Immersion dans un sous-marin NUCLÉAIRE

  • l’année dernière
"HONDELATTE PART EN LIVE: DANS UN SOUS MARIN NUCLEAIRE" / Christophe Hondelatte en immersion dans un sous-marin nucléaire d’attaque.
Le temps d’une traversée de la méditerranée, entre Toulon et Chypre, Christophe Hondelatte embarque sur le sous-marin nucléaire d’attaque : le Casabianca.
Les sous-marins nucléaires d’attaque, propulsés grâce au nucléaire sont porteurs d’armes conventionnelles. Leurs missions : la lutte anti-sous-marine, la lutte anti-navires, le renseignement et les opérations de débarquement des forces spéciales.
Christophe Hondelatte est aux côtés du Commandant Nicolas Lambropoulos et de ses 75 hommes d’équipage. Des hommes qui passent 6 mois par an, sous l’eau, coupés du monde et de leurs proches.
Pendant 6 jours et 6 nuits, Christophe Hondelatte tente de s’approcher au plus près de ces hommes dont le métier est un véritable sacerdoce.
Quel est leur rythme ? Comment s’organise t-on à bord ? Comment vit-on coupé de tout ?
Grâce à des moments d’intimité avec les sous-mariniers, le journaliste parvient à comprendre quelles sont leurs motivations, leurs doutes, leurs peurs et leurs satisfactions.
Transcript
00:00 A bord, chaque centimètre carré est optimisé.
00:02 Indispensable lorsqu'il s'agit de stocker 50 jours de vivres
00:06 pour 80 bonshommes.
00:08 C'est donc au bout de sa couchette que le comis range les centaines
00:12 de kilos de farine nécessaires à la fabrication quotidienne du pain.
00:15 Chaque jour, il joue avec ses cartons une partie de Tétris assez périlleuse.
00:21 Tout petit, je rêvais d'aider les autres.
00:28 Sauver, secourir, protéger.
00:30 Finalement, je suis journaliste et j'ai décidé d'aller à la rencontre
00:37 de ces hommes et de ces femmes ordinaires qui exercent des métiers hors du commun.
00:42 Me voici au beau milieu de la Méditerranée,
00:47 à bord d'un sous-marin nucléaire d'attaque de la marine française.
00:51 - J'arrive à le crier exaucéte.
00:55 Les forces sous-marines françaises, 3500 hommes à peine,
00:58 10% des effectifs de la marine.
01:00 - Top un bateau.
01:04 - Commandant, il ne sait pas qu'on le regarde.
01:06 Il m'intrigue, ces hommes qui passent six mois par an sous l'eau,
01:13 coupés du monde et de leurs proches.
01:15 - Je pense qu'il faut que je m'arrête maintenant parce que,
01:20 après, mon épouse ne me comprendra pas.
01:23 Alors, je vais passer six jours et six nuits avec eux,
01:26 à bord du sous-marin nucléaire d'attaque, le Casabianca.
01:30 - Présentez-vous.
01:32 - Présentez-vous.
01:34 - Présentez-vous.
01:36 - Présentez-vous.
01:38 - Présentez-vous.
01:39 - Présentez-vous.
01:41 - Présentez-vous.
01:43 - Présentez-vous.
01:45 - Présentez-vous.
01:47 - Présentez-vous.
01:49 - Présentez-vous.
01:51 - Présentez-vous.
01:53 - Présentez-vous.
01:55 - Présentez-vous.
01:57 - Présentez-vous.
01:59 - Présentez-vous.
02:01 - Présentez-vous.
02:03 - Présentez-vous.
02:06 - On rate !
02:07 - Tout commence au port militaire de Toulon.
02:20 C'est ici que se concentre la majeure partie des forces navales françaises.
02:24 Quelques semaines avant le départ,
02:30 je demande à Damien, le commandant en second du Casabianca,
02:34 de me faire un tour dans la salle sèche
02:36 où la bête s'offre un petit lifting avant la grande plongée.
02:39 J'ai des films en tête,
02:41 à la poursuite d'Octobre Rouge, USS Alabama ou encore d'Ace Boat,
02:45 des films de sous-marins.
02:47 Et pour dire vrai,
02:52 je suis curieux
02:54 et un peu inquiet.
02:56 - Et c'est l'avant, ça ?
02:58 - Là, on est à l'avant du sous-marin.
03:01 Ce sont les tubes lance-torpilles que l'on voit là.
03:03 De là sortent nos missiles, nos torpilles, les mines,
03:06 toutes les armes que l'on peut lancer.
03:08 C'est un gros suppositoire de 3000 tonnes.
03:12 70 mètres de long, 70 personnes à bord,
03:15 une chaufferie nucléaire,
03:17 des armes. Tout ça, c'est compacté.
03:19 Des vivres pour pouvoir durer le plus longtemps possible en mer.
03:23 Avec tout ça, on navigue pendant 4 ans.
03:26 - Vu d'ici, c'est quand même une sacrée bestiole.
03:31 - On a l'avantage avec nos propulsions nucléaires
03:33 de pouvoir avoir une allonge illimitée, une endurance illimitée.
03:36 - Illimitée ? - C'est illimitée.
03:38 - En théorie ? - Ce qui nous limite, c'est notre capacité à durer
03:41 et nos vivres.
03:43 Il faut que ponctuellement, on aille recompléter les vivres.
03:47 Mais le sous-marin, lui, peut durer très longtemps à la mer
03:52 et aller très loin très vite.
03:54 - À l'arrière, il y a un secret sur l'hélice.
03:59 - C'est ça.
04:00 - À l'arrière, c'est notre signature.
04:02 L'hélice, on ne la montre pas.
04:04 On ne peut pas y aller.
04:06 Par le bruit que fait l'hélice, on peut être capable
04:09 de déterminer de quel type de bateau il s'agit.
04:11 - C'est à identifier.
04:13 - Et en plus du type, on est capable de dire parfois
04:15 de quel sous-marin il s'agit,
04:18 de quel bâtiment de surface il s'agit, ce genre de choses.
04:22 On est maintenant à 48 heures du départ.
04:24 L'arsenal est une ruche.
04:27 - On monte tout doucement, juste de façon à ce que ça passe.
04:30 - On la suit dans la squelette.
04:32 Le Casabianca quitte le bassin,
04:35 tiré par deux remorqueurs de la marine
04:37 pour rejoindre son quai de chargement.
04:40 Pour la corvée des vivres, tout l'équipage est mobilisé.
04:43 Les camions sont déchargés carton par carton.
04:46 Les bateaux sont déchargés en un seul.
04:49 Les camions sont déchargés carton par carton
04:51 et embarqués par le sas le plus large du bateau.
04:54 Un trou d'à peine un mètre de diamètre.
04:57 C'est par là que tout ou presque entre et sort du Casabianca.
05:00 A l'avant du bateau,
05:07 on vient de livrer l'armement du sous-marin.
05:10 Des torpilles pour attaquer et détruire les navires ennemis.
05:13 Et des missiles pour les cibles en surface.
05:18 Les fameuses exocettes.
05:19 Le jour du grand départ.
05:30 Comme tous les membres d'équipage, je suis convoqué pour la peine.
05:33 - Bienvenue. - Bon, on y est ?
05:36 - On y est.
05:38 Ca fait plusieurs semaines que l'équipage s'entraîne au large des côtes de Toulon.
05:41 Comme moi, ils sont tous impatients de prendre la mer.
