SMART BOURSE - IA : Nvidia, taille patron

  • il y a 4 mois
Jeudi 23 mai 2024, SMART BOURSE reçoit Hervé Amourda (Économiste, ProBTP Finance) , Hervé Goulletquer (Senior Economic Advisor, Accuracy) et Axel Botte (Directeur de la stratégie marchés, Ostrum AM)

Category

🗞
News
Transcript
00:00 (Générique)
00:10 Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13 Hervé Amorda est avec nous ce soir, économiste chez Pro-BTP Finance.
00:17 Bonsoir Hervé.
00:17 - Bonsoir.
00:18 - Ravi de vous accueillir. Je rappelle au passage que vous êtes un des nombreux contributeurs de ce livre
00:24 et vous êtes membre du think tank BSI Economics.
00:27 Je crois qu'on le prononce comme ça, Hervé.
00:30 Avec cet ouvrage collectif qui a été publié récemment aux éditions du NOO,
00:34 "12 clés économiques pour aborder 2030".
00:37 Hervé Goulette qui arrive avec nous également, senior economic advisor chez Acuracy.
00:40 Bonsoir Hervé.
00:41 - Bonsoir Grégoire.
00:42 - Et Axel Bott nous accompagne également. Bonsoir Axel.
00:44 - Bonsoir.
00:45 - Merci d'être là. Vous êtes directeur de la stratégie de marché chez Ostrom Asset Management.
00:49 Nvidia, vous vouliez en dire un mot, même peut-être plus qu'un mot,
00:52 enfin Nvidia et tout ce que ça implique, le développement de l'intelligence artificielle.
00:56 Enfin, la création de valeur quand même en aussi peu de temps d'un groupe technologique,
01:02 ça reste quand même une histoire assez exceptionnelle de ce point de vue-là, Hervé.
01:06 - La création de valeur de marché est impressionnante.
01:09 Alors sur Nvidia, mais on pourrait dire sur le secteur de la tech,
01:15 qui performe bien depuis longtemps.
01:17 Le message que ça envoie, c'est le message que
01:22 on aurait une translation de la création de valeur des marchés financiers à l'économie
01:28 et que l'on doit s'attendre finalement à un renouveau avec plus de productivité,
01:35 plus de croissance, plus de distribution de richesses, peut-être.
01:40 Moi j'aurais envie de dire deux choses.
01:43 D'abord sur l'analyse, il y a quand même un débat aujourd'hui.
01:48 On voit très en pointe les banques d'investissement,
01:52 des grands cabinets de conseils en stratégie.
01:57 Et puis lorsque l'on voit la littérature plus académique,
02:00 et j'invite tout le monde, le mois dernier,
02:02 le FMI a sorti une synthèse de la littérature académique sur le sujet.
02:07 Et en fait, la littérature académique nous dit,
02:10 peut-être ben que oui, peut-être ben que non.
02:12 Alors c'est beaucoup plus sophistiqué que cela.
02:14 Mais la conclusion, c'est on ne sait pas.
02:16 Alors si on ne sait pas, il y a eu d'autres chocs technologiques ces dernières décennies.
02:23 Il y a eu la micro-informatique fin des années 70, début des années 80.
02:30 Après on a eu la nette économie dans les années 80, 90.
02:36 Et en fait, quel est le choc de productivité que l'on a vu ?
02:40 En fait, oui, il y a eu un choc de productivité,
02:42 mais finalement pas si important et pas si durable que ça,
02:46 avec une question, à qui a profité ce choc ?
02:49 Au producteur des nouvelles technologies ?
02:51 Est-ce qu'il y a eu diffusion de ce choc ?
02:54 Avec un peu le sentiment que c'est plutôt resté à l'intérieur du secteur.
02:58 Tout ça pour dire qu'on ne sait pas,
03:00 et donc l'engouement ne devrait pas pousser à des excès d'investissement.
03:05 Et dans ce cas-là, on n'aurait pas la création de valeur économique que l'on attend aujourd'hui.
03:11 Donc oui à l'engouement, ça on l'observe.
03:14 Est-ce qu'on sait vraiment où on va ?
03:17 J'ai l'impression que non.
03:18 D'ailleurs le marché ne s'y trompe pas de ce point de vue-là,
03:20 et j'allais dire avance avec prudence sur cette thématique.
03:23 Alors oui, Nvidia étant évidemment l'emblème assez facile en matière d'investissement,
03:29 mais derrière ça reste assez limité.
03:31 On trouve quelques sociétés, on essaye de raccrocher le thème IA à pas mal de sociétés.
03:36 Oui, Schneider avec l'électrification participe aussi à l'efficacité énergétique,
03:40 et c'est utile pour des data centers qui vont être de plus en plus gourmands en énergie.
03:45 Oui, Publicis avec la création de contenus et la capacité aussi à traiter les données,
03:50 ou à posséder des données, est vu comme un groupe publicitaire qui va bénéficier de la technologie.
03:57 Mais ça reste assez concentré quand même, je trouve, ce thème dans le marché aujourd'hui.
04:01 Oui, c'est concentré.
04:03 Moi j'aurais envie de dire que cette concentration dit peut-être que,
04:09 justement, le bénéfice aujourd'hui est visiblement chez les producteurs de technologies correspondants,
04:17 et que les effets bénéfiques dans le reste de l'économie, pour le moment, on ne sait pas très bien.
04:23 Donc si c'est comme ça qu'il faut lire le message envoyé par le marché,
04:27 au-delà peut-être de l'excès de valorisation chez les producteurs, on n'a pas...
04:31 Pas excès, j'en sais rien.
04:33 Moi je disais, le prix de l'action Nvidia, il a suivi la trajectoire de la croissance du chiffre d'affaires en l'occurrence.
04:39 Oui, du chiffre d'affaires, oui bien sûr.
04:40 Ah ben ça se paye cher, forcément.
04:42 Mais bon, vu le rythme de croissance, ça peut être justifié au moins pour un temps.
04:46 Et visiblement, les résultats montrent que ça ne s'arrête pas là sur un trimestre comme ça.
04:50 Enfin, le trou d'air que tout le monde pouvait craindre sur les commandes ou la demande en produits Nvidia,
04:55 il n'est pas pour tout de suite.
04:57 Qu'est-ce que ça vous inspire comme réflexion, et notamment du point de vue des marchés ?
