Quentin Durward - 1971 - Episode 03

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DB - 29-08-2024
Transcript
00:00Si de tels actes ont été commis, c'est contre notre volonté et contre nos ordres.
00:09Nous ordonnerons une enquête, nous punirons les coupables et réparerons s'il se doit.
00:17Cette réponse est dilatoire, Sire, et je ne pense pas qu'elle suffise à rétablir
00:22l'amitié entre la France et la Bourgogne.
00:26Il en sera ce qu'il plaira à Dieu, ne préjugeons pas de ses décisions, M. l'Ambassadeur.
00:36Cette fois, on ne se bat plus.
00:38Morbleux, je vous parie que si.
00:40Deux aigus, Capitaine.
00:41Bouh ! Tenu.
00:43Chut !
00:44La seconde demande, Sire, c'est que Votre Majesté cesse d'entretenir des intelligences clandestines
00:49avec les villes de Gant, de Liège et de Malines.
00:53Si des troubles éclataient dans ces villes, Sire, ils seraient imputables à Votre Majesté.
00:57Je n'entretiens aucune espèce d'agent secret, ni en Flandre, ni ailleurs.
01:02Vous savez, M. l'Ambassadeur, que ces gens-là coûtent fort cher et que je suis très économe
01:07des deniers de l'État.
01:09Nous avons pourtant pris plusieurs espions.
01:12Sous la question, ils ont avoué vous servir.
01:15Mon cousin devrait se méfier des aveux faits sous la question.
01:19Pour en finir, le supplicier dit n'importe quoi.
01:23Mais continuez, M. l'Ambassadeur.
01:25Le Duc de Bourgogne requiert du Roi de France
01:28de renvoyer sans délai dans ses domaines
01:31les personnes d'Isabelle de Croix et sa parente tutrice, la Comtesse Ameline,
01:36toutes deux en état de rébellion contre leur suzerain, le Duc de Bourgogne.
01:42Mais, Sire, vous avez bien fait de commencer Votre Ambassade de si bon matin.
01:47Si votre dessein est de me demander compte de chaque vassal de votre maître,
01:50le soleil se couchera avant que la liste en soit épuisée.
01:55Mon Ambassade se contentera du retour immédiat des fugitives.
01:59Car dans toute cette affaire, nous ne doutons pas que Votre Majesté ait été abusée.
02:03Avec les femmes, tout est possible, M. l'Ambassadeur.
02:07Mais qui donc peut affirmer que ces dames sont en mon royaume?
02:11Un témoin, Sire, qui a vu et reconnu ces personnes
02:15à l'auberge des Fleurs de Lys.
02:17Appelez ce témoin, M. l'Ambassadeur,
02:21et pour prouver à chacun notre bonne foi et notre bonne volonté,
02:25il prêtera serment sur les évangiles, et nous l'écouterons sur l'heure.
02:30Sire, c'est malheureusement impossible.
02:33Impossible? Pourquoi cela?
02:37Mon témoin, Sire, n'est pas chrétien.
02:41Oh! Avouez que la chose est fâcheuse, M. l'Ambassadeur.
02:47Par estime, pour mon cousin Charles, je ne puis retenir ce témoignage.
02:53Je vous l'accorde, Sire.
02:55Mais par mesure de prudence, j'ai fait cerner l'auberge par les hommes de mon escorte.
03:00Je vous demande l'autorisation de la faire fouiller de la cave au grenier.
03:04Nous vous l'accordons bien volontiers, M. l'Ambassadeur.
03:07Si vous le désirez, M. le Grand Prévost vous prêtera main forte.
03:11En attendant, vous êtes mon hôte, et je vous convie à ma chasse.
03:16Je serai toujours reconnaissant à Votre Majesté de la royale courtoisie dont elle a bien voulu m'honorer.
03:22Sire, Sire, je crains qu'un pénible incident n'empêche M. le Prévost d'accomplir ses missions.
03:30Un incendie s'est déclaré à l'auberge des Troilices,
03:34et le zèle des gardes de M. l'Ambassadeur a empêché qu'on amène des secours.
03:39Bref, les bâtiments sont maintenant à proie des flammes.
03:42Isabelle!
03:43Oui, et les comtesses?
03:45Si vos informations étaient bien exactes, M. le Crécoeur,
03:48je pense que ces dames se sont rendues à vos ordres, sinon...
03:52Les malheurs sont prêts.
03:54Que s'est-il passé?
03:57Vous pouvez mesurer, Mesdames, combien Sa Majesté avait raison de se méfier de vos ennemis.
04:03Le château lui-même ne peut être qu'un refuge provisoire.
04:07J'apprécie Votre sollicitude, Monsieur.
04:10Nous n'accepterons désormais de prendre une décision
04:13d'après nous être entretenus avec le Roi de France.
04:16Je transmettrai, Mesdames.
04:18Cependant, je vous supplierai de ne pas commettre d'imprudence.
04:49Isabelle!
04:51Isabelle, m'entendez-vous?
04:53Isabelle!
04:55Isabelle!
04:56Pressons, pressons, les enfants.
04:58Quand la charpente s'étroulera, les bourguignons fouilleront les décombres.
05:01En aucun cas, ils ne doivent découvrir l'entrée de ce souterrain.
05:06Allez, pressons, pressons, pressons!
05:11Isabelle!
05:13Isabelle!
05:18Isabelle!
05:23Isabelle!
05:27Sergent, vous entendez?
05:29Il y a encore quelqu'un là-haut.
05:31Isabelle!
05:32Par que Dieu, je reconnais cette voix.
05:34Oh, le petit imbécile, il m'a tout fait rater.
05:39Isabelle!
05:45Isabelle!
05:47Isabelle!
05:51Quentin!
05:53Mon petit Quentin!
05:55Quentin!
05:57Quentin!
05:59Quentin!
06:00Mon petit Quentin!
06:01Je cherche Isabelle!
06:05Quentin!
06:07Quentin!
06:10Alors, Quentin!
06:11Quentin!
06:16Oh, pas griller, hein, toi!
06:17Quentin!
06:18C'est bon, mon petit Quentin!
