Sénat en action s'immerge dans les coulisses du Sénat pour montrer le travail des 348 élus de la chambre haute, l'élaboration d'une loi et son application sur le terrain. Auditions, commissions d'enquête, projet de loi... plongée inédite au coeur du Sénat. Année de Production : 2023
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00:00 ...
00:20 -La nuit, c'est le seul moment que j'ai à moi
00:23 où je peux pleurer toute seule.
00:25 ...
00:28 ...
00:36 C'est vrai que ça m'arrive d'hurler dans le lit,
00:39 parce que cette charge, je l'évacue par des hurlements,
00:44 mais en contenant encore toujours,
00:46 parce que les filles ne sont pas loin.
00:48 ...
01:10 -Nana, c'est prêt !
01:11 Je me suis retrouvée dans cette situation
01:16 de famille monoparentale, il y a six ans,
01:19 suite à une séparation sur des faits graves
01:23 de violences conjugales, intrafamiliales.
01:26 Tu veux de la briège, Zazu ? -Oui.
01:28 -Nana, t'en veux ou pas ? -Merci.
01:31 -C'était soit je fuyais avec les filles les derniers coups,
01:36 soit j'y restais, quoi.
01:37 Il n'y avait pas 36 choix
01:40 que de prendre deux valises...
01:46 Et concrètement, les filles sont le bras,
01:49 et on part, quoi.
01:51 ...
01:54 ...
02:04 -Salut, papa.
02:05 ...
02:09 -Celui-là, il est sans sucre.
02:11 -La semaine prochaine, je suis convoquée à midi.
02:16 Ca va me laisser le temps de les déposer le matin.
02:19 Ca veut dire que je serai pas là pour les récupérer,
02:22 donc si vous pouviez me les récupérer...
02:25 -On fait comme d'habitude, on gère...
02:27 -Papa, c'est un peu la figure paternelle
02:31 que les filles n'ont pas eue.
02:34 Au-delà de l'aspect pratique qu'ils apportent tous les deux,
02:37 il y a eu un soutien moral, physique.
02:41 J'ai été hospitalisée plusieurs fois sur ces six dernières années.
02:45 C'est papi et mamie qui ont pris le relais avec les filles.
02:49 C'est aussi papi et mamie qui m'ont relevé
02:51 quand j'étais au 36e en dessous.
02:54 C'est aussi papi et mamie qui m'ont dit
02:59 "Non, tu lâches pas, t'as deux enfants derrière."
03:02 -Oui.
03:03 -Et quand on n'a pas un papi Jean-Yves
03:07 et une mamie Annie,
03:09 ben...
03:10 Je serai pas devant vous.
03:14 Financièrement, on a tapé dans les économies.
03:17 On pouvait pas la laisser...
03:20 Comme ça, sans rien.
03:22 Et puis, il faut penser aux enfants, aussi.
03:25 Il faut penser. Donc on n'a pas regardé.
03:27 Et puis, voilà.
03:29 Et on continue aussi, on continue encore.
03:31 Musique douce
03:34 ...
03:38 -C'est le plongeon dans les abîmes financières.
03:42 ...
03:44 Du jour au lendemain, je peux être noyée
03:47 par les pannes de voiture,
03:49 par les procédures judiciaires que j'ai pas demandées,
03:52 les hospitalisations, les frais médicaux,
03:54 les dépassements d'honoraires.
03:56 Une avalanche de factures
03:59 où, en fait, vous en êtes au point
04:02 où la banque vous dit "Stop, on arrête tout !"
04:05 ...
04:06 Être submergée par les factures, ça fait partie des charges...
04:10 Au-delà de la charge mentale, la charge financière,
04:13 la charge d'assumer les deux rôles de parent,
04:17 on est toujours sur la...
04:18 J'associe vraiment les deux termes "famille monoparentale"
04:23 avec "charge". Ca va de pair, pour moi.
04:26 ...
04:30 -Cette charge, cette solitude pour assumer ses enfants,
04:33 c'est le quotidien d'un quart des familles en France.
04:37 Une famille sur quatre est aujourd'hui monoparentale
04:40 et pourtant, ses parents isolés se sentent invisibles,
04:44 hors radar, et restent dans les angles morts
04:47 des politiques familiales.
04:49 ...