05:00 Est-ce que c'est une action aussi systémique qu'on le dit aujourd'hui ?
05:04 Alors il y a eu Nokia au moment de la bulle Internet, l'ère Apple bien sûr, post-grande crise financière,
05:10 et aujourd'hui, Nvidia, j'allais dire, est l'entreprise la plus regardée au monde sur les marchés.
05:15 Ce que ça m'inspire, c'est que je pense qu'après l'Internet, on avait vu une accélération de la productivité malgré tout,
05:22 sauf qu'elle était moins brutale et plus étalée dans le temps que ce qu'on imagine.
05:26 Il y a des effets de seuil, d'adoption, qui prennent un petit peu plus de temps que ce que les marchés aimeraient bien voir.
05:32 Et peut-être qu'on est dans cette phase-là, d'où peut-être le risque d'excès au moins temporaire sur les valorisations et l'effet de retour ensuite.
05:39 Mais je pense que c'est structurant.
05:42 Si on regarde beaucoup les faits sur la productivité américaine assez rapidement, ou européenne, qu'on voit beaucoup moins,
05:51 c'est très difficile à mesurer, mais il y a un exemple très concret à mon avis, c'est dans la production de véhicules électriques en Chine,
05:56 où l'adoption de l'IA dans les chaînes de production, c'est quelque chose d'assez nouveau.
06:03 On démarre "from scratch" depuis quelques années.
06:07 Clairement, il y a eu un choc de productivité qui est colossal et qui crée les déséquilibres et la suroffre qu'on a sur ces véhicules aujourd'hui.
06:16 Donc, il doit y avoir ceux qui vont être capables de l'adopter et de l'adapter à un business model qui existe ou qui est en train d'être développé, ils vont gagner.
06:24 Il y a beaucoup de gens qui essayent de se rattacher à la thématique parce qu'on s'est rattaché au bitcoin il n'y a pas si longtemps.
06:31 D'ailleurs, Nvidia a parfaitement joué ce shift du mining de bitcoin vers l'IA.
06:37 C'est fini, ça n'existe plus.
06:41 Même si le bitcoin est peut-être plus élevé maintenant que ce qu'il était avant.
06:46 Ce n'est plus l'activité, ils ont réussi ce shift.
06:48 Et je pense que la deuxième phase, ça va être tous ceux qui ont un business model existant et qui ne soupçonnent pas encore ce que l'IA peut leur faire gagner en termes de part de marché, d'efficacité opérationnelle, etc.
07:01 Peut-être que dans le suivi des chaînes d'approvisionnement, ça aura un apport qui va contribuer à desserrer les contraintes qui existent aujourd'hui.
07:10 Donc, la productivité est un truc extrêmement difficile à mesurer.
07:15 On va en parler avec Hervé Amourdin.
07:18 Mais ensuite, je pense qu'on ne soupçonne même pas ce qu'on peut faire aujourd'hui avec ces outils.
07:25 C'est une question qui n'a peut-être pas de réponse aujourd'hui, mais je vous la pose à vous Hervé Goulet-Dekker, Axel Bott.
07:30 Est-ce que Nvidia a la capacité à devenir un jour un groupe comme Apple ou est-ce que c'est un groupe qui restera comme un Cisco des temps modernes ?
07:39 Je mets de côté le crash Cisco, Post Bull.com, mais est-ce que ça reste un fournisseur de produits hardware ou est-ce que c'est une entreprise qui a la capacité à se plateformiser,
07:51 à devenir une entreprise aussi de service comme l'est devenue Apple par exemple aujourd'hui ?
07:58 C'est possible. Il y a un élément en tout cas qu'ils auront très difficile à répliquer, c'est la marque.
08:06 La marque Apple qui à mon avis joue beaucoup dans la valorisation.
08:10 Vous pensez que la marque Nvidia n'a pas ce potentiel ?
08:13 Pas auprès du grand public, je ne sais pas.
08:16 Le problème c'est que j'ai peut-être trop de gamers dans mon entourage.
08:19 Oui, c'est un biais.
08:21 Mais quand on a une connaissance du monde du jeu vidéo, Nvidia était déjà une marque star auprès d'un public bien précis avant même l'arrivée de l'Ire.
08:33 En fait, je crois qu'il n'y a pas de réponse à votre question. C'est une bonne question, mais il n'y a pas de réponse.
08:40 Mais c'est l'enjeu pour Nvidia, j'imagine à un certain stade.
08:42 Demain, la création de valeur en partant de l'équipement et donc des puces jusqu'aux produits qui seront créés.
08:55 La chaîne de valeur va mettre plus de valeur ici, là, là-haut, là-bas.
08:59 Et ça, on n'en sait rien. Et l'organisation des marchés le long de cette chaîne-là fera que la valeur sera plutôt ici ou plutôt ailleurs.
09:07 Pour le moment, eux, ils sont en amont de ce processus.
09:11 Moi, j'aurais envie de dire que globalement, s'ils veulent contrôler leur marché, l'environnement de leur marché, il faudra qu'ils se déplacent.
09:20 Il est plus facile pour eux de se déplacer vers l'aval parce qu'ils sont quand même assez vers l'amont.
09:25 Et donc, ils vont le faire. Mais j'imagine que des concurrents et des grands noms de la tech aujourd'hui se disent
09:31 "il faut que l'on empêche Nvidia de se positionner plus vers l'aval".
09:36 Donc, on va avoir un jeu d'acteurs de marché. On va avoir peut-être des déplacements de concentration de valeur.
09:45 Et on ne sait pas. Mais vous avez raison, la question est absolument clé.
09:49 En tout cas, pour l'instant, tout roule pour Nvidia. Nvidia à la productivité et au salaire en zone euro, il n'y a qu'un pas.
09:56 Hervé Amourda, je me tourne vers vous. C'était l'autre événement du jour.
10:00 Ce rapport sur les salaires négociés en zone euro pour le premier trimestre qui était très attendu.
10:06 La zone euro avait mis un focus très important sur ces données.
10:10 Qu'est-ce qu'il en ressort et quel peut être l'impact sur, alors, non pas la décision de la BCE le 6 juin,
10:17 puisque la baisse de taux semble acquise, mais au-delà ?
10:20 Qu'est-ce que ça peut changer dans la fonction et le rythme de baisse de taux anticipée pour la BCE ?
