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Béatrice Brugère, secrétaire générale d’Unité Magistrats FO et auteure de l’ouvrage "Justice : la colère qui monte" aux éditions de L'Observatoire, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.

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Transcription
00:00Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin la secrétaire générale du syndicat d'unité magistra force ouvrière.
00:10Bonjour Béatrice Brugère.
00:11Bonjour.
00:12Bienvenue sur Europe 1, je rappelle le titre de votre dernier ouvrage « Justice, la colère qui monte » paru aux éditions de l'Observatoire.
00:18Question avec vous ce matin justement sur le fonctionnement de la justice dans l'affaire de la mort de la petite Camilia, sept ans il y a deux semaines, à Valoris,
00:25percutée on s'en souvient par une moto qui faisait une roue arrière et qui roulait à contresens.
00:30La cour d'appel d'Aix-en-Provence a décidé hier de laisser le motard en liberté,
00:35contrairement à ce qu'avait requis mardi le parquet de Grasse, à savoir son placement en détention provisoire.
00:41Matteo, c'est le prénom du chauffard, est donc dehors, sous contrôle judiciaire certes, mais dehors, c'est-à-dire pas en prison.
00:47Le père de Camilia a témoigné de sa colère hier matin sur Europe 1, juste après l'annonce de cette décision.
00:52C'était dans Pascal Proévous. Je vous propose, Béatrice Brugère, d'en écouter un extrait.
00:57Vu le comportement de la justice, en fait, je ne comprends pas.
01:01J'ai juste une question à poser. Imaginons que demain, moi, je me balade à Antibes,
01:05ou dans des endroits où ce Matteo, je vais le croiser, que par malheur il y a un accident.
01:11On ne va pas dire que je l'ai fait exprès, que je me suis vengé pour ma fille ?
01:14Est-ce que la justice, elle prend ce point-là en considération ou pas ?
01:17Qu'ils mettent ma vie et la vie de ma famille en danger.
01:20Quand ton fils, il te demande le matin, il te dit,
01:22mais papa, comment ça se fait qu'il n'est pas en prison ?
01:24Qu'est-ce que vous lui répondez ?
01:25Et c'est quoi le message qu'ils sont en train de passer à la justice à cette jeunesse, en fait ?
01:29En fait, on a des policiers qui se cassent le cul pour mettre l'ordre sur la voie publique.
01:33Et on a d'un autre côté la justice, en fait, qui emmerde tout le monde.
01:36Elle n'en a rien à foutre, en fait.
01:38Je fais ce qu'il me semble bien faire, mais mon avocat, il m'a averti déjà.
01:42Il m'a averti concernant la justice, dès le départ.
01:45Il m'a dit, ne t'attends pas à des miracles.
01:47C'est ce qu'il m'a dit, en fait.
01:48Apparemment, prendre la bonne décision de la part de la justice,
01:51c'est devenu un miracle maintenant, en fait.
01:53Protéger les citoyens français, c'est un miracle.
01:56On s'inquiète plus pour les délinquants et pour les fautifs que les victimes, en fait.
02:01Le procès peut durer même deux ans, en fait.
02:03Entre-temps, nous, on a supporté ça, en fait.
02:05C'est vrai qu'on est maltraités dans la garde à vue.
02:08On est maltraités en prison, logés, nourris et blanchis avec l'argent du peuple, en fait.
02:12Voilà, le père de Camilia Slim, donc au micro hier, de Pascal Praud.
02:15Pascal Praud et vous, c'était sur Europe 1.
02:17Je ne comprends pas le comportement de la justice.
02:20Vous l'avez entendu, Béatrice Brugère.
02:22Qu'est-ce qu'on répond à ce papa, quand on est comme vous,
02:25une professionnelle du monde de la justice ?
02:27Oui, déjà, bon, moi, j'entends cette colère
02:31parce que le drame que ce monsieur a subi est assez épouvantable.
02:35Je crois qu'il n'y a rien de pire que la mort d'un enfant.
02:38Surtout dans ces conditions inattendues d'une petite fille.
02:45Pour autant, c'est vrai qu'une fois qu'il faut respecter cette colère et l'entendre,
02:51il faut aussi s'interroger sur l'image que renvoie la justice
02:55et la façon dont elle fonctionne.
02:58Parce que c'est extrêmement important d'abord de bien communiquer,
03:01de bien expliquer les décisions.
03:03Justement, qu'est-ce qui motive dans cette histoire
03:06le fait de maintenir en liberté ce jeune chauffard
03:10qui s'est présenté, ses vrais visages masqués, hier devant la justice ?
03:14Alors, en fait, ce qu'il faut comprendre et ce que souvent on a du mal à comprendre,
03:19c'est que la détention provisoire n'est pas considérée comme une sanction
03:23mais comme une mesure de sûreté, si vous voulez, pendant l'instruction,
03:27pendant l'enquête.
03:29Donc, en vrai, ces mesures de sûreté répondent à d'autres critères
03:35que celle de la sanction, qui est celle de sécuriser.
03:38Et dans ces critères, vous avez le trouble à l'ordre public.
03:42Or, il faut considérer que la mort de quelqu'un comme ça sur la voie publique
03:46est un trouble à l'ordre public.
03:48Mais le législateur, depuis 2005, et même avant il y a eu des débats,
03:53a supprimé la possibilité d'utiliser ce critère pour les délits.
03:58Or, l'infraction qui est retenue dans le cas de ce monsieur
04:03n'est pas un crime mais un délit, puisque c'est un homicide involontaire.
