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Laurent Marcangeli, président du groupe "Horizons et apparentés" et député de Corse-de-Sud.

Il est le challenger qui s'impose là où ne l'attend pas... Que ce soit comme maire d'Ajaccio, comme député ou comme président du groupe Horizons à l'Assemblée, Laurent Marcangeli a toujours déjoué les pronostics.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 Il est le challenger qui s'impose là où on ne l'attend pas forcément,
00:03 que ce soit comme maire d'Ajaccio, comme député
00:06 ou aujourd'hui comme président du groupe Horizon à l'Assemblée.
00:09 Mon invité a toujours déjoué les pronostics.
00:12 Musique intrigante
00:14 ...
00:27 -Bonjour, Laurent Marcangeli. -Bonjour.
00:30 -Vous faites partie de ces députés qui ont eu une adolescence
00:33 un peu différente, on va dire, dans votre chambre.
00:36 A l'époque, c'était pas des posters de chanteurs
00:38 ou d'acteurs de cinéma, mais plutôt Jacques Chirac
00:41 et le général de Gaulle. -Non, il y avait pas que ça.
00:44 Il y avait des joueurs de foot, des top modèles,
00:46 mais il est vrai que...
00:48 -Votre père raconte qu'il trouvait ça étonnant
00:51 de vous voir afficher des posters. -Il avait été étonné,
00:54 parce que personne ne s'intéressait assez à la politique
00:57 jusque-là, et à l'adolescence, j'ai été pris de passion
01:00 pour la politique et je supportais
01:02 jacques Chirac alors candidat à la présidence de la République.
01:06 -C'est la présidentielle de 1995
01:08 qui a fait un peu l'objet d'un déclic chez vous.
01:10 Qu'est-ce qui vous a passionné à ce point-là
01:13 dans cette campagne présidentielle de Jacques Chirac ?
01:16 -Sa volonté. -C'est pas tant le combat d'idées,
01:18 c'est plutôt l'histoire de cet homme donné battu,
01:21 ce côté presque romanesque de cette...
01:23 -Comme beaucoup de jeunes, j'ai été séduit
01:26 par son discours sur la fracture sociale.
01:28 -Il y avait cet aspect-là. -Je considérais
01:30 qu'il y avait un certain nombre de problèmes
01:33 dans le pays qui n'avaient pas été réglés.
01:35 J'étais né en 1980, juste avant l'élection
01:38 de François Mitterrand à la présidence de la République.
01:41 Cet homme, ce physique, cette stature,
01:43 et les difficultés qu'il a rencontrées
01:46 pour arriver jusque-là m'ont séduit.
01:48 -Le côté "homme trahi par ses proches,
01:50 "par ses amis". -Le côté "conte de Monte-Cristo",
01:53 je le dis souvent, que je disais à l'époque en même temps.
01:56 C'est un peu romanesque et ça m'avait attiré.
01:59 -A la présidentielle suivante,
02:01 il se trouve que Jacques Chirac est venu tenir un meeting
02:04 dans votre propre ville, à Jacques Ciot, en 2002.
02:07 On va revoir un extrait de son discours.
02:09 -La Corse a besoin de bien d'autres choses
02:14 que d'un rafistolage institutionnel
02:18 qui la placerait en marge de la République.
02:22 La Corse et les Corses ont besoin que soit mis
02:25 définitivement un terme à la violence
02:28 qui sape les fondements même de la paix sociale sur l'île.
02:33 -Si je vous remonte ces images,
02:34 c'est parce qu'elles vous rappellent quelque chose.
02:37 Vous aviez 21 ans, vous étiez sur place,
02:40 mais vous vous êtes monté sur scène
02:42 et vous avez tenu un discours devant Jacques Chirac lui-même.
02:45 C'est un moment qui vous a marqué ?
02:47 -On voit la photo. -On vous voit avec lui.
02:50 -De lui parler à l'oreille, ça m'a marqué
02:52 parce que c'était ma première expression en public.
02:55 -En plus, devant celui qui était peut-être pas votre modèle,
02:58 mais en tout cas, que vous admiriez.
03:00 -Qui m'avait beaucoup inspiré,
03:02 qui était la raison pour laquelle je me retrouvais là.
03:05 On m'avait fait la proposition d'ouvrir ce meeting.
03:08 C'est toujours un moment d'émotion de voir ces images
03:11 parce qu'il y avait du monde,
03:12 un chapiteau qui avait été fait exprès pour.
03:15 Je me suis retrouvé à 21 ans devant plusieurs milliers de personnes
03:19 chez moi pour parler de cette campagne présidentielle
03:22 si particulière de 2002 avec Jacques Chirac au premier an.
