Mardi 14 janvier 2025, SMART BOURSE reçoit Florent Wabont (Économiste, ECOFI) , Hervé Guez (Directeur de la gestion actions et taux, Mirova) et Vincent Juvyns (Stratégiste, JP Morgan Asset Management)
Category
🗞
NewsTranscription
00:003 invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13Hervé Guèze est avec nous, directeur des gestions de Mirova.
00:16Bonsoir Hervé.
00:17Bonsoir Grégoire.
00:18Vincent Juvins nous accompagne également, stratégiste global macro chez JP Morgan Asset
00:22Management.
00:23Bonsoir Vincent.
00:24Bonsoir Grégoire.
00:25Et Florent Vabon est avec nous, économiste chez Ecofi.
00:26Bonsoir Florent.
00:27Bonsoir Grégoire.
00:28Merci d'être là messieurs, ravi de vous retrouver.
00:31On est à quelques jours du Day 1 de Donald Trump 2.0.
00:35Florent, je crois que tout le monde a déjà fait l'exercice de réfléchir à ce que pourrait
00:40être Trump 2.0, mais c'est peut-être l'occasion d'en reparler, notamment avec cette séquence
00:45de rumeurs, spéculations, ballons d'essai sur la stratégie des tarifs douaniers.
00:51On peut imaginer que même la future administration Trump, sortie de la campagne présidentielle,
00:58réfléchit à la meilleure formule de tarification douanière, dans un monde déjà beaucoup
01:03plus frictionnel qu'avant, et avec des marchés américains, en l'occurrence, très attentifs
01:10visiblement à cette question, Florent.
01:12Et avec une inflation plus élevée que lors du premier mandat de Donald Trump.
01:16C'est un peu ça le sujet, c'est-à-dire que finalement il a été élu sur la base
01:20de ce qu'on pourrait qualifier de crainte de l'inflation, de véritablement peur.
01:25Traumatisme.
01:26Traumatisme.
01:28Traumatisme de l'inflation.
01:29C'est le mot que je cherchais.
01:30Et de ce point de vue-là, il n'a pas intérêt à ce que l'inflation reparte, sachant qu'il
01:33a lui-même évoqué le fait qu'il y a quelques jours, l'inflation était trop élevée,
01:37et que les taux aussi étaient trop élevés.
01:40C'est Trump.
01:41Je pense que le mot qui revient sans cesse, c'est le mot de pragmatisme.
01:44Et je pense que c'est le bon mot à utiliser, c'est-à-dire qu'il y a des effets d'annonce
01:50de se dire qu'il va y avoir des hausses de tarifs, de droits de douane pour l'Europe,
01:54pour la Chine, de X%, mais il y a la réalité des faits, et à notre sens, c'est plutôt
01:59une arme de négociation.
02:00Et ça, je pense qu'il l'a bien compris, et ceux qui l'entourent aussi.
02:03D'ailleurs, il y avait eu une première rumeur, me semble-t-il, dans le Wall Street Journal,
02:07qui faisait état du fait qu'il y aurait une possible modération de ces droits de
02:12douane.
02:13Ça avait d'ailleurs entraîné une hausse des marchés actions européens, tout comme
02:15ce que l'on voit aujourd'hui.
02:16Et donc, de ce point de vue-là, effectivement, on peut être tenté de se dire que ça va
02:19être modéré.
02:20Donc ça, c'est plutôt bon signe.
02:21C'est plutôt bon signe pour l'inflation américaine.
02:24Elle est élevée, mais ça veut dire que ça ne va pas rajouter un effet one-off.
02:28C'est bon signe pour la croissance européenne, parce que ça veut dire que ça va potentiellement
02:32avoir moins d'impact négatif en termes de croissance.
02:36Donc, il faut espérer.
02:39Oui, je comprends.
02:40Mais je n'oublie pas que Donald Trump est un animal politique hors normes, et qu'avant
02:45tout, il a besoin de satisfaire sa clientèle politique.
02:48Ce que vous décrivez là, ce mélange de modération, de pragmatisme confronté à
02:52la réalité.
02:53Évidemment, en tant qu'économiste, je comprends tout à fait que cette idée-là germe dans
02:58les cerveaux.
02:59Mais ça permet quand même à Trump de satisfaire et de rendre à son électorat ce qu'il lui
03:06doit à travers cette victoire ? Il y a une manière de spinner, de tourner les choses
03:11politiquement qui permet à Trump de garder aussi la confiance de son électorat ?
03:16Alors, je vais enfiler une casquette de philosophe éventuellement.
03:19Pourquoi pas ?
03:21Le sujet, je pense, pour son électorat, c'est plutôt de savoir qu'il a la main.
03:24Et quand on a des armes pour négocier, ça veut quand même dire qu'on est en position
03:30de force.
03:31Quelqu'un qui est en contrôle et en maîtrise.
03:32Et donc, s'il va et qu'il négocie et qu'il revient victorieux, d'une certaine manière,
03:37ça suffira.
03:38On n'a pas parlé des baisses de taxes.
03:40Et ça, à mon sens, ça a plus de chances de se produire.
03:44Parce que là, d'accord.
03:45Pas forcément dans son intégralité, encore une fois, c'est sans doute un petit peu plus
03:49circonstancié.
03:50Mais ça suscite beaucoup plus d'adhésion du côté du Parti républicain.
03:53Donc, il ne faut pas oublier ce côté-ci.
03:55Les baisses de taxes, c'est plutôt pro-croissance.
03:58Un petit peu pro-inflation par la demande.
04:01On y reviendra peut-être sur l'inflation, mais il y a des raisons de tempérer un peu
04:06les craintes.
04:07Les craintes de résurgence d'inflation ?
04:09Oui.
04:10D'accord.
04:11Parce que les craintes, on ne sait plus trop dans quel sens elles sont.
04:13En Europe, il y a la crainte aussi de voir l'inflation trop basse, peut-être, dans
04:17un futur plus ou moins proche.
04:19Vincent, sur ce Day One de Trump et sur l'idée effectivement qu'on aura peut-être une forme
04:25de modération, de pragmatisme qui pourrait s'exprimer chez Trump, on sent en tout cas
04:29qu'il y a une histoire de séquence et d'ampleur dans la mise en exécution des grands axes
04:36de sa politique qui va être quelque chose d'assez important et peut-être même qui
04:39va façonner le rythme des marchés au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
04:44Oui, c'est clair.
04:45Les marchés sont dans l'expectative après les célébrations des premières heures.
04:49Aujourd'hui, c'est de se demander à quel souci ils seront mangés, sur le plan commercial,
04:51sur le plan migratoire.
04:52On a encore vu la semaine passée un marché du travail qui reste tendu, donc c'est vrai
04:55que là aussi, sur l'aspect migratoire, c'est un sujet.
