• il y a 3 mois
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00:00:00Ciel, évidemment, sur ces news consacrées à la disparition de ce monstre sacré du cinéma français qu'est Alain Delon.
00:00:07Nous sommes toujours avec Éric Neuf, journaliste au Figaro.
00:00:10Oui, on a on a évoqué la carrière d'Alain Delon.
00:00:14Mais que serait Alain Delon sans toutes ces histoires d'amour qui ont jalonné sa vie ?
00:00:20Éric, avec une telle beauté.
00:00:21Qu'il avait formé avec Nathalie, qui était un peu comme sa jumelle astrale physiquement et mentalement.
00:00:31Et oui, il a serré les plus belles femmes du monde dans ses bras.
00:00:34Ce qui a été bizarre, c'est que les femmes étaient amoureuses de lui et les hommes n'étaient pas jaloux de lui.
00:00:40Ça, c'est un phénomène qui n'existe pas beaucoup.
00:00:43Et moi, je me souviens de la fin.
00:00:46Il était intelligent, de la fin du film Les Aventuriers, où Joanna Chinkus, qui était magnifique, était amoureuse de Lino Ventura et pas d'Alain Delon.
00:00:55Et à la fin, sur le sommet de Fort Boyard, parce qu'il y a des gens pour qui Fort Boyard ne représente pas une émission de télévision, mais le film de Robert Henrico.
00:01:05Delon est blessé à mort et Lino Ventura lui dit « Tu sais qui elle aimait, Laetitia, c'était toi ».
00:01:13Et les derniers mots de Delon, c'est « Sacré vieux menteur ».
00:01:15Et ça, pour moi, c'est quelque chose de fabuleux.
00:01:18Et aussi, Delon est mort, mais son personnage dans Le Samouraï disait « Je ne perds jamais, jamais vraiment ».
00:01:27Et je pense que Delon n'est pas vraiment mort et qu'ils sont là pour nous prouver.
00:01:32Éric, ce qui est vrai, c'est qu'Alain Delon s'était progressivement retiré de la vie.
00:01:39Il a été profondément affecté par la disparition.
00:01:42Parce que c'est vrai que le point commun, Nathalie Delon est disparue, Roby Schneider est disparue, Mireille D'Arc est disparue.
00:01:47Et toutes ces disparitions l'ont profondément affecté et il s'en est longuement très aimé, d'ailleurs.
00:01:54Oui, non seulement les femmes de sa vie, mais aussi les hommes de sa vie, les acteurs, les réalisateurs.
00:02:00Losey, René Clément, Melville.
00:02:02Et on peut presque imaginer que c'était quelqu'un qui comptait les morts pour s'endormir le soir et qui vivait complètement dans la nostalgie.
00:02:13Ce qui n'est pas du tout un défaut et que le cinéma lui servait un petit peu de béquille et de livre d'or.
00:02:21Merci, Éric, d'avoir accepté notre invitation dans cette édition spéciale.
00:02:26Merci mille fois. Je rappelle que vous êtes journaliste au Figaro.
00:02:29Michel Taube, vous souhaitiez apporter un regard.
00:02:33Alors, je parlais tout à l'heure de la profondeur parce qu'Alain Delon, c'était un homme d'une beauté incroyable, extraordinaire.
00:02:42Mais c'était aussi un homme d'une profondeur qui avait touché les côtés les plus noirs de notre société.
00:02:48Notamment, il avait grandi juste à côté de la cour, dans la cour de la prison de France, ce qui l'avait forcément beaucoup marqué.
00:02:55Mais je voudrais dire deux petites choses. Nous vivons tous là un moment d'une grande nostalgie, en fait.
00:03:01Parce qu'Alain Delon, c'est la nostalgie d'un monde qui n'est plus.
00:03:05Et pour ceux qui ont un certain âge, comme vous et moi, c'est ce que j'allais vous dire, pour des gens de notre âge et pour toutes les générations.
00:03:13Mais c'est ça qui est important aujourd'hui. C'est qu'Alain Delon, c'est votre génération, la nôtre, mais c'est la vôtre aussi.
00:03:18Mais celles qui sont même plus jeunes que moi aujourd'hui et que Mathieu, c'est quand même la nostalgie d'une époque qui a vécu.
00:03:25Et quand Pascal Praud disait tout à l'heure, de façon très forte, qu'Alain Delon était entouré de plus de morts que de vivants autour de lui.
00:03:33Bien sûr.
00:03:34Et qu'il avait la nostalgie, j'imagine, d'une époque révolue.
00:03:37Voilà, c'est aussi ça que l'on vit.
00:03:38La deuxième chose que je veux dire, c'est qu'Alain Delon avait une passion de la France et que, évidemment, les heures que l'on vit sont celles de la famille avant tout.
00:03:49Et il faut respecter leur dignité.
00:03:50D'ailleurs, le communiqué est assez symbolique.
00:03:52La famille est réunie et ça, c'est le plus important.
00:03:55C'est ce qu'il faut retenir.
00:03:56Absolument. Mais je ne doute pas qu'au-delà de ces obsèques qui auront lieu, si j'ai bien compris à Douchy, puisqu'il a souhaité entrer à Douchy.
00:04:04Je ne doute pas qu'il y aura un hommage national.
00:04:06Rappelez-vous, pour Johnny Hallyday, le chef de l'État avait organisé un hommage national qui s'était déroulé sur les Champs-Élysées à la Madeleine.
00:04:14C'était un moment très fort.
