Parlons Vrai chez Bourdin avec Jacques Attali, économiste, chef d’entreprise, essayiste et auteur de « Le Monde, modes d'emploi Comprendre, prévoir, agir, protéger » (Editions Flammarion).
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NewsTranscription
00:00 Jean-Jacques Bourdin.
00:01 - Notre invité ce matin, Jacques Attali, "Le Monde", mode d'emploi, mode au pluriel,
00:06 comprendre, prévoir, agir, protéger, chef à Marion.
00:09 Jacques Attali, bonjour.
00:10 - Bonjour.
00:11 - Merci d'être avec nous Jacques Attali.
00:13 Alors, alors, alors, alors, vous...
00:17 Bon, c'est un livre, c'est un livre à la fois inquiétant,
00:22 mais qui porte aussi quelques messages d'espoir.
00:25 Est-ce que le temps nous est compté ? Vous écrivez "le temps nous est compté".
00:29 Est-ce que le temps nous est compté ?
00:30 - J'essaie dans ce livre de faire la synthèse de tout ce qu'on sait en 250 pages,
00:35 qui était difficile, sur l'histoire du monde depuis 3000 ans,
00:39 sur les grandes tendances depuis 1000 ans, et d'en déduire des prévisions sur 30 ans.
00:43 Ce qui n'est pas très difficile parce que 30 ans ce n'est pas grand chose.
00:46 - Oui, 2050.
00:48 - Et sur 2050, on se perçoit qu'il y a des évidences qui arrivent,
00:51 c'est-à-dire la croissance démographique, des progrès techniques fabuleux,
00:55 des mouvements géopolitiques qui vont entraîner un déclin relatif des États-Unis,
01:01 une montée de la Chine, une montée de l'Afrique, qui sera une grande puissance un peu plus tard,
01:06 une montée de l'Inde, mais en même temps,
01:10 une impossibilité sans doute de voir un nouvel empire prendre le pouvoir après celui des États-Unis,
01:17 une impossibilité pour les Etats-Unis de maintenir leur pouvoir,
01:20 je ne crois pas par exemple que la Chine deviendra la superpuissance,
01:24 la domination vraisemblable du monde par l'économie contre le politique,
01:30 et en particulier par des entreprises qui vont généraliser des objets de consommation nouveaux
01:34 qui sont des objets ultra narcissiques.
01:37 Et à partir de ce chaos que le marché sans état de droit va créer,
01:42 l'aggravation de trois menaces qui pèsent sur nous depuis longtemps,
01:45 qui sont la menace climatique, beaucoup plus grave qu'on ne le croit,
01:49 la menace de guerre qui s'accélère et s'amplifie,
01:53 de l'hyper-conflit, voilà.
01:54 Et ce que j'appelle la menace de l'artificialisation,
01:57 c'est-à-dire tout ce qui vient au confluent de la génétique et de l'intelligence artificielle
02:03 pour créer davantage de suppléments ou de prothèses aux humains jusqu'à les remplacer totalement.
02:10 Et ça c'est des menaces épouvantables, mais il y a des réponses.
02:15 Et quand je dis le temps est compté, c'est que nous avons les moyens encore de gagner.
02:20 J'ai pris avant-hier l'exemple du match de Monfils,
02:23 on est mené 4 à 0 mais le match n'est pas perdu.
02:26 On est mené 4 à 0 au 5e set, mais le match n'est pas perdu.
02:29 On peut le gagner encore. Et j'essaye d'expliquer comment.
02:31 - Bien, c'est le sujet du livre Jacques Attali, mais on va entrer un peu dans le détail.
02:40 D'abord, vous rappelez, et ça je suis tellement d'accord avec vous,
02:44 vous dites "chacun d'entre nous devrait plus que jamais s'intéresser à la marche du monde".
02:50 Nous oublions.
02:52 Quel que soit finalement, on parle beaucoup des français qui sont toujours très auto-centrés,
02:57 mais c'est vrai aux Etats-Unis, c'est vrai en Russie, c'est vrai en Chine, c'est vrai partout dans le monde.
03:03 - C'est une tendance naturelle que de s'intéresser à soi.
03:05 - Oui.
03:06 - Et le libéralisme économique, comme le libéralisme politique,
03:10 il pousse beaucoup, puisque le libéralisme conduit à "moi d'abord".
03:15 "Moi d'abord", c'est d'ailleurs le principal slogan publicitaire.
03:21 Donc l'économie de consommation fonctionne là-dessus.