10:26 Alors, effectivement, c'est un chiffre très attendu, le chiffre des salaires négociés.
10:30 Et une petite particularité, c'est que ce chiffre a légèrement progressé.
10:33 Donc, on était autour de 4,5, on est passé à 4,7.
10:37 Quand on regarde dans le détail, il y a une composante assez importante.
10:41 C'est que tous les paiements 1-off sont comptabilisés au moment où ils sont déboursés du point de vue,
10:48 donc là, en l'occurrence, du gouvernement, parce que c'était pour les emplois publics en Allemagne.
10:52 Il y avait une prime inflation un peu supérieure à 1 900 euros pour tous les employés du secteur public en Allemagne.
10:58 Et donc, ça, ça crée ou c'est responsable de la hausse.
11:02 Ce que regarde la BCE, en réalité, ce n'est pas cet indicateur.
11:04 C'est un indicateur qui s'appelle le "wage tracker".
11:07 Et le "wage tracker", qu'est-ce qu'il fait, à la différence du premier ?
11:10 C'est qu'il va lisser ces paiements-là sur 12 mois, et donc sur les 12 prochains mois.
11:14 Donc, quand on regarde ce nouvel indicateur-là, en fait, c'est flat.
11:18 On n'a pas d'accélération, on est plutôt dans la continuité.
11:20 Et je vais même aller un peu plus loin.
11:22 Si on prend la progression des salaires depuis 2024, qu'on la compare avec la progression des salaires en 2023,
11:27 l'équivalent de l'acquis de croissance côté salaire, il serait à 4,1 %, donc inférieur à la prévision...
11:34 - En 2023 ? - Alors, inférieur à ce qu'on a eu en 2023, certes.
11:37 - Et inférieur à la prévision de la BCE ? - Mais inférieur à la prévision de la BCE pour 2024.
11:40 Donc, on est 0,2, 0,3 en dessous de la prévision de la BCE.
11:43 Donc, en réalité, c'est plutôt un chiffre qui fait les affaires de la BCE.
11:47 Mais c'est peu surprenant, parce que la Banque Centrale, elle a accès à ces données en temps réel, ce "wage tracker".
11:52 Et quand on a vu les discours d'Isabel Schnabel, de Louis de Guindos, encore dernièrement,
11:57 on se rend compte qu'ils sont vraiment très confiants sur cette première baisse de taux.
12:00 Mais à un point même qui peut surprendre, Ville-Royal-Galop, François Ville-Royal-Galop,
12:04 gouverneur de la Banque de France, s'exprime cet après-midi depuis le salon Vivatech,
12:07 il dit maintenant "on ramènera l'inflation à l'objectif de 2 % d'ici l'an prochain, au plus tard".
12:15 Mario Centeno, le gouverneur de la Banque du Portugal, il y a trois jours, nous dit "inflation is falling".
12:21 L'inflation est en train de chuter en zone euro à un rythme "sustain pace", un rythme soutenu.
12:29 Donc on a même l'impression que la BCE, ou certainement de la BCE, sont même encore eux-mêmes surpris
12:35 de la vitesse à laquelle l'inflation et les pressions inflationnistes sont en train de s'évanouir.
12:39 Oui, absolument. Et là, c'est vraiment, ça dépend de l'indicateur qu'on regarde.
12:43 Et en l'occurrence, je pense que Centeno, il regarde vraiment la variation mensuelle ajustée des variations saisonnières.
12:48 Et effectivement, on est sur un rythme très fort. Alors attention, le dernier chiffre,
12:52 on a eu un effet vacances de Pâques avec tous les ponts, etc.
12:55 Et donc la comparaison avec la période de Pâques de l'année précédente fait qu'on a eu une baisse un peu plus importante.
13:00 Et donc si on regarde la variation mensuelle de ce chiffre-là, automatiquement, c'est effectivement très fort.
13:04 En revanche, quand on regarde juste la variation annuelle, et je pense que c'est ce que Ville-Loire-de-Gallaud a en tête,
13:10 eh bien sur la deuxième partie de l'année, on a des effets de baisse plutôt positifs.
13:13 Donc les progrès que nous sommes en train de faire sur le S1 seront bien moindres sur le S2.
13:18 Et donc finalement, les prévisions aujourd'hui d'inflation de la BCE restent plutôt cohérentes,
13:24 mais ne seront pas à 2% en 2024. On les atteint, j'allais dire, avec beaucoup de chance fin 2025,
13:31 et plus durablement peut-être en 2026, comme c'est souvent le cas avec la BCE.
13:35 D'accord. Moi je pensais que dans le discours de Ville-Loire-de-Gallaud, le calendrier était en train même de se raccourcir.
13:40 Le calendrier vers l'objectif était en train de se raccourcir. Ce n'est pas évident.
13:43 L'objectif, ça reste de voir 2% en 2025.
13:46 C'est ça.
13:47 Qu'est-ce que ça implique pour la BCE, notamment ce rapport sur la série des salaires négociés,
13:52 qui est, comme vous le disiez, plutôt un bon rapport du point de vue de la BCE ?
13:56 Est-ce que ça veut dire que oui, le 6 juin, on y va, et qu'on discute éventuellement d'en refaire une dès le mois de juillet ?
14:02 Alors, effectivement, pour le 6 juin, là, ça semble vraiment acté.
14:05 Ça serait compliqué de revenir en arrière. On est très proche, en plus, de la deadline.
14:09 Et il y a très peu de données, en plus, qui pourraient nous surprendre sur la période, en l'occurrence.
14:13 Pour juillet, il faut l'annoncer. On sait que des baisses de taux ou des hausses de taux en juillet, c'est très compliqué.
14:18 Il n'y a pas de liquidité sur les marchés. On ne peut pas faire de baisse surprise.
14:21 Ça peut avoir des impacts assez importants en termes d'anticipation de taux, en termes de courbe des taux.
14:25 C'est assez délicat. Donc, en général, les banquiers centraux essayent de se préserver un peu de ce genre de risque.
14:30 Moi, j'ai tendance à penser que, jusqu'à présent, la BCE, elle a été data-dependent.
14:35 Donc, elle a toujours dit qu'on fait ces premières baisses de taux parce qu'on sait qu'à la fin, on va atteindre notre objectif d'inflation.
