Mercredi 13 novembre 2024, LEX INSIDE reçoit Jamila El Berry (Associée, JEB Avocats) , Julie Jacob (Associée fondatrice, Jacob Avocats) et Fleur Jourdan (Associée fondatrice, Fleurus Avocats)
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00:00Bonjour, je suis ravi de vous retrouver pour un nouveau numéro de Lex Inside, l'émission
00:27qui donne du sens à l'actualité juridique. Au programme de ce numéro, nous allons parler
00:32des transferts de football à l'aune d'une jurisprudence de la CGE. On va se demander
00:37si c'est la fin du système de transferts tel qu'on le connaît à l'heure actuelle
00:42avec Fleur Jourdan, associée fondatrice de Fleurus Avocat. On abordera également la
00:47question de l'enquête interne avec Jamila Elbery, associée de JEB Avocat et enfin on
00:56parlera du statut juridique de l'influenceur avec Julie Jacob, associée fondatrice de
01:02Jacob Avocat. Voilà pour les titres, c'est parti pour Lex Inside.
01:06On va commencer ce Lex Inside et on va parler d'un arrêt de la CGE qui a fait couler beaucoup
01:22d'encre en matière de transferts de football. Quid des transferts de football ? Va-t-on vers
01:27la fin des transferts ? On en parle tout de suite avec mon invitée Fleur Jourdan, associée fondatrice
01:34au sein du cabinet Fleurus. Fleur Jourdan, bonjour. Bonjour Arnaud. Alors nous allons
01:38nous intéresser aux transferts de football à l'aune d'un arrêt de la CGE du 4 octobre dernier
01:44qui estime que certaines règles de transferts sont contraires aux droits de l'Union européenne.
01:50Quelles sont les principales règles de la FIFA jugées contraires aux droits européens par la CGE ?
01:55Eh bien l'arrêt porté sur des règles en matière de transferts dans les cas où la rupture était
02:03soit à l'initiative du joueur, soit ce qu'ils appelaient sans juste cause, c'est-à-dire quand
02:09un joueur décide de quitter son club ou étant litige on va dire avec son club. Et dans ces cas
02:16de situation de litige entre le joueur et le club d'origine de ce joueur, la FIFA avait
02:24instauré des règles assez dures pour le club qui voudrait recruter ce joueur. Il y avait
02:35deux types de règles. Les premières c'était des règles indemnitaires, c'est-à-dire que le joueur
02:40tout comme le club d'accueil était solidaire d'indemnités, de montants indemnitaires assez
02:45importants. D'accord. Et les autres règles étaient des règles de sanctions, de sanctions
02:50quasi automatiques à la fois du club qui accueillait le joueur, qui ne pouvait plus
02:56recruter, et contre le joueur qui en fait ne pouvait pas obtenir son certificat de transfert.
03:01Et là en l'occurrence c'est le joueur Lassana Diarra, ancien international,
03:05qui avait sollicité, qui avait fait ce recours. Exactement, il avait été en désaccord avec son
03:12club d'origine à Moscou. Et dans cette situation de tension, il avait souhaité partir à Charleroi en
03:19Belgique. Et en fait le club de Moscou s'était opposé à ce transfert en demandant, en réclamant
03:27des sommes indemnitaires assez importantes. Et donc du coup le transfert ne s'est pas fait en
03:32raison de ce blocage. Et il y a eu un litige qui a duré deux ans et qui en fait finalement empêchait
03:39le joueur de jouer pendant un an. Alors pour bien comprendre la décision, en quoi les règles étaient
03:44contraires à la libre circulation des joueurs selon la cour ? Alors ces règles, on le voit en fait,
03:49elles avaient une portée dissuasive. En fait l'objectif c'était de maintenir l'équilibre des
03:54clubs, une sorte de pérennité au sein des clubs et des compositions de l'équipe, qu'il n'y ait pas
03:59des transferts un peu tous azimuts. Et donc elles avaient par définition vocation à être un peu
04:05dissuasives. Mais la cour a jugé que ces règles, elles étaient totalement disproportionnées. Les
04:10indemnités étaient énormes. Elles étaient sans corrélation avec les vrais salaires des joueurs. Et
04:16surtout les sanctions étaient très graves. Et donc la cour a considéré que c'était une entrave à la
04:22libre circulation des joueurs qui sont des travailleurs comme les autres. D'accord. Alors si
04:26on essaye de se projeter dans un avenir plus ou moins proche, quelles pourraient être les conséquences