03:25 -Et avec un ancien député qui est venu vous voir ce jour-là
03:28 et qui vous a dit "Vous, vous serez député un jour".
03:31 -Oui, mon prédécesseur, Jean Baudry...
03:33 -Vous vous repérez ce jour-là. -Oui, qui avait été député
03:36 à plusieurs reprises de la première circonscription de la Corse du Sud.
03:40 Je lui avais répondu, il va falloir quand même
03:42 que je fasse mes preuves avant, que j'ai quelques diplômes.
03:46 Il m'avait dit "Non, vous n'y pourrez rien,
03:48 "vous serez député". -Au-delà de Jacques Chirac,
03:51 ce sont les valeurs de la droite gaulliste
03:53 qui vous ont séduit. A 16 ans, vous avez pris votre carte au RPR,
03:57 alors que vos parents y votaient plutôt pour les nationalistes corses.
04:00 Est-ce que la cause nationaliste vous a tenté à un moment ?
04:04 -Non, non, parce qu'au début de mon engagement, à 15 ans,
04:07 j'ai de suite été happé par les idées portées
04:11 par la droite gaulliste, mais je suis corse.
04:15 Ca, c'est indissociable de mon identité.
04:19 Je n'ai pas besoin d'être nationaliste
04:21 pour l'être plus que d'autres. -C'est pas compliqué
04:23 de faire de la politique en Corse quand on n'est pas nationaliste.
04:27 Vous êtes le seul député non-nationaliste en Corse.
04:30 -Oui. Vous savez, ce sont des cycles.
04:32 Les nationalistes ont mis des années avant de réussir
04:35 à avoir un seul élu, ne serait-ce que dans une mairie,
04:38 parce qu'ils étaient rejetés par la population.
04:41 Il y a eu des évolutions, beaucoup de changements
04:44 et, en ce qui me concerne,
04:45 quand je me présente devant les électrices et les électeurs,
04:48 ça se passe plutôt bien pour moi,
04:50 peut-être parce que les discours et les actes que je tiens
04:54 conviennent et qu'il n'y a pas besoin d'être nationaliste
04:57 pour pouvoir être élu et accepté par la population.
05:00 -C'est vrai qu'au lycée, on vous surnommait le maire ?
05:03 -Oui. -Vous aviez déjà l'ambition
05:05 de devenir maire d'Ajaccio ? -Oui, parce que je l'avais dit.
05:08 Je voulais être maire de la ville un jour,
05:10 car c'est une ville qui m'est à chair,
05:12 et personne ne pensait véritablement
05:14 que j'allais avoir cette forme de constance
05:17 dans l'engagement et que ça allait finalement arriver.
05:20 -On va raconter votre parcours,
05:22 mais effectivement, ça s'est fait étape par étape,
05:25 mais vous y êtes arrivé.
05:27 Vous êtes d'abord devenu député en 2012,
05:29 avant d'être élu maire, mais dès l'âge de 20 ans,
05:32 vous vous êtes présenté au municipal
05:34 sur la liste du maire de l'époque, Marc Angeli,
05:36 qui n'est pas de votre famille,
05:38 en tout cas assez éloigné. -C'était un petit cousin.
05:41 Nous nous sommes connus que dans le cadre de la vie politique,
05:44 puisqu'il avait un accord avec le RPR,
05:48 et moi, j'étais candidat en tant que membre du RPR.
05:50 J'avais beaucoup de cheveux, quand même.
05:53 Le temps passe.
05:54 Et donc, voilà, j'étais sur le contingent RPR,
05:56 j'étais le Benjamin de cette liste.
05:58 J'étais assez jeune, puisque je n'avais que 20 ans.
06:01 -6 ans plus tard, vous avez été élu dans l'opposition.
06:04 Vous vous êtes imposé comme le chef de l'opposition.
06:07 Vous avez travaillé à réunir la droite d'Ajaccio,
06:10 c'était un parti assez divisé,
06:12 et en 2014, vous avez été élu maire.
06:15 On sent vraiment la force de votre détermination
06:17 pour atteindre vos objectifs.
06:19 C'était vraiment votre objectif politique.
06:21 -Je crois que vous pouvez avoir des candidats
06:24 de n'importe quelle tendance qu'ils soient.
06:26 Lorsque vous voulez chercher une victoire,
06:29 il faut avoir une ferme détermination.
06:31 Surtout quand vous avez une opinion qui est partagée.
06:34 Vous aviez un maire sortant qui était installé depuis 13 ans.
06:38 Les gens sont assez rétifs aux changements.
06:41 On change de maire alors que le sortant est candidat,
06:44 c'est assez rare.
