Tous les vendredis, samedis et dimanches soirs, Pascale de La Tour du Pin reçoit deux invités pour des débats d'actualités. Avis tranchés et arguments incisifs sont au programme de 19h30 à 21h00.
Retrouvez "Ça fait débat" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-grandes-voix-du-weekend
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00:00Il est 20h12 sur Europe 1, nous sommes dans Europe 1 Soir Week-end, viennent de s'installer Gabrielle Cluzel, merci d'être là, bonsoir Gabrielle.
00:08Bonsoir Pascale.
00:09Des réalistes, rédactrice en chef du site Boulevard Voltaire et Olivier D'Artigolle, chroniqueur politique.
00:14Bonsoir Pascale.
00:15Merci d'être là ce soir. Régis Lesaumier, on va commencer à parler de l'Ukraine et de la position de la France avec l'Ukraine et la position de la Russie.
00:24Régis Lesaumier, je suis très heureuse de vous avoir en studio, la dernière fois que nous nous sommes parlé, c'était aussi dans ce studio mais par téléphone,
00:30puisque je le racontais à Gabrielle et Olivier il y a un instant, vous étiez du côté russe et vous entendiez les missiles passifs, vous voyiez les drones au-dessus de votre tête.
00:38J'étais sur un parking assez froid, c'était la nuit et ce n'était pas aussi confortable qu'aujourd'hui.
00:43On est bien d'accord. Et vous êtes allé en Ukraine également Régis Lesaumier ?
00:46Je ne suis pas allé du tout en Ukraine, j'étais sur le front de Kursk. J'étais sur le front de Soudzha, c'est la partie que les Ukrainiens occupent sur le territoire de la Russie, environ 500 kilomètres carrés encore aujourd'hui.
01:01Et ça va ?
01:03Moi ça va, oui, c'était très intense, c'était un reportage un peu particulier, puisqu'on était avec une unité de dronistes, c'est-à-dire des gens qui sont des très jeunes soldats spécialistes des drones.
01:16Et je me suis rendu compte à leur contact pendant 11 jours, qu'en fait ces gens-là sont au centre de la guerre aujourd'hui.
01:22C'est eux qui font le plus de morts, c'est eux qui font le plus de dégâts, qui détruisent le plus de blindés, des deux côtés, côté ukrainien comme côté russe.
01:30Et aujourd'hui la guerre a complètement changé, on ne peut plus faire de grands offensifs parce que les drones arrivent et puis ils détruisent tout.
01:37Et c'est des jeunes, un peu comme des ados de chez nous, ils mangent des pizzas, ils boivent du Red Bull, ils ont un rythme de vie, ils jouent aux jeux vidéo assez fréquemment.
01:48Mais ce sont des espèces de petits génies qu'on envoie en petits commandos comme ça dans les bois pour aller jusqu'à 20 kilomètres, frapper l'adversaire sur ses positions, sur son arrière.
01:59Même on a un moment, c'était une station essence que ceux avec qui j'étais ont détruite.
02:06C'est assez incroyable de voir en direct cette nouvelle guerre drone-artillerie, la combinaison des deux toujours, mais où le franc-tassin a moins la place qu'il avait avant.
02:18Et on est dans une dimension d'un autre type avec aussi pour la plupart des soldats, ce qui est intéressant, deux ans et demi d'expérience.
02:27Donc des gens qui ont vu mourir leurs camarades, qui sont extrêmement endurcis.
02:31Là on peut parler d'envoyer nos troupes en Ukraine, certes, mais on est face à un type de soldat qui ont vécu deux ans et demi de guerre déjà.
02:39Jean-Noël Barreau ne fixe pas, et ça c'est quand même assez nouveau et c'est pour ça qu'on avait besoin de votre expertise, ne fixe pas de ligne rouge face à la Russie.
02:49Il n'exclut pas l'envoi de troupes françaises en Ukraine.
02:54D'abord, sur ce point effectivement, la stratégie de la France est en train d'évoluer.
03:00Oui et non, elle est confirmée, mais souvenez-vous, le 2 mai dernier, c'est à peu près exactement ce qu'avait dit Emmanuel Macron,
03:07quand il avait laissé entendre qu'il pouvait envoyer, il y avait même un papy du monde à l'époque, où il disait, je vais envoyer des mecs à Odessa.
