SMART TECH - Éduquer à un usage soutenable de la donnée

  • il y a 7 mois
Pour débuter l’année 2024, les experts du Cercle de la Donnée ont sorti une étude, qui a pour vocation d'interpeller les citoyens mais aussi les pouvoirs publics sur les données numériques. Parmi ces solutions, figure celle consistant à éduquer le public à une pratique soutenable de la donnée. Une proposition qui tire les leçons de certains rendez-vous manqués, dans le passé, entre la loi et le public : loi informatique et libertés, RGPD…
Transcript
00:00 (Générique)
00:06 On termine cette édition avec notre grand rendez-vous sur le monde de la donnée,
00:10 tenu par le Cercle de la Donnée, en particulier aujourd'hui, Mathieu Bourgeois.
00:13 Bonjour Mathieu, avocat vice-président de ce Cercle de la Donnée,
00:17 qui s'apprête à publier une étude consacrée à l'empreinte des données sur le vivant.
00:21 Une douzaine d'experts qui ont mis à jour cette empreinte matérielle des données.
00:26 Cette étude a la vocation à interpeller les citoyens, mais également les pouvoirs publics,
00:31 pour aussi leur proposer des solutions pour infliger cette trajectoire actuelle
00:38 qui vous semble pas tenable sur le long terme.
00:41 Parmi ces propositions, il y a celle-ci,
00:44 éduquer le public à une pratique soutenable de la donnée numérique.
00:47 Vous allez nous expliquer ce que ça veut dire,
00:49 mais peut-être déjà nous parler de ce qui est à l'origine de cette idée.
00:53 Absolument. Bonjour Delphine, bonjour à tous.
00:55 Alors, cette idée, en réalité, elle nous est venue,
01:00 si on remonte à l'origine, de la loi de Gabor.
01:02 Vous savez, cette loi, c'est la loi selon laquelle tout ce qui peut être fait techniquement le sera.
01:07 En réalité, c'est une loi qui, grosso modo, dit "on fait d'abord et on réfléchit éventuellement après".
01:14 Alors, c'est une loi qui est relativement funeste,
01:17 si on voit aujourd'hui certains grands dérèglements qui ne sont plus tenables.
01:21 En réalité, au cercle et dans cette étude, je crois qu'on a été convaincu qu'il faut renverser cette loi.
01:26 Et pour renverser cette loi, il faut d'abord prendre conscience de l'empreinte, de la donnée sur le vivant.
01:30 Et c'est une empreinte qui est préoccupante dans trois dimensions.
01:34 Tout d'abord, sur les ressources naturelles.
01:37 Le numérique consomme beaucoup d'électricité qui entre en conflit avec des consommations électriques
01:41 pour des besoins primaires, se chauffer, se déplacer, se nourrir.
01:44 Deuxièmement, il y a une empreinte sur la biodiversité, puisque le numérique est tout sauf immatériel.
01:49 Il entraîne l'artificialisation des sols, la construction de data centers, la destruction d'espaces naturels.
01:54 Et troisièmement, une empreinte sur la santé humaine, psychique d'abord,
01:57 ça on en parle de plus en plus, les problématiques de dysrégulation émotionnelle notamment et d'addiction,
02:02 mais aussi sur la santé physique avec les troubles du sommeil, les troubles de l'alimentation, la sédentarité.
02:07 Alors, une fois qu'on a bien pris conscience de cette empreinte,
02:12 en réalité, il faut y aller assez fortement sur cette prise de conscience
02:16 parce que ça a été longtemps encouragé par un discours ambiant, l'usage immodéré des services numériques.
02:21 Et donc, cette prise de conscience, pour prendre conscience de cette empreinte,
02:25 rien de tel ne nous a semblé en tout cas que l'éducation des plus jeunes et l'information du plus grand nombre.
02:30 Voilà pourquoi cette seconde proposition, il y en a cinq au total, s'inscrit dans l'étude
02:34 et elle fait partie du volet éducatif de l'étude qui compte deux autres volets,
02:38 un volet économique et un volet service public.
02:40 Alors, cette proposition aussi, je dois le dire, elle essaye de tirer les leçons de certains rendez-vous manqués dans le passé,
02:46 de rencontres entre la législation, entre la loi et le public.
02:52 Et je vais parler du rendez-vous manqué, à mon sens, entre le RGPD, la loi informatique et liberté, et le public.