03:23 C'est aussi le populisme. "Moi d'abord", c'est "moi d'abord" et "je veux pas des autres".
03:27 C'est aussi tout ce qui tourne autour de l'idéologie d'un bouddhisme mal compris,
03:33 du zen, de la méditation.
03:35 Donc il y a une sorte de consensus assez global autour du narcissisme.
03:41 - Et mondial.
03:42 - Et mondial. Les Chinois ne pensent qu'à eux, les Indiens ne pensent qu'à eux,
03:46 et souvent dans des conditions plus particulièrement difficiles,
03:50 sans se rendre compte de quelque chose qui est très difficile à comprendre,
03:53 mais qui est pourtant essentiel,
03:55 nous avons intérêt au bonheur des autres.
03:57 Nous avons intérêt à être altruistes.
04:00 Nous avons intérêt au bonheur de nos enfants, bien sûr,
04:03 mais nous avons intérêt au bonheur de tous,
04:05 parce que c'est par le bonheur des tous que,
04:08 pour prendre des exemples prosélyques, si les gens sont tous bien soignés, il n'y aura pas de pandémie,
04:12 si les gens mangent tous à leur faim chez eux,
04:15 ils ne viendront pas dans d'autres pays,
04:20 si les gens sont tous bien éduqués, l'économie mondiale sera plus développée,
04:25 et la culture et la démocratie seront beaucoup plus florissantes.
04:30 Nous avons intérêt au bonheur des autres, comme un musicien d'orchestre ou un joueur de foot,
04:34 qui a intérêt à ce que les autres joueurs ou les autres musiciens jouent bien.
04:37 Mais on ne s'en rend pas compte parce que nous sommes pris dans une idéologie où
04:41 on a l'impression que ce qu'on donne aux autres est pris à soi, c'est le contraire.
04:45 Et c'est la grande bataille idéologique d'aujourd'hui, entre l'altruisme,
04:49 d'ailleurs on peut prendre un exemple très simple,
04:51 un boulanger a intérêt à ce que ses clients soient contents,
04:54 il a donc intérêt à être altruiste, c'est la condition de son propre succès.
04:58 Mais s'il pense qu'à lui, il est mort,
05:00 il va faire faillite.
05:02 Donc, nous avons intérêt à être altruistes, nous avons intérêt à nous occuper des autres,
05:07 et on n'y pense pas beaucoup.
05:09 - Au-delà de toutes les crises qui s'annoncent, c'est le premier grand défi.
05:12 - Absolument.
05:12 - Parce que c'est le défi de l'humanité, celui-là.
05:14 - Et plus encore, nous avons intérêt,
05:17 c'est encore plus compliqué à admettre,
05:20 nous avons intérêt au bonheur de ceux qui ne sont pas encore nés.
05:22 Parce que ceux qui ne sont pas encore nés
05:25 feront un jour les travaux dont nous avons besoin.
05:29 - Oui, bien sûr.
05:30 - Ils seront encore plus âgés que nous le sommes,
05:32 et nous avons donc intérêt à imaginer une planète où plus personne ne naîtrait,
05:36 ce serait l'enfer pour les derniers vivants.
05:38 Donc nous avons intérêt au bonheur de ceux qui ne sont pas encore nés.
05:40 Donc on a intérêt à financer les crèches, les écoles maternelles,
05:43 les maternités, la protection de l'environnement,
05:48 même si les dangers sont à 50 ans,
05:50 nous y avons intérêt, nous.
05:52 - Oui, parce que vous dressez évidemment des constats que beaucoup ont fait,
05:56 et ils sont clairs.
05:58 L'espérance de vie qui ne progresse plus,
06:00 les dépenses de défense qui augmentent,
06:02 le terrorisme et le fondamentalisme qui se développent,
06:06 les conflits impliquant au moins un gouvernement,
06:08 il y en a 56, vous avez recensé, 56.
06:12 Le changement du rapport au travail, par exemple.
06:19 Vous dites, vous rappelez que dans les pays développés,
06:22 les humains ne passent pas plus de 10% de leur vie à travailler,
06:26 c'était 40% en 1900.
06:28 - C'est un chiffre qui peut surprendre,
06:30 mais il suffit de calculer soi-même pour sa propre vie,
06:32 pour ceux qui ont fait des études,
06:34 pour s'apercevoir que c'est vrai.
06:36 - J'ai une question en parallèle,
06:38 qui me vient à l'esprit, comme ça, spontanément.
06:40 Est-ce que l'intelligence artificielle dont on parle tant,
06:42 peut détruire le monde ?
