Jacques Pessis reçoit Claude Sérillon : le Journal Télévisé en a fait une star du petit écran. Épris de liberté, il a connu des hauts et des bas. Sa vraie passion, la littérature. Il publie un recueil de nouvelles : « L’extravagant » (Cent mille milliards).
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##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2024-06-11##
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NewsTranscription
00:00 Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
00:03 Les clés d'une vie, celles de mon invité.
00:05 Le journal télévisé a permis aux passionnés de littérature que vous êtes d'avoir voix au chapitre.
00:11 Vous avez aujourd'hui délaissé l'information et sa réalité pour vous consacrer à d'autres nouvelles sorties de votre imaginaire.
00:18 Bonjour Claude Sérillon.
00:19 Bonjour Jacques Pessis.
00:20 Alors, vous publiez un livre de nouvelles qu'on va évoquer, l'Extravagant, aux éditions 100 000 milliards,
00:26 titre qui n'est pas choisi par hasard, et en même temps on va vous recevoir dans les clés d'une vie pour parler de votre parcours de journaliste et d'écrivain,
00:33 car il s'est passé beaucoup de choses, et le principe des clés d'une vie, vous le savez, vous êtes venu il y a bien longtemps,
00:38 c'est de raconter votre parcours à travers des dates clés.
00:41 Alors très volontiers.
00:42 Alors la première, c'est le 10 août 1973.
00:45 D'après mes archives, c'est votre premier reportage sur le tournage de Madame Bovary.
00:50 Oh là là, oui, exactement.
00:52 Un téléfilm de Pierre Cardinal avec Nicole Courcel, Jean Bouys et André Dussolier.
00:57 Et vous faites ce reportage à Gerberoy.
01:00 Oui, exact.
01:01 Et alors dans le même genre de choses, comme ça, je me souviens, et c'était très émouvant pour moi,
01:07 je suis allé faire un entretien, une interview de Pierre Frenet, au Butte-Chaumont.
01:14 Je crois que j'étais en dessous de minable, parce que j'étais tellement impressionné par Pierre Frenet,
01:20 je me souviens, j'étais légèrement en dessous de lui, quasiment à genoux, je lui tendais le micro,
01:24 et j'ai dû poser deux questions absurdes.
01:26 Il était d'une très grande jandiasse, il se faisait dire "ce pauvre petit garçon".
01:30 Mais pour moi, Pierre Frenet, c'était tellement important.
01:34 D'ailleurs, je crois que d'une certaine manière, quand je revois un peu tout ce que j'ai fait,
01:38 j'ai toujours été plus impressionné par les créateurs, par les artistes, que par les gouvernants.
01:45 Pierre Frenet, je crois que c'était son dernier téléfilm qu'il tournait au Butte-Chaumont, "Le jardinier".
01:49 - Absolument. - Et vous aviez de la chance, car Yvonne Printemps n'était pas là.
01:53 Et moi, je me suis retrouvé un jour, au théâtre de Michaudière, en train d'interviewer Pierre Frenet,
01:58 avec Yvonne Printemps à côté, qui ne cessait de l'insulter.
02:02 C'était leur truc. - Ah oui, oui.
02:04 Est-il vrai que quand il est mort, elle a dit "enfin Raed".
02:07 - Je pense que c'est une plaisanterie.
02:10 Enfin, elle ne le supportait pas, et quand il est mort, elle ne l'a pas supporté non plus.
02:15 Elle est morte de chagrin.
02:17 Et elle l'avait quand même volé, enfin Pierre Frenet avait volé Yvonne Printemps à sa chaguiterie.
02:21 - Est-ce qu'il vous arrive, Jacques Pécis, d'être impressionné par des artistes ?
02:25 - Bien sûr. - Encore aujourd'hui ? - Bien sûr.
02:27 Et tout le temps, sinon quel serait l'intérêt ?
02:30 Il y en a quand même des gens autour de nous. - C'est ça qui est formidable,
02:32 c'est de pouvoir être impressionné, d'être dans l'émotion.
02:34 - Exactement. Alors, vous êtes aussi impressionné à vos débuts,
02:37 parce que, à part ce reportage culturel sur Madame Bovary,
02:41 quand on consulte votre filmographie,
02:43 vous ne faites que du sport, cyclisme, judo, basket,
02:46 que des reportages comme ça, Claude Cyril ?
02:48 - C'est-à-dire que moi j'ai commencé à Presse Océan en 1970,
02:51 dans la presse écrite, je faisais des chiens écrasés, les faits divers.
02:54 On a volé des bicyclettes, on a volé une voiture, les crimes, les délits.
03:00 Puis après, comme moi j'ai appris sur le tas, je n'ai pas fait d'école de journalisme,
03:03 bien évidemment, j'allais faire aussi bien le sport que les manifestations sociales ou autres et tout.
03:11 Je crois qu'à part la météo, j'ai à peu près tout fait.
03:14 - Il y a un reportage où vous êtes juste avant la météo, dans un Flash Info, c'est le Seine.
03:19 - Ah bon ?
03:20 - Alors, la première fois où vous parlez d'un livre à la télévision,
03:22 puisque les livres c'est votre passion, Claude Cyrillon,
03:25 c'est pour évoquer "Vive le vélo" de Jacques Durand, qui raconte son histoire en 140 pages.
03:30 Votre premier reportage.
03:31 - Oh là là, alors là, vous voyez, je ne m'en souvenais même pas.
03:34 - Et le début de votre vie, Claude Cyrillon, on peut le symboliser par une chanson.
03:38 * Extrait de "Vive le vélo" de Jacques Durand *
03:44 - Une chanson qui serait issue d'une romance du XIIe siècle,
03:48 que Guy Béard, Dorothée et Nana Mouskouri ont interprétée.
03:51 Et Nantes, c'est votre ville de naissance.
03:53 - Ah oui, c'est ma ville de naissance, c'est la ville de mes parents.
03:56 J'ai encore une sœur qui vit là-bas.
03:58 Oui, c'est une ville qui a été importante d'abord parce que j'y ai été très heureux,
04:02 j'ai fait mes études, j'ai commencé dans le journalisme là-bas.
04:05 J'ai été supporteur du FC Nantes.
04:08 Voilà, c'est devenu une ville moi qui m'impressionne
04:11 parce qu'elle a été transformée cette ville.
04:12 C'est une ville culturelle formidable aujourd'hui.
04:15 Donc ça reste dans mon cœur même si j'y vais pratiquement plus.
04:19 - Et je crois que vos études supérieures de lettres,
04:21 vous les avez faites à l'université de Nantes.
04:23 - Voilà, c'est ça. J'ai commencé par l'hypocagne et puis ensuite la licence.
04:26 - D'ailleurs, curieusement, cette université, au moment où vous y êtes,
04:29 Claude Cyrillon est présidé par un médecin, Jean-Pierre Kernes.
04:33 Il se trouve que votre père était pharmacien.
04:35 - Non, il était préparateur en pharmacie.
04:37 - Oui, mon papa était Ardècheois.
04:39 Il avait lui aussi appris le métier comme ça.
04:42 C'était un préparateur en pharmacie à l'ancienne,
04:44 mais que ses clients aimaient beaucoup.
04:46 Et il m'arrive encore quelques fois dans des salons de livres
04:49 de rencontrer des gens qui me disent
04:50 "Ah, mais votre papa était dans telle pharmacie et il s'occupait de moi".
04:54 - Oui, et il s'occupait aussi d'envoyer des médicaments à des associations.
04:58 - Oui, il travaillait pour une association qui récupère des médicaments,
05:02 les trie, voit leur validité, les reconditionne et les envoie en Afrique.
05:11 - Oui, parce qu'à l'époque, la redistribution des médicaments était autorisée.
05:14 Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
05:16 Elle est interdite en France depuis 2009 parce que l'OMS l'a décidé.
05:20 - Oui, parce qu'il y a eu beaucoup d'abus.
05:22 Qu'ensuite, il y avait des envois de médicaments
05:25 qui n'étaient pas du tout adaptés aux personnes à qui on les envoyait.
05:28 Donc, ils y ont mis un terme.
05:30 - Il se trouve que votre médicament à vous, c'est la lecture.
05:33 Je crois que l'un des premiers auteurs qui vous a marqué
05:36 et puis vous avez des points communs de naissance avec lui, c'est Jules Verne.
05:39 - Ah oui, moi je trouve que Jules Verne, Alexandre Dumas,
05:43 c'est des gens qui inventent des histoires.
05:46 La créativité, l'imaginaire de Jules Verne est absolument exceptionnel.
05:51 Moi, j'aime bien ceux qui me racontent une histoire,
05:55 ceux qui me prennent par la main et puis qui me font rentrer dans un monde imaginaire.