04:58Je souscris assez fort à l'idée, mais enfin, c'est peut-être parce qu'on est économiste
05:02et qu'on voit le bon sens triompher, en tout cas, que ce sera le cas et que le pragmatisme
05:07se dominera aux États-Unis.
05:08On ne peut jamais dire jamais, je pense qu'on peut faire sur ce plateau à ce stade que
05:12des suppositions.
05:13Maintenant, ce n'est évidemment pas dans son intérêt de mettre l'économie américaine
05:16à genoux.
05:17Les Américains sont sensibles à l'inflation, donc finalement, faire revenir l'inflation
05:21fortement, ce n'est pas le sujet.
05:23On sent d'ailleurs déjà que cette technique de négociation a bien fonctionné, puisque
05:26partout, on s'est montré prêt à discuter, prêt à négocier, ceux de la Vendée en disant
05:31qu'on peut importer plus de gaz, les Canadiens aussi.
05:33Tout le monde s'est retrouvé à Mar-a-Lago pour essayer déjà un petit peu d'anticiper.
05:37Tout le monde, pas encore, mais certains et certaines.
05:39Voilà, donc en tout cas, on peut reconnaître que sur l'approche, ça semble avoir déjà
05:44porté ses fruits.
05:46Retenons en effet les baisses d'impôts qui sont plus fortes avec Trump qu'elles ne l'auraient
05:50été avec Kamala Harris.
05:52Pour les investisseurs que nous sommes, modestement, finalement, c'est une bonne chose.
05:57C'est finalement davantage de bénéfices restitués aux actionnaires.
06:00C'est bon pour l'activité économique.
06:02On voit que le sentiment, dans le cas des acteurs de l'économie, PMA et autres, reste
06:08bien orienté.
06:09Donc voilà.
06:10J'en viens pas à souhaiter qu'on ait un Donald Trump en Europe, mais enfin, il nous
06:15manque un petit peu parfois en Europe cet enthousiasme qu'il faudrait susciter d'une
06:18manière ou d'une autre.
06:19Et voilà.
06:20Donc l'année 2025 reste à l'entame de celle-ci.
06:24Toujours une année dominée par cet exceptionnalisme américain qui est incontestable, difficile
06:29de challenger à l'heure actuelle, alors que l'Europe demeure embourbée avec ses propres
06:33problèmes.
06:34Il faudra sans doute attendre le deuxième trimestre pour peut-être voir un petit peu
06:36plus clair dans les perspectives de chaque zone.
06:39Je rebondis sérieusement d'ailleurs sur votre point, peut-être qu'il nous manque
06:42un Donald Trump en Europe.
06:44J'ai encore l'idée qu'on peut trouver d'autres options qu'un Donald Trump européen pour
06:50redonner un peu de perspective à l'Europe.
06:52Mais j'entends tout à fait le point, Vincent.
06:54Il faudrait corriger le tir immédiatement.
06:57En tout cas, quelqu'un qui a de l'ambition pour l'économie européenne.
07:00Face à Donald Trump, il faut qu'il y ait quelque chose.
07:02Il faut qu'il y ait quand même une tactique, une stratégie.
07:05Alors, est-ce que c'est une position de force et un bras de fer face à un homme fort comme
07:10Trump ? Est-ce que c'est une autre approche ? Mais en tout cas, il y a forcément quelque
07:14chose à imaginer face à Trump par rapport à l'administration précédente.
07:21Je pense qu'il faut une ambition renouvelée.
07:23Elle a été évoquée notamment par Mario Draghi.
07:26On a reconnu le caractère difficile de certains aspects du plan qu'il proposait.
07:30Il nous faut un axe franco-allemand fort.
07:32On a des élections en Allemagne prochainement.
07:35On espérait qu'il en sorte un exécutif qui ait de l'ambition pour l'Allemagne, mais
07:38de l'ambition pour l'Europe.
07:39On avait cet axe franco-allemand relativement fort durant le Covid et on en mesure encore
07:44aujourd'hui tous les bénéfices.
07:45On parlait avant que cette émission commence de la situation en Italie, mais derrière
07:49les bons chiffres de la croissance en Italie, il faut voir l'impact du Fonds de relance
07:54européen.
07:55Donc, il nous faut ce genre de mesures.
07:56On sait évidemment que tant en France, tant en Allemagne aujourd'hui, c'est difficile.
07:59Les exécutifs sont évidemment en difficulté et dès lors difficiles d'avoir des ambitions
08:04au niveau européen.
08:05Et c'est ça qu'il nous faut avant tout aujourd'hui, c'est plutôt que de chercher
08:09la confrontation, c'est déjà pour nous-mêmes prendre les bonnes mesures pour nous relancer
08:14dans un monde où tant en Chine qu'aux Etats-Unis, on pense d'abord à soi et on ne va pas s'exporter
08:20hors de nos problèmes, ce qu'on pouvait encore faire auparavant.
08:23On pouvait compter sur une relance de la demande chinoise via l'automobile, via le luxe et
08:27ainsi de suite.
08:28Le luxe peut-être, mais les automobiles, ça ne marchera pas en 2025 malheureusement.
08:31On commence, à ce propos je rebondis aussi, on commence à percevoir un timide sursaut
08:36en Europe.
08:37De qui ? De quoi ? De l'économie ?
08:39De l'autonomie stratégique.
08:40Ah, l'autonomie stratégique.
08:41D'ailleurs, en réponse au droit de douane de Donald Trump qui avait été évoqué pendant
08:47sa campagne, on avait, alors Christine Lagarde n'est pas le représentant de la Commission
08:51européenne, mais elle avait déjà évoqué qu'il fallait potentiellement lâcher du
08:54laisse sur le gaz natural liquéfié, sur les plans de défense, etc.
08:57Il y a eu une interview très politique de Christine Lagarde au FT, si c'est la même
09:01référence que vous avez, Florent, où le mot d'ordre, c'était la stratégie du
09:06bookcheck, du chéquier, il faut négocier avec Trump.
09:09Voilà.
09:10Alors, c'est toujours très dangereux de dévoiler ses cartes avant de commencer à
09:13négocier.
09:14Donc après, ce n'était pas son rôle non plus, mais ça a le mérite de se dire qu'effectivement
09:18il y a quelque chose qui est en train de bouger.
09:20D'ailleurs, juste après, on a des plans de compétitivité qui ont été évoqués
09:23du côté de la Commission européenne, des plans de défense également.
09:27Ça peut vouloir dire que, d'une certaine manière, l'Europe sent qu'elle est au pied
09:30du mur et qu'elle n'a pas d'autre choix que d'avancer, que de négocier avec Donald
09:34Trump et puis de, encore une fois, véritablement avoir cette autonomie stratégique, donc investir.