03:14C'est ce que disait le monde. Après ça avait été démenti par l'Elysée, enfin bref, propos rapportés.
03:19Mais en tout cas, lui avait dit, nous n'avons plus de ligne rouge, déjà à l'époque.
03:24Il n'y avait pas cette idée d'autoriser les missiles de longue portée, c'était donc la différence.
03:30Là, la France suit l'exemple des Américains, qui ont donné l'autorisation aux Ukrainiens d'utiliser leur missile Atak MS,
03:37des Anglais qui ont donné l'autorisation d'utiliser leur missile Storm Shadow, et nous arrivons en troisième.
03:43Pour le moment, à ma connaissance, aucun missile Scalp, donc à longue portée, n'a été encore utilisé sur le territoire de la Russie.
03:50On va voir ce qu'il va se passer dans les prochains jours, mais en tout cas, ce que vous avez vu, c'est que ça a provoqué une réaction chez Vladimir Poutine,
03:57avec l'usage d'un premier missile qui est vraiment un missile...
04:02Longue portée ?
04:03Longue portée, non, mais c'est surtout un missile qui, normalement, porte des têtes nucléaires, qui va à 3 km à la seconde.
04:12Et en ce moment, ce que je trouve très inquiétant, c'est, je regarde un petit peu, je suis un peu ce qui se passe aussi sur les télés russes,
04:19ils commencent à mettre des cartes et expliquer qu'on pourrait frapper Paris en moins de 20 minutes, avec ce type de missile.
04:24Mais ça, ils l'avaient déjà fait ! Pardon, mais ça, ils l'avaient déjà fait ! Souvenez-vous, le début de la guerre en Ukraine, Régisseur Sommier,
04:28à la télévision russe, on s'amusait en disant qu'en deux secondes, on pouvait...
04:31On demandait aux invités de choisir la ville qu'ils voulaient détruire en premier.
04:35Donc, des choses, des dingueries comme ça, ça existe.
04:37C'est de la provocation, ça !
04:38Evidemment, ça existe, mais c'est une sorte de conditionnement.
04:41Vladimir Poutine a, par contre, ce qui est nouveau par rapport à l'époque des premières déclarations d'Emmanuel Macron sur l'envoi de troupes,
04:49il a expliqué et a changé la doctrine, a modifié la doctrine nucléaire russe,
04:56en y ajoutant une composante qui est qu'un pays non nucléaire aidé par des puissances nucléaires
05:02peut être frappé par un tir nucléaire.
05:05Donc ça, c'est nouveau, et sous-entendu, évidemment, c'est l'Ukraine.
05:08Mais ça, pardon Régisseur Sommier, moi j'ai suivi, pas comme vous, évidemment, la guerre en Ukraine,
05:12j'ai l'impression que la menace nucléaire, c'est le dada de Vladimir Poutine.
05:16C'est-à-dire qu'à chaque fois, il agite le chiffon rouge.
05:18C'est dangereux quand même, non ?
05:20Je pense que c'est dangereux.
05:22Je ne crois pas qu'on en soit encore à ce stade,
05:26mais c'est des choses, vous savez, il faut quand même se considérer que là,
05:32on a franchi, dans les trois dernières semaines, un certain nombre d'étapes
05:39qui vont vers la confrontation,
05:41la principale étant l'autorisation par Joe Biden
05:44d'utilisation de ces missiles à longue portée.
05:47Et, immédiatement par les Ukrainiens, quelques heures plus tard,
05:51sur la région de Bryansk,
05:53l'utilisation de ces missiles à Tak-MS,
05:55donc une sorte d'illustration.
05:57Donc là, on est passé à un stade, jusqu'à présent, qui avait été refusé à l'Ukraine.
06:01Souvenez-vous, Vladimir Zelensky s'était rendu à Washington,
06:05ensuite il avait assisté aux réunions de l'ONU,
06:09il avait été demandé à Joe Biden, spécifiquement, cet usage,
06:13et Joe Biden, à l'époque, l'avait refusé.
