Thierry Breton quitte le Commissariat européen et règle ses comptes avec Ursula Von Der Leyen
Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour.
Retrouvez "Les débats d'Europe 1 Soir" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-actu
Category
🗞
NewsTranscript
00:00Europe 1 Soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:05Mes camarades de la deuxième heure d'Europe 1 Soir, bonsoir Vincent Rouen.
00:08Bonsoir Pierre.
00:09Bonsoir à Gilles Boutin, chef des infos au Figaro.
00:12Et bonsoir au président de la fondation Robert Schumann, Jean-Dominique Giuliani.
00:16Bonsoir.
00:17Merci d'être avec nous. Thierry Breton quitte donc le commissariat européen.
00:21Est-ce qu'on peut dire qu'il règle ses comptes avec Ursula von der Leyen ?
00:24Est-ce que c'est juste une vente d'état personnel ou est-ce que c'est plus compliqué que ça ?
00:28C'est plutôt l'inverse, c'est plutôt elle qui a dit qu'elle ne souhaitait plus travailler avec lui.
00:34Mais qu'est-ce qui se passe ?
00:35Qu'a donc fait Thierry Breton pour qu'on ne travaille plus avec lui ?
00:38Je pense qu'il a son style, sa méthode.
00:42C'est un bulldozer, c'est comme ça qu'on le surnomme à Bruxelles.
00:45Il marche un peu sur les pieds des uns et des autres mais il fait avancer ses dossiers.
00:50On ne peut pas lui reprocher d'avoir été inactif.
00:53C'est quoi le bilan de Breton ?
00:54Le bilan de Breton, c'est toute la législation destinée à mettre un frein à la force et à la puissance des grands groupes numériques.
01:03Regardez, la patronne de Twitter vient de se féliciter de la démigration.
01:08Un grand jour pour la liberté d'expression, dit-elle.
01:10Absolument.
01:11On peut s'interroger.
01:13C'est aussi un agenda de compétitivité et de réindustrialisation mené au pas de charge.
01:19Je crois que c'est à lui qu'on doit les vaccins dont on a pu disposer si rapidement, à personne d'autre au sein de la Commission.
01:27Donc avec ces méthodes parfois controversées et qui tranchent un peu dans le milieu bruxellois,
01:33où on préfère parler un langage doux, soft et feutré,
01:40je crois que l'affaire a un peu, comment dirais-je, il y a eu des frictions entre la présence de la Commission européenne,
01:48qu'on connaît bien aussi, n'est-ce pas ?
01:50Quand elle était en Allemagne, elle avait toujours des problèmes avec ses secrétaires d'Etat, avec son gouvernement, etc.
01:56Et elle a estimé être en position de force pour faire un petit chantage à la France,
02:01comme Emmanuel Macron avait renommé Thierry Breton,
02:05qui allait être vice-président exécutif avec plus de pouvoirs, à peu près le même portefeuille aussi large qui va de la défense à l'industrie.
02:12Elle a dit oui, d'accord, je veux bien, mais donnez-moi un autre nom.
02:16Je crois qu'on a eu tort de céder, parce qu'il aurait suffi de dire non.
02:21Il a fait un bon boulot, on peut peut-être lui reprocher un certain nombre de choses, mais pas les résultats.
02:27Et là le nom de Stéphane Séjourné arrive comme ça ?
02:32Oui, donc je ne suis pas vraiment compétent pour commenter la politique intérieure française.
02:39Il n'a pas été un ministre des Affaires étrangères qui a laissé une trace impérissable.
02:46Vous voulez dire qu'il n'a pas les épaules de Thierry Breton ?
02:49Non, pas le style en tout cas, je ne le mets pas en cause.
02:52Vincent Roy, contenez-vous, on vous a dit que c'était un pafutré en ce qui concerne l'Europe.
02:56Je le regrette, j'ai trouvé que c'était un grand ministre.
03:00Non, un peu sérieusement, je suis content qu'il soit exfiltré.
03:04Ça libère une place, mais c'est quand même un très proche.
03:08Ça libère une place, et puis ça en ouvre une aussi.
03:11Arthur Delaborde disait dans le journal qu'il y avait une possibilité pour que Thierry Breton soit ministre de l'économie.
03:16Jean-Dominique Jougy a dit.
03:18Vous savez, je connais bien Thierry Breton.
03:21Nous avons été dans les mêmes cabinets.
03:23Vous voyez bien que, honteusement, j'en profite quand même de votre présence.