05:47 - Quel est le nom de votre nom ? Vous répondez présent et vous ralliez le bord.
05:49 - Capitaine de corvette, Raoul Corlotte.
05:53 - Présent. - Le nom de son nom, le voilà.
05:56 Nous sommes un peu plus de 70 hommes embarqués,
05:59 dont une dizaine pour la première fois.
06:01 Moyenne d'âge, 28 ans.
06:03 Aucune femme. Je serai le doyen à bord.
06:06 - Monsieur Onglet.
06:08 - Présent.
06:10 - On est complets à part pour le bateau Poulain.
06:13 - Parfait. Y a plus qu'à.
06:16 Voici donc ma nouvelle maison.
06:18 Dans quelques secondes, je vais découvrir l'intérieur d'un sous-marin.
06:22 La France en possède 6 comme celui-là.
06:24 Pour moi, la surprise est totale.
06:26 - Vous prenez 5 ? - Ouais.
06:28 - C'est cool.
06:30 - Deux-trois, bravo. Diffusion générale, signe d'alerte et de rappel au poste de combat bien fonctionné.
06:34 Si de l'extérieur, la coque est imposante,
06:37 à l'intérieur, tout est minuscule.
06:40 6 jours dans cette boîte de conserve.
06:43 Sacrée aventure.
06:45 - C'est bon ?
06:46 - Montrez-moi ma couchette.
06:49 - Voilà, vous allez vivre.
06:51 - Ma chambre.
06:53 Les meilleures couchettes sont attribuées en priorité aux plus anciens.
06:55 Et comme je suis un petit nouveau, je dois m'attendre au pire.
06:58 Mais c'est encore pire que ce que j'imaginais.
07:02 On m'installe à l'avant, juste derrière les tubes lance-torque.
07:07 - Nous voilà dans la tranche armes.
07:12 - Dans la ventilation en diesel.
07:14 - Armes, c'est-à-dire ?
07:15 - C'est-à-dire de dormir entre les torpilles et les missiles.
07:18 - Je vais dormir entre les torpilles et les missiles ?
07:20 - Voilà, voici votre...
07:22 - Il y a carrément écrit "Exocet" là.
07:24 - Ah oui, ça c'est un missile.
07:26 - Voilà un missile là-dessus.
07:28 Et voici votre lit.
07:30 Ici, donc vous avez une torpille en dessous.
07:32 - Et ça c'est mon truc pour mettre mon sac ?
07:35 - Exactement.
07:37 - Ah bah c'est pas mal.
07:39 - Ce sont les ronces, donc les supports d'armes qui ne sont pas occupés,
07:42 mais on y est bien, il fait frais.
07:43 - Ah...
07:45 On va s'éclater là-dedans.
07:47 - Et comment on rentre ?
07:49 - Vous rentrez à plat ventre,
07:51 et puis après vous n'avez pas la place de vous retourner.
07:53 Il faut choisir sa position.
07:55 Voilà, il faut choisir votre position.
08:03 - On peut se retourner quand même, bon.
08:05 - Eh bah écoute, c'est intime.
08:09 - On verra, il fait très frais, on y est bien.
08:11 - Il fait frais ?
08:12 - C'est l'endroit le plus silencieux et le plus frais du bateau.
08:14 - Ah ouais ?
08:16 A bord, l'environnement est hostile, tout est étriqué.
08:18 Putain, c'est pas grave.
08:20 Comment font les gars pour passer trois mois enfermés là-dedans,
08:25 alors que j'ai déjà envie de sortir pour prendre un grand bol d'air ?
08:29 - Remarquation GFM de sous-marin, fort éclair.
08:39 - Je suis prêt à reposter pour le chalalage à 400 m sur mon avant-tribord.
08:41 - J'ai un truc dans la tête là,
08:43 d'abord le sentiment de vivre un truc super privilégié,
08:45 donc ça c'est formidable.
08:48 Se dire qu'on est là où très peu de gens peuvent aller.
08:51 Et puis quand même une petite angoisse,
08:53 parce qu'on est 70 dans cette boîte à 70.
08:56 - Je vous donnerai liberté de manœuvre à l'issue de la grande passe.
08:58 - Moi j'aime bien avoir ma bulle autour de moi,
09:00 pouvoir m'isoler,
09:02 je ne suis pas très sociable,
09:04 tout le temps en tout cas.
09:07 Et donc est-ce que je vais pouvoir faire reconstituer ma bulle autour de moi ?
09:10 Et notre limonade.
09:12 Au passage, moi qui suis accro aux portables et aux réseaux sociaux,
09:24 je serai coupé du monde.
09:26 Sur le quai, l'homme à la casquette qui vient d'arriver,
09:31 c'est le commandant du sous-marin, le pacha.
09:34 Il est le dernier à monter à bord.
09:40 Il s'appelle Nicolas Lambroupoulos, il a 40 ans.
09:43 Et il commande le Casabianca depuis deux ans.
09:46 - Bonjour commandant.
09:48 - Vous êtes bien arrivé ?
09:49 - Super.
09:50 - C'est des textos c'est quoi ?
09:52 - Bah oui on envoie des textos, des photos, vous savez ce que c'est ?
09:55 - Les derniers quoi.
09:57 - Les derniers quoi.
09:59 [Musique]
10:10 Derrière nous, l'arsenal s'éloigne lentement.
10:14 Et j'apprécie chaque seconde à l'air libre, avant le grand plongeon.
10:18 Comment vais-je supporter cet enfermement et cette promiscuité ?
10:24 [Musique]
10:32 A côté de moi, le pacha lui aussi apprécie l'instant.
10:36 C'est sa dernière mission sur le Casabianca.
10:39 [Musique]
10:45 - Ouais c'est quand même 15 ans de vie, ce nucléaire d'attaque.
10:50 - Je suis du style émotif et sensible.
10:53 - Donc je suis assez nostalgique.
10:56 - Il passe ce tour.
10:57 - Ouais il passe encore.
10:58 - Il reste la mission.
11:00 - Il reste la mission, il reste 3 mois.
11:01 - C'est la dernière fois que vous quittez Toulon.
11:03 - Ouais c'est vrai.
11:04 [Musique]
11:08 [Musique]
11:22 [Musique]
11:33 Nous sommes bientôt parés à plonger.
11:36 Il est temps de s'abriter dans les entrailles du sous-marin
11:38 et de refermer derrière nous la porte étanche, notre unique rempart.
11:43 - Donc là c'est fermé là ?
11:51 - Là c'est fermé.
11:52 C'est fermé et il n'y a que ça qui nous retiendra en termes d'étanchéité.
11:57 - D'accord.
11:58 - Lorsqu'on sera à X mètres sous l'eau, l'eau viendra au-dessus
12:02 et c'est notre dernière barrière d'étanchéité.
12:05 - Les panneaux supérieurs fermés, verrouillés, plus personne à l'extérieur.
12:10 [Musique]
12:18 Rapidement, après avoir quitté l'arsenal de Toulon,
12:21 nous plongeons à 300 mètres sous le niveau de la mer.
12:25 [Musique]
12:40 Le commandant du Casablanca, le Pacha, a déjà une petite surprise pour moi.
12:45 [Musique]
12:48 - Qu'est-ce que c'est ça commandant qu'on vient de nous porter ?
12:51 - De l'eau de mer.
12:52 - De l'eau de mer ?
12:53 - Puisée à P.
12:54 - C'est à P ?
12:55 - P, pression maximale.
12:57 Immersion maximum à P.
