Jacques Pessis reçoit Patrice Romedenne : journaliste à la télévision, il publie son premier roman inspire par un fait authentique, un « saut de la liberté entre Berlin Est et Berlin Ouest en 1961 (Plon).
Découvrez plusieurs dates-clefs de la vie des plus grands artistes, auteurs et personnalités aux côtés de Jacques Pessis.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry
________________________________________
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/
________________________________________
Nous suivre sur les réseaux sociaux
▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
☀️ Et pour plus de vidéos des clefs d’une vie : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDQVk_MxJ_jFc3Az4Aqy_giC
##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2024-01-10##
Découvrez plusieurs dates-clefs de la vie des plus grands artistes, auteurs et personnalités aux côtés de Jacques Pessis.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry
________________________________________
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/
________________________________________
Nous suivre sur les réseaux sociaux
▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
☀️ Et pour plus de vidéos des clefs d’une vie : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDQVk_MxJ_jFc3Az4Aqy_giC
##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2024-01-10##
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessy.
00:03 Sud Radio, les clés d'une vie, celle de mon invité.
00:06 Être journaliste sur plusieurs chaînes ne vous a jamais empêché de défendre les libertés.
00:11 Le romancier que vous devenez le démontre une fois de plus en racontant un saut que nous allons évoquer
00:17 après avoir fait un bond dans votre passé.
00:19 Bonjour Patrice Romden.
00:20 Bonjour Jacques et merci de votre invitation.
00:23 Écoutez, je suis ravi de vous accueillir parce que vous avez fait tellement de choses dans votre carrière.
00:27 Le principe des clés d'une vie c'est d'évoquer un parcours donc il y a une matière très riche.
00:31 Et on le fait à l'occasion de la sortie de ce livre passionnant, "Le saut vers la liberté"
00:36 chez Plon que nous allons évoquer tous les deux tranquillement tout à l'heure
00:39 après avoir évoqué votre parcours.
00:41 Et la première date que j'ai trouvée, j'en ai trouvé quatre pour vous,
00:45 c'est le 12 avril 1992, un jour hélas dramatique pour la télévision.
00:50 [Musique]
00:54 Alors ce qui est étonnant c'est que vous évoquez sur TF1 les disparitions de La 5 ce jour-là au journal de 13 heures.
00:59 Oui, on reconnaît là ainsi parlé Zara Toustra.
01:03 C'était le générique du journal télévisé de La 5 à l'époque,
01:09 présenté alternativement par Jean-Claude Bourré, Guillaume Durand, Gilles Schneider, Béatrice Schönberg.
01:16 Et effectivement le 12 avril 1992, c'est le dernier jour de La 5.
01:24 Et je me rappelle effectivement cette soirée qui était extrêmement émouvante
01:28 parce que la rédaction de La 5 était une rédaction extrêmement solidaire,
01:33 qui l'était devenue encore plus parce qu'elle avait connu le deuil de la disparition de Jean-Louis Calderon
01:39 qui était un immense grand reporter mort à Bucarest pendant la révolution roumaine.
01:45 Et c'était une rédaction où on rigolait toute la journée, on se marrait.
01:51 Et je ne suis pas sûr qu'actuellement dans toutes les rédactions, quelles qu'elles soient en France,
01:56 on se marre autant qu'on a pu se marrer à l'époque à La 5.
01:59 Je crains hélas que vous ayez raison.
02:01 Alors il se trouve que pendant trois ans vous avez fait des reportages très variés.
02:05 Le premier je crois que c'était sur le surf.
02:07 Alors c'est fort possible, mais je vous avoue avoir oublié quel était mon premier reportage.
02:13 En fait moi j'étais à l'époque un jeune journaliste, j'avais été fraîchement diplômé,
02:18 j'étais passé rapidement par France Inter et France Info à la création de la radio.
02:23 Et Fréquences Nord aussi.
02:25 Fréquences Nord aussi tout en étant étudiant à Lille sous la direction à l'époque de deux garçons
02:30 qui s'appelaient pour l'un, je parle au passé, Jean-Pierre Mortagne, le patron d'Esports,
02:35 et pour l'autre Jean Collin qui était le patron de la rédaction.
02:38 Et moi ensuite, après avoir passé un an et demi au Canada comme journaliste coopérant,
02:46 j'avais effectivement atterri à la 5 où j'étais logé à l'enceinte de tous les jeunes journalistes
02:50 qui composaient cette rédaction.
02:51 C'est-à-dire qu'effectivement un jour je pouvais faire un reportage sur le surf,
02:54 le lendemain on m'envoyait à l'Assemblée à la salle des 4 colonnes,
02:57 le troisième jour j'allais faire un faute-nouvelle,
02:59 et le quatrième jour on m'envoyait je ne sais où.
03:02 C'est vrai qu'il y avait un ou deux reportages à faire par jour,
03:05 et comme la rédaction était assez resserrée,
03:07 les jeunes journalistes que nous étions avaient la possibilité de s'exprimer une voire deux fois par jour.
03:13 Oui, avec des sujets qui sont parfois toujours d'actualité.
03:16 Le droit des péages sur les plages, on n'en parle plus, ça a un vrai effet aussi,
03:19 mais en revanche, les problèmes dans les cités à Mantes-la-Jolie
03:22 ou l'évolution des migrations, vous en parliez déjà Patrice Romden.
03:25 On en parlait déjà parce que les banlieues, c'était déjà un sujet.
03:29 Je me rappelle avoir tourné à Mantes-la-Jolie,
03:31 je me rappelle avoir tourné à la Courneuve,
03:33 je me rappelle même avoir tourné dans un quartier qui s'appelle Forêt,
03:37 qui est dans la banlieue de Bruxelles.
03:40 Et j'en parle parce qu'il y a deux, trois ans il a encore flambé ce quartier.
03:44 Donc vous voyez, près de 30 ans après,
03:46 on a l'impression que rien n'a été résolu dans les banlieues.
03:49 Je dirais même que la situation souvent a empiré.
03:52 Et puis il y a des sujets qu'on ne peut plus imaginer aujourd'hui,
03:54 que vous avez traités comme une grève des employés de France Télécom
03:57 qui refusent la privatisation du téléphone.
03:59 Alors ça, ça ne figure pas parmi mes souvenirs, mais je vous crois sûrement pas.
04:04 Ah, j'ai vu le reportage.
04:05 Si vous dites que je l'ai fait, je l'ai effectivement sans doute fait,
04:08 mais encore une fois, c'est parce qu'on faisait des sujets extrêmement variés.
04:12 Et c'était la force aussi de cette rédaction
04:14 que de donner à de jeunes journalistes la possibilité,
04:17 le matin, de faire de la politique, l'après-midi,
04:19 de faire ce qu'on appelait une cabine, un commentaire sur la politique étrangère,
04:23 le troisième jour de faire du sport et le quatrième jour de faire un fait divers.
04:27 Et c'est un privilège rare que de pouvoir être multi-cartes pour un journaliste.
04:31 Oui, en tout cas, moi, c'est quelque chose que j'ai toujours apprécié.
04:35 Pouvoir faire de la télé, pouvoir faire de temps en temps de la radio,
04:39 pouvoir faire, pourquoi pas, de la presse écrite de temps en temps.
04:42 Et puis jusqu'à se lancer dans l'édition.
04:44 Il y a quand même une personne que je n'ai pas citée,
04:47 c'est Patrice Duhamel, qui était patron de cette rédaction de La Cinq.
04:50 Et il avait eu du flair, il avait quand même monté une rédac avec des gens
04:53 qui tous ensuite ont fait plutôt de belles carrières.
04:57 Exactement. Et alors, il y avait aussi à travers ces films, quand on les voit,
05:01 on voit l'évolution de la société depuis 1990.
05:05 Alors, c'est vrai que la télévision,
05:10 contrairement souvent aux gens, a de la mémoire.
05:12 Elle a de la mémoire parce que l'image, elle se garde.
05:15 Et c'est vrai que quand on regarde un petit peu les sujets qui se faisaient à l'époque
05:19 et les sujets qui se font maintenant, on voit effectivement une évolution de la société.
05:25 Un détail, mais c'est vrai que c'est parlant. Les gens qui fument, par exemple.
05:29 Vous en voyiez beaucoup à l'époque dans les reportages ou même sur les plateaux télé.
05:35 Aujourd'hui, dès qu'il y a une cigarette qui traîne dans le champ,
05:38 on dit non, est-ce que vous pouvez vous pousser ou éteindre votre cigarette?
05:41 Mais ça ne va pas être possible.
05:42 Alors, il se trouve aussi que les moyens de tournage ou de montage
05:46 n'étaient pas ceux d'aujourd'hui, Patrice Romden.
05:48 Oui, alors là, on s'est beaucoup allégé et ça a fait quand même du bien.
