Mardi 18 mars 2025, retrouvez Céline Moine (Directrice de rédaction, Artprice.com) dans ART & MARCHÉ, une émission présentée par Sibylle Aoudjhane.
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00:00Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans Arts et Marchés, votre émission hebdomadaire consacrée
00:12au marché de l'art. Le rapport ArtPrice d'analyse du marché de l'art 2024 a été publié. Quelles
00:17sont les principales conclusions ? On remarque notamment les prémices d'une redéfinition
00:21géographique des places de marché. On en parle tout de suite avec mon invité Céline Moine qui
00:26est directrice de rédaction d'ArtPrice.com. Bienvenue à toutes et tous qui nous rejoignez
00:30tout de suite, c'est Arts et Marchés. Le 30e rapport annuel d'ArtPrice analyse les dynamiques
00:39du marché de l'art 2024 et nous allons dresser les principales conclusions avec Céline Moine
00:44qui est directrice de rédaction d'ArtPrice.com. Merci beaucoup d'être avec nous. Merci, bonjour.
00:48Alors on l'a vu, est-ce que vous pouvez tout d'abord nous dire quelle est la tendance générale
00:54que Dessel se rapporte si vraiment on regarde la grande image du marché de l'art ? La big picture.
01:01Effectivement, on constate tout d'abord qu'il y a de la même manière que l'année dernière une
01:06tendance qui se confirme avec un chiffre d'affaires qui est en baisse et qui est fortement en baisse
01:11sur l'année 2024 puisqu'on perd 5 milliards c'est-à-dire plus de 33% de chiffre d'affaires
01:20en un an, ce qui est beaucoup étant donné qu'on avait déjà un marché qui était à la peine en
01:272023 avec une perte de 7 milliards. Il faut remettre ça un petit peu dans le contexte aussi
01:32de cette année 2022 avec un effet rebond post-covid et avec des collections qui étaient majeures qui
01:39sont arrivées sur le marché notamment la collection de Paul Allen etc. Et là effectivement le
01:44contexte était beaucoup plus bloquant en général et de fait on a eu une contraction, une raréfaction
01:51des oeuvres de prestige qui tirent vraiment les chiffres vers le haut. Ça explique en très
01:57grande partie en fait cette baisse de résultat de chiffre d'affaires global. Oui parce que c'est
02:02vraiment les oeuvres millionnaires ou les plus grosses oeuvres qui permettent à ce marché d'avoir
02:08les plus grands chiffres. Oui c'est ça. Ce qu'on a constaté déjà il y a beaucoup moins d'oeuvres
02:12millionnaires mais si on regarde par palier de prix, les oeuvres qui se vendent plus de 100 000
02:18dollars au cours de l'année 2024, elles ont baissé de 17%. Mais celles qui vont se vendre à 500 000
02:25dollars, donc le palier est vraiment supérieur, ont baissé d'un quart. Donc plus on augmente
02:30dans les niveaux de prix et plus on a une contraction finalement du marché global.
02:35Mais à l'inverse, est-ce que plus d'oeuvres d'art à des prix beaucoup plus accessibles ?
02:43Oui ça c'est vrai que c'est un contraste qu'on avait déjà constaté au cours de l'année 2023 et on a
02:49cette mise en sommeil en quelque sorte du marché de prestige en ce moment, la difficulté de
02:56trouver des oeuvres et puis moins d'investissements aussi visiblement notamment l'année dernière du
03:02côté de la Chine, des acheteurs chinois entre autres. Par contre on arrive à un nouveau record
03:07quant au nombre de transactions d'oeuvres d'art vendues aux enchères et l'année dernière sur ce
03:12même plateau, j'avais déjà indiqué que c'était un record d'oeuvres d'art. Il s'est vendu 804 000
03:21oeuvres d'art aux enchères ce qui est un record absolu dans l'histoire du marché de l'art et
03:28effectivement ce qui va animer ce chiffre là ce sont les oeuvres les plus accessibles et
03:36les plus abordables. Alors si vous voulez je peux donner quelques chiffres pour qu'on se repère.