04:52 -Les politiques publiques de soutien et d'accompagnement
04:55 des familles monoparentales, elles existent dans notre pays.
04:58 Elles ne sont parfois pas cohérentes,
05:01 elles ne sont parfois pas assez efficaces
05:03 par rapport aux objectifs qu'elles se sont fixés
05:06 et qui devraient se fixer.
05:08 -Colombe Brossel est sénatrice de Paris.
05:11 Elle mène un travail sur les familles monoparentales.
05:14 -La question qui est posée, c'est est-ce que les politiques
05:18 répondent à des préoccupations qui sont celles des familles
05:21 aujourd'hui, dans leur diversité, ou à des préoccupations
05:24 telles qu'elles étaient il y a 20 ans ?
05:26 -Car en quelques années, ces familles monoparentales
05:30 sont devenues un fait social.
05:32 Leur nombre explose à partir de 1975,
05:36 avec la loi sur le divorce par consentement mutuel.
05:39 -Il y a eu un retournement des raisons de la monoparentalité.
05:43 Avant, on était mère de famille monoparentale,
05:47 essentiellement suite au décès de notre mari conjoint.
05:51 Aujourd'hui, ce sont des situations
05:53 qui sont beaucoup moins présentes.
05:55 Maintenant, c'est la séparation conjugale,
05:58 que ce soit un divorce ou une séparation,
06:00 la cause principale de la monoparentalité.
06:03 Mais il y a aussi une partie, donc à peu près 15 %,
06:07 qui sont monoparentales depuis la naissance de l'enfant,
06:11 et ce sont des choix, et c'est de plus en plus possible,
06:14 aujourd'hui, avec la PMA notamment.
06:16 Musique douce
06:18 -Des familles plus précaires que les autres,
06:21 41 % vivent en dessous du seuil de pauvreté,
06:24 ...
06:25 et dans plus de 80 % des cas,
06:28 ces familles ont à leur tête une femme.
06:31 ...
06:32 Lorsque l'appellation "famille monoparentale"
06:35 a été mise en place, c'était dans l'objectif
06:37 de réunir toutes les personnes dans ces situations
06:40 et de les déstigmatiser, d'enlever cette figure
06:43 de la fille mère célibataire qui a eu un enfant hors mariage,
06:46 et de l'autre côté, il y avait la figure de la veuve.
06:50 Et donc, aujourd'hui, on a encore dans l'imaginaire collectif
06:53 cette image d'un manque.
06:58 En fait, il y aurait un manque d'une figure paternelle,
07:02 et donc, ces femmes doivent prouver tout le temps
07:05 qu'elles sont capables de concilier leur vie professionnelle
07:09 et leur vie familiale.
07:10 D'un côté, on va leur dire qu'il faut travailler
07:12 pour sortir de la pauvreté, et de l'autre,
07:15 il faut être présente pour vos enfants,
07:17 parce que sinon, ils vont devenir des délinquants, etc.
07:20 ...
07:21 -On parle de jeunes qui, pour une très large majorité,
07:24 n'étaient pas connus de la justice.
07:26 On parle de jeunes qui, pour une écrasante majorité,
07:30 on le voit, ont un cadre familial qui est fragilisé,
07:33 parce qu'ils sont dans des familles qu'on appelle monoparentales,
07:37 ils sont élevés par un seul de leurs parents.
07:39 La leçon que j'en tire, c'est que notre pays a besoin
07:42 d'un retour de l'autorité à chaque niveau,
07:45 et d'abord dans la famille.
07:47 -Comment voulez-vous que les familles monoparentales,
07:50 dont je répète que c'est une famille sur quatre dans notre pays,
07:54 80 % de femmes à la tête de ces familles,
07:56 ne se sentent pas stigmatisées
07:58 quand, dans la seule parole publique
08:01 sur les familles monoparentales,
08:03 il n'y est à coller le mot "manque d'autorité",
08:06 le mot "déviance", le mot "violence".
08:10 Comment voulez-vous que les familles monoparentales
08:13 ne se sentent pas stigmatisées ?
08:15 C'est pour ça que le travail qu'on fait est important,
08:18 parce qu'il faut justement remettre en lumière
08:21 qui sont les familles monoparentales.
08:23 -Ces familles, les sénatrices les ont écoutées.
