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Mardi 5 mars 2024, SMART BOURSE reçoit David Benamou (Associé Gérant - Directeur des Investissements, Axiom Alternative Investments)

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00:00 [Musique]
00:10 Le dernier quart d'heure de Smart Bourg, chaque soir c'est le quart d'heure thématique.
00:13 Le thème ce soir c'est celui du secteur bancaire et notamment du secteur européen.
00:18 Du secteur bancaire européen, on en parle avec les spécialistes d'Axiom Alternative Investment
00:22 et son cofondateur, associé et directeur des investissements David Benahou qui est à mes côtés en plateau.
00:27 Bonsoir David.
00:28 Bonsoir.
00:29 Je vais résumer les publications des grandes banques européennes, les résultats au titre de l'exercice 2023.
00:36 En fait le chiffre que j'ai envie de mettre en avant, c'est le montant qui va être reversé aux actionnaires de ces banques européennes en 2024
00:45 au titre des résultats de l'exercice 2023.
00:48 120 milliards de retour aux actionnaires prévus sous forme de dividendes ou de rachats d'actions pour les actionnaires des grandes banques européennes.
00:57 C'est du jamais vu, je crois que même peut-être dans les grandes années pré-crise financière,
01:02 grande crise financière, je crois que ces montants n'avaient jamais été atteints.
01:05 Qu'est-ce que ça nous dit de la solidité et de l'opérationnel du système bancaire européen aujourd'hui David ?
01:12 Alors c'est vrai que le pic c'était 2007 et c'était bien inférieur.
01:17 Bien inférieur aux 120 milliards qui sont annoncés cette année.
01:20 Ce qui s'est passé entre temps c'est que les banques européennes ont eu la crise de 2008, la fameuse,
01:29 et ils s'en sont suivis par une transformation complète du secteur et surtout une énorme recapitalisation du secteur
01:37 qui ont conduit aujourd'hui les banques européennes à un niveau de fonds propres réglementaires très élevé, 15%.
01:44 Ce qui leur permet aujourd'hui sereinement d'opérer.
01:51 Mais évidemment il y a un sujet d'excès de capital d'autant plus que les résultats sont très bons.
01:57 On vit maintenant 11 ou 12 trimestres consécutifs.
02:01 Les revenus sont au plus haut.
02:05 C'est intéressant de voir qu'on est en revenus rapportés au total bilan, le fameux retour sur actif à 0,63%,
02:15 le pic c'est 0,64% en 2007.
02:19 Toutes les références nous ramènent à 2007 évidemment quand on parle du secteur bancaire.
02:23 Ce qui fait qu'effectivement beaucoup de revenus, des résultats très importants, une grosse base de capital au départ.
02:31 Donc effectivement il y a la distribution de dividendes et puis du rachat d'actions.
02:37 Ce qui fait que quand on achète le secteur bancaire aujourd'hui, on sait qu'on a à peu près 28% de rendement cash
02:44 qui va être versé aux actionnaires 2024-2025.
02:50 C'est ce que je disais en introduction tout à l'heure.
02:54 Je vous demanderais mais je ne sais pas où sera le prix des actions bancaires à la fin de l'année.
02:58 En tout cas les actionnaires savent qu'il y aura eu 120 milliards de retour.
03:02 L'autre chiffre qui m'a marqué, je crois que c'est sur les deux derniers exercices,
03:06 ce sont les revenus d'intérêt net qui s'élèvent à 100 milliards d'euros pour les grandes banques européennes.
03:12 C'est-à-dire la différence entre la rémunération qu'elles ont payée pour les dépôts de leurs clients
03:19 et les intérêts qu'elles ont perçus sur les prêts qu'elles ont accordé à l'économie réelle.
03:24 Tout ça fait 100 milliards de revenus sur deux ans.
03:28 La question étant, qu'est-ce qui se passe de ce point de vue-là
03:32 si on imagine que les banques centrales baissent leur taux dans les prochains mois et les prochains trimestres ?
03:37 Alors la marge d'aide d'intérêt, disons pour la simplifier, il y a trois composantes.
03:43 Il y a les revenus qu'on a sur les dépôts, enfin les revenus que le taux d'intérêt que les banques touchent sur les dépôts
03:48 et qu'elles ne reversent pas.
03:49 Oui c'est ça, la différence entre les deux.
03:52 Ensuite vous avez la marge d'intérêt qui est produite sur les crédits
03:56 et puis vous avez une partie de la marge qui résulte de la transformation.
04:01 Donc c'est quand la pente des taux est "pentue", vous prêtez un peu plus long que vous vous refinancez.
04:11 Donc il y a ces trois composantes qui théoriquement alimentent la marge.
04:15 Pendant les dix dernières années, quand les taux étaient négatifs,
04:19 toute la partie marge sur les dépôts avait disparu.
