Ukraine : «La France a été dans un entre-deux au début de la guerre», estime Isabelle Lasserre

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Isabelle Lasserre, correspondante diplomatique au journal Le Figaro et ex-correspondante à Moscou, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Elle publie le livre "Macron-Poutine, les liaisons dangereuses" disponible aux éditions de l’Observatoire.

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00:00 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko. Ce matin vous recevez la journaliste Isabelle Lasserre.
00:05 - Bonjour Isabelle Lasserre. - Bonjour Dimitri.
00:07 - Bienvenue sur Europe 1. On vous connaît, il vous arrive de remplacer Vincent Herouette à l'édito internationale sur Europe 1.
00:12 Vous êtes la rédactrice en chef adjointe au service international du Figaro en charge de la diplomatie.
00:17 Je montre votre dernier livre Isabelle puisqu'il vient de sortir "Macron, Poutine, les liaisons dangereuses".
00:22 C'est aux éditions de l'Observatoire.
00:24 On parle ce matin Isabelle de cette visite surprise, visite éclair de Volodymyr Zelensky en France.
00:30 Hier soir, le président ukrainien a dîné à l'Elysée, à cet art.
00:33 C'est sa deuxième visite en France depuis le début de la guerre.
00:36 Quel était le but de ce déplacement de Volodymyr Zelensky jusqu'à Paris ?
00:40 - Alors deux buts principaux. D'abord sécuriser le soutien des alliés, des principaux alliés en Europe.
00:47 Et les deux factos, les deux principaux pays qui peuvent aider l'Ukraine sont l'Allemagne pour des raisons économiques
00:53 et la France pour des raisons militaires.
00:55 Et puis aussi essayer d'entraîner ces pays dans une coalition militaire qui pourrait fournir des avions de combat à l'Ukraine.
01:03 Et là aussi, il n'y a pas 36 000 pays qui peuvent fournir des avions de combat.
01:07 Et c'était un souhait, une demande de Volodymyr Zelensky de manière répétée depuis très longtemps.
01:13 Mais force est de constater que c'est toujours un tabou pour l'instant en Allemagne.
01:17 Et en France, la décision est décalée pour l'instant.
01:22 - C'est jugé prématuré parce qu'on met en avant la nécessaire formation des pilotes ukrainiens à des appareils de chasse
01:28 qu'ils ne connaissent pas forcément, etc. C'est un prétexte ?
01:31 - Oui, ça c'est un prétexte parce que la formation des soldats ukrainiens, y compris à terre pour des vols éventuels plus tard
01:39 si ces deux pays finissent par en fournir à l'Ukraine, a déjà commencé depuis longtemps.
01:44 Donc c'est un prétexte. En fait, les vraies réticences tiennent à ce qu'on appelle à Paris la peur d'une escalade.
01:52 C'est-à-dire que Paris et Berlin ont peur que Moscou en profite pour escalader le conflit, comme si le conflit pouvait être encore escaladé.
02:05 Et puis aussi, il y a aussi, ça c'est un argument de Paris, c'est-à-dire une volonté de coller aux besoins immédiats de l'Ukraine.
02:12 Et c'est vrai que les avions français... Est-ce que l'Ukraine a vraiment besoin d'avions français aujourd'hui ?
02:19 Ce seraient plutôt des avions américains qui pourraient faire la différence. Et là aussi, le tabou n'a pas encore été brisé.
02:26 Alors ce crochet par Paris de Volodymyr Zelensky, il a lieu après un déplacement entamé vendredi à Rome, où Volodymyr Zelensky a rencontré le pape Giorgia Meloni,
02:35 qui l'assure aussi du soutien à 360% de l'Italie. Je me demande si elle n'a pas confondu les degrés et les pourcents.
02:41 Mais enfin, le message était quand même très clair. Ensuite, Volodymyr Zelensky est allé en Allemagne, il y est resté deux jours.
02:47 Et puis voilà, il arrive finalement à Paris comme s'il se souvenait qu'il y avait une capitale qui s'appelle Paris juste à côté.
02:54 Est-ce qu'on ne peut pas y voir le signe d'un manque de considération pour la France ?
02:59 Je crois qu'il y a un effet de loupe sur ce voyage pour une seule raison, c'est que l'Allemagne a éventé la visite de Volodymyr Zelensky à Berlin,
03:08 alors que la France ne l'a pas éventé. Donc on a l'impression que le déplacement en France a été organisé au dernier moment.
03:16 Simplement, je pense qu'il y a eu plus de discrétion. Je pense aussi que Volodymyr Zelensky essaye d'appuyer, enfin de convaincre les dirigeants
