Jean-Claude Jitrois : "Depuis des siècles, tout le monde a dragué dans le jardin des Tuileries"

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Le créateur de mode et designer Jean-Claude Jitrois est au micro de Léa Salamé ce matin, alors qu'il publie son autobiographie "Ma peau se souvient" (éditions Pauvert) Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-jeudi-12-septembre-2024-9986758

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00:00Ce matin, vous recevez un designer et créateur de mode.
00:03Et bonjour Jean-Claude Gix, bonjour Jean-Claude Gix, bonjour Jean-Claude Gix J3, je vais y arriver, merci d'être avec nous ce matin.
00:10Léa, je suis ravi d'être avec vous ce matin.
00:12Et bien moi aussi, je suis ravie.
00:13Si vous étiez un livre, un chanteur, un paysage et une décennie, vous seriez qui ? Vous seriez quoi ?
00:20Alors un livre d'abord.
00:21Un livre, c'est celui de Marguerite Oursena, qui parle des mémoires d'Adrien.
00:25Ça a été mon livre de cheveux et ça l'est encore.
00:28Vous dites, ce livre me hante.
00:30Et bien exactement, puisqu'il me hante parce que c'est une vie fracassée, une vie d'amour.
00:39Et l'amour, c'est ce qui a le droit le plus important dans notre vie.
00:42Et justement, l'empereur est amoureux d'un jeune garçon et ce jeune garçon va se suicider.
00:49Et ça, c'est terrible.
00:51Et voilà pourquoi ce livre me hante, me hante parce que c'est un problème sur la mort et sur l'amour.
00:58On va en parler.
00:59Si vous étiez un chanteur ?
01:01C'est Johnny Hallyday, bien sûr.
01:02Là, je me suis beaucoup amusé avec lui.
01:04Vous savez que je l'ai rencontré quand j'avais 19 ans.
01:07Et on me dit un jour, tiens, il y a un jeune là, à côté, qui est en train de faire une...
01:14Au Golfe Drouot, vous ne connaissez pas parce que vous êtes beaucoup trop jeune et d'été au Golfe Drouot.
01:18On me dit vas-y, alors je vais au Golfe Drouot et je vois ce mec qui commençait à bouger et beaucoup les jambes, etc.
01:25Et puis bon, le truc se termine, j'applaudis.
01:27Et puis, comme par hasard, j'étais habillé comme lui.
01:30Il avait un petit costume gris, un pantalon gris, une petite cravate fine comme on portait dans ces années-là.
01:35Parce que je parle de là, il y a 50 ans presque.
01:38Oui, c'est les années 60.
01:39C'était amusant parce qu'à ce moment-là, il y a un gros monsieur qui vient à côté de moi et qui me dit comment vous l'avez trouvé ?
01:46Alors, je lui dis que c'était très intéressant.
01:49Et en fait, c'était Pierre Desgros de 5 colonnes à la une.
01:53Donc, ça a été ma première rencontre avec Johnny Hallyday et la télévision et la radio.
01:57Johnny, on va y revenir puisque vous l'avez habillé.
02:00Après, je ne l'ai pas revu pendant plus de 40 ans.
02:03Jusqu'à ce qu'il vous rappelle.
02:04Mais là, vous déflorez vos mémoires.
02:07Si vous étiez un paysage.
02:09Oh, c'est la Provence.
02:11La Provence.
02:12Ma grand-mère en Provence, Alex en Provence.
02:15Et une décennie.
02:17Les années 80.
02:18Les années 80, ça a été des années folles où les gens se sont éclatés, où l'amour était là, où il y avait aussi la tendresse et où il y avait la création.
02:29Il y avait la création et il y avait aussi les années Sida, les années 80.
02:32Vous y revenez aussi dans votre livre.
02:34Il faut toujours un coup de folie pour bâtir un destin, disait Marguerite Yoursenaert.
02:39Quel a été le vôtre de coup de folie ?
02:41Je crois que le coup de folie, c'est d'abord d'avoir fait 140 heures d'analyse avec un psychanalyste.
02:48Ça a été un petit coup de folie pour mieux me connaître.
