Marc de Basquiat défend l'idée d'une retraite "à la carte"

  • l’année dernière
Parlons Vrai chez Bourdin avec Marc de Basquiat, économiste.

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Transcription
00:00 (Générique)
00:07 Il est 12h15, merci d'être avec nous. Marc de Basquiat, économiste, est avec nous. Bonjour Marc de Basquiat.
00:13 Bonjour.
00:14 Alors, évidemment, vous suivez de près, vous êtes un spécialiste des questions sociales et notamment des questions de retraite.
00:19 Vous suivez de près ce débat à l'Assemblée Nationale qui doit se terminer, je le rappelle, vendredi à minuit.
00:25 Nous allons voir, parce que c'est une question que personne ne soulève et pourtant elle est importante, nous allons voir quel va être le comportement des députés de la NUPES.
00:32 Pourquoi est-ce que je dis ça ? Parce qu'il y a encore beaucoup, beaucoup, beaucoup d'amendements à examiner.
00:38 Et donc deux solutions pour la NUPES. Soit retirer les amendements pour permettre que le projet de loi soit examiné dans son entier,
00:47 et notamment le fameux article 7 qui prévoit le passage de l'âge légal à 64 ans, ou alors garder les amendements et ne pas discuter de l'âge légal à 64 ans au sein de l'Assemblée Nationale.
01:01 Nous allons voir quelle sera l'attitude de la NUPES.
01:04 Bien, Marc de Basquiat, sur cette réforme des retraites, vous avez une voix, vous faites entendre une voix différente.
01:13 Parce que vous proposez, vous n'êtes pas seul d'ailleurs, vous proposez une retraite à la carte.
01:20 Un autre système que notre retraite par répartition que nous connaissons bien.
01:25 Mais expliquez-moi, retraite à la carte, c'est-à-dire que chaque salarié pourrait, chaque français pourrait choisir son départ à la retraite, l'heure de la retraite.
01:36 - En fait, je pense que la première chose qu'il faut regarder, c'est le fait de décider de partir à la retraite, tel que c'est présenté dans nos débats, on présente ça comme un âge légal.
01:46 - Oui.
01:47 - Comme si le fait de partir avant ou après, M. Bourdin, serait illégal.
01:51 - Oui.
01:52 - C'est une violence que nous faisons aux gens.
01:54 - Oui, c'est vrai, c'est vrai.
01:55 - C'est une violence.
01:56 - Âge légal à 64 ans, oui, je vois pas, ça serait illégal alors.
01:59 - Je pense qu'il faudrait déjà commencer par barrer du vocabulaire politique cette expression d'âge légal de départ à la retraite.
02:05 - Oui, ça vous avez raison.
02:06 - C'est la première chose.
02:07 - C'est la première chose.
02:08 - Une fois qu'on a dit ça, ensuite il faut se dire quelles seraient les modalités concrètes qui permettraient à chacun d'exprimer son choix, sa préférence, sa décision personnelle, de dire "j'en ai marre, j'arrête, je vais m'occuper de mes petits-enfants, de mon jardin, de mes travaux, de ce que je veux".
02:24 - Oui.
02:25 - Pour cela, il faut que les règles soient claires et que chacun comprenne bien que lorsqu'il décide à un moment donné de dire "j'arrête", il sache exactement quelles sont les conséquences financières de ce choix sur ses retraites futures.
02:40 Et tant qu'on est dans un système avec 23 systèmes différents, avec des règles et des sous-règles et des cas et des exceptions, c'est compliqué pour les personnes.
02:49 Donc je pense que déjà le premier aspect c'est de barrer ce vocabulaire qui n'est pas adapté.
02:55 Deuxièmement, que les règles soient tellement simples et explicites que chacun puisse consulter sur un site web les conditions qu'il regarde lui ou elle de départ pour faire des choix de manière éclairée.