05:52 Je me rappelle mes tout premiers sujets à l'école de journalisme.
05:57 Il fallait que nous accompagne un gars qui, au bout d'une sangle,
06:02 tenait une espèce de magnétoscope qui devait faire 70 centimètres sur 40.
06:07 Enfin, c'était un truc, il fallait une personne déjà à plein temps pour porter l'appareil.
06:11 Ensuite, je me rappelle les reportages à la 5, où on était des équipes plutôt légères.
06:16 Il y a eu l'avènement de ce qu'on a appelé la bêta cam,
06:19 cette fameuse caméra qui coûtait à l'époque l'équivalent de,
06:23 on va dire de 30, 35 000 euros aujourd'hui.
06:26 Pour parler en euros, puisque j'avais le prix en francs dans la tête.
06:29 Et c'était une caméra qui prenait en même temps le son.
06:35 C'était une révolution.
06:38 Aujourd'hui, on travaille avec des outils encore plus petits,
06:41 voire parfois avec des smartphones, des appareils photos qui font de l'image.
06:45 Et le pire, c'est que la qualité ne s'est pas dégradée, au contraire.
06:49 C'est très pixelisé, on arrive à avoir des choses qui sont d'une qualité franchement étonnante.
06:55 Mais ça a tué quelques boulots aussi.
06:56 Le boulot de preneur de son, il y en a de moins en moins.
06:59 Le boulot parfois même de journaliste reporter d'image
07:03 risque d'être atteint à un moment ou à un autre
07:06 parce qu'il n'arrive que des rédacteurs dont c'est a priori pas le métier
07:09 fassent aussi leurs propres images.
07:11 Et moi, je me souviens du temps pour faire un reportage sur Carlos Bois Saint-Germain.
07:15 J'ai vu débarquer deux camions de l'ORTF, des câbles partout.
07:20 C'était infernal. On a pratiquement bloqué le quartier.
07:22 En toute discrétion, parce que là, vous parlez de Carlos le terroriste.
07:25 Non, non, le chanteur.
07:25 Ah, le chanteur, pardon.
07:26 Parce que s'il était question d'arrêter le terrorisme.
07:29 Non, je dis ça parce que je ne sais pas si vous vous rappelez,
07:31 mais la première fois que Jacques Mestrine a failli être arrêté,
07:37 il était dans un immeuble, il a regardé par la fenêtre
07:40 et il a vu passer une voiture d'RTL.
07:42 RTL, à l'époque, écoutait les fréquences de la police
07:44 et c'est là qu'il a compris qu'il risquait d'être arrêté et il s'est sauvé.
07:48 Et c'est comme ça qu'il a échappé à la police.
07:49 Oui, et Jacques Mestrine, qui était le copain d'enfance de Jean-Jacques Debout,
07:53 ils faisaient les choeurs ensemble dans une école.
07:56 Et c'est là où Jacques Mestrine a commis son premier arsenal.
07:59 Il a volé l'argent de la quête à la fin de la messe.
08:02 D'accord, ça, c'est une information que je n'avais pas.
08:05 Pas plus qu'il n'était pas déguisé en Bécassine dans les spectacles de Chantal Gouy.
08:09 Pas vraiment.
08:10 Alors, il se trouve, Patrice Romden, que vous êtes né à Meknes, au Maroc.
08:14 Meknes, beaucoup de gens connaissent parce que les premières aventures
08:16 de Michel Tanguy et la Verdure, les Chevaliers du ciel,
08:20 se sont déroulées à la base de Meknes.
08:22 Mais il y avait une base militaire, effectivement.
08:24 Et c'est une station touristique.
08:26 Oui, alors il faut reconnaître que Meknes souffre de la proximité de Fès,
08:30 qui est à 60 kilomètres.
08:32 Et Fès propose la plus belle médina du monde arabe.
08:36 Donc le vrai spot touristique, je dirais, c'est Fès.
08:39 Mais quand on est à Rabat, la capitale du Maroc,
08:42 et qu'on va à Fès, qui se trouve à 200 kilomètres,
08:45 il faut s'arrêter à Meknes, qui est à 146 kilomètres de Rabat.
08:49 Pourquoi ? Parce que Meknes est une ville splendide.
08:54 Notamment grâce à ses remparts.
08:57 Elle a des remparts incomparables.
08:58 Et ses remparts, ils ont notamment été créés sous le sultan Moulaï Ismail,
09:04 qui était le contemporain de Louis XIV.
09:07 Et c'est lui qui avait fait de Meknes sa ville d'élection.
09:11 Et il a laissé beaucoup de traces architecturales de son époque là-bas.
09:16 C'est là où vous avez grandi, Patrice Romden.
09:18 C'est là que j'ai grandi, que je suis né, que j'ai grandi pendant 14 ans.
09:23 Et que j'aime retourner régulièrement pour y retrouver ou des amis,
09:28 ou des ambiances, ou une atmosphère.
09:31 Même si la ville a évidemment énormément changé.
09:34 Mais c'est vrai que j'ai grandi dans un monde, on va dire,
09:37 multiculturel, déjà.
09:40 Parce qu'il y avait des Marocains, il y avait des Français.
09:42 Et puis il y avait, alors, là-bas on disait les Marocains, les Français et les Juifs.
09:47 Ce qui est idiot, parce que les Juifs pouvaient être parfois Marocains
09:50 et parfois ils étaient de nationalité française.
09:52 Mais il y avait trois communautés, on les désignait comme ça,
09:56 et ces trois communautés vivaient vraiment en harmonie.
09:58 Et vous êtes venu en France pour faire une école de journalisme ?
10:02 Alors un petit peu avant, en fait, j'ai suivi mes parents qui,
10:05 comment dirais-je, étaient enseignants.
10:07 Et dans les années 70, je ne vais pas rentrer dans le détail,
10:10 mais il y a eu ce qu'on appelle un grand mouvement de marocanisation au Maroc,
10:13 symbolisé à l'époque par la marche verte,
10:16 symbolisé par aussi la nationalisation de tout un tas de business.
10:19 Et mes parents qui étaient enseignants,
10:21 alors qu'ils avaient fait l'essentiel de leur carrière au Maroc,
10:24 ma mère était même née sur place,
10:27 ont été invités à aller terminer leur carrière en France.
10:31 Et moi j'avais donc 14-15 ans et j'étais dans leur bagage.
10:35 Et c'est quelques années après que j'ai fait l'école de journalisme.
10:37 Vous aviez envie de faire ce métier ?
10:39 Alors oui, quand on me demande "Pourquoi tu es devenu journaliste ?"
10:43 j'ai une explication qui va vous amuser, mais pourtant est vraie.
10:47 Vous savez, quand j'étais petit, je rêvais d'être Michel Platini ou Dominique Rocheteau.
10:53 Et j'ai très vite compris que ça serait compliqué,
10:56 parce que je n'avais pas le niveau,
10:58 même si j'avais mon petit niveau technique en football.
10:59 Et je me suis dit "Il faudrait que tu deviennes journaliste de sport,
11:03 comme ça tu pourras aller dans les vestiaires,
11:05 interroger les joueurs et tu resteras dans ce milieu".
11:07 Donc initialement, ce qui me donne l'envie de faire ce métier,
11:11 c'est le football et le sport.
11:13 Et puis après, je fais donc des études de journalisme,
11:15 mais en faisant ces études, je me suis aperçu qu'il y avait,
11:17 même si j'adore toujours ça,
11:19 qu'il y avait d'autres choses que le sport et le foot dans la vie.
11:22 Et je me suis intéressé à d'autres sujets.
11:23 Oui, mais en même temps, vous avez fait l'enchaînement de la prochaine date,
11:26 le 24 juillet 1998.
11:29 A tout de suite sur Sud Radio avec Patrice Romden.
11:31 Sud Radio, les clés d'une vie. Jacques Pessis.
11:35 Sud Radio, les clés d'une vie. Mon invité Patrice Romden.
11:38 Alors on vous connaît forcément un jour ou l'autre,
11:40 parce qu'on vous a vu à la télévision, dans différentes émissions.
11:43 Vous avez absolument tout fait.
11:45 Donc ça, on va en reparler.
11:47 Il y a ce livre "Le saut vers la liberté" chez Plon,
11:50 qui est un roman inspiré d'une histoire vraie.
11:52 On va aussi en reparler.
11:54 Et vous avez parlé de football tout à l'heure.
11:55 Et ça tombe bien parce qu'il y a une date importante dans votre vie.
11:57 C'est le 24 juillet 1998.
12:00 Alors, cette chanson a une histoire, je ne sais pas si vous la connaissez.
12:08 En fait, elle avait été malade, Gloria Gaynor.
12:11 Et donc, elle a écrit "I will survive" pour se remettre de cette maladie.
12:15 C'était une phase B au départ.