02:51Et puis ensuite, j'ai rencontré les gens et ça m'a permis d'avoir le contact avec les gens.
02:57Parce que ce travail que j'avais fait en profondeur sur moi, j'ai pu le faire sur les autres.
03:02Vous avez fait une psychanalyse à la fois jungienne et lacanienne, c'est ça ?
03:05Oui, plutôt jungienne.
03:07À l'Institut Carl Gustav Jung de Zurich.
03:10Quelle vie quand même ! Quelle vie que la vôtre, Jean-Claude Gigue III, qu'on découvre dans cette autobiographie sans filtre
03:17que vous publiez aujourd'hui à 80 ans passés.
03:20« Ma peau se souvient » chez Peau Vert.
03:22Une vie trépidante, enfiévrée, libérée des conventions.
03:26On connaissait le couturier du cuir qui a habillé Johnny, on le disait, Dalida, Elton John, Lady Gaga, Céline Dion.
03:31Vous avez habillé tout le monde, vous avez glamorisé, vous avez popularisé le cuir.
03:36Tout le monde l'a porté, c'est votre signature le cuir.
03:38Mais on découvre en vous lisant, et c'est assez surprenant, que vous avez eu une première vie très éloignée du milieu de la mode
03:43puisque vous étiez psychomotricien réputé.
03:46Vous avez été formé à la Psychomotricité Enfantile à la Pitié-Salle-Pétrière sous la tutelle de Françoise Dolto.
03:54Vous avez été nommé dans les années 70 par Simone Veil, à l'époque ministre de la Santé et directeur de l'Institut de Psychomotricité de Nice.
04:01Vous avez eu de nombreuses publications universitaires.
04:03Et trois promotions !
04:05Oui, et le « Que sais-je » publié en années 70 sur la psychomotricité, c'est vous qui l'avez écrit.
04:12Absolument !
04:12J'ai été stupéfaite en fait.
04:14Mais j'en ai fait deux, parce que je l'ai réédité plusieurs fois.
04:17J'espère que ce livre sera vendu peut-être dix fois moins que le « Que sais-je ».
04:23Mais il a été énormément vendu.
04:24Mais qu'est-ce qui vous a attiré dans la psychomotricité ?
04:29C'est le jeu de rôle qui m'a attiré.
04:31C'est comment on soigne les esprits, la pensée, la tête, grâce au corps.
04:36En fait, là encore, il y a le corps et les jeux de rôle.
04:39Très vite, vous comprenez qu'un vêtement, ce n'est pas seulement cosmétique et futile.
04:43Et vous utilisez, quand vous soignez les enfants, vous avez beaucoup soigné les enfants.
04:46Par exemple, vous les habillez en gendarme, vous dites, pour qu'ils retrouvent leur moi, pour que ce soit plus facile.
04:52Oui, mais je pars sur une jeune femme, par exemple, qui acceptait mal sa féminité.
05:00Je lui dis, aujourd'hui, je vais te faire une nouvelle robe, une robe en papier crépant,
05:04parce qu'à cette époque-là, on n'avait pas ce qu'il fallait.
05:08Et puis, tu vas être la maîtresse de maison.
05:11Tu enfiles la robe noire que je suis en train de te faire, et tu vas diriger les enfants.
05:18Tu vas parler avec les enfants, tu vas jouer avec les enfants, et c'est toi qui deviens la maîtresse de maison.
05:23Ça renforce son moi, et c'est ça qui est important.
05:27Et ce qui a été important, et là on va tout à fait dans la question que vous posez, pourquoi le déclic ?
05:34Alors le déclic, c'est qu'elle laisse la robe en papier crépant, une robe noire,
05:38et mon assistante me dit, dites-moi, est-ce que je ne pourrais pas la prendre ce soir parce que j'ai une soirée ?
05:44Je lui dis, ben oui, prenez-la, amusez-vous.
05:47Et le lundi matin, elle revient, je lui dis, alors comment c'était ?
05:50Elle me dit, c'était pas mal, mais j'ai plus la robe.