00:04:15Et je pense qu'Alain Delon aura, je n'en doute pas, un hommage national et même un hommage mondial parce que je suis certain que des cinéastes du monde entier,
00:04:24des comédiens du monde entier voudront lui rendre un dernier hommage parce que c'est un monstre sacré, une légende du cinéma français, mais mondial, qui est aujourd'hui parti.
00:04:34Priorité aux témoignages, vous l'avez bien compris, dans cette édition spéciale sur ces news consacrées à la disparition d'Alain Delon,
00:04:40qu'on a pris par un simple communiqué de l'AFP suivi d'un communiqué de la famille peu de temps après.
00:04:47Nous sommes avec Christophe Narbonne, journaliste cinéma.
00:04:50Bonjour, Christophe.
00:04:51Merci d'avoir accepté notre invitation dans cette édition spéciale.
00:04:55Que dire sur Alain Delon, si ce n'est qu'évidemment, c'est un monstre sacré qui s'en est allé, qui a rejoint aujourd'hui le monde des étoiles.
00:05:05Je passe un peu après tout le monde, donc ça va paraître peut-être un peu banal ce que je vais dire.
00:05:09Effectivement, c'était un monstre sacré pour ma génération, ça prend un peu plus de 50 ans, et on a grandi avec lui, que ce soit au cinéma ou avec les VHS qui sortaient dans les années 80.
00:05:19Moi, ce que j'ai envie de dire sur lui, c'est que moi, quand j'étais gosse, j'étais fan de Bébel, parce que moi, je suis de l'époque As des As, tous ces films-là, des années 80, Les Morts Fallous, Les Marginales.
00:05:33Et Delon, pour moi, c'était ce mec un peu distant, qui était un petit peu arrogant, alors que Bébel était le mec sympathique.
00:05:41Et puis, en devenant cinéphile, puis journaliste de cinéma, j'ai appris à redécouvrir Delon, à redécouvrir sa filmographie qui est extraordinaire.
00:05:48Et je trouve que, si leurs carrières sont parallèles jusqu'au milieu des années 70, on va dire, pour faire simple, je trouve que la carrière de Delon, à partir de Monsieur Klein, etc.
00:06:00montre quand même une volonté, et même avant d'ailleurs, montre une volonté quand même d'alterner réellement le cinéma grand public, comme le faisait Bébel, et le cinéma d'auteur assez pointu.
00:06:10Donc, jusqu'en 84, jusqu'à notre histoire de Bertrand Blier, il va faire un peu ça, ce qui le distingue quand même de Bébel.
00:06:18Et je trouve aussi, par ailleurs, qu'il a une puissance de jeu, une richesse, une profondeur que n'avait peut-être pas Belmondo qui, paradoxalement, avait fait des études
00:06:30de théâtre, alors qu'Alain Delon s'était fait tout seul.
00:06:34Donc, il y a une chose intéressante chez lui, dans son mythe, qui m'interpelle personnellement.
00:06:41Restez avec nous, si vous le voulez bien, mon cher Christophe Narbonne, on vous retrouve dans quelques instants.
00:06:46On va écouter une nouvelle fois Alain Delon.
00:06:48Donc, Pascal Praud l'a reçu sur le plateau de Seigneaux, c'était en 2019, juste après avoir été récompensé à Cannes de la Palme d'Or d'Honneur.
00:06:56Et il avait été écartier des médias quelque temps, mais il avait tout de même accepté l'invitation de Pascal Praud.
00:07:02Alain Delon explique pourquoi.
00:07:05Pourquoi je suis là aujourd'hui, moi ?
00:07:08C'est ce que je voulais demander.
00:07:09Ce que je vous ai appelé de nombreux fois.
00:07:12Ce n'est pas tout à fait ça.
00:07:13Je voulais simplement vous dire que je suis là aujourd'hui pour vous et pour vous tout seul.
00:07:17Et avant Cannes, je vous ai bien dit, je ne verrai personne et personne ne me verra avant Cannes que vous.
00:07:23Pourquoi ?
00:07:25Parce qu'il y a quelques années, j'ai beaucoup souffert d'une situation délicate où les gens étaient terribles avec moi.
00:07:30Et il y a un monsieur qui s'est dressé que je ne connaissais pas et que je ne connais toujours pas.
00:07:34Je le vois ce soir pour la première fois.
00:07:36C'est Pascal Praud.
00:07:37Il s'est mis à hurler « On ne touche pas à Alain Delon ».
00:07:41Ça m'a bouleversé.
00:07:43Je lui ai dit « Mais qui c'est celui-là ? ».
00:07:44On s'est parlé au téléphone depuis, mais c'est la première fois, disons-le aux gens qui nous regardent.
00:07:49C'est la première fois qu'on se rencontre, Pascal, à cause de ça.
00:07:53Et je voulais vous le dire, merci, parce que souvent dans ma vie, on m'a attaqué, on m'a fait beaucoup de choses,
00:07:59mais personne n'a fait comme vous en disant « On ne fait pas ça, on ne dit pas ça à cet homme-là. »
00:08:05Pourquoi ? C'est vous.
00:08:06Merci, Pascal.
00:08:08– Merci de nous accueillir, édition spéciale, évidemment, dans cette heure des pros,
00:08:12en ce dimanche matin, puisqu'on l'a appris un peu avant 8h, Alain Delon est mort.
00:08:17Beaucoup de témoignages, beaucoup de réactions, vous l'imaginez bien.