04:31de cet arrêt ? Est-ce qu'on va avoir une libéralisation ou un stop des transferts ? Qu'est-ce que ça
04:36pourrait être les conséquences de cet arrêt ? Alors ça va avoir une conséquence importante parce qu'en
04:41fait ce qu'il faut mesurer c'est qu'en fait c'était cette contrainte qui pesait un peu sur
04:47les joueurs et sur les clubs qui faisait qu'en fait les clubs étaient obligés de s'entendre et de
04:51fixer des montants de transferts assez importants pour
04:56éviter ces déconvenus. Et ça faisait un peu monter les enchères. Donc non ce ne sera pas la fin des
05:04transferts parce qu'en plus la cour reconnaît et la FIFA s'en est un peu enorgueillie en disant
05:11non non il n'y a pas d'illégalité dans les règles de transferts. Donc les transferts vont continuer,
05:16il va y avoir des transactions qui vont continuer. Mais en revanche comme il va y avoir un certain
05:22nombre de réformes, on va y venir sans doute, ça va on pense plutôt conduire à faire baisser
05:27ces indemnités de transferts. Alors est-ce que la FIFA va devoir à l'aune de cette jurisprudence
05:36adapter son règlement ? Alors oui la jurisprudence est très sévère vis-à-vis des règles de la FIFA,
05:43c'est à dire qu'elle est vraiment, elle considère que ces règles sont disproportionnées, je l'ai
05:48dit. Donc c'est évident qu'elles ne peuvent pas rester en l'état. La FIFA va devoir revoir sa
05:54copie en précisant sans doute ce que c'est qu'une rupture sans juste cause qui était à l'origine
06:01du litige. En précisant aussi le mode de calcul des indemnités puisque maintenant un joueur qui
06:07va être en désaccord avec son club pourra plus facilement partir. Néanmoins ça ne se fera pas
06:13sans prix, il y aura quand même une indemnité comme dans le monde du travail mais ce sera sans
06:18doute plus corrélé à la fois à son salaire et à différentes, enfin en tout cas ce sera objectivé
06:24peut-être un petit peu plus. D'accord donc pour vous il n'y aura pas fin au système d'indemnités
06:29de transferts ? Non non il n'y aura pas de fin au système des indemnités de transferts mais
06:33elle sera ramenée sans doute à quelque chose d'un peu plus raisonnable et en tout cas quelque
06:37chose de plus objectif, de plus transparent, de plus prévisible à la fois pour les joueurs et
06:43pour les clubs. Est-ce que ça va pas nuire à l'équilibre du marché parce que justement c'est
06:47certains clubs mis sur certains joueurs et en espèrent une valeur financière derrière, est-ce
06:53que l'équilibre financier va pas se retrouver perturbé par cette décision ? Alors il est
06:58évident que pour certains clubs professionnels cette indemnité elle était anticipée donc elle
07:02était quasiment provisionnée donc elle était même intégrée dans les comptes donc il va y avoir
07:07sans doute une réadaptation. Alors ce qu'il faut bien voir c'est que l'arrêt de la CGE là il est
07:12temporaire on va dire puisqu'il va falloir qu'il y ait une décision au niveau de la Belgique qui
07:18va traduire ces orientations donc pour en tirer toutes les conséquences là pour l'instant c'est
07:23un petit peu flou mais c'est sûr que les clubs vont en tirer des conséquences comptables c'est
07:29certain et puis en plus c'est une jurisprudence qui va faire jurisprudence pour le coup et il
07:34y a peut-être des clubs ou des joueurs qui vont faire des recours sur la base de cette décision
07:40et donc du coup ça aussi ça pourra avoir un impact économique sur les clubs. Vous voyez une
07:46vraie tendance de fond justement sur ces recours qui pourraient être faits par des joueurs ? Des
07:52joueurs ou des clubs qui estiment qu'ils ont été lésés donc effectivement je pense que ça correspond
07:58à quand même quelques situations et ça ne m'étonnerait pas qu'il y en ait quelques-uns qui
08:02se mettent dans la brèche. Alors parfois aussi dans ces transactions il y a une indemnité qui
08:07est prévue quand le joueur est transféré pour le club formateur et donc c'est aussi un gain
08:12important pour les clubs formateurs est-ce que ça va pas les pénaliser aussi du fait de cette
08:17jurisprudence ? Alors effectivement il y a un sujet par rapport à l'application de cette jurisprudence
08:23sur les petits clubs qui soit à la fois club formateur mais l'indemnisation des clubs formateurs