03:27Je ne crois pas qu'il soit candidat.
03:29D'accord.
03:30Mais je n'en sais rien.
03:32En ce qui concerne l'Allemagne, est-ce que ça vous a étonné cette décision de Lafchol de remettre le contrôle aux frontières ?
03:39Oui, ça m'a étonné parce que d'abord c'est une décision prise sous le coup de l'émotion, l'émotion légitime.
03:45Avec l'histoire du Syrien qui avait poignardé des gens.
03:48Deuxièmement, parce que je ne crois pas que ce soit efficace,
03:52on voit déjà aux frontières en Alsace que les contrôles sont extrêmement soft, si je puis dire,
03:59et qu'en réalité on ne veut pas gêner les travailleurs frontaliers qui sont aussi importants en Allemagne qu'en France d'ailleurs.
04:07Mélina Fachin, notre correspondante en Allemagne, a passé la journée sur le pont de l'Europe,
04:11contre Strasbourg et Kell, qui est la première ville allemande,
04:14et elle disait qu'il y avait quand même beaucoup plus de patrouilles, qu'il y avait des chiens aussi,
04:19parfois renifleurs, qu'on ouvrait les coffres, enfin, ça existe.
04:23Vous confirmez ce que je dis, c'est vraiment de la com' et ça participe d'une certaine communication.
04:30J'ai eu l'occasion de le dire sur votre antenne donc je l'assume complètement.
04:33Si un gouvernement vous dit qu'il va régler tout seul les problèmes migratoires
04:38en fermant les frontières, ce qu'il ne peut pas tenir, je crois que c'est un mensonge ou c'est de la démagogie.
04:48En réalité, la solution est dans la coopération entre au moins les voisins.
04:53Je ne dis même pas l'Union Européenne, au moins les voisins, au moins les pays voisins,
04:57au moins les pays membres de l'Union Européenne qui ont les mêmes problèmes.
05:02Vous savez, pour le Covid, Mme Merkel avait fermé la frontière entre la France et l'Allemagne,
05:09elle a été obligée de la rouvrir très vite.
05:11Parce qu'aujourd'hui, on ne peut pas avoir une Europe qui organise la libre circulation des capitaux et des biens,
05:18sauf des personnes. Il y a quelque chose qui ne va pas quelque part.
05:21En tout cas, vous n'avez pas changé de position parce qu'on avait ressorti une archive pour vous du 17 septembre 2023,
05:28dans l'émission que je présentais à l'époque, et vous dites exactement la même chose.
05:33C'est courté, vous auriez pu dire exactement le contraire, mais en l'occurrence, vous êtes fidèle à votre ligne Jean-Dominique Juliani.
05:40Ça vous étonne ?
05:41Ça ne m'étonne pas.
05:43Ceci étant dit, j'entends ce que vous dites, mais ça lance quand même un signal.
05:49C'est-à-dire que ce n'est peut-être pas complètement de la com'.
05:55En tous les cas, il y a un symbole et un signal qui est donné, et c'est peut-être pas mal, ça peut quand même peut-être réduire.
06:03Je ne pense pas que l'effort soit vain.
06:06Merkel a tellement appelé de migrants, un million, de Syriens, il y a un moment, il faut peut-être arrêter l'hémorragie d'une manière ou d'une autre.
06:15Si vous voulez me faire dire que c'est un constat d'échec, je suis d'accord avec vous.
06:19Mais c'est d'abord l'échec des États membres, avant d'être l'échec de l'Europe.
06:23Là, c'est l'échec de Merkel, en l'espèce.
06:24Oui, oui, c'est l'échec, politiquement.
06:27Et quand on dit, je vois, on m'a interrogé ici pour me dire que les Français veulent le retour aux frontières nationales.
06:35Je rappelle qu'elles sont contrôlées aujourd'hui, qu'on a des policiers à menton, que même Emmanuel Macron en a remis dans les Pyrénées, etc.
06:42Donc, le problème c'est qu'au XXIème siècle, on ne peut pas mettre un douanier à chaque frontière.
06:47D'abord, on n'a plus les effectifs, ce qu'il faut c'est trouver une méthode, c'est extrêmement complexe.
06:52Et ça ne peut pas être fait dans l'émotion, et je suis très étonné, mais pas tant que ça finalement,
06:58parce que le gouvernement de Scholz est en difficulté, donc il mange son chapeau.
07:02Surtout pour un social-démocrate allemand.
07:04Oui, c'est ça qui est étonnant.