05:53Ils m'ont tous déchiré la robe, ils se sont tous approprié ce symbolique.
06:00Mais ce déclic-là, qui fait qu'effectivement, vous passez de psychomotricien,
06:05où vous travaillez avec les enfants, où vous apprenez à renforcer le moi,
06:11grâce au corps et grâce aux vêtements, à un moment, vers 30 ans, 33 ans précisément,
06:18vous assumez que vous voulez changer de vie et vous ouvrez une première boutique à Nice.
06:26Mais il faut être audacieux, il faut être courageux, il faut être téméraire, presque, pour se dire…
06:30Audacieux, téméraire, c'est un des mots, mais surtout, il faut être épaulé.
06:34Et ma femme est orthophoniste.
06:36Ma femme est orthophoniste, elle vient d'accoucher d'un enfant qui s'appelle Jérôme,
06:41qui aujourd'hui est déjà père de deux enfants aussi.
06:44Et donc, un de ces enfants s'appellera Adrien, évidemment, et ça, ça me fait très plaisir.
06:50Et donc, ma femme, qui a accouché, s'occupe de l'enfant.
06:54Moi, je fais trois promotions, je rencontre déjà beaucoup de gens dans le monde,
07:02c'est-à-dire je rencontre César, je rencontre Ben, je rencontre tous ces gens-là.
07:08Et je me suis dit, je vais arrêter un peu, parce qu'elle, elle voulait arrêter.
07:13On me dit, on va faire un peu, peut-être, quelque chose de différent.
07:17On va tenter.
07:18On va se lancer dans la mode.
07:19Et c'est ce que vous avez fait.
07:21Le cuir, qui est votre signature, alors je précise que vous êtes né à Oran en 1944.
07:26Non, non, ma chère, erreur sur la personne.
07:28Je ne suis pas né à Oran, je suis né à…
07:35Je ne sais plus où je suis né, avez-vous ?
07:36Mais vous êtes né où ?
07:40Vous ne savez plus où vous êtes né ?
07:42À Narbonne.
07:43Ah, vous êtes né à Narbonne ?
07:44À Narbonne.
07:45Et alors pourquoi il y a Oran ?
07:46Je n'en sais rien, je suis né à Narbonne.
07:48Mais vous avez bien un père pilote dans l'armée de l'air.
07:51Ah oui, bien sûr.
07:52Et c'est lui, ce père, qui portait ses vestes cuir d'aviateur.
07:56Absolument.
07:57Où, dès l'enfance, vous vous dites, le cuir, il y a quelque chose, ça rend fort, ça rend puissant.
08:01Dans l'enfance, j'essayais de m'amuser avec le blouson de cuir.
08:04Il ne veut pas.
08:04Il ne veut pas, c'est interdit.
08:05Voilà, c'est interdit.
08:06Mais déjà, ça vous attire.
08:07C'est l'interdit que je cherche.
08:09Et toute ma vie, je vais essayer de trouver, de canaliser cet interdit en quelque chose de permis.
08:16Rentrer l'interdit dans la permission.
08:20Le cuir, ça transforme une silhouette.
08:23Le cuir, ça donne de l'assurance, ça donne du charisme.
08:26Comment vous comprenez que le cuir, puisque c'est vraiment votre signature...
08:31C'est simple.
08:32Le cuir, c'est un miroir.
08:34Vous voyez, ce matin, je me porte...
08:36Vous êtes en cuir.
08:36Un petit blouson de cuir noir.
08:39Et c'est déjà du miroir.
08:40Ça reflète l'atmosphère.
08:43Ça reflète ce que vous avez à l'intérieur également.
08:46On va le retrouver partout, le cuir.
08:48On va le retrouver dans la rue.
08:50On va le retrouver dans les concerts avec les stars.
08:52On va le retrouver au cinéma, dans Grease notamment, où Olivia Newton-John danse devant John Travolta
08:57avec un legging en cuir qui rend fou toute une génération.
09:06Alors, vous rencontrez le créateur de mode Hadzaro, vous montez à Paris, vous ouvrez
09:21une boutique rue du Faubourg Saint-Honoré, vos clients s'arrachent vos pièces de cuir,
09:25des stars s'arrêtent dans votre boutique, Liz Taylor, Elton John.
