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Conférence régionale des acteurs de la lutte contre la pauvreté, le 4 juillet 2023 à Sciences Po Bordeaux (Pessac, 33)
//Le futur pacte des solidarités en Nouvelle-Aquitaine : enjeux et perspectives//

Intervention en visio de Cécile Tagliana, déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté
Transcription
00:00 Bonjour à toutes et à tous.
00:04 Désolée de ne pouvoir être avec vous aujourd'hui en Nouvelle-Aquitaine,
00:08 mais bravo pour l'organisation de cette journée,
00:13 cette journée placée sous le signe de la transition
00:17 entre la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté
00:20 et le Pacte des solidarités.
00:22 Il était d'ailleurs prévu que la présentation du pacte
00:26 ait lieu aujourd'hui, ce matin, par la Première ministre,
00:30 mais la réunion étant repoussée au 19,
00:33 j'insisterai uniquement sur les grandes lignes du pacte
00:36 et ne pourrai donc pas vous détailler tout ce qui est prévu dedans.
00:40 Se donner un temps de bilan est important avant de passer à une nouvelle étape,
00:44 à la fois pour se féliciter des réussites
00:46 et puis aussi pour voir quelques marges de progrès.
00:49 C'est pourquoi je voudrais tracer quelques pistes de continuité
00:52 et de complémentarité entre la Stratégie pauvreté
00:55 et le Pacte des solidarités.
00:57 Pour commencer, mettons-nous d'accord sur le fait
00:59 que les Français attendent beaucoup de l'État,
01:01 sans d'ailleurs toujours savoir de quel État on parle,
01:04 est-ce que c'est l'État, les collectivités, la sécurité sociale,
01:07 voire parfois des associations mandatées par ces organismes.
01:12 Un État protecteur et un État régulateur, jusque sur les territoires,
01:16 comme le matérialisent les trois grandes réformes majeures
01:19 sur lesquelles le Pacte des solidarités vient s'appuyer.
01:22 France Travail, d'une part, le service public de la petite enfance,
01:26 d'autre part, est la solidarité à la source.
01:29 Il n'est pas possible sur ces grandes réformes
01:31 que l'État fasse tout lui-même,
01:32 mais par contre, il est attendu qu'il mette en place
01:34 les conditions d'une collaboration réussie
01:37 pour toucher tous les habitants qui ont besoin de soutien
01:39 et agrandisse leur possibilité de choix.
01:42 Je parle en effet plutôt de choix que de moyens financiers,
01:45 même si nous utilisons souvent, et même très souvent,
01:48 la référence au taux de pauvreté à 60% du revenu médian.
01:52 Car la pauvreté, ce n'est pas seulement les conditions de vie,
01:55 mais bien l'absence de choix.
01:57 Pas de choix de la voie scolaire pour son enfant,
01:59 pas de choix d'un emploi qu'on aime,
02:01 pas de choix dans l'alimentation, pas de choix dans les loisirs.
02:05 Avec ces partenaires du futur Pacte des solidarités,
02:08 l'État se donne comme ambition d'ouvrir les possibilités de choix
02:11 de tous les Français qui ne les ont pas eues à la naissance
02:14 ou qui les ont perdues au cours de leur vie.
02:17 Le Pacte des solidarités, c'est l'aboutissement de la stratégie
02:19 de prévention et de lutte contre la pauvreté.
02:22 La stratégie pauvreté, elle a été fondée sur deux grands axes
02:25 que vous connaissez très bien, l'investissement social
02:27 dès la petite enfance et la sortie de la pauvreté par le travail.
02:31 Le Pacte, il prolonge ces deux grands axes qui ont commencé
02:34 à porter leurs fruits et il les complète à la fois à l'intérieur
02:36 des axes et avec deux autres axes de travail.
02:40 Concernant l'investissement social dans la petite enfance,
02:43 il s'agit de consolider et de capitaliser sur les démarrages
02:47 réussis dans la stratégie de lutte contre la pauvreté.
02:51 Si j'en cite quelques-uns, les bonus handicap, territoire et mixité
02:55 pour les crèches, les dispositifs à vocation d'insertion professionnelle
03:00 pour ces mêmes crèches et les accueils du jeune enfant
03:03 qui ont permis pendant quatre ans au secteur de la petite enfance
03:06 de renouer avec l'universalité de l'accueil et l'adaptation
03:09 aux enfants des familles plus défavorisées.