12:59 - On est descendu donc chercher cette eau pour ça ?
13:01 - Oui, juste pour vous, à P.
13:03 Le mieux c'est de la boire d'un coup, mais après vous faites ce que vous voulez.
13:07 - Et ben voilà.
13:08 - Cheers.
13:09 [Musique]
13:16 - C'est pas mal hein ?
13:17 - Ben j'en avais jamais vu d'eau de mer en fait.
13:19 - Ça m'étonne pas, puis après on embraye sur le...
13:20 - Sur le champagne ?
13:21 - Oui.
13:22 - Ah oui c'est mieux.
13:23 [Rires]
13:25 - Merci.
13:26 - Bienvenue à bord en tout cas.
13:27 - Merci.
13:28 - A la vôtre.
13:29 - A la vôtre.
13:30 - Merci en tout cas, pour votre accueil.
13:32 [Musique]
13:33 Parmi les 70 hommes d'équipage, plusieurs visages vont devenir familiers.
13:37 Damien, le second, le bras droit du pacha.
13:41 Il vient d'être promu commandant et forme son successeur, Hugo.
13:46 [Musique]
13:52 A l'arrière du case avianca, Pascal, instrumentiste sur le réacteur nucléaire, fils de sous-marine.
13:59 - Bon, à la bord, je suis instrumentiste arrière.
14:01 Je fais des rondes, des relevés tous les jours.
14:04 Et je m'assure du bon fonctionnement de la chaufferie nucléaire embarquée.
14:08 Et enfin Brian, passionné de littérature, en charge du compartiment auxiliaire 2 dans les entrailles du bateau.
14:17 - En fait, ce compartiment, c'est assez étrange parce que vous allez avoir des heures de calme
14:21 et pendant une vingtaine de minutes, une intense accélération du temps.
14:24 Et que ce soit pour l'esprit, pour le physique, c'est déroutant.
14:28 On peut s'y perdre rapidement.
14:29 [Musique]
14:36 À bord du cas avianca, ce qui est nucléaire, c'est la propulsion, le moteur.
14:41 Les armes, elles, sont conventionnelles.
14:44 Mais à quoi servent de tels engins puisque la France n'a pas coulé de navire depuis la seconde guerre mondiale ?
14:51 Je comprends vite qu'ils servent d'abord à montrer nos gros bras et témoignent de la puissance militaire de la France.
14:57 Mais ils servent aussi à observer, à écouter, à faire du renseignement.
15:02 C'est ce que le cas avianca a fait, par exemple, lors du conflit libyen en 2011.
15:08 J'ai deux ou trois questions à poser au Pacha.
15:12 - Commandant, c'est donc là chez vous ?
15:14 - Oui, voilà ma chambre, la plus grande du bateau.
15:18 - La plus grande du bateau, la plus confortable.
15:19 - Solitaire.
15:20 - Vous savez votre privilège.
15:22 - Oui, parce que ça fait 15 ans que je suis aux forces marines, donc j'ai dormi un peu partout dans le bateau.
15:27 - Ah oui ? Donc vous connaissez les autres pioles.
15:29 - Donc je connais les autres pioles, oui, exactement.
15:31 - En termes de renseignement, que peut faire un bateau comme celui-là au large d'un pays quel qu'il soit ?
15:38 - Entre Misrata et Benghazi, vous avez ce qu'on appelle le Gol de Sirte, d'accord,
15:43 qui était fermé parce que Kadhafi a considéré que ce Gol de Sirte était ses eaux intérieures, ses eaux nationales.
15:49 Or, personne ne reconnaissait ça, on ne les reconnaissait pas, mais on n'y allait pas non plus, pour ne pas provoquer, etc.
15:55 Le sous-marin, c'est un outil qui pouvait aller sans gêne dans ce Gol de Sirte, sans provoquer particulièrement,
16:03 parce que ça ne se voit pas, donc aller plus proche des côtes, observer ce qui se passait.
16:07 - C'est bien la Libye. Enfin, à un moment donné dans une carrière comme la vôtre, ça rend concret tout ce pour quoi vous vous êtes préparé.
16:16 - Alors moi, je n'aime pas trop cette façon de voir les choses, parce que je veux dire, on n'est pas là pour prendre du plaisir à mener un combat contre quelqu'un.
16:30 Ce n'est pas un achèvement, un aboutissement.
16:33 - Non, mais c'est bien de voir un jour que tout ce pour quoi on se prépare, ça a un sens concret.
16:39 - Mais en face, si vous voulez, en Libye, le sens concret, c'est quand même des gens qui se tuent les uns les autres.
16:44 - C'est ça le sens concret.
16:46 - On ne va pas s'en réjouir.
16:48 - C'est difficile, moi, j'ai un peu de mal à m'en réjouir.
16:52 Surprenant ce pacha, à peine 40 ans, et déjà à la tête d'un sous-marin nucléaire.
16:58 Je m'étais imaginé Musclor et je découvre un homme posé, philosophe et très humain.
17:09 - On m'a raconté que vous avez écrit à toutes les femmes de votre équipage avant de partir, pour leur dire, s'il y a un problème, appelez ma femme.
17:19 Et vous lui avez donné le numéro de téléphone de votre femme, en leur disant, voilà, et ma femme me dira.
17:24 - J'espère, je ne sais pas ce qu'en pensent mes bigus, mais il me semble que, il y a autre chose qu'un lien institutionnel possible,
17:33 quand on n'est pas là, il y a quelque chose entre femmes qui peuvent se comprendre, qui existe, qui est possible en tout cas, qui est ouvert.
17:43 Je pense que ça rassure, c'est le plus serein.
17:48 - En tout cas, ça prouve que la Royal, c'est une famille.
17:51 - La Marine, c'est une vraie famille. C'est important.
18:00 Une vraie famille, d'accord, mais un peu spartiate avec ses invités. J'aurais bien troqué ma couchette, moi, contre celle du pacha.
18:08 - Je vous conseille de faire des nœuds dessous les draps. - C'est-à-dire ?
18:18 - Quand vous faites vos draps, en fait, ceux qui sont bas à un ballon, vous faites des nœuds, comme ça, quand vous allez pouvoir les enlever et les remettre, ils seront toujours en même place.
18:24 - Bien.
18:25 - Eh ben, va falloir beaucoup de force de conviction pour dormir, là, quand même.
18:35 Je finis par dormir, bercé par le ronronnement des souffleries. C'est ma deuxième journée d'enfermement. Il en reste encore 4.
18:47 Oh, putain, on a plus 20 ans. J'ai des mâles partout.
19:09 Je commence à prendre mes marques. Ici, les quartiers habitables n'occupent qu'une toute petite partie du bâtiment. Vous avez donc la cafétéria et la cuisine.
19:19 Au niveau supérieur, le carré des officiers et leur cabine. Au bout du couloir, le poste de pilotage et le centre opérationnel qui analyse les sonars.
19:32 Ce matin, il y a de l'agitation. Le Casabianca s'apprête à reprendre la vue au périscope.
19:44 - A quelle hauteur est-ce que vous avez la vision ? - Ben là, oui, c'est à 25. - À 25 ? - Le gris qui absorbe. Il faut qu'on soit à peu près à 16 mètres, 17 mètres.
19:54 Les sons de visi sont pas très bonnes. Attention pour un bien pointé sur le 36. Top, un bateau. Dans l'eau.
20:09 Un seul bâtiment à la vue. À droite, 20. Venir au 180. Vous l'avez vu, là ? - Oui. - Parfait. - Donc, en fait, on prend une photo pour rester un minimum.