00:08:21Avec moi, ce matin, pour réagir, on n'avait pas spécialement prévu cet être-là, évidemment.
00:08:28On avait prévu de parler politique, mais on va parler beaucoup, beaucoup de cinéma.
00:08:33Avec moi, Nathan Devers, soyez le bienvenu.
00:08:36– Bonjour Thierry.
00:08:36– Amine Elbaïe, bonjour Amine, Pierre-Marie Sèvres.
00:08:40– Bonjour Thierry.
00:08:40– Bonjour, et Maxime Thiebaud, et puis nous sommes toujours avec…
00:08:44Bonjour Maxime, nous sommes toujours avec Christophe Narbonne, journaliste au cinéma.
00:08:49Avant de retrouver Christophe, dans quelques instants, petit tour de table,
00:08:53évidemment, lorsque vous avez pris la disparition d'Alain Delon,
00:08:58dont on savait que les jours étaient, hélas, comptés,
00:09:02ça circulait évidemment, on savait que son état de santé s'était dégradé.
00:09:06Que retenez-vous les uns et les autres d'Alain Delon ?
00:09:10On commence avec vous Pierre-Marie Sèvres.
00:09:11– Écoutez, moi je m'y connais assez peu en culture, très honnêtement.
00:09:14J'ai grandi dans plein de pays du monde,
00:09:16donc ma culture est divisée entre plusieurs pays.
00:09:20Mais il se trouve qu'Alain Delon, pour le coup,
00:09:22c'est un des rares acteurs pour lesquels j'ai une affection,
00:09:28auquel je m'étais attaché, j'ai vu la quasi-totalité de ses films.
00:09:32J'ai eu une grande admiration, même, j'ai trouvé que c'était,
00:09:37quand j'étais jeune, adolescent, un modèle d'homme libre,
00:09:42intelligent, sûr de lui-même.
00:09:46Donc j'ai vraiment eu de la tristesse, ça doit être une des premières fois,
00:09:51parce que je vous dis, je connais mal la culture,
00:09:53quand je vois un acteur disparaître, souvent, je ne connais pas si bien.
00:09:56Et là, en l'occurrence, j'ai vraiment eu de la tristesse ce matin,
00:09:58en prenant mon petit déjeuner, en apprenant ça.
00:10:00– Il y a un film qui vous a marqué, Pierre-Marie,
00:10:04parce qu'effectivement, il y a beaucoup de films,
00:10:06mais il y a un film, quel âge avez-vous Pierre-Marie ?
00:10:08– J'ai 30 ans. – 30 ans, voilà, 30 ans.
00:10:10J'ai peu connu sa carrière active, on va dire,
00:10:13mais le premier film que j'ai vu, qui m'a beaucoup marqué,
00:10:15c'était Le Guépard, un film absolument, pour ceux qui ne l'ont pas vu,
00:10:18absolument magnifique, une fresque historique, c'est du Visconti,
00:10:22donc l'histoire vaut toujours ce qu'elle vaut,
00:10:24mais c'est une fresque, c'est une œuvre d'art, vraiment,
00:10:27avec en plus l'Italie, la Sicile de la fin du 19e siècle,
00:10:32le moment où tout change, pour que rien ne change, il faut tout changer.
00:10:35Donc Le Guépard m'a vraiment marqué,
00:10:37et puis là, on voit Rocco et ses frères aussi.
00:10:39– Oui, Rocco et ses frères.
00:10:41– La beauté en noir et blanc.
00:10:42C'était aussi la grande époque de la collaboration franco-italienne,
00:10:46où les deux pays de l'art se réunissaient pratiquement tous les ans
00:10:49pour faire 10, 15 super productions cinématographiques
00:10:53qui avaient un succès fou à chaque fois,
00:10:54et c'était vraiment pour moi la belle époque du cinéma,
00:10:58malheureusement, c'est mon avis personnel,
00:11:00mais aujourd'hui on en est vraiment très loin,
00:11:02et puis peut-être un autre film, Plein soleil m'avait beaucoup plu,
00:11:05pareil, à Naples, en Italie, sur la mer Méditerranée.
00:11:11Donc voilà, mais en fait, je pourrais en citer…
00:11:14– Oui, on va continuer, nous sommes en fond durant deux heures,
00:11:17donc on n'a pas fini d'évoquer les films d'Alain Delon.
00:11:23Maxime, vous, quel regard portez-vous sur la carrière d'Alain Delon ?
00:11:28Quels sont les films qui vous ont marqués ?
00:11:30– Au petit matin, quand j'ai appris son décès,
00:11:33c'est un peu une Madeleine de Proust que j'ai eue,
00:11:35je me suis revu avec mon grand-père regarder Le Samouraï,
00:11:39j'ai 33 ans, donc effectivement, j'ai le même constat,
00:11:42c'est-à-dire que je n'ai pas connu sa carrière dans son activité,
00:11:46dans sa jeunesse, dans sa puissance.
00:11:47– Cette chaîne où vous parlez sur la piscine que l'on voit…
00:11:50– Mais effectivement, Alain Delon,
00:11:53c'est pour ma génération le grand-père de tous,
00:11:59c'est ce grand cinéma, c'est cet instant de nostalgie aussi
00:12:03quand on regarde ses films, on se dit, mais quelle belle époque,
00:12:07cette époque d'après-guerre, cette époque de la puissance française,
00:12:10de la beauté, il incarnait en fait, à lui seul, un modèle français
00:12:16qui bien souvent nous manque dans la vie que l'on connaît aujourd'hui,
00:12:21et c'est pour ça que je me souviens de la défense
00:12:24qu'avait prise Pascal Praud à son égard,
00:12:27et je m'étais dit effectivement, il y a un moment,
00:12:30il faut quand même remettre l'Église au milieu du village,
00:12:33le clocher au milieu du village, et Alain Delon,
00:12:36c'est un être sacré dans notre pays.