06:41Quentin!
07:00Quentin!
07:02Mon petit Quentin!
07:04Quentin!
07:09C'est vous, mon oncle?
07:11Pas plus que ce n'est toi qui te jetais dans les flammes
07:14et que nous nous sommes sortis par ce souterrain
07:16qui, d'ailleurs, n'existe pas, tu m'entends?
07:18N'existe pas!
07:20Isabelle!
07:21Mais comment, Dieu blanc, j'ai pu sauver une personne
07:23qui jamais n'est venue en France?
07:25Tu m'entends?
07:26Jamais!
07:28Je vous supplie, mon oncle!
07:30Écoute bien ceci, mon petit, une fois pour toutes.
07:33Le service nous oblige parfois de voir et d'entendre des choses
07:37que nous pouvons oublier dès que notre mission est exécutée.
07:41C'est ça, notre honneur de soldat.
07:44Je comprends.
07:45C'est pourquoi tu vas aller changer de costume
07:48et retourner à une chance que nous n'avons jamais quittée.
07:51Tu entends?
07:52Jamais!
07:54Jamais!
07:56Nous ne sommes seulement égarés en rabattant le gibier.
07:59Voilà!
08:00Voilà, mon petit!
08:01C'est ça!
08:02C'est ça!
08:03Allez, viens!
08:04Enlevez les chaises!
08:12Ah, M. le Cardinal!
08:14Quel heureux homme, mon cousin de Bourgogne!
08:16Quel heureux homme, vraiment!
08:18En quoi donc, Sire?
08:19En la façon dont il est servi!
08:21Quelle selle!
08:22J'écrais le coeur!
08:23Quel fond!
08:24Quelle audace!
08:25En plus, c'est un excellent cavalier.
08:27Vous ne le trouvez pas, M. le Cardinal?
08:29Certes, oui, Sire.
08:30Pourtant...
08:31Pourtant?
08:32Son ambassade prétendait beaucoup et...
08:35Je ne sais pas.
08:36Je ne sais pas.
08:37Pourtant?
08:38Son ambassade prétendait beaucoup et...
08:41se contente de fort peu.
08:43Ah!
08:44Ça prouve qu'en plus de ses nombreuses qualités,
08:46c'est un homme raisonnable.
08:48Je donnerais beaucoup pour être entouré
08:50de gens comme lui.
08:52Sa majesté ne manque pas de serviteurs dévoués.
08:55Oui, ils le prétendent.
08:57De conseillers réfléchis,
08:59de négociateurs habiles.
09:01Quelques-uns, peut-être, oui.
09:03Et dans la partie qui vient de se jouer,
09:05certains de vos intérêts, Sire,
09:07ont été mieux servis que ceux du Duc de Bourgogne.
09:09Oh, là, M. le Cardinal,
09:10sommes-nous ici pour prendre de l'exercice
09:12ou pour chanter vos louanges?
09:14Pour la chasse, Sire.
09:16Assurément pour la chasse.
09:17Alors, pouvez-nous, M. le Cardinal,
09:19que sur ce terrain-là aussi,
09:21vous surpassiez M. de Crèvecoeur?
09:35Sous-titrage MFP.
10:05Sous-titrage MFP.
10:36Oh!
10:39Oh!
10:40Oh!
10:45Oh!
10:46Oh!
10:51Oh!
11:05Oh!
11:13Oh!
11:15Oh!
11:16
11:27
11:37
11:42
11:52
12:01– À la chasse, M. le Cardinal ! À la chasse !
12:06– Eh bien, Monseigneur, voulez-vous assister à la fouille des décomptes de l'auberge ?
12:09– Non, non ! Occupe-toi de ça, cloison d'or !
12:11– En humiliant le Cardinal, le Roi vient de commettre sa première erreur.
12:14Je dois en profiter.
12:16– Hé !
12:40
12:51
13:01
13:08
13:22– Votre éminence, est-elle blessée ?
13:24– Oh !
13:25Non !
13:26Il crachera Dieu, je n'ai rien !
13:27– Ah !
13:29J'ai connu pareilles aventures, mais j'en suis sorti avec plus de dommages.
13:32La dernière fois, c'était bras et côtes cassés.
13:34– Vous, crève-cœur !
13:35– Hélas, oui !
13:36Que voulez-vous ?
13:37– C'est le cheval qui fait souvent le cavalier.
13:40– Oui, ce cheval a été mal dressé.
13:42Je le fera battre, il n'aura que ce qu'il mérite.
13:44En attendant, celui-ci est très docile.
13:46Voulez-vous le monter, éminence ?
13:47– Non, non, non !
13:48Quelques pas me feront du bien.
13:50Je préfère marcher.
13:52– Si vous le permettez, éminence, nous ferons la promenade ensemble.
13:55– Très volontiers, Monsieur l'Ambassadeur.
13:57Nous parlerons politique.
13:59– Je ne comprends pas.
14:00Je n'apprends plus.
14:09– Nous nous sommes égarés. Il faut rejoindre nos amis.
14:11– Le galop du cardinal nous a coupés en trois.
14:13J'ai perdu à la fois la chasse et le roi.
14:15– Prenez pas la corne du bois.
14:16Il faut rejoindre Sa Majesté.
14:18– Monsieur le Comte,
14:19ma tâche à la Cour de France est souvent difficile.
14:23Mais dites bien au Duc Charles que je ne suis la même personne.
14:27Et surtout pas de la bordagne.
14:29– Ce sont là de bonnes et douces paroles, éminence,
14:31mais hélas, des paroles seulement.
14:33– Non pas, Excellence.
14:34Et bientôt, je vous le prouverai par des actes.
14:37– Dans ce cas, vous gagnerez l'amitié du Duc Charles
14:39et toute sa reconnaissance.
14:45Et le Duc Charles est le plus généreux des hommes.
14:57– Allons-y.
15:27– Allons-y.
15:57– Allons-y.
16:28– Eh bien, mauvaise tête.
16:30Je te tire de la potence
16:31et toi, tu me sauves des coups de boutoir de cet animal.
16:34Eh bien, nous sommes quittes à présent.