09:39Ça, c'est des dépenses d'investissement, c'est plutôt bon pour la croissance.
09:42Donc il y a des fondations qui sont posées, des jalons qui sont posés ici et là, en
09:47attendant le grand moment politique de cohésion et de renforcement.
09:53Le rapport Draghi, pour moi, fait date.
09:55On l'a presque oublié, mais pour moi, il fait date.
09:58C'est-à-dire que, lorsqu'il est sorti, la réponse des Allemands, notamment, a été
10:04tout de suite une forme de révulsion.
10:05Et aujourd'hui, on commence à comprendre que ce n'est plus vraiment le cas, c'est-à-dire
10:10qu'on dirait qu'il y a quelque chose qui se passe, notamment avec les élections qui
10:14arrivent où le frein à l'endettement, peut-être qu'il peut être légèrement levé, l'orthodoxie
10:19budgétaire peut être un peu modérée.
10:21Donc on commence à voir des choses et le rapport Draghi, à mon sens, est quelque chose qui,
10:25à mon avis, a aiguillé un peu cette flexibilité allemande.
10:29J'entends.
10:30Hervé, vos commentaires, vos réactions, vos remarques ?
10:33Je reviens au sujet du moment, c'est Day One, la semaine prochaine pour Donald Trump
10:37à la Maison Blanche.
10:38Oui, écoutez, je crois que la dernière fois qu'on s'était vus, c'était juste avant les élections.
10:43Ah oui, ok.
10:44Et on parlait des Trump Economics et du marché.
10:48Je disais que le marché avait commencé à acheter les Trump Economics et qu'on se dirigeait
10:51probablement vers des taux pas loin de 5.
10:54On y est aujourd'hui.
10:56Après, il y a eu une première phase dans laquelle ce que le marché a acheté, c'est
10:59un peu le biais cognitif qu'on a.
11:02Trump est rationnel, donc le pro-business, oui, la partie inflationniste, non.
11:07Donc on a eu une gros rallie-action et puis détente sur les taux.
11:11Puis à l'approche de l'arrivée de Trump, on se dit bon, finalement, est-ce qu'il est
11:14quand même si rationnel ?
11:15On a parlé des tarifs douaniers, mais presque plus inflationnistes que les tarifs douaniers,
11:19c'est la politique migratoire qui pourrait avoir une influence assez significative sur
11:24le taux d'inflation.
11:25Donc là, le marché revient sur, bon, et finalement, s'il faisait quand même un peu ce qu'il
11:29a dit qu'il allait faire parce qu'il faut qu'il soigne son électorat, quelles conséquences
11:33ça pourrait avoir ?
11:34Bon, alors, je ne sais pas, tu disais philosophe, je pense qu'il voulait dire psychologue.
11:38Je ne sais pas s'il pourrait avoir une approche rationnelle avec Donald Trump, c'est difficile
11:45d'avoir une approche psychologique, ça me semble aussi très compliqué.
11:48Donc de ce point de vue-là, ce qu'a remis Trump, plutôt que de la visibilité et de
11:54la certitude, c'est quand même de l'incertitude, de la volatilité, de l'imprévisibilité.
12:00Est-ce qu'il suivra ses conseillers, des conseillers plus ou moins rationnels ? Qu'est-ce qu'il
12:05fera ? Est-ce que ce sera un one-shot progressif, etc. ? Objectivement, comme tu as dit, je
12:10pense que ce n'est pas sûr.
12:11On n'a pas la boule qui permet de comprendre ce qu'a à faire Donald Trump.
12:15Donc on est clairement, d'un point de vue d'investissement, sur une phase qui est plutôt
12:18une phase d'imprévisibilité sur le choc qui est lié à ces mesures.
12:22Il y a un souci, Trump a un côté pragmatique qu'on peut anticiper, c'est effectivement
12:29la partie, je pense qu'il a les yeux fixés sur les marchés, presque plus que sur l'économie,
12:37et donc il peut y avoir un phénomène autoréalisateur si les marchés s'en approchent trop des 5%,
12:44si ça tombe, etc.
12:45Donc ça, ça peut lui faire dire, attention, il peut se passer quelque chose.
12:50Ça peut être une espèce de forme de rappel rationnel en se disant, bon, il ne faut pas
12:53que, tant que les marchés ne s'inquiètent pas trop de ce que je raconte pour faire plaisir
12:56à mon électorat, ça va, si ça commence à aller pas bien, il faudra que je corrige.
13:00Il n'a pas beaucoup de marge, à part exécuter à la perfection, il n'a pas beaucoup de marge
13:05par rapport à la situation des marchés.
13:07Il n'a pas beaucoup de marge, mais lui, ça a été dit, paradoxalement, il a quand même
13:11la chance d'être sur une économie qui va plutôt bien, des anticipations de bénéfices
13:15qui sont à plus de 15%, dès qu'il ose la voir, Biden, il doit quand même pleurer.
13:23Il doit se dire, si j'insulte les Européens, j'ai la première ministre italienne qui dit
13:28qu'Elon Musk est un génie parce qu'elle a traité Kerstheimer de quoi ?
13:33De complice, de nanche, de la vie.
13:36De méprisable.
13:37De méprisable, pardon.
13:38Elon Musk a traité le premier ministre anglais de méprisable et la première ministre italienne
13:43trouve qu'Elon Musk est un génie.
13:44La vraie question, elle ne me semble-t-il pas tant côté américain, mais tu l'avais
13:51mentionnée, c'est quelle est la réponse européenne ? Et là-dessus, pour le coup,
13:55je suis beaucoup plus pessimiste.
13:56C'est-à-dire que le couple franco-allemand n'existe plus, l'Allemagne va encore presque
14:01trop bien pour se remettre en question, alors que ça ne va pas mieux, mais elle est toujours
14:06sur un modèle exportateur net extrêmement fort, malgré la baisse, elle engrange les
14:12excédents commerciaux réguliers, j'ai l'impression qu'elle veut se battre à tout prix pour
14:16préserver ce modèle, donc je pense que le réveil allemand sera lié à une inversion
14:21de ça, c'est-à-dire que quand ils se rendront compte que la politique exportatrice ne peut
14:25plus être l'élément clé qui justifie les politiques économiques, ils changeront.
14:31On n'en est pas là, le niveau de douleur n'est pas encore suffisamment fort sur le modèle allemand.