06:15Là, on sent bien qu'il y a, de la part de Joe Biden,
06:17peut-être l'idée de laisser une guerre plus compliquée,
06:21encore qu'elle ne l'est,
06:23à Donald Trump, peut-être précipiter les choses,
06:26internationaliser le conflit.
06:28Vous savez, on parle beaucoup des Nord-Coréens,
06:31alors bon, ils seraient sur le front de course.
06:33Moi, j'y ai passé 11 jours, j'ai vu des Colombiens,
06:37j'ai vu des Sri-Lankais, j'ai vu, en mercenaires,
06:41j'ai vu même un Chinois spécialiste des drones,
06:44qui travaille avec les forces russes,
06:47mais je n'ai pas vu de Nord-Coréens.
06:49Mais peut-être qu'il y en aura, en tout cas,
06:51il y a eu une volonté, en disant, il y a des Nord-Coréens,
06:53ils vont envoyer des Nord-Coréens,
06:55d'internationaliser le conflit.
06:57Et puis après, on rappelle que l'Iran a aussi fourni des missiles balistiques,
07:00l'Iran a fourni surtout ces fameux drones Shahid,
07:03qui ont eu une efficacité redoutable.
07:05Donc, cette fourniture d'armes dirait que, bon,
07:08voilà, le conflit est internationalisé.
07:10Il l'est déjà, de facto, aussi, avec l'aide que nous apportons à l'Ukraine,
07:13depuis le début.
07:14Donc, finalement, la vraie question, c'est,
07:17si les choses s'aggravent,
07:20qu'est-ce qui peut déclencher,
07:22ou le feu nucléaire, ou en tout cas, une riposte réelle ?
07:25Est-ce que les Russes vont frapper des bases autres qu'en Ukraine ?
07:29C'est ça la vraie question.
07:30On parle d'une base américaine en Pologne.
07:32Donc, voilà, tout ça est dans l'équation.
07:35On sent, en tout cas, qu'on n'a jamais été aussi proche d'un conflit,
07:38cette fois-ci, entre la Russie et l'OTAN.
07:40Ah oui, entre la Russie et l'OTAN.
07:42Et là, les choses s'aggravent.
07:43Est-ce que le veu pieux d'une guerre résolue,
07:46diplomatiquement, du président Zelensky,
07:48est totalement enterré, en 2025 ?
07:50Écoutez, le problème de Zelensky, c'est qu'il a dit ça,
07:53et la semaine suivante, il a dit,
07:56les missiles frapperont,
07:58ce ne sont pas des mots, etc.
08:00Donc, il manie un peu le chaud et le froid.
08:02Moi, je pense que, par contre, on peut s'avancer,
08:05dire que l'hypothèse d'arrêter la guerre en Ukraine
08:08en moins de 24 heures
08:09est mise comme promesse électorale par Donald Trump,
08:11semble un petit peu illusoire aujourd'hui.
08:14Ça ne va pas se passer comme ça.
08:16Les choses vont...
08:18On va voir, il y a encore deux mois,
08:20mais deux mois qui vont être quand même très compliqués
08:24parce qu'on sent qu'il y a quand même des gens
08:27qui poussent à la guerre des deux côtés.
08:29Et Donald Trump, de facto, arrive le 20 janvier
08:32avec une promesse de paix.
08:34On n'est plus dans cette escalade.
08:36Est-ce que Vladimir Poutine va accepter aussi cette paix ?
08:39Parce que, là aussi, moi, je reviens du front
08:42en Ukraine et Russie.
08:44Actuellement, c'est catastrophique pour l'Ukraine.
08:47C'est vraiment catastrophique.
08:49Je pense qu'on ne le dit pas assez.
08:51Je pense que M. Barreau, dont j'ai écouté les propos,
08:54ne prend pas assez en considération
08:56qu'il y a un véritable risque d'effondrement du front en Ukraine.
09:00Chaque jour, les Russes reprennent des villages,
09:03plus que des villages, des bourgs.
09:05Et il y a un certain nombre de forteresses
09:08comme Pokrovsk, Toresk,
09:10et peut-être même Sloviansk et Kramatorsk
09:14qui sont à risque.