16:37– Sire, je reste toujours votre obligé.
16:41Ainsi que votre humble et très obéissant serviteur.
16:44– Allons donc, tu es un ingrat comme les autres.
16:48Vois le cas que tu fais de mes présents.
16:51– J'étais dans l'embarras, Sire.
16:53Et puis, ce n'était que le cadeau de Maître Pierre
16:56un marchand que je connaissais à peine et qui ne mettait rien.
16:59– Soit tenu, aujourd'hui, c'est un présent du roi.
17:02Garde-le soigneusement, car mes présents sont rares.
17:06– Cette chaîne ne quittera plus mon cou, Sire, jusqu'à ma mort.
17:10– Je te rends ce bijou, mais j'y mets une condition.
17:14Ne te vente à personne d'avoir tué le sanglier.
17:19– Je l'aurais tué sans doute, Sire,
17:22si mon pied n'avait glissé.
17:24– Oui.
17:26– Mais je serais mort à présent si Votre Majesté n'était intervenue.
17:31C'est grâce au courage et à l'habileté du roi de France que je suis encore en vie.
17:36– Voilà, c'est comme ça qu'il faut décrire l'histoire.
17:39– À l'occasion, raconte cette anecdote à M. de Comines.
17:43– Il sera le premier à l'entendre, Sire.
17:46– Tu me plais bien, Quentin. Je suis heureux de t'avoir sauvé la vie.
17:51– Chut!
18:09– Ah, vous voilà, Sire.
18:11Toute la chasse vous cherchait.
18:13– C'est une erreur, le jeu de suivre le sanglier, non le roi?
18:16– À votre sire, tout le monde connaît vos qualités de chasseur
18:19et chacun sait que là où va le gibier, on trouve le roi.
18:24– Voilà un compliment bien tourné pour un homme de guerre.
18:27Rentrons vite au château, messieurs. Nous fêterons une naissance.
18:30– Laquelle, Sire?
18:32– Celle de l'esprit de Dunois.
18:47– Eh bien, Poison d'or, cette auberge?
18:50– Elle était vide, Monseigneur.
18:52Nous n'avons trouvé ni les corps, ni les comtesses ou même la trace de leur séjour.
18:55Il semble bien que le Bohémien nous ait menti.
18:57– Alors, il paiera le préconvenu.
18:59Retourne aussitôt en Bourgogne et donne l'ordre aux bourreaux d'exécuter mes instructions.
19:02– Ils sont terribles, Monseigneur.
19:04Il y a près de vingt personnes dans la tribu du Bohémien.
19:07– Je sais, mais une menace a force de promesses
19:09et quand un crève-cœur donne sa parole, il ne la reprend pas.
19:12Allez!
19:16– Allez!
19:24– Allez, mon vieux lapin, ça va aller très bien.
19:27On va arranger ça.
19:29– Je regrette fort, mon neveu,
19:31que vous ayez manqué l'occasion de nous distinguer à la chasse.
19:34Quand le roi vous fait l'honneur de vous inviter pour la première fois,
19:37c'est lui qu'on suit à la trace et pas le sommelier.
19:40– Je n'ai voulu désobliger personne en étant le seul à ne pas perdre le roi.
19:43– Tu as donc...
19:45Voilà un sentiment qui vient tout droit d'Ecosse et non de la Cour de France.
19:50Ici, mon neveu, c'est la course aux honneurs
19:52et tout est bon pour se faire remarquer.
19:54Venez, jeune homme.
19:56Voilà votre affectation pour ce soir.
19:59Vous montez la garde devant les appartements du roi.
20:02– Les appartements du roi? Lui?
20:05– Lui-même, M. Leslie.
20:08– Sentinelle dans les appartements du roi?
20:10Habituellement, ce poste n'est confié qu'à ceux qui communent plus de 20 ans de service.
20:14– Les compliments, mon neveu, vous allez vite.
20:16À propos, savez-vous seulement tenir une arquebuse?
20:20– Mon oncle, je comptais justement sur vos leçons.
20:24Car jamais le roi ne m'aurait donné ce témoignage de confiance
20:29s'il n'avait su que j'étais votre neveu.
20:32– Ah, mon bonheur!
20:34Tout ce que je sais, je te l'apprendrai.
20:37Nous avons deux heures devant nous.
20:38Allez, viens, mon garçon.
20:42– Les femmes, les femmes!
20:45Si l'on se mariait pas, pas d'héritage, pas de complications.
20:49– Mais pas de politique, monsieur.
20:51– D'ailleurs, le mariage n'arrange pas tant nos affaires.
20:54Si le duc d'Orléans épouse votre fille...
20:56– Comment si? Il l'épousera, vous dis-je?
20:58Il l'épousera ou il se fera moine?
21:00– Les sentiments du jeune homme, hélas, sont très éloignés de Dieu.
21:03Ses sentiments ne sont pas plus vifs à l'égard de son altesse royale, la princesse Chane.
21:06– Mais qui parle de sentiments? Il s'agit de politique, messieurs.
21:10Ma fille Jeanne est fluette, chétive, incapable de donner la moindre descendance.
21:15– C'est un grand chagrin pour un père, sire.
21:17– Mais c'est une chance pour le roi de France, monsieur le cardinal.
21:20Car dans ce mariage, la famille d'Orléans s'éteindra,
21:23se tarira comme une mauvaise source.
21:26Donc, j'ai besoin pour la couronne.
21:28– Tel est donc votre plan, sire?
21:30– Notre plan, éminence, car c'est vous qui les marierez.
21:33– Que la volonté de Dieu soit faite.
21:35– Et la mienne également, s'il vous plaît.
21:37Vous êtes le serviteur de Dieu, mais vous êtes aussi le ministre du roi, monsieur le cardinal.
21:44– Je ne l'oublie jamais, sire.
21:46– Ah, à la bonne heure.
21:49Bon, passons maintenant aux autres affaires.
21:52Olivier?
21:54– Le comte de Craqueur s'est remis en route pour la Bourgogne.
21:57– Furieux?
21:59– Impénétrable.
22:00– Impénétrable?