03:40La part des oeuvres vendues à moins de 10 000 dollars aux enchères représente 90% du marché
03:50et si on regarde une petite tranche de prix qui est celle des oeuvres à quelques centaines de
03:55dollars à 600 moins de 600 dollars c'est près de la moitié des oeuvres qui ont été vendues au
03:59cours de l'année dans le monde en 2024. C'est à dire que 400 000 oeuvres quasiment vont se vendre
04:05sous un seuil de prix qui est finalement minime et dans ce seuil de prix là effectivement il y a
04:12beaucoup d'oeuvres multiples, beaucoup d'estampes etc mais aussi des oeuvres qui peuvent être des
04:18oeuvres uniques et originales avec notamment des peintures qui sur la gamme de prix très
04:25abordables à moins de 1000 euros ont progressé d'une manière complètement phénoménale sur la
04:31décennie. Elles ont triplé en l'espace de dix ans donc il y a vraiment un marché qui est de
04:36plus en plus alimenté par des oeuvres très abordables d'où qu'elles viennent qui viennent
04:40de partout et quelles que soient les catégories de création. Oui je disais le littoral de Thierry
04:46Herrmann qui signe aussi ce rapport, il dit on passe d'un marché acheteur à un marché vendeur
04:52donc ça veut dire que la demande est toujours là finalement c'est juste que c'est les prix qui ne
04:59sont pas forcément alignés. La demande est très forte, les prix sont, tout dépend des gammes de
05:04prix, ils n'ont pas été toujours très alignés sur des gammes de prix très supérieures mais
05:12en général le marché s'est bien tenu. Ce qui a vraiment manqué ce sont ces oeuvres très
05:18valorisées, très prestigieuses et par contre le marché est de plus en plus alimenté par des
05:26oeuvres abordables. C'est vrai que c'est quelque chose qui marche notamment très bien avec la
05:34digitalisation des ventes qui a été croissante notamment après la crise sanitaire,
05:42et c'est quelque chose qui a transformé vraiment le marché sur sa base et qui a permis de le nourrir
05:50en oeuvres abordables. Et donc ce qui continue dans cette voie des heureux millionnaires qui
05:57sont moins présentes c'est aussi ces places fortes dont on parle souvent qui sont New York et la
06:05Chine qui sont beaucoup moins dynamiques qu'avant et du coup ça a forcément un impact sur le marché.
06:12Oui effectivement les places de marché les plus qualifiées sur le marché très haut de gamme sont
06:18celles qui ont le plus souffert en termes de chiffre d'affaires et la Chine qui perd plus de
06:2260% de résultats en 2024, les Etats-Unis mais aussi la France également et l'Allemagne.
06:31Effectivement parce que c'est Hong Kong, New York qui sont les places de marché les plus prestigieuses
06:38et là le marché s'est ralenti. Par contre tout ne perd pas en dynamique et on se rend compte que des
06:46places de marché qui misent moins sur les oeuvres de prestige ont maintenu un très bon flux d'activité
06:53voire ont progressé et c'est quelque chose qu'on peut constater notamment sur plusieurs places de
06:59marché européennes en Portugal, aux Pays-Bas, en Pologne, en Autriche. L'Autriche fait un très bon
07:06résultat en 2024 et puis en Suisse avec une performance assez incroyable, un chiffre d'affaires
07:11qui a progressé de 80% sur le marché de l'art suisse.
07:15Comment est-ce que ça s'explique ? Est-ce que c'est parce qu'il y a eu moins d'oeuvres phares sur ces places de marché
07:21Etats-Unis, Chine ou c'est vraiment une contraction du marché intérieur avec tout ce dont on parle très régulièrement
07:29dans l'actualité, l'économie, la géopolitique qui pour le coup ne soutiennent pas les acheteurs et ne leur permettent pas d'acheter ?
07:40Alors ces places de marché-là, elles ne reposent pas sur des oeuvres qui vont être valorisées à plus de 10 millions de dollars
07:47contrairement aux places de marché de Hong Kong, de Londres ou de New York.
07:52Et c'est ce segment-là qui s'est fortement contracté avec un manque d'oeuvres général au cours des années 2023 et 2024.
08:00Par ailleurs, lorsque de très belles oeuvres se présentent sur le marché, ça marche parce que la rareté
08:08c'est qu'il y a un vrai appétit de la part des collectionneurs pour des oeuvres de qualité.