12:16 Personne n'y croyait.
12:17 Et c'est devenu une chanson officielle.
12:19 Et c'est devenu une chanson officielle parce que je crois qu'un footballeur
12:22 la reprenait souvent encore dans les entraînements.
12:24 C'est exactement ça.
12:25 Il y avait, je ne sais plus quel footballeur dans l'équipe de 98.
12:28 Vincent Candela.
12:29 Ben voilà, Vincent Candela,
12:30 donc l'un des arrières de l'équipe de France à l'époque.
12:32 Il ne jouait pas tous les matchs.
12:33 Il était souvent remplaçant,
12:35 mais il faisait partie du groupe des 23, comme l'on dit à l'époque.
12:38 Et Vincent Candela l'a passé dans les vestiaires,
12:40 notamment à la mi-temps pour essayer de donner un peu de courage
12:43 à tous ses coéquipiers.
12:44 Et lors de la victoire finale, alors la victoire est intervenue le 12 juillet.
12:48 Le 12 juillet de 1998.
12:49 Mais vous me dites 24 juillet, peut-être pour la sortie d'un livre.
12:51 Oui, parce que justement, c'est une performance.
12:53 Le 12 juillet, la France gagne.
12:55 Le 24 juillet, le livre racontant cette histoire est déjà dans les librairies.
12:59 Et c'est votre livre.
13:00 Et 1, 2, 3, 0.
13:01 Alors là, c'est l'histoire d'une intuition qui s'est avérée bonne.
13:05 C'est à dire que.
13:07 À l'époque, même si je ne sais pas si on
13:11 repense à ce qui s'est passé avant cette victoire de la France en Coupe du Monde.
13:15 Aimé Jacquet avait été très critiqué.
13:18 L'équipe de France ne faisait peur au fond qu'à ses supporters,
13:20 pas tellement à ses adversaires.
13:21 Moi-même, j'avais des doutes, mais je savais.
13:25 Je savais pour avoir vécu ça en 94 aux Etats-Unis,
13:28 que dès que l'événement se déclencherait,
13:30 il se passerait quelque chose dans ce pays.
13:32 C'était instinctif.
13:33 Oui, j'avais vu.
13:35 Vous savez, quatre ans auparavant, j'étais aux Etats-Unis
13:37 pour couvrir la Coupe du Monde de foot pour France Télévisions.
13:41 Et j'avais, c'est une de mes plus belles missions,
13:43 parce que j'avais carte blanche.
13:44 On me disait, tu nous envoies un sujet tous les jours.
13:47 Donc je sillonnais le pays.
13:48 Et deux jours avant la Coupe du Monde,
13:49 je trouvais qu'on était dans un pays où rien n'annonçait
13:51 qu'il y aurait une Coupe du Monde.
13:53 Et puis, tout à coup, l'événement est arrivé et le pays,
13:58 je dirais pas a pris feu, mais le pays, tout à coup, est entré en ébullition.
14:02 J'avais vu ça aussi en 90 au Cameroun.
14:05 J'avais vu comment les passions sportives peuvent mettre le feu à un pays.
14:09 Parce que le Cameroun, en 90, avait été quart de finaliste de la Coupe du Monde.
14:12 Donc j'avais l'intuition qu'en France, ce serait une grande fête
14:15 et que malgré tout ce qu'on disait, l'équipe de France
14:18 avait de solides arguments à faire valoir.
14:20 J'ai été donc aller voir des éditeurs en leur disant,
14:23 je vous propose un journal quotidien de la France à l'heure du Mondial
14:27 et le jour de la finale, je vous rends tout ce que j'ai écrit
14:33 et on le publie dans la foulée.
14:36 Le livre devait s'appeler "Carnet de balles", B.A. de Z.L.E.S. initialement.
14:40 Mais quand il y a eu la victoire finale, l'éditeur m'a appelé et m'a dit,
14:43 je ne vous demande même pas votre avis, le livre s'appellera "1 et 2 et 3 et 0"
14:47 et pour la couverture, on met "Jacquet, je ne vous demande pas votre avis non plus".
14:50 Et il se trouve que vous avez tenu pendant 100 jours le journal de bord
14:55 alors que personne n'y croyait.
14:56 Eh oui, j'ai eu cette intuition et ça m'a plutôt réussi.
15:00 Ce qui m'intéressait aussi, c'était de parler de sport,
15:02 mais c'était de parler de l'événement dans le contexte,
15:05 de parler du pays dans le contexte de l'événement.
15:09 C'est pour ça que dans ce livre, il y a aussi bien des histoires purement sportives
15:12 qui concernent Jacquet, les joueurs, les autres équipes,
15:14 mais aussi des choses politiques sur les prises de parole des uns et des autres.
15:19 Déjà, on parlait du VAR à l'époque avec Philippe Seguin
15:22 qui était un passionné de foot et qui ne voulait pas en entendre parler.
15:26 J'avais envoyé le livre d'ailleurs et il m'avait gentiment répondu,
15:29 "J'ai adoré votre livre, même si nous sommes toujours en désaccord sur le VAR."
15:32 J'ai gardé le petit mot qu'il m'avait envoyé à l'époque.
15:36 Je me rappelle, j'avais parlé aussi de l'actualité syndicale
15:40 parce que Blondel, à l'époque patron de FO,
15:43 menaçait d'une grève des transports pendant le Mondial.
15:48 Et moyennant quoi, il avait obtenu à peu près tout ce qu'il voulait
15:50 parce qu'il ne fallait surtout pas qu'il y ait une grève à ce moment-là en 98 pendant le Mondial.
15:54 Il se trouve que vous avez tu ce journal en allant voir les joueurs,
15:57 en allant voir les entraînements.
15:58 Alors je vais vous décevoir, mais j'ai presque tenu ce journal,
16:03 pardon de le dire, mais en direct de mon bureau.
16:07 Alors, évidemment, je lisais énormément tout ce qui se faisait,
16:12 mais il y avait une telle profusion d'informations qu'il était impossible de tout lire.
16:17 Et j'avais aussi pas mal de correspondants, des copains qui étaient sur le terrain,
16:21 certains auprès de l'équipe de France,
16:24 qui me disaient ce qu'ils avaient vu ou entendu
16:26 et me le disaient d'autant plus volontiers que parfois ils ne pouvaient pas le mettre dans leur sujet.
16:31 Donc finalement, je récupérais souvent du caviar, du miel, du nectar
16:34 qu'eux ne pouvaient pas mettre parce que sinon ils se grillaient ou ils allaient se fâcher avec X et Y.
16:38 Mais moi, je pouvais parler ensuite de ça en décalage dans le livre
16:42 sans pour autant dire d'où ça venait.
16:44 – Oui, en même temps, vous avez vu quelques matchs ?
16:46 – Comment ? – Vous avez vu quelques ?
16:47 – Oui, j'avais vu des matchs, je crois, de mémoire j'en ai vu 4.
16:51 Je me rappelle 2 plus particulièrement.
16:54 Celui au Stade de France où Zidane se fait expulser contre l'Arabie Saoudite
16:59 et évidemment la finale.
17:02 La finale, j'ai eu ma place pour la finale à peu près 2 heures avant.
17:06 Je dois rendre hommage à quelqu'un que les téléspectateurs et les auditeurs des radios connaissent peut-être
17:11 qui s'appelle Mickaël Darmon, c'est un bon frère journaliste.
17:14 Et c'est Mickaël avec qui je travaillais à l'époque à France Télé
17:17 qui m'appelle à 19h et me dit "Patrice, rendez-vous devant le stade,
17:21 j'ai réussi à trouver une place".
17:23 Il avait trouvé une place pour son pote Patrice
17:25 et je peux vous dire que je lui en ai été éternellement reconnaissant.
17:28 – Et l'ambiance ce soir-là sur le stade ?
17:30 – L'ambiance ce soir-là était…
17:35 Rien que d'y repenser, j'ai des larmes qui me montent aux yeux.
17:39 Non, non, mais c'était…
17:40 Vous savez quand on est passionné de foot, surtout des gens de ma génération,
17:46 et qu'on a été gamins, adolescents dans les années 70-80,
17:51 ça a été dur, parce qu'on était en tant que supporters en permanence humiliés.
17:57 Jusqu'à la défaite de Saint-Etienne, une finale de Ligue des champions
18:01 où on perd contre le Bayern de Munich 1-0.
18:04 C'est-à-dire que quand on aimait le foot et qu'on était gamins dans les années 70,
18:08 on ne gagnait jamais, et qu'on était français bien sûr,
18:10 on ne gagnait jamais, c'était dur.
18:12 Et puis un jour, il s'est passé quelque chose,
18:14 Michel Hidalgo est arrivé avec une génération de joueurs exceptionnels,
18:17 notamment Michel Platini.