08:27elle est quand même elle n'est pas contestée ça par la CGU, elle reste quand même dans le cadre des
08:33règles de la FIFA par contre il y avait un système de pourcentage de proportionnalité qui du coup va
08:38forcément impacter les clubs formateurs et puis les petits clubs ils vont avoir du mal à retenir
08:45leur talent c'était une clause incitative ou dissuasive selon le sens dans lequel on se place
08:51qui leur permettait aussi de retenir leur talent si maintenant les indemnités elles sont calculées
08:56sur la base des salaires pour eux ça va être beaucoup moins intéressant et finalement ces
09:00indemnités de transfert certes elles étaient vraiment très importantes et du coup c'est vrai
09:04qu'il y avait un débat là dessus et peut-être un côté un peu spéculatif mais en même temps c'est
09:08une forme de redistribution et elle permettait aussi aux petits clubs de vivre parce que les
09:13gros clubs leur achetait des joueurs à des prix assez importants et assez conséquents donc ça
09:18risque d'avoir une conséquence effectivement sur les petits clubs et sur les clubs formateurs
09:22et sans doute que dans le cadre de la refonte du règlement il va falloir sans doute traiter
09:28aussi ce sujet là de redistribution entre les clubs et trouver une manière aussi de mieux
09:33redistribuer l'argent du football entre les clubs les petits et les gros. Pour finir on est plus sur
09:39une évolution plutôt qu'une révolution du système de transfert avec ces indemnités ? Oui oui oui je
09:45pense qu'on est sur une évolution sur une évolution effectivement quantitative en termes de montant ça
09:51je l'ai dit et puis aussi sur quand même un équilibre du rapport de force qui va changer
09:55c'est à dire qu'aujourd'hui c'est une décision qui est très favorable aux joueurs aujourd'hui
10:00ils étaient peut-être un petit peu exclus de la négociation et pas tellement à la manette là on
10:06leur dit aujourd'hui finalement vous pouvez aussi rompre votre relation contractuelle ça vous coûtera
10:11quand même de l'argent ça ne coûtera pas rien mais ce sera pas ce sera pas forcément dissuasif.
10:15On va conclure là dessus merci d'être venu sur notre plateau
10:26On poursuit ce LexInside et on va parler de l'enquête interne RH avec mon invité Jamila
10:35El-Berry, avocate fondatrice du cabinet JEB Avocat. Jamila bonjour. Bonjour Arnaud bonjour
10:43merci de me recevoir. On va aborder un sujet sensible l'enquête interne RH qui est déclenché
10:49lorsqu'un comportement inapproprié est signalé au sein de l'entreprise pour commencer à
10:55quel moment l'entreprise doit-elle déclencher une enquête interne RH? Alors c'est une excellente
11:01question on a plusieurs types de configurations on a une configuration selon laquelle le
11:06signalement révèle des faits gravement fautifs auquel cas effectivement il faut impérativement
11:10investiguer et diligenter une enquête interne ou alors le fait s'avère être léger véniel ce qui
11:17va nécessiter peut-être des investigations complémentaires mais c'est un arbitrage qui
11:21est fait par l'employeur au moment où il reçoit le signalement et il estime nécessaire évidemment
11:26de poursuivre une démarche qui vise à faire cesser une situation de crise. Qui pilote l'enquête
11:31RH? Tout dépend des moyens qui sont alloués par l'entreprise pour ce type de démarche vous
11:36pouvez avoir des situations où on externalise l'enquête auprès de cabinet de conseil,
11:40de cabinet d'avocat notamment et qui vont effectivement piloter ce type de démarche
11:44pour des raisons de neutralité et puis vous avez effectivement la ressource en interne lorsque
11:49l'entreprise a professionnalisé ses équipes sur ce type de démarche. Alors on va parler maintenant
11:54qu'on connaît bien la démarche d'une enquête RH, quelles sont les précautions procédurales à
12:01prendre en compte? Alors il y en a plusieurs, la première c'est d'abord d'agir avec une certaine
12:05célérité, n'oublions pas que nous sommes tenus par les délais qui sont fixés par le code du
12:10travail notamment les délais relatifs à la procédure disciplinaire si naturellement on va
12:15vers une sanction disciplinaire mais aussi et surtout des besoins de neutralité, d'impartialité,