06:00 Finalement, l'équilibre ou le déséquilibre formidable,
06:04 quand on est journaliste, c'est d'être proche de la réalité,
06:06 proche de l'actualité, du réel, du solide, de l'abrupte quelquefois, et du violent.
06:11 Et puis d'avoir cette deuxième partie qui est totalement libre
06:14 où on invente des histoires.
06:16 Donc, Jules Verne, et récemment, j'ai relu "Monte Cristo" de Dumas,
06:21 c'est exceptionnel.
06:22 Les scénaristes américains, ils n'ont rien inventé par rapport à tout ça.
06:25 - Et d'ailleurs, il y a un Jules Verne méconnu
06:27 qui est paru en anglais en février 1889,
06:30 qui est la journée d'un journaliste américain.
06:32 Une nouvelle.
06:33 On l'a attribuée au fils de Jules Verne et c'est lui qui l'a signée.
06:36 Et elle a été publiée en 1891 dans le "Moniteur de la Somme", le journal d'Amiens.
06:41 Un méconnu, parce qu'il a écrit plein de choses qu'on ne connaît pas.
06:43 - Je vous reconnais bien là.
06:45 - Alors, finalement, quand vous commencez à "Presse-Océan",
06:49 vous avez des moyens très limités, je crois que vous avez une 2 chevaux
06:52 pour vous promener dans les circonscriptions.
06:53 - Ah, c'est-à-dire que les moyens du journal, ils étaient limités
06:57 et puis c'était... Moi, je terminais très tard dans la nuit
07:00 parce que pour la dernière édition.
07:01 Donc, j'avais soit... J'ai eu une Simcam 1000, une 2 chevaux.
07:04 [Rires]
07:06 Mais c'était formidable parce qu'il fallait suivre les voitures de pompiers
07:10 ou la police, c'est comme ça.
07:11 - C'est formateur.
07:12 - Mais j'ai... La rédaction locale de "Presse-Océan"
07:17 qui a été dirigée par Daniel Garnier m'a tout appris.
07:22 Je crois que la base de mon métier, je l'ai appris là.
07:26 - Je crois que l'origine de votre métier, c'est un voyage en Norvège,
07:29 un reportage sur le club de football qui doit rencontrer le FC Nantes.
07:34 - Voilà, mais là, c'est un domaine que vous ne connaissez pas très bien.
07:38 Le FC Nantes était une grande équipe.
07:40 A l'époque, il y avait Saint-Etienne et Nantes.
07:42 Nantes avait gagné le titre de champion de France
07:46 et il était opposé à un club que vous connaissez très bien, Jacques,
07:49 qui s'appelle le Stromgötze 7.
07:50 - Bien sûr !
07:51 - Le Drammen.
07:53 - Déjà, c'est facile à prononcer.
07:54 - J'étais allé pousser la porte de "Presse-Océan" en disant
07:57 "je pars avec des copains jusqu'au Cap-Nord,
07:58 je vais passer par là et je vous ferai un reportage".
08:01 Et la famille Garnier, qui était très nombreuse dans ce journal,
08:06 m'a dit "ok, banco".
08:07 Ils m'ont donné des pellicules de films, puis ils m'ont dit "vas-y, tu nous envoies ça".
08:11 Voilà, mais j'ai fait cinq papiers que j'ai envoyés comme ça
08:13 et c'est réellement mes débuts, puisqu'ensuite, ils m'ont engagé.
08:16 - Vous ne pensiez pas être journaliste à l'époque ?
08:18 - Si, moi c'est 68 qui m'a convaincu d'être journaliste.
08:21 Moi, je me suis toujours intéressé à l'actualité, au débat d'idées,
08:25 à rencontrer des gens différents.
08:28 Et je voulais être journaliste depuis 1968.
08:31 - Et puis l'un de vos premiers scoops, c'est l'incendie de la cathédrale de Notre-Dame.
08:35 - Oui, n'exagérons rien.
08:37 Il se trouve qu'au moment où l'alerte d'incendie de la cathédrale de Nantes est déclenchée,
08:42 je suis à la caserne des pompiers avec eux et que je les suis,
08:45 et que je monte avec eux dans le toit et qu'on redescend très vite
08:47 parce que ça commence à s'écrouler.
08:49 Donc j'ai pu faire un papier là-dessus,
08:53 disons que les circonstances...
08:55 Mais je pense que la vie, elle est faite de rencontres.
08:57 Il n'y a pas de hasard. Il y a des rencontres, il y a des choses qu'on force un peu,
09:01 et puis ça se déroule, et puis après si on travaille,
09:04 si on a quelques capacités, ça va.
09:07 - La preuve que la vie est faite de rencontres,
09:10 vous êtes entré, Claude Séry, en LORTF par hasard.
09:13 - Ah oui, totalement.
09:14 Ça va me flatter, mais le même jour, on m'avait proposé de rentrer au journal Le Monde.
09:18 Et je suis rentré à la télé parce que j'y connaissais rien.
09:21 Parce qu'en fait, moi, quand je connais pas, j'ai envie d'aller voir.
09:24 Je pense que la curiosité,
09:27 que certainement l'éducation de mes parents m'a transmise,
09:31 c'est ça, c'est absolument nécessaire quand on veut être journaliste,
09:34 quand on veut regarder ce qui se passe,
09:36 à la fois dans son quartier comme à l'autre bout du monde,
09:39 il faut être curieux. Donc moi, quand je connais pas, j'essaye d'aller voir.
09:43 C'est comme ça que j'ai eu des hauts et des bas dans ma vie,
09:46 mais ça m'a permis aussi de m'ouvrir la tête.
09:49 - Vous êtes rentré très exactement à Paris-Ile-de-France.
09:52 - Voilà.
09:53 - C'était quoi à l'époque ? C'était pas ce qu'on connaît aujourd'hui.
09:55 - Alors c'était LORTF Paris-Ile-de-France,
09:58 c'était un embryon de ce que deviendra ensuite le réseau de La Troie.
10:02 On était installé rue François 1er,
10:04 dans les locaux qu'occupe maintenant Dior,
10:08 si je puis dire.
10:09 On avait un petit studio, il y avait des gens très célèbres,
10:11 il y avait Michin Sandrel, Betty Duro, Jean-Claude Narcy,
10:15 qui étaient là.
10:17 Et moi je suis rentré, le petit jeune là-dedans,
10:18 et j'ai appris là aussi sur le temps, grâce aux équipes,
10:21 des caméramans, des preneurs de son, tout,
10:24 qui m'ont appris là aussi à ce qu'était ce métier,
10:27 de faire des reportages, d'écrire un commentaire.
10:29 Vous savez, moi j'étais, quand j'ai fait mes études de lettres,
10:33 j'étais très passionné par le nouveau roman.
10:35 Et quand j'ai commencé comme journaliste, on m'a tapé sur la tête,
10:37 parce qu'on m'a dit "attends, dans une phrase,
10:39 il y a un sujet, un verbe et un complément,
10:41 donc tu dois être rigoureux et précis".
10:43 Et ça, c'est aussi une leçon que j'ai retenue.
10:45 - Et vous êtes arrivé à la télévision en même temps que la 3ème chaîne,
10:49 qui au départ devait être culturelle et qui est devenue une chaîne des régions,
10:52 ce qui n'était pas prévu.
10:53 - Oui, mais moi je suis arrivé sur...
10:55 Non, je suis passé sur la 2 directement de l'Ouest.
10:57 - En même temps, la 3ème est née directement.
10:59 - Ah oui, exact, exact.
11:01 Mais moi je suis arrivé en Thènes 2,
11:03 c'était Marcel Julien, le PDG.
11:05 Et ça, c'était un grand grand souvenir de cet homme,
11:08 immensément cultivé, drôle et attentif aux gens avec qui il vivait.
11:13 - Et justement, la télévision, on en reparle avec une autre date,
11:16 le 24 octobre 1986.
11:19 A tout de suite sur Sud Radio avec Claude Sérillon.
11:21 - Sud Radio, les clés d'une vie,
11:26 mon invité Claude Sérillon,
11:28 le romancier avec des nouvelles, l'extravagant,
11:31 dont nous parlerons tout à l'heure, qui est chez 100 000 milliards éditions.
11:35 Mais on en revient pour l'instant à votre parcours de journaliste.
11:38 On a vu vos débuts à Nantes et ailleurs.
11:41 Et je parle du 24 octobre 1986,
11:44 car ce jour-là, au Lido,
11:45 vous recevez un set d'or du meilleur présentateur.
11:48 - Oui.
11:49 - Oui.
11:50 - Eh bien, je ne sais pas ce qu'il est devenu.
11:51 - Ah bon ?
11:52 - Je l'ai perdu.
11:53 Alors c'est vrai que j'ai déménagé quelques fois, mais je l'ai perdu.
11:57 Mais c'était un joli moment.