06:44 - C'est la meilleure et la pire des choses comme tout.
06:46 On pouvait dire la même chose de la machine à vapeur.
06:50 On craint que la machine à vapeur détruise l'humanité.
06:54 Oui, l'intelligence artificielle,
06:56 si elle est mise au service du mal,
06:58 peut créer des faux.
07:00 Vous pourriez être en train de parler avec un faux moi,
07:02 je pourrais être en train de parler avec un faux vous,
07:04 et ça entraîne beaucoup de perspectives.
07:06 J'ai d'ailleurs été déjà victime de ce genre de pièges.
07:08 On peut avoir toutes sortes de manipulations
07:12 qui entraînent des provocations et des guerres.
07:14 On peut avoir des intelligences artificielles
07:16 qui deviennent des armes terribles,
07:20 mais en même temps, c'est un outil extraordinaire
07:22 pour la santé, pour l'éducation,
07:24 pour l'amélioration des conditions de travail.
07:26 - Tout dépend de ce qu'on va en faire.
07:28 Comment on va l'utiliser ? C'est évident.
07:30 Est-ce qu'on va l'utiliser au profit de l'humanité
07:32 ou au dépens de l'humanité ?
07:34 C'est toute la grande question.
07:36 - Le grand auteur de science-fiction,
07:38 Isaac Asimov, avait dit
07:40 sur l'intelligence artificielle,
07:42 il faut imposer trois lois qui se résument à une seule.
07:44 Une intelligence artificielle ne doit pas nuire
07:46 à celui qui l'a créée.
07:48 Et si on arrive à imposer cela,
07:50 ce qui n'est pas facile,
07:52 je pense que l'intelligence artificielle
07:54 sera un outil formidable
07:56 d'amélioration de la vie de chacun.
07:58 - Alors j'étais passionné par votre livre,
08:00 Jacques Attali.
08:02 Vous dites, vous avez des moments
08:04 où on déprime un peu, hein ?
08:06 Vous dites, les crises qui s'annoncent
08:08 sont bien plus terribles que toutes celles du passé.
08:10 - C'est pas pour ça que j'écris ça,
08:12 pour déprimer, au contraire,
08:14 j'écris ça pour qu'on se réveille.
08:16 - Pour que ça nous donne envie de bouger.
08:18 - Je prône le basculement vers ce que j'appelle
08:20 l'économie de la vie, c'est-à-dire
08:22 sortir de l'économie de la mort
08:24 qui est tout ce qui tourne et utilise
08:26 les énergies fossiles et les sucres artificiels
08:28 qui représentent, quand on y réfléchit,
08:30 plus de la moitié du PIB, plus de la moitié
08:32 de votre consommation et de la mienne.
08:34 Nos vêtements, nos voitures,
08:36 nos tables, nos meubles,
08:38 les produits chimiques qu'on utilise,
08:40 c'est plus de 50% de notre dépense.
08:42 L'économie de la vie, c'est-à-dire la santé,
08:44 l'éducation, les médias, la culture,
08:46 les énergies renouvelables,
08:48 l'alimentation saine, c'est même pas
08:50 40 à 50% du PIB.
08:52 Et de notre consommation individuelle.
08:54 Donc chacun d'entre nous a un rôle à jouer
08:56 en éliminant aussi vite que possible toutes ces
08:58 consommations en économie de la mort et en faisant
09:00 plus de place pour l'économie de la vie.
09:02 On peut, même si on a un budget modeste,
09:04 dépenser plus pour de l'alimentation
09:06 saine, à condition de dépenser moins
09:08 sur... - L'économie de la mort dont vous parlez,
09:10 qui asphyxie nos océans
09:12 et nos mers avec le plastique,
09:14 qui, là aussi,
09:16 c'est un danger majeur. - Qui fait partie
09:18 de l'économie de la mort, le plastique c'est du pétrole.
09:20 - Bien sûr. - Et l'ensemble
09:22 des autres dimensions font partie.
09:24 - Bah, évidemment. Alors, vous dites
09:26 l'humanité, donc
09:28 vous avez évidemment
09:30 des pistes,
09:32 vous proposez des pistes de réflexion,
09:34 vous dites que l'humanité peut encore emprunter
09:36 un chemin très étroit, mais est-ce que
09:38 ça, je me
09:40 projette sur un terrain plus politique ?
09:42 Euh...
09:44 Emprunter un chemin, mais parfois,
09:46 quand on emprunte un chemin qu'on ne connaît pas,
09:48 on a besoin d'un guide.
