Nicolas Pouvreau-Monti : «La loi Immigration telle que sortie de la censure du Conseil constitutionnel était un texte très allégé»

  • il y a 42 minutes
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Nicolas Pouvreau-Monti, directeur de l'Observatoire de l'immigration et de la démographie, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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00:007h-9h, Europe 1 Matin. Il est 7h12 sur Europe 1. Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le directeur de l'Observatoire de l'immigration et de la démographie.
00:09Bonjour Nicolas Pouvremonti. Bonjour. Bienvenue sur Europe 1. Y aura-t-il une 31e loi immigration depuis 1980 ?
00:16Le gouvernement vient en effet d'annoncer un nouveau texte sur la maîtrise des flux migratoires pour le début de l'année prochaine, 2025, un an après la loi Darmanin.
00:24On se souvient de la bataille parlementaire autour de ce texte au mois de décembre 2023. On n'avait jamais autant suivi une commission mixte paritaire.
00:32Apparemment, ce fut beaucoup de bruit. Pour rien, Nicolas Pouvremonti, puisqu'il faut déjà relégiférer ?
00:37Ce qui est certain, c'est qu'il y a une succession de lois d'immigration, vous l'avez évoqué, à une trentaine depuis les années 80, qui ne s'ajoutent pas entre elles,
00:44qui ajoutent des dispositions ou modifient des dispositions déjà existantes. Ce qui est certain aussi, c'est que la loi immigration telle que sortie de la censure du Conseil constitutionnel
00:53était quand même un texte très allégé.
00:55On s'en rappelle, le texte est voté fin décembre et fin janvier, le Conseil constitutionnel rend son verdict. 35 articles sur 86 censurés.
01:03C'est ça, tout à fait. Une poignée d'entre eux sur le fonds constitutionnel et la majeure partie d'entre eux sur le principe dit du cavalier législatif.
01:10C'est-à-dire que le Conseil a estimé, par exemple, que des dispositions sur les restrictions au regroupement familial n'avaient pas leur place dans une loi sur l'immigration,
01:17ce qui est un peu absurde, mais c'est la jurisprudence du Conseil, que les dispositions sur la nationalité non plus n'y avaient pas accès.
01:22Mais ces mesures pourraient revenir à l'avenir avec d'autres lois, car le Conseil n'a pas estimé qu'elles étaient contraires à la Constitution par elle-même.
01:27Alors, ça n'est pas fini, puisqu'il y a eu cette censure partielle, mais quand même assez importante, du texte de Gérald Darmanin.
01:35On apprend que le baromètre de l'application des lois qui est publié par l'Assemblée nationale indique qu'à peine un quart, 27% des décrets d'application de cette loi Darmanin ont été publiés.
01:45C'est-à-dire, non seulement le texte était déplumé dès le départ, mais en plus, il n'est appliqué qu'au quart.
01:50Tout à fait, et une part importante de ces décrets, du quart de décrets qui a été pris, l'ont été seulement au début de l'été, donc il y a quand même eu une latence assez forte.
01:59Il n'en demeure pas moins que certaines mesures ont été globalement d'application immédiate, je pense notamment à la levée d'un certain nombre de protections dont bénéficiaient des étrangers contre l'expulsion,
02:09par exemple des profils arrivés en France avant l'âge de 13 ans ou ayant des liens privés et familiaux forts en France, des profils représentant une menace grave pour l'ordre public.
02:17Ces mesures ont quand même pu être prises, il y a eu des éloignements supplémentaires de l'ordre de quelques centaines en cours de début d'année qui sont des résultats concrets de cette loi.
02:24Mais enfin, pour ce qui est des grandes masses de l'immigration, là on parle vraiment de l'épaisseur du traitement.
02:28Alors on pourrait se dire que le but de cette nouvelle loi, cette loi Retailleau, puisque c'est Bruno Retailleau qui la portera, ce serait quoi ?
02:34Ce serait de retenter, de faire passer les mesures qui avaient été retoquées par le Conseil constitutionnel ou les mesures qui sont restées lettres mortes,
02:41ou bien l'actualité fait qu'on a d'autres idées pour l'immigration ?
02:44Alors pour l'instant, la seule disposition explicitement annoncée par le gouvernement sur cette future loi concerne l'extension de la durée maximale de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière.
02:54Aujourd'hui en France...
02:54Pour ça c'est jurisprudence philippine.
02:56Oui, il y a clairement un effet de cette réalité tragique.
03:00Parce que son tueur présumé était sorti avant le délai des 90 jours, et s'il était resté jusqu'au bout...
03:05Tout à fait, parce que le laissez-passer constitutionnel n'avait pas été obtenu, enfin il y a eu une série de dysfonctionnements qui ont appelé notamment ce genre de mesures.
03:11Aujourd'hui, comme vous le soulignez, ces 90 jours maximum, ça peut être jusqu'à 210 jours pour des profits liés à des activités terroristes.