18:19 Et puis il y a eu une qualification en 78 avec une élimination en face de poule,
18:23 et surtout l'embellie à partir de 82, le fameux match de Séville,
18:28 la victoire de l'Euro en 84.
18:29 Et je dirais que cette génération a fait du bien à tous les gamins que nous étions,
18:33 et surtout, si elle n'avait pas existé,
18:35 je pense qu'elle n'aurait pas inculqué à la France cette culture de la gagne
18:39 qui lui a permis, des années plus tard, avec la génération Deschamps, Zidane, etc.,
18:44 de gagner la Coupe du monde.
18:47 Et donc l'ambiance ce soir-là, c'était…
18:48 Alors ce soir-là, c'est une ambiance extraordinaire.
18:51 Bon, on a beaucoup disserté à l'époque sur la France black, blanc, beur,
18:55 alors ça a duré ce que ça a duré, mais objectivement,
18:58 c'était… nous étions tous debout sur la plus haute marche
19:03 du podium de l'identité collective, quoi.
19:05 C'était un bonheur sans nom.
19:07 Et je me rappelle avoir quitté en scooter le Stade de France,
19:10 avec d'ailleurs Mickaël Darmon derrière moi, là, sur le siège.
19:14 On a mis 1h20 pour arriver à Paris, pour faire 15-20 km,
19:18 en passant par le grand périph', vous savez, celui à 86,
19:21 parce que tout était bloqué.
19:23 Et j'ai un souvenir, parce que, étant rentré à 2-3h du matin,
19:28 je m'étais mis à ma table de travail à France Télévisions,
19:31 à l'époque France 2 était Avenue Montaigne.
19:33 Je me rappelle, il faisait chaud, j'avais ouvert la fenêtre
19:36 et j'avais écrit dans la foulée, parce que je voulais faire à chaud,
19:40 pour le fameux bouquin que je devais rendre deux jours après.
19:42 Et j'oublierai jamais, un gars était passé sous la fenêtre,
19:47 dans l'avenue, Avenue Montaigne, et il était là,
19:51 et il chantait la marseillaise tout seul.
19:53 Je crois que je n'ai jamais revu ça.
19:56 - Alors, en plus, le sport, ça vous intéresse tellement
19:58 que quand on voit vos reportages sur la 5,
20:00 vous avez aussi fait du tennis, de la boxe,
20:03 les Jeux Olympiques d'Alberville,
20:04 c'était vraiment au-delà du football, Spasso Chromeden.
20:07 - Oui, j'aimais toute l'actu.
20:11 C'est vrai que j'ai une passion particulière pour le football,
20:13 mais en fait, j'aime les grands événements.
20:15 Il n'y a jamais autant de passion que lors des grands événements de sport.
20:19 Je me rappelle avoir été à Limoges aussi,
20:21 quand Limoges a été couronné champion d'Europe de basket.
20:24 Basket, ce n'était pas forcément mon sport de prédilection,
20:26 mais ce que j'aime, ce sont les ambiances populaires autour du sport.
20:31 - Et vous avez fait, quelques temps plus tard,
20:32 un autre livre très émouvant sur Laurent Fignon, Patrice Omdène.
20:35 - Oui, alors ça, je l'ai fait...
20:38 En fait, c'est un livre qui est signé de Valérie Fignon,
20:42 la veuve de Laurent Fignon, qui est une amie
20:45 et qui voulait depuis des années...
20:47 À qui on avait demandé des éditeurs,
20:48 il avait dit, il faut écrire un livre sur le combat de Laurent Fignon contre le cancer.
20:52 Et elle ne se sentait pas de le faire.
20:54 Et comme on est amis, un jour, elle m'a dit,
20:56 mais pourquoi tu ne le ferais pas avec moi ?
20:58 Et on a même impliqué dans l'aventure Michel Cymès,
21:01 qui est aussi un ami de Valérie Fignon,
21:04 pour avoir un point de vue médical un petit peu sur le livre.
21:06 C'est effectivement un livre assez émouvant
21:09 et je ne dirais pas que ça a évité à Valérie Fignon
21:15 quelques séances chez le psy,
21:16 mais elle m'a toujours dit que ça lui avait fait
21:18 beaucoup de bien, finalement, de pouvoir accoucher de cette histoire
21:23 et raconter ce combat qu'elle a mené à côté de lui
21:26 et ce combat qui, malheureusement, a été perdu.
21:29 - C'est tout à votre honneur.
21:30 Et puis, vous avez évoqué quelqu'un qu'on va évoquer à travers une autre date.
21:34 C'est Michel Cymès.
21:35 Et à travers la date du 31 octobre 2018.
21:38 A tout de suite sur Sud Radio avec Patrice Romden.
21:41 - Sud Radio, les clés d'une vie.
21:43 Jacques Pessis.
21:44 - Sud Radio, les clés d'une vie.
21:45 Mon invité Patrice Romden, nous parlerons tout à l'heure de ce roman,
21:49 "Le saut vers la liberté" chez Plon,
21:51 qui est plus qu'un roman, qui est inspiré d'une histoire vraie.
21:53 Votre premier roman.
21:55 Là, on revient sur votre carrière télévisuelle.
21:56 On a expliqué vos débuts sur la 5,
21:59 votre passion pour le sport et ce fameux livre sur la Coupe du monde 98.
22:04 Et là, j'ai trouvé une date intéressante et inattendue pour vous
22:08 et qui montre votre côté multi-cartes.
22:10 Le 31 octobre 2018,
22:12 premier crowning dans l'émission de Michel Cymès.
22:16 Ça ne sortira pas d'ici.
22:18 - Alors, effectivement, c'est une émission
22:22 qui avait été imaginée par Michel,
22:25 diffusée sur France 2, si mes souvenirs sont bons.
22:28 - Tout à fait.
22:29 - Et l'idée, en fait, c'était de
22:34 faire une version télévisée de l'émission radio
22:38 que nous faisions tous les dimanches sur RTL.
22:45 Voilà, c'est de parler de santé de manière un petit peu décontractée.
22:49 Et cette émission, donc, nous en avons fait deux ou trois numéros.
22:55 Et on va dire que, enfin, oui, on peut parler d'échec au sens où,
23:00 finalement, les, comment dire, les...
23:02 - Les audiences.
23:03 - Non, c'est pas ça, les chroniqueurs que nous étions.
23:05 Nous étions deux, Cédric Baudou et moi-même.
23:07 Un jour, on nous a dit, non, mais écoutez, les gars,
23:08 on va faire l'émission sans vous.
23:12 Voilà, donc l'émission a continué à vivre
23:14 à la durée d'une ou deux saisons,
23:15 présentée par Michel Cymès.
23:17 Mais moi, je n'ai fait que trois ou quatre numéros
23:21 en compagnie des autres chroniqueurs.
23:22 Mais ce qui est intéressant, c'est qu'en fait,
23:25 ça fait partie des multiples projets
23:29 que nous avons menés ensemble,
23:31 Michel Cymès et moi-même, souvent d'ailleurs à son initiative,
23:35 parce qu'il est quand même leader dans cette affaire.
23:36 Michel est très connu, très demandé.
23:38 Donc, on lui demande souvent des émissions.
23:39 Il a eu, et parce qu'on s'entend bien
23:42 et parce qu'on travaille bien ensemble,
23:43 souvent la générosité de m'impliquer dans ses aventures.
23:46 Et c'est pour ça qu'on a fait, notamment pendant des années,
23:49 sur une autre radio, on va dire, le dimanche matin,
23:54 une émission sur la santé où on parlait santé,
23:56 bien-être et surtout, on se marrait, quoi,
23:58 parce que parler de santé et de tous les petits tracas
24:01 qu'on peut avoir, ça peut être minant parfois.
24:04 Donc, si on le fait en rigolant,
24:05 avec l'humour qu'on lui connaît, ça passe beaucoup mieux.
24:08 Et comment est née cette rencontre avec Michel Cymès, Patrice Robben ?
24:11 Un peu par hasard.
24:12 Nous avons un ami commun qui est un ancien joueur de rugby.
24:16 Je vais le citer. Il s'appelle Christophe Brun.
24:18 C'est un gars qui a joué à l'Aviron Bayonet
24:22 et au Racing Club de France, au rugby.
24:26 Sud Radio, la station du rugby,
24:27 donc on connaît forcément au plus haut niveau.
24:30 Et je connaissais Christophe.
24:32 Et Christophe, un jour, me dit "tu travailles à la télé,
24:34 donc tu dois connaître Michel Cymès".
24:35 Je dis "bah non, on ne s'est jamais croisés".
24:37 Curieusement, il me dit "mais il faut absolument que tu le connaisses".
24:39 Et il nous réunit. Et c'est vrai que ça a matché tout de suite.
24:42 Même humour, même centre d'intérêt.