07:06La coalition n'est d'accord sur rien.
07:07Laure Lavalette, ce matin, disait que finalement, elle était contente qu'on reprenne une idée de Jordan Bardella.
07:13Non, ce n'est pas la même idée, ce n'est pas la même idée, ce n'est pas la double frontière, etc.
07:18C'est, encore une fois...
07:20Alors, la double frontière, pardon aux gens du Rassemblement National, n'a jamais vraiment bien compris de quoi il s'agit.
07:26Oui, moi non plus.
07:27On a eu beau les interroger, à chaque fois il y avait une version différente, donc c'était un peu compliqué.
07:31Donc si vous voulez, c'est une thématique qui pose un problème, un constat vrai, c'est un échec.
07:37La politique migratoire en Europe est un échec.
07:40Mais enfin, on pourrait dire ça aux Etats-Unis aussi, parce que M. Trump n'a pas mieux réussi que M. Biden.
07:45Le constat, le contrat...
07:47300 millions de réfugiés dans le monde, ça ne s'est jamais produit.
07:51D'ailleurs, ils sont essentiellement, on ne le dit pas assez, sud-sud.
07:55Il n'y a que 4% des réfugiés qui viennent en Europe.
07:58C'est trop, on a un problème d'intégration, on a un problème d'autorité aussi,
08:03quand on accepte des gens qui viennent sur notre territoire, pour les contraindre à accepter un certain nombre de choses.
08:09C'est ça qui choque les citoyens.
08:10C'est-à-dire qu'on n'a rien à leur offrir en plus.
08:12Si vous voulez intégrer, si vous voulez assimiler, il faut avoir quelque chose à offrir.
08:16On n'a plus grand-chose à offrir.
08:18On a encore les métiers en tension.
08:20Mais tout cela, il faut que ce soit régulé, ça ne peut pas être fait en l'état.
08:26L'exemple du Brexit, c'est fait sur le retour des frontières.
08:30Et l'immigration illégale a doublé.
08:33Donc si vous voulez, en 2022, elle avait doublé par rapport à la période du Brexit.
08:37Donc ce n'est pas la recette miracle.
08:39On a 320.000 entrées, plus 150.000 clandestins.
08:42Voilà, on est à 500.000.
08:44Vous parlez d'aveu d'échec.
08:48320.000 titres de séjour, 150.000, et 600.000 à 900.000 clandestins.
08:53Je voulais revenir sur la notion d'aveu d'échec.
08:57Est-ce qu'on n'est pas entré dans une nouvelle phase, qui serait constatant l'aveu d'échec,
09:00les États prennent des initiatives personnelles plus ou moins abouties ou pragmatiques,
09:05mais du coup aboutissant à tordre le bras aux institutions européennes pour trouver les solutions ?
09:11Pas besoin de tordre le bras aux institutions européennes, on n'a qu'à prendre des lois.
09:15On en est à la dixième, nous, de la loi sur l'immigration.
09:19Donc on va à Bruxelles, on change, on négocie.
09:22Mais c'est tellement compliqué, et ça se passe dans la durée.
09:25Mais qu'est-ce qu'il y a de compliqué ?
09:27Madame Mélanie fait de gros efforts.
09:29Mais elle a reporté toute l'immigration sur l'Espagne et le Portugal.
09:32Plus 150%, je crois, l'Espagne et le Portugal.
09:35Mais il ne passe pas, il ne passe plus.
09:37Il change de pays.
09:39Donc si vous voulez, tant qu'on n'a pas quelqu'un des responsables politiques qui disent
09:44« Ok, c'est compliqué, on a échoué, on va essayer de faire des choses ensemble.
09:49On n'est pas obligé de le faire avec les institutions européennes,
09:51et on le ferait avec l'Italie, la Grèce et l'Espagne, ce serait déjà bien pour la France.
09:55Et l'Allemagne, ce serait encore mieux.
09:58Mais donc, il faut, à un moment, accepter qu'on ne peut pas faire.
10:02Or, les responsables nationaux disent « Je peux. »
10:05On a quand même le sentiment que c'est quand les Etats se sentent impuissants
10:08et qu'ils sentent que les institutions européennes sont impuissantes
10:11à coordonner, à amener les Etats à se concerter,
10:13que, encore une fois, chacun fait ce qu'il peut.
10:15Et vous parlez de l'Espagne, on attend la réaction de l'Espagne face à la politique italienne
10:19ainsi que la Grèce.