03:18L'idée du gouvernement c'est d'étendre ce délai maximal de 210 jours à une gamme plus large d'étrangers dangereux, des étrangers par exemple condamnés pour des crimes ou des délits graves.
03:26Le droit européen permet d'aller jusqu'à 18 mois en la matière, jusqu'à 550 jours, donc en la matière il n'y aura pas de question quant à la conformité de cette mesure au droit européen.
03:34Et c'est d'autant plus important qu'on a aujourd'hui entre 80 et 90% des étrangers détenus dans les cras qui sont connus pour les troubles à l'ordre public.
03:43Les centres de rétention administratives.
03:45Absolument, absolument. Donc là pour le coup on parle d'un public qui est aujourd'hui un public majoritaire dans les centres de rétention.
03:50Qu'il faut sortir des rues.
03:51Qu'il faut sortir des rues, c'était l'une des priorités du ministère d'Armanin, mettre la focale des éloignements sur ces profils représentant une menace pour l'ordre public,
03:58qui ne sont pas toujours les plus faciles à éloigner mais qui sont ceux dont l'éloignement implique un gain de sécurité notable.
04:03Alors on peut se faire une petite idée de ce qu'il pourrait y avoir dans cette prochaine loi immigration en regardant ce qu'avait proposé Bruno Retailleau quand il était sénateur.
04:11Il avait porté une proposition de loi, il y a de ça un peu plus d'un an, en juin 2023, assez dure, avec tout un ensemble de mesures pour rendre la France moins attractive en comparaison de nos voisins européens.
04:23Qu'est-ce que fait la France ? Que ne font pas les Allemands, les Espagnols, etc. Et qui attire des clandestins en France, Nicolas Péromontier ?
04:30Aujourd'hui, sur les principales modalités de l'accueil et du séjour des étrangers, il est incontestable que la France se rende comparativement plus attractive que ses voisins.
04:37Pour donner simplement deux catégories d'exemples, d'abord dans le champ de la santé, on parle beaucoup de l'AME, et à juste titre, l'aide médicale d'État absolument,
04:45qui est un dispositif réservé aux étrangers en situation irrégulière.
04:48C'est la sécurité sociale pour les clandestins, sans contribuer.
04:50C'est ça, et c'est même mieux que la sécurité sociale, puisque c'est une prise en charge intégrale du panier de soins, à l'exception des PMA et des cures thermales.
04:57Ailleurs en Europe, pour les étrangers en situation irrégulière, au-delà des situations d'urgence, on va rarement dans les soins de confort, et on va jamais à 100% de prise en charge.
05:06À côté de l'AME, il y a le dispositif des titres de séjour pour soins.
05:09La France est l'un des très rares pays au monde à avoir une procédure spécifique d'octroi de titres de séjour à des étrangers malades.
05:16Si vous ne pouvez pas vous faire soigner d'une telle maladie dans votre pays, vous pouvez demander à la France...
05:19C'est ça, vous n'avez pas d'accès effectif à un traitement dans votre pays.
05:22Si vous arrivez à démontrer que l'absence d'accès à ce traitement menace gravement votre santé, vous pouvez obtenir un titre de séjour sur ce motif-là en France,
05:29qui est vraiment une exception parmi les quelques pays au monde qui font ça.
05:32Donc le champ de la santé est peut-être un deuxième exemple, le champ de l'hébergement.
05:36La France est l'un des rares pays en Europe à avoir inscrit dans son droit le principe d'un hébergement inconditionnel des personnes.
05:41Concrètement, à quoi ça aboutit ?
05:43Ça aboutit à ce que nous dit la Cour des comptes en début d'année.
05:4540 à 60% des places d'hébergement d'urgence du parc de l'État sont aujourd'hui occupées par des immigrants en situation irrégulière.
05:52On pourrait multiplier les exemples.
05:54Donc l'hébergement d'urgence, c'est par exemple pour les sans-abri pendant l'hiver, ce genre de choses ?
05:57Absolument, les sans-abri pendant l'hiver, les femmes qui doivent quitter leur domicile parce qu'elles sont menacées.
06:01Une place sur deux ?
06:02Une place sur deux occupée dans le parc de l'État par un immigrant en situation irrégulière.
06:06Pour environ 1 milliard d'euros par an, c'est l'estimation qu'en fait la Cour des comptes.
06:09Et à côté de ça, il faut évidemment induire l'effet d'éviction pour les Français comme pour les étrangers en situation régulière,
06:15qui auraient un besoin effectif d'accès à ces places.
06:17Merci beaucoup Nicolas Pouvremonti.
06:19À ce stade des opérations, on ne peut pas beaucoup vous en dire plus sur le contenu de ce texte,
06:22mais voilà en tout cas quelques éléments qui sont dans l'air du temps dans le débat autour de ce prochain texte.
06:28Merci d'être venu sur Europe 1 nous en parler.
06:30Je rappelle que vous êtes le directeur de l'Observatoire de l'Immigration et de la Démographie.
06:33Bonne journée à vous.
06:34Merci.

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