20:21 - Voilà. Donc là, on s'approche. On s'approche. On s'approche. Et puis, après, on va essayer de prendre une photo. Lire son nom. - Et on s'assure que c'est bien lui.
20:29 - Les informations qu'il a transmises sont cohérentes avec ce qu'il y a écrit dessus. - Ça, c'est extraordinaire. Il y a tout près d'un bateau.
20:36 Ça peut être un bateau de guerre, un bateau de commerce. - Jusqu'à combien ? - Il ne vous voit pas. - Vous pouvez s'approcher d'un bateau ?
20:40 - On peut s'approcher très proche. 1 000 mètres. 1 000 mètres, ça fait 1 km. Ça paraît loin, 1 km. Mais 1 km sur un bateau qui fait 300 mètres de long, qui se déplace...
20:49 Enfin, c'est très proche. Voilà. Vous pouvez lire son nom. Vous pouvez regarder les gens qui se déplacent sur son pont, en déduire combien ils sont, qu'est-ce qu'ils font.
20:58 Et eux, ils vous voient pas. Ils ne fonctionnent pas une seule seconde. - Leur radar peut pas accrocher le mât ?
21:05 - Non, pas à cette distance. Puis de toute façon, on hisse, on regarde 20 secondes, crac, on affale. Voilà, donc c'est extrêmement discret.
21:12 Le pacha décide de me faire plaisir. Il ordonne de hisser pour moi le second périscope, le périscope de veille. Observer sans être vu, drôle de sentiment.
21:32 - Commandant, il sait pas qu'on le regarde, lui. Il a aucune possibilité.
21:38 C'est assez incroyable, quand même. Imaginez qu'on est au milieu de la Méditerranée.
21:56 La machinerie nucléaire du Casablanca, vous ne la verrez pas. Elle occupe presque la moitié du bateau, mais la marine refuse qu'on la filme. Secret défense.
22:06 Pour faire simple, la centrale du Casablanca produit de la vapeur que l'on transforme en électricité, qui ensuite entraîne l'hélice.
22:16 Avant, les années 70, on utilisait du diesel pour produire cette vapeur. Aujourd'hui, c'est un réacteur nucléaire.
22:25 A la tête de l'installation, une quinzaine d'atomiciens. Arnaud est le plus jeune.
22:29 - Vous, vous êtes ingénieur ? - Ingénieur de carte, c'est ça.
22:32 - Atomicien ? - Atomicien.
22:34 - Quel âge est-ce que vous avez ? - 31 ans.
22:36 - Et vous êtes le patron de la centrale ? - C'est ça.
22:38 - On nous a remis ça, là, quand on est entré sur le bateau. Donc ça, ça mesure, évidemment...
22:43 - Un petit dosimètre. - Voilà, c'est un dosimètre. Ça mesure le rayonnement atomique.
22:46 - C'est ça. - Si on reçoit des rayons... On en reçoit, ici ?
22:50 - Alors, ici, on en reçoit une petite partie. On est susceptible d'en recevoir une petite partie.
22:56 La législation française fait en sorte que tout travailleur du nucléaire doit être contrôlé en permanence.
23:03 De manière à lui admettre un temps de repos si jamais il a pris une dose supérieure à la législation.
23:11 - Vous, vous avez pris des rayons, déjà ? - On en prend tous.
23:14 - Qu'est-ce qui fait que vous choisissez de vous enterrer dans un sous-marin plutôt que d'être à EDF ou chez ARRÉ ?
23:20 - Déjà, c'est la passion de servir notre pays en tant que militaire.
23:25 Après, c'est la volonté d'être marin, notamment, dans mon cas, quand on est originaire de Toulon.
23:31 Et troisièmement, c'est le besoin de découvrir un métier pointu, le métier du sous-marinier.
23:39 Et qui plus est, le métier de l'atomicien en matière de nucléaire. Voilà.
23:45 - Non, parce que je dis peut-être une bêtise, mais vous gagneriez mieux votre vie chez ARRÉVAC que dans l'armée française ?
23:51 - Peut-être.
23:53 Peut-être, c'est même certain.
23:55 Et c'est d'ailleurs un problème pour la marine qui voit partir vers le nucléaire civil ses meilleurs atomiciens,
24:00 au point de manquer régulièrement de spécialistes pour prendre la main.
24:04 - Traitement GV, est-ce que tu es isolé, Fabrice ?
24:07 - Non, je passe sur l'avant, je te lisole au passage.
24:10 - Très bien, merci. Bon appétit.
24:12 Pour poursuivre mon exploration, je dois à présent m'équiper de lunettes de protection.
24:17 Là où je vais, on redoute des projections hautement corrosées.
24:21 - Protégez les yeux. Et voilà, vos sons.
24:24 - Voilà la centrale ventilation. Ici, arrive tout l'air du bord et repart tout l'air du bord.
24:33 On capte l'air du bateau et on le purifie ici.
24:37 Une fois que l'air est purifié, on le renvoie vers l'ensemble des compartiments du bateau.
24:41 Pour ça, on utilise deux usines.
24:43 La première, c'est celle-ci, qui nous permet de produire de l'oxygène.
24:47 - Comment on fait pour produire de l'oxygène à 70 mètres de profondeur ?
24:52 - On aspire de l'eau de mer, qu'on fait bouillir.
24:55 C'est le même procédé que pour produire de l'eau douce.
24:58 On obtient de l'eau déminéralisée.
25:00 Et cette eau déminéralisée, on l'utilise après pour casser la molécule d'eau.
25:04 On conserve l'oxygène de la molécule d'eau et l'hydrogène.
25:07 - En gros, il y a de l'oxygène dans l'eau, quoi.
25:09 - Voilà. Donc l'eau, c'est de l'hydrogène et de l'oxygène.
25:12 - De l'hydrogène crache de l'eau.
25:14 - Voilà. On conserve l'oxygène à bord et on recrache de l'hydrogène.
25:16 - Vous pouvez rester 35 jours ou plus en totale autonomie d'oxygène.
25:22 - En totale autonomie. Donc on mesure en vie, exactement.
25:24 - Sans remonter.
25:25 - Sans remonter. Et ça, c'est l'apport du nucléaire par rapport aux autres consommes marins classiques.
25:29 Enfin, par rapport aux sous-marins classiques.
25:31 C'est justement, on a cette capacité de rester en permanence,
25:34 de produire tout ce qu'il faut et de purifier notre air en totale autonomie.
25:39 - Passer de Messine en bateau, c'est déjà pas mal.
25:44 Mais le passer en sous-marin, c'est un luxe supplémentaire.
25:47 - Vous avez une idée de la taille de cette cuisine, chef ?
25:52 - Pas loin de 4 mètres carrés.
25:54 - 4 mètres carrés ?
25:55 - Oui.
25:58 - C'est lui qui va trouver la trace du sous-marin.
26:01 C'est lui qui va dire "le sous-marin, il est là".
26:03 - Je pense qu'il faut que je m'arrête maintenant, parce qu'après, mon épouse ne comprendra pas.
26:08 Cela fait 2 jours que nous avons quitté Toulon.
26:15 On a contourné la Corse et longé l'Italie.
26:17 Et si le Casabianca est remonté aujourd'hui à la surface,
26:21 c'est que nous approchons du détroit de Messine, entre l'Italie et la Sicile,
26:25 lieu de passage très fréquenté.
26:27 Je fais partie des privilégiés.