08:27 Toutes s'interrogent qui, pour les relayer
08:30 pour la garde de leurs enfants,
08:32 comment trouver un logement avec un seul salaire,
08:35 comment faire vis-à-vis de son employeur
08:38 quand son enfant est malade,
08:39 où trouver le temps pour aller chez le médecin,
08:42 aller au cinéma ?
08:44 Des dizaines de questions, des besoins multiples
08:47 et une réponse, une revendication,
08:50 la création d'un statut.
08:52 -Un statut de parent isolé
08:54 ouvrirait l'accès aux droits afférents
08:56 en termes de logement, d'accès à la santé,
08:59 d'accès à la culture, d'accès à l'éducation
09:02 et aux loisirs.
09:03 -Ce qu'on veut, c'est une place.
09:05 Nous sommes 25 % des familles aujourd'hui,
09:08 donc on veut être reconnus.
09:10 -Ce statut permet de sensibiliser l'opinion publique,
09:13 les professionnels, politiques,
09:15 mais aussi employeurs,
09:16 aux enjeux et aux difficultés de ces familles.
09:19 -Sans cadre juridique,
09:20 on ne peut pas proposer des vraies solutions
09:23 qui permettent aux parents et devant leurs enfants seuls
09:26 de s'organiser au quotidien.
09:28 -Il y a autant de familles monoparentales,
09:30 autant de situations que de raisons
09:32 pour lesquelles on a une famille monoparentale.
09:35 Les sujets ne sont pas les mêmes.
09:37 Le statut, sans que ce soit une solution miracle,
09:41 c'est en tout cas poser la question
09:43 de l'existence des familles monoparentales
09:46 dans un environnement qui est celui qu'il y a.
09:48 Musique douce
09:50 -Car être maman seule,
09:52 parfois, c'est aussi une volonté.
09:54 ...
09:55 Elodie est attachée de presse indépendante.
09:58 Elle a fait ce choix il y a 12 ans.
10:01 -J'avais un couple d'amis lesbiennes américaines
10:03 qui étaient déjà dans un début de processus PMA.
10:06 ...
10:08 C'est comme ça que c'est arrivé à moi.
10:10 Après, ça a été deux ans de mûres réflexions
10:12 avant de m'engager vraiment et d'aller pour de vrais,
10:15 "faire un séminaire" en Belgique, à Bruges, en l'occurrence.
10:19 ...
10:21 Après, j'ai la joie, trois mois après,
10:23 d'apprendre que je suis enceinte.
10:25 -Aujourd'hui, sa vie de maman seule,
10:27 elle la partage dans une BD.
10:29 -J'avais très envie de raconter ce témoignage-là
10:32 et mon parcours en tant que maman solo.
10:34 ...
10:38 Ma fille, j'ai attendu qu'elle ait 10 ans,
10:40 qu'elle me donne un feu vert pour raconter son histoire,
10:43 car c'est vraiment son histoire à Nes.
10:45 J'avais aussi envie de témoigner pour d'autres femmes,
10:48 pour qu'elles aient une idée
10:50 de ce que ça représente comme parcours,
10:52 les difficultés qu'elles peuvent rencontrer,
10:54 les joies, les peines, les freins.
10:56 -C'est une de mes images préférées.
10:58 -Ouais. L'Everest ? -Ah bah oui.
11:00 -Elle est jolie, cette image. -Avoir un enfant à deux,
11:03 c'est un Everest fois deux,
11:05 mais alors, seul, c'est une puissance 10.
11:08 -C'est ça.
11:09 ...
11:15 -Même en étant d'un milieu aisé
11:17 et en étant...
11:19 fière de mon choix, contente de mon choix,
11:25 ce n'est pas subi, j'ai choisi la monoparentalité,
11:28 donc même en étant dans ces baskets-là,
11:30 ça n'empêche pas qu'il y a des fois où t'es totalement dépassée.
11:34 ...
11:37 L'aide à laquelle j'avais pensé, elle existe presque pas.
11:40 Il y a même des gens qui verbalisent le fait
11:43 "tu voulais un enfant toute seule, tu l'as."
11:46 Il n'y a pas de relais. Il n'y a pas de relais.
11:49 ...