03:12 Le Pacte, il va permettre de consolider cet existant
03:15 et de le généraliser avec une plus grande ampleur
03:18 grâce au service public de la petite enfance.
03:21 On dispose aussi depuis peu de nouvelles études françaises
03:25 qui montrent que le développement des enfants défavorisés
03:28 peut être particulièrement amélioré lorsqu'ils fréquentent
03:30 un accueil collectif de qualité ou un accueil individuel de qualité
03:34 avec des temps collectifs entre deux et trois ans.
03:37 Le service public de la petite enfance avec les mesures spécifiques
03:40 comprises dans le Pacte s'adressera donc à ce public particulier
03:44 au sein de tous les petits Français.
03:46 La stratégie pauvreté, toujours dans cet axe d'investissement social,
03:49 avait fait du primaire sa priorité.
03:52 Le dédoublement des classes en grande section, en CP, en CE1,
03:55 commence à porter ses fruits.
03:57 Le président l'a confirmé lors de son déplacement à Marseille,
03:59 d'ailleurs vous avez pu l'entendre.
04:01 Il faut donc continuer, ne pas abandonner,
04:04 y compris grâce à la revalorisation des métiers,
04:06 pour investir dans l'éducation.
04:09 Le Pacte étendra cet effort à l'âge de l'adolescence,
04:12 cet âge difficile, âge des décrochages,
04:14 décrochage scolaire mais aussi décrochage familial,
04:17 en articulation avec la réforme du collège,
04:19 en particulier le renforcement de la sixième,
04:22 et celle du lycée professionnel,
04:23 mais je pense que la rectrice vous en parlera tout à l'heure.
04:27 Par ailleurs, les mesures de la stratégie pauvreté
04:29 étaient concentrées sur l'éducation scolaire.
04:32 Or, l'égalité des chances, elle passe tout autant
04:34 par le soutien à la parentalité
04:37 et par l'ouverture des horizons des enfants,
04:39 par la culture, le sport, les vacances.
04:42 De cette manière, il s'agit d'augmenter
04:44 le capital social de tous les enfants
04:46 et de préparer un avenir plus ouvert en termes de possibilités,
04:49 y compris sur les compétences d'innovation,
04:51 de création, d'autonomie,
04:52 dont auront besoin les métiers de demain.
04:55 Le deuxième axe de la stratégie de prévention et lutte
04:58 contre la pauvreté, portait sur la sortie de la pauvreté
05:01 par le travail.
05:02 Elle a déjà permis de faire sortir d'une certaine invisibilité
05:05 les bénéficiaires du RSA par une accroche beaucoup plus forte
05:08 entre l'État et les conseils départementaux,
05:11 grâce à la contractualisation,
05:13 et grâce à un rapprochement avec Pôle emploi
05:14 sur l'accompagnement global en particulier.
05:17 Si l'amélioration de la conjoncture générale
05:19 a joué dans la réduction du nombre de bénéficiaires du RSA,
05:24 le service public de l'insertion et de l'emploi
05:26 a quant à lui posé les jalons d'une coopération pragmatique
05:29 entre les acteurs de l'emploi et du social.
05:32 Il faut encore aller plus loin,
05:34 mettre encore plus d'acteurs autour de la table,
05:36 les coordonner, leur donner des objectifs
05:38 et des outils communs.
05:39 Ce sera l'objet de la réforme d'ampleur,
05:42 réforme systémique de France Travail,
05:44 dont l'attention aux plus éloignés de l'emploi,
05:46 ceux qui ont le plus de difficultés sociales,
05:48 de freins sociaux comme on dit,
05:50 fait le lien avec le pacte des solidarités
05:52 dans une stratégie de plein emploi pour tous.
05:56 Ce sera un axe absolument majeur
05:58 de la stratégie pauvreté en lien avec France Travail.
06:02 La stratégie pauvreté avait aussi lancé des pistes
06:04 sur d'autres champs d'action
06:06 qui sont encore depuis deux ans sur le devant de la scène.
06:10 Il s'agit notamment de l'accès au droit.
06:12 La stratégie portait quelques actions
06:14 comme la formation des travailleurs sociaux,
06:16 le premier accueil social inconditionnel.