08:12En l'occurrence sur le marché de l'art suisse, il y a une très belle collection d'art qui s'est vendue qui était celle de M. Kantfeld
08:18qui était un grand galeriste, marchand, éditeur, commissaire-priseur avec des oeuvres qui sont arrivées sur le marché helvétique
08:26importante notamment de Giacometti. Plusieurs oeuvres de Giacometti et sculptures se sont vendues entre 5 et 8 millions de dollars
08:33donc on voit bien qu'on est sur du marché de prestige et qui marche bien avec des oeuvres fortes, d'une belle provenance, etc.
08:40Et de même sur le marché français finalement puisqu'on a eu cette très belle vente de l'oeuvre de Jean-Sylvain Chardin
08:49le melon entamé qui s'est vendu au seuil des 29 millions de dollars alors que l'estimation l'a donné à 13 millions.
08:56Donc lorsque des oeuvres vraiment exceptionnelles arrivent sur le marché, les acheteurs sont présents et sont prêts à les soutenir.
09:04Mais on voit quand même que les maisons de vente aux enchères et même il y a beaucoup d'expositions qui tentent à explorer ces nouveaux pôles
09:15et même des artistes aussi dont on ne parlait pas trop, des artistes indiens, des artistes vietnamiens, etc.
09:22Donc on sent qu'il y a une attirance, un regard nouveau sur certaines zones, certaines places, certains artistes d'autres nationalités
09:31moins de polarisation entre Etats-Unis et Chine comme avant.
09:35Oui c'est vrai, c'est quelque chose que l'on remarque et c'est même intéressant de constater que parallèlement à ce déploiement digital du marché de l'art
09:45qui va très vite et très fort depuis quelques années, il y a également une expansion géographique.
09:51Du côté de l'Asie depuis une vingtaine d'années, très fortement à Hong Kong notamment avec des investissements très forts des grands acteurs internationaux
10:03Christie, Sotheby's qui ont inauguré de superbes nouveaux locaux en 2024, Philips, Bonan qui aussi ont renforcé leurs structures sur place
10:14et on a le marché de la Corée du Sud qui est intéressant, beaucoup de places de marché en Asie et là il se passe des choses aussi du côté de l'Arabie Saoudite
10:26notamment avec le Qatar, les Emirats Arabes Unis et l'Arabie Saoudite sont actifs sur le marché international depuis très longtemps, ça fait partie du développement de leur soft power
10:37il y a vraiment des investissements stratégiques très importants depuis des années dans l'industrie culturelle et dans les acquisitions d'oeuvres majeures
10:45là ce qui s'est passé en 2024 c'est qu'effectivement Christie's et Sotheby's ont obtenu des licences commerciales pour pouvoir opérer des ventes aux enchères sur place
10:55et que Sotheby's a réalisé sa première vente aux enchères en février dernier, en février 2025 avec des résultats qui sont très prometteurs, très encourageants
11:06Et pour terminer cette interview, est-ce qu'on peut faire un petit point sur la France, est-ce qu'on suit ces mêmes dynamiques, est-ce qu'il y a une régression aussi, comment est-ce qu'on se porte ?
11:17Alors le chiffre d'affaires est redescendu de 17% tout de même sur l'année 2024 en France
11:25par contre ce que je trouve vraiment intéressant de constater c'est de voir l'évolution du marché français sur les 10 dernières années
11:32Sur 10 ans il progresse de presque 50%, on n'est pas loin des 50% et il est la deuxième place de marché, enfin Paris qui représente vraiment le coeur du marché français, 88%
11:44Paris devant cette année Pékin et Shanghai, c'est-à-dire que dans un contexte difficile la place de marché parisienne affirme vraiment sa place sur l'échiquier mondial
11:56La deuxième chose c'est le dynamisme de l'achat, des achats qui sont réalisés en France puisque le nombre d'oeuvres vendues a doublé en 10 ans
12:07et qu'aujourd'hui la France est juste derrière les Etats-Unis en termes de nombre de transactions pour ce qui est de la vente d'oeuvres d'art aux enchères
12:14Donc un marché français encore très dynamique
12:17Merci beaucoup Céline Moine, je rappelle que vous êtes directrice de rédaction d'ArtPrize, merci de nous avoir présenté ce 30ème rapport annuel d'ArtPrize Analyse du marché de l'art 2024
12:26et merci à vous toutes et tous de nous avoir suivis, c'était Arrêt Marché