03:26 qui jusque-là ont manifesté des réticences à le soutenir. Et c'est vrai que l'Allemagne du chancelier Scholz a été un des pays qui ont le plus traîné dans l'aide à l'Ukraine.
03:39 C'est la même chose pour l'Italie, non pas vis-à-vis de Georgia Meloni qui a été très claire depuis qu'elle a été élue dans son soutien à l'Ukraine,
03:46 mais vis-à-vis du pape. Donc la visite au Vatican, que Volodymyr Zelensky attendait depuis longtemps, vise aussi de sa part à remettre les pendules à l'heure.
03:56 C'est-à-dire qu'on a vu le pape, il y a une dizaine de jours, aller en grande pompe en Hongrie voir le principal allié de Vladimir Poutine.
04:06 Et il a toujours ménagé la Russie.
04:09 Alors justement, votre livre interroge les relations qu'Emmanuel Macron a pu nouer avec Volodymyr Zelensky, comme avec d'ailleurs Vladimir Poutine.
04:17 Alors quel allié est la France aux yeux de l'Ukraine ? Vous vous rappelez un instant quand même que les Allemands ont mis un peu de temps à démarrer dans leur soutien à l'Ukraine.
04:25 Voilà ce qu'a dit Olaf Scholz ce week-end, il a dit "Nous vous soutiendrons aussi longtemps que nécessaire".
04:30 C'est sans nuance, enfin je veux dire, il n'y a aucune ambiguïté. Et de l'autre côté, on a la France qui continue d'apporter son soutien aux réponses aux besoins urgents de l'Ukraine.
04:38 C'est quand même beaucoup plus distant, beaucoup plus modéré.
04:40 Non, parce que quand on lit le communiqué de l'Elysée qui a été publié cette nuit, le soutien est aussi clair et aussi ferme que celui de l'Allemagne.
04:48 Mais pourquoi sommes-nous autant critiqués ? La France est beaucoup critiquée.
04:51 Alors, je vais répondre à votre question. Quand on demande aux Ukrainiens quelle est la relation de l'Ukraine avec la France depuis le début de la guerre, ils répondent "ça dépend des semaines".
04:59 Donc c'est ça la réponse.
05:01 Il y a deux manières de voir les choses. C'est-à-dire d'un côté, des petites phrases d'Emmanuel Macron qui ont régulièrement énervé les Ukrainiens.
05:11 Alors je pense à "il ne faut pas humilier la Russie, il faut donner des garanties de sécurité à la Russie", alors qu'il faudrait plutôt en donner à l'Ukraine.
05:19 Donc tout ça a vraiment surpris et vraiment énervé les Ukrainiens, comme d'ailleurs tous les partenaires d'Europe orientale de la France.
05:28 Et puis derrière, il y a la politique de la France. Et là, à forcer de constater que...
05:32 - Vous dites qu'on a des lunettes russes en France ?
05:34 - Oui, mais la politique de la France, c'est quand même aider l'Ukraine militairement.
05:37 Et ça, les Ukrainiens sont reconnaissants à la France.
05:41 Oui, on a des lunettes russes. Ce n'est pas forcément celles de Macron.
05:45 Ce sont les lunettes russes de tous les dirigeants français depuis très très longtemps.
05:50 Il y a une relation spéciale avec la Russie, pour des raisons culturelles, pour des raisons géopolitiques.
05:57 - Mais est-ce que vous diriez, Isabelle Lasserre, que la France est dans un entre-deux ?
06:00 Vous avez cette phrase "On en a trop fait pour ne pas énerver la Russie, mais pas assez pour vraiment aider Kiev".
06:05 - Alors la France a été dans un entre-deux, moi je pense, au début de la guerre.
06:10 En tout cas, a donné l'impression d'être un entre-deux.
06:13 C'est-à-dire que quand on continue à parler avec Vladimir Poutine pendant des mois...
06:17 - Ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
06:19 - Et à défendre un plan de paix coûte que coûte,
06:22 on donne l'impression de vouloir imposer à Volodymyr Zelensky des limites à sa reconquête territoriale
06:29 et à donner des gages à la Russie.
06:32 Alors est-ce que ça a changé ?
06:33 Oui, je pense que ça a changé.
06:35 Les événements ont forcé la France à changer et aussi la dynamique.
06:39 Mais c'est vrai que la France a été en fait assez en retard dans ce soutien à l'Ukraine,
06:45 en tout cas diplomatiquement et politiquement.
06:47 - Votre livre "Macron-Poutine, les liaisons dangereuses", Isabelle Lassère aux éditions de l'Observatoire.
06:52 Merci d'être venue nous voir ce matin sur Europe 1.
06:55 Bonne journée à vous.

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