06:45 C'est ce qui s'est passé en 2014 à Ajaccio.
06:48 -Vous dites que vous n'avez pleuré que deux fois en politique,
06:51 le jour où vous avez été élu maire et le jour où vous aviez su
06:54 que vous alliez devoir renoncer à votre mandat
06:57 parce que vous aviez été élu député, réélu, en 2022.
07:00 Si vous étiez si heureux dans ce mandat de maire,
07:03 pourquoi vous l'avez abandonné ?
07:05 -C'était le moment.
07:06 Il y avait une situation qui a exigé que je sois présent ici.
07:09 D'abord parce que la Corse a vécu des moments difficiles,
07:12 notamment suite à l'agression d'Yvan Colonna,
07:15 qui lui a coûté la vie.
07:16 On a eu des scènes émeutes de violences très graves.
07:19 -Vous avez rédigé un rapport parlementaire.
07:22 -Je suis rapporteur de la commission d'enquête
07:24 sur les faits qui se sont produits.
07:26 Je considère que le lien se distingue
07:28 entre la République et la Corse,
07:30 à tel point qu'il fallait qu'il y ait une voix assez forte
07:33 dans la majorité présidentielle
07:35 pour représenter la Corse.
07:37 C'est ce que j'essaie de faire.
07:38 -Ce qui vous caractérise, c'est un côté "eternel challenger".
07:42 Personne ne croyait en vos chances aux législatives de 2012.
07:45 Vous avez été le seul, sur toute la France,
07:48 à reprendre un siège de député à la gauche, cette année-là.
07:51 En 2014, à Ajaccio, vous étiez aussi le "challenger".
07:54 En 2022, personne n'avait vraiment anticipé
07:57 que vous alliez devenir le président du groupe Horizon,
08:00 le parti d'Edouard Philippe.
08:02 Est-ce que vos adversaires n'ont pas tendance
08:05 un peu à vous sous-estimer ?
08:06 -Mal leur en prend, visiblement.
08:08 -Pourquoi est-ce qu'ils vous sous-estiment ?
08:11 -Je sais pas. Je crois qu'ils sont de moins en moins
08:13 de nature à me sous-estimer,
08:15 parce qu'on me voit un peu plus venir,
08:17 chez moi et même ici.
08:19 Mais pour la présidence du groupe,
08:21 ça s'est passé quand même de manière très naturelle.
08:24 Les liens que j'entretiens avec Edouard Philippe
08:27 sont anciens, nous nous connaissons depuis 11 ans.
08:29 Ce sont des liens basés sur l'amitié
08:31 et l'identité de point de vue.
08:33 Quand je me suis présenté à cette élection interne,
08:36 ça s'est passé plutôt bien,
08:38 mais les journalistes n'avaient pas forcément prévu
08:41 le scénario. Ils ne l'ont pas vu venir.
08:43 -On sent qu'il y a quelque chose de passionné en vous
08:46 dans votre rapport à la politique,
08:48 au point que certains vous ont reproché d'être un peu trop rude.
08:52 Vous le reconnaissiez récemment dans une interview.
08:55 "C'est vrai qu'à 31 ans, j'étais plus âpre et rude
08:58 "que maintenant, j'étais dans une version 1.0,
09:00 "je n'étais pas père de famille ni marié."
09:03 Vous avez changé ? -On change tous.
09:05 -Vous vous êtes calmé ? Enfin, assagi ?
09:07 -Bien sûr. Heureusement, d'ailleurs.
09:09 Heureusement qu'on s'assagit.
09:11 Ensuite, on voit la difficulté des choses.
09:14 On les appréhende d'une autre manière
09:16 et surtout, on apprend à faire avec les autres
09:18 malgré les différences.
09:20 Parfois, j'étais plus conniere, plus puncher.
09:22 Je pense que depuis un an, en tant que président de groupe
09:26 à l'Assemblée, ceux qui me fréquentent,
09:28 y compris mes homologues, voient que je suis un homme de dialogue,
09:32 un homme qui s'assure de faire avec les autres,
09:34 qui essaie de respecter la fonction et le cadre
09:37 de l'Assemblée nationale.
09:38 -Il y a eu cet incident,
09:40 dont le Canard enchaîné s'est fait l'écho.
09:42 C'était au mois de février de cette année.
09:45 Le Canard enchaîné raconte que vous avez failli en venir aux mains
09:48 dans l'hémicycle avec le député LR Aurélien Pradié.
09:51 Le journal précise que vous avez menacé de lui casser les dents
09:55 et que les huissiers ont dû intervenir.
09:57 Vous étiez prêts à faire le coup de poing ?