03:06 - Oui, mais d'accord. D'accord. Mais enfin, il y a une durée de cotisation. Parce qu'en fonction de la durée de cotisation est fixé évidemment le montant de la pension.
03:16 - Tout à fait. C'est-à-dire que l'équation radicale d'un système par répartition, c'est-à-dire que les cotisations acquittées par les cotisants d'une année donnée sont égales aux pensions versées aux retraités de la même année.
03:30 - Oui. - C'est ça l'équation fondamentale ? - Évidemment. Pour ne pas avoir un régime en déficit.
03:36 - Tout à fait. Donc pour que ça fonctionne, il faut que le nombre de cotisants fois le montant du revenu fois le taux de cotisation soit égal au nombre de retraités fois le montant de la pension.
03:47 Donc il y a cinq choses à bouger. Et dans nos discussions cette année-temps, on ne parle que de diminuer le nombre de retraités avec un départ plus tard et d'augmenter le nombre de cotisants avec un départ plus tard.
03:59 - Oui. - Une même décision joue les deux côtés de l'équation. - J'ai compris. - C'est extrêmement tentant pour les politiques de gérer là-dessus.
04:04 - Oui. - Mais on regarde peu les autres dimensions, qui sont peut-être un petit peu moins efficaces à court terme. En particulier, on s'intéresse assez peu au montant des pensions.
04:14 - Exactement. Et je le dis sans cesse dans tous les débats que j'organise ici, le montant des pensions qui s'érode en France d'année en année.
04:23 - Qui s'érode en France mais qui néanmoins est supérieur à celui des actifs. - Mais qui est quand même supérieur encore à celui des actifs en moyenne.
04:30 - En fait, quand on regarde les taux de remplacement, c'est-à-dire le rapport entre le montant de la pension et le montant du dernier salaire, en France, il est de l'ordre de 60%.
04:38 - 60%. Bien. Mais comment feriez-vous ? - Le Japon, c'est 32%. - Alors comment feriez-vous ? - Comment ferait-on ? En fait, il faut que les personnes...
04:48 C'est un système en compte national. En compte national, c'est-à-dire que chacun cotise au long de sa vie pour sa retraite.
04:55 - Oui, mais c'est le cas aujourd'hui. On ne bouge pas. - Ce que je me propose n'est pas une grande révolution. - Alors chacun cotise.
05:02 - Et qu'on ait cotisé à différentes caisses, très bien, pas de souci. Tout ceci forme une masse de cotisations.
05:09 N'importe quoi, mettons 200 000 euros, 1 million d'euros, qu'on a cotisé selon son salaire toute sa vie. Cette masse-là, au moment où on décide de prendre sa retraite,
05:19 on divise cette masse-là par l'espérance de vie au moment de la retraite. Je prends ma retraite à cet âge-là, à ce moment-là, bon, d'après les statistiques,
05:29 on sait que je vais, statistiquement, être 25 ans à la retraite. Et dans ce cas-là, qu'est-ce qui se passe ? Il y a des personnes qui vont vivre moins que 25 ans.
05:39 C'est-à-dire qu'elles ne consomment pas tout, ce stock. - Donc ces personnes-là vont partir plus tôt ? - Elles partent plus tôt... Non, pardon, elles ne partront pas plus tôt.
05:47 On ne sait pas... La mort est une inconnue dans l'histoire. - Oui, non mais ça, oui. - Voilà, c'est une inconnue. Et donc du moment où on décide de partir,
05:55 c'est statistiquement, ils se disent "Tiens, je vais rester 25 ans, 20 ans, 30 ans, selon l'âge que je prends". Et voilà. Ceux qui vont mourir plus tôt,
06:03 ben, elles ne vont pas consommer le stock d'optimisation. Ceux qui partiront plus tard vont surconsommer. Ça, c'est la mutualisation du risque.
06:12 Donc on est dans une assurance, donc tout fonctionne très bien. Mais ça fonctionne bien l'assurance à condition que les règles soient les mêmes pour tout le monde.
