néanmoins,
35:51c'est quelqu'un qui clame son innocence.
35:53Donc j'ai beaucoup de mal
35:55à reprocher à quelqu'un
35:57qui clame son innocence de ne pas dire
35:59j'ai de l'empathie pour les victimes. Pour autant,
36:01j'entendais tout à l'heure
36:03sur sa personnalité,
36:05notamment mon confrère qui
36:07glosait, et il a raison, c'est une bonne guerre
36:09sur l'histoire du Golfe.
36:11En fait, il est beaucoup plus
36:13au fait du dossier que ça.
36:15Il sait très bien que tout cela s'inscrit
36:17dans une logique
36:19de personnalité qui est
36:21extrêmement intéressante
36:23parce qu'effectivement,
36:25l'enquête a été
36:27assez approfondie, et on
36:29voit bien que nous avons là
36:31une personnalité complexe, et surtout
36:33ce qui est très important
36:35dans ce dossier, et ce qui est
36:37vertigineux,
36:39c'est que les victimes
36:41directes
36:43des empoisonnements
36:45ne sont pas les personnes
36:47qui sont visées en réalité,
36:49elles sont paradoxalement
36:51des dommages collatéraux, parce qu'en réalité
36:53ce que le dossier démontre
36:55aujourd'hui, c'est que
36:57le docteur Péchier utilisait
36:59les patients
37:01de ses confrères
37:03pour régler des comptes.
37:05Il créait des empoisonnements pour créer
37:07des situations qui non seulement
37:09mettaient en difficulté des collègues,
37:11mais qui lui permettaient à lui, derrière,
37:13d'arriver en étant le sauveur.
37:15J'ai le souvenir quand même d'un de mes
37:17clients qui est
37:19fort, un de mes clients qui dit
37:21« moi je suis en salle de réveil,
37:23je ne sais pas ce qui m'arrive,
37:25je sors d'anesthésie,
37:27d'un coma, etc.
37:29et la seule chose qui arrive, c'est que j'ai un médecin
37:31que je ne connais pas, puisqu'il n'est pas mon médecin,
37:33qui est le docteur Péchier, qui me dit « ah bonjour monsieur,
37:35c'est moi qui vous ai sauvé la vie. »
37:37Voilà, c'est très paradoxal.
37:39Maintenant c'est quelqu'un qui nie les faits.
37:41Donc le docteur Péchier,
37:43tant qu'il niera les faits,
37:45on ne va pas pouvoir lui demander « pourquoi vous l'avez fait ? »
37:47donc on n'aura pas d'explication.
37:49Et c'est une vraie frustration pour les victimes.
37:51Et je pense que
37:53si le docteur Péchier reconnaissait
37:55des faits qui, à mon avis,
37:57aujourd'hui ne sont pas niables,
37:59après il se défend comme il veut,
38:01mais s'il les reconnaissait, là on avancerait
38:03sur quelque chose d'intéressant,
38:05on pourrait travailler sur la personnalité
38:07et la corrélation entre
38:09ce qu'il est et ce pourquoi
38:11il a commis les faits.
38:13Tant qu'il les niera, ce qui est son droit le plus strict,
38:15moi en tant qu'avocat je ne peux pas
38:17lui en reprocher,
38:19nous aurons cette frustration au niveau des victimes,
38:21parce que je pense que nous n'aurons jamais
38:23une vraie explication.
38:25Maintenant quelqu'un qui dit « je veux mourir innocent »
38:27je vais vous en tirer
38:29les arguments que vous voulez, mais ça paraît quand même
38:31assez extraordinaire.
38:33Jacques Admith, je voudrais vous entendre
38:35sur ce que votre confrère
38:37appelait la personnalité complexe
38:39du docteur Péchier.
38:45Ecoutez,
38:47je lui laisse la paternité
38:49de cette analyse.
38:51Moi je le redis une nouvelle fois,
38:53j'ai affaire à un homme rigoureusement
38:55ordinaire.