12:00 Avec Bernard Rapp, on présentait le journal.
12:02 C'était...
12:03 Ça, c'est des moments formidables que j'ai passés à la rédaction.
12:07 - Oui.
12:08 - On était dans une très grande liberté, une très grande indépendance,
12:11 avec une capacité à faire beaucoup de choses,
12:13 d'être très libre,
12:15 d'aller voir sur place.
12:17 Et ça, c'était un...
12:19 Oui, ça, c'était parmi mes meilleurs souvenirs de journalisme.
12:22 - Alors il se trouve que ce soir-là, vous succédez à Christine Ockren,
12:24 qui a vu le premier set d'or.
12:26 Vous êtes le second.
12:27 Le meilleur journaliste ou reporter, c'est Anne Sinclair.
12:31 Le meilleur magazine, c'est Droit de Réponse.
12:33 Et la meilleure émission de variété,
12:35 c'est une émission sur un chanteur que vous aimez.
12:37 - Quand on a que l'amour
12:41 À s'offrir en partage
12:44 Au jour du grand voyage
12:46 - "Brel", je crois, fait partie, comme la chanson française,
12:49 de vos écoutes favorites.
12:51 - Oui, je ne peux pas dire...
12:53 Lui plus qu'un autre ou d'autres, ou Brassens, ou Beko, ou Ferré, ou...
12:58 Moi, j'aime beaucoup Georges Cholon.
13:00 J'aime beaucoup la chanson française.
13:02 Je suis très admiratif de Barbara, de ces gens-là.
13:05 Donc, pardon pour ceux que je ne cite pas,
13:07 mais il y a une qualité des textes de Pierre Perret ou d'autres.
13:11 C'est un vrai bonheur.
13:13 Donc moi, j'écoute beaucoup la chanson française.
13:15 - Vous avez bien raison, il faut continuer.
13:17 Alors, il se trouve que "Brel", cette chanson, c'était son premier succès.
13:19 Et quand il a reçu le Grand Prix du disque, il a dit
13:22 "J'ai débuté longtemps, longtemps, pendant trois ans".
13:24 Vous avez débuté beaucoup plus vite que pendant trois ans
13:27 pour le journal télévisé.
13:28 C'est-à-dire que vous avez commencé à assurer des flashs à 18h45.
13:33 - Oui, on a fait des flashs l'après-midi en alternance avec Gérard Rolls.
13:39 - Ça, c'était nouveau à l'époque ?
13:41 - Ah bah oui, parce que de toute façon, l'antenne ne commençait...
13:44 Au départ, on n'avait même pas le journal le midi.
13:47 On commençait dans l'après-midi.
13:50 Donc il y avait des flashs que Gérard et moi, on faisait.
13:53 Puis ensuite, il y a eu l'antenne de midi.
13:56 Et puis ensuite, on est passé à 24h/24.
13:59 Mais dans un premier temps, on était une demi-chaîne, si j'ose dire.
14:02 - Oui, mais effectivement, des flashs de trois minutes,
14:05 ça demandait presque autant de travail qu'un journal d'une heure.
14:08 - Oui, enfin, c'était... On va pas se vanter.
14:11 On faisait ça un petit peu à l'arrache, parce qu'il y avait des dépêches,
14:15 on n'avait pas d'image, c'était de la radio filmée.
14:19 - Oui, il fallait avoir une cravate, c'est tout.
14:20 - Voilà, mais ça, je les ai gardées.
14:23 Honnêtement, elles sont pas toutes montrables aujourd'hui.
14:27 - Alors, il se trouve aussi que le premier reportage
14:30 que vous faites dans Antenne de midi avec Daniel Bilalian,
14:34 c'est sur les mouvements autonomistes corse.
14:36 - Ah oui ? - Oui.
14:37 Et au hasard, au destin, le premier 20h vous présentait,
14:40 c'est à l'heure des résultats des élections de la première assemblée corse.
14:44 - Eh ben alors, vous me rafraîchissez la mémoire, là.
14:48 - C'est fou, hein ?
14:49 Mais pendant plusieurs années, j'étais un peu le journaliste de service pour la Corse.
14:54 J'y suis allé très, très souvent.
14:56 J'ai vécu l'après-aléria, les moments d'autonomie,
15:02 mais plutôt intelligents d'ailleurs, à l'époque.
15:04 Donc ça, c'était très intéressant.
15:05 Mais là aussi, il y avait une curiosité.
15:07 Je connaissais pas la Corse, moi.
15:08 Donc il a fallu aller sur place.
15:10 Il a fallu nouer des contacts.
15:12 Et je me souviens d'ailleurs, j'ai gardé un ami de cette époque-là,
15:15 qui est corse, qui vit toujours en Corse.
15:17 Il se reconnaîtra, il s'appelle Guy.
15:20 Et c'est un de mes amis les plus fidèles.
15:21 On a noué une belle amitié depuis 1976.
15:25 - Alors, vous progressez régulièrement,
15:27 puisque d'abord, c'est des reportages avec votre voix.
15:30 Ensuite, vous commencez les plateaux à l'écran.
15:33 - Oui, alors on faisait des remplacements.
15:35 On était un peu joker.
15:36 Il y avait ceux qui avaient le poste et puis, de temps en temps, ils partaient.
15:40 Et d'ailleurs, on était là à guetter le moment où ils allaient partir
15:43 pour pouvoir faire un petit peu d'antenne.
15:46 Donc ça, j'ai appris là aussi.
15:47 J'ai beaucoup regardé.
15:48 Il y a des gens qui m'ont inspiré, des gens comme Jean Lanzi ou Jean-Marie Kavada
15:51 ont été pour moi des références.
15:53 Jean-Michel Desjeunes, qui sont des noms peut-être un petit peu obligés maintenant,
15:56 mais qui m'ont beaucoup impressionné par leur capacité à être à l'antenne
16:01 avec à la fois une rigueur, mais aussi une personnalité, une subjectivité,
16:06 une émotion qui le faisait passer quelquefois.
16:08 - Alors, il y a eu des hauts et des bas dans votre carrière, Claude Séryon.
16:12 Notamment, il y a eu une revue de presse d'antenne 2.
16:14 - Je suis sûr que vous allez parler des bas.
16:16 Il faut les évoquer quand même.
16:17 Il y a eu les Diamants de Bocassa.
16:19 Ça, ça vous a coûté très cher.
16:20 - Oui, il y a eu Bocassa, il y a eu Malik Ousekine.
16:22 Plus tard, il y a eu Jospin.
16:24 Voilà, moi, j'ai un tempérament à être très libre dans ma tête.
16:29 Je considère que quand on fait ce métier, qu'il faut être un peu exigeant, rigoureux
16:36 et qu'il y a des choses sur lesquelles il ne faut pas céder.
16:38 Et si on a fait son travail avant et qu'on est assez solide pour dire
16:43 "Bah non, il faut en parler", moi, je n'hésite pas à le faire.
16:46 Ce qui m'a valu quelques désagréments.
16:48 - Les Diamants de Bocassa, en même temps, vous avez résisté.
16:52 Mais ce qui n'a pas résisté, c'est l'éditeur qui s'est apprêté à publier
16:55 les Mémoires de Bocassa.
16:56 Le livre a été imprimé à côté d'une fortune, mais il n'est jamais sorti.
16:59 - Il n'est jamais sorti, exact.
17:00 - C'est un collector.
17:01 Alors, effectivement, à chaque fois que vous êtes revenu,
17:03 vous êtes revenu à chaque fois.
17:04 Alors, je crois qu'en 1981, vous revenez comme chef du service société.
17:08 Est-ce qu'il n'a rien à voir avec ce que vous faisiez avant ?
17:10 - Non, mais avant, j'ai fait la chronique judiciaire beaucoup avec Paul Lefebvre.
17:14 Je présentais des journaux comme ça, en joker ou tard le soir, autre.
17:19 J'ai bougé beaucoup dans tout ce que j'ai fait.
17:22 Et puis, bon, j'étais plutôt dans les faits de société.
17:25 Mais à partir de 1981, j'ai surtout commencé à faire des présentations de journaux.
17:31 - Mais il faut tenir moralement le choc quand on est viré, qu'on revient, qu'on repart.
17:35 - Oui, j'étais viré, j'étais mis au placard, comme on disait à l'époque.
17:39 J'ai même eu un titre donné par le Canada en Chine et j'ai été placardor à plusieurs années.
17:46 Ce qui était mon traité d'emmerdeur aussi.
17:49 Mais moi, je ne me penche pas beaucoup, c'est gentil de revenir là-dessus.
17:56 J'essaye de me souvenir que des bons souvenirs, que des bonnes choses
17:59 et des choses que j'ai apprises et qui font que je suis l'homme que je suis aujourd'hui.
18:03 Tous ces gens-là, ils m'ont formé.