14:37Tu arrives douanier sur l'automobile chinoise, pour ne pas parler des Etats-Unis, l'Allemagne
14:41a dit « on vaut de compte ». Donc on voit bien que, pour l'instant, l'Allemagne est
14:46dans une situation où elle estime qu'elle va vouloir essayer de sauver le maximum de
14:50meubles qu'elle peut sauver sur sa politique exportatrice, et de ce point de vue-là, elle
14:54est complètement antinomique sur une France qui a d'autres choses à faire et qui accueillerait
14:58le rapport Draghi de façon beaucoup plus volontaire, mais qui a encalminé dans une
15:03situation politique compliquée des déficits budgétaires extrêmement élevés.
15:07Donc on a un couple franco-allemain malade des deux côtés du Rhin, et effectivement
15:14les pays périphériques ne pourront pas prendre le relais de façon durable de ce couple-là.
15:18Donc est-ce qu'il faut un Donald Trump européen ? Je ne sais pas, mais ce qu'il nous faut,
15:22c'est un réveil européen où on ne parle plus d'autonomie stratégique, mais où on
15:27l'a fait.
15:28On est un fichu de faire autre chose pour l'instant que de la régulation, un fichu
15:34de construire les sociétés technologiques de demain, d'avoir une politique très ferme,
15:41très claire sur les investissements, où est-ce qu'on veut les orienter.
15:43Donc je trouve qu'en tant qu'investisseur, je m'intéresse à toutes les zones géographiques,
15:54et c'est un peu avec colère qu'on se dit que la zone Europe, à part on en parlera
15:58peut-être un petit décalage ponctuel de valorisation qui fait que peut-être que l'Europe
16:02ne fera pas trop mal cette année, mais sur le long terme, l'Europe, ça va très mal,
16:11et il ne semble pas y avoir de prise de conscience forte sur la nécessité, non pas d'avoir
16:19intellectuellement une autonomie stratégique, mais de la construire.
16:22Défense, on est toujours nulle part, les Français et Anglais font ce qu'ils peuvent,
16:27les pays de l'Est continuent à acheter américains, est-ce que ça va s'inverser ? Je ne suis
16:31pas sûr.
16:32Technologie, on s'est félicité, et c'est très bien d'avoir la première réglementation
16:39sur l'intelligence artificielle, très bien, on est champion de la réglementation, est-ce
16:43qu'on pourrait avoir un acteur de l'intelligence artificielle qu'on soutient, quelle est la
16:47place qu'on va leur donner, est-ce qu'on va accepter d'être à la menace d'une patte
16:51Microsoft ?
16:52Sur ces sujets-là, d'un point de vue politique, on n'en parle pas, Trump hausse le ton, qu'est-ce
16:58qu'on dit ? On va acheter plus de GNL américains.
17:00Magnifique.
17:01Il est difficile d'être optimiste sur l'émergence d'un Trump européen, enfin pas un Trump,
17:11on a bien compris l'expression, pas au sens caractère Donald Trump, mais au sens Europe
17:16first.
17:17Europe first, non, c'est chacun pour soi, et chacun va essayer d'aller négocier sur
17:25le sujet qui l'intéresse, l'Allemagne, l'automobile avec la Chine et les Etats-Unis, les Français,
17:32le luxe avec la Chine, chacun va négocier, on a déjà vu l'Italie faire de même, donc
17:39Europe first, on ne la voit pas.
17:41Est-ce que ça veut dire pour un investisseur global, l'Europe n'a plus vocation à être
17:46un investissement stratégique, que c'est au mieux une poche tactique d'investissement
17:50aujourd'hui, c'est ce à quoi on est réduit ?
17:52C'est le risque auquel on est clairement soumis, c'est-à-dire que si on regarde les
17:56flux et la direction qu'on prend, tous les investisseurs, que ce soit retail ou investisseurs
18:03institutionnels, le mouvement est très fort sur un des éléments de force qui pouvait
18:09être l'épargne européenne qui est en train de se faire aspirer par le marché américain
18:17et merchandisie, donc même sur le sujet où on pourrait se dire qu'il y a l'épargne
18:22mobilisable, on peut la mobiliser pour les investissements dans les entreprises, dans
18:26la technologie, dans la révolution verte, on a des investisseurs qui disent il n'y a
18:33qu'à voir les performances des marchés actions européennes cette année et américaines,
18:35enfin c'est les deux dernières années, non en fait on va commencer à diversifier, on
18:39va faire plus d'expositions aux US, quand bien même les valorisations sont élevées,
18:43donc franchement le discours européen sur la technologie, sur la défense, sur l'épargne,
18:52sur la finance, c'est du discours.
18:55Qu'est-ce que ça implique pour l'investissement quand même en cette année de 2025 ? Parce
19:01que c'est aussi, alors j'allais dire c'est toujours un peu la même histoire avec l'Europe,
19:04avec beaucoup du pessimisme et des questions structurelles qu'on soulève, beaucoup se
19:09retrouvent quand même déjà en partie dans les prix de marché, les valorisations des
19:13actifs européens, Vincent, quel état des lieux là vous dressez de cette asymétrie
19:19qu'il y a des deux côtés de l'Atlantique ?
19:22L'Europe c'est trop bon marché pour être sous-pondéré, soyons réalistes, en effet
19:27comme vous le dites, il n'y a pas de raison d'être particulièrement enthousiaste à
19:29court terme, il n'y a pas d'histoire à raconter, le meilleur argument qu'on a pour l'Europe
19:32c'est que c'est bon marché, c'est bon marché, effectivement, on est relativement bien payé
19:36pour attendre, les entreprises européennes continuent de choyer leurs actionnaires tant
19:39qu'elles peuvent, on a à nouveau une année de record en termes de distribution de dividendes,
19:43ça vient d'être communiqué notamment par La Maison qui publie chaque année, donc on
19:47est bien payé pour attendre, on ne peut pas être en décalage, maintenant même si l'Europe
19:52fait un peu mieux que les Etats-Unis dans la première journée d'échange de l'année,
19:56c'est vrai que...
19:57Oui, enfin ramené en dollars, je ne suis pas sûr qu'on fasse si bien que ça.
20:00C'est vrai que j'ai du mal à voir l'Europe surperformer les Etats-Unis au cours du premier trimestre,
20:05je pense que l'avantage demeure aux Etats-Unis, on le verra la semaine prochaine, la saison
20:09de réunion, enfin cette semaine.
20:11Le momentum, parce qu'on peut regarder l'avalot du marché américain, on peut se faire peur,
20:15on est j'imagine dans des percentiles très élevées quasiment en matière de charté
20:20pour le marché américain, mais vous dites qu'il y a un facteur momentum là, contre
20:25lequel on ne peut pas se mettre.