38:57Oui, mais quand vous entendez, pardon,
38:59quand vous entendez
39:01que certains de ses collègues disent
39:03« il se prend pour Zorro, il a besoin
39:05de briller dans les yeux des uns et des autres »
39:07Eh bien je vous réponds
39:09que cela m'en dit beaucoup plus
39:11sur ses collègues que sur lui-même.
39:13Voyez-vous, dans un collectif
39:15quel qu'il soit,
39:17d'ailleurs nous autres avocats,
39:19dans nos barreaux respectifs, nous ne sommes pas épargnés
39:21par ce type de petite concurrence,
39:23de petite
39:25mesquinerie.
39:27C'est la même chose chez les médecins, c'est-à-dire que
39:29certains sont réputés meilleurs que d'autres,
39:31certains s'imaginent être meilleurs que d'autres,
39:33certains sont plutôt dans un complexe
39:35d'infériorité, et puis ça va les créer
39:37des relations à type d'affinité
39:39ou de non-affinité.
39:41On est là-dedans, c'est pour ça que
39:43je vous parle de ce monsieur,
39:45du docteur Pechet comme quelqu'un de très ordinaire,
39:47mais également des gens qui l'entourent,
39:49et finalement on a fait d'une situation qui est plutôt ordinaire,
39:51c'est-à-dire une situation
39:53où, dans le cadre d'une clinique
39:55ou de deux, il y a
39:57ce qu'on appelle ces événements indésirables
39:59graves, c'est-à-dire des accidents médicaux,
40:01et puis à un moment donné on va
40:03pointer du doigt quelque chose dont
40:05on nous dit que nécessairement ce n'est plus de l'ordre de l'accident,
40:07il va falloir trouver un coupable,
40:09et quand on va recouper,
40:11comme vous l'avez évoqué tout à l'heure, d'une façon purement
40:13artificielle de mon point de vue, un certain nombre
40:15d'informations, on va désigner à la verdict ce
40:17docteur Pechet. Et s'apercevant que le docteur
40:19Pechet n'est ni psychopathe,
40:21ni quoi que ce soit de l'ordre du narcissisme
40:23problématique, on va aller faire
40:25les poubelles. Je suis désolé de le dire comme ça,
40:27mais on ne peut pas le dire autrement, on va aller chercher
40:29un petit épisode dépressif, comme il
40:31semblerait que lui seul en eût connu
40:33en 2014.
40:35Ça prêterait à sourire,
40:37si les institutions ont été posées.
40:39Si on admet votre hypothèse
40:41à savoir que la justice voudrait
40:43trouver un parfait coupable en la
40:45personne du docteur.
40:47Elle l'a fait déjà. Elle l'a déjà connu.
40:49C'est votre hypothèse en tout cas. Comment on peut dans ce cas-là
40:51expliquer autant de coïncidences ?
40:53Très honnêtement,
40:55ce n'est pas en quelques dizaines de minutes
40:57que l'on va régler cette question
40:59qui va, je crois, concerner
41:01pendant près de 3 ou 4 mois la Cour d'Assises du Doubs
41:03l'année prochaine.
41:05Il n'y a pas tant de coïncidences que cela
41:07finalement, et la construction
41:09de cette accusation
41:11est intellectuelle et pas très honnête.
41:13Ça c'est ce que nous nous emplorons à démontrer devant la Cour d'Assises.
41:15Mais,
41:17j'ai envie de vous rétorquer quelque chose qui
41:19est un argument qui peut relever un peu du populisme,
41:21mon confrère Bernard m'excusera
41:23ce coup de pied de l'âne en réponse au sien.
41:25Il a le sourire, je vois,
41:27sur l'écran de contrôle.
41:29Il y a une trentaine de crimes
41:31qui sont reprochés au docteur Péchier.
41:33Il y a deux observations
41:35qu'on peut faire et sur lesquelles on s'entendra tous.
41:37La première,
41:39il n'y a pas le moindre élément de preuve
41:41qu'il ait participé à
41:43un quelconque empoisonnement.