24:45 Pas d'accord sur tout, mais beaucoup de tolérance
24:48 et de capacité d'écoute d'un côté et de l'autre.
24:51 Et très rapidement, Michel m'a dit
24:53 "mais tu pourrais m'aider à écrire certaines chroniques
24:57 ou tu pourrais m'aider à écrire certains livres".
25:00 Donc on a commencé à signer des livres ensemble.
25:02 Il écrivait, parfois je réécrivais, parfois je touchais à rien
25:04 parce que Michel a cette capacité d'être assez polyvalent
25:07 et de pouvoir écrire de manière très intéressante
25:12 au sens où il écrit comme il parle.
25:14 Donc il se fait très, très bien comprendre.
25:16 Et on a du coup monté des émissions ensemble.
25:20 On a fait beaucoup de bouquins ensemble.
25:22 Et si j'osais, je vous dirais qu'on travaille aussi en ce moment
25:26 peut-être sur un spectacle.
25:28 On fera peut-être un jour ensemble, en tout cas dans l'écriture.
25:31 Mais pour l'instant, on n'en est qu'aux prémices de l'affaire.
25:34 Il se trouve que les émissions médicales à la télévision,
25:36 ça a commencé très tôt.
25:37 Je ne sais pas si vous le savez, Patrice Ronden,
25:39 la première émission médicale...
25:40 N'était-ce pas avec le papa de...
25:44 C'était Igor Barère.
25:45 Igor Barère, le papa d'Anne Barère.
25:47 En fait, il faisait ses études de médecine
25:49 et comme exercice pour sa thèse, il a tourné une endoscopie
25:53 à la télévision qu'il a réalisée en direct avec les caméras.
25:56 Et comme il fallait un volontaire, il a trouvé un avaleur de sabre
25:59 qui a accepté de jouer le jeu.
26:02 C'est en 1962.
26:03 Il n'y a que chez vous qu'on trouve ce genre d'annexe.
26:07 Alors, il se trouve aussi que dans votre parcours étonnant,
26:11 c'est que moi, ce qui me fascine avec vous, Patrice Ronden,
26:13 c'est que vous avez travaillé le jour et la nuit
26:15 et faites de la télé à n'importe quelle heure du jour et de la nuit.
26:17 Oui, oui, j'ai travaillé...
26:19 Oui, ça, c'est vrai.
26:21 J'ai beaucoup travaillé le matin parce que matinale,
26:24 vous êtes obligé d'être là à 4-5 heures du matin
26:26 et encore au début, peut-être même un peu plus tôt
26:28 parce qu'il faut prendre ses marques.
26:30 Mais t'es arrivé aussi de travailler le soir,
26:32 de présenter le journal de 23 heures sur France 2
26:37 de manière ponctuelle, mais aussi le journal de minuit sur La 5,
26:43 parfois le 13 heures, parfois le 20 heures.
26:45 Oui, non, c'est un métier, c'est pas à vous que je vais dire ça.
26:47 Jacques, c'est un métier où il n'y a pas vraiment d'horaire
26:49 et quand il faut y aller, il faut y aller.
26:51 Parfois, on vous appelle, surtout quand vous êtes un jeune reporter
26:53 à peu près tout terrain et qu'il faut partir.
26:55 Voilà, on ne vous demande pas l'heure
26:57 ou quel est votre emploi du temps de la journée.
26:59 On vous dit, il faut que tu sois dans tel avion,
27:00 dans tel train ou dans telle voiture d'ici une heure.
27:03 Et vous le faites parce que c'est un métier passion.
27:06 Et ça, je n'invente rien quand je dis ça.
27:09 Non, mais en même temps, c'est rare de pouvoir faire
27:10 autant de choses aussi différentes.
27:12 En plus, avec les horaires qui correspondent.
27:14 Les horaires du matin sont intéressants parce que
27:18 vous arrivez à 4 heures du matin, mais en général, à 10 heures,
27:21 vous avez fini une première journée.
27:23 Donc, ça vous laisse le temps de faire autre chose dans la journée.
27:28 Si j'ai écrit quelques livres, c'est aussi parce que j'ai parfois eu
27:31 le temps dans la journée de le faire.
27:33 C'est vrai que quand on bosse le matin, on n'a pas le temps
27:36 à perdre à la machine à café ou à tchatché ou à dire du mal
27:39 de x ou de y.
27:40 Non, il faut être productif le matin.
27:42 Donc, vous arrivez et si vous ne passez que 6 heures à la rédaction
27:45 de 4 heures à 10 heures, ce sont 6 heures pleines.
27:47 Vous avez à peine le temps d'avaler parfois un café.
27:51 Il se trouve aussi que vous avez fait un exercice assez particulier.
27:54 La revue de presse dans Télématins.
27:56 Oui, la revue de presse, c'est quelque chose...
28:02 J'étais rédacteur en chef à France Télévisions.
28:05 Je gérais parfois des journaux, parfois un service,
28:09 notamment le service Société, Sciences, Environnement.
28:12 Et à un moment, j'en ai eu un peu marre de gérer des gens
28:17 et j'ai eu envie de retrouver l'antenne.
28:19 Et je me suis proposé pour faire la revue de presse.
28:21 À l'époque, Arlette Chabot m'a dit banco.
28:23 Et moi, je m'étais dit, je vais faire ça pendant un an ou deux
28:25 pour me changer les idées.
28:27 Et j'ai adoré l'exercice.
28:30 D'abord parce que personne ne me disait ce que j'avais à faire.
28:34 J'avais une autonomie totale.
28:36 Ensuite, parce que j'ai pu éditorialiser un petit peu l'exercice.
28:39 Donc, quand on a un peu de bouteille, on peut se permettre de le faire.
28:43 Et puis ensuite, parce que j'ai découvert une équipe
28:47 qui avait été montée à l'époque par William Lémergie,
28:50 qui était extraordinaire de bienveillance, de camaraderie et de talent.
28:54 Et c'est là que j'ai passé des matinées inoubliables
29:00 avec des gens adorables que je vois toujours
29:03 et que j'avais déjà plaisir à voir en dehors du boulot.
29:06 Ça se consigne.
29:07 - Mais la revue de presse, Percés Romden, c'est un exercice très particulier.
29:10 Il faut lire tous les journaux, il faut trouver la bonne formule,
29:13 il faut voir le titre. C'est très spécial.
29:15 - Alors, écrire vite avec la bonne formule,
29:17 ça, c'est quelque chose que j'aime bien faire
29:20 et où je me débrouille pas trop mal, on va dire.
29:22 On peut se tromper, parfois, je peux avoir une forme malheureuse ou quoi.
29:25 Mais c'est un exercice que j'aime bien.
29:27 Après, lire tous les journaux, effectivement.
29:29 Mais il y a une innovation technologique qui a facilité un petit peu les choses.
29:34 C'est que ces dernières années,
29:37 on va dire maintenant depuis une petite dizaine d'années,
29:40 les journaux, vous les avez la veille.
29:42 Et vous avez même des papiers qui sont publiés sur le net,
29:45 qui seront dans l'édition du lendemain.
29:47 Donc, c'est assez pratique d'avoir ça sous la main
29:52 parce que vous pouvez déjà la veille sentir un petit peu
29:54 ce qu'il va y avoir dans l'air du temps le lendemain
29:57 et choisir les papiers sur lesquels vous allez travailler,
30:00 voire préparer un petit peu vos formules.
30:03 - On s'interroge en France sur l'invention de la revue de presse.
30:07 Selon les sources, ce serait Émile de Girardin,
30:09 Georges Haussmann ou Charles Maurras qui leur aient fait les premières.
30:12 - Ce sont de bonnes références, on va dire.
30:14 - C'est quand même pas mal.
30:15 - Vous avez fait aussi beaucoup de reportages
30:17 dans tous les sens pour France Télévisions.
30:20 Il y a une soirée qui vous a marqué, c'est à l'hôtel de Lassay
30:23 quand François de Rugy a annoncé sa démission.
30:27 - Oui. Alors, ce qui s'est passé, c'est que, effectivement,
30:31 François de Rugy a dû démissionner parce qu'on l'accusait
30:35 d'avoir fait des repas pas possibles à l'hôtel de Lassay.
30:39 Il se passe que moi, j'ai été invité à l'un de ses dîners.
30:44 Mais ça n'avait absolument rien à voir avec ce que semblait décrire
30:47 une certaine presse, en l'occurrence Mediapart,
30:50 qui a fait la chasse au Rugy à l'époque.
30:52 Mediapart décrivait ses repas comme des fiestas.
30:58 En quelque sorte, ce n'était pas du tout ça.
30:59 Pour moi, c'était des repas de travail où on croisait des gens
31:02 de la société civile, où on pouvait discuter avec le ministre
31:05 et éventuellement échanger et où lui-même s'intéressait
31:09 à ce que nous faisions, à ce qu'était l'ambiance
31:12 dans le milieu dans lequel nous travaillons.