20:26Pour moi la rotation elle a d'abord lieu aux Etats-Unis avant d'avoir lieu internationale,
20:28donc je résumerais les choses ainsi, on a les Etats-Unis, c'est un marché bêta
20:33pureplay, avec la tech comme driver, mais plus uniquement je pense que la thématique
20:39aujourd'hui de diffusion de la croissance bénéficiaire plus à l'avantage des autres
20:44secteurs, ou en tout cas d'autres secteurs qui rivalisent avec la tech davantage, c'est
20:47assez bien acquis par la plupart des investisseurs, la thématique equal weight qui avait surgi
20:53en juin dernier continue à faire tâche d'huile, donc voilà.
20:58Élargissement de la performance aux Etats-Unis au sein du S&P 500, au sein des niveaux de
21:04capitalisation, l'attrait pour les small cap aujourd'hui est beaucoup plus important
21:07aux Etats-Unis notamment, Europe c'est plutôt un marché pour être neutre, plutôt un marché
21:11de rendement, salaires, moi je serais plutôt sur des valeurs immobilières, des valeurs
21:15bancaires en Europe.
21:16Il y a des meilleurs perfs, le secteur bancaire fait plus de 20% l'an dernier en Europe.
21:20On a des perspectives démenées, on a du rendement et tout ça c'est très bien, le marché deep
21:25value, alors s'il faut en trouver un, allons-y franco, allons-y la Chine, donc là tant qu'à
21:31faire et on a plutôt plus de croissance bénéficiaire qu'en Europe, et on a plutôt des autorités
21:39qui sont tentées d'utiliser le marché actions justement pour relancer un petit peu la confiance.
21:43Elles l'ont fait avec succès en 2024, ça a mal commencé en 2025, aujourd'hui ça
21:47va mieux, trop tôt pour dire si c'est durable, mais en tout cas c'est facile je dirais de
21:53relancer la confiance par ce canal-là, ce sera plus facile que de relancer la confiance
21:57par une remontée des prix immobiliers qui est là beaucoup plus cher à atteindre.
22:01Florent, dans quelle mesure les taux, notamment on vous évoquait l'inflation de fer, dans
22:08quelle mesure les taux long terme, comme on les voit monter depuis quelques semaines,
22:13peuvent être un problème, notamment pour le marché américain ? Je redonne, c'est
22:1774% désormais du MSCI World, les Etats-Unis, moi j'étais resté au 2 tiers, voire 70%,
22:25maintenant on m'a dit c'est 73-74%, ça monte encore, qu'est-ce qu'on peut dire de la situation
22:31des taux longs, de ce mouvement un peu global de repricing, et où est la limite de ce point
22:38de vue-là ? Ça amène à se questionner j'imagine sur les perspectives d'inflation là, et
22:41vous aviez l'air de dire qu'il fallait peut-être ne pas être trop inquiet à ce stade d'une
22:47période modérément inquiète, je ne veux pas attrahir votre pensée, d'un risque de
22:51résurgence de l'inflation, quel est l'argumentaire derrière la flamme ? Peut-être parler sur
22:56les taux longs déjà pour commencer, effectivement, pour caricaturer mais on n'est pas loin des
23:00choses, c'est-à-dire que depuis que la Fed a baissé ses taux de 100 points de base,
23:04les taux de marché, le 10 ans américain a pris 100 points de base. Je crois que c'est
23:07à peu près une équation juste. C'est relativement, voire même je dirais c'est inédit, dans
23:12une période de baisse de taux, il arrive à certains moments de l'histoire où les
23:16taux d'intérêt remontent légèrement, les taux d'intérêt de marché j'entends lorsque
23:19les taux directeurs diminuent, mais pas dans cette ampleur. Et d'autre part, le seul parallèle
23:24historique, alors à chaque fois que je viens sur ce plateau, j'ai une habitude, c'est
23:27que je parle d'Alan Greenspan, donc je vais recommencer. Le seul parallèle historique
23:31que l'on peut dresser, c'est lorsque Alan Greenspan a effectué son ajustement de politique
23:35monétaire, a fait atterrir l'économie en douceur et n'a baissé les taux que de 75
23:40points de base, les a maintenus pendant une certaine période, pendant quasiment un an
23:44et demi, deux ans, et les a ensuite remontés avant de les rebaisser, etc.
23:47Ça c'est les années 90 ?
23:48Exactement, les années 90, et à ce moment-là, les taux d'intérêt de marché étaient plutôt
23:52restés stables, c'est-à-dire que le 10 ans américain n'avait pas augmenté de 100
23:54BP comme aujourd'hui. Donc ça c'est déjà la situation qui est inédite de ce point
23:58de vue-là. Alors, là où ça pose problème, c'est qu'effectivement, c'est pas nécessairement
24:03ce que voulait la Fed, a priori. Sauf que ce dont on se rend compte, pardon, c'est que
24:08finalement l'économie américaine arrive à gérer ce niveau de taux d'intérêt pour
24:11le moment. Le rapport qui a été publié ce matin pour les petites entreprises américaines
24:17nous indique qu'elles voient les conditions de crédit qui leur sont accordées se détendre
24:22un peu.
24:23S'améliorer ?
24:24Alors, elles sont pas encore en train de dire qu'elles vont déployer du cash pour
24:26investir, pas encore, mais elles voient des perspectives bien meilleures pour l'économie
24:31américaine. Les petites entreprises. Alors, il y a sans doute l'effet Trump, on en a
24:33parlé, mais là où, par exemple, ce matin, je pensais que l'effet s'estomperait, finalement
24:39le chiffre a été plus fort que les attentes. C'est-à-dire qu'il y a quand même quelque
24:44chose dans l'économie américaine qui se passe, qui est de se dire, on a un taux d'intérêt
24:49qui aujourd'hui n'est pas forcément en train d'impacter négativement l'économie.
24:54Pas aussi restrictif que ce qu'on peut imaginer.
24:56Peut-être qu'on n'est pas loin de la fameuse neutralité. Alors ça, ça nous ramène à
25:00quelque chose de théorique.
25:01On est à quoi ? 4,25, c'est ça sur les taux directeurs de la Fed, c'est ça aujourd'hui.
25:04Sur la fourchette basse.
25:054,25, 4,50.
25:06Donc ça veut dire quoi ? Ça veut dire que la Fed n'a pas besoin de baisser beaucoup
25:10ses taux. Donc une fois qu'on a dit ça, forcément les marchés l'anticipent, font
25:15remonter les taux de marché. Et le problème, c'est que par sympathie, les taux remontent.
25:25Et là, c'est beaucoup plus problématique. Là où pour l'économie américaine, à mon
25:29sens, alors 4,8, ça commence à faire beaucoup. Quelque chose entre 4,3 et 4,5.
25:332,5% de taux réel autour.
25:36C'est un peu élevé. Mais ce n'est pas encore non plus excessivement élevé.
25:40Et ça devient attractif.