14:41 Eh bien, tous les trois mois, elle a des prévisions d'inflation qu'elle met à jour.
14:44 Donc, ça serait une bonne occasion, à l'occasion de chaque mise à jour, en septembre et puis en décembre, de se dire « On refait le point. Est-ce qu'on peut ou non baisser les taux ? »
14:54 Je mets juste en garde. Je le présente peut-être comme si à chaque meeting, ça serait ce qu'on appelle un live meeting.
15:00 Et donc, il y aurait une grande période d'incertitude.
15:03 À mon avis et à mon sens, la BCE a envie de se prémunir aussi de cette incertitude.
15:08 Et elle ne va pas annoncer un chemin de baisse de taux complet. Mais elle ne veut pas non plus brusquer le marché.
15:14 Le but, c'est de rentrer assez rapidement et le plus rapidement possible en pilotage automatique pour justement créer le moins de remous possible sur les marchés.
15:22 Très intéressant. Bon. Pour la BCE, il y a le 6 juin et ensuite. Est-ce que quelques baisses de taux, ça fait un cycle de baisses de taux ?
15:32 Est-ce que ça permet in fine d'aller chercher un taux neutre, quand bien même il est toujours un peu virtuel ?
15:39 Est-ce que c'est l'idée de la BCE aujourd'hui ?
15:42 Moi, je pense que la BCE s'est engagée pour le 6 juin. Et il y a un effet d'annonce.
15:48 On passe d'une époque à une autre en termes de réglage monétaire. Et c'est important pour elle. C'est important pour les marchés.
15:57 Mais la réalité, parce que Hervé le disait, il y a les salaires. Mais n'empêche que 4%, ça reste très élevé dans l'absolu si on garde bien la cible de 2%.
16:09 Et le problème que l'on a, c'est la productivité. Alors elle a une dimension structurelle, elle a une dimension conjoncturelle.
16:17 La BCE se veut rassurante en nous expliquant que, conjoncturellement, le pire est passé et qu'elle va s'améliorer.
16:24 C'est un discours que l'on peut suivre. Je pense que la cohérence analytique est bonne.
16:29 Mais bref, on est à du moins 1% sur la productivité à peu près. Elle va s'améliorer. Mais que diable !
16:36 Elle va s'améliorer à quel niveau ? Et on n'en sait rien. Et c'est là où on vire du conjoncturel au structurel.
16:42 Et on voit bien qu'on parle d'investissement, qu'on parle de R&D, qu'on parle de brevets, de tout ce qu'on veut, de tous les ingrédients, de la productivité un peu structurelle.
16:52 On n'a pas l'impression qu'on va avoir un rebond très fort. Si on veut avoir une inflation durablement à 2%, il faudrait qu'on ait, en simplifiant, des coûts salariaux unitaires autour de 2%.
17:08 Si on dit que la cible de productivité c'est 1, il faudrait juste que les salaires soient à 3%. Alors on peut se réjouir qu'on n'ait pas d'accélération.
17:17 - Ils y vont à 3% les salaires ? - Pour le moment ils n'y sont pas. On est à 4%. Et on sait bien que le monde a changé, que les équilibres sur le marché du travail ont changé.
17:27 Donc en fait on peut dire le 4% qu'on a aujourd'hui est un peu fort. Mais une fois encore, est-ce qu'on va passer de 4 à 3 rapidement ? Est-ce qu'on va même atteindre 3 ? Tout ça on n'en sait rien.
17:38 Donc en fait moi j'ai l'impression qu'on peut dire tout ce qu'on veut sur les prix à la consommation, dire 2, on y est presque. Quand on prend en compte tout l'amont des prix, on s'aperçoit qu'on n'y est pas.
17:48 C'est une situation qui est à l'opposé des Etats-Unis. Parce que les coûts salariaux unitaires aux Etats-Unis ils sont à 2% aujourd'hui, avec une inflation, prix à la consommation, elle est autour de 3,5.
17:59 Pour faire simple. Donc aux Etats-Unis on dit on n'y est pas avec un amont qui est bon. En Europe on dit on y est avec un amont qui n'est pas bon.
18:07 Donc en fait moi j'ai l'impression qu'il y a un peu de confusion dans ce débat, en sachant que la question de fonds, mais que les banques centrales ne veulent pas aborder,
18:17 c'est que avec les déformations du monde que l'on a aujourd'hui, avec un commerce extérieur qui va apporter moins de désinflation qu'il n'en a apporté, avec des marchés du travail qui vont être plus tendus,
18:32 et bien est-ce qu'on peut encore avoir durablement du 2% ou est-ce qu'on ira vers autre chose ?
18:39 Je pense qu'il y a une honnêteté intellectuelle à poser la question. Alors on ne veut pas le faire parce que la crédibilité des banques centrales serait considérée comme étant en jeu,
18:50 ou qu'on ne saurait pas répondre à la question. Mais en fait je pense que pour finir il y a juste tout de même un espèce de mal-être par rapport à cette question des prix,
19:00 et que le discours de nos amis de la BCE, je le trouvais un peu simple par rapport à une réalité qui pour moi est compliquée.
19:10 Donc ça implique en tout cas que la BCE restera beaucoup plus data-dependant que ce qu'on peut imaginer, c'est ça Hervé ?
19:17 Hervé Amourda estime qu'à un moment on ira peut-être, en tout cas la BCE a cette volonté d'aller chercher un mode de pilotage un peu automatique pour essayer de ne pas générer de volatilité justement chez les agents et dans les marchés.
19:31 Il dit que ce sera difficile peut-être pour la BCE de se mettre sur ce rail-là ?
19:35 Moi je pense que ce sera difficile, mais finalement ce n'est peut-être pas aussi grave que ça, parce qu'en fait on a une économie dont le financement est moins indexé maintenant sur des taux variables que sur des taux fixes,
19:45 et dans ce cas-là la vraie question c'est plutôt le niveau des taux plus loin sur la courbe que les taux extrêmement courts,
19:52 et donc en fait même si elle patauge un peu sur ce qu'on fait avec les taux courts,
19:57 si on garde le cap de taux longs qu'on arrive à peu près à maîtriser à des niveaux pas trop élevés, elle sera contente.