22:02– Le comte est un homme obstiné.
22:04Il poursuivra son enquête et finira par savoir la vérité.
22:08Cette affaire tourne mal, sire.
22:11– Si le téméraire parvenait à faire épouser Campobasso à la jeune comtesse de Croix,
22:16l'affaire serait encore plus mauvaise.
22:19– Est-ce tellement certain?
22:22– Regardez cette carte, monsieur le cardinal.
22:25Les domaines de la comtesse sont situés juste entre les frontières de Bourgogne et de Flandre.
22:31Comme un coin enfoncé dans les possessions de Charles.
22:34Une base d'attaque pour prendre l'ennemi à revers en cas de conflit.
22:40Si la comtesse épouse un homme à nous, que nous est permis?
22:45Jamais, jamais le duc de Bourgogne n'osera défier la France avec une telle menace dans son dos.
22:51Jamais!
22:52En revanche, s'il se sent rassuré de ses arrières, il n'hésitera pas à tenter l'épreuve de force.
22:58Et en cas d'une défaite de nos armes, ça serait fait pour toujours de la couronne de France.
23:03– Eh bien, éminence, que faut-il faire?
23:06– Renvoyer les comtesses de Croix au duc de Bourgogne, sire.
23:09– La paix est à ce prix-là?
23:11– Livrer les réfugiés.
23:13Ça serait faire bon marché de l'honneur de la couronne.
23:16Le roi n'accepterait jamais.
23:18– Exagérons rien, compère.
23:19Si ce sacrifice devait être profitable, je le ferai sans hésiter.
23:22L'intérêt supérieur de la couronne, voilà tout ce qui compte.
23:25– L'intérêt de la couronne, c'est la paix, sire.
23:27– Oui, si nous sommes les moins forts.
23:30Non, si nous devons l'emporter.
23:32Il y a un pari à faire, éminence.
23:35Un pari sur notre bonne fortune.
23:37– Sire, comment renoncer à l'idée d'établir un ennemi du duc de Bourgogne au centre même de ses domaines?
23:43Et si facilement?
23:45Pas une simple messe.
23:46– La comtesse est capricieuse, messire.
23:49Elle a fui l'époux que lui destinait le duc.
23:52Elle pourrait aussi refuser celui que vous lui offriez.
23:55– Nous sommes prévenus de son caractère, éminence.
23:58Il ne serait pas question de lui demander son avis.
24:00– La difficulté serait plutôt de trouver le mari.
24:02Je pourrais être assez digne de confiance, essuyer sans broncher le blâme général,
24:06continuer à me servir secrètement, tandis que publiquement, je ne pourrais que le désavouer.
24:11– Qui, en effet, c'est toute la question.
24:17– Vous pourriez, sire, trouver un homme sorti de rien qui dépendrait entièrement de vous.
24:25Un homme qui ne pourrait pas plus exister sans votre appui que s'il était privé d'arrêt de soleil.
24:31Un homme dont l'ambition, le goût de l'intrigue et l'appétit d'argent seraient pour vous la meilleure des garanties.
24:40– Un homme comme toi, par exemple?
24:42– Exactement, sire.
24:47– Je t'aime bien, Olivier, mais même si je te fais duc aux yeux du monde, tu n'en resteras pas moins, Manon.
24:54Tu en as l'âme, les goûts, les manières, et puis que ça, la réputation.
24:58Le comte de Croix peut être un gredin, peu importe, mais il doit être né.
25:03Toi, tu es seulement venu au monde.
25:07– Sire, je supplie votre majesté d'écouter une proposition raisonnable.
25:13– Parlez, minance.
25:14– Le comté de Croix est placé sous l'autorité ecclésiastique de l'évêché de Liège.
25:19Louis de Bourbon, le prince évêque de cette ville, est le plus noble et le plus respecté des prélats.
25:25Je suggère à votre majesté de faire partir les comtesses sous un déguisement accompagné d'une petite escorte.
25:32En quelques jours, elles seront à Liège et l'affaire sera réglée.
25:37– Au profit de qui, minance?
25:39– Au profit de la paix, messire, car l'évêque fera prendre le voile à la comtesse
25:44et c'est un couvent qui héritera le comté.
25:47Le domaine de Croix sera définitivement neutre.
25:50– Oui, ce n'est pas ce que souhaitait notre cousin de Bourgogne, mais ce n'est pas non plus…
25:53– Mais ce n'est pas non plus ce que nous espérions, sire.
25:55Monsieur le cardinal propose une politique de démission.
25:57– Une politique d'équilibre, sire, et de bonne foi.
26:01– Messieurs, je vous en prie, pas de querelles de langage.
26:03Sachez qu'il n'y a qu'une seule politique, celle qui rapporte le plus.
26:06Venez réfléchir à vos propositions.
26:36– Avant de l'avoir vue, et moi je suis de même, celle qui t'est prévue, celle qui t'est prévue.
26:59– Voilà, doucement, sire Écuyer.
27:01Vous avez certes le réflexe rapide, mais si je l'avais voulu, vous étiez un homme mort.
27:08Est-ce donc en rêvant comme on te la garde en Écosse ?
27:11– Non, sire, mais j'attendais les consignes et les ordres de Votre Majesté.
27:15– Il n'y a qu'une seule consigne, toujours la même.
27:19Tuer en cas de trahison.
27:21– Trahison, sire ? Dans un château si bien gardé ?
27:32– La trahison, jeune homme, peut s'introduire par le trou d'une vrille.
27:37Elle s'assit à nos banquets, brille dans nos coupes,
27:40prend l'habit de nos bouffons, porte la barbe de nos conseillers.
27:45La trahison peut être partout.
27:47– Dans ce cas, sire, comment se garder de la trahison ?
27:52– En soupçonnant tout le monde, et en te subissant.
27:57En soupçonnant tout le monde, et en ne se confiant à personne.
28:03En frappant l'honnête homme avant qu'il ne devienne un fripon.
28:07En rouant, pendant,
28:10et cartelant tous ceux qui ne sont pas sûrs de leur langue.
28:17Comprends-tu cela ?