09:16C'est-à-dire, ce sont les dernières forteresses
09:18ukrainiennes du Donbass qui sont à risque,
09:20peut-être même avant la fin de l'année.
09:22Donc, si tout ça est conquis par les Russes,
09:25il n'y a plus d'obstacles naturels
09:27qui viendraient se glisser entre eux et le Dniepr.
09:30Et l'Ukraine pourrait, à ce moment-là,
09:32perdre encore plus de territoire.
09:34Là, elle a perdu 20% de son territoire,
09:36ça pourrait aller jusqu'à 30%.
09:38Donc là, ça voudrait dire quoi ?
09:40Ça voudrait dire que l'Ukraine négocierait
09:42dans des conditions extrêmement périlleuses
09:44et négocierait peut-être une capitulation.
09:47Ce qu'il faut arrêter, je pense,
09:50de négocier des maintenances, ça veut dire
09:52préservons au moins une Ukraine
09:54avec une capacité d'être un pays.
09:57Ne préservons pas un pays en lambeaux
09:59complètement détruit et défait militairement.
10:02Régis Le Sommier, je voudrais avoir votre sentiment
10:05de grand reporter.
10:07Vous êtes allé sur le terrain, vous connaissez
10:09très très très bien ce dossier.
10:11Est-ce que les frontières de l'Europe
10:13vont bouger ? Est-ce que finalement,
10:15l'Ukraine a perdu, quelles que soient
10:17les configurations ?
10:19Je crois que l'Ukraine a perdu,
10:21c'est une vérité.
10:23Maintenant, les frontières de l'Europe,
10:25j'ai discuté plusieurs fois
10:27avec des officiers russes
10:29ou avec des gens qui font
10:31la guerre depuis deux ans.
10:35Leur préoccupation, envahir la Pologne
10:37ou les Pays-Baltes n'est pas du tout
10:39dans leur préoccupation.
10:41L'un d'entre eux me disait, vous savez,
10:43on a 17 millions de kilomètres carrés en Russie,
10:45on n'a pas besoin de terres supplémentaires
10:47et surtout, pourquoi irions-nous
10:49envahir des pays qui nous sont
10:51hostiles ? La Russie, c'est
10:53141 millions d'habitants,
10:55le marché européen, enfin l'Europe,
10:57c'est 550 millions d'habitants.
10:59Je ne vois pas l'intérêt,
11:01en tout cas, eux m'exprimaient
11:03cette idée
11:05que pourquoi
11:07irait-il annexer à nouveau
11:09les Pays-Baltes ou la Pologne ou la Roumanie ?
11:11Donc ça, je pense qu'il y a une espèce de
11:13surenchère. Il faut rappeler qu'historiquement,
11:15ces pays ont été, en effet,
11:17occupés de façon très dure et de façon
11:19même épouvantable, dans certains
11:21cas, par la Russie. Mais ça, c'est
11:23parce que, pendant la Seconde Guerre mondiale,
11:25nous avons signé les accords de Yalta
11:27qui ont divisé le monde et qui ont
11:29donné l'Europe de l'Est à la Russie. La Russie
11:31y est allée pour défaire l'Allemagne nazie
11:33et ensuite, on a cautionné ça par
11:35un traité que nous, occidentaux,
11:37avons signé. Donc,
11:39la volonté expansionniste de la Russie
11:41à l'Est, elle a existé
11:43mais si vous voulez, aujourd'hui,
11:45ils ont quand même eu, depuis deux ans et demi,
11:47beaucoup de difficultés en Ukraine
11:49pour gagner. S'ils gagnent
11:51cette guerre, ce qui semble vraiment
11:53apporter, on le voit,
11:55vous savez, il y a une chose qui
11:57ne trompe pas, c'est le moral des soldats.
11:59Vous êtes avec des gens
12:01qui ont deux ans et demi de guerre derrière eux,
12:03j'ai pas toujours vu ça. C'est mon cinquième séjour,
12:05ils ont la banane.
12:07C'est-à-dire qu'ils sont,
12:09ils savent qu'ils vont gagner.