20:04 Bon Axel, sur ces sujets de politique monétaire, déjà est-ce que les anticipations de marché alors qu'on était très volatiles, 7 baisses, 0,
20:12 est-ce qu'il faut monter les taux côté Fed, etc, ça a un peu moins bougé côté BCM,
20:17 mais est-ce que ce que le marché anticipe aujourd'hui paraît quand même plus raisonnable, plus rationnel,
20:22 plus en lien, en consistance avec ce qu'on peut anticiper sur le plan de la conjoncture et ce que disent les banquiers centraux aujourd'hui ?
20:30 Oui, mais je pense que c'est un équilibre presque endogène au marché,
20:35 c'est-à-dire que les marchés, quand vous regardez par exemple les anticipations d'inflation,
20:40 les marchés depuis très longtemps voient l'inflation en dessous de 2 au 3e trimestre.
20:44 Avec tout ce qu'on vient de dire, et je souscris tout à fait, il y a assez peu de chances que les déterminants intrinsèques de l'inflation
20:50 nous amènent à une inflation aussi rapidement en dessous de 2%,
20:54 ce peut toujours arriver pour des effets du pétrole, de la volatilité,
20:57 mais il y a pas mal de choses qui repartent dans le mauvais sens sur les matières premières,
21:01 si on regarde les métaux par exemple, alors que ça n'a pas d'effet direct sur les prix à la consommation,
21:05 mais on est aussi dans une dynamique de reprise,
21:08 donc le risque d'être à contre-temps du cycle et du pouvoir d'achat des ménages,
21:13 on sait qu'on a passé 5 trimestres, la conso qui se contractait,
21:17 et ça a sans doute joué un petit peu plus qu'aux Etats-Unis dans le ralentissement des prix,
21:21 ça va s'inverser mécaniquement avec le retour des gains de pouvoir d'achat,
21:26 mais toujours au plus bas historique sur le marché du taux de chômage,
21:31 donc il n'y a aucune raison que le pouvoir de négociation s'inverse aussi de ce point de vue,
21:35 donc les déterminants de l'inflation ne vont pas dans le sens,
21:38 et je pense qu'il y a une décélération pérenne de l'inflation d'une part,
21:42 et en plus la BCE est totalement schizophrène sur sa politique bilancielle
21:46 qui fait exactement l'inverse que de la promesse des baisses de taux,
21:50 donc en plus l'articulation des instruments monétaires de la BCE
21:53 est très compliquée à appréhender,
21:58 puisqu'on va diminuer le bilan de quasiment 800 milliards cette année,
22:01 et en même temps on veut baisser les taux, ce qui n'est pas possible,
22:05 sauf qu'on bricole dans les deux sens avec en plus une batterie d'outils au cas où,
22:11 qui ne veut rien dire non plus,
22:13 donc je pense que la BCE elle-même s'est autoconvaincue qu'il fallait baisser les taux,
22:17 mais en réalité est-ce qu'il y a même une raison de le faire ?
22:21 On est vraiment dans le cas je pense où la dépendance aux données
22:26 montre ses limites ou son problème conceptuel,
22:32 c'est-à-dire qu'on réagit aux derniers chiffres d'inflation
22:34 alors que ça n'a aucune espèce d'importance
22:37 vu l'horizon de la politique monétaire, sur ce qui va se passer,
22:41 donc la BCE est typiquement dans ce piège-là,
22:44 je pense qu'il y a énormément de pression politique aussi pour baisser les taux en juin,
22:48 et on va le faire.
22:50 Il y a quand même deux ans de stagnation économique,
22:52 alors je sais que ce n'est pas le mandat, que c'est la stabilité des prix, etc.
22:55 Mais peut-être qu'il va le faire en amont, je ne sais pas.
22:57 Oui, mais ça fait partie quand même aussi de la stabilité qu'on recherche
23:01 d'avoir une peu d'activité économique.
23:04 Et c'est une stagnation qui n'a pas eu d'incidence du point de vue du chômage,
23:07 par exemple quand on a une vraie récession,
23:09 le chômage valide, on a des destructions d'emplois, on a beaucoup de faillites,
23:12 on n'a pas vu ça du tout.
23:14 Alors si vous dites que, si vous vous interrogez sur la pertinence de baisse de taux côté zone euro,
23:19 qu'est-ce que vous dites pour la Fed là aujourd'hui ?
23:21 La Fed, je pense, a un accord tacite avec le Trésor pour alléger le coût de la dette publique américaine.
23:29 C'est la seule raison de vouloir baisser les taux.
23:33 Et de fait, l'assouplissement monétaire a commencé avec la réduction du quantitative tightening qui a été annoncée.
23:38 Donc la Fed va réinvestir 300 milliards de plus,
23:43 ou même un peu plus, que ce qui était prévu initialement.
23:47 Donc c'est ça l'enjeu.
23:49 Et Powell exclut de monter les taux, c'est un signal qu'ils vont les baisser, whatever.
23:56 L'inflation n'est plus à 10% quand même, Axel.
23:59 Si la Fed ou la baisse ne font rien alors que l'inflation a quand même considérablement baissé,
24:06 ça veut dire que le niveau de restriction monétaire ne fait que s'accroître.
24:10 Oui, mais la politique monétaire fonctionne dans la mesure où vous influez sur la demande.
24:15 C'est le seul impact que ça a, en tout cas à l'horizon relativement prévisible de 6-12 mois, un petit peu plus.
24:22 Donc il n'y a aucun signe que la demande américaine ait été faible ces derniers temps.
24:26 Donc il n'y a aucun signe que ce soit la politique monétaire qui soit la source de l'amélioration de l'inflation,
24:32 qui d'ailleurs ne tient qu'à la normalisation des chaînes de production, même si ça est en train de patiner de nouveau.
24:39 Et tout ce qui est sensible ou extrêmement sensible aux taux, finalement, est reparti à la hausse déjà.
24:44 Et donc est-ce qu'on a fait suffisamment pour diminuer l'inflation qui provient du secteur du logement, par exemple ?
24:50 Probablement pas. Probablement pas. On ne construit pas assez.
24:53 Il faudrait détruire de la demande si on voulait diminuer l'inflation qui provient du logement.
24:58 Améliorer les conditions d'offre, effectivement, pour construire plus.
25:01 Ça c'est difficile. Et l'immigration tourne à plein régime,
25:06 ce qui est un des facteurs qui normalement doit se retrouver dans la capacité de production.