31:13 Il y avait des gens qui travaillaient dans l'édition,
31:15 dans l'architecture, d'autres dans le journalisme,
31:17 d'autres encore dans je ne sais quel domaine.
31:20 Et je trouve qu'il a payé un petit peu cher
31:23 le fait d'avoir organisé ces dîners.
31:26 D'ailleurs, comment dirais-je, encore une fois,
31:30 ce n'était pas ce que décrivait une certaine presse,
31:34 à savoir des dîners festifs.
31:35 Et quand on l'a accusé, alors moi, quand je suis allé,
31:37 il n'y avait pas de homard, mais quand on l'a accusé,
31:39 il y avait des homards.
31:39 Est-ce que vous pensez sincèrement qu'un ministre qui bosse,
31:44 j'imagine, 15, 16, 18 heures par jour, s'occupe du menu ?
31:49 Non, quand vous êtes à l'hôtel de la C,
31:50 il y a un maître d'hôtel, c'est lui qui décide
31:52 ce qu'il va y avoir à dîner le soir.
31:54 Et je ne suis pas persuadé que ce soit le ministre
31:56 qui décide si on va mettre du poulet, des pois chiches
31:58 ou du homard dans l'assiette.
32:00 - Et puis un jour, vous avez fait un beau voyage.
32:02 Écoutez.
32:03 [Musique]
32:12 - Vancouver, Véronique Samson, qu'elle a écrite
32:14 au château des Rouvilles, enfermée dans une pièce
32:16 parce qu'elle ne travaillait pas assez,
32:17 avec du papier et un crayon et qui est devenue un succès.
32:21 Et Vancouver, j'en parle parce que vous avez passé
32:23 quelque temps à Vancouver.
32:25 - Lorsqu'il s'est agi de faire le service militaire,
32:30 quelque chose qui existait il y a une trentaine d'années,
32:33 je n'avais pas tellement envie de terminer dans une caserne,
32:35 donc je m'étais proposé pour faire un service national
32:38 comme journaliste en coopérant.
32:40 Et je me suis donc retrouvé journaliste coopérant
32:43 à Vancouver, donc en terre anglophone,
32:45 dans l'ouest du Canada, dans un journal francophone.
32:49 C'est-à-dire je défendais en quelque sorte la francophonie
32:52 en écrivant en français dans un journal francophone
32:55 qui avait de mémoire 4000 abonnés à Vancouver
32:59 parce que la langue française à Vancouver,
33:02 quand vous êtes à l'ouest au Canada,
33:04 ça reste quand même résiduel.
33:05 - Ça s'appelait, je crois, le soleil de Colombie.
33:07 - Absolument, le soleil, pourquoi ?
33:08 Parce que tous les journaux dans le monde anglo-saxon,
33:10 il y a toujours "The Sun", donc le soleil,
33:12 et de Colombie parce que Vancouver se trouve
33:14 dans la Colombie-Britannique, qui est la province
33:17 la plus excentrée du Canada.
33:18 - Et ça a duré pendant trois décennies avec beaucoup de bénévoles,
33:21 mais ça vous a appris aussi d'autres choses
33:23 que vous étiez en même temps correspondant pour la France.
33:25 - Oui, c'est-à-dire que lorsque je suis arrivé à Vancouver,
33:28 je sortais d'un stage qui avait même été prolongé
33:31 et qui s'était bien passé à France Inter et à France Info.
33:36 Et avant de partir à Vancouver, je suis allé voir,
33:38 à l'époque, je me rappelle, Bernard Brigoulex,
33:40 qui était le patron du service étranger de France Inter,
33:45 à qui j'ai dit, écoutez, je ne sais plus si je tutoye,
33:48 vous voyez, moi j'étais jeune journaliste,
33:49 je lui ai dit "Je pars au Canada,
33:51 je crois que vous n'avez pas de correspondant là-bas,
33:55 je veux bien être votre correspondant".
33:57 Et là, il m'avait dit dans une boutade,
33:59 "Ouais, tu seras notre correspondant,
34:01 de toute façon, il ne se passera jamais rien au Canada".
34:04 Ce que je peux comprendre, sauf que moi, une fois là-bas,
34:07 je voyais bien qu'il y avait des faits divers à droite, à gauche,
34:09 et puis du coup, j'appelais, et du coup, ça les intéressait, ils prenaient.
34:13 Et puis j'ai eu une année, j'ai eu de la chance,
34:15 parce qu'il y a eu la...
34:17 Comment s'appelait ce chanteur canadien ?
34:21 Non, j'ai oublié son nom, mais ce chanteur est mort,
34:24 donc du coup, ça a été Félix Leclerc.
34:27 Il est mort en 88, vous pouvez vérifier,
34:29 donc du coup, ils m'ont demandé des papiers.
34:30 Et puis il y a eu les Jeux Olympiques de Calgary,
34:33 alors je dis, non loin de Vancouver, sur la carte, c'est pas loin,
34:36 mais en vrai, vous avez 900 bornes.
34:37 Mais j'y suis allé, et du coup, j'ai pu faire quelques papiers.
34:40 Bon, je n'ai pas fait 50 000 papiers dans l'année,
34:43 mais comme jeune journaliste, j'ai pu faire quelques papiers du Canada
34:45 pour France Inter et France Info,
34:49 et ça m'a plu de faire ça à l'époque.
34:52 - Et en plus, vous avez continué dans d'autres pays,
34:54 et on va l'évoquer à travers la date du 26 octobre 2023.
34:58 A tout de suite sur Sud Radio avec Patrice Romden.
35:01 - Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Patrice Romden,
35:07 on a parlé de votre carrière à la télévision,
35:10 vos débuts, tout ce qui s'est passé dans vos reportages,
35:14 et puis là, une nouvelle activité, vos débuts de romancier,
35:18 avec ce livre qui est sorti le 26 octobre 2023,
35:21 "Le saut vers la liberté" chez Plon.
35:23 Alors, c'est un roman, mais un roman inspiré d'une histoire vraie
35:26 qui se passe lorsque le mur de Berlin n'est pas encore construit,
35:29 et lorsqu'il y a des barbelés.
35:31 - Oui, c'est un roman effectivement qui...
35:37 tourne autour d'une date particulière,
35:40 celle du 13 août 1961,
35:45 parce que cette date symbolise le début de la construction du mur de Berlin.
35:50 Et à l'époque, un Vopo de 19 ans...
35:55 - Un Vopo c'est un policier ?
35:56 - Oui, c'est un policier militaire, en quelque sorte.
36:00 Un Vopo de 19 ans est affecté à la surveillance
36:05 de ce qu'il sera demain le mur.
36:07 En l'occurrence, ce sont des barbelés qu'on a posés
36:10 pendant qu'à côté, on commence déjà avec des truelles et des briques
36:14 à construire un mur.
36:16 Et il est affecté à la surveillance des lieux
36:18 pour empêcher évidemment les gens de Berlin-Est
36:21 de passer à Berlin-Ouest,
36:23 parce qu'il y avait une hémorragie de la population de Berlin-Est
36:25 vers l'Ouest.
36:27 Et à un moment, il décide lui-même,
36:31 alors qu'il est affecté à la surveillance,
36:33 de prendre quelques pas d'élan,
36:34 de sauter par-dessus les barbelés,
36:37 et donc de passer à l'Ouest.
36:40 Alors l'histoire pourrait s'arrêter là et on aurait fait le tour,
36:43 sauf que pour son grand malheur,
36:45 ce gars-là a été pris en photo
36:48 par un jeune journaliste,
36:51 à peine plus âgé que lui, Peter Leibing,
36:54 qui avait 20 ans à l'époque,
36:55 alors que le Vopo, lui, en avait 19.
36:58 Peter Leibing observait ce Vopo,
37:00 il sentait qu'il était un petit peu nerveux,
37:02 il fumait cigarette sur cigarette,
37:04 enfin il n'a jamais vu un type fumer comme ça,
37:06 dira-t-il plus tard.
37:08 Et il va le prendre en photo quand il saute,
37:10 et il va faire la photo de l'année,
37:11 qui va d'ailleurs obtenir le prix Overseas en 1961.
37:16 Et cette photo est devenue
37:19 la photo la plus célèbre de la guerre froide.
37:21 C'est une photo iconique de notre histoire contemporaine.
37:25 Et moi cette photo, je l'ai redécouverte,
37:28 parce que je l'avais vue dans les livres d'histoire
37:29 ou dans des documentaires talibans,
37:31 je l'ai redécouverte lorsque
37:33 j'ai été nommé par France 2 correspondant permanent à Berlin.
37:37 - Dans les années 80 ?