26:29 Pour assister au franchissement du détroit, j'ai le droit de monter dans le massif,
26:34 histoire de prendre un peu l'air.
26:36 - Et voilà !
26:37 - Tiens, Gautier.
26:38 - Si je clique là-bas, il y a un stoppage bleu.
26:41 - Je vais décider d'arrêter.
26:49 Ça ne tient pas l'expérience.
26:52 - Je vais vous dire que vous êtes un peu trop loin.
26:54 - Je suis un peu trop loin.
26:56 - Ça ne tient pas l'expérience.
26:58 Déjà, passer de Messine en bateau, c'est déjà pas mal.
27:10 Mais passer en sous-marin, c'est un look supplémentaire.
27:13 - Vous envoyez 3 personnes et on fait des centaines.
27:15 - Ça fait oublier la couchette, les 2 pêtes que je me suis mises sur la couchette,
27:19 au-dessus, ici et un autre ici, qu'on ne voit pas bien, mais qui me fait un peu mal.
27:24 - Là, celui-là, là. Celui-là, il me fait un peu mal.
27:28 Si la marine nous a autorisés à embarquer, c'est que le Casabianca est actuellement en transit.
27:33 Dans une dizaine de jours, il sera dans l'océan Indien, théâtre de sa mission.
27:38 Entre-temps, bien sûr, j'aurais été débarqué.
27:41 À bord, l'ambiance est donc détendue.
27:47 Le pacha a même manigancé un petit bisoutage pour l'infirmier.
27:50 Il lui a fait croire qu'un câble électrique était suspendu au-dessus de la mer
27:54 et qu'à l'aide d'une perche, il allait devoir le soulever.
27:57 Humour de marin.
27:59 - Quel anglais, quel anglais d'étonnant.
28:19 Avec leur perche, les bisous sont prêts à la manœuvre.
28:22 Mais il n'y a évidemment aucun câble accroché au pylône de Messines.
28:26 Il y en avait, mais il y a plus de 20 ans.
28:28 - On a l'impression que c'est une grosse déception, mais il n'y a pas de câble.
28:33 - Il peut arriver de temps en temps que... - Que les câbles ne soient pas à poste.
28:38 - Les câbles ne soient pas à poste. Ou alors que le pacha se foute de votre tête de temps en temps.
28:42 Ça peut arriver.
28:44 - Ce qu'on va faire, c'est qu'on va prendre une petite photo
28:46 et immortaliser le passage de Messines avec M. O'Neill.
28:49 - Ah oui.
28:50 - Ça s'appelle un bisoutage, c'est ça ? - Tu peux faire des collis du plaire.
29:01 - C'est grave comme bisoutage.
29:03 - Ça s'appelle une perche. - Ça s'appelle une perche.
29:05 - C'est bon, vous montez ou pas ?
29:08 - C'est bon, tu m'as mis ? - Ouais, c'est bon.
29:10 À bord, chaque centimètre carré est optimisé.
29:29 Indispensable lorsqu'il s'agit de stocker 50 jours de vivres pour 80 bonshommes.
29:36 C'est donc au bout de sa couchette que le comi range les centaines de kilos de farine
29:40 nécessaires à la fabrication quotidienne du pain.
29:43 Chaque jour, il joue avec ses cartons une partie de Tétris assez périlleuse.
29:48 Ici, tout est bas de plafond.
29:56 Derrière la plonge, Cyril n'est pas le bienvenu avec son mètre 94.
30:01 Trois mois en mer, plié en deux.
30:04 La vie de sous-marinier impose quelques sacrifices.
30:07 - Magnifique !
30:11 - Bon appétit !
30:16 - Toi, t'es plutôt légumes verts.
30:18 - C'est ce qu'on appelle la semelle, ça, non ?
30:20 - Non, non, non.
30:22 On va essayer de te filer un morceau qui n'est pas trop mal, quand même.
30:25 - Celui-là, là ? - Ouais.
30:27 - Un peu de verdure. - On mange bien ?
30:29 - Ouais, ouais.
30:30 Heureusement, les petites unités et les sous-marins bénéficient encore d'une table qui reste...
30:39 - À la route. - Ouais, qui reste assez sympa,
30:41 qui remonte le moral, quoi.
30:42 C'est vrai que le moral des troupes tient beaucoup à ce qu'il a dans son assiette.
30:46 Et là, pour le moment, le moral est bon.
30:48 - Et ça ?
30:50 - Ça, avec extrême modération, c'est...
30:54 Voilà.
30:55 Effectivement, il y a de l'alcool à bord.
30:58 On va pas non plus diaboliser l'alcool.
31:01 - Et le mec qui déconne, qu'est-ce qui lui arrive ?
31:03 - Le mec qui déconne, c'est pas compliqué.
31:05 Sa carrière, elle est... Voilà.
31:06 Explosée en mille morceaux. Voilà.
31:08 C'est une fois, une seule... Voilà.
31:10 Même si vous avez 10 ans de carrière derrière vous...
31:13 - C'est pas trop...
31:15 - Ah, ouais, ouais, c'est aussi sec. C'est direct. Voilà.
31:24 Le chef cuistot. Les hommes l'appellent bocuse ou la cuisse.
31:29 Sa chambre dans la marine.
31:31 Il faut être un virtuose pour travailler dans la cuisine du Casablanca.
31:35 Car à bord, les flammes et le feu sont interdits.
31:37 On cuisine donc tout au four ou au bain-marie.
31:41 - Alors, comment est-ce qu'on fait, en gros, pour fabriquer quand même...
31:50 - À déjeuner, à dîner, pour combien de personnes ?
31:53 - 70, 77, 79.
31:56 - 79 personnes, tous faits là ?
31:58 - Oui, tous faits là.
31:59 - À deux ? - Oui, bien organisés.
32:00 - À deux ? - Ah oui, à deux.
32:01 - Vous avez une idée de la taille de cette cuisine, chef ?
32:05 - Pas loin de 4 mètres carrés.
32:06 - 4 mètres carrés ? - Oui.
32:07 - Mais pas au sol, quand même. Au sol, on est à moins.
32:10 Au sol, on est à 1,20 m sur 1,20 m, quoi.
32:14 - C'est assez étroit.
32:16 - Et qu'est-ce que c'est, ça ?
32:18 - Alors, en fait, ça, c'est les frigos.
32:20 C'est les frigos vivres.
32:22 Vous avez là, +4, toute la longueur.
32:24 Et à gauche, vous avez une autre porte, que c'est la -20.
32:26 C'est le congelé.
32:27 - Le congelé. Donc là, c'est +4, c'est un frigo ?
32:29 - Oui, frigo vivre.
32:30 - Ce qu'il est important de dire, c'est que...
32:32 Bon, certes, les officiants ont leur salade à manger.
32:34 - Oui.
32:35 - Et les marins, la leur.
32:37 - Oui.
32:38 - Mais tout le monde mange un des trois.
32:39 - Ils sont tous servis pareil, à part...
32:41 Oui, les officiants, on les dresse à l'assiette.
32:43 Et eux, on le dresse sur plat.
32:44 - C'est le même repas.
32:46 - C'est le même repas.
32:47 - Le même repas...
32:48 - Y a que le vin qui change en haut.
32:50 - Oui.
32:51 - En haut, les vins sont fins.
32:53 Et en bas, on est un peu à la ice tea, au Coca et à la bière.
32:57 Dans leur salle à manger,
33:02 le pacha et ses officiers disposent d'un mètre d'hôtel.