06:19 C'est ça qui est un peu gênant dans tout ce qui est actuel. - Oui, mais expliquez-moi comment on peut faire. Expliquez-moi, je vais être concret.
06:26 J'ai commencé à travailler à 20 ans. Je veux partir à 60 ans. Je n'ai que 40 années de cotisation. - Vous n'avez pas 40 années de cotisation.
06:37 Vous avez un stock de cotisation. - J'ai un stock de cotisation, oui. - Voilà. Admettons, je vous dirais, 400 000 euros. - Oui. - Ou n'importe quoi, 400 000 euros.
06:45 Vous partez à un âge où on vous dit, tiens, votre espérance de vie à la retraite, c'est de 25 ans. - Je pars à 60. - Voilà. Et donc, on vous divise cette masse-là par le nombre d'années qui vous restent.
06:57 - Mais c'est un système étatique, ça, ou c'est un système privé ? - C'est un système, oui, étatique, bien sûr. - Étatique. - Ah oui. - C'est une forme de capitalisation étatique.
07:04 - C'est pas de capitalisation, c'est de la répartition pure et dure. - C'est répartition pure et dure. - Ah oui, c'est la répartition pure et dure. - Oui, mais d'accord, mais si j'ai exercé un métier pénible ?
07:11 - Alors, métier pénible, ça c'est un grand sujet, un grand sujet sur lequel je pense qu'on se fourvoie beaucoup. D'estimer que la pénibilité doit être prise en compte par le contribuable, voire par la dette de nos enfants, c'est une aberration totale, cette affaire-là.
07:25 La pénibilité doit être prise en compte par l'employeur. - Par l'employeur, oui. - Aujourd'hui, quand vous êtes à l'armée, les cotisations retraites des militaires, elle est supérieure à leur salaire, à leur solde.
07:37 C'est-à-dire qu'on admet bien que dans certains métiers, que les cotisations retraites soient très, très supérieures à la norme. - C'est-à-dire qu'il faut augmenter les cotisations retraites payées par les employeurs pour les métiers pénibles ? - Absolument.
07:49 - C'est d'ailleurs un peu vers quoi va le... - Et ça permettrait à ceux qui ont un métier pénible de partir plus tôt, avec une retraite... - Avec une retraite bonifiée. - Bonifiée.
07:58 - Mais ça, pendant les années, le travail pénible. Après, on peut travailler légèrement. - Oui, bien sûr. - Voilà, et donc, un ajustement et une incitation, bien sûr, à ce que les employeurs... - Oui, mais vous chargez encore les entreprises.
08:11 - Les employeurs qui imposent des métiers pénibles, c'est un peu eux qui sont les premiers concernés et qui ont cette nécessité d'améliorer la situation. - Oui, je comprends. - C'est vertueux.
08:20 - Alors que faire payer par le contribuable ou par nos petits-enfants, ce n'est pas vertueux. - Oui, non, non, mais je comprends. - Et je pense que les syndicats ont plutôt intérêt à se battre là-dessus.
08:29 - Ce que vous proposez, c'est à la fois une retraite par points et à la fois une retraite par répartition, un peu. Parce que c'est ça, un peu, une retraite par points. C'est un peu ça, on accumule tout au long. - Ça y ressemble.
08:40 - Ça y ressemble. Encore une fois, ce que je propose n'est pas une révolution. - Non, non, mais ça... - Ça ressemble beaucoup au système Arco-Argirc, voilà, c'est assez proche.
08:50 - Oui, le système Arco-Argirc, c'est le système des cadres, c'est la caisse des cadres et qui est très bénéficiaire, je voudrais bien le rappeler. - Qui fonctionne bien. Donc on est sur quelque chose qui est assez sain.