00:12:39Aujourd'hui, une nouvelle page se tourne,
00:12:43mais on n'oubliera jamais qu'il représente cette France
00:12:45qui nous manque tant.
00:12:47– Nathan, Nathan Devers.
00:12:49– Je pense qu'Alain Delon faisait mentir l'adage
00:12:54selon lequel il ne faut pas juger les gens à leur physique,
00:12:56parce qu'en l'occurrence, il avait un physique
00:13:00qui lui valait à juste titre d'être considéré
00:13:02comme le plus beau des Français, quand il était jeune et même après,
00:13:07il avait un physique qui en soi était déjà une forme de légende,
00:13:11avec un regard qui était littéralement fait pour la caméra,
00:13:16qui appait une présence physique littéralement solaire,
00:13:20c'est Muriel, il a, pareil comme vous deux,
00:13:25je n'ai pas vu sa légende en train d'être construite,
00:13:27on a grandi notre génération avec la légende Alain Delon
00:13:30qui était déjà édifiée et qui était déjà, non pas achevée,
00:13:35mais en tout cas l'essentiel existait déjà et était déjà derrière nous,
00:13:40il a joué en effet dans des chefs-d'œuvre
00:13:42dont je pense qu'on reparlera pendant toutes les deux heures de l'émission,
00:13:45mais en une phrase, moi ce qui me marquait chez lui,
00:13:48c'est que cet homme avait donc tout, il avait eu une vie incroyable,
00:13:53il avait été reconnu et à juste titre
00:13:57comme l'un des acteurs les plus importants de sa génération
00:14:01et pourtant je pense qu'il y avait quelque chose en lui
00:14:04qui le protégeait de l'hubris et qui était assez énigmatique,
00:14:08mais une forme de tristesse, de mélancolie, de noirceur
00:14:13dont on ne saurait pas dire exactement d'où elle lui venait,
00:14:16était-ce de son enfance, était-ce de ses histoires d'amour,
00:14:20était-ce peut-être aussi d'une forme de timidité,
00:14:24comme souvent chez les gens qui sont absolument éclatants
00:14:28et qui sont extrêmement glorieux
00:14:30et qui semblent, si vous voulez, être comme vous avez dit,
00:14:32sûrs d'eux-mêmes, peut-être y avait-il cette zone-là.
00:14:35– Je pense que c'est un ensemble de tout cela.
00:14:36– Exactement, mais en tout cas cette noirceur, cette mélancolie
00:14:40qui correspond aussi, je pense,
00:14:42à ce que notre génération a le plus connu de lui,
00:14:44ça veut dire que quand on le voyait s'exprimer publiquement
00:14:48dans des interviews, sur des plateaux télé,
00:14:51chez Pascal Praud, ailleurs, etc.,
00:14:53il montrait de lui très souvent cet aspect-là,
00:14:56avec d'ailleurs une forme de sagesse,
00:14:57un peu notamment dans les dernières années,
00:14:59un peu vanité des vanités, tout s'en va, tout fuit,
00:15:01la vieillesse est un naufrage
00:15:03et finalement il ne restera rien du monde.
00:15:06Et je pense qu'il y avait en lui cette réunion
00:15:11du soleil et d'une forme d'ombre,
00:15:14mais quand je dis ça, ce n'est pas pour le déprécier,
00:15:17c'est au contraire d'une forme de sagesse de Silène,
00:15:21de pessimisme intelligent qui l'a protégé,
00:15:24qui l'a inspiré et qui probablement d'ailleurs
00:15:27l'aura beaucoup grandi.
00:15:30– Je reviens avec vous dans quelques instants,
00:15:32mon cher Amine, pour également vous demander
00:15:34quels sont les films ou ce que vous retenez du personnage,
00:15:37mais nous sommes toujours avec Christophe Narbonne,
00:15:39journaliste de cinéma, on l'a évoqué avec mes invités.
00:15:43La vie d'Alain Delon mériterait évidemment un film,
00:15:47c'est un véritable grand scénario,
00:15:51la vie d'Alain Delon, Christophe.
00:15:55– Oui, je pense que ça a nourri, tout a été dit,
00:15:57son enfance difficile, ses amours plus ou moins contrariés,
00:16:02sa rivalité avec Bebel, il y a plein de choses qu'on pourrait dire,
00:16:06son impopularité parce qu'à une époque,
00:16:07il n'était quand même pas très aimé des Français,
00:16:10l'amour pour Alain Delon a grandi aussi avec le temps,
00:16:13parce qu'il a été mythifié,
00:16:15parce que ce n'était pas le même amour que pour Bebel,
00:16:18je pense, je me trompe peut-être,
00:16:19mais ce n'était pas le même amour,
00:16:20il y avait du respect pour Alain Delon,
00:16:22il n'y avait pas peut-être autant d'amour que pour Bebel,
00:16:25et avec le temps, je pense que ça s'est transformé vraiment en amour,
00:16:28comme avec Brigitte Bardot, comme avec des mythes comme ça,
00:16:31il en respecte beaucoup,
00:16:33donc c'est quelque chose qui s'est transformé,
00:16:36qui a mué lentement à mon avis, de mon point de vue,
00:16:40de ce que je ressens et de ce que j'ai vécu,
00:16:42et moi personnellement, comme je vous le disais,
00:16:45j'ai appris à l'aimer réellement en grandissant,
00:16:48mais par rapport à sa carrière, par rapport à sa personnalité,
00:16:51que tout le monde ne comprenait peut-être pas tout le temps,
00:16:55il avait une forme d'arrogance,
00:16:56il avait des façons, une morgue,
00:16:59une façon de s'exprimer qui n'était pas du tout celle de Bebel,
00:17:03c'était quelqu'un, on sentait,
00:17:04je crois que Nathan l'a dit,
00:17:06quelqu'un d'un peu dur,
00:17:08qui n'avait pas eu la vie facile,
00:17:10donc effectivement, c'est un personnage absolument fascinant,
00:17:13charismatique,
00:17:15sur lequel, sans aucun doute,
00:17:16on pourrait faire un biopic, c'est évident.