28:19– Ma foi, sire, je comprends surtout qu'il vaut mieux se tenir écarté de vos affaires.
28:25– On ne choisit pas toujours, jeune homme.
28:28Et pour toi, il est déjà trop tard.
28:31– Pourquoi donc, sire ?
28:34– Parce que tu m'as fourni des preuves de ton courage,
28:38et de ton dévouement.
28:41Parce qu'un homme,
28:44aussi seul que le roi de France,
28:47a parfois besoin d'une oreille amie
28:50pour se confier.
28:55– Sire,
28:57je dois monter la garde,
28:59et la consigne m'interdit de parler.
29:02– Mais non pas d'écouter, Quentin du Roi.
29:07Assieds-toi.
29:20– Tu m'as déjà blâmé pour les nombreuses potes que j'ai rencontrées.
29:24Et pour toutes les militances qui s'élèvent dans ce pays.
29:28– Je n'en ai parlé qu'à maître Pierre.
29:30– C'est pourquoi maître Pierre n'a pu te dire ce qu'il en coûte au roi de France,
29:35chaque fois qu'il entend le cri d'un supplicié.
29:38Les ordres terribles que parfois je dois donner
29:43attristent mon cœur,
29:46plus que tu ne saurais le croire.
29:49Mais c'est pour maintenir un royaume qui me vient de mes ancêtres,
29:54une tâche très lourde,
29:57mais un devoir sacré.
30:00– Je comprends, sire.
30:03– Je ne puis te livrer les détails de l'affaire qui m'occupe.
30:07Sache seulement qu'il s'agit
30:10de l'honneur,
30:12de la liberté,
30:14de la vie peut-être,
30:16de deux étrangères
30:18que la fatalité a jeté au travers de ma route.
30:21La raison d'État me commande
30:23de les rendre à celui qui les réclame.
30:27Mais,
30:29mon sentiment de gentilhomme m'incite à les secourir.
30:34Parle sans crainte, Quentin du Roi.
30:38Que me conseilles-tu ?
30:41– J'ai cru comprendre, sire,
30:43que la raison d'État
30:46s'accommodait de bien des détours.
30:50En revanche,
30:52devant le danger,
30:54l'honneur veut que l'on porte la tête haute
30:57et que l'on avance tout droit.
30:59– Nous sommes compris, Quentin du Roi.
31:02Grâce à toi, j'y vois plus clair.
31:06Et je t'en remercie.
31:09– Je suis le serviteur de Votre Majesté.
31:12– Tu n'étais bien plus que ça.
31:20Plus tard, si Dieu te prête vie,
31:24tu pourras dire à tes enfants
31:26qu'une nuit,
31:28pendant quelques minutes,
31:30tu as aidé un pauvre roi désorienté
31:34à porter le fardeau de la France.
31:51– Tenez, monsieur.
31:53La nuit est fraîche,
31:55et je pensais qu'un peu de vin chaud vous ferait du bien.
31:58Qu'est-ce que vous faites dans cette position ?
32:01– Je suis le plus humain,
32:03le plus simple,
32:05le plus incompris des rois.
32:07Oh, Bertrand !
32:09Quelle chance nous avons
32:11de servir un tel homme !
32:13– Buvez pendant que c'est chaud.
32:16– Merci.
32:18Buvez pendant que c'est chaud.
32:38– Sire,
32:40tout ce que je dis dans cette boule
32:42confirme ce que nous a dit l'horoscope du jeune homme.
32:44– Tout indique la bravoure.
32:45Chacune de ces entreprises
32:47porte la marque du succès.
32:49– Mais la loyauté, grand-père,
32:51la loyauté, c'est plus important que tout.
32:53– Voyez-vous, même si
32:55je dis
32:57loyauté,
32:59loyauté,
33:01la marque du reflet se redresse.
33:03C'est maintenant une ligne droite comme une flèche.
33:05– Qu'indique-t-elle, cette ligne,
33:07grand-père ?
33:09– Elle prouve que le jeune homme sera loyal et fidèle
33:11envers tous ceux qui lui seront
33:13loyalement et fidèlement attachés.
33:15Il n'y a pas de détour.
33:17Elle est pure et transparente
33:19comme le cristal de cette boule.
33:21– C'est bien, c'est très bien, Galeotti.
33:23J'ai plus confiance en ta science
33:25qu'en les conseils de mes ministres.
33:27– Par bonheur, les astres ont toujours aidé
33:29Votre Majesté à prendre la bonne décision.
33:31– Je méfie de la hâte, mais
33:33ce soir, je vous demande un effort, Galeotti.
33:36J'ai besoin de savoir
33:38l'heure favorable
33:40du départ d'une certaine expédition.
33:42Six heures.
33:43Serait-ce bien ?
33:45– Pourquoi six heures ?
33:47– Six cierges brûlaient ce soir devant l'hôtel Saint-Julien.
33:50Pourquoi six cierges ?
33:52Il m'a semblé que c'était un signe.
33:57– Six heures ?
34:01Oui.
34:03Pourquoi pas ?
34:05Regardez.
34:09La position de la Lune
34:11à l'égard de Saturne
34:13et de Jupiter
34:15sont une augure de succès.
34:17– Je le savais.
34:19Saint-Julien ne m'a jamais trompé.
34:21– C'est bizarre.
34:23Cette conjonction promet le succès
34:25à celui qui décide et fait partir l'expédition.
34:28Pourtant...
34:30– Pourtant ?
34:32– Saturne étant en combustion,
34:34elle menace de violences et de dangers
34:37ceux qui partent.
34:39– Vous avez bien dit succès pour celui qui fait partir.
34:40– Succès complet, sire, mais...
34:43– Mais qu'importe !
34:45C'est bien, c'est très bien, Galioti.
34:47Mais j'ai un autre souci.
34:50– Je vous écoute, sire.
34:52– Il s'agit d'un homme engagé dans une contestation importante.
34:55Il pense arranger cette affaire à l'amiable
34:58dans une entrevue personnelle avec son adversaire.
35:01Dans ce cas, deux hypothèses.