18:04 Peut-être que moi, j'ai commis des erreurs d'ailleurs.
18:06 Donc on se façonne comme ça.
18:10 On apprend et puis on s'ouvre un petit peu entre les moments où je fais des reportages en Corse
18:17 ou à Sarajevo ou ailleurs.
18:20 Et puis, quand je vais dans les dernières années où je suis à la télé avec Michel Drucker,
18:24 c'est des grands écarts.
18:26 Mais à chaque fois, ça permet de connaître, d'apprendre, de découvrir les autres.
18:30 - Oui, et en même temps, vous n'êtes pas le premier ni le dernier à avoir fait ça.
18:34 Claude Dargé, qui est présenté le jour où on a télévisé,
18:36 avait le message carrément du ministre sur son bureau.
18:40 Il prenait le papier, il le lisait à l'antenne pour montrer qu'il n'était pas d'accord.
18:43 - Oui, tout à fait.
18:44 - On imaginait ces pratiques des années 60 totalement disparues quand vous êtes arrivé, Claude Sérieux ?
18:50 - Non, jusqu'en...
18:51 Je dirais que jusqu'en 81, il y a eu des pressions et tout.
18:56 Après, il y a eu un mieux, puis il y a eu des moins biens, et puis c'est revenu...
19:00 Vous savez, la tentation des gens qui sont au pouvoir,
19:03 c'est toujours de s'en occuper.
19:05 Regardez aujourd'hui, on veut à nouveau s'occuper de l'audiovisuel public.
19:09 Ce qui me semble une absurdité, une imbécilité, pour ne pas dire autre chose.
19:16 Franchement, laissons les gens qui sont spécialistes, qui sont experts,
19:21 qui sont journalistes, qui sont animateurs, producteurs, faire leur métier.
19:25 Et pourquoi est-ce que les élus politiques veulent à tout prix s'occuper de ça ?
19:31 Alors moi, ce qui me fascine aussi, c'est que le public, à chaque fois, vous a suivi.
19:34 Lorsque vous avez eu des problèmes, il y a eu des pétitions,
19:37 et le public a dit "mais on veut voir Claude Sérieux".
19:39 - Oui, ça va, il y a une certaine sympathie pour moi,
19:42 peut-être parce que justement, je suis un peu troublion sur certaines choses.
19:46 - Vous étiez aussi troublion dans votre adolescence, à la fac ?
19:49 - J'étais bavard.
19:51 Bien avant la fac, même en classe et au lycée, j'étais bavard, oui.
19:55 On disait... J'étais plutôt un bon élève, on va dire que j'étais un moyen ou bon élève.
20:00 Mais j'étais souvent marqué "insolent".
20:03 - Et ça a continué avec 1968, vous avez carrément pris position.
20:07 - Oui, oui.
20:08 Moi, je découvrais tout d'un coup qu'une société pouvait évoluer,
20:11 pouvait être bouleversée.
20:13 Et que des idées nouvelles,
20:15 qui étaient à 100 000 lieux de ma famille, de mon éducation,
20:20 pouvaient m'intéresser.
20:21 Et au fond, aujourd'hui, quand je lis,
20:24 quand je rentre dans une librairie, je cherche des livres que je ne connais pas,
20:27 des auteurs que je ne connais pas, parce que j'ai envie de découvrir.
20:30 J'ai envie de me dire "Tiens, je pense comme ça, mais il y en a d'autres qui pensent autrement".
20:33 Donc essayons d'apprendre.
20:36 - Et vous avez une particularité, je crois d'ailleurs,
20:38 quand vous lisez un livre, il vous arrive de le laisser quelque part pour que d'autres le lisent.
20:42 - Toujours. Moi, je ne garde pas mes livres.
20:44 C'est-à-dire que j'ai eu une période où, au moment du journal,
20:48 ou quand j'étais avec Michel Drucker, je recevais beaucoup, beaucoup, beaucoup de livres.
20:52 Je les ai pratiquement tous donnés. Je les distribue.
20:55 Je suis très frappé par ça.
20:57 Pourquoi entasser des bibliothèques chez soi si on ne relit pas les livres ?
21:02 On peut en garder, parce qu'il y a des livres qu'on peut relire,
21:04 mais pour le reste, il faut faire partager la lecture.
21:06 C'est formidable quand vous dites, vous êtes dans un train,
21:10 vous terminez le bouquin, vous demandez à votre voisin "Vous voulez le lire ?
21:13 Vous allez voir, c'est formidable, ça va vous faire passer un bon moment."
21:16 Regardez d'abord, la personne va sourire, sera contente.
21:19 Et puis vous dites "Peut-être que ça va transmettre,
21:20 que ça lui donnera envie d'aller en acheter un autre", et ainsi de suite.
21:23 Et c'est peut-être pour cela que vous demeurez encore et toujours un homme à la page.
21:27 On va continuer à parler de vous avec une autre date importante dans votre vie,
21:31 une autre spécificité, le 9 décembre 1989.
21:35 A tout de suite sur Sud Radio avec Claude Sérillon.
21:38 Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
21:41 Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Claude Sérillon.
21:44 Nous parlerons tout à l'heure de ce 25e roman, livre plutôt,
21:48 "L'Extravagant", un recueil de nouvelles aux éditions 100 000 milliards.
21:51 On expliquera pourquoi cette édition porte ce nom.
21:55 On en revient à votre parcours.
21:57 Et le 9 décembre 1989 est un moment qui figure dans les annales de la télévision.
22:03 - Il y a un type un jour, il m'a dit "Mais arrête de te plaindre".
22:05 J'ai dit "Mais si je m'arrête de me plaindre, je ne gagne plus ma vie".
22:07 [Rires]
22:09 Plus je me plaindre, plus les gens se marrent.
22:11 - Michel Bouchna vous raconte ses maladies.
22:13 Et vous avez un fou rire en direct de Téléthon qui dure plus de deux minutes.
22:18 - J'aurais dû déposer ce fou rire.
22:22 Je serais très riche.
22:25 En fait, pour moi ce qui est important,
22:27 je pense que c'est une des rares fiertés que j'ai dans mon parcours professionnel,
22:33 c'est d'avoir participé à la création du Téléthon.
22:36 On est nombreux à l'avoir fait, il y a plein de gens qui ont...
22:40 À commencer par la FM de Barato.
22:42 Mais moi je suis très fier d'avoir été dans la première aventure du Téléthon.
22:46 - Vous savez qu'au départ, personne ne croyait en ce Téléthon.
22:48 Jerry Lewis est venu plusieurs fois à Paris pour le proposer et personne n'en voulait.
22:52 - Absolument.
22:53 Et d'où, quand il est venu pour la première année,
22:56 il nous a vu, Michel Drucker, Gérard Roll, C'est moi, et d'autres comme ça.
23:02 Honnêtement, d'après ce qu'on sait, il nous a trouvé très amateurs.
23:06 Et puis, le lendemain matin, il logeait dans un très très bel hôtel de Paris.
23:12 Il met à la télé et puis il voit le chiffre du compteur.
23:15 Et donc, en une soirée, on avait fait plus que lui en 10 ans.
23:20 Donc il est revenu et le soir même, le samedi soir, il a été formidable.
23:23 Il a fait un très grand numéro.
23:25 Mais c'est surtout que, moi, on a créé quelque chose qui maintenant appartient à tous les Français.
23:30 C'est que chaque année, à la même époque, début décembre,
23:34 dans pratiquement toutes les communes de France, il y a le Téléthon.
23:38 Et ça, je vous dis, c'est une vraie fierté, ça m'émeut.
23:41 Et quand je vois des enfants ou des adultes qui sont atteints de myopathies ou de maladies
23:50 qui sont dues à des défectuosités cellulaires, génétiques, ça m'émeut beaucoup.
23:55 Je me dis, on a fait quelque chose.
23:56 Sans doute pas assez, sans doute que ça ne bouge pas assez.
23:59 Mais il y a déjà des résultats de thérapie génique.
24:01 Et c'est un sujet, moi, qui me touche beaucoup.
24:03 Et je suis très fier d'avoir été là et je suis très heureux que la France bouge chaque année pour ça.
24:09 - Oui, et d'ailleurs, c'est l'un des rares pays à bouger aujourd'hui avec les États-Unis.
24:13 Mais surtout, ça nous ramène à votre enfance,
24:16 car adolescent, vous étiez déjà Claude Sérion dans le bénévolat.
24:20 - Oui, j'ai fait... Parce qu'on était une famille où on faisait beaucoup dans le monde associatif.
24:24 Surtout mes parents.
24:26 Les enfants, un peu moins, mais on était toujours un petit peu...
24:29 On était façonné par ça, c'est-à-dire que...
24:33 S'intéresser à l'autre, toujours se dire "ça pourrait m'arriver, donc il faut faire quelque chose".