00:17:18Merci en tous les cas pour votre témoignage,
00:17:20Christophe Narbonne,
00:17:21je sais que vous devez nous quitter,
00:17:22merci d'avoir apporté votre témoignage.
00:17:25Alors, les réactions depuis ce matin,
00:17:26évidemment, sont nombreuses,
00:17:28notamment les réactions politiques,
00:17:30mais pas que.
00:17:30Adrien Spittieri,
00:17:31vous nous faites un petit tour d'horizon
00:17:33de ces réactions qui tombent les unes après les autres,
00:17:35évidemment.
00:17:36Exactement, Thierry,
00:17:37les réactions sont nombreuses depuis ce matin,
00:17:39notamment sur le réseau social X.
00:17:41On va commencer avec Valérie Pécresse,
00:17:42la présidente de la région Ile-de-France,
00:17:44qui a écrit un très court message ce matin,
00:17:47accompagné d'une photo d'Alain Delon.
00:17:49« Adieu, cher Alain », a-t-elle déclaré.
00:17:51Éric Ciotti a également réagi
00:17:53dans un message un petit peu plus long.
00:17:55« Cette fois, Alain Delon était de la race des seigneurs,
00:17:57il restera jamais aux yeux du monde,
00:17:59l'homme français avec un grand H.
00:18:02La France pleure un monstre sacré
00:18:04qui habita le quotidien des Français,
00:18:05par-delà les générations,
00:18:07et continuera à nous faire vibrer encore longtemps. »
00:18:10Enfin, une réaction aussi du côté du Rassemblement national.
00:18:13La députée Laure Lavallette a déclaré
00:18:15« Une étoile a rejoint les étoiles ».
00:18:17Elle cite aussi Alain Delon
00:18:19« Je n'ai pas vraiment peur de la mort,
00:18:21je pense à la vie »,
00:18:22une phrase qu'avait prononcée l'acteur.
00:18:25Thierry Adrien, on va vous retrouver
00:18:26tout au long de notre émission spéciale
00:18:28pour suivre toutes ces réactions.
00:18:30On le voit, on le constate,
00:18:31mais on parlera de l'aspect aussi politique,
00:18:34d'Alain Delon qui a pris des positions
00:18:37tout au long de sa carrière.
00:18:40Mais on en parlera,
00:18:41et on parlera également d'Alain Delon et du sport,
00:18:43parce que c'est un grand amoureux de sport.
00:18:46On sera avec notre ami Jacques Brandou
00:18:48dans quelques instants
00:18:49qui nous parlera de la passion d'Alain Delon et du sport,
00:18:52et notamment, vous le savez tous, de la boxe.
00:18:54Amine, je ne vous ai pas encore donné la parole,
00:18:56que retenez-vous d'Alain Delon, de sa carrière ?
00:19:01Quels sont les films qui vous ont le plus marqué ?
00:19:05Je vous écoute.
00:19:06Alain Delon est l'acteur qui réconcilie les générations.
00:19:09Il parle à la génération de mes parents.
00:19:13Il parle aussi aux jeunes issus de ma génération.
00:19:16Moi, le dernier film en tête,
00:19:19en tout cas le plus récent,
00:19:20c'est Astérix, aux Jeux Olympiques,
00:19:23pour tenir compte...
00:19:24Mais oui, mais c'est réalité.
00:19:27Oui, mais ça fait partie de la filmographie,
00:19:30il jouait son propre rôle.
00:19:31La scène, c'est magnifique.
00:19:34Intelligent.
00:19:35C'est très intelligent.
00:19:36Moi, j'ai adoré cette scène.
00:19:38J'ai été frappé...
00:19:39Je suis moi.
00:19:41En tout cas, par la personnalité d'Alain Delon.
00:19:43C'est un homme qui n'avait pas la langue dans sa poche,
00:19:45qui disait concrètement ce qu'il pensait.
00:19:50Je sais qu'on abordera l'aspect politique des choses juste après,
00:19:53mais j'ai été sensiblement marqué aussi par l'amour.
00:19:57L'amour qu'il donnait et qu'il exprimait publiquement pour ses enfants.
00:20:04Il n'était pas seulement un acteur du cinéma.
00:20:07Il a également joué un certain nombre de rôles
00:20:12dans plusieurs pièces de théâtre,
00:20:15en 1960, bien sûr,
00:20:17mais aussi au début des années 2000,
00:20:18et la dernière en date,
00:20:19c'est celle où il joue sur scène
00:20:24dans Une journée ordinaire, d'Eric Asouz, en 2011,
00:20:27aux côtés de sa fille Anoushka.