04:22 Donc il y avait de temps en temps un petit peu de pente de taux et puis essentiellement de la marge sur les crédits.
04:27 Donc là depuis deux ans, on a beaucoup de marge sur les dépôts.
04:32 Alors sur la production de crédits, évidemment quand les taux montent fortement, elles s'effondrent.
04:38 Donc il y a beaucoup moins de nouvelles marges sur les dépôts.
04:42 Et comme la pente de taux est inversée, il n'y a non plus de marge sur la pente de taux.
04:47 Donc là on a une case sur trois coché.
04:50 Exactement. Alors évidemment elle est spectaculaire parce qu'on a des taux à 4% donc il y a beaucoup de marge.
04:56 Mais en réalité, ça bénéficie essentiellement à des banques qui sont très sensibles aux taux.
05:05 Donc celles qui ont vraiment tiré leur pin du jeu de ce point de vue là, c'est les banques italiennes, espagnoles.
05:09 Et on a vu les résultats incroyables.
05:11 Parcours incroyable.
05:12 Par exemple, Montepasqui qui aurait dit que Montepasqui ferait des RE supérieurs à 15%.
05:18 La plus vieille banque du monde, toujours "alive".
05:21 Voilà, toujours "alive".
05:23 Donc voilà, c'est vraiment ce qui s'est passé là. Il faut comprendre que c'est essentiellement les dépôts.
05:30 Après, ce qu'on a vu c'est que par exemple pour les résultats des banques un peu plus au nord, notamment nous en France,
05:38 les résultats ne sont pas spectaculaires. Ils sont bons mais ils sont loin d'être extraordinaires.
05:42 Tout ça c'est parce que nous on a d'autres moteurs en France pour la marge d'intérêt.
05:48 Et donc on a besoin plutôt d'un niveau de taux qui va être un peu plus bas, je dirais entre 2 et 3% pour que tout fonctionne bien de notre côté.
05:59 Donc tout ça, ça veut dire deux choses.
06:01 Ça veut dire que d'une part aujourd'hui, oui, il y a beaucoup de marge d'intérêt.
06:08 Mais là, quand les taux vont rebaisser, il y a d'autres moteurs qui vont se mettre en marche.
06:12 La production de crédit et puis probablement la marge de la pente.
06:15 La pente, un peu, oui.
06:17 Donc ça c'est la première chose.
06:18 Et puis la deuxième chose dont il faut se souvenir, c'est que même si quand on pense banque, on a l'impression que tout se ressemble,
06:23 en réalité il y a beaucoup de dispersion sur le secteur.
06:26 Il y a des modèles économiques très différents qui ne vont pas fonctionner pareil.
06:30 Et dans l'avenir, ce qui a moins profité aux banques françaises deviendra plutôt un vent porteur, on peut imaginer, pour les banques françaises,
06:39 ou les modèles des banques françaises et associées ?
06:43 Exactement. Ce qui devrait se passer, c'est que la profitabilité des banques très associables au taux devra être moins impressionnante.
06:50 Et en revanche, nos françaises, BNP, Société Générale, notamment, Crédit Agricole, devraient retrouver un peu plus de vent dans les voiles, entre guillemets,
07:06 parce que ce sont des modèles économiques qui seront plus performants avec un niveau de taux un peu plus bas.
07:14 Ce qui est incroyable, David, et c'est une discussion permanente avec vous chaque fois que vous venez,
07:18 c'est que malgré tout ce qu'on décrit, malgré ce changement de monde, presque, pour le secteur bancaire ces dernières années,
07:27 malgré une dynamique de prix en bourse qui a été quand même bonne, le secteur fait 25% l'an dernier,
07:32 la performance de votre fonds action secteur bancaire est encore même supérieure,
07:38 en termes de valorisation, rien n'a changé.
07:43 Les investisseurs ne veulent pas considérer que quelque chose a changé,
07:48 en tout cas quand il s'agit de valoriser une banque européenne dans l'absolu,
07:53 et je ne parle même pas en relatif par rapport au même secteur aux Etats-Unis.
07:58 Paradoxalement, le truc amusant, c'est que ça a même un peu baissé, puisque le consensus s'est amélioré.
08:05 Là par exemple, post dernier trimestre, on a encore une petite amélioration des perspectives bénéficiaires.
08:13 Mais les valos ne bougent pas, donc du coup elles baissent en relatif,
08:20 mais c'est vrai qu'en fait c'est extrêmement bas, c'est-à-dire qu'on est à 6 fois et quelques des cotes de 50% avec les autres secteurs.