37:38 - Voilà, non c'était un peu plus tard,
37:39 c'est en l'an 2000.
37:42 J'avais fait énormément de reportages à l'étranger,
37:44 c'était pas trop mal passé,
37:45 et puis un jour la récompense,
37:47 c'est le poste de correspondant.
37:49 Et donc j'arrive à Berlin,
37:50 je vais au musée du Mur,
37:51 je tombe sur cette photo et je suis ému
37:55 de la revoir, de la redécouvrir.
37:58 Et je me suis toujours dit,
37:59 je m'intéresserais tôt ou tard à l'histoire de ce gars.
38:03 Et ça a pris quelques années,
38:05 j'avais d'autres priorités, il faut croire.
38:08 Et puis j'ai décidé de traiter l'affaire
38:10 sous la forme d'un roman,
38:12 évidemment inspiré de pas mal de choses vraies.
38:14 - Oui, parce que finalement,
38:15 on va suivre le parcours de ce garçon,
38:17 Konrad Schumann,
38:19 depuis le moment où les policiers
38:22 décident de partir et ce qui se passe ensuite,
38:24 il a fallu vous inspirer de faits authentiques,
38:26 Patrice Amdena.
38:27 - Effectivement, il a fallu d'abord
38:28 que je travaille un petit peu sur les raisons
38:31 qui l'avaient amené, lui, à devenir Vopo,
38:36 parce que ce gars-là, c'est un paysan,
38:38 il vit au fin fond de la Saxe,
38:40 c'est un fils de berger,
38:42 il n'a pas tellement d'avenir.
38:43 Et puis un jour, on vient le chercher,
38:45 on lui propose de se construire en quelque sorte un destin
38:48 et il considère que devenir Vopo,
38:50 ce sera un destin convenable.
38:52 Et il faut se remettre aussi dans le contexte de l'époque,
38:54 on a un peu trop tendance à oublier tout ça,
38:56 c'est qu'il y avait un bourrage de crâne terrible,
38:59 on est en pleine guerre froide.
39:00 Je veux dire, dans l'ex-RDA,
39:02 on explique que le grand soir, c'est pour demain,
39:05 que le communisme va vaincre, etc.
39:09 Et Konrad Schuman, lui, devient Vopo,
39:11 donc il a fallu que je travaille un petit peu
39:13 sur la vie quotidienne à l'Est à cette époque,
39:16 dans les années 60 et même ce qui a précédé.
39:20 Que je travaille effectivement sur ce moment où il saute
39:24 et les raisons pour lesquelles il va le faire,
39:26 parce qu'initialement, il le fait, je vous le dis,
39:28 c'est une pulsion,
39:30 en fait, il y a au moins une raison profonde
39:32 qui l'incite à sauter,
39:33 et que je travaille aussi un petit peu sur la vie quotidienne
39:36 en RFA, en Allemagne de l'Ouest,
39:39 pendant le mur et même après la chute du mur.
39:42 - Oui, et avant, vous évoquez des choses
39:44 qu'on ne sait pas forcément,
39:45 parce qu'on a beaucoup parlé du mur,
39:46 mais il y avait quand même des Allemands de l'Est
39:49 qui voulaient passer à l'Ouest,
39:50 et là, il n'y avait qu'une seule solution, le métro,
39:52 mais la police, donc, Konrad, débarquait dans le métro.
39:55 - Exactement. Alors, initialement, en fait,
39:59 Berlin était une incongruité,
40:01 c'est-à-dire que le pays était, après la guerre,
40:03 a été divisé en deux, Allemagne de l'Est, Allemagne de l'Ouest.
40:06 Et vous avez Berlin, cette capitale, donc symbolique,
40:09 qui a été libérée et par les Russes et par les Alliés,
40:13 qui se trouve dans la partie Est du pays.
40:16 Donc Berlin va être coupé aussi en deux.
40:19 Donc les Allemands de l'Est ne pouvaient pas passer à l'Ouest,
40:22 mais il y avait une possibilité quand on était à Berlin.
40:25 Quand vous étiez à Berlin-Est,
40:26 il suffisait de prendre le métro pour passer à l'Ouest.
40:29 Et une fois que vous étiez à Berlin-Ouest,
40:31 si vous ne rentrez pas le soir à la maison,
40:33 vous pouvez ensuite prendre un avion,
40:35 si vous avez des papiers, pour aller en Allemagne de l'Ouest,
40:39 du côté de Bonn, de Hamburg, de tout ce que vous voulez.
40:42 Donc, voyant bien que le communisme ne menait à rien
40:45 et qu'il y avait de moins en moins de liberté,
40:48 Berlin-Est était en train de se vider de ses habitants.
40:51 Tous les cerveaux du pays se barraient,
40:53 les ingénieurs, les infirmières, même les artisans,
40:55 tout le monde partait.
40:56 Et à un moment, les autorités de l'Est se sont dit
40:58 « Oh, stop ! Il va falloir qu'on les empêche de passer. »
41:02 Donc, ils ont commencé par les patrouilles dans le métro,
41:04 mais les hémorragies continuaient.
41:06 Donc, à un moment, ils ont dit « On va construire le mur. »
41:08 Et ce mur, on a aussi parfois tendance à l'oublier.
41:11 Ils séparaient Berlin-Est de Berlin-Ouest.
41:13 Mais comme la partie Ouest de Berlin
41:18 voisinait avec l'ex-RDA,
41:20 je veux dire, ce mur va devenir en fait un mur d'enceinte,
41:23 qui va faire 160 km de long.
41:26 Et paradoxalement, les gens qui peuvent se prétendre libres,
41:29 les gens de l'Ouest vont se retrouver cernés par un mur.
41:32 - C'est fou.
41:33 Alors, ça effectivement, on ne l'a jamais dit.
41:35 Mais ce qui est étonnant aussi, c'est la façon
41:37 dont certains ont tenté de s'échapper avec leurs valises.
41:39 Et alors, dès qu'on avait une grosse valise, c'était fichu.
41:42 - Oui.
41:42 Alors au début, on passait avec les valises et puis ils laissaient passer.
41:45 Et puis à un moment, quand ils ont dit
41:46 « On va commencer à faire des patrouilles. »
41:48 Ils ont surveillé, évidemment.
41:49 Dès qu'il y avait quelqu'un qui avait une valise,
41:50 on faisait ouvrir la valise.
41:52 On voyait qu'il y avait des chandeliers, des bijoux et je ne sais quoi dedans.
41:55 On disait « Monsieur, vous retournez chez vous et vous allez avoir des soucis. »
41:57 - Et il y en a même qui passaient avec une toute petite valise,
42:00 mais beaucoup de vêtements sur eux.
42:01 - Oui. Alors ça, c'est la dimension romanesque.
42:04 Mais j'ai lu des anecdotes comme ça.
42:05 Mais effectivement, j'ai à un moment insisté sur ce Vopo
42:09 qui repère un gars qui, en plein mois de juillet,
42:13 passe avec cinq épaisseurs de vêtements.
42:15 Ce gars-là, il déménage.
42:17 - Oui, mais vous savez, à Paris, ça s'est fait.
42:18 Dans les années 60, il y avait Renoma, la boutique des jeunes.
42:21 Il n'y avait pas de système pour repérer qui volait.
42:25 Les jeunes arrivaient, mettaient trois vêtements sur eux et sortaient sans problème.
42:29 - C'était à l'époque où il n'y avait pas encore les bips et les codes.
42:31 - Donc ça se déroulait sans problème.
42:33 Et le déclic, alors est-ce que c'est assez romanesque,
42:35 mais en même temps, ça a pu arriver ?
42:37 C'est une petite fille qui ne peut pas rejoindre ses parents à Berlin-Ouest.
42:40 - Alors ça, c'est la vérité.
42:41 Là, je parle, je raconte à ma manière.
42:44 Mais effectivement, le déclencheur de toute cette affaire,
42:50 c'est qu'un deux jours avant de sauter,
42:54 Konrad Schumann, qui est le héros de ce roman et de cette affaire,
43:00 assiste à une scène qui lui retourne l'estomac.
43:03 C'est-à-dire que des parents vivant à Berlin-Ouest
43:09 se présentent au poste frontière avec leur petite fille pour la remettre.
43:16 C'est des grands-parents qui se présentent avec la petite fille pour la remettre aux parents
43:18 parce que la petite fille était venue passer le week-end à l'Est.
43:21 Et sauf que dans la nuit du 12 au 13 août 61,
43:27 dans la nuit du samedi au dimanche,
43:29 ils commencent à construire le mur et là ils disent la petite fille ne passera pas.
43:33 Et là Konrad assiste à cette scène et voit qu'il y a une gamine
43:37 qu'on empêche de retrouver ses parents à l'Ouest
43:39 et qui va donc devoir rester avec ses grands-parents à l'Est.