00:20:30Moi, ce qui m'a marqué chez Alain Delon,
00:20:32c'est évidemment sa personnalité.
00:20:34Et quelque part, j'ai envie de vous dire ce matin que
00:20:37nous étions préparés à sa disparition.
00:20:39C'est ce que je disais.
00:20:40Nous étions préparés à sa disparition.
00:20:42Je me souviens d'ailleurs d'une matinale
00:20:46où Pascal Praud résume finalement son échange avec Alain Delon
00:20:51et dit aux téléspectateurs et aux auditeurs,
00:20:55« Je veux mourir. »
00:20:57Et je sais que le public et les téléspectateurs
00:21:01et ses fans ont été particulièrement marqués aussi
00:21:04par les tragédies familiales
00:21:08où on a pu envisager un monde sans Alain Delon,
00:21:11alors qu'Alain Delon était encore vivant.
00:21:13Et il était encore présent dans la mémoire des vivants.
00:21:17Voilà, je suis assez touché ce matin,
00:21:21comme tous les Français.
00:21:24Mais j'ai fort espoir que le parcours artistique d'Alain Delon
00:21:32pourra en inspirer plus d'un demain.
00:21:34Et Pascal l'a redit,
00:21:36il n'est pas homme à être impressionné,
00:21:39Pascal, vous le connaissez.
00:21:41Évidemment, quand on reçoit une telle star sur son plateau,
00:21:44ça marque une carrière journalistique
00:21:46parce qu'il dégage quelque chose.
00:21:48Il le disait très justement lorsqu'Alain Delon
00:21:50en débarquait dans les locaux de CNews.
00:21:53Tout le monde regardait Alain Delon.
00:21:55Peut-être demander quelque chose Thierry.
00:21:57Je me souviens, lorsqu'Alain Delon est venu
00:21:59sur le plateau de Pascal Praud,
00:22:01à la fin de cette interview,
00:22:03Pascal Praud avait proposé une musique
00:22:05pour finir cette interview en beauté.
00:22:08Et on sent, on voit le visage
00:22:10très expressif d'Alain Delon.
00:22:12Et on sent finalement la fierté d'Alain Delon
00:22:18qu'il exprimait à la fin de sa carrière
00:22:23artistique.
00:22:25On sentait en tout cas
00:22:27beaucoup d'émotion
00:22:29à la fin de cette longue interview.
00:22:31Et c'était un moment de télé
00:22:33très fort. Alors justement,
00:22:35on vous a posé la question
00:22:37tôt ce matin.
00:22:39Vous, les Français qui nous
00:22:41regardez, que représente
00:22:43Alain Delon, écoutez
00:22:45vos réactions.
00:22:53Alors ça va partir dans quelques
00:22:55instants. On évoquera
00:22:57tout au long de cette émission
00:22:59tous les aspects
00:23:01de la carrière d'Alain Delon.
00:23:03Je l'ai dit, on parlera
00:23:05de sa passion du sport
00:23:07et de ses engagements
00:23:09politiques. Il a pris
00:23:11des positions très fortes,
00:23:13Pierre-Marie Sève, Alain Delon,
00:23:15tout au long de sa vie.
00:23:17Moi je me souviens, ça devait être en 1986,
00:23:19il avait dit publiquement qu'il soutenait Raymond Barr.
00:23:21Ça devait être dans ces années-là.
00:23:23Ça je me souviens très bien. Je me souviens qu'il n'a
00:23:25jamais renié son amitié, alors que
00:23:27c'était absolument pas la mode avec
00:23:29Jean-Marie Le Pen. Il l'avait dit publiquement, alors qu'il
00:23:31ne le soutenait pas politiquement, mais il disait
00:23:33c'est un ami. Et Alain Delon fait partie
00:23:35de ces gens qui placent les valeurs,
00:23:37l'amitié,
00:23:39l'honneur, toutes ces choses-là
00:23:41au-dessus de qu'est-ce qu'on
00:23:43va en penser la galerie. Donc
00:23:45il était ami avec Jean-Marie Le Pen.
00:23:47Il avait beau pas être d'accord politiquement avec lui,
00:23:49il assumait les choses.
00:23:51Il assumait les choses.
00:23:53Et d'ailleurs, je pense que ça en dit long
00:23:55sur lui. Vraiment, c'était
00:23:57le sens de l'honneur. Je me souviens très bien
00:23:59qu'il y avait eu des difficultés avec son fils,
00:24:01son fils aîné,
00:24:03auquel il ressemblait beaucoup,
00:24:05en plus physiquement et dans la personnalité
00:24:07aussi je pense. Mais
00:24:09peut-être c'est pour ça d'ailleurs qu'il avait
00:24:11eu des petites tensions. Et je me
00:24:13souviens qu'il disait souvent
00:24:15je voulais que mon fils
00:24:17soit un homme comme lui. Il était devenu
00:24:19un homme. Lui, il était devenu un homme vraiment à la dure,
00:24:21à l'armée, etc.
00:24:23Et je pense que
00:24:25c'est ça qui m'avait vraiment touché.
00:24:27Il assumait sa masculinité.
00:24:29C'était vraiment la vieille France
00:24:31au sens propre. Vous savez l'expression
00:24:33vieille France, cette vieille France.
00:24:35Moi, je trouve que c'est extrêmement positif
00:24:37comme expression.
00:24:39D'ailleurs, on m'en a
00:24:41parfois affublé.