35:03Ou bien celui-ci répondra à la confiance par la confiance
35:06ou bien il abusera de l'avantage offert.
35:08– Il y a un risque à prendre.
35:11– Un risque énorme.
35:13Séparer sa fortune, sa liberté, sa vie peut-être sur un coup de dés.
35:17C'est pourquoi, Galioti, j'ai besoin de toute patience.
35:21Je veux connaître le jour propice à l'exécution de ce projet.
35:25Je veux savoir sans erreur possible
35:28les chances de succès de cette négociation.
35:32Et cela vite, très vite.
35:35– Sire, tout mon art est au service de votre majesté.
35:39Sire, tout mon art est au service de votre majesté.
36:10– Dix écus.
36:12Pour dix écus, il voudrait que je change le cours de l'histoire.
36:18– Sa sainte-té, le pape, est plus généreuse.
36:22Elle connaît le juste prix des confidences que vous fait le roi.
36:29– Ta majesté parlait à mot couvert.
36:32Avez-vous tout entendu ?
36:35Tout compris, Excellence ?
36:37– Oui. Le roi projette d'aller voir le duc de Bourgogne sans armes et sans protection.
36:42Il veut traiter seule à seule en dehors des diplomates.
36:45C'est-à-dire sans moi.
36:47– En cas de réussite, la chose est fâcheuse.
36:50Mais en cas d'échec,
36:52elle est excellente pour votre éminence.
36:55– Peut-être. Je dois réfléchir.
36:58Jusque-là, le roi ne doit prendre aucune décision.
37:02– Soyez sans crainte, Éminence.
37:04Tant que vous n'aurez pas choisi la ligne à suivre,
37:07les astres resteront muets.
37:14– Albéla qui vive !
37:16– Quelqu'un que toutes les sentinelles connaissent et saluent, Monsieur.
37:19– Je ne connais que ma consigne.
37:21– Et quelle est-elle, cette consigne ?
37:23– On ne passe pas !
37:25– C'est bien, Monsieur. Mais je suis Louis d'Orléans, premier prince du sang.
37:28Pensez-vous qu'un tel ordre puisse s'appliquer à un personnage tel que moi ?
37:31– Je l'ignore, Monseigneur.
37:32Et si je la forçais, cette consigne ?
37:34– Je vous tuerais !
37:36– Et vous tueriez, sans réfléchir, le futur gendre du roi.
37:39Depuis quand êtes-vous engagé ?
37:41– Depuis hier, Monseigneur.
37:43– Je comprends pourquoi votre instruction a des lacunes.
37:45Enfin, admettez, Monsieur, que si le roi me fait entrer dans sa famille,
37:48ce n'est pas pour me fermer ses appartements.
37:50Je vous salue, Monsieur. Continuez votre garde.
37:57– Il n'y a pas trop politique, ma nièce.
37:59Le roi Bièze, Ergote, Tergivers…
38:02Et s'il n'a pas pris ouvertement parti pour nous,
38:05c'est qu'il nous considère comme des otages.
38:07Comme une simple monnaie d'échange qu'il emploiera au mieux de ses intérêts.
38:10– Je ne puis le croire, ma tante.
38:12Le roi de France ne peut avoir le cœur aussi sec.
38:14– Heulasse, ma pauvre tourterelle !
38:16Le roi vous arracherait les plumes pour en tirer deux sous.
38:19– S'il en est ainsi de tous les grands de ce monde,
38:21alors qu'il se partage mon héritage.
38:23Qu'il prenne mes biens, ma fortune, mais qu'il me laisse en paix.
38:26– Ça ne leur suffirait pas !
38:27On ne peut prétendre au titre et au domaine de croix quand vous épousons.
38:30– Mais je refuse de me marier.
38:32– Mais alors que faire ?
38:34– Eh bien, tout ce qui est en notre pouvoir.
38:36Crier, geindre, hurler, faire tant de tapages que l'on nous sorte de cette prison.
38:39– Et après ?
38:41– Eh bien, après, on verra bien.
38:43Nous chercherons refuge ailleurs.
38:45En Angleterre, par exemple, ou bien chez le duc de Bretagne.
38:47– À quoi bon rêver, Isabelle ?
38:49Jamais le roi de France n'y consentira.
38:51– Eh bien, dans ce cas, nous nous échapperons.
38:53Nous fuirons toutes les deux comme déjà nous sommes parties de Bourgogne.
38:55– Pauvre petite !
38:57Mais cette fois, ce serait sans aide, sans argent, sans même un ami.
39:01– En voici un, madame.
39:03Pour vous, je risquerai ma vie, mon honneur, ma fortune.
39:05Vous pouvez disposer de moi comme vous l'entendez, mon épée, tout à votre service.
39:08– Mais monsieur, qui êtes-vous ?
39:10– Un pauvre diable de prince.
39:12Le premier de cette cour.
39:14Après le roi.
39:16– Quoi ? Le duc d'Orléans ?
39:18– Oui, madame, pour mon malheur.
39:20– Comment croire ?
39:22Comment comprendre une offre aussi généreuse ?
39:23Comment expliquer un tel miracle ?
39:26– De nos jours, madame, les seuls miracles possibles sont ceux que produit l'amour.
39:29Dès l'instant où j'ai vu votre nièce,
39:32plus rien, plus rien ni personne n'a compté à mes yeux.
39:36Dès la première seconde, j'ai compris.
39:39J'ai su qu'elle serait pour moi le visage du bonheur.
39:42Oh, madame !
39:44Madame, sans vous, la vie serait comme un ciel sans étoiles.
39:47Et le soleil, un astre froid et mort.
39:50– Relevez-vous, monsieur.
39:51Je ne saurais écouter vos paroles.
39:53– Les mots sont peu de choses, il est vrai.
39:55Mais bientôt, ce sont mes actes qui vous convaincront de ma sincérité.
39:58– Non, monsieur, en aucun cas.
40:00Durant ma vie entière, je vous saurai gréer de votre généreuse proposition.
40:04Mais nous ne pouvons accepter votre aide.
40:06Car nous savons les liens qui vous unissent à la princesse Jeanne.