25:11 Mais ça ne fonctionne pas. En tout cas, ça reste très insuffisant.
25:15 Et donc, il doit baisser les taux quand le principal problème d'inflation, c'est l'immobilier.
25:22 C'est antinomique aussi.
25:24 Les prix de l'immobilier dans les grandes villes résidentielles, dans les grandes villes américaines,
25:28 est au plus haut historique. Enfin, je veux dire, dans les 20 plus grandes villes américaines.
25:32 Hervé, sur ces considérations, ce match fait de baissieurs,
25:36 et puis l'idée de savoir quelle forme va prendre ce cycle de baisse de taux.
25:41 Alors, je veux bien qu'on revienne aussi sur la question de la productivité.
25:43 Vous travaillez là-dessus en ce moment, au sujet d'un possible rattrapage de productivité en zone euro.
25:51 Alors, peut-être pas dans la magnitude de ce qu'on a pu voir aux Etats-Unis,
25:55 mais partant de -1, comme le rappelait Hervé Goulet-Dekker,
25:58 il y a quand même un peu de place, vous dites, pour retrouver un peu de gain de productivité, au moins pour un temps ?
26:03 Oui, absolument. Alors, moi, je pense que c'est surtout une opportunité à saisir.
26:06 Je suis entièrement d'accord avec tout ce qui a été dit sur l'effet conjoncturel et l'effet structurel.
26:10 Et on ne rattrapera pas notre retard de productivité en zone euro, ça c'est absolument certain.
26:15 Ça reste notre plus gros problème, c'est le plus grand mal de la zone euro, véritablement.
26:19 Mais on a une vraie opportunité, puisque le commerce international freine et ralentit,
26:25 enfin, a beaucoup ralenti ces deux dernières années, pourrait repartir légèrement avec le départ de la Chine.
26:31 On sait que l'incensification du commerce international est plutôt favorable aux gains de productivité.
26:36 On sait qu'on a un problème aussi de balance commerciale, avec les excédents allemands, avec notre déficit commercial français.
26:42 Et tout ça, pour moi, c'est une opportunité pour que la productivité, pour que les gains de productivité,
26:48 finalement, soient un peu plus pérennes et qui, en tout cas, nous permettent de gommer ce type d'écart-là.
26:54 Demande externe un peu ravivée, ça génère de la production et des gains de productivité derrière.
27:01 Exactement. Et en l'occurrence, là où on a un peu de chance, c'est que d'habitude, la productivité,
27:06 quand vous demandez à un économiste de faire des prévisions sur la productivité, c'est peut-être la dernière chose qu'on a envie de prévoir.
27:12 Oui, qu'il a envie de faire.
27:13 Et peut-être les profits juste avant ça, parce que c'est vraiment un résidu,
27:16 mais je pense que la productivité, c'est ce qu'on essaye d'éviter le plus possible.
27:20 Et là, en l'occurrence, on a de vrais arguments, en tout cas à très court terme, conjoncturels,
27:24 qui sont la rétention de l'emploi que l'on a connu depuis la pandémie et puis ensuite pendant la crise.
27:30 On a vu une baisse, alors non pas de l'emploi pendant la pandémie, parce que celui-ci a été préservé
27:34 avec la politique du Kurzarbeit allemand, qui a été vraiment généralisée à l'ensemble de la zone euro,
27:40 mais plutôt sur le nombre d'heures travaillées. Ça, ça a baissé. Donc le nombre d'heures travaillées par employé.
27:45 Et ce nombre-là, on n'a pas retrouvé son niveau d'avant-crise.
27:50 Donc on parle effectivement de plein emploi, on sait que le marché de l'emploi est assez dynamique en zone euro,
27:54 alors il l'est beaucoup plus aux Etats-Unis, mais pour la zone euro, c'est quand même assez notable.
27:58 Et bien en l'occurrence, on a malgré tout ce retard à rattraper.
28:01 Le plein emploi peut encore s'améliorer de ce point de vue-là.
28:04 En tout cas, la participation peut encore s'améliorer.
28:07 Et ce qui a été fait sur la période, c'est qu'on a augmenté le travail temporaire.
28:11 Donc en fait, on a vraiment augmenté les deux nominateurs.
28:14 On l'a préservé dans un premier temps avec la rétention de l'emploi,
28:17 et on l'a augmenté légèrement pour compenser cette baisse du nombre d'heures travaillées.
28:21 Et bien tout ça, ça a une fin à un moment donné.
28:23 Aujourd'hui, alors ça a été fait parce que les marges des entreprises étaient élevées,
28:26 ça a été fait parce que les salaires réels étaient faibles,
28:28 donc ça coûtait peu cher de retenir cette main-d'oeuvre.
28:31 Aujourd'hui, avec la désinflation, tout ça, ça va commencer à disparaître.
28:34 Les marges vont se tendre un tout petit peu.
28:36 Et donc on aura moins la possibilité de retenir cette demande.
28:40 Et on voit l'activité qui, alors on l'a dit tout à l'heure en introduction,
28:43 avec les PMI qui commencent à repartir, certes c'est encore assez faible,
28:47 c'est vraiment les balbutiements de la reprise,
28:49 mais a priori sur le S2, on peut imaginer une croissance un peu plus positive.
28:54 Donc là pour le coup, on a de moins en moins d'incertitudes,
28:57 en tout cas à court terme, sur ces gains de productivité.
29:01 Je ne vais pas revenir sur tout ce qui a été dit avant sur l'innovation,
29:03 mais effectivement il y a aussi quelque chose à saisir peut-être de ce point de vue-là.
29:08 Et puis le dernier élément qu'on n'a pas trop abordé,
29:11 puisqu'il n'est jamais très intéressant,
29:13 mais je pense que malgré tout il est assez structurant dans le constat,
29:16 c'est les problèmes de calcul de la productivité.
29:19 Et effectivement, on parle de productivité du travail essentiellement,
29:22 là dans notre échange, parce que c'est très conjoncturel.
29:24 La productivité globale des facteurs sur la croissance potentielle,
29:28 et qui vraiment compte pour le coup en capacité productive de l'économie,
29:32 celle-ci, non, ne prend pas en compte l'innovation, l'intelligence artificielle.
29:36 Là aussi, c'est uniquement le résultat et toute la résultante des gains de productivité
29:41 de ces nouvelles technologies que l'on va capturer.