12:11Je vous le dis,
12:13le soldat russe, qui est quelqu'un d'assez
12:15peu expressif d'habitude,
12:17là, vous sentez qu'il y a vraiment...
12:19J'étais sur le front de course, qui est un peu particulier
12:21parce que l'Ukraine a osé,
12:23de façon très audacieuse,
12:25attaquer le territoire de la Russie.
12:27Ce n'était pas arrivé depuis 1941.
12:29Beaucoup de Russes qui se sont engagés
12:31au moment, après le 6 août,
12:33après l'attaque de l'Ukraine,
12:35aujourd'hui, sont sur le front
12:37parce que pour eux, c'est une insulte
12:39de la part des Ukrainiens
12:41d'être présents encore sur le sol de Russie.
12:43Mais vous voyez que
12:45ça fait partie de...
12:47Ils sont dans une dynamique de victoire.
12:49Économiquement,
12:51ils ont largement résolu
12:53les problèmes qu'ils avaient au début.
12:55Ils ont changé leur économie.
12:57Ils ont rationalisé
12:59leur armée.
13:01Au début, il y avait trois corps d'armée,
13:03avec des difficultés de coordination.
13:05Il n'y en a qu'un seul.
13:07Il y a eu plein de choses qui ont été faites.
13:09La Russie a beaucoup appris de ses erreurs.
13:11Elle a fait beaucoup d'erreurs dans cette guerre.
13:13Aujourd'hui, elle n'est pas...
13:15C'est très...
13:17La dernière fois que l'Ukraine a repris
13:19une position, ça doit remonter
13:21à il y a six mois,
13:23on n'est plus dans une dynamique.
13:25On voit bien que la dynamique n'est pas du côté ukrainien.
13:27La dynamique s'est inversée.
13:29Et nous, la France, où se positionne-t-on
13:31dans ce conflit ?
13:33L'Ukraine doit pouvoir
13:35neutraliser des cibles militaires
13:37en Russie lorsque ces cibles
13:39permettent à la Russie d'agresser
13:41les Ukrainiens. C'est un principe
13:43de légitime défense et il est reconnu
13:45par le droit international, même avec des missiles s'il le faut.
13:472300 soldats ukrainiens
13:49ont été formés et équipés
13:51dans notre pays. C'est la première
13:53fois que nous formons une brigade
13:55complète de soldats étrangers depuis
13:57la première guerre mondiale.
13:59Ces soldats vont rentrer en Ukraine
14:01dans quelques jours pour regagner le front
14:03armé par des équipements français.
14:05Et dans quelques semaines, c'est le mirage
14:07français qui volera dans le ciel
14:09de l'Ukraine.
14:11Alors, voilà les mots
14:13du chef de la diplomatie française,
14:15Régis Le Saumier. On était en train de
14:17discuter dans ce studio
14:19et se dire, si on envoyait des troupes,
14:21que peut faire
14:23la France ?
14:25Que peut-on faire ?
14:27Moi, je vais quand même rendre hommage à l'armée française
14:29parce que j'ai passé beaucoup de temps
14:31avec elle en Afrique, en reportage
14:33sur Barkhane, sur Takouba,
14:35sur les différentes missions,
14:37sur plusieurs années. On a des soldats
14:39exceptionnels qui ont été capables
14:41justement de conscrire la menace
14:43djihadiste, et c'est important
14:45en Afrique, mais entre la menace djihadiste
14:47qui consistait à traquer
14:49des groupes à travers le désert
14:51et affronter une armée russe
14:53qui a deux ans et demi
14:55d'expérience, qui est retranchée
14:57avec des fortifications
14:59qui maîtrisent les drones
15:01comme personne au monde, y compris
15:03les américains. Ce que vous dites, c'est qu'on serait dépassé,
15:05c'est ça ? Si on envoie des troupes, si on envoie des
15:07armes ? Le Mirage 2000,
15:09c'est quand même un avion de chasse qui...
15:11C'est pas le rafale, hein ? Non, non, c'est pas le rafale,
15:13mais c'est un très bon avion.
