Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour.
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00:00Europe un soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:05Et nous voilà de retour sur le plateau d'Europe un soir avec Antonin André, rédacteur en chef adjoint du service politique du JDD,
00:11avec l'ancien juge d'instruction Georges Fenech, auteur de l'Ensauvagement de la France, la responsabilité des juges et des politiques.
00:17Ensauvagement, on peut en parler, quand on écoute le témoignage de Nolwenn qu'on va accueillir.
00:23Bonsoir, merci d'être avec nous cher Nolwenn.
00:26Vous êtes restauratrice de vitraux, c'est bien cela ?
00:30Oui, c'est cela. Oui, bonsoir.
00:32Et vous nous parlez d'un fait terrible, puisque quand on est artisan comme vous, c'est pas toujours facile à la fin du mois.
00:40Et il s'est passé quand même une chose abominable pour vous le 1er mai dernier lors du défilé,
00:46c'est que votre voiture, votre camionnette, celle qui vous sert tous les jours pour votre travail, s'est trouvée au mauvais endroit.
00:54C'est cela, c'est cela, oui. Malheureusement, au mauvais endroit.
00:58Racontez-nous.
01:00Le camion est toujours garé à côté de l'atelier.
01:03Et ce jour-là, j'étais au travail, parce qu'il y a toujours du travail à réaliser.
01:09Et puis là, il y a eu le début de la manifestation qui était au 1er cortège.
01:18Et là, on a vu les déchaufouraisons.
01:21On est dans quel quartier là ?
01:22On est à Paris 12ème, à Ville de Ménil.
01:25Donc ils avaient quitté République et là, ça a commencé assez fortement.
01:30Ils ont réussi à prendre des briques au sol et à en tirer un peu partout.
01:36Et après, ils sont allés dans la rue d'à côté pour vandaliser les vitrines et les voitures.
01:43Et dans la camionnette.
01:45Malheureusement, ils ont cassé les deux vitres et ils ont incendié le camion juste après.
01:52Donc là, vous attendez évidemment l'assurance.
01:55Tout ça, ça prend des semaines et des semaines.
01:57Le temps de faire venir l'expert, etc.
01:59Oui, ça va être un peu galère.
02:01Totalement, franchement, totalement.
02:04Ce qui est délicat, c'est de dire à nos clients qu'il faut un peu décaler les rendez-vous.
02:11C'est un peu gênant. Ce matin, j'ai dû annuler des rendez-vous.
02:13Au-delà des dégâts matériels, qu'est-ce que vous en pensez, vous, Nolwenn, en tant que citoyenne française,
02:20quand vous regardez ces manifestants, cette jeunesse qui passe à l'acte assez vite, avec des couteaux.
02:26On l'a encore vu tout à l'heure dans un lycée de Toulouse.
02:29Là, on incendie votre voiture. Quel est votre sentiment aujourd'hui ?
02:34Je trouve ça triste, en fait. C'est un acte assez facile, triste.
02:41Franchement, on n'a rien demandé.
02:43On est en train de travailler, et tout d'un coup, votre outil de travail disparaît.
02:50Vous êtes plutôt triste ou vous êtes plutôt en colère ?
02:53Je crois que la colère n'est pas encore arrivée.
02:56Mais je pense que ça va venir quand je vais m'apercevoir que ça ne va pas être simple les prochaines semaines.
03:01Ce ne sera pas le même camion.
03:03Mon camion, il est aménagé pour pouvoir transporter des vitraux.
03:07Oui, ça ne va pas être simple, ça, c'est certain.
03:10Après, je pense bien que les assurances vont rassurer.
03:14Quoique, j'ai déjà vécu un incendie. Je vous en prie, merci beaucoup.
03:18C'était vraiment très sympathique d'avoir votre témoignage.
03:21Et Georges Fenech, ça traduit quand même d'une situation intenable en France, ce témoignage.
03:27Ce qui est quand même assez choquant, c'est qu'on a le sentiment de l'impuissance face à ce phénomène qui se répète.
03:38Et là, on le sent dans son témoignage qu'elle est totalement résignée.
03:42On n'est pas capable, effectivement, de protéger efficacement.
03:46Je ne remets pas en cause le travail exceptionnel que font les policiers.
03:51Il y en a 13 qui ont été blessés, il faut le rappeler.
03:53En urgence, ils sont tous transportés à l'hôpital.
03:56Ils ont été hospitalisés. Ce n'est pas ça dont je parle.
03:59Ce que je parle, c'est qu'on n'est pas en capacité de trouver des dispositifs
04:03qui permettent de lutter plus efficacement, non pas contre les syndicalistes,
04:07ce ne sont pas les syndicalistes qui commettent ces dégradations.
04:10Ce sont des ultras qui s'infiltrent, on le sait, dans les précortèges
04:13et qui commettent ces dégradations et ces violences.