25:41Et ça peut devenir attractif, effectivement. On peut être tenté de se dire que ça peut
25:44retomber aux alentours de 4,5 sur le taux de 10 ans américain, quelque chose comme ça.
25:48Là où c'est plus problématique, c'est pour l'Europe. On prend le 10 ans allemand.
25:52Non.
25:53Ou français.
25:54Oui, oui, non, si, si, oui, oui, oui.
25:56De 2 à 2,6 quasiment en l'espace de quelques semaines. Dans une période où la banque
26:01centrale européenne baisse ses taux. Et là, on aurait plutôt envie que les pressions
26:04obligataires diminuent pour qu'il y ait un effet boost sur l'économie européenne.
26:08Et comment vous avez vu la capacité de la BCE à s'affranchir s'il le faut à nouveau
26:13de la politique monétaire américaine, si la Fed devait se mettre en pause durable pour
26:17plusieurs mois ?
26:18Je pense que ce que cette séquence reflète aussi, c'est l'incertitude vis-à-vis du
26:23temps qui sépare le moment où on se parle et l'investiture de Donald Trump. Donc il
26:28n'est pas improbable que les choses se détendent un petit peu et qu'on ait une détente sur
26:31les taux obligataires aussi allemands, français, etc. Après, il y a un autre concept théorique,
26:36un peu magique aussi, c'est la fameuse prime de terme. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, les
26:39investisseurs, pour le dire très simplement, la prime de terme, c'est qu'on exige un rendement
26:44supplémentaire pour prêter à un État sur le long terme. Parce qu'à long terme, il
26:47peut se passer plein de choses. Il y a des problèmes de déficit à financer, peut-être
26:50que les États vont trop s'endetter. Il y a des problèmes de soutenabilité de la dette.
26:54Il y a de la volatilité sur l'inflation. Il y a une incertitude sur le fameux taux
26:57neutre. On ne sait pas véritablement où il se situe. Pour toutes ces raisons-là,
27:01la prime de terme a augmenté. Elle a augmenté principalement aux États-Unis et ensuite
27:05à l'impact les taux européens. Encore une fois, la BCE se retrouve dans une situation
27:09délicate. C'est-à-dire qu'on a une inflation qui diminue fortement, qui va probablement
27:12encore continuer à diminuer pendant un certain temps. On a une inflation dans les services
27:17qui est élevée, mais nous, on anticipe qu'elle va commencer à s'apaiser dans les prochains
27:21mois. Ça lui laisse des marges de manœuvre, au moins à mon sens, sur la première partie
27:26de l'année. Après, et c'est là où le plateau aujourd'hui se divise en deux, c'est que
27:29moi, je suis beaucoup plus optimiste sur la croissance européenne pour 2020.
27:33Conjoncturellement, il y a quand même quelque chose de pas si défavorable, malgré le degré
27:39exceptionnel d'incertitude, de pessimisme et d'incertitude politique.
27:43D'ailleurs, pour compléter avec le marché d'action, et je finirai là-dessus, il y
27:46a un pessimisme qui est peut-être un peu trop élevé. Finalement, le degré de surprise
27:51qu'il faut pour que les choses se rétablissent, entre guillemets, ou qu'il y ait un rebond
27:55des actions européennes, il est finalement assez bas.
27:57Il faut mettre un chiffre sur la croissance européenne cette année ?
28:00Nous, on est un petit peu plus de 1.
28:02Ah oui ?
28:03Ah oui, ça c'est en moyenne annuelle.
28:05Le consensus moyen est à 0,9.
28:07On est un peu en dessous de 1.
28:08Oui, c'est ça.
28:09Alors, je rappelle une chose, c'est que la croissance potentielle de la zone euro, c'est
28:12à peu près 1%.
28:13Oui.
28:14Donc, on est un peu en dessous.
28:150,9, 1, 1, 1. Je ne pense pas que l'histoire jugera les défis européens à l'aune de
28:21dixième de point de base comme ça.
28:23Pour vérifier peut-être un élément précis, j'ai beaucoup moins de certitudes sur le
28:28court terme, à la limite, et sur l'année 2025 que le long terme.
28:31Ce que je dis juste, c'est que les États-Unis, sur les décennies qui viennent de suivre,
28:35gain de productivité, démographie.
28:37La France, pas de gain de productivité, beaucoup moins de démographie.
28:40C'est 15 ans d'investissement continu, c'est ça qu'il faut comprendre.
28:44Exactement.
28:45Potentiel à la zone europe, c'est 1.
28:48Alors, si on est content, si on fait 1, on est un peu déçu si on fait 0,8.
28:52Sérieusement.
28:53Donc, mon sujet, il n'est pas sur l'année 2025.
28:58Encore une fois, il y a des risques, à mon avis, aux États-Unis, probablement plus,
29:02en fait, sur les niveaux de marge des gros acteurs de la tech et la capacité à maintenir
29:07ça, notamment sur les acteurs de l'intelligence artificielle.
29:09Donc, il y a des autres risques qui peuvent faire que les États-Unis ne vont pas bien.
29:12Malheureusement, je pense que si les marchés actions américains ne vont pas bien, on n'aura
29:15pas les marchés européens qui vont aller très bien non plus.
29:18Mais bon an, mal an, compte tenu des écarts de performance qu'on a eu l'année dernière,
29:21du pessimisme très ambiant sur l'Europe, ce que je dis finalement, j'enfonce des portes
29:25ouvertes un petit peu, sur les problématiques européennes à moyen et long terme, fait
29:28que le fait de se dire, est-ce que sur 2025, sur un malentendu, j'avais envie de dire,
29:33on ne va pas avoir un marché européen qui va faire un peu mieux que le marché américain,
29:36pourquoi pas ça ? J'ai vraiment pas une confiance forte sur ce sujet.
29:41De toute façon, j'ai envie de dire, ça a été dit, quand on a un gérant actif long
29:45terme, c'est aussi...
29:46Alors, peut-être que c'est le seul élément d'inquiétude qu'on peut avoir, c'est qu'il
29:49y a une tendance naturelle à surpondérer l'Europe.
29:51Parce qu'un fonds global, si c'est un fonds américain diversifié, ça ne remplit pas
29:55son rôle.
29:56Donc globalement, les gérants actifs sont quand même plutôt surpondérés Europe,
29:59ce qui n'est pas...
30:00Quand on gère avec les risques, oui, il y a...
30:02Il y a la force de rappel qu'on ne peut pas dire que sur le marché, il y a une sous-pondération
30:06très très forte des marchés européens.
30:08Donc moi, mon point, ce n'est pas de dire sur 2025, est-ce que finalement, sur un malentendu,
30:13l'Europe ne va pas faire mieux que les Etats-Unis, ou le timing.
30:16Je n'ai pas de confiance là-dessus.