11:55 Dès que je sentais trop de fatigue ou quoi,
11:58 je prenais du sucre, je mangeais du chocolat, des bonbons, des gâteaux.
12:01 Je mangeais tout ce qui se passait, je calculais rien.
12:04 Ce qu'il fallait, c'était prendre des forces
12:07 et c'était ma façon d'encaisser la pression, quoi.
12:10 Je me suis toujours demandé comment font les mamans solos salariées.
12:15 ...
12:17 La monoparentalité en étant salariée,
12:20 alors ça, c'est un mystère pour moi.
12:22 Je sais pas comment font ces femmes et je leur tire un chapeau de ouf.
12:26 Si j'avais pas été à mon compte, je sais pas comment j'aurais géré.
12:30 Comment t'expliques 50 fois "oui, là, elle a de la fièvre,
12:33 "oui, mais là, il y a une conjonctive,
12:35 "oui, mais là, tout le monde est en otite,
12:37 "oui, mais là..." T'as toujours un truc.
12:39 Après, ça se tasse avec l'âge, heureusement,
12:42 mais toutes les petites maladies enfantines,
12:45 quand t'es salariée, je sais pas ce que tu racontes à ton employeur.
12:48 ...
12:50 Sonnerie.
12:51 -Eh, salut ! -Salut, Lilo !
12:53 -Tu vas bien ? -Bien et toi ?
12:55 -Très bien. -Bienvenue, bienvenue.
12:57 C'est cool que tu viennes d'elle.
12:59 La monoparentalité,
13:02 s'il fallait la résumer en un mot,
13:04 c'est que ton enfant prend la priorité sur toi, surtout.
13:09 -C'est super bien. -Ouais, j'adore mon quartier.
13:12 Tes enfants sont en vacances ? -Ouais.
13:14 -Nessou, elle est en colo d'équitation, cette semaine.
13:17 Par contre, elle s'est cassée la gueule il y a deux jours.
13:20 Il faut qu'on prévienne quelqu'un d'autre.
13:22 -Ah ouais ? C'est marrant, la question du centre-équipe.
13:25 Vous avez pas besoin de prévenir quelqu'un d'autre.
13:28 C'est bon, je suis prévenue.
13:29 T'aimes les sauces pimentées, toi ? -Oui.
13:32 -Quand on rentre le soir, le boulot, c'est agréable d'échanger
13:35 avec son conjoint ou sa conjointe.
13:37 Y a un échange avec une personne adulte,
13:40 qu'on n'a pas, je pense, quand on est maman solo.
13:43 Je sais que parfois, elle aimerait...
13:45 Elle aimerait pouvoir un petit peu vider son sac
13:47 auprès de quelqu'un qui serait dans son quotidien.
13:50 -Être avec d'autres adultes,
13:55 vivre en communauté avec des parents solos...
13:58 A Poissy, une résidence propose des logements privés
14:03 et des espaces communs.
14:04 Une dizaine de familles monoparentales vivent ici.
14:07 Ce co-living intéresse la sénatrice Colombe-Brussel
14:11 pour son enquête.
14:13 -C'est quand même majoritairement des femmes,
14:15 qui ont entre 30 et 45 ans,
14:17 donc un ou deux enfants à charge.
14:19 Majoritairement des personnes qui habitent à Poissy
14:22 ou dans les villes alentours,
14:24 qui sont toutes en situation d'emploi.
14:26 Certaines qui étaient dans l'urgence de la séparation,
14:29 d'autres qui avaient une envie de vivre en communauté,
14:32 mais qui étaient bien installées dans des logements individuels.
14:36 -Bonjour. Je suis Colombe-Brussel. Je suis sénatrice de Paris.
14:40 On est ravies de pouvoir être présentes ici aujourd'hui
14:44 et vous rencontrer, même si c'est par le biais d'un écran.
14:47 Merci beaucoup de nous consacrer un peu de temps.
14:50 Qu'est-ce qui vous a emmenées vers cet espace à Poissy ?
14:56 Et voilà, ce que vous en tirez à titre personnel
14:59 pour vous et votre famille ?
15:02 -Quand on arrive parfois du travail et qu'on n'en peut plus,
15:05 qu'on a déjà une grosse charge mentale,
15:08 on est obligés de rester chez soi, enfermés.