12:20il faut garantir à toutes les parties prenantes et bien que cette enquête est faite vraiment en
12:25toute objectivité pour permettre de valider le résultat, pour permettre de donner une certaine
12:31légitimité aux conclusions donc des précautions qui sont impérativement nécessaires à respecter
12:36et en particulier aussi de l'égalité des droits de chacune des parties qu'il s'agisse de celui qui
12:40a signalé ou qu'il s'agisse du mis en cause qui est accusé à tort ou à raison. Concrètement
12:47comment vraiment s'assurer qu'on a bien pris les précautions? Alors ça, ça va nécessiter le
12:53regard d'un juriste, donc un juriste expert qui maîtrise ce type d'outil ou alors
12:59effectivement une ressource interne RH qui est au fait de cette procédure parce que la
13:06difficulté lorsqu'on l'amène tambour battant et sans aucune précaution et sans aucune stratégie
13:11juridique, sans aucune sécurisation juridique, le risque étant qu'elle puisse être ensuite
13:15invalidée par les juges pour l'estimer qu'en réalité elle a été faite pour les besoins de la
13:21cause, pour protéger l'employeur, le mis en cause ou pour justement excommunier quelqu'un dont on ne
13:26veut plus dans l'entreprise. Pour aller un peu plus loin, quelle est la valeur ajoutée d'une telle
13:31démarche? La valeur ajoutée, il y en a deux, alors la première c'est la preuve, tout d'abord la preuve
13:36que l'employeur peut se réserver dès lors que le signalement porte sur des comportements
13:42inappropriés type harcèlement moral ou harcèlement sexuel, donc on va avoir effectivement de la preuve
13:48qui va émaner de la démarche et des conclusions de l'enquête et puis la deuxième valeur ajoutée
13:52évidemment c'est de démontrer que l'employeur a été proactif et a bien répondu à son obligation
13:58de prévention et de sécurité qui lui incombe notamment lorsqu'il y a des situations dysfonctionnelles
14:04qui sont portées à sa connaissance et pour lesquelles il doit nécessairement intervenir en
14:09toute urgence. Alors vous avez parlé de situations de harcèlement qui font l'objet d'enquêtes
14:14internes, est-ce qu'il y a d'autres types de situations on va dire inappropriées qui font
14:19l'objet d'enquêtes internes pour bien comprendre? Alors oui, le champ d'application est quand même
14:23assez large, c'est-à-dire qu'on résume à travers comportement inadapté ou comportement inapproprié
14:29ce qui permet finalement de faire entrer tous les cas de figure dans le type de démarche mais il
14:34peut s'agir évidemment d'infractions pénales comme les abus de biens sociaux, les enquêtes qui
14:39visent le blanchiment d'argent, la corruption, toutes les infractions pénales, tous les
14:44comportements on va dire infractionnels sont éligibles à ce type de démarche évidemment
14:50avec toutes les précautions procédurales qu'on a évoquées tout à l'heure et avec l'expertise
14:54de l'enquêteur qui va être déterminante pour valider le résultat. Alors vous l'avez dit tout
14:59à l'heure l'employeur doit être réactif mais que se passe-t-il si l'employeur ne réagit pas
15:05lors d'un signalement? Alors c'est une vraie question, c'est-à-dire que l'employeur qui ne réagit pas
15:11lorsqu'il y a un signalement peut engager la responsabilité de l'entreprise voire même la
15:16sienne ad hominem, c'est-à-dire sa propre responsabilité si, prenons l'exemple d'une
15:21personne qui signale une situation de harcèlement moral très grave, que la personne ne supporte pas
15:27que l'employeur reste inerte face à ces accusations et qui fait une tentative de suicide par exemple.
15:34Si on remonte la causalité et si on refait l'arbre des causes, on va s'apercevoir qu'à un
15:41moment l'employeur a été informé en temps réel mais qu'il n'a pas été réactif et qu'en ce sens
15:47il peut engager à la fois la responsabilité civile de l'entreprise avec des dommages d'intérêt qui
15:51peuvent être très lourds mais aussi sa responsabilité pénale si le cas échéant et bien il n'a pas
15:55assisté une personne qui est potentiellement en situation de danger.
15:58Hormis la réactivité de l'employeur, est-ce qu'il y a d'autres bonnes pratiques, des petits conseils à l'intention des entreprises pour bien traiter ces sujets ?