24:38 Et puis après, le premier livre que j'ai fait en 87,
24:42 je l'ai fait à la suite d'un voyage avec Xavier Emanuely,
24:45 pour "Médecins sans frontières".
24:48 Et c'est un livre sur l'humanitaire, ça s'appelait "De quoi je me mêle".
24:52 Parce que j'ai beaucoup de respect, moi, pour les gens qui ainsi donnent de leur vie,
24:57 et quelquefois, ils sacrifient beaucoup de choses de leur vie, pour les autres.
25:00 - Alors, je reviens à votre fou rire, parce qu'il a quand même marqué la télévision.
25:04 Vous avez toujours eu un fou rire que vous n'avez jamais arrêté.
25:08 - Oui, c'est ça. D'abord, j'ai un rire naturel un peu sonore, ça c'est vrai,
25:13 qui dérange quelquefois, mais...
25:17 Je crois que j'essaie d'être dans la vie, comme à la radio, comme à la télévision.
25:21 Je suis un peu spontané.
25:23 - Alors, je me suis un peu renseigné, il y a un certain Belhashwe Jirmah,
25:26 un Ethiopien, qui est le recordman du rire,
25:29 et le recordman mondial, il a établi le rire le plus long à 3h06.
25:33 - Ah oui, moi c'est très très loin.
25:35 Je crois qu'avec Michel Bouchetin, si on a fait un quart d'heure, 20 minutes, c'est un maximum quand même.
25:39 - En tout cas, vous avez résisté au fou rire un jour,
25:42 où, en plein direct du journal, le sigle de la chaîne est tombé derrière vous.
25:45 - Ah oui.
25:46 Ah oui, c'était formidable. Vous savez, les décors,
25:49 maintenant, c'est pour l'instant, c'est des fonds verts, c'est du numérique, comme on dit,
25:53 mais la première fois où Alain Gilot-Pétret présente La Météo,
25:56 il a un panneau,
25:59 et puis, il y a des aimants pour tenir les nuages, comme on dit.
26:03 Et bien, les aimants sont barrés.
26:04 Donc, tout d'un coup, il n'y avait plus ni orage, ni pluie, ni soleil, il n'y avait plus rien et tout.
26:09 Bah oui, c'est ça, quoi.
26:10 - Mais un sigle qui tombe, c'est rarissime. Vous avez retenu un grand bruit, et puis...
26:14 - Bah oui, mais on bricolait beaucoup à une certaine époque.
26:17 - Alors, on vous appelle à l'époque, et j'ai retrouvé les archives journalistiques,
26:20 le couteau suisse de la chaîne.
26:22 - Bah parce que j'étais utilisé un peu partout, oui, c'est vrai.
26:25 Bah c'est...
26:26 Moi, en même temps, c'est mon privilège,
26:28 et que j'ai fait aussi bien une émission avec Maurice Reims, qui s'appelait "Hautes curiosités",
26:32 que "La nuit des étoiles" avec Hubert Rives,
26:37 que... j'ai fait plein d'émissions différentes.
26:39 J'ai fait "Géopolis", qui était une émission de géopolitique.
26:41 J'ai fait des émissions de débat qui ressemblaient à "Droit de réponse".
26:45 Oui, c'est vrai, j'ai fait un petit peu tout,
26:47 mais c'était formidable. J'ai fait une série avec Cousteau.
26:51 Donc, tout ça, c'était passionnant.
26:53 Mais ça participe aussi de mon...
26:55 de mon envie de ne pas être cadré dans un petit coin
27:00 et de faire que la même chose tout le temps.
27:02 - Voilà. Alors justement, j'ai répertorié quelques-unes de ces émissions.
27:04 Il y en a eu... Il y en a qui ont duré longtemps,
27:06 d'autres qui ont eu une vie brève...
27:08 Il y a une émission très particulière, c'est "Édition spéciale",
27:11 où vous êtes derrière votre bureau, avec les papiers entassés,
27:14 et vous la présentez, et ça c'est la seule émission que j'ai vue dans ce genre,
27:18 avec les papiers sur la table et le bureau.
27:19 - Oui, c'était pour montrer comme si c'était une rédaction.
27:22 - Des fois, on a des idées particulières.
27:25 - Mais c'est vrai que c'est assez rare.
27:27 En plus, les papiers, aujourd'hui, il n'y en a plus.
27:28 On a un ordinateur, mais à l'époque, les papiers, c'était quoi ?
27:31 - Oui, d'ailleurs, vous observerez que la plupart des présentateurs des journaux de télévisée,
27:35 maintenant, ils ont un bloc, enfin, c'est à la main et tout.
27:39 Ça ne sert à rien, puisque de toute façon, il y a le prompteur.
27:41 Donc, c'est une illusion qu'ils pourraient avoir les mains libres.
27:44 - Alors, il y a eu aussi les dossiers de l'écran,
27:46 car vous avez été le dernier présentateur, Claude Sérien,
27:49 on l'oublie un petit peu, des dossiers de l'écran.
27:51 - Je venais de me faire virer.
27:52 - Une fois de plus.
27:54 - Et Armand Jameau m'a fait signe.
27:55 Il a été formidable et il m'a demandé de présenter quelques dossiers de l'écran.
27:59 J'ai dû en présenter cinq ou six, je pense, comme ça.
28:01 D'un, dont je me souviendrai toujours, c'était avec Michel Morgan.
28:05 Et elle est arrivée dans une très belle voiture,
28:09 on a ouvert la portière et je l'ai amenée à moi.
28:12 J'étais à son bras et nous sommes allés faire cette émission.
28:16 Elle était extrêmement attentive, souriante, joyeuse et tout.
28:22 Elle regardait un peu apeurée, parce que ce n'était pas son truc, les longues interviews.
28:26 Et elle demandait toujours à Gérard Roubry de lui faire un signe, si ça allait.
28:29 - Oui, elle était très timide, Michel Morgan, en interview.
28:32 - Oui, elle était d'une grande timidité, je pense.
28:36 - Et les premiers dossiers de l'écran, en 67,
28:39 le premier, c'était un dossier de l'écran, un débat sur les criminels nazis.
28:43 On croyait tellement peu à l'émission,
28:45 qu'Armand Jammoux avait loué le décor pour 4 semaines en disant "on n'ira pas plus loin".
28:49 - Oui, c'est une grosse personnalité, Armand Jammoux.
28:52 - Et il a inventé des chiffres et des lettres. - Absolument.
28:54 - Dans un taxi, il allait proposer une autre émission, il a eu l'idée dans le taxi,
28:58 et il est arrivé avec ce projet. - Avec cette nouvelle émission.
29:01 - Ça a duré 50 ans.
29:02 Alors, "Géopolis", on y revient, parce que c'est quand même
29:05 un magazine qui était en avance sur son temps, Claude Sérillon.
29:07 - Je pense que, quand je l'ai proposé à Hervé Bourges,
29:11 qui était à l'époque le PDG, il a sauté là-dessus,
29:14 parce que ça l'intéressait beaucoup, la géopolitique.
29:16 Et on a inventé un genre qui était très simple, au fond.
29:19 On faisait de l'histoire, avec des archives,
29:22 on faisait de la géographie avec des cartes, et puis un reportage d'actualité.
29:26 Et pendant 12 ans, on a fait des émissions sur à peu près tous les pays où on a raconté ça.
29:33 Et une de mes émotions, c'était un jour, j'étais à Cotonou, au Bénin,
29:39 et des étudiants m'ont dit "mais c'est formidable, parce que grâce à vous,
29:42 on a appris de l'histoire de notre pays".
29:45 Ils m'ont dit "mais c'est terrible, parce que nous, habituellement,
29:50 on sait plein de choses sur vous, mais on sait jamais rien sur nous, donc merci beaucoup".
29:53 - Oui, c'est une chose qui manque un petit peu aujourd'hui, justement.
29:56 - Je trouve que la géopolitique... Ah, il y a "Dessous des cartes", d'Emilie Aubry,
29:59 qui est une très bonne émission, que j'aime beaucoup,
30:02 qui manque dans les journaux télévisés, même.
30:05 Regardez, aujourd'hui, il y a cette catastrophe, aujourd'hui, où on enregistre,
30:09 il y a Papouasie-Nouvelle-Guinée. Si je vous dis ça,
30:13 je ne suis pas sûr qu'il y ait grand monde qui sache où se trouve la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
30:17 C'est au nord-ouest de l'Australie...
30:20 Mais il faudrait mettre une carte !
30:23 Dans les journaux télévisés, on manque de cartes.
30:25 Alors on l'explique souvent pour la guerre en Ukraine,
30:28 ou un peu pour ce qui se passe en Palestine,
30:30 mais les cartes, c'est important, la géographie, c'est essentiel de savoir où on est.