15:10 Et ça m'arrive d'aller dans l'espace partagé
15:14 et rien ne fait changer, parfois, quelques mois,
15:17 avec un autre parent,
15:18 ou juste de voir mon fils se jouer dans l'espace partagé
15:22 et moi, je décharge un peu de mon côté.
15:25 Je suis en train de détecter un câble.
15:27 Ca permet de lâcher prise.
15:30 On n'est pas tous les deux, seuls, dans un appartement,
15:33 face à nos problèmes, nos gardes, nos parents.
15:35 -Il trouve un sens, ici.
15:38 Parce que c'est plus qu'une résidence
15:42 qui accueille des familles monoparentales.
15:45 C'est vraiment un travail autour du lien,
15:47 autour de la reconnaissance du fait
15:51 que l'on est une famille monoparentale
15:53 et qu'on a des besoins qui vont être les mêmes
15:56 que toutes les familles et des besoins spécifiques.
15:58 Musique douce
16:00 -Les parents, devenus solos après une séparation,
16:04 ceux qui ont la charge quotidienne de leurs enfants,
16:07 sont plus fragiles financièrement.
16:09 Après la rupture, ils doivent trouver un compromis
16:12 avec leur ex-conjoint.
16:14 Qui paye quoi ? Combien l'un va donner à l'autre ?
16:17 Adeline, elle, n'a rien eu du père de ses filles.
16:20 -La juge des affaires familiales a estimé
16:23 que monsieur n'était pas soumis à la pension alimentaire
16:27 par le fait qu'il était soumis
16:29 à un droit de visite en lieu médiatisé,
16:33 que ça lui demandait de faire des trajets
16:35 entre la Creuse et l'île Lévilène.
16:37 Par conséquent, au regard de ses revenus,
16:41 ça représentait un coût.
16:42 -Attention.
16:46 -Rajouter une pension alimentaire là-dessus
16:49 n'était pas entendable.
16:50 -Il faut qu'on prévoie toutes les trois, là,
16:55 pour aller chercher des baskets, là,
16:58 parce que vos baskets sont complètement...
17:01 Oui, bien sûr. Je fais ce que je peux avec ce que j'ai.
17:04 Donc, si c'est pas des Nike,
17:06 ça sera des baskets normales, en fait.
17:10 -Oui.
17:11 -Du moment que t'as des baskets au pied...
17:13 -Voilà. -D'accord ?
17:15 J'ai une allocation au soutien familial
17:20 qui fait office de pension alimentaire.
17:22 J'ai 180 euros par enfant.
17:25 Par exemple, je prends la dernière facture de cantine,
17:30 où on est à 97,20 euros par enfant.
17:34 Ca fait pas le joint, en fait, en vrai.
17:37 Le père de mes filles a complètement démissionné
17:44 puisqu'il a organisé cette disparition...
17:47 administrative.
17:49 -Oui, allô ?
17:52 -Bonjour, madame Gaye.
17:53 -Je me permettais de vous appeler,
17:55 pour plusieurs points qui s'accumulent ces derniers temps.
17:58 Je sais que, sur les intérêts civils,
18:01 il va falloir mener une recherche
18:04 pour faire signifier le jugement,
18:08 mais en soi, si vous voulez,
18:10 ce qui, moi, me pose peut-être plus un problème,
18:13 j'allais dire, déontologique que judiciaire,
18:16 c'est que c'est quand même pas à moi
18:18 d'aller...
18:20 de nouveau rechercher une adresse,
18:24 alors qu'il fait tout pour...
18:26 De toute façon, il fait tout pour rester injoignable,
18:30 totalement injoignable,
18:32 et il fait tout pour masquer, en fait, son adresse...
18:35 Enfin, masquer sa présence...
18:38 Je ne sais pas où.
18:39 -Demandez une adresse mail,
18:41 essayez d'avoir un mail pour faire des mails.
18:44 -Administrativement, j'ai besoin de savoir où il est,
18:47 mais du point de vue des filles,
18:48 et j'allais dire même de mon point de vue personnel à moi,
18:52 c'est bien qu'il ne soit plus dans l'éparrage,
18:55 parce que j'estime que la réparation de mes traumas,
18:58 elle ne se fera que...
19:00 sans lui.
19:02 Et pas avec lui, elle se fera sans lui.