29:43 Mais ce n'est pas directement ces nouvelles technologies.
29:45 Donc là aussi, il y a peut-être un problème de mesure encore qu'il ne faut pas oublier,
29:48 parce que peut-être qu'on nous cache quelque chose.
29:51 Ça fait partie des casse-têtes extrêmes pour les économistes, ces questions de productivité.
29:58 Si je reviens à quelques baisses de taux en zone euro,
30:01 puisqu'il y en aura forcément une, si il y en a une, il y en aura deux, j'imagine.
30:05 Et peut-être même trois.
30:07 Qu'est-ce que ça change justement au profil conjoncturel, là, du moment, pour la zone euro ?
30:14 Est-ce que 50, 75 points de base de baisse de taux,
30:18 est-ce que ça a un impact macro ?
30:21 Et à quel rythme, à quelle vitesse, on peut le voir ?
30:23 Et sur quel type d'activité ?
30:25 Alors, ça a d'abord un impact marché, je pense essentiellement,
30:28 qui ensuite peut se transmettre dans les conditions de financement
30:31 et pourrait libérer le marché de l'immobilier,
30:33 puisque finalement, c'est le seul marché qui a vraiment, j'allais dire,
30:37 intégré ces hausses de taux et cette normalisation de la politique monétaire.
30:41 Parce que sur ce sujet, moi, je rejoins Hervé et Axel,
30:45 l'impact de la politique monétaire sur la désinflation, il est encore approuvé.
30:50 Et donc, l'impact finalement de ces baisses de taux sur l'économie,
30:53 il est tout aussi ténu.
30:56 Donc, voilà.
30:57 Non, moi, j'aurais tendance à ne pas trop espérer de 50, 75 points de base.
31:02 D'autant que, voilà, on a une activité qui repart un petit peu
31:06 et on a une demande qui est restée aux Etats-Unis très solide,
31:09 en zone euro qui est plutôt résiliente et qui commence à repartir légèrement.
31:13 Donc, voilà, c'est plutôt la désinflation qui va aider la demande,
31:16 plutôt que les baisses de taux.
31:17 Bon, grande prudence.
31:18 Donc, j'entends sur, alors, à la fois le rythme de baisse de taux
31:21 et l'impact des baisses de taux.
31:22 Néanmoins, Axel, qu'est-ce que ça peut générer comme effet,
31:25 alors, sur l'activité économique et sur les marchés ?
31:29 Est-ce que tout est parfaitement intégré aujourd'hui ?
31:31 Est-ce que c'est même peut-être un "sell the news"
31:33 à un moment auquel il faut s'attendre ?
31:35 Ou est-ce qu'il y a quand même matière à, je ne sais pas,
31:38 générer encore une dynamique ou des vents porteurs pour les marchés
31:42 à travers ces baisses de taux attendues ?
31:43 Je ne pense pas qu'on soit dans la logique "sell the news", justement,
31:46 puisqu'on l'a vu un petit peu avec les données légèrement moins bonnes aux Etats-Unis.
31:49 Il n'y a pas eu de dérapage des marchés très significatif.
31:54 C'était plutôt un peu avant, mais c'est reparti plutôt à la hausse.
31:58 Ensuite, et ça a entraîné un peu toutes les bourses mondiales.
32:02 Donc, je ne crois pas qu'on soit encore dans cette logique-là.
32:06 La réaction de cet après-midi sur le PMA, il me dit plutôt que "sell the good news".
32:13 Donc, c'est un petit peu ça.
32:15 Et ça remet en jeu ce qui est l'effet le plus direct sur les marchés,
32:19 c'est les anticipations de taux d'intérêt, toujours.
32:21 Et donc, si Powell était pris en défaut ou contraint de dire
32:27 que finalement, on va peut-être démonter les taux,
32:30 là, clairement, on aurait une correction boursière.
32:32 C'est pour ça qu'ils évitent au maximum d'arriver à cette logique-là.
32:36 Après, moi, je suis étonné de l'absence totale de volatilité sur les spreads,
32:42 sur les spreads de souverains, de crédits, le high yield qui continue de se resserrer également.
32:48 Un calme olympien.
32:49 Un calme olympien.
32:50 Il n'y a que de la...
32:51 Quelque part, les marchés sont un petit peu à l'inverse de la logique,
32:55 où c'est l'actif sans risque qui est de loin le plus volatil.
32:58 Et les anticipations de taux et la courbe des taux qui bougent davantage.
33:01 Même si le move a baissé quand même sur les marchés de monnaie, d'ailleurs.
33:03 Le move a quand même baissé un petit peu,
33:05 mais il reste quand même sur des niveaux sensiblement plus élevés que ce qu'il pourrait être.
33:10 Puisqu'il n'y a pas de mouvement monétaire depuis un certain temps,
33:14 donc ça aurait dû un petit peu écraser la volatilité de taux.
33:16 Mais les anticipations continuent d'aller dans tous les sens.
33:20 Donc ça crée toujours une forme de volatilité qu'on ne retrouve nulle part ailleurs.
33:24 On peut s'amuser sur le Yen, mais c'est assez remarquable,
33:29 cet effet contre-intuitif, où l'actif sans risque est le plus risqué.
33:34 Le piège, c'est peut-être après le 5 novembre ?
33:37 Alors là, pour le coup, quand on regarde la structure par terme de la volatilité,
33:40 clairement, il y a une inflexion après d'abord sur l'euro/dollar, sur un certain nombre d'index d'actifs...
33:44 Et ça paraît tout à fait légitime !
33:46 Et là, du coup, c'est la principale...
33:48 Parce que tout peut changer, on a des hypothèses.
33:51 Si Jérôme Paul ne nous dit pas qu'il va monter les taux dans un prochain mouvement,
33:55 2025, sous une hypothèse Trump, pourquoi pas ?
34:00 Enfin, je veux dire, ça peut poser aussi un problème à la Fed...
34:04 Pourquoi pas, s'il y a un dérapage budgétaire extrêmement violent,
34:09 en tout cas, même annoncé, ça peut avoir ce type de...
34:14 On peut avoir une grosse pontification violente de la courbe,
34:17 peut-être qu'on arrêtera la baisse du quantitative tightening,
34:20 et peut-être que la Fed sera moins conciliante,
34:22 s'il y a une attitude délibérément irresponsable du point de vue budgétaire...
