L’égalité des chances ne concerne-t-elle pas les enfants placés ? Selon une récente étude de France Stratégie, de nombreux écueils pénalisent les jeunes en famille d’accueil, entre traumatismes liés à une situation familiale dégradée ou un impératif d’indépendance financière qui éloigne ces profils des études supérieures.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00BISMARTH
00:02Musique
00:04Musique
00:06Musique
00:08Musique
00:10BISMARTH
00:12Bien dans son job pour parler d'un sujet
00:14qui à ma connaissance n'a vraiment
00:16jamais été adressé d'un point de vue médiatique
00:18la situation de ces jeunes placés
00:20à l'aide sociale à l'enfance
00:22qui sont d'ailleurs pilotés par les départements
00:24français. Que deviennent-ils ?
00:26Comment font-ils leurs études ? Font-ils
00:28des études longues et supérieures ?
00:30Et on le découvre dans cette étude, ce n'est pas
00:32le cas. On en parle avec vous Bénédicte
00:34Galtier, adjointe au chef du département
00:36politique social chez France Stratégie. Je rappelle
00:38que vous êtes l'une des coautrices de
00:40politique publique en faveur de la mobilité sociale
00:42des jeunes. C'est important de le préciser.
00:44Et cette étude,
00:46qui nous dit quoi en résumé ?
00:48Elle nous dit que le parcours chaotique
00:50de ces enfants, qui deviennent ensuite
00:52des adolescents pour devenir des adultes
00:54après 18 ans,
00:56ils n'ont pas des parcours
00:58scolaires qui les amènent à avoir
01:00une vie professionnelle épanouie.
01:02Est-ce que je résume bien les choses ?
01:04Oui, vous résumez bien les choses.
01:06Je crois que le principal message à retenir
01:08est que les jeunes placés à l'aide sociale
01:10à l'enfance accèdent très peu à l'enseignement
01:12supérieur. Je voudrais juste vous donner
01:14deux chiffres. En 2015,
01:16une enquête a été réalisée auprès des jeunes placés
01:18à l'aide sociale à l'enfance, l'ASE.
01:20Ils avaient en moyenne 20 ans. Seuls 12%
01:22avaient un baccalauréat
01:24général ou un diplôme de l'enseignement
01:26supérieur. La même année,
01:28au même âge, la proportion
01:30était de 40% pour l'ensemble des jeunes.
01:32Autrement dit, les jeunes
01:34placés à l'aide sociale à l'enfance étaient
01:36trois fois moins nombreux que les jeunes de leur génération
01:38à avoir un baccalauréat général
01:40ou un diplôme de l'enseignement supérieur.
01:42La difficulté principale
01:44de ces jeunes, c'est l'origine même
01:46de leur placement, difficulté familiale,
01:48enfants maltraités,
01:50enfants battus, agressés sexuellement
01:52ou parents déficients
01:54qui décident de ne plus s'occuper
01:56de leurs enfants et donc de les confier à l'aide sociale
01:58à l'enfance, qui fait
02:00un départ très chaotique
02:02et même un rapport compliqué
02:04à la notion d'études et de réussite.
02:06C'est très sociologique.
02:08Oui, je crois qu'on peut évoquer
02:10trois facteurs qui expliquent ces parcours scolaires
02:12heurtés. Le premier, comme vous l'avez
02:14évoqué, le contexte familial qui a
02:16conduit au placement. Les jeunes ont pu être
02:18victimes de négligence parentale
02:20de maltraitances, de violences
02:22qui provoquent de nombreux troubles, des troubles
02:24cognitifs, des troubles
02:26psychiques, comportementaux, émotionnels
02:28et naturellement, tous ces facteurs
02:30entravent la réussite scolaire.
02:32Alors, un mot quand même, parce qu'il faut
02:34rendre hommage aux ministres quand ils font des lois
02:36intéressantes. Le ministre Taquet,
02:38Adrien Taquet, qui s'occupait justement
02:40des jeunes et qui avait
02:42fait cette loi qui, il faut le dire,
02:44le coût prêt pour un jeune placé à l'ASE, c'est 18 ans.
02:46L'institution, l'État
02:48l'accompagne jusqu'à 18 ans, puis ensuite
02:50il est livré à lui-même. Et la loi Taquet
02:52permettait justement de poursuivre cet accompagnement.
02:54Où en sommes-nous quand on lit
02:56votre rapport ? On se dit
02:58peut-être qu'on n'a pas encore les effets de la loi, mais ça ne
03:00fonctionne pas bien.
03:02Alors, l'étude que nous avons réalisée
03:04porte sur des données qui sont antérieures
03:06à la loi dite Taquet qui date de février
03:082022 et qui maintient
03:10pour les jeunes, qui maintient de droit
03:12pour les jeunes placés
03:14un accompagnement jusqu'à
03:1621 ans, dès lors qu'ils n'ont pas
03:18les ressources et les liens familiaux suffisants.
03:20Pour le moment, cette loi
03:22est encore récente. Il va falloir encore attendre un petit peu
03:24pour en voir les effets et pour voir
03:26notamment si cette loi
03:28améliore l'accès à l'enseignement
03:30supérieur des jeunes placés. Je ne l'ai pas précisé,
03:32mais France Stratégie, c'est une institution importante parce
03:34qu'elle est reliée directement au Premier ministre. C'est-à-dire
03:36que cette étude, ce travail,
03:38le digest, sera sur
03:40le bureau de Michel Barnier et de ses conseillers.
03:42Une fois qu'on a fait le diagnostic
03:44et vous le portez à travers
03:46cette étude qui est vraiment riche, qu'est-ce qu'on fait ?