04:15Il y avait eu cette tentative, vous vous souvenez, après les émeutes d'un 1er mai,
04:19de légiférer et de prévoir que le préfet pouvait interdire administrativement
04:26des individus déjà repérés, signalés, pour éviter qu'ils soient dans les cortèges.
04:31Ça a été censuré par le Conseil constitutionnel.
04:35Il avait été annoncé qu'une réflexion serait portée pour trouver un texte
04:40qui soit dans les clous. Pour qu'il soit dans les clous, il faut qu'il y ait
04:43l'intervention d'un juge, tout simplement. Mais pourquoi on ne le fait pas ?
04:47Pourquoi on ne rétablit pas ce dispositif qui permettrait d'exfiltrer à l'avance
04:53des gens qui sont connus des services ? Ils sont fichiers S, ils sont connus,
04:57ils sont parfaitement connus. Et puis on pourrait peut-être réfléchir aussi,
05:02à restaurer ce qui a existé du temps de Giscard, c'est-à-dire la loi anti-casseurs.
05:07Quand vous êtes dans un groupement, qu'il y a de la casse, et que vous ne quittez pas
05:11le groupement, c'est que quelque part vous encouragez.
05:13« Quand tu casses, tu répares », a dit le Premier ministre.
05:15Et en attendant, ce n'est pas suivi de fait.
05:17Non, mais il l'a dit pour autre chose.
05:19C'est vrai qu'il l'a dit.
05:20Ça pourrait s'appliquer quand même à ce qu'on a vu hier encore.
05:23Ça pourrait s'appliquer, effectivement.
05:25Antoine André, c'est la fête du 1er mai ou c'est la fête des Black Blocs et des casseurs ?
05:30Alors, d'abord, je trouve que c'est toujours difficile.
05:34Mais pour cette femme, c'est un drame personnel, effectivement,
05:37pour lequel on ne peut avoir que de la compassion.
05:39Ensuite, je trouve que le niveau de violence cette année n'était pas si élevé que ça,
05:43si l'on compare aux années précédentes.
05:45Non, mais il y a toujours pire.
05:47Rappelez-vous de 2018, les 200 Black Blocs sur le pont d'Austerlitz qui ont saccagé le McDonald's.
05:52Je me rappelle d'une année aussi où Martinez...
05:55Vous mettez les Black Blocs dans les gilets jaunes ?
05:58Non, pas du tout.
05:59Mais il se trouve que cette année-là, la colère était telle
06:02qu'ils avaient surfé sur un mouvement de colère sociétale qui était tellement puissant
06:06que ça avait probablement décuplé leur mobilisation.
06:09Je me rappelle aussi d'une année qui m'avait frappé.
06:11C'est en 2019, quand Philippe Martinez avait dû être exfiltré du cortège
06:17parce qu'il y avait des violences contre lui.
06:19Donc, je ne peux pas dire que cette année ait été un cru.
06:22Je vais tirer une conclusion qui ne va pas être très optimiste.
06:26Je pense qu'il y a une part de résignation très forte chez les Français.
06:29Une part d'abattement terrible.
06:31Je ne dis pas ça.
06:33Mais si vous voulez, on a le sentiment que...
06:36Je crois qu'il y a une part de colère surtout, plus que de résignation.
06:39Et ce que dit Georges Fenech, c'est une loi anti-casseurs.
06:41Pourquoi pas ?
06:42Mais qui sont les auteurs de cet acte de journalisme ?
06:45On ne sait pas.
06:46On les connaît, ils sont 2000 à peu près en France.
06:48Là, en l'occurrence, sur cet événement précis.
06:49C'est pour ça qu'il faut aussi se méfier des amalgames et de la désignation de coupabilial.
06:55Pour le reste, moi je suis tout à fait favorable, comme vous le dites,
06:57à avoir des dispositifs qui permettent à des individus qui ont été absolument identifiés
07:01comme étant des vandales, des casseurs,
07:03qu'ils soient maintenus administrativement chez eux les jours de manifestation.
07:07On attend aussi que la justice soit extrêmement ferme pour les 45 individus
07:12qui ont été interpellés.
07:13On verra qui sera...
07:14Elle l'est généralement.
07:15On l'a vu au moment des émeutes.
07:16L'été dernier, les peines étaient quand même assez sévères.
07:19Et c'est tant mieux, parce que la justice est là pour effectivement montrer aux citoyens
07:23que l'impunité n'existe pas.
07:24Mais bon, nonobstant, le drame de cette femme,
07:28moi j'étais presque soulagé à la fin de la journée de me dire,
07:31bon, on n'y a pas eu...
07:33Vous n'êtes quand même pas habitué à la violence.
07:36Si vous voulez, il y a d'autres années, on a eu 100, 200 policiers blessés.
07:40J'aimerais bien qu'on s'habitue pas à cette violence.
07:51Qu'on soit d'accord tous les trois à se dire,
07:53moi je suis habitué, même si c'est moins tendu que les autres années.