10:20Et tel un bateau qui prend l'eau, est-ce qu'à l'arrivée,
10:23on ne va pas colmater toutes les brèches uniquement par des initiatives individuelles ?
10:26C'est la crédibilité de nos dirigeants.
10:28Nationaux comme européens.
10:30Parce que si vous voulez, aujourd'hui, on dit qu'il faut négocier avec la Libye, le Niger, etc.
10:36Qui paye pour le Niger ?
10:38C'est l'Union Européenne qui paye des camps de réfugiés, etc.
10:41Mais le problème est tellement compliqué.
10:43Quand vous allez dans un petit village du sud de la France,
10:45vous voyez bien que la solidarité des gens,
10:48elle est totale avec un enfant d'immigré, une dame en détresse,
10:52et en même temps, nous, on est dans les studios à Paris,
10:54et on dit que c'est inadmissible, qu'il faut être plus ferme, etc.
10:57C'est très compliqué.
10:58Vous voyez aussi la réalité des chasseurs typiquement qui se font agresser par des immigrants.
11:01Vous voulez dire que le fait de prendre une décision politique est compliqué ?
11:03C'est très compliqué.
11:04Il faut se hisser au-delà du simple intérêt national apparent
11:09pour essayer de trouver une solution durable.
11:12Mais pour rendre l'Europe étanche, j'allais dire, d'une certaine manière ?
11:17Je crois qu'il faut être plus ferme.
11:18Incontestablement, il faut être plus ferme.
11:20Il faut être plus ferme avec les pays de départ, par exemple.
11:22C'est très choqué, moi.
11:24Je navigue un peu, vous le savez, j'étais en Tunisie l'été dernier,
11:27je voyais passer les bateaux, sortir,
11:30et en même temps, on paie la Tunisie pour qu'elle retienne.
11:33Donc, il y a un moment, il ne faudrait plus faire.
11:35Il faudrait les payer.
11:36Mais il y a aussi une chose qui est quand même extraordinaire.
11:38Schengen, vous parliez de Schengen.
11:40Schengen, il y a combien de temps ?
11:44Libre circulation, les biens clairs.
11:461995.
11:47Est-ce que vous ne pensez pas qu'entre 1995 et 2024,
11:50la situation a totalement changé ?
11:53L'immigration débonde.
11:56Beaucoup de choses ont changé.
11:57Est-ce que Schengen est toujours d'actualité ?
11:59C'est ça. Hier, Éric Zemmour, au grand rendez-vous européen,
12:02disait Schengen est mort.
12:03Non, Schengen n'est pas mort.
12:05Parce que, expliquez ça à vos enfants, vos petits-enfants,
12:08qu'il ne faut plus voyager, qu'il ne faut plus prendre le train pour aller...
12:11Il ne s'agit pas de voyager, il s'agit de montrer son passeport.
12:14Voyager, c'était un peu plus compliqué quand même.
12:18Non, je vous assure que j'ai voyagé avant Schengen.
12:21C'est pas vrai que rien n'a été fait.
12:24Je ne dis pas que rien n'a été fait, je dis que ce n'est pas adapté à la situation.
12:27Vous allez aujourd'hui en Grèce, c'est la solidarité européenne
12:30qui paye des camps de réfugiés dignes de ce nom,
12:33qui permet d'enregistrer.
12:34Le problème, c'est que nous-mêmes, nous n'expulsons pas.
12:38Vous savez les fameux OQTF ?
12:40Oui, bien entendu.
12:41Je ne sais pas si c'est la justice ou si c'est le gouvernement,
12:45mais on a quelqu'un qui est condamné, on ne l'expulse pas.
12:48Pour expulser, il faudrait d'abord qu'on obtienne des laissés-passer consulaires.
12:52Vous voyez que c'est compliqué.
12:55Ça veut dire que le futur ministre de l'Intérieur,
12:58le futur ministre de l'Europe et le futur ministre de l'Intérieur
13:02et des affaires étrangères ont beaucoup de pain sur la planche,
13:05en commençant par ceux-là.
13:07Mais on ne commence jamais par cette question-là des OQTF
13:11puisqu'il y a des intérêts économiques derrière,
13:15avec certains pays du Maghreb.
13:17Il y a eu pendant très longtemps la question du gaz avec l'Algérie.
13:21Je ne sais pas si c'est encore sur la table.
13:23Vous voyez, il y a cette volonté politique qui pêche,
13:28qui n'est pas là et ça pose un problème.