30:34 Souvent, d'ailleurs, un conflit s'explique par la géographie.
30:37 Sarajevo, ça s'expliquait beaucoup par la géographie.
30:41 - Il se trouve aussi que dans les émissions qui ont marqué l'histoire de la télé,
30:44 c'est "Nuit des étoiles", qui était au départ, je crois, la "Nuit des étoiles" filante, la première fois,
30:48 avec Hubert Grieve, ça aussi, c'est un grand souvenir pour vous que l'autre...
30:51 - C'était la seule émission de télévision où on disait aux gens
30:54 d'être attentif, mais de ne pas regarder la télé.
30:59 On disait "sortez et regardez le ciel".
31:01 C'est-à-dire que Hubert était un conteur formidable.
31:05 Il nous a fait aimer les étoiles.
31:08 Rendez-vous compte, comment expliquer un trou noir ?
31:10 Comment expliquer la vie des étoiles qui sont mortes alors qu'elles nous arrivent encore ?
31:13 Lui, il avait cette capacité de raconter les comètes, de raconter les étoiles,
31:18 de raconter les gaz, les matières qui se trouvent dans l'univers.
31:23 C'est exceptionnel. Et on a tenu pendant 12 ans le "Tard le soir".
31:27 C'est d'ailleurs assez intéressant de voir que dans tous les clubs,
31:32 un petit peu partout en France, on regarde le ciel au même moment.
31:35 C'est dommage qu'il n'y ait plus l'émission.
31:37 - En même temps, Hubert Reeves avait une autre qualité extraordinaire
31:39 qu'on connaît peu, c'était un grand musicien.
31:41 - Ah, très grand.
31:42 - Il jouait du piano, il jouait Bach qu'il adorait,
31:45 mais il détestait l'orgue parce que ça lui rappelait
31:47 les souvenirs d'enfance à l'église qui étaient dramatiques.
31:49 - Et je crois qu'il avait enregistré une version de "Pierre et le loup".
31:51 - Exactement, de Prokofiev.
31:53 Alors aujourd'hui, vous continuez à faire de la télévision,
31:56 mais à votre façon, par des podcasts, je crois.
31:58 - Oui, j'enregistre des podcasts pour des associations,
32:01 pour des gens qui veulent sensibiliser aux problèmes de biodiversité,
32:06 de l'évolution du climat, de la recherche.
32:09 J'ai fait récemment toute une interview sur les cellules souches embryonnaires
32:14 qui permettent de réparer des déficiences de cellules.
32:19 Tout ça est très intéressant.
32:20 Là aussi, c'est un domaine qui demande beaucoup de travail,
32:23 de lire des articles, des livres,
32:26 de se rendre compte de l'étendue du réchauffement climatique.
32:30 Pourquoi ? Comment ? Qu'est-ce qu'on peut faire ?
32:32 Là, j'ai notamment, avec Jean Jouzel,
32:35 mais avec beaucoup d'autres chercheurs,
32:38 avec des spécialistes qui sont de toute l'Europe.
32:41 Et donc j'enregistre ces podcasts.
32:42 C'est un moyen, mais c'est un moyen concurrent de Sud Radio.
32:46 Voilà, vous en faites vous aussi.
32:48 Je pense que maintenant, les auditeurs ou les téléspectateurs
32:51 ne veulent plus être liés à un horaire précis.
32:54 Ils veulent pouvoir écouter sa station, qu'ils aiment,
32:57 en l'occurrence Sud Radio,
32:59 mais au moment où il est disponible.
33:01 On est moins coincés.
33:02 Rappelez-vous, quand même, avant, on disait la messe du 20h.
33:04 Donc les gens s'arrêtaient.
33:06 Ou ils mangeaient avant, ou ils mangeaient pendant, ou après,
33:07 mais c'était un repère.
33:09 Maintenant, c'est perdu, ça.
33:10 - Je vous signale que nous sommes sur YouTube.
33:12 Nous avons plus de 900 000 abonnés,
33:14 donc ils seront heureux de vous entendre dire tout ça.
33:16 Mais vous faites partie de ceux qui peuvent dire
33:19 "Les jours où je n'apprends rien ne sont pas des bons jours".
33:22 - Oui, sans doute.
33:23 Sans doute, oui.
33:24 Oui, sans doute.
33:25 Au moins, d'avoir appris quelque chose chaque jour, un peu.
33:28 Quelquefois, c'est simplement en parlant avec son voisin.
33:31 Quelquefois, c'est en lisant, souvent.
33:34 Quelquefois, c'est aussi par curiosité.
33:39 Les seuls livres, vraiment, je disais que les livres, je les donne,
33:42 les seuls livres vraiment que je garde, moi, c'est les dictionnaires.
33:44 J'adore les dictionnaires.
33:45 Je trouve qu'aller chercher les définitions de dictionnaire,
33:48 surtout si vous avez les vieux dictionnaires,
33:49 vous voyez l'évolution de la définition.
33:52 C'est formidable.
33:53 - Bernard Pivot, lui, avait commencé sa vie enfant
33:56 en découvrant les dictionnaires.
33:58 - Oui, absolument.
33:59 On a fait des émissions ensemble avec Bernard.
34:01 Vous vous rendez compte qu'il avait eu, par deux fois,
34:04 l'immense élégance de me dire "C'était Géopolis"
34:07 et lui, Bouillon Culture,
34:08 et évidemment, c'était plus important.
34:10 Moi, il mettait Géopolis avant son émission,
34:13 parce qu'il disait "Il faut qu'on explique le pays où on est".
34:16 C'est formidable.
34:17 - C'est formidable, mais il nous manque beaucoup.
34:18 Et je crois qu'il ne sera pas remplacé de si tôt,
34:21 sauf peut-être par vous,
34:22 vous pourriez faire une émission littéraire, non ?
34:24 - Sur Sud Radio.
34:26 - Ou à la télévision.
34:27 - Ou à la télévision.
34:27 - Je pense qu'il y a une demande.
34:29 - Oui, je ne sais pas.
34:30 Je pense qu'il faut savoir tourner une page aussi.
34:34 - Tourner une page, justement, celle de vos livres
34:37 qu'on va évoquer à travers une autre date,
34:38 le 15 mars 2024.
34:40 A tout de suite sur Sud Radio avec Claude Sérillon.
34:43 - Sud Radio, les clés d'une vie. Jacques Pessis.
34:46 - Sud Radio, les clés d'une vie.
34:48 Mon invité Claude Sérillon,
34:49 on a évoqué votre parcours télévisuel,
34:52 mais il y a le passionné de livres que vous êtes,
34:54 le romancier, l'auteur de poèmes.
34:56 Et vous publiez votre 25e livre qui est sorti le 15 mars 2024,
35:01 "L'Extravagant", un recueil de nouvelles.
35:03 Alors moi, j'ai lu plusieurs de vos livres
35:05 dont des recueils de poèmes.
35:07 Un recueil de nouvelles,
35:08 c'est pas si courant que ça de votre part.
35:10 - Ça doit être mon troisième, quatrième quand même.
35:12 Mais celui-là est assez particulier
35:14 parce que j'ai mis beaucoup de temps à l'écrire.
35:16 Comme c'est des nouvelles un peu bizarres,
35:19 un peu étranges qui peuvent surprendre,
35:21 j'ai mis beaucoup de temps parce que c'était...
35:23 Je voulais aller vers quelque chose d'un petit peu extravagant, effectivement.
35:27 - C'est-à-dire que ce sont dix nouvelles pour explorer l'imaginaire.
35:29 - Voilà. - Comment est venue cette idée ?
35:31 - Parce que j'ai commencé...
35:34 Je crois qu'un des premiers que j'ai écrits,
35:36 c'est la nouvelle sur le mal de mer.
35:38 C'est-à-dire qu'un jour...
35:41 Je vais raccourcir.
35:42 Un jour, on se réveille à Nice, devant la baie des Anges,
35:46 et la mer est partie.
35:48 Elle en a eu marre, la mer.
35:49 J'en fais un personnage.
35:51 La mer en a eu marre parce que tous ces gens qui...
35:53 D'abord qui la regardent, puis comme ça,
35:55 puis qui jettent leurs affaires dedans, puis qui s'en foutent,
35:58 et bien elle est partie.
35:59 Et donc, patatras,
36:01 vous avez la baie qui est vide.
36:03 Et alors là commence l'imaginaire.
36:06 La baie vide, qu'est-ce qu'il y a ?
36:08 Il y a des saletés, il y a des rochers,
36:09 puis il y a des choses étranges comme ça.
36:11 Et donc j'en ai fait un petit polar,
36:14 parce qu'il y a une intrigue à chaque fois.
36:16 Et ça, ça m'a conduit à me dire,
36:19 tiens, je vais aller explorer ce genre-là,
36:22 d'aller raconter des histoires qui sont a priori un peu absurdes,
36:25 mais qui forcément ont un sens.