15:15C'est pas un truc au rabais qu'on donnerait aux
15:17ukrainiens. C'est pas comme nos AMX
15:19qu'on a un peu largué là-bas
15:21et comme beaucoup de pays ont envoyé leurs vieux
15:23matériels. Non, là, on donnerait des choses
15:25qui seraient opérationnelles
15:27pour l'Ukraine, alors que... Mais ça sert à quoi,
15:29Régis Le Sommier ? Ben, ça sert,
15:31à mon avis, à se donner bonne conscience. Voilà !
15:33Non, mais c'est ça ! Ça sert à se donner
15:35bonne conscience. Sur la photo, non ?
15:37C'est un peu ça, mais...
15:39Moi, je trouve que ce qui
15:41est assez incroyable,
15:43j'aimerais entendre le chef d'état-major
15:45des armées, Thierry Burckhardt, qui avait
15:47alerté la France depuis des
15:49années en disant, attention, les guerres de haute
15:51intensité vont revenir, il faut
15:53se préparer, personne ne l'écoutait, on rigolait
15:55quand il disait ça, parce que ça fait
15:5715-20 ans qu'on faisait des guerres
15:59asymétriques en Afrique et au Moyen-Orient.
16:01Aujourd'hui, s'il avait une liberté
16:03de parole, ça serait intéressant de l'entendre
16:05parler sur notre capacité
16:07à être prêt. Oui,
16:09si le plus beau cadeau qu'on
16:11pourrait faire aux Ukrainiens, c'est des hommes.
16:13Parce que l'Ukraine manque d'hommes. L'Ukraine
16:15n'a pas de quoi... Non, mais attendez, là, oui, Gabriel Cluset,
16:17on n'a pas le nom militaire français
16:19sur le front. C'est la mère de famille
16:21qui réagit en moi.
16:23Mais je pense qu'il y a
16:25peu de Français qui
16:27envisagent de gaieté
16:29de cœur envoyer leurs soldats
16:31sur le... Vous m'aviez
16:33dit un jour, ça m'avait beaucoup frappé,
16:35cette guerre, c'est Verdun plus
16:37les drones, et on n'a pas envie de
16:39revenir à Verdun, on ne sait plus faire ça,
16:41et les drones, c'est pas là non plus.
16:43Souvenez-vous, quand on a fait Verdun, c'était
16:45la paysannerie française qui a fait
16:47gagner la France à l'époque. Donc des gens
16:49capables de...
16:51Et le nombre de morts que j'ai soumis.
16:53Et voilà, il y a des gens capables
16:55d'encaisser
16:57tous leurs camarades morts.
16:59Les Russes ont une espèce de
17:01prédisposition, enfin c'est assez...
17:03On sent qu'ils sont quand même
17:05à l'aise là-dedans. Ils sont à l'aise
17:07parce que c'est chez eux, parce que ce sont des
17:09températures sibériennes
17:11l'hiver, parce qu'il y a la boue
17:13qu'il faut gérer. Enfin bref, toutes ces conditions-là,
17:15ils les maîtrisent. Nous, on n'a pas
17:17l'habitude de ces conditions-là. Et on n'a pas
17:19la constitution physique,
17:21je vous le dis très honnêtement.
17:23Si on doit envoyer la jeunesse de France
17:25les conscrits, on n'est pas...
17:27Non mais...
17:29Certaines personnes ont évoqué
17:31le général Desportes.
17:33Les fils et les filles de France
17:35devront... On parle de sacrifice.
17:37J'ai entendu comment
17:39M. Kouchner parlait de sacrifice.
17:41Je ne pense pas que M. Kouchner, en dehors de Sac-de-Rhin,
17:43soit allé véritablement au front.
17:45Alors si, à Sarajevo, peut-être à l'époque.
17:47Mais en tout cas, ce qu'il demande
17:49de sacrifice... Mais ça veut dire quoi ?
17:51Et en plus, ça ne serait absolument pas
17:53décisif.
17:55Ça ne servira à rien.
17:57Ben oui, Régis Le Sommier, vous ne nous en avez même pas.
17:59Franchement, ce serait de la chair à canon.
18:01C'est horrible, hors de question. On oublie ça.
18:03Merci infiniment, Régis Le Sommier,
18:05d'être venu sur le plateau, dans le studio
18:07d'Europe. Il est 20h30.