04:07Alors, je vais vous citer, Béatrice Brugère, dans votre livre La colère qui monte,
04:11à un moment vous dites, la vraie justice, c'est pas qu'affaire de moyens,
04:15de crédits supplémentaires, ça consiste pas à gérer des stocks,
04:18c'est pas un métier de logistique.
04:21C'est d'abord une affaire de chair, d'esprit, de qualité et d'humanité.
04:27Alors, j'entends l'explication juridique, technique, finalement,
04:30que vous apportez à la décision qui est apportée,
04:32mais là, les juges, est-ce qu'ils tiennent compte du fait,
04:36par exemple, et ce papa le dit, il s'appelle Slim, il dit,
04:38mais si je le croise, moi, dans la rue, le Matéo,
04:41finalement, il n'habite pas très loin l'un de l'autre,
04:43il a même rencontré la famille de celui qui a tué sa fille.
04:46Est-ce que ça, ça a été pris en compte ou négligé, d'après vous ?
04:49Non, mais là où vous avez raison, c'est que la justice doit prendre en compte
04:53une forme d'humanité, mais aussi garantir la paix sociale,
04:56c'est-à-dire que ces décisions ne doivent pas heurter pour éviter la vengeance,
05:01puisque c'est un peu ça, ou en tout cas, un règlement de compte.
05:04Il est évident qu'aujourd'hui, et moi, en tout cas, c'est ma position,
05:08que le critère du trouble à l'ordre public qui a été supprimé en 2005
05:13devrait être remis, en tout cas, dans le débat qui a lieu aujourd'hui.
05:17Vous savez, il y a une proposition de loi qui a été faite,
05:20mais qui n'a pas pu aller jusqu'au bout à cause de la dissolution,
05:24qui était celui de l'homicide, de l'homicide russier,
05:28suite à l'affaire Alenau, je ne sais pas si vous vous souvenez,
05:31qui était aussi un drame.
05:32Le fils du chef Yannick Alenau, effectivement.
05:33Exactement. Et en fait, il y a toute une réflexion à faire
05:36pour remettre, justement, de l'humanité, ou peut-être de la justice,
05:39et parce que moi, je l'entends, sur ce critère qui est le trouble à l'ordre public.
05:44Il faut savoir qu'aujourd'hui, quand même, la volonté du législateur
05:49et également la politique pénale, c'est d'incarcérer le moins possible,
05:53y compris pendant la détention.
05:56Nous avons...
05:57Donc, c'est clairement redébattu à l'occasion du dossier
06:03qui va revenir de la proposition de loi.
06:05Je pense qu'aujourd'hui, le trouble à l'ordre public doit être redébattu.
06:09Mais il faut aussi quand même se dire que si le parquet a requis la détention,
06:13c'est que d'autres critères auraient peut-être pu être mis,
06:17comme celui de mettre fin à l'infraction, de protéger la victime,
06:22puisque c'est exactement ce que vous avez évoqué tout à l'heure,
06:25avec la colère, en fait, aussi, de protéger le mis en cause par rapport aux victimes.
06:33Mais il faut savoir aussi, et ça c'est quelque chose qu'on ne dit pas,
06:36c'est que le fait de mettre ou de ne pas mettre en détention,
06:39aujourd'hui, a un autre impact.
06:41C'est-à-dire que la justice est tellement saturée,
06:44elle est tellement embolisée, les délais sont tellement longs,
06:47que sur certains ressorts de cours d'appel,
06:51ne sont jugés quasiment que les dossiers où il y a des détenus,
06:56pour aller plus vite, parce qu'on a des délais qui sont contraints.
07:00Ce qui veut dire aujourd'hui, très clairement,
07:02que lorsque le mis en cause n'est pas détenu comme ça,
07:06dès le début de la procédure, et ni maintenu,
07:09ça rallonge énormément la date du procès.
07:13Donc en fait, ça a plusieurs impacts.
07:15Ça veut dire qu'aujourd'hui, par exemple,
07:17je pense que c'est sur le ressort de la cour d'appel d'Aix en Provence,
07:20il y a des tels délais d'attente pour être jugés,
07:23que l'on passe quasiment en priorité que les dossiers où il y a des détenus.
07:29Donc le procès Camilia, c'est sûrement pas avant des mois, peut-être des années ?
07:33Oui.
07:35Donc vous voyez, il y a plusieurs impacts sur ces mesures.
07:38Il n'y a pas que simplement, parce qu'après,
07:41il y aura peut-être une peine de prison, je n'en sais rien.
07:43Mais ça veut dire qu'il faut réévaluer tout notre système,
07:46au regard en effet de l'humanité,
07:48mais du trouble à l'ordre public qui est commis,
07:52pour éviter de donner cette image et cette lisibilité d'une justice
07:57qui va à deux vitesses, qui ne protège pas les victimes,
08:00et qui peut-être est beaucoup trop favorable
08:04pour ceux qui commettent des délits qui sont graves, ou des crimes.
08:07Merci beaucoup Béatrice Brugère de vos lumières ce matin.
08:10Je rappelle que vous êtes la secrétaire générale du syndicat Unité Magistre à Force Ouvrière.
08:13Votre livre, toujours d'actualité malheureusement,
08:16Justice, la colère qui monte.
08:18La colère des justiciables justement.
08:20C'est aux éditions de l'Observatoire.
08:22Bonne journée à vous, merci Béatrice Brugère.

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