33:05 L'ambiance est plus feutrée.
33:07 Et les couverts sont en argent.
33:12 - Tous les vendredis soir, c'est pizza.
33:14 - Oui.
33:15 - Pizza pour 77.
33:17 Et le jeudi, on fait repas améliorés.
33:19 Voilà.
33:20 Ça, ils viennent.
33:21 Ça, c'est clair.
33:22 Les pizzas, les spaghettis carbo, tout ça, ils adorent.
33:26 - C'est des gamins, quoi.
33:27 - Ah ben oui, le 4h, tout ça.
33:29 Oui, c'est...
33:30 Peut-être le reste de dessert du midi, on le donne aux 4h.
33:34 - Oui.
33:35 - Donc voilà.
33:36 - Et vous vivez avec eux, par ailleurs.
33:37 - Ah oui, oui.
33:38 - Vous dormez avec eux.
33:39 - Ah oui, on écrit tous les midis et les soirs.
33:41 Si la nourriture, elle est pas bonne ou bonne, on le sait.
33:43 - Le mouchari ?
33:44 - Ah oui, oui.
33:45 Ils sont là pour ça.
33:46 Ils sont là pour ça.
33:47 - C'est quoi, votre surnom ?
33:48 - La cuisse.
33:49 - La cuisse.
33:50 - La cuisse et le comis, c'est le comis.
33:51 Voilà.
33:52 - Voilà.
33:53 La cuisse et le comis.
33:54 - Ouais.
33:55 A bord, il faut faire le deuil de certaines habitudes.
33:57 Par exemple, pour économiser de l'eau, on ne tire pas systématiquement la chasse.
34:02 Avec 2 toilettes pour près de 80 gugus, je ne vous fais pas un dessin.
34:06 Enfin, nouvelle délicatesse, je viens de découvrir que les poubelles de la cuisine sont stockées au pied de ma couchette.
34:14 Dans ces sacs bleus, biodégradables, des déchets organiques m'asserrent depuis plusieurs jours.
34:21 Heureusement pour moi, ils vont être évacués.
34:24 C'est quoi, le jeu au fond, là ?
34:28 - C'est de l'eau.
34:29 - Ah, c'est de l'eau, ça va.
34:30 J'avais peur que le sac ait perdu un peu de son...
34:33 - Oui, c'est le sac.
34:34 - De son âme.
34:35 Ah oui, c'est le contenu du sac, quand même.
34:37 Ça, c'est ma couchette, là.
34:42 Là où le sac est posé.
34:44 - Là, il n'est pas posé dessus.
34:45 - La grosse poubelle qui pue, c'est ma couchette.
34:48 - Ah, crache !
34:49 - Non, c'est de l'autre côté.
34:51 - Ah, c'est de l'autre côté.
34:52 - C'est presque là-dedans, maintenant.
34:53 - Ça me sert.
34:54 - Il faut que ça ait la même étale.
34:56 - Ok, on verra.
35:02 - Donc là, au fond, là, c'est l'eau, qu'on voit ?
35:05 - Oui, c'est la mer.
35:06 - Alors, il y a la porte extérieure.
35:09 Elle est étanche.
35:10 Et donc, effectivement, il y a toujours un peu d'eau.
35:13 - D'accord, mais elle sera ouverte quand on aura refermé, bien entendu.
35:15 - Voilà.
35:16 - Donc là, on rentre 5 sacs, on ferme et on ouvre en dessous.
35:21 - 3 sacs.
35:22 - 3 sacs.
35:23 - Donc la porte extérieure a déverrouillé.
35:24 Maintenant, vous devez compter.
35:26 - Le nombre de tours.
35:27 - 37 tours, 3/4.
35:28 - D'accord.
35:31 - Allez.
35:32 - 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8.
35:38 - 37 tours, 3/4.
35:40 Assez du sport pour sortir les poubelles.
35:42 - 5, 6, 7, 8, 9, 30.
35:49 - L'air comprimé vient de chasser les sacs.
35:52 - Allez, fermez.
35:53 - Venez, on...
35:54 - Il fait chaud.
35:57 - Un petit sport.
36:00 - Fermez la porte en comptant 37 tours, 3/4.
36:04 - Allez, 37 tours, 3/4.
36:06 Et c'est reparti.
36:07 37 tours, 3/4 pour refermer la porte, recharger avec de nouvelles poubelles
36:12 et recommencer la manœuvre autant de fois que nécessaire.
36:15 - Quand je pense qu'on râle quand on nous dit qu'il faut descendre les poubelles,
36:18 la prochaine fois, je ne râlerai plus.
36:21 Parce que comparé à l'éjection de poubelles depuis le sous-marin, de clair, c'est...
36:28 - Ça va être clair.
36:29 - Il va falloir asperger, d'abord.
36:32 - Ça doit se sentir meilleur, avec des poubelles en moins.
36:37 - Ouais, mais comment dire ?
36:40 C'est pas immédiat.
36:41 Quand on part plusieurs mois dans quelques dizaines de mètres carrés à 80 bonshommes,
36:49 il vaut mieux savoir créer sa bulle.
36:51 Moi, j'en ai besoin.
36:53 Mais à bord, difficile de s'isoler.
36:57 Toute la journée, certains transforment la salle des torpilles, ma chambre, en salle de sport.
37:02 Pompes, tractions, à défaut d'un bon football.
37:05 Les autres jouent aux cartes ou à la console de jeu.
37:11 À bord, on est coupé du monde.
37:13 Aucun journal télévisé, aucune info, sauf une laconique revue de presse envoyée par la Marine nationale.
37:19 Ici, plus de jours, plus de nuits.
37:23 Les rythmes physiologiques sont bouleversés.
37:26 Les horaires ont été repensés pour vaincre l'ennui.
37:28 4 heures de travail, 8 heures de pause, 4 heures de travail.
37:32 À bord du sous-marin, il existe un endroit peinard, dans la cale.
37:46 Là où travaille l'opérateur de car qui s'occupe des égouts du sous-marin.
37:52 Le poulain
37:54 - Bonjour. - Brian.
38:04 - Ravie de vous rencontrer. - Alors, on est où ici ?
38:07 On est dans le compartiment auxiliaire 2.
38:10 C'est un peu la mine du bateau, c'est le compartiment le plus bas.
38:12 - Ouais ? - D'accord.
38:13 Et là, ça consiste à surveiller quoi, ici ?
38:17 Donc, dans ce compartiment, on s'occupe des poulaines.
38:20 - Des poulaines ? - C'est les toilettes de l'équipage.
38:23 - Vous appelez ça les poulaines ? - On appelle ça les poulaines dans la Marine.
38:26 Vous avez la poulaine arrière, on va dire, pour tout ce qui est déchets lourds.
38:33 Donc là, vous avez une des toilettes de la CAF et les toilettes officielles qui viennent ici.
38:41 Et ensuite, une deuxième capacité ici de 600 litres qui va recevoir le reste.
38:46 Donc ça, on remplit jusqu'à ce que ça soit à bord ?
38:48 Pas forcément. On a à peu près toutes les 12 heures, on attend de reprendre la vue.
38:52 - Oui. - Ça se fait à peu près toutes les 12 heures.
38:54 - Parce qu'on évacue pas en profondeur ? - Non.
38:56 On essaie de grouper au maximum ce qu'on appelle les PIG, les pastilles d'indiscrétion générale.