00:24:43Mais Alain Delonze, c'était vraiment la vieille France.
00:24:45C'était vraiment la vieille France.
00:24:47Il a toujours assumé de droite.
00:24:49On en parlera dans quelques instants.
00:24:51Il avait une grande passion pour De Gaulle évidemment.
00:24:53On en parlera.
00:24:55Il assistait, je ne sais pas si vous le savez.
00:24:57Moi, je me souviens avoir lu ça il y a des années.
00:24:59Ses parents adoptifs géraient
00:25:01la prison de Fresne.
00:25:03Il vivait dans la prison de Fresne.
00:25:05Il était dans la cour en train de jouer
00:25:07quand il a entendu les coups
00:25:09de fusil qui ont
00:25:11tué, qui ont exécuté
00:25:13à Laval, juste après
00:25:15la seconde guerre mondiale.
00:25:17Il a béni quand même dans cette ambiance
00:25:19d'après-guerre, pas toujours
00:25:21très heureuse, parfois un peu morose.
00:25:23Mais il a vu l'histoire, il a fait l'histoire.
00:25:25Allez, on va
00:25:27écouter les réactions
00:25:29des Français. On vous a posé la question
00:25:31que représente Alain Delonze
00:25:33pour vous. Écoutez-vous.
00:25:35Le dernier monstre sacré
00:25:37du cinéma français, un artiste
00:25:39incomparable, un acteur.
00:25:41Il aimait se faire appeler
00:25:43acteur, non comédien.
00:25:45Et voilà, c'est le dernier monstre sacré
00:25:47du cinéma, après Jean Gabin, Lino Ventura.
00:25:49Et voilà, c'était...
00:25:51C'est une grande tristesse
00:25:53pour l'ensemble des Français, je pense.
00:25:55C'est sûrement une grande figure du cinéma.
00:25:57Ça le restera.
00:25:59Voilà, tout le monde connaît
00:26:01Alain Delonze et bon, c'est désolant.
00:26:03Tous ceux qui meurent, c'est désolant.
00:26:05Il a eu une belle vie, je pense qu'il était...
00:26:07Il a été au fond des choses.
00:26:09Il a dû avoir la vie qu'il voulait.
00:26:11Voilà, c'est bien pour lui.
00:26:13Mais bon, c'est pas mon acteur préféré.
00:26:15Marie, c'était un très bel homme.
00:26:17J'ai vu il y a deux semaines, par exemple,
00:26:19j'ai vu Borsalino.
00:26:21Excellente image.
00:26:23Un homme très beau, je me pose pas de questions
00:26:25sur sa vie privée, ça ne me regarde pas.
00:26:27Mais quand même, c'est un monstre du cinéma
00:26:29qui a su, je veux dire, faire plaisir aux gens.
00:26:31Il avait vraiment un charisme extraordinaire.
00:26:33Et puis il était beau.
00:26:35Voilà, peu importe le reste.
00:26:38Eh oui, voilà, il était beau.
00:26:40Vous savez, les hommes de ma génération,
00:26:42on était tous jaloux d'Alain Delon,
00:26:44parce qu'évidemment, il avait une telle beauté.
00:26:46C'était pas très grand.
00:26:48Oui, mais bon, c'est Alain Delon, quand même.
00:26:50On était tous jaloux, mais qu'est-ce qu'il y a
00:26:52de plus que nous, Alain Delon, quand même, néanmoins.
00:26:54Voilà, c'était très sympathique,
00:26:56tous ces messages.
00:26:58Et ça représente, évidemment,
00:27:00tout l'homme qu'il était.
00:27:02On va faire un petit tour d'horizon
00:27:04de toutes les facettes d'Alain Delon.
00:27:06On a un peu commencé à parler politique,
00:27:08mais on y reviendra tout au long
00:27:10de cette émission.
00:27:12Mais Alain Delon, c'est le sport aussi.
00:27:14Il avait une profonde passion pour la boxe.
00:27:16Il était, on se souvient,
00:27:18il était très ami de Carlos Monzon,
00:27:20par exemple, un grand boxeur
00:27:22devant Eternel.
00:27:24Et je voulais aborder cet aspect-là
00:27:26avec notre ami Jacques Vandrouw,
00:27:28qui est avec nous.
00:27:30Alain Delon et le sport, c'était une grande
00:27:32histoire d'amour, évidemment.
00:27:34Le sport et la boxe.
00:27:36Mais pas que la boxe, d'ailleurs.
00:27:38Par rapport à l'ensemble de sa carrière,
00:27:40évidemment, sauf qu'Alain Delon
00:27:42était d'abord quelqu'un de cœur
00:27:44parce qu'il avait organisé
00:27:46le championnat du monde de boxe
00:27:48à Roland-Garros.
00:27:50C'était le 29 septembre 1973,
00:27:52entre Carlos Monzon, avec qui il était très ami,
00:27:54et aussi Jean-Claude Boutier.
00:27:56Jean-Claude Boutier est venu s'installer
00:27:58pendant pratiquement trois mois
00:28:00à Douchy pour s'entraîner
00:28:02au championnat du monde.
00:28:04Le manager de Boutier à l'époque,
00:28:06c'était Jean Protonelle.
00:28:08Et c'est vrai qu'avec Thierry Roland,
00:28:10on allait les voir régulièrement s'entraîner
00:28:12et on était toujours reçus
00:28:14avec une immense gentillesse par Alain Delon
00:28:16et également par Mireille Dard,
00:28:18qui systématiquement nous faisait des pas de carbonara,
00:28:20si vous voulez tout savoir,
00:28:22justement, dans cette histoire.