16:08Absolument, alors le premier conseil étant de ne jamais prendre à la légère le signalement quel qu'il soit.
16:14D'abord ne pas avoir de préjugés sur qui signale, on peut avoir dans les entreprises ou dans les environnements de travail
16:20des personnes dont on sait qu'elles ont l'habitude de râler, permettez-moi l'expression, ou de formuler un certain nombre de récriminations.
16:27Nous devons être neutre face au signalement et à la personne qui signale donc toujours le prendre en considération
16:33mais peut-être effectivement faire un premier examen, une espèce de primo écoute lors du signalement qui va permettre de savoir si on va aller jusqu'au bout de la démarche d'enquête
16:42parce que parfois elle est superfétatoire ou elle ne se prête pas à la situation telle qu'elle est dénoncée par exemple.
16:48Alors un point qui est aussi important, quel est le coût d'une telle démarche lorsqu'on fait appel à un cabinet d'avocats ou de prévention en matière de RPS ?
16:58Alors c'est vrai que le coût peut effectivement être rédhibitoire pour certaines entreprises parce que c'est une démarche qui coûte cher.
17:05Disons qu'en règle générale lorsqu'on a recours à un cabinet d'avocats c'est essentiellement lorsqu'on a un cas de figure très spécifique
17:12où on a un signalement qui concerne quelqu'un du top management et qui va nécessiter effectivement qu'on externalise cette démarche
17:19où on va avoir des faits extrêmement graves type violences sexuelles et sexistes qui vont nécessiter aussi un regard extérieur et qui va permettre de garantir l'impartialité et la neutralité.
17:29C'est dans ces cas de figure qu'on a recours à un expert externe qui va facturer cela naturellement en fonction du temps passé à réaliser cette enquête.
17:38Evidemment ça fait l'objet de négociations entre le cabinet et également l'employeur qui va ensuite faire en sorte de paramétrer le prix en fonction et le tarif en fonction de la nature de la démarche.
17:50Et après comment le cabinet intervient ? Il fait des entretiens au sein de l'entreprise ? Comment ça se passe concrètement l'enquête ?
17:59Oui évidemment il fait des entretiens alors il y a deux types de démarches là aussi c'est ou des entretiens en présentiel lorsque le cabinet d'avocat ou l'avocat se déplace sur place
18:09alors souvent ils y vont en binôme ou alors effectivement ça peut être sous forme de visio mais toujours est-il que c'est sous la forme effectivement d'entretiens qu'ils opèrent
18:19et ensuite qu'ils vont analyser les résultats et les restituer auprès de chacune des parties prenantes.
18:24Alors vous parlez de la restitution des résultats est-ce que ça donne un échange avec l'entreprise ? Comment ça se passe ?
18:31Alors quand l'entreprise commande cette enquête au prix du cabinet d'avocat, le cabinet d'avocat rend compte à l'entreprise des résultats.
18:39Il appartient ensuite à l'entreprise de faire sa propre restitution auprès des parties prenantes c'est-à-dire du signalant mais également du mis en cause.
18:48Et après de prendre les mesures adéquates ?
18:50J'ai coutume de dire que l'avocat lui est biodégradable ou le cabinet d'avocat est biodégradable, c'est-à-dire qu'on l'utilise dans le cadre de l'enquête et ensuite il disparaît
19:00puisqu'il est censé aussi garantir la même impartialité et ne pas avoir de liens commerciaux et avec l'entreprise et avec les différentes parties prenantes pour garantir une légitimité au niveau des résultats.
19:12On va conclure là-dessus, merci d'être venu sur notre plateau.
19:15Merci pour votre invitation Arnaud.
19:20On poursuit ce Lex Inside et on va parler du statut juridique des influenceurs avec mon invité Julie Jacob, associée fondatrice de Jacob Avocat.
19:38Julie Jacob, bonjour.
19:40Bonjour.
19:40Alors depuis quelques années, les influenceurs ont investi les réseaux sociaux, on va voir ensemble comment le droit s'adapte à cette activité.
19:49Pour commencer, pouvez-vous nous expliquer la différence entre les influenceurs marketing et les influenceurs de l'information ?
19:57Alors les influenceurs marketing sont ceux qui font de la promotion d'une marque, d'un produit ou d'un service et ils ont une rétribution, ils font la publicité d'une marque.