34:29 Non, non, en tout cas, il y aura de la volatilité,
34:31 quoique Trump dise s'il est élu.
34:34 Ça, je pense qu'on peut s'accorder là-dessus.
34:37 Pour autant, la volatilité, aujourd'hui, elle est extrêmement faible.
34:41 Le vixe, en tout cas, sur les actions, ou effectivement sur les actifs risqués...
34:44 C'est peut-être le manque d'idées. On a parlé beaucoup d'NVIDIA,
34:48 c'est un gros marqueur. On aurait pu dire qu'il y a les...
34:51 Et comme ça se passe bien, bon...
34:52 Les médications anti-obésité, c'est un deuxième marqueur,
34:55 mais finalement, pas tant d'idées que ça.
34:57 Et il y a un marché qui est dominé.
35:01 À mon avis, c'est rarissime de voir que les résultats d'une boîte
35:05 étaient tellement attendus depuis quelques jours,
35:07 presque autant qu'un meeting de la Fed.
35:09 Plus ?
35:10 Ouais, peut-être plus.
35:12 NVIDIA plus fort que Tchèque-Pauvret ?
35:14 Ça, c'est assez rare.
35:16 Bah oui, on l'a vu, c'est ce que je disais.
35:18 Alors, moi, j'ai pas connu... Enfin, j'ai pas connu Nokia.
35:20 Si, j'ai connu Nokia, mais dans ma poche,
35:22 mais je suivais pas les marchés à cette époque-là.
35:23 Mais on m'a raconté que c'était déjà un peu de cette acabit.
35:26 Et puis, Apple, au moins, sur quelques trimestres,
35:28 ou une paire d'années, les résultats d'Apple chaque trimestre,
35:31 c'était l'événement mondial pour toute la planète finance.
35:34 On parlait du risque de volatilité post-5 novembre,
35:38 du risque peut-être pour les marchés obligataires, etc.
35:41 Ça nous amène à dire un mot quand même du Royaume-Uni,
35:43 qui a été un des seuls pays G7 récents
35:47 à avoir connu un vrai choc, ou un vrai stop,
35:50 mis par les marchés sur des annonces budgétaires
35:53 jugées un peu trop hasardeuses.
35:55 Donc ça, c'était l'épisode Lystros en moins de 50 jours.
35:59 Donc, nouvelle étape dans la vie politique britannique,
36:02 avec des élections qui arrivent beaucoup plus vite que prévues,
36:04 le 4 juillet prochain, Hervé.
36:06 Oui. Alors, beaucoup plus vite.
36:08 Un peu plus vite, parce que...
36:09 Un peu plus vite, oui.
36:10 Le Premier ministre avait promis au second semestre,
36:14 et donc il tient sa promesse en tapant sur le tout début de la période.
36:19 Moi, je pense que ce que l'on doit dire,
36:22 c'est que si le Premier ministre appelle les élections maintenant,
36:29 c'est sans doute parce qu'il considère qu'on est à un moment économique
36:34 qui est relativement bon.
36:37 On a eu la croissance du premier trimestre,
36:39 0,6%, alors aidé par des bizarreries sur le commerce extérieur.
36:44 Le reste est quand même beaucoup plus terne.
36:46 Mais n'empêche qu'on peut afficher, ça va mieux.
36:49 L'inflation, bon, on est tout près de la cible.
36:53 Alors, c'est un peu comme ailleurs, c'est un peu artificiel, cela.
36:57 N'empêche qu'il peut vendre la cible.
36:59 Et donc, on est dans un environnement économique, sans doute,
37:03 où il s'est dit, la fenêtre n'est pas merveilleuse,
37:06 elle n'est pas vraiment ouverte.
37:08 - C'est la moindre.
37:09 - Mais ça risque d'être moins bien après.
37:12 Donc c'est pour ça qu'il se lance dans cette aventure.
37:15 Ce que tous les sondages nous racontent,
37:17 et je pense que le bon sens va un peu dans cette direction,
37:21 c'est-à-dire que les conservateurs ont quand même une probabilité élevée
37:25 d'être sanctionnés parce qu'ils ont vendu une histoire,
37:29 la sortie de l'Europe qui allait apporter des fruits sucrés au Royaume-Uni.
37:34 Et pour le moment, depuis 2016, depuis 2020,
37:38 les fruits sucrés, on les attend toujours.
37:41 Et on a en face une offre travailliste qui est raisonnable.
37:46 C'est-à-dire que le parti travailliste s'est déplacé nettement vers le centre,
37:52 à un leader qui paraît quelqu'un de posé, de réfléchi.
37:57 Donc l'offre est critique d'un côté, raisonnable de l'autre.
38:03 Et donc en fait, on a envie de se dire que c'est un changement politique qui va se produire.
38:10 Et finalement, après toutes ces années,
38:13 finalement qu'il y ait une respiration démocratique, c'est pas mal.
38:16 Est-ce que ça va nous changer la trajectoire économique du Royaume-Uni
38:21 et faire que les investisseurs vont voir les choses autrement ?
38:24 La trajectoire économique, je ne crois pas.
38:27 Par contre, on aura un sentiment de stabilité plus grande, et ça c'est bien.
38:32 On aura aussi sans doute l'espoir d'un rapprochement avec l'Europe
38:36 qui mettra plein de temps à venir.
38:38 Il n'empêche que, on se dira, on ne va pas avoir de crispation.
38:41 Et donc à ce titre-là, on va peut-être réévaluer un peu à la hausse les actifs britanniques.
38:47 Mais le chemin pour gommer quand même la sottise qui était celle de sortir de l'Europe,
38:53 le chemin va être très long.
38:55 - Bon, Kirstammer, c'est le nom du leader travailliste qui sera potentiellement...
39:01 - C'est l'ordre, Starmer, s'il vous plaît.
39:03 - Potentiellement le futur Premier ministre sera le cinquième en six ans, je crois, pour le Royaume-Uni.
39:08 Merci beaucoup messieurs, merci d'avoir été les invités de Planète Marché ce soir.
39:12 Hervé Goulet de Kerr, senior economic advisor chez Accuracy,
39:14 Axel Bott, directeur de la stratégie de marché d'Ostrom Asset Management
39:18 et Hervé Amourda, économiste chez Pro-BTP Finance.

Recommandée