09:29Ça explose dans les années 80, c'est plus compliqué dans les années 90 et ça reprend
09:34dans les années 2000 où vous avez une deuxième vie.
09:36À aucun moment, vous avez songé à abandonner ?
09:39Non, même pas aujourd'hui, même quand ça n'allait pas.
09:42Même quand c'était difficile parce qu'il y a eu le sida et là, ça a été quand même difficile.
09:47Mais je suis parti aux Etats-Unis, je suis parti en Chine, je suis parti voir un peu les différents pays.
09:57Et donc là, je voyais qu'il y avait quand même des prémices que ça allait reprendre.
10:04Et ça a repris.
10:05Et ça a repris.
10:06À l'heure où le véganisme et la mode éco-responsable gagnent du terrain, comment vous imaginez
10:11l'avenir du cuir ? Est-ce que vous ne craignez pas parfois que le cuir devienne la fourrure
10:15au fond et que ce soit interdit ?
10:16Non, je ne pense pas parce qu'on est en train de chercher des techniciens avec les
10:22cellules souches pour faire du cuir.
10:25Alors, on peut le faire sur des petites quantités pour l'instant, mais pour des robes ou pour
10:30des blousons, c'est difficile.
10:31Peut-être pour des sacs, des choses beaucoup plus menus.
10:35Jean-Claude Gitroy, votre grande rencontre, vous en avez parlé, c'est lui.
10:39Que je t'aime, que je t'aime, que je t'aime, que je t'aime, que je t'aime, que je t'aime.
10:51Johnny, vous devenez son ami, son confident, à tel point qu'il vous demande, vous, d'aller
10:58voir Laetitia pour la demander en mariage.
11:00Et pourquoi il n'a pas fait lui-même ?
11:01Parce qu'il avait honte.
11:02Il était très timide, vous savez, et j'étais à la Lorada, et il me dit, écoute, tu peux
11:13aller voir Laetitia et tu lui demandes la main pour moi, que je veux l'épouser.
11:19Donc, Laetitia me voit arriver, à peu près compris, mais sans trop.
11:24Et puis, je lui dis, tu sais, Johnny veut t'épouser.
11:27Alors, on tombe l'un dans l'autre en pleurant, et puis on se retourne, et on voit tous ceux
11:34qui étaient dans la cuisine, à travers les vitres, ils rigolent, ils rigolent tous et
11:39tout.
11:40Et ensuite, qu'est-ce qui s'est passé ? C'est que c'est Nicolas Sarkozy qui les a mariés,
11:44et c'était moi qui étais le témoin du mariage.
11:46Et voilà, et vous racontez ça.
11:47Quel homme était-il ? Vous dites, on allait manger une soupe dans un petit restaurant
11:51du 16e arrondissement, lui et moi.
11:53Oui, ou même chez lui, tout simplement.
11:56Il était beaucoup plus calme qu'on croit.
11:59C'était quelqu'un d'affectif, d'affectueux, de fragile, de très fragile.
12:06Et quand vous entendez, là, dans toutes les cérémonies des Jeux Olympiques, reprendre
12:10tout le public qui reprend du Johnny, ça vous fait plaisir, ça vous touche ?
12:13Bien sûr, bien sûr, j'ai la larme à l'œil, bien sûr.
12:16Il est parti trop tôt, parce que nous avons le même âge, à quatre jours près.
12:19Il y a Johnny, et puis il y a elle, qui était une de vos très grandes amies.
12:26J'ai souvent l'impression que la France, depuis le Moyen-Âge, en fait…
12:30Alors ça, c'est Marguerite Hurson-Armé.
12:32Elle aime des filles, elle envoie des garçons, épouser des garçons, pour ne pas vivre seul.
12:44Dalida.
12:45J'en pleurerais presque, parce que j'avais un rendez-vous avec elle le samedi.
12:50Tous les samedis, elle venait me voir.
12:52Et à chaque fois, on essayait des vêtements, elle était heureuse.