08:29 Très ça ne bouge pas. Est-ce qu'il y a quelque chose qui peut encore déclencher un re-rating de ce secteur,
08:36 ou est-ce qu'il faut s'attacher à l'idée que non, c'est un secteur qui se payera toujours aussi faiblement par rapport aux autres ?
08:44 Je pense qu'il faut encore du temps, parce que finalement on a l'impression,
08:52 quand on discute avec les investisseurs, ils restent très sensibles aux risques de récession.
08:56 Il y a ce vieux réflexe qui dit que quand on a un risque de récession, on vend les banques,
09:02 elles sont encore vues de manière très cyclique.
09:05 Donc les investisseurs ne voient pas tout le travail de mue qui a été fait, poussé par les régulateurs d'ailleurs,
09:13 qui ont littéralement transformé ce secteur.
09:17 Donc il faut probablement encore un petit peu de temps pour réaliser ça.
09:21 Et puis il y a un autre élément, parce que ça c'est plus un aspect risque,
09:26 c'est-à-dire qu'on a peur des défauts, mais les banques n'ont plus du tout le même appétit aux risques.
09:31 Et puis il y a un autre aspect qui est l'aspect revenu,
09:34 c'est-à-dire la soutenabilité des revenus avec des taux qui rebaissent et qui se stabilisent à un niveau plus bas que celui qu'on a aujourd'hui.
09:45 Et ça, probablement, ça va aider le re-rating, mais il faut probablement un peu de temps pour le re-rating.
09:52 Mais bon, comme vous le disiez, en attendant, on est relativement bien payé.
09:55 Ah oui, oui.
09:57 Donc voilà.
09:58 Oui, c'est ça. Il y a toujours une charge de la preuve qui est du côté des banques.
10:01 C'est à dire, c'est toujours aux banques de prouver effectivement qu'elles ont changé
10:04 et qu'elles sont capables d'être moins cycliques qu'avant.
10:08 D'ailleurs, vous me le rappeliez, mais les régulateurs imposent des coussins, des amortisseurs, contracycliques.
10:14 C'est bien l'idée que, justement, on a décyclicisé un peu l'activité bancaire.
10:20 S'il faut qu'on parle des risques, quand même, tout le monde regarde et a refait ses devoirs sur l'exposition des banques
10:28 au secteur immobilier en général et au secteur de l'immobilier commercial en particulier.
10:33 Dans quelle mesure c'est un risque pour le secteur dans son ensemble aujourd'hui, David ?
10:39 Ce n'est pas vraiment un risque pour le secteur dans son ensemble.
10:44 Ce sont des risques qui sont très germaniques et très localisés sur les prêteurs spécialisés.
10:52 C'est à dire qu'on a vraiment deux banques qui sont des prêteurs spécialisés,
10:57 qui ont une grosse partie de leur loan book qui est dédié au commercial real estate.
11:04 Ils se trouvent, c'est Arial Bank notamment et Pound Brief Bank.
11:09 Ce sont deux banques qui ont une exposition d'environ 10% de leur loan book aux Etats-Unis.
11:16 Là, effectivement, aux Etats-Unis, le commercial real estate est en train de souffrir très fortement.
11:25 Il y a des raisons qui sont très locales.
11:29 Le marché est très différent. Il y a des taux de vacances qui sont très importants.
11:35 Il y a un surequipement des bureaux aux Etats-Unis par rapport à l'Europe.
11:40 Il y a plein de facteurs qui sont locaux.
11:43 La particularité de ces banques allemandes, c'est que le niveau de provision n'était pas en ligne avec celle des grandes banques américaines.
11:52 Il y a un travail de remise à niveau des provisions qui est en cours.
12:01 Cela fait un peu des dégâts dans le compte de résultats de ces banques.
12:05 - Mais sortie de ça, vite, il n'y a pas de diffusion de ce risque aujourd'hui.
12:12 Les banques européennes se sont restées disciplinées ?
12:16 - Non seulement disciplinées, mais on en vient à l'appétit au risque.
12:19 Les banques européennes ne peuvent plus prendre un type de risque déraisonnable.
12:30 Elles sont obligées, elles sont contraintes.
12:33 Ce qu'on a vu, c'est tout le développement du marché de la dette privée qui s'est développé parce que les banques ne pouvaient plus prendre...
12:44 - En substitution de la dette bancaire et du crédit bancaire qui était moins présent.
12:50 Merci beaucoup David, merci beaucoup pour cet éclairage sur le secteur bancaire européen qui sort d'une année encore spectaculaire
12:59 avec ses perspectives de retour de cash aux actionnaires pour 2024.
13:04 On verra où seront les cours de bourse en fin d'année, mais l'année 2023 a déjà été une très bonne année pour le secteur bancaire en Europe.
13:12 David Benhamou, cofondateur et directeur des investissements d'Axiom Alternative Investments.
13:16 [Musique]

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