40:09– Mais, madame, je suis comme vous, victime des intrigues et prisonnier de la politique.
40:12Le roi de France veut m'imposer cette épouse.
40:15Tout comme le duc de Bourgogne veut vous marier de force avec le comte de Campobasso.
40:18Nos malheurs et nos destins.
40:21Ils sont semblables.
40:22– C'est vrai ?
40:23– Non, madame.
40:24– Mais si, madame.
40:27– Non, vous dis-je.
40:29Car contrairement à vous, monsieur, je n'ai donné ma foi à personne.
40:34– Maintenant, partez, monsieur.
40:36Tout est dit.
40:39– Eh bien, je…
40:41Je pars, puisque vous l'exigez.
40:45Mais le duc d'Orléans ne peut empêcher son cœur de battre pour vous.
40:48Et vous ne pourrez l'empêcher de vous aider.
40:55– Maintenant, c'est bien fini.
40:57Le duc nous proposait notre dernière chance.
40:59Et l'honneur nous interdit de la saisir.
41:02– Pas seulement l'honneur, ma tante.
41:05Le cœur aussi.
41:07– Le cœur ?
41:08– Oui.
41:10Car pour tout accepter d'un homme,
41:12il m'aurait fallu l'aimer.
41:17– Qui vit ?
41:18– Je n'en vois pas le sort.
41:19Soyez sans inquiétude.
41:20Je vous consigne qu'à ta sens unique.
41:21– Apprenez-moi, monseigneur.
41:23Voilà encore une chose que j'ignorais.
41:30– Moi, monsieur.
41:32Il me semble que nous nous sommes déjà rencontrés.
41:35– Certainement, monseigneur.
41:36Il y a un quart d'heure à peine.
41:38– Non.
41:39Une autre fois.
41:41C'est étrange.
41:43Par deux fois, dans les mêmes circonstances,
41:45nos chemins se sont croisés.
41:49Dites-moi,
41:51tout à l'heure, si je ne m'étais pas fait connaître,
41:54vous m'auriez tué ?
41:55– Sans doute, monseigneur.
41:59– Dommage.
42:07– Ah, la journée a été rude, grand-père.
42:09Je ne suis pas fâché d'aller me coucher.
42:10– Hélas, ici,
42:11Votre Majesté a ce soir une visite.
42:14– Qu'est-ce encore ?
42:17– Marion,
42:18qui est de retour des Flandres.
42:20Elle a réussi à établir le lien
42:21entre les bourgeois de Liège et Guillaume de Lamarck.
42:23– Ah, ça, c'est très important.
42:24Fais-la venir tout de suite.
42:26– Je vais m'essayer d'avancer votre réaction aussi.
42:28– Vous êtes ici ?
42:34– Je suis aux ordres de Votre Majesté.
42:36– On raconte beaucoup de choses sur Guillaume de Lamarck.
42:39On le dit brutal,
42:40cruel,
42:41sanguinaire, même.
42:43– Tout cela est vrai, sire.
42:44En Flandre, on ne l'appelle plus
42:45que le sanglier des Ardennes.
42:47– Quel est l'état réel de ses forces ?
42:49– Plusieurs centaines d'hommes.
42:50Principalement des cavaliers.
42:52C'est une forte bataille.
42:54– Et vous,
42:55que faites-vous ici ?
42:57– Je suis en charge
42:58de protéger les Flandres.
43:00– Et vous,
43:01que faites-vous ici ?
43:03– Je suis en charge
43:04d'une forte bande très mobile.
43:06Elle vit de rapines,
43:07de pillages,
43:09et obtient par la terreur
43:10de multiples complicités.
43:11– Comment Guillaume a-t-il
43:12atteigni mes offres ?
43:13– Tout d'abord avec colère, sire.
43:15On m'avait envoyé à l'huile
43:16les mains vides.
43:17– Et ensuite ?
43:19– Au seul nom de Liège,
43:20il s'est calmé.
43:21Il est prêt à tout
43:22pour se venger du prince évêque
43:23qu'il avait excommunié.
43:25– Vous pensez
43:26que l'on puisse se fier
43:27à Paris furieux ?
43:29– J'hésiterai à l'affirmer, sire.
43:31Mais il a auprès de lui
43:32son fils, Éric de Lamarck.
43:34C'est un garçon frêle, maladif,
43:36aussi cruel que son père,
43:37mais doté d'une forte intelligence.
43:40Le sanglier n'entreprend rien
43:41sans prendre son avis.
43:43Pour la forme,
43:44il faut consulter Guillaume,
43:46mais en fait,
43:47c'est l'homme
43:48qui a le plus d'intelligence
43:49et le plus de force.
43:51– Et vous,
43:52que faites-vous ici ?
43:54– C'est avec Éric
43:55qu'il faut négocier.
43:57– J'ai deux questions à te poser.
43:59Y a-t-il des frontières
44:00qui arrêtent Guillaume ?
44:02– Aucune, sire,
44:03pourvu qu'il y trouve son intérêt.
44:11– Je connais certains
44:12de tes talents, Marion,
44:13et je les apprécie.
44:16Aurais-tu celui
44:17d'être chambrière ?
44:19– Je serai toujours
44:20celle qui vous plaira, sire.
44:25– Olivier,
44:27va réveiller les comtesses
44:28et préviens-les avec ménagement
44:29qu'elles quitteront le château
44:30demain à 5 heures.
44:32Réveille aussi
44:33le capitaine Cunningham
44:34et dis-lui de venir
44:35prendre mes instructions.
44:55– Et maintenant, sire,
44:57que dois-je faire ?
44:59– M'écoutez très attentivement,
45:01ma fille,
45:03car du succès de cette affaire
45:04dépend votre fortune
45:07ou votre vie.
45:20– Jeune homme,
45:21il est minuit
45:22et le roi vient
45:23de me faire réveiller.
45:24Savez-vous
45:25que je trompe pour qui ?
45:26– Non, capitaine.
45:27– Pour vous, mon garçon.
45:29Vous avez, paraît-il,
45:30de tel mérite
45:31que Sa Majesté
45:32n'a pu attendre l'aube
45:33pour vous charger
45:34d'une mission.