19:05 -Pour éviter les tensions, les conflits entre les parents,
19:14 depuis le 1er janvier 2023,
19:17 il existe un intermédiaire,
19:19 la Caisse des allocations familiales.
19:21 Ces agents se chargent désormais de récupérer
19:25 et de reverser les pensions alimentaires.
19:28 ...
19:33 -Il s'agit de la pension alimentaire
19:35 que le père de mes enfants doit me verser.
19:38 Je ne sais pas si vous avez le temps de reprendre mon dossier.
19:41 -Oui, j'ai votre dossier.
19:42 Vous devez une pension alimentaire,
19:45 on avait une procédure de recouvrement
19:48 qui a pris fin en septembre 2023.
19:51 Nous, on vous a versé la pension alimentaire du mois de décembre.
19:54 -Vous avez réussi à récupérer la pension.
19:57 -Suite à un... -C'est en votre compte.
19:59 -C'est un virement qui a été fait par monsieur,
20:01 qu'on a reçu et qu'on vous a reversé en date du 30 décembre.
20:05 Je vais vous verser janvier et février.
20:07 Vous aurez vos pensions alimentaires de janvier et février.
20:10 On va mettre en place le prélèvement à partir du mois de mars.
20:13 On n'aura plus de problème de non-versement.
20:16 -OK, super. Merci beaucoup.
20:18 Je vous souhaite une bonne journée. -Bonne journée et à lundi.
20:21 -Au revoir.
20:22 -Les parents ont encore une fonction parentale à exercer ensemble,
20:26 mais ils sont séparés.
20:27 Il vaut mieux qu'ils se parlent d'éducation des enfants
20:30 que de sujets financiers douloureux et qui génèrent de la tension
20:33 et parfois aussi de la violence.
20:35 Dans ces cas-là, un service public,
20:37 se mettre entre les deux sur ces sujets financiers,
20:40 neutralise ce sujet, banalise ce sujet.
20:42 Le pari et le défi de cette réforme,
20:44 c'est que ça diminue les impayés de pension.
20:47 -Ces pensions non payées représentent aujourd'hui 40 %.
20:51 En jouant les intermédiaires,
20:53 les caisses d'allocations espèrent les faire baisser à 15 % en 2026.
20:58 -Bonsoir.
20:59 Les objectifs qui sont fixés par l'Etat
21:03 à la Caisse nationale des allocations familiales
21:06 en termes de baisse du nombre de pensions alimentaires non payées
21:10 sont manque d'ambition, on va le dire comme ça.
21:13 On sait que dans d'autres pays,
21:15 l'exemple du Québec est très souvent cité,
21:17 eh bien, il y a un dispositif qui passe directement
21:21 par le système, par les impôts,
21:24 et avec un prélèvement direct.
21:27 Au Québec, 95 % des pensions alimentaires sont payées.
21:31 Passer par une fiscalisation,
21:33 passer par un prélèvement à la source
21:35 pourrait permettre d'atteindre vraiment ces objectifs.
21:38 -L'autre objectif est de faire connaître
21:42 aux familles monoparentales leurs prestations,
21:45 du RSA majoré à l'allocation adulte handicapé,
21:50 les aides au logement
21:52 ou encore la prestation de soutien familial.
21:55 Souvent, ces familles n'en font pas la demande.
21:58 -Pourquoi elles ne connaissent pas leurs droits ?
22:00 C'est des règles complexes, c'est une perception
22:03 que c'est pas pour eux, parfois.
22:05 Ils sont sortis d'un système social avec des difficultés
22:08 et ils n'ont pas envie d'y revenir,
22:10 dans l'instabilité des droits, dans ce que ça peut créer.
22:13 Il y a une série d'actions qu'on engage
22:16 et qu'on mène en permanence sur ces sujets.
22:18 -On s'intéresse à simplifier les obligations des allocataires
22:22 en termes de déclaration.
22:23 Aujourd'hui, c'est très complexe, ils se trompent souvent.
22:27 On leur réclame parfois de l'argent qu'on leur a versé.
22:30 C'est quelque chose qui provoque du non-recours.
22:33 -Le vrai sujet, c'est le sujet du non-recours.
22:35 Oui, ce sera notre première préconisation.