10:00 -C'est exagéré.
10:01 Les huissiers n'ont pas dû intervenir.
10:03 Ca s'est passé hors séance, dans l'hémicycle,
10:06 mais en suspension.
10:07 Je dirais qu'une seule chose.
10:09 Je suis très courtois.
10:11 Je respecte énormément les autres.
10:13 J'attends en retour que les autres en fassent de même pour moi.
10:17 Ca n'a pas été le cas.
10:18 -Vous pouvez aussi faire preuve d'une forme de dureté,
10:21 y compris avec vos amis.
10:23 Jean-Jacques Ferrara, qui était votre suppléant à l'Assemblée,
10:26 vous a succédé comme député en 2017,
10:29 puisque vous avez choisi de rester maire d'Ajaccio.
10:31 Vous deviez choisir entre les deux.
10:33 Mais en 2022, vous lui avez repris le siège
10:36 de façon un peu brutale.
10:37 Il n'y a pas de place pour l'amitié, en politique, selon vous ?
10:41 -Il n'y avait pas de place pour prendre le risque
10:43 de perdre le siège.
10:45 -Vous avez sacrifié une amitié, parce que c'était votre ami.
10:48 -C'était un des moments les plus difficiles
10:51 de ma vie politique et de ma vie personnelle.
10:53 Effectivement, il n'y a pas que des liens politiques,
10:56 il y a aussi des liens personnels qui se créent.
10:59 Mais à un moment, il y a eu une décision qui a été prise,
11:02 par moi, mais qui n'a pas été prise que par moi.
11:05 Il y a eu des discussions, au préalable, avec d'autres.
11:08 Moi, je n'agis pas sur des coups de menton.
11:10 Je dirais... On n'était pas sur de l'improvisation,
11:13 il y avait une longue réflexion.
11:15 Je sais que j'ai fait du mal à cet homme
11:18 pour lequel j'ai vraiment profond respect,
11:20 mais je peux vous dire avec certitude,
11:22 vu la difficulté de l'élection qui a été la mienne,
11:25 que ça aurait été plus difficile si ça avait été lui le candidat
11:29 et qu'on n'aurait pas trois députés autonomistes
11:31 élus à l'Assemblée nationale, mais quatre.
11:34 -Votre trajectoire politique suit de très près
11:36 celle d'Edouard Philippe.
11:38 Vous étiez tous les deux engagés à droite,
11:40 vous avez tous les deux soutenu Alain Juppé.
11:43 Vous vous avez rallié Emmanuel Macron,
11:45 vous présidez le groupe Horizon à l'Assemblée.
11:48 Est-ce que c'est pas un peu comme avec Jacques Chirac,
11:51 entre vous deux ? Est-ce que c'est pas une histoire d'hommes,
11:54 d'hommes de respect ? Vous avez pas besoin de ça
11:57 pour vous engager derrière quelqu'un ?
11:59 -Si j'avais pas ce rapport à Edouard Philippe,
12:02 ce rapport de fidélité, de respect, d'admiration,
12:05 parce que je crois... -Vous avez besoin d'admirer.
12:08 -J'ai besoin d'avoir confiance.
12:10 Je ne me range pas tous les quatre matins derrière quelqu'un.
12:14 Edouard Philippe est un homme d'une très grande qualité,
12:17 tant d'un point de vue politique qu'humain.
12:20 Ca compte pour moi.
12:21 -On va passer à notre quiz, à présent,
12:23 si vous le voulez bien. Le principe est simple.
12:26 Je commence une phrase et c'est vous qui la complétez.
12:29 C'est parti. S'il y a un cliché sur les Corses,
12:32 que je confirme. -Susceptible.
12:34 -Ah. -Oui. On est plutôt susceptibles.
12:36 -Un bon président de groupe doit avant tout...
12:39 -Rassembler. Il doit rassembler son groupe,
12:42 il doit rassembler son groupe derrière une ligne politique,
12:45 sur des textes et sur une attitude à avoir dans l'hélicycle
12:48 et même en dehors.
12:49 -Enfin, en 2027, Edouard Philippe sera...
12:53 -Je ne sais pas.
12:54 -Élu président de la République ? Vous le souhaitez ?
12:57 -Il a les qualités pour être un bon président de la République,
13:00 comme un bon Premier ministre,
13:02 mais il doit être pris par lui et par lui seul,
13:05 et ensuite, le peuple français décidera
13:07 qui sera le chef de l'Etat en 2027.
13:09 -Merci, Laurent Martangeli, d'être venu dans "La Politique et moi".
13:13 -Merci.
13:14 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
13:16 Générique
13:17 ...
13:26 [Musique]

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