30:18Ce que je dis juste, c'est que sur le long terme, les défis européens auxquels on
30:22a à faire face, il n'y a pas le début, l'ombre.
30:25Le rapport Draghi, ça a été dit.
30:26Mais enfin, est-ce qu'il a résurgi un tout petit peu ?
30:30Enfin, on est peut-être les seuls à être au courant alors.
30:32Parce que sinon, je n'ai pas du tout l'impression que ça fasse le début d'une prise de conscience
30:38d'investissement politique européen.
30:40La plateforme politique pour porter ça aujourd'hui, je suis d'accord.
30:42Mais il existe, il a le mérite d'exister.
30:44Et du coup, pour finir, ce qui peut être inquiétant sur les taux européens, pour
30:49le coup, c'est à se demander si les incertitudes politiques très fortes et la disruption que
30:55peut faire Donald Trump, cette Europe qui a tendance à tirer à hue et à dia en fonction
31:00de ses intérêts allemands, français, n'est pas en train d'apparaître une prime de risque
31:05liée à la construction européenne, sur la capacité de l'Europe à maintenir ça.
31:10C'est-à-dire que ce qu'on voit, c'est que les investisseurs internationaux, américains,
31:15asie, l'euro fait partie de leur allocation stratégique assez fortement.
31:21Ils se questionnent aujourd'hui fortement sur qu'est-ce qu'on est en train de nous
31:25vendre comme projet de long terme sur la construction européenne.
31:29Donc, je pense qu'effectivement, c'est bien d'essayer de négocier avec Donald Trump,
31:33de voir qu'est-ce qu'on peut arracher, est-ce qu'on achète un peu de Génel.
31:35Il faudrait quand même vraiment qu'il y ait une vraie prise de conscience, pas par
31:41les mots mais par les actions, de ce sujet de souveraineté européenne sur lequel il
31:46n'y aura pas de rebond durable des marchés européens en dehors de cette prise de conscience.
31:51Une question de volonté ou de capacité politique aujourd'hui effectivement qui est vraiment
31:55sur la table.
31:56A propos de défis, Hervé, comment vous regardez dans votre univers, en tout cas dans votre
32:03dimension d'analyse, tous ces départs en série des grandes alliances net zéro, que
32:08ce soit pour le secteur bancaire, pour les assets honneurs, etc.
32:11Là, on a eu une multiplication de départs.
32:14En gros, les grandes banques américaines et des européennes qui sortent aussi de ce
32:19genre d'alliances.
32:20En 2016, on n'avait pas eu ça.
32:22Il y a aussi l'exemple de Meta, du pivot que fait Meta sur sa stratégie en matière
32:29d'information sur les réseaux sociaux.
32:31C'est vrai qu'il y a une concomitance avec l'arrivée de Donald Trump qui fait
32:35qu'on s'interroge.
32:36Mais en 2016, il n'y avait pas eu ça.
32:38Il n'y avait pas eu cette mise en ordre, si je puis dire, sur Trump 1.0.
32:43La différence, c'est que sur 2016, Trump était évidemment climato-sélectif, pas
32:49du tout pour, etc.
32:51Mais on se disait, il a beau dire, les politiques industrielles bas carbone sont portées par
33:00les États beaucoup, dont beaucoup d'États républicains.
33:03Et donc, c'est plus du langage que des vraies mesures très fortes.
33:11Il y en a eu quand même.
33:12Mais finalement, post-2016, on s'est dit, bon, il faut continuer sur l'agenda.
33:16Ce qui s'est passé entre 2016 et pendant le mandat où il n'a pas été élu, le sujet
33:21qu'en Europe on appelle l'ESG ou l'investissement responsable a été politisé par les Américains,
33:27ce qui n'était pas le cas.
33:28C'est-à-dire que là, en 2016, on était vraiment sur, est-ce qu'il faut investir
33:32dans l'économie bas carbone ?
33:34Bon, maintenant, il faut se faire élire avec Tesla.
33:36Donc, potentiellement, il y a eu un mouvement là-dessus.
33:39Mais par contre, le sujet des politiques d'investissement responsable a été politisé,
33:42si je caricature un petit peu, en disant, ces sujets de prise en compte des dimensions
33:48environnementales et sociales, c'est un projet d'extrême gauche, c'est du woke capitalism.
33:53Nous, les Républicains, on est archi contre ça.
33:56Et les États républicains ont enchaîné sur des plaintes auprès de tous les acteurs,
34:01grands acteurs financiers implantés aux États-Unis, qu'ils soient américains ou européens,
34:06en disant, si vous mettez à votre agenda des sujets environnementaux ou sociaux,
34:10c'est forcément au détriment de votre seul objectif raisonnable et rationnel,
34:14parce que Trump est très rationnel, qui est de faire de la performance financière.
34:18Et donc, on va vous poursuivre, voire on va vous poursuivre pour entente.
34:21Donc, c'est ça, aujourd'hui, qui est en train de se passer.
34:24Et donc, par crainte...
34:27Oui, oui, j'entends, j'entends.
34:29Par prévention, oui, oui, oui.
34:31Politisation et judiciarisation du sujet.
34:35J'entends, j'entends.
34:37Il y a un retrait de ça. Est-ce que ça va se traduire ?
34:40Est-ce que ça va avoir des effets réels, en dehors des effets d'affichage ?
34:46Ça aurait été un peu curieux de ma part si je vous avais dit
34:50que toutes ces alliances ne servent à rien.
34:52La mobilisation des acteurs financiers, ça ne sert à rien.
34:55Et donc, le fait qu'il se retire, dire que ça aura zéro impact...
34:58Mais ce n'est pas non plus la condition sine qua non pour que le travail se poursuive.
35:02Il me semble qu'il y a deux sujets.
35:04Il y a un sujet qui est sur la politique sociale.
35:07C'est-à-dire, on voit, là, pour le coup, c'est descendu au niveau des entreprises,
35:11sur les sujets de diversité et inclusion.
35:13Là, il y a un vrai retour en arrière très, très fort.
35:17Bon, à la limite, le côté modèle français, universel, etc.,
35:22pourrait comprendre ça, puisque c'était allé très loin.
35:25Donc, il y a un vrai retour en arrière sur ce sujet de diversité et inclusion.
35:28Sur le sujet du climat, pour le coup, ce que je viens de dire reste vrai.
35:32C'est-à-dire que les investissements vont continuer.
35:35On allègera peut-être certaines contraintes, etc.
35:38Mais Tesla ne va pas se mettre à fabriquer des moteurs thermiques
35:41pour faire plaisir à l'électorat populaire, etc.
35:45Donc, la transition climatique va se poursuivre.
35:49Elle va se poursuivre dans l'économie.