22:38 C'est une grande campagne sur l'accès aux droits
22:41 pour que les femmes, puisqu'elles sont 80 % à être concernées,
22:45 puissent avoir accès à l'information
22:48 facilement et en proximité dans tous les territoires.
22:52 Musique douce
22:54 -Tu fermes souvent les yeux.
22:56 ...
23:00 -Ah, elle est sympa !
23:01 -On voudrait pas qu'il fasse un vol plané ?
23:04 ...
23:06 Ah, les terrasses sont prises d'assaut !
23:09 -Je sais que j'ai mis au monde un enfant sans papa
23:12 et que c'est pas le chemin idéal.
23:14 Je suis consciente que j'ai fait un choix un peu atypique.
23:18 Pour l'instant, on mène une vie heureuse toutes les deux.
23:21 -Je peux faire un gâteau ?
23:23 -Il nous reste en plus tout.
23:25 Il nous reste du chocolat.
23:27 Ah oui, on n'a pas les deux.
23:28 Ouais.
23:30 ...
23:33 -Il fait de la musique ?
23:34 -La BD est née parce que j'ai rencontré un couple d'amis
23:38 qui m'a dit "En fait, elle est super bien élevée, ta fille.
23:41 "Puis vous avez l'air bien, toutes les deux."
23:44 "Ben oui, pourquoi ?"
23:46 "Non, parce qu'au début, quand tu nous as dit
23:48 "qu'elle avait pas de papa, on s'est dit 'Wa la la''."
23:51 ...
23:53 Ce regard-là de la société, s'il est si complaisant et dur,
23:57 c'est aussi parce que c'est forcément
23:59 qu'on a raté quelque chose.
24:01 Moi, c'est parce que j'ai réussi quelque chose,
24:04 que je suis maman solo. J'ai réussi à faire naisse.
24:07 -Au début, quand tu m'as dit pourquoi,
24:09 il faisait où ?
24:10 -J'aimerais bien qu'on arrête d'associer les mamans solo
24:13 à des victimes.
24:15 ...
24:25 -Cette reconnaissance, elle part aussi
24:28 sur le changement de regard de la société.
24:31 Reconnaissez-nous, et pas uniquement que financièrement,
24:35 mais changez le regard sur nous.
24:37 On ne cherche pas ces situations-là,
24:39 et surtout, ce qui est usant,
24:41 c'est qu'on cherche toutes les solutions pour s'en sortir,
24:44 mais très régulièrement, on a énormément de portes
24:47 qui se ferment à nous.
24:48 ...
24:55 -La lutte contre cette stigmatisation,
24:57 elle viendra par la reconnaissance,
24:59 et c'est pour ça qu'une forme de reconnaissance officielle
25:02 a du poids politique.
25:04 C'est pour ça que la question du statut est importante politiquement.
25:08 -L'idée d'une carte famille monoparentale
25:10 à laquelle on pourrait adjoindre des droits,
25:13 ça pourrait être une bonne façon de consigner les choses,
25:16 une première pierre qui permet d'avancer
25:18 et de faire exister institutionnellement
25:21 les familles monoparentales,
25:22 et qui, en même temps, laisse la liberté
25:25 à celles et à ceux qui ne souhaitent pas, de fait,
25:28 en bénéficier ou rentrer dans cette case,
25:32 eh bien, de ne pas le faire.
25:35 ...
25:45 -Je la trouve vraiment courageuse, ma mère.
25:47 Elle baisse jamais les bras, même,
25:49 quand il y a vraiment des périodes très compliquées.
25:52 En fait, elle fait les deux rôles à la fois,
25:55 et c'est impressionnant.
25:58 Et elle gère très bien.
25:59 -C'est un dit à tout.
26:02 -Oui, c'est un dit.
26:04 -Voilà !
26:05 -En fait, elle a jamais de temps pour elle.
26:08 Et ça, ça me fait un peu mal au coeur,
26:10 parce que j'aimerais bien qu'elle se pose un moment,
26:14 qu'elle se détende, qu'elle fasse une journée avec ses amis.
26:17 Je veux dire, quelque chose comme ça.
26:19 -Elle nous offre tout ce qu'on a besoin.
26:23 ...
26:25 Et elle nous donne à manger.
26:27 Et elle est gentille avec nous.
26:30 ...
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