36:28 L'histoire de la pelle à tarte, les particulières,
36:32 le vol d'une chaussette, des choses comme ça.
36:34 - Alors, oui, il y a plein de choses.
36:36 Sur la mer, moi je pense toujours au sketch de Raymond De Vos,
36:39 "La mer démontée".
36:40 A Biarritz, il lance un café un jour, il est comédien,
36:43 il dit "je voudrais voir la mer",
36:46 on dit "elle est démontée",
36:47 il répond "quand est-ce qu'on la remonte ?"
36:49 parce que c'est parti comme ça sa carrière.
36:51 Alors là, en fait, vous partez de l'imaginaire,
36:54 ce qui est le contraire du travail journalistique que vous avez fait.
36:56 - Absolument.
36:57 Mais ça, justement, c'est cette capacité,
36:59 on va me dire c'est équilibre ou déséquilibre,
37:02 d'aller vers un autre monde,
37:03 de pouvoir être...
37:05 Finalement, quand vous êtes dans la réalité,
37:08 vous avez des contraintes,
37:09 il faut être rigoureux,
37:10 il faut être dans une honnêteté intellectuelle,
37:12 il faut vérifier tout ce qu'on dit.
37:14 Là, je suis dans la position de l'écrivain qui invente.
37:19 Donc là, j'ai une totale liberté.
37:22 On pourra me dire "mais ça ne correspond pas à la raison".
37:25 Oui, mais justement.
37:26 Moi, je rentre dans des histoires qui sont a priori un peu absurdes,
37:30 mais qui, pour moi, ont une signification.
37:32 Tous les personnages que j'ai inventés dans toutes les nouvelles de ce livre,
37:36 c'est des personnages qui sont composés d'observations que j'ai pu faire.
37:40 - Oui, d'observations journalistiques au départ.
37:42 Alors le premier, c'est l'extravagant,
37:43 titre du livre et titre d'une nouvelle.
37:46 Vous n'avez rien d'extravagant a priori,
37:48 mais vous avez inventé un personnage.
37:50 - Oui, j'ai inventé un personnage.
37:51 Mais le mot extravagant, je l'ai trouvé comme ça.
37:54 C'est-à-dire que je cherchais un synonyme dans les dictionnaires
37:58 sur quelqu'un qui erre, qui cherche sa voix,
38:01 qui vague.
38:03 On dit vague.
38:04 On va dans deux endroits.
38:05 Puis extravaguer.
38:07 Extra, c'est partir dans tous les sens, comme ça.
38:09 Donc effectivement, c'est dérangeant, les gens extravagants.
38:12 Et le personnage, là, il va troubler complètement une communauté.
38:15 Donc j'ai essayé jusqu'au bout de cette idée illogique
38:23 pour en faire une nouvelle
38:25 qui, là aussi, nous fait réfléchir sur l'extravagance des gens.
38:27 - Oui, vous vous interrogez d'ailleurs sur les limites de l'extravagance.
38:30 - Oui.
38:31 Est-ce que, par exemple, vous comme moi,
38:34 on se promène dans la rue, puis on voit quelqu'un
38:35 qui est habillé d'une certaine manière, qui chante fort,
38:38 on va dire...
38:38 Bon, il est différent de nous.
38:42 Quelle est notre réaction ?
38:43 Réaction de rejet, réaction d'attentive,
38:46 réaction amusée, scandalisée, peu importe.
38:50 Mais l'extravagance est intéressante en elle-même
38:54 parce qu'elle nous dérange,
38:55 parce qu'elle nous oblige à réfléchir sur l'âme humaine.
38:58 - Et puis, il y a l'excentricité aussi.
38:59 Et le livre le plus célèbre sur les voyages,
39:01 c'est "Les cinq sous de la varette", je ne sais pas si vous le savez.
39:03 - Bien sûr.
39:04 - "Les voyages excentriques" de Paul Divois,
39:06 qui a été une gloire de son époque,
39:08 et lui aussi qui était le premier à être allé vers cette extravagance.
39:11 - Oui, mais Violat, il a écrit des livres absolument formidables
39:15 qui sont totalement extravagants aussi.
39:17 Et c'est ça, moi, dans la littérature que j'essaie de faire
39:23 depuis quelques temps, c'est d'aller vers des lieux
39:28 de l'imaginaire que je n'ai pas encore explorés.
39:31 Parce que ça, à la fois, ça m'amuse, ça m'excite un petit peu,
39:36 puis j'essaie d'en faire des histoires qu'on pourra raconter à d'autres.
39:40 - Alors justement, il y a des points communs
39:42 entre les dix nouvelles de votre livre extravagant.
39:45 J'ai trouvé, entre la pelle à tarte, l'épidémie du hockey destructeur,
39:49 un vol de chaussettes et à chaque fois des meurtres
39:51 ou les enquêtes policières.
39:52 - Oui, toujours un petit peu.
39:53 Oui, parce que je veux que ça soit une lecture qui soit facile
39:58 et que ça puisse intriguer.
39:59 Parce que ce n'est pas juste faire de la littérature sur un thème.
40:05 Donc je crée des personnages.
40:06 Et puis après, je m'identifie à chacun des personnages.
40:10 En fait, ce qui était assez amusant quand on écrit ça,
40:12 c'est que d'abord, c'est très condensé.
40:13 Donc il faut être très attentif à l'écriture.
40:18 Et vous êtes obligé de jouer tous les personnages,
40:21 de vous mettre à la place de chacun,
40:22 un peu comme quand on écrit des pièces de théâtre ou autre.
40:25 Et ça, c'est un exercice qui est assez jouissif pour un écrivain.
40:29 - Et quand vous dites que vous avez mis beaucoup de temps à écrire ce livre...
40:32 - Oui, j'ai mis plusieurs années.
40:33 C'est des nouvelles que j'ai faites petit à petit.
40:35 J'en ai encore 4 ou 5 autres, d'ailleurs, que j'ai mis de côté.
40:39 Il y aura sans doute peut-être un deuxième ouvrage à terme.
40:42 Mais ça prend du temps parce que j'écris à peu près tous les jours sur des carnets.
40:46 Et puis après, je reprends mes idées, j'écris à la main.
40:49 Et ensuite, je tape seulement.
40:51 De façon à ce qu'il y ait une maturation.
40:54 Pour les livres de poésie que j'ai pu faire avant, par exemple, c'est ça aussi beaucoup.
41:00 Donc c'est un accompagnement quasi constant.
41:02 - Oui, et puis vous allez aussi dans l'avant-garde, je dirais,
41:07 avec l'avenir, un univers où on peut changer de prénom à volonté
41:10 parce qu'on a une puce sous le bras.
41:11 Ça vous arrivera peut-être un jour ?
41:13 - Bah oui, pourquoi pas.
41:15 C'est-à-dire que vous vous appelez Jacques Pessis,
41:17 vous vous dites "j'ai envie de m'appeler Anselme".
41:20 Bon, bah Anselme, c'est tout.
41:22 Appelez-moi Anselme.
41:24 Moi j'aime bien cette...
41:26 Finalement, regardez, dans le monde que vous connaissez infiniment mieux que moi,
41:31 le monde du spectacle et des créateurs,
41:32 ils ne se donnent pas de limites,
41:34 aussi bien dans la mode qu'ailleurs.
41:37 Ils inventent tout le temps.
41:38 Quelquefois on se dit "mais où ils sont allés chercher ça ?"
41:41 C'est ça, c'est des histoires.
41:44 Au fond, j'ai vu qu'Henri Gougo était décédé,
41:47 c'était un très très grand conteur.
41:49 Là, ces nouvelles, c'est un peu comme des contes à chaque fois.
41:53 Et des contes que vous avez mis des années à écrire,
41:57 mais en plus d'années à imaginer, à rêver de faire.
41:59 Oui, puisque je continue ça.
42:03 Mais j'aime bien cette période de ma vie
42:06 où je continue à faire ce métier de journaliste
42:09 et en même temps j'ai cet autre univers
42:10 qui me permet de me raconter des histoires à moi aussi,
42:15 de m'inventer des trucs.
42:16 Il y en a plein qui tombent.
42:17 Après, si 15 jours après je relis trois pages,
42:20 je me dis "bon, j'ai rien compris".
42:22 Alors je les enlève.
42:24 Mais ça nourrit beaucoup le travail.
42:28 Et puis quand on lit ce recueil de nouvelles,
42:30 on se rend compte de la précision du mot
42:32 et même de la virgule que vous évoquez.
42:34 Oui, mais j'essaye beaucoup ça.
42:37 Je crois que le travail d'écriture, pour moi, est très important.
42:41 Faire attention aux mots, faire attention au rythme de la phrase.