12:57Et ce samedi-là, elle n'est pas arrivée.
13:00J'ai dit, ce n'est pas possible qu'elle n'arrive pas.
13:02Et en fait, c'était là, la catastrophe.
13:04C'était la catastrophe.
13:06En fait, elle s'était suicidée la veille de venir vous voir.
13:08Oui, exactement.
13:09Elle était très seule, vous dites.
13:10Très seule.
13:11Vous écrivez.
13:12Et puis, il y a votre vie privée, Jean-Claude Gittroy, que vous racontez dans ce livre.
13:16Alors, complètement sans filtre, on va le dire, votre vie sexuelle.
13:20Bon, là, à cette heure-ci, à 9h37, je crois que les enfants sont à l'école.
13:23Mais s'ils ne le sont pas à l'école, planquez-les.
13:25Non, pas tant pis, planquez-les.
13:27Parce que quand vous parlez de sexe dans ce livre, on va dire que c'est très créatif.
13:31Alors, asseyez-vous bien derrière le poste de radio.
13:35Vous vous êtes marié deux fois, avec deux femmes.
13:37Vous avez eu un enfant avec chacune de ces femmes.
13:39Vers 22-23 ans...
13:40Une fille et un garçon, de chaque côté.
13:42Vers 22-23 ans, vous vous rendez compte que vous êtes aussi attiré par les garçons.
13:46Oui.
13:47Vous vivrez en troupes.
13:49Et puis, je ne sais pas si le mot existe, en couples.
13:52Puisque vous étiez à quatre.
13:54Comment vous vous qualifiez ?
13:56Bisexuel ? Homosexuel ? Libertin ? Libre, tout simplement ?
14:01Libre. Libre, c'est beau.
14:03Libre, c'est beau.
14:04Et c'est jamais tout le monde en même temps, quand même.
14:07Enfin, vous nous racontez.
14:09Vous ne cachez rien.
14:10Vous racontez comment vous draguiez les garçons au jardin des Tuileries.
14:14Ah oui, bien sûr.
14:15Parce que j'habite sur rue Drivoli.
14:17Alors, à rue Drivoli, je suis avec mes amis aussi.
14:23Et puis, j'ai une jumelle.
14:25Et je regarde à la jumelle ce qui se passe dans la rue de Drivoli et dans le jardin.
14:31Ça a toujours été ça, depuis des siècles.
14:33Vous ne savez pas, mais c'est des siècles et des siècles.
14:35Tout le monde a dragué dans ce jardin-là.
14:37Et là, quand je vois quelque chose qui bouge un peu, je vais voir.
14:41Et puis, j'enfile un jean un peu moulant.
14:43Parce qu'il fallait se montrer habillé, mais presque nu.
14:47Et un t-shirt tout simple.
14:49Vous voyez, Nicolas Demorand est mort de rire.
14:52Et voilà.
14:53Mais seulement, je drague d'une certaine façon.
14:56C'est-à-dire que je ne parle pas.
14:58Je ne parle pas.
15:00Je regarde.
15:01Je ne touche pas.
15:02Et puis, je dis, j'habite là.
15:05Voilà, c'est comme ça que vous...
15:06Je marche.
15:07Si on me suit, c'est bien.
15:09Si on ne me suit pas, tant pis.
15:11C'est le consentement.
15:12C'est vrai qu'il y a certaines pages où on pense à Guillaume Dustan, à Cyril Collard.
15:16On se dit, c'était vraiment les nuits fauves.
15:18Et je me dis, est-ce que vous aimez l'époque aujourd'hui, les années 2020,
15:23où vous les trouvez trop prudes, trop moralistes ?
15:26C'est quand même une autre époque que vous décrivez.
15:29Aujourd'hui, j'ai 80 ans.
15:30Oui, d'accord, mais...
15:32Ça ne peut plus être pareil.
15:34Oui, ça j'entends bien.
15:36Mais vous nous trouvez, la nouvelle génération, plus prudes ?
15:43Peut-être un peu plus attentives à ce qu'elles font.
15:47Il faut parfois se laisser aller.