41:45Quand je parle d'éléments de preuve, je parle
41:47d'un témoignage direct ou d'éléments scientifiques.
41:49On est toujours dans cette construction
41:51et dans ces recoupements et dans ces coïncidences, comme vous le disiez.
41:53Ça, c'est la première chose.
41:55Et la deuxième qui découle de la première,
41:57c'est que j'ai pas, moi, pour avoir
41:59mis mes pattes
42:01dans près de 200
42:03affaires criminelles,
42:05souvenir de quelqu'un à qui on reproche
42:0730 crimes et contre lequel on n'a tellement
42:09pas d'éléments qu'à aucun moment
42:11on n'envisage la question
42:13de savoir s'il faudrait l'écarter
42:15de la société compte tenu d'une certaine dangerosité.
42:17Alors, j'ai entendu tout à l'heure, chevaleresque,
42:19mon confrère Bernard nous expliquer qu'au départ,
42:21lui aussi, il doutait. Mais que ce doute
42:23s'est envolé. En réalité, il n'y a pas
42:25que mon confrère Bernard qui doute. Tout le monde doute
42:27dans ce dossier. Tous les magistrats
42:29un peu sérieux, c'est-à-dire notamment ceux qui se sont penchés
42:31sur la question d'une éventuelle privation de liberté
42:33ont plus que douté. Ça n'existe pas.
42:35Ça n'existe pas de telles accusations
42:37sans que l'on prive
42:39celui qui est accusé de liberté
42:41sauf s'il n'y a aucun élément.
42:43Alors, je voudrais, en guise de conclusion
42:45de cette émission, laisser
42:47la parole à Victor Lefebvre
42:49à propos d'une anecdote
42:51qui laissera notre
42:53réflexion en suspens sur
42:55les mobiles qui auraient pu animer le docteur
42:57Péchier. Il y a à chercher
42:59aussi dans son enfance.
43:01Oui, en tout cas, il y a deux motivations qui sont avancées par
43:03les enquêteurs. D'abord, il soupçonne, donc on l'a dit,
43:05le docteur Péchier
43:07d'avoir agi en pompier pyromane,
43:09d'avoir sciemment provoqué des arrêts cardiaques ou des incidents
43:11opératoires pour mieux démontrer par la suite
43:13ses talents de réanimateur. Et puis aussi
43:15les interventions qui auraient permis
43:17de discréditer certains de ses collègues
43:19avec lesquels il était en conflit aigu
43:21selon le procureur de la République.
43:23Frédéric Péchier avait une très bonne réputation en tant que médecin
43:25mais il s'est brouillé avec de nombreux collègues.
43:27L'hypothèse d'une vengeance personnelle
43:29fait donc partie des pistes envisagées
43:31par les enquêteurs dans ce dossier
43:33complexe. Et j'ajoute aussi qu'on a retrouvé une
43:35seringue dans la poubelle du docteur
43:37Péchier qui aurait pu servir potentiellement
43:39à l'empoisonnement d'un patient
43:41qu'il suivait lui-même. Il s'agit
43:43de Jean-Claude Gandon. On a retrouvé
43:45des traces d'une substance
43:47de la mébivacaine,
43:49une molécule identifiée comme responsable
43:51de l'arrêt cardiaque du patient
43:53Jean-Claude Gandon.
43:55Merci à tous les deux
43:57d'avoir été
43:59avec nous. Merci à vous
44:01Victor Lefebvre. On est obligés d'interrompre cette émission
44:03c'est passionnant pourtant. C'est un des grands
44:05procès qui arrivent en 2025. Il faudra le suivre
44:07mais nous sommes obligés de
44:09rendre l'antenne. Vous pouvez retrouver notre émission
44:11sur la chaîne YouTube de Sud Radio.
44:13La semaine prochaine on se retrouve entre 12h et
44:1513h pour une nouvelle affaire dans l'affaire.
44:17Tout de suite c'est Alain Marty qui nous amène sur
44:19les routes des vins de France. Avec le bilan du millésime
44:212024. Et bien à tout de suite
44:23sur Sud Radio.

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