06:18 Elle portait surtout le revenu universel d'activité
06:21 qui n'a toutefois pas abouti.
06:23 La solidarité à la source,
06:24 au sein du pacte des solidarités,
06:26 donne l'horizon à quelques années
06:28 d'une ambition de recours automatique
06:30 au droit pour tous.
06:32 Dans l'attente, et pour même compléter cette ambition,
06:35 les expérimentations de territoire zéro non-recours,
06:38 dont le choix est en train d'être fait en ce moment même,
06:41 permettront de tester les meilleurs moyens
06:43 de favoriser l'accès au droit,
06:45 en particulier par davantage d'allers verts
06:48 pour toucher les personnes les plus éloignées des institutions.
06:52 J'ai la conviction que nous pouvons arriver,
06:53 malgré les complexités qui font quelque part la richesse
06:56 de notre système de protection sociale,
06:59 à toucher davantage de non-recourants
07:00 si nous nous coordonnons au plus près des territoires.
07:03 Les préfectures, les France Service,
07:05 les conseils départementaux,
07:07 les caisses de sécurité sociale,
07:08 les CCAS, les centres sociaux,
07:10 les associations d'inclusion numérique, etc.
07:13 Ils pourront s'appuyer sur les collectifs d'acteurs
07:15 et les projets soutenus par les commissaires
07:17 à la lutte contre la pauvreté,
07:18 et j'en profite pour saluer Isabelle Grimaud,
07:20 qui ont été soutenus ces dernières années.
07:23 Il s'agit d'une question sociale cruciale
07:25 pour ne laisser personne au bord du chemin,
07:26 en prenant en compte la dissolution du lien social
07:29 pour le recréer différemment,
07:30 s'appuyer sur le pouvoir d'agir des personnes en précarité.
07:35 Enfin, même si des projets ponctuels
07:36 ont été menés par les commissaires,
07:38 grâce à la plasticité de la stratégie pauvreté,
07:41 il est vrai que la transition écologique
07:43 n'en faisait pas partie au départ.
07:45 Or c'est un facteur potentiel d'exclusion sociale,
07:48 d'accroissement des inégalités,
07:50 si l'on n'y prend pas garde.
07:51 Alors que d'un autre côté,
07:52 ça peut être une vraie chance
07:53 pour ceux qui subissent le plus le changement climatique.
07:57 Le Pacte des Solidarités embrasse donc
07:59 cette nouvelle dimension,
08:00 en agissant sur toutes les précarités,
08:02 énergétique, précarité dans le logement,
08:04 précarité alimentaire,
08:06 précarité dans les mobilités.
08:08 Le pacte se donne comme ambition
08:09 de réduire le poids des dépenses contraintes
08:11 dans le budget des plus précaires,
08:13 qui vivent aujourd'hui une sobriété subie.
08:15 La question des mobilités
08:16 a fait l'objet d'une attention soutenue
08:18 grâce aux 70 millions d'euros
08:19 dégagés par la stratégie pauvreté
08:21 ces deux dernières années,
08:22 en vue de l'insertion des personnes
08:23 en recherche d'emploi.
08:25 Il faut dès à présent y ajouter pleinement
08:27 la dimension durable de cette mobilité.
08:29 Le pacte approfondira les solutions qui marchent,
08:32 comme le chèque énergie ou les plateformes de mobilité,
08:35 et soutiendra l'innovation
08:36 à la fois au niveau national et local.
08:40 Le pacte des Solidarités,
08:41 il s'adresse à un public large,
08:43 de la grande précarité,
08:45 aux personnes des classes moyennes,
08:47 inférieures, laborieuses,
08:48 en risque de précarisation et de déclassement.
08:52 Il porte donc un projet de société
08:53 pour réparer le présent et préparer l'avenir.
08:57 C'est pourquoi deux types de personnes
08:58 sont plus particulièrement ciblées
08:59 dans l'ensemble de ces axes,
09:01 et je voudrais y porter une attention un peu particulière.
09:04 D'abord, les personnes en grande précarité.
09:06 Elles se sont rappelées à la société
09:08 au moment du Covid,
09:09 où les initiatives spontanées
09:10 ont mis en lumière à la fois
09:12 leurs problèmes particuliers,
09:13 mais aussi les possibilités d'y répondre.