45:37– À vos ordres, capitaine.
45:38– Non, non, mon ami, non.
45:39Moi, à minuit,
45:40je ne donne pas d'ordre.
45:41À minuit, je dors.
45:42Je dors ou je transmets.
45:44Voici donc les instructions.
45:47On vous a désigné, vous,
45:49je ne sais pas pourquoi,
45:51afin de convoyer
45:52à Liège
45:53pour une raison
45:54que j'ignore,
45:56trois dames
45:57dont on me tait les noms.
45:59Ces trois personnes
46:00seront placées
46:01sous la protection
46:02de l'évêque de cette ville
46:03et ce,
46:05quels que soient
46:06les embûches
46:07et les péripéties
46:08du voyage.
46:10Voilà.
46:11C'est clair ?
46:12– Oui, capitaine.
46:14Je pars à Liège
46:15et je reviens.
46:16C'est ça.
46:17– Et c'est tout simple,
46:18n'est-ce pas ?
46:19– Je pense, capitaine.
46:20– Morbleux, jeune homme !
46:22Ne savez-vous pas
46:23que le duc de Bourgogne
46:24accuse d'espionnage
46:25tous ceux qui se rendent
46:26à Liège par la route de France ?
46:28Ignorez-vous aussi
46:29que le chemin est plus bordé
46:30de Coupe-Jarée
46:31que de Magrète ?
46:32Et ne comprenez-vous pas
46:33que pour vous,
46:34le plat pays de France
46:35se couvrira
46:36de ravins et de précipices ?
46:38– Je ne sais qu'une chose, capitaine.
46:40Le roi m'a fait l'honneur
46:41de me confier une mission.
46:43Je ferai l'impossible
46:44pour la mener à bien.
46:48– Et si tu te fais tuer,
46:49quel sera ton nom, imbécile ?
46:50– Ça sera la tête haute
46:51et l'épée à la main.
46:53– Psst !
46:54Écossais !
46:56Mauvaise tête !
46:58Orgueilleux comme son père !
47:01Et comme moi, tiens,
47:02viens m'embrasser, mon fils.
47:06Tiens !
47:08Voilà de l'or
47:09pour le voyage.
47:11Et cette lettre contient
47:12la liste des endroits
47:13où vous pourrez faire halte.
47:14Ah !
47:15Comme escorte,
47:16tu n'auras que Bertrand
47:17dans Vallée d'Arbre.
47:19Où partons-nous ?
47:20– Dès l'aube.
47:21Je n'ai pas une seconde à perdre.
47:22– Alors, permettez.
47:24– Où vas-tu ?
47:25– Mais quittez, capitaine.
47:30Ah !
47:31Pas assez petit.
47:38Tiens !
47:44– Prêt à partir, Bertrand ?
47:45– Paré, monsieur.
47:47– La consigne,
47:48a-tu pensé au vif ?
47:49– Faites-moi confiance.
47:50J'avais carte blanche aux cuisines.
47:52J'ai fait charger
47:53le ravitaillement d'une compagnie.
47:58– Les chevaux sont prêts.
48:19– Nous réveiller en pleine nuit,
48:21nous faire partir à l'aube,
48:22par une poterne,
48:23comme des servantes que l'on chasse.
48:25C'est une insulte supplémentaire, monsieur.
48:27– Je vous répète, madame,
48:28qu'il ne s'agit là
48:29que de mesures de sécurité.
48:30D'ailleurs, sa majesté elle-même
48:31a tenu à se lever tôt.
48:32– Pour s'excuser, peut-être.
48:34– Pour venir vous saluer
48:35avant votre départ.
48:42– Je suis désolé, madame,
48:43mais je n'ai pas l'intention
48:44de vous faire mal.
48:46– Je sais, mesdames,
48:47que vous souhaitiez me voir
48:48depuis longtemps.
48:51Les affaires, hélas,
48:52ne m'ont pas laissé le loisir.
48:54Je n'ai pas voulu, cependant,
48:55que vous quittiez la France
48:57sans emporter le témoignage
48:59de mon affection.
49:00– Sire, son éminence nous a dit
49:01que souvent vous avez prié pour nous.
49:04Permettez-moi d'en remercier
49:05votre majesté.
49:07Je comprends que le roi de France
49:09n'ait pas trouvé le temps
49:10de s'occuper à la fois
49:11du salut de nos âmes dans le ciel
49:13et de nos intérêts sur cette terre.
49:15– Ma nièce, sire, a le cœur pieux,
49:17mais elle ignore tout de la politique.
49:20Elle brûle d'apprendre
49:21pourquoi votre majesté
49:22l'appelle en France hier
49:23et l'en chasse aujourd'hui.
49:26– Ne chassons personne, mesdames.
49:28Selon la conjoncture,
49:29nous tâchons, au contraire,
49:30de vous trouver l'asile le plus sûr.
49:33Quand la raison le commande,
49:34il faut parfois faire violence
49:36à son cœur, n'est-ce pas,
49:37monsieur le cardinal?
49:38– Hélas, oui, madame.
49:40Sa majesté et moi
49:41avons longuement réfléchi
49:42avant de prendre cette décision.
49:44Il fallait éviter la guerre
49:46et sauvegarder vos intérêts.
49:48Nous avons, je crois,
49:49choisi la meilleure solution.
49:51– Dans ce cas,
49:52nous partons sans regret, sire,
49:54et nous brûlons du désir
49:55de nous retrouver au plus vite
49:56sous la protection
49:57de l'évêque de Liège.
49:58– Madame, vous êtes injuste.
50:00C'est de bon cœur
50:01que la France vous a donné
50:02l'hospitalité.
50:03– Elle nous l'a seulement prêtée,
50:04Eminence,
50:05et aujourd'hui,
50:06elle nous la réclame.
50:07Nous la lui rendons
50:08de bonnes grâces.
50:09– Nous continuerons
50:10de prier pour vous, mesdames.
50:12Puisse le Seigneur vous éclairer
50:13sur la pureté de nos intentions.
50:15Allez, et que Dieu vous protège.