09:50 Est-ce que l'humanité a besoin
09:52 aujourd'hui d'un guide ?
09:54 - Le guide ça peut être chacun d'entre nous, et mon travail
09:56 comme intellectuel, c'est d'apporter
09:58 des moyens pour réfléchir. - Vous comprenez ce que je veux dire ?
10:00 Ce que je veux dire, c'est que dans les pays aujourd'hui,
10:02 il y a une montée d'autoritarisme. Vous le constatez.
10:04 - Oui, il y a une montée de l'autoritarisme,
10:06 mais je ne pense pas que
10:08 l'autoritarisme soit plus efficace que la démocratie.
10:10 La façon dont la Chine
10:12 a désastreusement
10:14 mené la politique du Covid,
10:16 qui ne serait pas
10:18 devenue une pandémie mondiale si la Chine avait été
10:20 une démocratie, parce qu'on aurait immédiatement su...
10:22 - Ça c'est vrai, oui, c'est vrai.
10:24 - Donc la Chine a été, et la Chine aujourd'hui
10:26 est en train d'échouer.
10:28 C'est pour ça que je pense qu'elle ne sera pas le centre du monde
10:30 dans 20 ans. Elle est en train d'échouer
10:32 parce qu'aucune dictature... - Elle échoue ?
10:34 Aujourd'hui, la Chine ? - Dans l'histoire,
10:36 et c'est ce que je raconte dans ce livre,
10:38 on s'aperçoit que les puissances
10:40 dominantes ont toujours été à l'avant-garde
10:42 des libertés. - Oui.
10:44 - C'est pour ça d'ailleurs que la France n'a jamais été
10:46 la puissance dominante.
10:48 Et que pour être à l'avant-garde des puissances dominantes,
10:50 il faut toute une série de conditions
10:52 que la Chine ne remplit pas.
10:54 Il faut accueillir les étrangers,
10:56 il faut accueillir le changement,
10:58 il faut ne pas se mentir à soi-même,
11:00 qui est le pire mensonge. Or les dictatures,
11:02 elles font que ça. Et donc,
11:04 la Chine va avoir
11:06 d'énormes difficultés devant elle,
11:08 ce qui est...
11:10 qui la conduira, je pense,
11:12 je ne sais pas quand,
11:14 à faire s'effondrer le régime
11:16 actuel, comme il s'est effondré dans
11:18 toutes les dictatures. Parce qu'il y a une contradiction
11:20 entre une économie de marché
11:22 qui crée une classe moyenne et une dictature
11:24 qui ne garantit pas la propriété privée.
11:26 Or la classe moyenne
11:28 a besoin d'être sécurisée sur sa
11:30 propriété. Donc, je pense que la Chine va
11:32 connaître quelques problèmes. Ce qui ne veut pas dire
11:34 que nous n'en connaîtrons pas aussi.
11:36 Ce qui veut dire que, d'abord, il faut prendre conscience
11:38 que nous sommes, nous en Europe,
11:40 formidablement privilégiés, même si
11:42 un tiers des Français au moins vivent
11:44 dans des conditions extrêmement difficiles.
11:46 Mais nous sommes un continent
11:48 privilégié. Et si on sait jouer
11:50 notre carte, vous parlez d'un guide,
11:52 si l'Europe sait ensemble se doter
11:54 des moyens de sa défense
11:56 et de protéger son modèle social
11:58 et de protéger son identité
12:00 culturelle, je pense qu'on a
12:02 toute vocation à être la vanguarde du monde.
12:04 - Oui, on parle de l'Europe hier en Slovaquie,
12:06 le président de la République était en Slovaquie,
12:08 aujourd'hui
12:10 en Moldavie.
12:12 L'Europe,
12:14 on n'a plus que jamais besoin d'Europe.
12:16 - Je me permets de rappeler
12:18 que l'initiative qui a été prise
12:20 par le président Macron, très heureusement,
12:22 d'une Confédération
12:24 européenne ou d'une communauté européenne,
12:26 reprend presque mot pour mot
12:28 celle que François Mitterrand avait lancée
12:30 en 1992,
12:32 qui était
12:34 un moment où nous essayions
12:36 de créer les conditions de rassembler
12:38 au plus vite tous les pays d'Europe
12:40 avant qu'ils ne puissent entrer dans l'Union européenne
12:42 et ça reste une extrême actualité.