02:58 Dans les années 70, il y a une élite en France qui a pris conscience de manière très anticipatrice, en fait,
03:03 des risques de l'informatique sur les libertés publiques et sur les droits fondamentaux.
03:07 Il est clair qu'elle était visionnaire parce qu'aujourd'hui, on voit bien que l'informatique menace, effectivement,
03:11 dans certains cas, la liberté et parfois même la démocratie, peut déstabiliser certains points de la démocratie.
03:17 Le problème, c'est que ce qui a manqué, c'est qu'il n'y a pas eu d'instruction, il n'y a pas eu d'adhésion du public.
03:23 Et donc, ça a généré une inconscience, une indifférence et une impunité.
03:26 C'est-à-dire que comme les gens n'ont pas été suffisamment instruits du sujet,
03:30 comme on pourrait le faire pour la sécurité routière, par exemple, ou pour le tabac,
03:33 eh bien, cette loi, elle a semblé au mieux très enquiquinante et au pire, inexistante.
03:39 Et donc, elle a été très peu appliquée, ce qui fait qu'aujourd'hui, le mal est fait en matière de droits fondamentaux
03:43 et la pente à remonter est longue et lourde.
03:46 Donc, on aimerait, là, en l'occurrence, pour l'empreinte sur le vivant, prendre conscience rapidement,
03:50 puisque ça y est, les effets sont palpables, et faire adhérer le public à ce sujet.
03:55 Sachant que, pour terminer, cette proposition ne part pas de rien,
03:58 puisque la loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique, la loi RIN, votée en novembre 2021,
04:04 impose déjà, elle est entrée en vigueur, cette loi, de sensibiliser dès l'école et jusqu'au dernier degré universitaire,
04:10 d'une part à la sobriété numérique, ça c'est pour les consommateurs de numérique,
04:14 et d'autre part, ça c'est pour les fournisseurs de numérique, c'est-à-dire les futurs ingénieurs,
04:18 à l'éco-conception des services numériques.
04:20 Alors, est-ce que vous pouvez nous en dire plus, quand même, sur cette proposition d'une utilisation soutenable de la donnée ?
04:25 Bien sûr. Alors, deux dimensions à cette proposition.
04:29 D'abord, éduquer les ingénieurs, les ingénieurs de demain, à l'éco-conception des services et des produits numériques.
04:36 Alors, cette première dimension, ça consiste à développer une filière numérique soutenable et à organiser sa professionnalisation,
04:44 alors notamment en intégrant un volet numérique responsable dans toutes les formations, notamment la formation ingénieure.
04:50 Deuxièmement, en conditionnant le financement public des formations à l'existence de modules de formation d'éco-conception.
04:57 Troisièmement, en créant une certification éducation numérique pour professionnaliser les métiers reconnus et les sensibiliser à la loi,
05:06 notamment à la loi RIN. Et enfin, en développant une filière, et ça c'est très important,
05:11 une filière de la seconde main pour les objets connectés.
05:13 En fait, je crois que dans le numérique, il faut vraiment mettre le paquet sur la durabilité des équipements.
05:19 C'est très important parce que l'IoT peut générer des milliards de déchets.
05:22 Donc, il ne faut absolument pas que ce soit le cas, ce serait terrible.
05:25 Il faut absolument que l'IoT génère des produits durables qu'on recycle, qu'on répare et qu'on réemploie.
05:30 Donc ça, c'est la première dimension.
05:32 La deuxième dimension, elle s'adresse cette fois-ci à vous, à moi, au grand public en fait.
05:36 C'est de faire de l'éducation à la sobriété numérique une grande cause nationale en l'introduisant littéralement dès l'école primaire,
05:44 peut-être dans le module d'instruction civique, pardon, d'éducation civique, ou bien peut-être d'en faire une matière à part.
05:50 De responsabiliser, ça vous allez être sensibles, la presse sur ce sujet-là.
05:55 Et enfin, d'éduquer à l'usage des écrans dès le plus jeune âge.
05:58 Merci beaucoup Mathieu Bourgeois.
06:00 J'imagine que tu seras largement détaillé dans votre rapport à venir.
06:04 Mathieu Bourgeois, avocat, vice-président du Cercle de la Donnée, était dans Smartech.
06:07 Merci encore.
06:08 Et puis, merci à vous de nous suivre sur la chaîne Bismarck et également sur les plateformes de podcast et sur les réseaux sociaux.
06:14 À très vite pour de nouvelles discussions sur la tech dans Smartech.
06:17 [Musique entraînante diminuant jusqu'au silence]

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