43:43 Et ça, ça lui retourne l'estomac.
43:45 Il ne peut rien faire.
43:46 D'ailleurs, il ne valait mieux pas qu'il fasse quoi que ce soit
43:49 parce qu'il aurait eu des problèmes.
43:51 Et c'est là qu'il commence à se poser des questions
43:53 parce qu'au début, lui, il croit le discours officiel.
43:57 Le communisme, c'est la liberté.
43:59 Demain, ce sera la richesse, la réussite.
44:01 Il y croit.
44:02 Mais il s'aperçoit qu'en fait, tout ça, c'est pas donner les mots à l'expression,
44:05 mais c'est des foutaises, c'est bullshit comme disent les Américains.
44:09 Donc, c'est aussi ce qui va déclencher son envie tout à coup de sauter,
44:14 sachant qu'il doit se décider très vite parce qu'il est devant les barbelés.
44:17 Il sait très bien que dans quelques heures,
44:20 les barbelés seront remplacés par des par des briques.
44:23 Ce saut, Patrice Romden en rappelle un autre qui s'est déroulé le 15 juin 61 au Bourget.
44:28 Rodolphe Nureyev doit repartir avec le Kirov et hop, il saute.
44:33 Ils sont tous en France protégés.
44:35 Il quitte les Russes au nez et à la barbe du KGB.
44:38 En fait, on sait aujourd'hui que tout ça avait été préparé à l'opéra
44:41 par une secrétaire qui avait monté le coup discrètement
44:44 pour que Nureyev puisse rester en France.
44:46 Eh bien, rapprocher Nureyev avec tout son art, son romantisme de Konrad Schuman,
44:52 je trouve que c'est beau.
44:55 C'est beau, je trouve surtout que le saut vers la liberté,
44:57 c'était aussi le saut de la liberté pour le coup, pour Nureyev.
45:00 C'est associé à son oeuvre.
45:02 Alors, il se trouve aussi de vous raconter la chute du milieu de Berlin.
45:06 On s'interroge encore, on pense qu'il y a une erreur administrative de compréhension.
45:10 Alors là, je ne me suis pas attardé sur cet épisode, mais effectivement,
45:14 ça mériterait un bouquin en soi, parce qu'effectivement, à un moment,
45:20 je crois qu'il y a effectivement un malentendu entre un gars qui entend
45:25 « bon ben on va ouvrir », mais il ne sait pas si c'est officiel ou pas.
45:28 Donc, l'ordre est transmis.
45:30 Et puis, on se retrouve avec le garde-frontière qui est tout en bas de l'échelle,
45:34 qui se retrouve avec des milliers de gens qui veulent passer,
45:37 qui décrochent le téléphone et qui disent « chef, qu'est-ce que je fais ? »
45:41 Le chef, il ne répond pas.
45:42 Donc, « chef, chef, répondez, qu'est-ce que je fais ? »
45:44 Il ne répond pas, donc il dit « bon ben je vais ouvrir »,
45:46 et puis les autres se regardent et disent « bon ben oui, on va ouvrir ».
45:49 Et les choses se sont faites un petit peu naturellement, et surtout sans violence.
45:54 C'est ça qui a été magnifique à l'époque,
45:56 ça a été un fleuve de joie qui a déferlé de Berlin-Est à Berlin-Ouest,
46:01 jusqu'au Kudam, cette fameuse avenue symbolique de la ville de Berlin,
46:04 sans qu'il y ait de mort.
46:06 Et puis il y a une chanson qui symbolise justement ce jour-là.
46:09 [♫♫♫]
46:19 C'est en pensant justement au mur de Berlin
46:21 que Pierre Delannoy et Claude Lebel ont écrit « Je chante avec toi, liberté »
46:26 pour Donna Muscuris sur l'aire de Nabucco.
46:29 C'est assez étonnant car c'est devenu un hymne à la liberté.
46:31 Oui, c'est devenu effectivement un hymne à la liberté.
46:34 Et il y a d'autres chansons ou images qui sont associées à la liberté et à la chute du mur.
46:40 Je pense notamment à Rostropovich, lorsqu'il joue du violoncelle au pied du mur,
46:47 entouré par tout un tas de reporters et de badauds qui regardent ça.
46:51 C'est une image qui est célèbre et qui restera dans les esprits.
46:54 Et dans ce livre, Patrice Romden, vous évoquez le quotidien de Konrad Schumann,
46:59 d'abord à Berlin-Est, et puis ensuite quand tout se termine,
47:02 il pense être un héros, il l'a été, mais ça va mal se terminer pour lui.
47:06 Oui, ça va mal se terminer pour lui.
47:07 En fait, c'est le héros malgré lui.
47:11 Konrad saute, son grand drame encore une fois c'est d'être photographié.
47:15 Il suffit que vous tapiez sur internet « Konrad Schumann photo »,
47:20 vous allez tomber sur la photo qu'il a rendue célèbre.
47:23 Et lui, il voulait vivre discrètement, c'était un gars simple.
47:26 Il est complètement dépassé par l'enjeu qu'il représente.
47:28 Parce que cette photo, elle est létale pour le régime communiste.
47:32 C'est-à-dire que le camp occidental, les Américains, les Français, les Anglais,
47:36 enfin tout le monde, cette photo, ils vont tous s'en servir pour dire
47:39 « Regardez, même leur propre troupe les fuit. »
47:43 Et ça, les communistes vont avoir beaucoup de mal à l'avaler.
47:46 Parce que c'est vrai que c'était...
47:48 Moi, j'ai vu personne sauter pour aller de l'ouest à l'est.
47:51 Ça, ça n'existe pas.
47:54 En revanche, dans l'autre sens, il y a eu beaucoup de monde qui a sauté,
47:56 il y en a qui se sont morts.
47:57 Mais il a été le premier, le symbole.
47:59 Mais ce qui est étonnant aussi, c'est que cette photo a rapporté très peu d'argent à son auteur.
48:03 Oui, alors voilà.
48:05 La photo a été prise par un gamin qui était stagiaire.
48:08 C'est intéressant d'ailleurs qu'à l'époque,
48:10 une agence de presse de Hambourg ait envoyé,
48:13 sur ce qui est devenu un gros truc de l'histoire contemporaine et géopolitique,
48:18 le mur de Berlin, ait envoyé un stagiaire.
48:21 Tout le monde se fichait royalement de ce qui se passait à Berlin.
48:24 Ouest, en tout cas.
48:25 C'était totalement... La ville était un petit peu abandonnée.
48:28 On en a fait tout un tam-tam quand le mur est tombé, à juste titre.
48:30 Mais quand il a été construit, les gens s'en fichaient un petit peu.
48:33 Enfin, je referme la parenthèse.
48:34 Et c'était quoi votre question ?
48:36 La photo a rapporté peu d'argent.
48:37 Oui, alors, ils envoient le stagiaire.
48:39 Le stagiaire fait la photo.
48:40 La photo devient extrêmement célèbre.
48:42 Mais le stagiaire ne touche rien.
48:43 Il touche juste son salaire.
48:45 Et ensuite, l'agence de presse pour laquelle il travaillait va faire faillite.
48:48 Et les fonds, l'argent va se perdre et les droits vont se perdre.
48:52 Ils vont appartenir au Land de Hambourg.
48:54 Et puis après, la veuve du photographe va en récupérer une partie.
48:57 Et lorsque le photographe et Konrad Schumann se sont rencontrés, 25 ans après la photo,
49:05 25 ans après la photo, alors qu'ils n'étaient pas censés se revoir, Konrad Schumann était
49:12 extrêmement remonté parce qu'il avait envie de rentrer dans l'art du photographe en lui
49:18 disant 1.
49:19 Vous m'avez pourri la vie.
49:20 2.
49:21 Vous avez fait une photo qui a dû vous rapporter des fortunes.
49:22 Et 3.
49:23 Moi, je n'ai pas touché un seul marque dans toute cette affaire.
49:24 Et l'autre l'a calmé tout de suite en disant mais tu sais, j'étais juste stagiaire.
49:29 Je n'ai pas touché plus d'argent ni moins d'argent à cause ou grâce à cette photo.
49:35 Et ils sont devenus amis.
49:36 Ils sont devenus amis.
49:37 Tout cela est dans ce livre que je recommande à la CDSE qui nous écoute parce que c'est
49:40 un roman passionnant d'un journaliste passionné.
49:43 Le saut vers la liberté chez Plon et puis continue à faire beaucoup de choses.
49:47 Je suis sûr que vous aurez encore plein de livres à écrire et de reportages à faire.
49:51 Je vais suivre votre conseil Jacques.
49:53 Merci.
49:54 Les clés d'une vie c'est terminé pour aujourd'hui.
49:56 On se retrouve bientôt.
49:57 Restez fidèle à l'écoute de Sud Radio.