15:50Parfois se projeter avec l'autre.
15:56Et là, il n'y a pas beaucoup de protection.
15:58De projection, plutôt.
16:00Mais quand vous viviez avec votre femme, vos deux compagnons, il n'y avait pas de jalousie entre eux ?
16:05Jamais.
16:06Mais comment vous expliquez ça ?
16:07Parce que c'était le jeu de rôle.
16:10C'est-à-dire que c'était un consentement accepté par tous ?
16:12Oui.
16:13Vraiment, il n'y a pas eu de crise ou de jalousie ?
16:15Non, pas du tout.
16:16C'est ça que je me suis demandé en lisant votre livre.
16:19On va terminer par les impromptus.
16:21Vous répondez rapidement, sans trop réfléchir.
16:23Oui.
16:24Autant en emporte le vent ou portier de nuit ?
16:26Portier de nuit.
16:28Vous avez vu « Le Comte de Montecristo » avec Pierre Ninet ?
16:30Oui, bien sûr, je l'ai vu.
16:31Et vous avez aimé ?
16:32Pas trop.
16:34C'est vrai que vous avez un siège attitré à l'Opéra, au rang 15.
16:37Oui, c'est vrai.
16:38Le rang des politiques.
16:39Oui.
16:40Vous voyez pourquoi ?
16:41Ah oui, vous avez la Légion d'honneur.
16:43C'est l'officier de la Légion d'honneur.
16:46L'argent fait-il le bonheur, Jean-Claude Jitrois ?
16:49Non, pas pour moi.
16:50Je compte pas.
16:51Saint-Laurent ou la Garfeld ?
16:52Les deux.
16:53Mais la Garfeld a fait des photos pour moi qui sont extraordinaires.
16:56Jacquemus ou Balmain ?
16:58Balmain.
16:59Basquiat ou Varol ?
17:01Andy Varol que j'ai rencontré, bien sûr, à New York et qui voulait faire pour moi
17:06un portrait et me vendre un… comment ça s'appelle ?
17:14Un ?
17:16Un cendrier ?
17:17Non, c'est pas un cendrier.
17:18Vous savez, on tirait pour faire des photos.
17:20Un polaroïd ?
17:21Un polaroïd !
17:23Il voulait me vendre le polaroïd et on était ensemble avec mon ami, etc.
17:29Et Andy Varol était un peu entreprenant.
17:33Et donc mon ami, là justement, était un peu jaloux.
17:36Il est parti.
17:37Et je suis pas resté avec Andy Varol et j'ai pas eu le polaroïd.
17:41Ah ben d'accord.
17:42Le meilleur président de la Ve République à vos yeux ?
17:44Ah, c'est Mitterrand.
17:48La dernière fois que vous avez…
17:49Il a dépenalisé l'homosexualité.
17:52La dernière fois que vous avez pleuré ?
17:54Oh, je pleure beaucoup.
17:57Qui pour vous incarner dans une série sur votre vie ?
18:00Jude Law.
18:01Jude Law, toute simplicité.
18:03La succession, vous y pensez ?
18:06Elle arrive.
18:07J'ai dix petits-enfants et voilà.
18:10Donc il y en a un, à mon avis, qui est très calé parce qu'il fait de la peinture.
18:15Vous misez sur lui ?
18:16Je me mise sur lui.
18:17Il s'appelle ?
18:18Il s'appelle Adrien.
18:19Il s'appelle Adrien, évidemment.
18:20Le livre, vous ne leur avez pas offert, les petits-enfants ?
18:22Ah non.
18:23Non, quand même pas.
18:24Et Dieu dans tout ça ?
18:25Pour finir, la question Jacques Chancel.
18:27Il est là.
18:29Jean-Claude Jitrois.
18:30Ma peau se souvient.
18:32Chez Peau Vert.
18:33Eh bien moi, j'ai pris un grand plaisir sur votre liberté au fond et vos mille vies
18:40que vous racontez dans ce livre-là.
18:41Et une époque aussi.
18:42Merci d'avoir été avec nous.
18:43Merci infiniment.

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