42:46 Ça, c'est quelque chose auquel j'essaie d'être très attentif.
42:50 Finalement, on est quand même, radio et télévision,
42:53 on est dans un monde qui s'efface très vite.
42:57 L'écriture, c'est concret, ça reste là comme ça.
43:01 Le bouquin, il est là.
43:03 Il y a un plaisir à l'ouvrir.
43:05 Donc je souhaite que justement cette écriture,
43:08 elle soit un peu remarquée, si ce n'est remarquable.
43:11 - C'est tout ce qu'on vous souhaite aussi.
43:13 Alors dans ce livre "L'Extravagant", Claude Sérillon,
43:16 on a aussi une observation de société avec le confinement.
43:21 Vos personnages sont confinés.
43:22 Est-ce que ça a un rapport avec le confinement qu'on a vécu ?
43:25 - Il y a eu... Certaines nouvelles ont été écrites à ce moment-là, oui.
43:29 Alors donc, oui, très certainement.
43:31 Très certainement, oui.
43:32 Mais c'était une drôle de période.
43:34 - Comment vous l'avez vécu ?
43:35 - Moi, je vais dire pas trop mal, parce que...
43:39 Bon, j'ai eu la Covid comme pratiquement tout le monde une fois.
43:44 Mais je suis passé à travers largement.
43:45 J'étais beaucoup dans le sud.
43:47 J'avais une maison à l'époque en petite Camargue.
43:49 Et j'ai pu sortir.
43:53 J'avais la liberté d'aller me promener dans les vignes.
43:57 J'allais même aider un ami vigneron.
44:01 J'ai pas eu trop de contraintes,
44:05 si ce n'est que j'assistais à une sorte de repliement de notre société.
44:09 D'ailleurs, on n'en est pas sortis de ça.
44:11 Regardez, les gens, ils sont tous sur leurs écrans.
44:15 Ce qui me frappe beaucoup, c'est que quand vous prenez le métro à Paris,
44:19 personne ne rentre en regardant l'autre.
44:22 Et il m'est arrivé quelquefois de me pencher vers quelqu'un qui lise un livre
44:26 pour lui dire "Oh, ça fait du bien !"
44:30 - Et puis il y a quand même dans ce livre, en filigrane, une crainte sur l'avenir
44:33 avec les océans qui disparaissent.
44:35 - Oui.
44:35 - Mais je suis très sensible à toute la lecture scientifique
44:42 qu'on nous propose sur le réchauffement climatique.
44:45 Évidemment, nous on peut se dire "On verra pas, qui se débrouille après nous ?"
44:50 Mais quand même, on est en train d'engager fortement
44:53 le destin de l'humanité entière dans les 50 ans à venir.
44:57 C'est rapide.
44:59 On voit les destructions un petit peu partout.
45:01 On voit les dizaines de tornades aux États-Unis en ce moment.
45:05 On parlait de la Papouasie, là où ça s'est effondré,
45:08 c'est les glissements de terrain.
45:09 En France, sécheresse, inondations.
45:12 Si les gouvernants ne prennent pas réellement compte
45:18 les alertes données par tous les scientifiques,
45:21 ça va être radical.
45:24 Radical.
45:25 Les populations vont mourir, des gens vont migrer fortement
45:28 parce qu'ils ne pourront pas vivre là où ils sont.
45:30 Récemment, en Inde, c'était 47-48 degrés.
45:34 L'être humain ne pourra pas resputer ça.
45:37 Donc il faut en prendre conscience, il ne s'agit pas de raconter n'importe quoi.
45:41 Il y a des scientifiques qui donnent tous les éléments.
45:44 On doit pouvoir s'adapter, on doit pouvoir atténuer ce réchauffement.
45:47 Ça veut dire qu'il faut prendre des mesures assez rapides et drastiques.
45:52 Votre livre "L'Extravagant" est lié à une maison d'édition
45:54 qui s'appelle "100 000 milliards" et ça évoque autre chose.
45:58 Interrogatoire.
46:00 À quelle heure ce jour-là passe à l'autobus de la ligne Est de Midi-Varsova...
46:04 "Exercice hostile de Raymond Queneau" par les frères Jacques.
46:06 "100 000 milliards", c'est aussi une expression chère à Raymond Queneau.
46:09 Oui, c'est un livre de Raymond Queneau,
46:11 qui est un livre que je recommande à tout le monde.
46:13 D'abord c'est un beau livre, parce que c'est un livre qui recèle plein de mystères.
46:19 C'est un livre avec des lanières.
46:21 Donc vous avez le premier vers, vous soulevez la lanière,
46:24 et vous laissez la deuxième et ainsi de suite.
46:27 Et donc vous pouvez composer 100 000 milliards de poèmes.
46:31 Et il faut savoir que "Exercice hostile" c'est la même histoire
46:34 avec 99 façons différentes de la raconter.
46:38 Quelle invention !
46:40 Quelle invention, cher Raymond Queneau, quand même !
46:42 Alors, quelle invention aussi dans ce livre,
46:45 mais la nouvelle c'est un genre qui est un peu délaissé en général aujourd'hui ?
46:49 En France, oui.
46:52 Je dirais dans cette partie de l'Europe de l'Ouest, oui.
46:54 Les pays anglo-saxons aiment beaucoup les nouvelles.
46:57 Il y en a pas mal.
46:59 Moi j'aime bien ce style-là, parce que je sais à chaque fois c'est 30-40 pages maximum.
47:04 Et donc on peut le lire...
47:06 Si on a une heure, une heure et un quart, on peut lire comme ça, une nouvelle.
47:09 Puis on repose, puis on en prend une autre.
47:11 Donc il y a une continuité, il y a un rythme qui à mon avis est bien adapté.
47:15 Mais c'est vrai que moi je fais des livres de poèmes ou des livres de nouvelles,
47:20 donc c'est des niches,
47:22 mais ça permet d'avoir un lectorat qui est assez attentif
47:26 et qui est dans une relation plus intime d'ailleurs.
47:29 Oui, alors on dit souvent que le livre est mort,
47:31 et vous faites régulièrement des détours par les salons du livre.
47:34 Et le livre ça marche très bien que le série.
47:35 Il y a beaucoup de gens.
47:37 Alors on voit, c'est réel, il y a un problème de pouvoir d'achat,
47:40 donc les gens achètent un peu moins de livres.
47:41 Mais ils viennent, ils viennent et ils aiment,
47:44 et les livres de poches se vendent très très bien.
47:46 Donc il y a quand même encore un appétit pour ça.
47:49 Il y a quand même un appétit pour des gens qui savent vous raconter des histoires.
47:52 Oui, et beaucoup plus de jeunes qu'on imagine.
47:54 Oui, et notamment sur...
47:56 Je vois Pirolé, je vais donner les titres,
47:58 mais deux livres de poésie là, "Se donner rendez-vous" et "Est-ce que quelqu'un m'entend ?"
48:02 J'ai eu des jeunes qui sont venus les acheter.
48:05 Parce que la poésie les intéressait.
48:07 Comme si c'était quelque chose qui était plus dans leur intérieur.
48:11 Et à l'avenir, vous continuerez à écrire des nouvelles, des poésies ?
48:15 Peut-être un roman ?
48:16 Oui, il y a plusieurs choses qui sont en train
48:19 que je vais finaliser, je pense, dans les deux, trois ans à venir.
48:23 Oui, mais je vais continuer, bien sûr.
48:25 Bien sûr, c'est une activité...
48:26 D'abord parce que je pense qu'il faut toujours avoir des projets,
48:28 il faut toujours faire plein de choses qui sont enrichissantes.
48:33 Ce n'est pas à vous que je dirais le contraire,
48:36 ni vous qui me direz le contraire plus exactement.
48:38 Donc oui, je vais continuer.
48:39 Mais moi, j'aime bien pouvoir continuer mon métier de journaliste
48:43 et cette possibilité d'être un écrivain, en tout cas quelqu'un qui écrit.
48:47 Oui, un bon écrivain.
48:49 Et franchement, on lit avec beaucoup de plaisir
48:52 cet extravagant, aux éditions 100 000 milliards, ces nouvelles.
48:55 Effectivement, on peut passer d'une à l'autre et ce n'est pas désagréable en ce moment.
48:59 Merci beaucoup.
49:00 Merci, Claude Séryon.
49:01 Je recommande ce livre à celles et ceux qui nous écoutent
49:03 et puis je recommande à Claude Séryon de continuer à écrire
49:05 pour qu'on vous retrouve un jour dans la Clé de vie.
49:07 Merci beaucoup.
49:08 A bientôt.
49:09 Au revoir, Jacques.
49:10 Au revoir, la Clé de vie, c'est terminé pour aujourd'hui.
49:12 On se retrouve bientôt.
49:13 Restez fidèles à l'écoute de Sud Radio.