12:44 Donc il reprend, avec j'espère
12:46 un plus grand succès, ce que nous
12:48 avions essayé de faire il y a 30 ans.
12:50 - Oui, c'est indispensable, pour nous,
12:52 pour l'avenir, même l'avenir du monde.
12:54 C'est fondamental, parce que c'est
12:56 un point de stabilité, l'Europe.
12:58 - Oui, et puis si on veut des règles du droit
13:00 global, ce qui est nécessaire,
13:02 si on n'est pas capable de faire
13:04 des règles de droit à 500 millions d'habitants,
13:06 comment on leur fera à 7 milliards ?
13:08 - Oui, évidemment.
13:10 - Nous sommes un avant-garde
13:12 et un terrain d'expérimentation.
13:14 - Alors, j'ai été frappé aussi,
13:16 pourquoi dites-vous que nous sommes
13:18 à la veille d'une immense
13:20 crise financière ?
13:22 - Bon, ça c'est connu...
13:24 - Vous croyez vraiment que...
13:26 - C'est-à-dire qu'on est dans une crise financière ?
13:28 - Il faut regarder l'histoire. Moi, je regarde toujours loin et global.
13:30 Si on regarde loin et global, on s'aperçoit
13:32 que chaque fois qu'un centre
13:34 de pouvoir a vacillé,
13:36 il a commencé par retarder sa chute
13:38 en empruntant. C'est ce que font les Etats-Unis,
13:40 qui ont été trois fois
13:42 au centre du monde, d'abord à Boston,
13:44 puis à New York, puis maintenant en Californie,
13:46 et depuis
13:48 2007,
13:50 le centre mondial californien
13:52 vacille. Et pour maintenir
13:54 son pouvoir, on s'endette.
13:56 Tant à titre personnel qu'à titre collectif,
13:58 s'endetter, c'est procrastiner.
14:00 Ou procrastiner suppose de s'endetter.
14:02 Et c'est ce qu'ont fait les Américains
14:04 aujourd'hui. Ils le peuvent,
14:06 parce que comme ils ont la première armée du monde,
14:08 le dollar reste la monnaie référence,
14:10 l'un est lié à l'autre, puis où allez-vous
14:12 investir les immenses ressources
14:14 de la planète si ce n'est pas dans cet endroit,
14:16 qui est encore un havre de tranquillité
14:18 pour les détenteurs de capitaux ?
14:20 Donc, ils ont les moyens de le faire. Mais la dette
14:22 américaine, c'est le tiers du PIB
14:24 mondial.
14:26 C'est le tiers du PIB mondial.
14:28 Et avec des endettements
14:30 extraordinairement instables.
14:32 Même l'enseignement,
14:34 l'endettement immobilier
14:36 qui avait causé la
14:38 première crise de 2007-2008,
14:40 il a recommencé
14:42 exactement de la même façon aujourd'hui, exactement le même.
14:44 Alors là, on vient
14:46 de, peut-être, on saura ça ce soir
14:48 ou demain avec le vote du Sénat,
14:50 de passer une étape retardante.
14:52 - Le plafond.
14:54 - Le plafond. Mais qu'est-ce qu'on a fait ?
14:56 On a autorisé à dépenser plus, c'est tout.
14:58 Et donc la dette augmente encore.
15:00 Or, l'histoire, et c'est pour ça que je crois
15:02 très important de comprendre l'histoire, l'histoire nous apprend
15:04 qu'il y a trois moyens de régler la dette.
15:06 Qui sont l'inflation,
15:08 qui ruine les prêteurs,
15:10 la guerre, qui ruine tout le monde,
15:12 et la croissance.
15:14 Alors, si on fait une croissance qui aggrave
15:16 le climat, on leur a réglé un problème
15:18 et aggravé un autre, mais si on fait une croissance
15:20 de l'économie de la vie, on leur a réglé
15:22 l'un et l'autre. Et c'est là
15:24 où c'est très important de changer
15:26 de mode de développement pour aller vers
15:28 une croissance de l'économie de la vie.
15:30 - Eh bien, merci de nous avoir permis de comprendre,
15:32 de prévoir, d'agir,
15:34 ce qui est important. En fait, ce sont
15:36 les pistes pour agir
15:38 que vous donnez. - À titre personnel aussi, parce que
15:40 j'explique ce que chacun d'entre nous peut faire.
15:42 - Merci beaucoup Jacques Attali.
15:44 Le Monde, mode d'emploi chez
15:46 Flammarion. Merci
15:48 d'être venu nous voir sur Sud Radio.
15:50 André Berco.