39:01 Quand on arrive proche de la surface, on fait un maximum de bruit, on évacue un maximum de choses
39:05 pour être indiscrets pendant un laps de temps le plus court possible.
39:09 - D'accord. - Donc ça, ça se passe pendant les reprises de vue.
39:12 - D'accord. - Voilà.
39:13 Dès qu'on remonte en surface, quoi. Je traduis, hein.
39:15 - C'est ça. - C'est ça.
39:17 Qu'est-ce que j'ai vu, là ?
39:20 Conrad Tolstoy.
39:23 Du suicide.
39:25 J'adore ça.
39:28 - C'est ce qui vous permet de... - C'est le seul moyen de s'échapper un petit peu.
39:30 - Ouais. - Parce que, voilà, de passer plus de 80 jours
39:34 dans un compartiment où il y a seulement quelques endroits où vous pouvez vous tirer debout,
39:38 où le bruit est incessant et où les occupations sont pas forcément nombreuses,
39:43 les livres, c'est vraiment un sauve-conduite de l'esprit, quoi.
39:46 - C'est vraiment salvateur. - Ouais.
39:48 Et Clara Morgan ?
39:50 Ah, ça, c'est la petite touche personnelle des 3 mecs qui sont de quart dans ce compartiment.
39:56 - D'accord. - Une petite décoration pour égayer un peu l'ensemble...
40:00 Madame Morgan !
40:02 - Vous pouvez essayer le... - Bien sûr.
40:05 - Asseyez-vous, asseyez-vous. Il est vieux, mais il est confortable. - Le drone du...
40:07 Il est vieux, mais confortable.
40:09 Pourquoi vous êtes là ?
40:10 - Pourquoi ? Dans les soirs, je pense. - Ouais.
40:12 D'une part, pour mon éducation. Ensuite, les idéaux.
40:16 Je pense qu'il faut encore une petite dose d'idéalisme dans ce monde pour réaliser ce qu'on fait.
40:21 - Il en faut un minimum. - Il y a des idéaux la France ?
40:23 - Des idéaux patriotiques, bien sûr. - Ouais.
40:25 Bien sûr. Même si c'est difficile à avoir maintenant, je suis tout à fait conscient.
40:28 Même nous, on nage en pleine désillusion en permanence.
40:31 On sait pas vraiment...
40:34 C'est difficile d'être idéaliste, mais on se force à l'être.
40:37 - Sinon, il y aurait plus aucun sens à ce qu'on est en train de faire. - Ouais.
40:40 Et la 3e raison, la raison qui motiverait tous les jeunes à venir chez nous, c'est l'aventure en général.
40:46 L'aventure, les doses d'adrénaline, la convivialité, un type d'amitié qu'ils ne trouveront jamais dans le monde civil.
40:54 - Jamais ? - Jamais.
40:56 Moi, en 3 mois dans un sous-marin, je me suis lié d'amitié avec des gens plus que dans le civil en 10 ans.
41:02 - D'accord. - Avec d'autres.
41:03 - C'est comme ça, quoi. - Ouais.
41:05 Mais à vous écouter, il n'y a pas d'inconvénients du tout.
41:08 Il y en a, des inconvénients. Il y en a, des inconvénients.
41:10 Les inconvénients, c'est la vie de famille qui peut être difficile.
41:14 - Moi, pour l'instant, ça va. 21 ans, célibataire. - Ouais.
41:17 Je gère plutôt bien ma barque.
41:19 Après, les conditions physiques, notre santé, bien sûr, on la bousille un peu, quoi, à bosser là-dedans.
41:25 On respire de l'air artificiel, des fois de l'air qui est pas bon.
41:30 - On travaille dans un environnement gras et dangereux. - Ouais.
41:33 - Le manque de lumière, de soleil... - Du nez...
41:36 - C'est difficile. - Ouais.
41:38 L'environnement extérieur commence à manquer en général au bout de 3 semaines.
41:41 Et s'isoler, c'est quoi ? C'est aller se mettre dans une bulle et...
41:45 S'isoler, c'est par exemple en étant seul à son poste de carte, de se plonger et de lire 5, 6 livres en une semaine.
41:51 Ou alors, tout simplement, d'aller se mettre dans sa banette et d'essayer de dormir un peu.
41:57 De toute manière, tout est sujet à nostalgie, ici.
42:00 Tout est sujet à nostalgie.
42:01 Une photo, une odeur, quoi que ce soit, si ça vous rappelle chez vous, il faut vite l'oublier.
42:06 Il faut passer à autre chose.
42:07 - On est content de vous avoir rencontré dans les entrailles du bateau. - Ouais.
42:11 - En fait, le mec le plus intéressant de ce bateau, il est en dessous.
42:16 - Merci à vous. - C'est quoi, votre grade ?
42:18 - 2d maître. - 2d maître.
42:20 Étonnante rencontre.
42:23 Après la marine, Brian rêve de bosser dans l'édition.
42:27 Le casabianca a été construit dans les années 80, mais sa conception est encore plus ancienne.
42:43 Eh oui, le florant de nos forces sous-marines a été pensé il y a plus de 40 ans, à l'époque du téléphone à cadran.
42:49 A bord, tout est donc très mécanique, plus proche du tracteur agricole que d'une Formule 1.
42:55 A l'exception des sonars.
42:58 - Devant les sonars.
43:03 Le sonarman qui est devant, là, devant les écrans, il écoute tous les bruits que font les bâtiments.
43:10 Et sa mission, autour de nous, et sa mission, c'est de détecter tout ce qui passe autour de nous.
43:15 D'éventuels sous-marins, des bâtiments de commerce, des bâtiments de guerre.
43:18 Et ça nous permet d'être sûrs que l'on connaît au mieux toute la situation qui nous entoure.
43:25 - Alors notamment pour les phases de remontée, c'est indispensable ?
43:28 - Notamment pour les phases de remontée, parce que là, actuellement, on est sous l'eau.
43:30 Tous les bâtiments passent au-dessus.
43:32 - Aucun bâtiment ne peut venir nous percuter ?
43:34 - Aucun bâtiment ne peut venir nous percuter.
43:36 On a une immersion de sécurité qui nous permet d'être...
43:38 - A 70 mètres.
43:39 - Voilà, là, on est à 70 mètres.
43:41 On est bien en dessous de tous les bateaux qui peuvent transiter dans cette zone.
43:44 On va vous mettre sur un bâtiment de commerce, là.
43:46 Ce bâtiment de commerce, on perçoit des battements.
43:49 - Là, je suis chez lui, là. Je suis sur le bâtiment de commerce, là.
43:52 - Effectivement, vous êtes sur le bâtiment de commerce.
43:55 - C'est le 136.
43:57 - Et là, on perçoit des mouvements de pales.
44:02 - D'accord.
44:07 Comment est-ce que vous savez que c'est un bâtiment de commerce ?
44:10 - Alors, c'est un bâtiment de commerce parce qu'il a un bruit particulier.
44:13 Il a aussi un nombre de pales, un nombre de tours, lignes d'arbres.
44:17 - Oui.
44:18 - Donc, la rotation de l'hélice, en fait, qui est particulière
44:21 et qui est propre à un certain type de bâtiment.
44:24 Chaque bâtiment a sa propre signature.
44:26 - Et ça, lui, il le sait, ça ?
44:27 - Et ça, lui, il le sait.
44:28 - Vous connaissez tous les bruits que font les hélices de toutes sortes de bâtiments ?
44:31 - A peu près, oui.
44:32 - Oui ?
44:33 - Facilement, ça.