03:48Il y a déjà la loi Taquet
03:50qui est de nature améliorer la situation.
03:52Ce qu'on peut faire,
03:54ça serait faire de la réussite scolaire
03:56un objectif explicite du placement.
03:58Pour le moment, ce n'est pas le cas. L'objectif du placement,
04:00et c'est normal, est de fournir
04:02un cadre sécurisé à l'enfant.
04:04Faire de la réussite scolaire un objectif,
04:06ça serait important.
04:08Vous dites que ce n'est pas le cas, ce n'est pas dans les
04:10piliers ? Ce n'est pas dans les objectifs
04:12actuellement. L'objectif, c'est de fournir
04:14un cadre sécurisé pour l'enfant
04:16qu'il n'a pas au sein de sa famille.
04:18La deuxième chose que l'on pourrait faire,
04:20c'est de renforcer les collaborations
04:22entre les services de l'aide sociale à l'enfance
04:24et l'éducation nationale.
04:26Il y a des choses qui commencent à se faire, par exemple
04:28l'Académie de Lille a mis en place
04:30un projet pédagogique 2022-2025
04:32dont le titre est
04:34Encourager la réussite scolaire des jeunes
04:36confiés à l'ASE.
04:38Ça veut dire aussi, sortir de ce chiffre,
04:40on va le découvrir, 60%
04:42en 2015, il y a une date mais
04:44c'est les derniers chiffres sur lesquels on peut
04:46s'appuyer, c'est une source France Stratégie.
04:4860% de ces jeunes placés
04:50étaient sur le marché du travail à un âge moyen
04:52de 20 ans. Ça veut dire que les études
04:54qu'ils font, on le voit dans votre étude,
04:56ce sont des formations professionnelles courtes,
04:58CAP, BEP, Bac Pro pour les
05:00plus motivés. L'idée, c'est de
05:02les faire passer dans les cycles
05:04supérieurs. Donc quoi ? Créer des passerelles,
05:06les accompagner, leur donner confiance parce qu'il y a
05:08un enjeu de confiance qui est très fort chez ces jeunes.
05:10Alors,
05:12si les jeunes font des études
05:14professionnelles courtes, il y a deux grandes raisons.
05:16La première raison, c'est, on l'a dit,
05:18ils ont des parcours scolaires heurtés, donc du coup
05:20face aux difficultés scolaires, ils sont
05:22redoublement très jeunes,
05:24des périodes de déscolarisation,
05:26des scolarités aussi dans l'enseignement
05:28spécialisé qui concerne les jeunes
05:30en situation de handicap et des jeunes ayant de grandes difficultés.
05:32Donc, ils ont
05:34des difficultés scolaires indéniables et c'est pour ça
05:36qu'on va les orienter dans des études
05:38professionnelles courtes menant à un CAP ou à un BEP.
05:40Mais il n'y a pas que ça. Il y a aussi
05:42le fait que le système de l'aide sociale
05:44à l'enfance, vous l'avez dit, est
05:46orienté vers l'objectif d'autonomie financière
05:48précoce des jeunes puisque à 18 ans,
05:50ils ne seront plus pris en charge.
05:52Du coup, les professionnels de l'aide sociale
05:54à l'enfance, conscients que
05:56ces jeunes ne pourront pas compter sur la solidarité
05:58familiale et qu'ils devront
06:00subvenir eux-mêmes à leurs besoins,
06:02les dissuadent de faire des études longues
06:04et les encouragent à...
06:06L'indépendance financière.
06:08Absolument. Et pourtant, quasiment 80%
06:10des jeunes qui ont été interrogés
06:12qui avaient 17 ans et qui étaient encore scolarisés
06:14souhaitaient poursuivre leurs études.
06:16Evidemment, mais prisonniers d'un manque d'argent
06:18donc obligés d'aller rapidement sur le marché du travail.
06:20Absolument. Donc, du coup, ce que l'on peut dire
06:22c'est que leurs aspirations sont bridées
06:24par le système de protection
06:26de l'enfance. Et pas l'inverse. Ils ne désirent pas
06:28forcément interrompre leurs études
06:30mais par la force des choses, sont obligés
06:32de le faire. Absolument. Et du coup,
06:34parfois, ils sont amenés à suivre des études
06:36qui ne correspondent pas à leurs aspirations.
06:38Et nous avons auditionné
06:40à la fois des jeunes placés
06:42et des responsables
06:44d'associations d'anciens placés
06:46et tous nous ont dit
06:48les jeunes placés ont besoin de temps.
06:50Ils ont besoin de temps pour expérimenter
06:52un métier. Ils ont besoin de temps pour éventuellement
06:54changer d'orientation scolaire et actuellement
06:56le système ne leur permet pas.
06:58Et qu'on leur fasse confiance à ces jeunes.
07:00Merci Bénédicte Galtier d'être venue nous éclairer
07:02sur un sujet important
07:04sur lequel on espère que la loi Taquet
07:06apportera ses fruits pour l'accompagnement
07:08après 18 ans jusqu'à 21 ans
07:10lorsque les familles sont toujours déficientes.
07:12Merci de nous avoir rendu visite
07:14pour être adjointe au chef du département
07:16politique social chez France Stratégie
07:18avec une étude complète à découvrir sur le site
07:20évidemment de France Stratégie. Merci.
07:22C'est un vrai plaisir. On tourne une page
07:24on s'intéresse à une institution
07:26dans le cerclérage. Ce sera un grand entretien
07:28INRS. Alors c'est un acronyme un peu
07:30barbare mais qui traite de tous
07:32les sujets du travail dans l'expertise
07:34l'accompagnement et le conseil
07:36aux entreprises et on en parle tout de suite
07:38c'est le cerclérage.