20:09Concrètement, ils sont rémunérés par une marque ?
20:11Exactement, il y a un contrat tripartite qui est signé entre l'agence, l'influenceur et la marque et l'influenceur est là pour promouvoir un produit ou un service.
20:22Ça s'oppose à un autre statut qui est assez récent qui est l'influenceur dit d'information et qui lui ne vend rien, ne vend pas de produit ou de service mais un fil d'actualité, d'information.
20:34Donc on pense par exemple à Hugo Travers qui a sa chaîne YouTube et évidemment d'autres réseaux sociaux, Hugo Décrypte ou Gaspard G qui font de la pure information,
20:47qui commentent l'actualité sur TikTok, sur Snap, Instagram, YouTube et Hugo Décrypte a même aujourd'hui fait évoluer sa pratique puisqu'il est présent sur une chaîne de France Télévisions.
20:59Donc on est sur des statuts qui sont vraiment différents et je dirais même qu'il y a un troisième statut qui est le statut de l'influenceur qui crée du contenu pur, de l'entertainment et qui est celui qui va faire de l'humour ou du contenu.
21:13Donc on pense par exemple à Squeezie, on pense par exemple à Enoch Stagg qui lui a fait un sublime documentaire qui a expliqué comment il a gravi l'Everest.
21:26Et là, on n'est pas dans de l'influence marketing directe ni dans l'information, mais dans un statut intermédiaire, bien qu'il soit financé par des sponsors.
21:36Alors la nature à horreur du vide, le droit aussi.
21:39Alors quelles sont les principales dispositions de la loi du 9 juin 2023 concernant la réglementation des influenceurs marketing en France ?
21:49Alors on est en pleine actualité parce qu'on a une loi, comme vous le dites, du 9 juin qui encadre le statut des influenceurs qui vient d'être un petit peu précisé par une ordonnance rendue le 6 novembre 2024.
22:02Et cette loi, elle prévoit pas mal de dispositions très intéressantes pour nous les avocats et les juristes.
22:08Tout d'abord, on définit ce que c'est un influenceur.
22:11Ensuite, on définit les secteurs d'activité puisqu'il y a des secteurs qui sont très cadrés.
22:16Donc je pense à des produits particuliers tels qu'un médicament, des produits cosmétiques.
22:21Il y a eu tout un sujet autour de la promotion de l'acide hyaluronique et également les produits interdits, les jeux, les paris sportifs, l'alcool ou le tabac, tout ce qui peut être médical ou paramédical.
22:36Et donc ça, c'est important, le champ d'intervention.
22:39Cette loi, elle prévoit également des dispositions sur la responsabilité.
22:45Comment est-ce qu'un influenceur qui vend un produit est responsable de la commande à la livraison?
22:50D'accord, ça, c'est très important parce qu'il y a un vrai engagement étonnamment de l'influenceur et de son agent.
22:57Oui, puis on sait qu'il y a eu beaucoup d'affaires, de tromperies par des influenceurs.
23:02Enfin, supposé après, il y a eu des contentieux.
23:05Donc la loi est venue encadrer un peu des pratiques.
23:08Parfois, il y a des influenceurs qui étaient allés un peu trop loin.
23:10Vous avez raison de le souligner.
23:12D'ailleurs, la DGCCRF est très active et l'année dernière a eu une activité très frénétique puisqu'il y a eu plus de 300 influenceurs qui ont été contrôlés avec des amendes.
23:25Il y a soit des injonctions pour être dans les clous de la loi, soit des amendes qui peuvent aller jusqu'à 300 000 euros quand même.
23:32Et il s'agit ici de vérifier que les pratiques ne sont pas trompeuses.
23:38À titre d'exemple, une influenceuse qui a fait l'objet de beaucoup de condamnations qui s'appelle Poupette Kenza a été dans un premier temps condamnée pour des pratiques commerciales illicites
23:48puisqu'il n'y avait pas d'informations sur le produit ni sur l'origine.
23:53Et puis après, il y a eu des plaintes pénales récemment sur des propos qui pouvaient attirer la haine et être contraires à la laïcité et l'indépendance des médias.
24:05Donc, il y a des condamnations qui arrivent, soit sur un terrain des pratiques commerciales, sur le contenu des propos et on va en parler avec les influenceurs qui donnent de l'information justement.
24:18Alors justement, vous évoquez les influenceurs qui donnent de l'information.