44:35 - Facilement.
44:36 - Alors, lui, il va être capable de distinguer des bâtiments de guerre,
44:39 des sous-marins, des bâtiments de commerce.
44:42 Tout ce type de bateau.
44:43 Et après, on fait appel à des oréadors.
44:45 - Oui.
44:46 - Des oréadors, c'est un veilleur sonore qui a des qualifications supérieures.
44:50 - Oui.
44:51 - Qui a une expérience plus importante et qui, lui, est capable de dire,
44:54 dans tel type de classe de bateau, c'est tel type de bateau.
44:58 - C'est tel bateau.
44:59 - Avec précision.
45:00 - Avec précision.
45:01 - Et quand on est au milieu de l'Atlantique,
45:02 il y a bien des endroits où il n'y a pas de bruit du tout ?
45:04 - Alors, il y a des endroits où il y a très peu de bruit.
45:06 Mais s'il n'y a pas de bruit de navigation, il y a du bruit de faune.
45:09 C'est-à-dire que vous avez des baleines, vous avez des crevettes,
45:11 vous avez des poissons, vous avez...
45:13 - Vous connaissez les animaux aussi, à l'oreille ?
45:16 - Il va vous en faire écouter un.
45:18 - Qu'est-ce qu'on a ?
45:19 - C'est quoi, ça ?
45:24 C'est la crevette, ça ?
45:26 - Donc là, on a... Il y a du bruit.
45:32 C'est pas du bruit humain, c'est du bruit...
45:35 - Commandant, si je dois faire un métier dans ce bateau...
45:38 - Celui-là ? - Ouais.
45:39 C'est celui qui me...
45:40 Ah ouais, ouais.
45:41 Ah ouais, c'est facile.
45:42 - C'est l'aspect audio. - Tout ce que vous m'avez montré...
45:45 Bon, ça colle avec les métiers qu'on fait, hein.
45:47 - C'est vrai. - C'est quand même un casque sur les oreilles.
45:49 Moi, ma vie, trois quarts de mon métier, c'est un casque sur les oreilles.
45:52 - Lorsqu'on chasse un sous-marin,
45:54 tous les regards sont concentrés vers cet homme-là.
45:57 - Ouais. - Parce que c'est lui qui...
45:58 - Et l'oreille d'or. - Et l'oreille d'or.
46:00 Parce que c'est lui qui va trouver la trace du sous-marin.
46:03 C'est lui qui va dire "le sous-marin, il est là".
46:05 Mon immersion à bord du Casablanca touche bientôt sa fin.
46:20 Dans 24 heures, je serai débarqué au large de l'île de Chypre.
46:24 Bientôt le grand air, bientôt la liberté.
46:29 (Bruit de moteur)
46:32 Pascal, instrumentiste sur le réacteur, vit également son dernier voyage.
46:42 - T'as combien de décalage ? - Ouais, là, c'est 4 pas.
46:46 - 4 pas. - Je contrôle toujours sur le 5.
46:49 - Ça marche. - Sur l'IP2.
46:51 Cela fait 15 ans que ce fils de sous-marinier a signé dans l'effort sous-marin.
46:56 - C'est bon, tu sais à quelle heure ?
46:59 15 années pendant lesquelles son engagement a pris le pas sur sa vie de famille.
47:04 15 années à appréhender les départs et les retours à la maison.
47:08 15 années pour accepter que la vie continue, même quand on n'est pas là.
47:13 - Le moment où tu rentres, c'est un moment délicat.
47:18 Parce qu'il faut réapprendre à vivre avec l'autre, tout en se ménageant.
47:23 Et... Enfin, faut pas braquer.
47:26 T'arrives pas en terrain conquis, en fait.
47:29 Justement, il faut que tu...
47:31 Naturellement, tu réinstaures un certain équilibre et une certaine hiérarchie dans le couple.
47:36 Tu as ta place, aussi.
47:38 Mais ça, tu dois le faire naturellement, intelligemment.
47:41 Le problème, c'est que... C'est quand t'y arrives pas.
47:44 - 40 % de l'équipage est donc célibataire.
47:50 Pas facile pour les autres, mariés, pères de famille, de disparaître 6 mois par an.
47:55 C'est un très lourd tribut à payer.
47:58 - Alors, mon épouse, elle comprend aujourd'hui ce qui me stimule encore.
48:08 Et... Mais... Mais elle trouve que c'est cher payé.
48:13 Voilà. Elle trouve que...
48:15 Avoir sacrifié tant d'années, c'est cher payé.
48:20 Parce que c'est 15 ans...
48:22 C'est 15 ans de vie entre parenthèses.
48:25 Donc... Voilà.
48:27 Je pense qu'il faut que je m'arrête maintenant, parce qu'après, mon épouse ne comprendra pas.
48:32 Elle comprendra plus.
48:34 Il y a 15 ans, j'avais envie de faire un métier, le métier que personne faisait.
48:39 Aujourd'hui, j'ai envie de faire le métier de monsieur tout le monde.
48:42 J'aspire à la normalité, ce qui va justifier mon départ un peu aussi dans la marine.
48:48 C'est que... Voilà. Mon fils, il a 6 ans. Il a besoin de moi.
48:52 Aujourd'hui, il me le signifie textuellement.
48:56 "On a besoin de toi." C'était ses derniers mots.
48:59 Et je sens qu'on a besoin de moi, puisque jamais j'ai servi ma nation aujourd'hui.
49:05 Enfin, ces dernières 15 ans... Ces dernières quinzaines d'années, j'ai servi ma nation.
49:10 Aujourd'hui, je dois penser à ma famille.
49:13 Voilà, parce qu'ils ont besoin de moi, là. Là, maintenant, ils en ont besoin.
49:17 T'imagines un peu les parties de roller que je vais pouvoir faire ?
49:19 Ça, ça va être bon, ça. Il y a plein de trucs sympas qui vont m'attendre.
49:22 T'imagines pas comment je suis pressé.
49:25 Ça va être bon.
49:28 Un Zodiac de la marine vient d'accoster.
49:38 Il doit me conduire à Limassol, sur l'île de Chypre.
49:41 Et pour être honnête, je ne suis pas mécontent de quitter le Casablanca.
49:45 La promiscuité, c'est pas mon truc, même si c'était passionnant.
49:50 De toute façon, je n'ai vécu qu'une croisière de complaisance.
49:53 Je n'ai aucune idée de l'envers du décor.
49:56 La mission militaire, l'immersion pendant 45 jours, avec la peur d'être repéré par le pays que l'on est venu espionner.
50:04 Dans trois mois, Pascal sera de retour auprès de sa famille dans la région d'Orléans.
50:15 Il postulera sans doute pour travailler dans le nucléaire civil, dans une centrale près de chez lui.
50:21 Dans les entrailles du sous-marin, Brian a déjà épuisé tout Tolstoy et tout Dostoevsky.
50:29 Le garçon est brillant, la marine va l'inciter à évoluer vers d'autres postes à bord du Casablanca.
50:36 Nicolas, le pacha, laissera derrière lui Toulon et son escadrille.
50:40 Dans trois ans, après un passage par l'école de guerre, il reprendra la mer à la tête d'un sous-marin nucléaire lanceur d'engin,
50:48 le monstre porteur de l'arme atomique.
50:56 Et moi ? Moi je pars vers de nouveaux horizons.
51:00 Demain, ailleurs, j'ai rendez-vous avec d'autres hommes et aussi des femmes aux vies peu ordinaires.

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