09:01 - Oui. - Alors ensuite, la pénibilité, ça c'est un point important, donc reporté sur les employeurs, c'est une chose importante. Un autre aspect important aussi, c'est le fait que nous n'avons pas tous la même espérance de vie en arrivant à 60 ans.
09:16 - Bien sûr. - Et il y a des statistiques qui sont très très impressionnantes, qui montrent que quand on a eu un salaire faible, l'espérance de vie quand on arrive à la retraite est relativement limitée.
09:25 - Eh oui. - Quand on a eu une belle carrière, souvent, on a une espérance de vie beaucoup plus longue. - On vit plus longtemps. Oui. Donc il faut porter secours, si je puis dire, à ceux qui ont des salaires faibles et qui vivront moins longtemps.
09:39 - Donc il y a quelque chose qui est organisé, qui est un transfert à réaliser, qui est une justice, hein. - Oui, une justice sociale, oui. - Une justice sociale entre ceux qui ont effectivement une belle carrière, donc une belle retraite, qui logiquement devraient être mis à contribution pour aider ceux qui ont... - Plus de cotisations.
09:57 - Alors c'est là que, quand le gouvernement parle d'augmenter le minimum contributif, ou minimum vieillesse, je dis "pourquoi pas ?" Mais est-ce que c'est aux actifs de le payer ? Là je dis "non".
10:09 Le fait qu'on ait un souci de solidarité envers les moins aisés des retraités, c'est quelque chose qui doit être assumé financièrement par les plus aisés des retraités, et non pas les actifs.
10:24 - A part les plus aisés des retraités, donc une forme de surcotisation infligée aux plus aisés des retraités.
10:34 - Alors c'est pas vraiment une surcotisation, c'est plutôt un impôt. - Un impôt ? C'est encore un nouvel impôt, ils vont être contents. - Oui, bien sûr. En France on sait faire que ça.
10:43 - Ah oui d'accord, mais oui mais... - Sur les plus aisés des retraités, et donc en réalité ce serait, mon schéma le plus naturel, ce serait mettons qu'on taxe à 20% tous les revenus de tous les retraités pour former un transfert vers les moins aisés.
10:59 - Vers les moins aisés qui partent à la retraite, et qui ont moins d'expérience de vie lorsqu'ils partent à la retraite.
11:05 - Donc ils sont de justice intra-générationnelle, dans la propre génération des retraités, une justice intra-générationnelle qui se forme...
11:12 - Et dans votre système il n'y a plus d'âge légal ? - Non. L'âge légal c'est une notion qui est choquante un peu de philosophique.
11:20 - Non mais je comprends, non non mais je comprends votre réflexion, c'est très très intéressant. C'est vrai que c'est choquant.
11:25 - L'âge légal ça veut dire que si on part avant ou si on part après on est dans l'illégalité. Vous avez raison, non non mais... - C'est aberrant.
11:31 - Non non mais ce qui explique aussi la colère de la justice. Elle est injuste cette réforme ?
11:38 - Non elle n'est pas injuste. Honnêtement elle est très modeste. Elle est paramétrique, elle est modeste.
11:44 - Il n'y a pas beaucoup d'idées quoi. - Il y avait des bonnes choses. - Il n'y a pas beaucoup d'idées nouvelles.
11:48 - Après le bouleversement qui avait été proposé en 2019, on est revenu sur quelque chose qui est beaucoup plus modeste.
11:53 Honnêtement, bon... - Honnêtement ça ne changera pas grand chose. - Ça ne changera pas grand chose.
11:57 - On a hésité un peu tout ça, c'est un prétexte, mais honnêtement c'est pas très révolutionnaire.
12:02 - Bon, et bien merci Marc de Basquiat. Merci d'être venu nous voir pour expliquer votre idée.
12:07 Vous êtes plusieurs à défendre cette idée, vous n'êtes pas seul. - Bien sûr.
12:11 - Bien, il est 12h27, merci de nous avoir accompagné ce matin André Bercoff.

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