09:15 Elles font donc l'objet,
09:16 dans le pacte des Solidarités,
09:17 d'une attention particulière,
09:19 par exemple sur l'accès aux droits,
09:21 et notamment aux droits de santé,
09:22 ou sur l'activité adaptée,
09:24 avec des dispositifs prenant en compte
09:25 leurs situations particulières et leurs capacités.
09:28 C'est la dignité de notre société
09:30 que de leur garantir des conditions de vie dignes,
09:33 en priorisant leur propre autodétermination
09:35 et la lutte contre la stigmatisation.
09:38 Grâce à plusieurs études récentes,
09:39 on sait aussi que les familles monoparentales
09:41 sont plus touchées que le reste de la population
09:43 par la précarité.
09:45 Si la situation des enfants s'est améliorée
09:47 entre 2009 et 2021,
09:49 s'ils subissent moins de privations
09:50 dans la vie courante,
09:52 ceux qui vivent en famille monoparentale
09:54 sont plus touchés.
09:56 La manière de calculer nos prestations
09:57 répond heureusement assez bien
09:58 aux coûts engendrés par une séparation
10:00 et le fait de ne pouvoir apporter
10:02 qu'un salaire dans un foyer.
10:04 Mais nous devons encore agir,
10:05 dans le prolongement des premières mesures
10:07 sur les pensions alimentaires
10:08 et sur le soutien à la garde d'enfants
10:09 pour les familles monoparentales,
10:11 qui ont été prises dans la loi de financement
10:13 de la Sécurité sociale pour 2023,
10:15 agir pour mieux accompagner ces familles,
10:17 notamment en termes de soutien à la parentalité
10:19 et d'accompagnement vers l'emploi.
10:22 Enfin, le pacte, je voudrais dire,
10:23 n'est pas un énième plan.
10:25 De même que la stratégie portait en elle
10:27 un changement de méthode,
10:29 le pacte s'en fait le prolongement.
10:31 La précarité se vit au niveau local,
10:33 ce n'est pas à vous, acteurs locaux,
10:35 que je vais le rappeler.
10:36 Elle appelle donc des solutions territorialisées
10:38 qui permettent d'adapter
10:39 et de mieux appliquer des décisions nationales.
10:42 La méthode collaborative mais exigeante
10:44 de la contractualisation avec les collectivités,
10:47 issue de la stratégie pauvreté,
10:49 sera poursuivie et enrichie,
10:50 notamment par France Travail,
10:52 avec davantage d'adaptation aux réalités locales.
10:55 Il ne s'agit pas de revoir complètement
10:56 les compétences de chacun,
10:57 mais de les utiliser au mieux,
10:59 de les coordonner pour éviter les zones blanches
11:01 et les ruptures de parcours.
11:03 Le pacte souhaite aller un cran plus loin,
11:05 en créant des alliances locales,
11:06 au-delà de la contractualisation,
11:08 pour la réalisation de projets concrets
11:10 sur le modèle de ceux initiés par les commissaires,
11:12 qui font intervenir une multitude d'acteurs locaux coordonnés.
11:15 Au-delà de la création de richesses nécessaires,
11:18 les entreprises doivent elles aussi
11:19 se sentir davantage concernées
11:21 par leur rôle social sur un territoire,
11:23 auprès de leurs salariés,
11:24 mais également de l'ensemble de la population,
11:26 en lien avec la collectivité et le milieu associatif.
11:30 Seules, on va vite,
11:31 mais ensemble, on va plus loin.
11:34 Pour ne pas faire profiter uniquement
11:35 quelques personnes de l'ascenseur social,
11:37 les plus méritantes ou les plus chanceuses,
11:39 mais pour en faire un projet de société
11:41 qui nous tirera tous vers un avenir meilleur,
11:43 nous avons besoin d'une alliance renouvelée
11:45 autour de quelques grands objectifs
11:46 qui structureront la politique sociale
11:48 pour les quatre années à venir.
11:50 Voilà l'ambition du pacte,
11:51 assise sur les fondations de la stratégie
11:53 de prévention et de lutte contre la pauvreté
11:56 de la première mandature.
11:58 Merci à vous.
12:01 (Applaudissements)
12:03 Merci d'avoir regardé cette vidéo !

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