24:22Quel est l'état de la réglementation en la matière ? Est-ce qu'elle est adaptée à ce type d'influenceurs ?
24:29Alors, je dirais que ce n'est pas vraiment adapté parce que la loi de 2023, elle prévoit vraiment des dispositions sur le marketing, sur la vente, les pratiques commerciales qui ne doivent pas tromper les consommateurs.
24:41Et donc, le statut de l'influenceur journaliste, je l'appelle journaliste parce qu'il délivre de l'information, n'est pas du tout abordé.
24:49Donc, il y a un vrai intérêt à réfléchir à un statut différent qui apporterait des droits et des obligations dédiées à son activité.
25:00Donc, aujourd'hui, il y a une union qui s'appelle l'UMIQ, l'Union des métiers de l'influence, qui travaille à une réflexion sur ce statut.
25:11L'UMIQ a déjà élaboré des chartes pour l'influence d'irresponsable, mais réfléchit à un statut pour ces influenceurs d'actualité.
25:22Alors, vous évoquiez l'UMIQ. Quels sont les principaux enjeux déontologiques auxquels sont confrontés justement ces influenceurs de l'information ?
25:32Alors, je dirais que les influenceurs de l'information, ils doivent quand même avoir des droits et des devoirs.
25:39Des droits puisque c'est évident quand on est un Hugo Descript ou un Gaspard G ou d'autres influenceurs de l'information, on a besoin d'accéder à des événements.
25:49Donc, est-ce que la procession de la carte de presse pourrait leur attribuer ?
25:55Il est clair qu'ils ont besoin d'accéder à des meetings politiques, à des événements sportifs, d'accéder à de l'information à des coûts qui sont accessibles comme un journaliste.
26:05Et donc, se pose la question de la délivrance de la carte de presse à ces influenceurs de l'information.
26:11Il en est de même, je pense, du secret des sources.
26:15À partir du moment où on délivre une information, eh bien, il est évident que la personne qui travaille, qui investit, qui investit sur un sujet aurait le droit,
26:25comme un journaliste, d'être protégé en cas d'injonction d'une instance judiciaire et de pouvoir dire « je protège mes sources, moi, en tant qu'influenceur de l'information, comme un journaliste avec une carte de presse ».
26:40Il y a plein d'autres sujets auxquels je pense de bénéficier d'aide, parce qu'ils développent leurs propres médias, de bénéficier de subventions, de fiscalité particulière et ça mérite vraiment…
26:53Aujourd'hui, il n'y a pas de cadre et selon vous, il faudrait qu'il y ait un cadre vraiment défini de manière à ce qu'il y ait les droits, mais aussi les obligations pour ce type d'influenceur.
27:02Voilà. Comme vous dites, il y a également le sujet des obligations qui est…
27:07Et sur les obligations, est-ce que la charte, justement, de déontologie de LUMIC et la charte de MUNIC peuvent servir de base, justement, à une régulation adaptée de ces influenceurs ?
27:19Alors aujourd'hui, il y a une base qui est la charte de l'influence quand on est membre de LUMIC qui permet d'avoir une sorte de label, mais pour les influenceurs du marketing.
27:30Pour les influenceurs de l'information, il y aurait vraiment besoin d'une charte dédiée autour de la laïcité, autour de l'indépendance, autour de l'absence de prise de position,
27:41de ne pas inciter à la haine, de lutter contre les fake news dans n'importe quel domaine, que ce soit le climat, la politique, la politique extérieure.
27:50On l'a vu récemment, il y a eu des excès. Il y a eu aussi le cas, par exemple, de Squeezie qui a, pendant les élections législatives, incité ses followers à ne pas voter pour le RN.
28:03Se pose donc la question, est-ce qu'un influenceur peut avoir des opinions politiques ? Est-ce qu'il va être dans les normes de LUMIC ou pas ?
28:13Et donc le sujet de l'indépendance et de la laïcité, je dirais, et de l'absence d'incitation à la haine, me semble essentiel à être posé dans les prochains travaux de réflexion,
28:27soit au niveau du ministère de la Culture, soit de LUMIC.
28:29Bon, voilà, la balle est dans leur camp. À suivre, on va conclure là-dessus. Merci d'être venu sur notre plateau.
28:36Merci à toutes et à tous pour votre fidélité. Restez curieux et informés et à très bientôt pour un nouveau Lexe Insight sur Be Smart For Change.