35:51Donc, elle va se poursuivre avec les entreprises, même si elles affichent moins.
35:54Voilà. Néanmoins, le fait d'avoir des investisseurs
35:59qui prennent moins d'engagement, etc.,
36:01c'est le rôle d'aiguillon qu'ils pouvaient avoir
36:04sur les financements de nouveaux projets charbon, pétrole, etc., va ralentir.
36:10Donc, la crainte, ce n'est pas tellement qu'on ait un ralentissement
36:12sur les investissements, sur les technologies vertes.
36:15La crainte, c'est que ça...
36:17Enfin, ce n'est pas une crainte. Du coup, je suis convaincu que ça va continuer.
36:20Mais c'est qu'on aura en parallèle aussi potentiellement
36:22beaucoup d'investissements sur tout type d'investissement.
36:24Énergie fossile, pétrole, charbon, pourquoi pas, gaz de schiste, etc.
36:28Et donc, la crainte, elle n'est pas tellement sur le coup de frein
36:32au développement des énergies vertes.
36:34Mais c'est le redémarrage de la partie fossile.
36:37C'est le redémarrage de tout l'ensemble fossile
36:39et la perte du rôle des guillemots, des investisseurs sur ce sujet-là
36:42qui va continuer à mettre à risque les accords de Paris,
36:46si tant est que le 1,5 degré reste un objectif réaliste,
36:49ce qui pourrait faire l'objet d'un autre débat.
36:51Oui, on parlera déjà matière première, je le rappelle.
36:54Dans le dernier quart d'heure, il y a à la fois le pétrole, le fossile.
36:58Il y a aussi tous les métaux et la partie technologie verte derrière
37:04qui est aussi importante à prendre en compte.
37:06Vincent, il nous reste deux minutes.
37:08La Chine, je veux bien qu'on en redise un mot quand même
37:12parce qu'il va falloir suivre la manière dont le dialogue
37:16ou la conversation entre la Chine et les Etats-Unis évolue
37:19avec l'arrivée de Donald Trump.
37:21Vous évoquiez tout à l'heure la décote extraordinaire des actifs chinois.
37:26Le nombre de rebonds qu'on a eus qui n'ont pas été suivis des faits,
37:31c'est vrai que ça nous laisse un peu sur notre faim, j'imagine.
37:35En tout cas, pour rebondir sur le sujet précédent
37:37et répondre à votre question en même temps,
37:39la Chine reste avec cet objectif de net zéro d'ici 2060.
37:42Elle vient d'ailleurs d'annoncer un immense projet d'infrastructure
37:45de barrages hydroélectriques.
37:46Je ne sais pas si c'est super pour l'environnement,
37:48mais en tout cas pour l'approvisionnement vert en énergie,
37:51c'est une bonne chose.
37:52Elle continue à investir massivement dans la transition énergétique.
37:55C'est en Chine qu'elle coûte moins cher d'acheter une voiture électrique
37:58qu'une voiture thermique.
38:00Alors que chez nous, ce n'est pas encore le cas.
38:02Raison pour laquelle ça devient évidemment le premier marché
38:05de l'autonomie électrique.
38:06Ils ont une avance tout à fait incontestable dans ce domaine.
38:09Et ce n'est pas le seul.
38:11La Chine, c'est le leader incontesté de la 5G.
38:13On l'oublie trop souvent.
38:14Mais enfin, avant Covid, c'était un peu le sujet de discussion.
38:18On ne l'a pas pris en Europe.
38:19Plein d'autres pays l'ont fait, Moyen-Orient et autres.
38:22Moi, j'avais la chance d'être à Monaco la semaine passée.
38:25Je me suis blessé de dire que les autorités monégasques
38:28ont pris la 5G chinoise.
38:29Je ne sais pas si après, c'est une bonne ou une mauvaise idée.
38:31On vient de l'affaire Huawei, ZTE, etc.
38:33Il y a plein d'autres pays qui font le choix des technologies chinoises.
38:37Technologie, on parle évidemment beaucoup de semi-conducteurs,
38:40depuis le trend AI.
38:43Et les Etats-Unis avaient décidé de limiter l'exportation
38:46de technologies critiques à la Chine pour garder leur avance.
38:50On se rend compte que finalement, cette approche ne porte pas ses fruits.
38:53Ils sont en train de rattraper leur retard.
38:55Et mieux, ils sont en train de devenir des leaders
38:58de semi-conducteurs d'ici 2030.
39:00Alors qu'aux Etats-Unis, on construit des usines de fabrication.
39:03En Europe, on a évidemment, pour toutes les raisons
39:05qui ont été justement évoquées, on est toujours en retard.
39:07Nos usines qui allaient ouvrir en Allemagne
39:08ne verront sans doute jamais le jour.
39:10Mais la Chine est en train de devenir un leader dans ces domaines.
39:13Évidemment, je pense plus à moyen et à long terme.
39:15Ça veut dire qu'en tout cas, on ne peut pas se passer de la Chine
39:17dans nos portefeuilles.
39:18Est-ce qu'en 2025, ils réussiront ?
39:21Ils ont réussi à certains égards en 2024.
39:23En tout cas, à recréer de l'enthousiasme localement
39:26pour leur marché equity.
39:27Il n'y a pas d'investisseurs occidentaux
39:28qui ont évidemment souscrit à ce mouvement.
39:30Je pense encore une fois qu'ils l'essaieront
39:32via ce canal-là en 2025.
39:34Il en faudra plus pour sortir l'économie de l'ornière.
39:37Les baisses de taux qu'ils ont réalisées
39:38ou les baisses de ratio de réserve obligatoire
39:40n'ont pas été suivies par une demande de crédit.
39:42C'est là le problème évidemment de la déflation qu'ils traversent.
39:45Mais enfin, ils sont acculés à réussir.
39:47Et force est de constater qu'alors qu'en Europe,
39:49on n'essaye pas pour l'instant,
39:51il faudrait, eux au moins, essayer.
39:53Alors, est-ce que ça réussira en 2025 ?
39:55En tout cas, si on cherche un marché value
39:57ou se positionner,
39:58il y a un marché qui essaye objectivement
40:00avec beaucoup d'échecs jusqu'ici,
40:02mais qui continue.
40:03Donc, sur la thématique de repricing
40:07ou de marchés qui pourraient converger
40:09vers ces moyens historiques,
40:10je parierais peut-être plutôt sur celui-là.
40:12Bon, c'est le jeu du concours de beauté
40:14permanent et éternel des marchés.
40:16Merci beaucoup, messieurs,
40:17d'avoir été les invités de Planète Marché ce soir.
40:19Vincent Juvins, JP Morgan Asset Management,
40:21Florent Vabon, Ecofi et Hervé Ghez, Mirova.