00:28:24Et c'est vrai qu'Alain s'est hyper, hyper
00:28:26investi dans ce championnat du monde.
00:28:28Il avait loué Roland-Garros,
00:28:30il avait gagné des enchères,
00:28:32parce qu'à l'époque, il y avait des enchères pour organiser
00:28:34les championnats du monde,
00:28:36et Alain s'était beaucoup investi financièrement
00:28:38pour être, comme vous l'avez dit
00:28:40depuis ce matin, Jean-Claude Boutier,
00:28:42le Français, même s'il était copain
00:28:44avec Monzon,
00:28:46il voulait aider surtout
00:28:48Jean-Claude Boutier, et surtout,
00:28:50ce qui est important aussi, c'est qu'avec
00:28:52Jean-Claude Boutier, mais quelques années plus tard,
00:28:54il se trouve que Carlos Monzon
00:28:56n'a pas eu des moments
00:28:58vraiment douloureux avec la justice,
00:29:00et bien Alain Delon et Monzon
00:29:02ont été le voir,
00:29:04Alain Delon et Boutier ont été aller le voir
00:29:06à Buenos Aires, en prison.
00:29:08Ça veut dire que, même ça, vous n'avez pas besoin de moi,
00:29:10c'est un mec qui était fidèle
00:29:12en amitié. Et donc,
00:29:14moi je l'ai côtoyé souvent à cette période-là,
00:29:16ce championnat du monde a été
00:29:18historique, c'était
00:29:20plein à craquer, et puis vous savez,
00:29:22Alain Delon, enfin vous le savez mieux que moi,
00:29:24ne faisait pas les choses à moitié, c'était un gros
00:29:26moment de sport, et il est resté
00:29:28fidèle à Jean-Claude Boutier,
00:29:30il est resté fidèle à également
00:29:32Carlos Monzon, mais ce que
00:29:34je voudrais dire aussi, et ça c'est très important
00:29:36de le dire, même si c'est
00:29:38peineuse par rapport à son immense carrière,
00:29:40moi j'ai eu la chance de le côtoyer
00:29:42et de le solliciter dans une autre
00:29:44vie, dans le service public,
00:29:46d'être notre consultant, je veux dire
00:29:48notamment aux Jeux Olympiques d'Atlanta,
00:29:50il a travaillé pour nous, gratuitement,
00:29:52avec le décalage horaire,
00:29:54il était toujours à l'heure pour les interviews,
00:29:56il avait une admiration incroyable
00:29:58pour Djamel Bourras, qui avait été
00:30:00champion olympique, et donc c'est quelqu'un
00:30:02qui était un professionnel,
00:30:04mais hors normes, même à notre petit niveau,
00:30:06quand je lui ai demandé, je lui ai dit
00:30:08Alain, est-ce que tu acceptes d'être notre consultant,
00:30:10il m'a dit oui tout de suite, on avait
00:30:12des rendez-vous avec le décalage horaire, il n'a jamais
00:30:14rien manqué quand on l'appelait d'Atlanta, etc.
00:30:16Et puis surtout,
00:30:18le summum pour moi, c'est la
00:30:20Coupe du Monde de 1998, il avait été invité
00:30:22par Michel Platini,
00:30:24puis il avait déclaré dans la presse
00:30:26que les Français
00:30:28n'encourageaient pas assez l'équipe d'Aimé Jacquet,
00:30:30et donc j'appelle
00:30:32Alain et je lui ai dit, est-ce que tu acceptes
00:30:34aussi d'être notre consultant,
00:30:36toujours gracieusement, pour la Coupe
00:30:38du Monde de 1998, il avait accepté,
00:30:40on avait toujours des rendez-vous
00:30:42réguliers, c'était un mec
00:30:44qui suivait tous les matchs,
00:30:46il savait de quoi il parlait, et puis
00:30:48j'avais fait un pari avec lui, je peux
00:30:50le dire maintenant, c'est que le jour
00:30:52de la finale de la Coupe du Monde de 1998,
00:30:54quand Emmanuel Petit
00:30:56marque le troisième but,
00:30:58j'avais dit à Alain Delon, Alain,
00:31:00si la France mène 3-0, est-ce que tu es capable
00:31:02de venir, parce qu'il était au match,
00:31:04commenter les dernières minutes de ce match
00:31:06pour le service public,
00:31:08et il avait accepté,
00:31:10et je peux vous dire que quand Delon
00:31:12est arrivé, alors que la France menait 3-0
00:31:14en Coupe du Monde de Football,
00:31:16quand Delon est arrivé dans la
00:31:18tribune de presse pour commenter les dernières minutes
00:31:20avec nous, je peux vous dire que d'abord, ça a été
00:31:22l'émeute, les photographes,
00:31:24il venait photographier Delon, et photographier plus
00:31:26les dernières minutes
00:31:28de la Coupe du Monde de Football, mais vraiment,
00:31:30vraiment, je voulais en parler ce matin
00:31:32parce que c'est, et puis, homme de cœur,
00:31:34très fidèle à Bernadette Chirac,
00:31:36sur l'association
00:31:38Plus De Vie, où il s'était beaucoup investi
00:31:40avec Mireille Darc,
00:31:42vraiment, vraiment, c'est un mec
00:31:44exceptionnel à mon niveau,
00:31:46j'ai passé des moments incroyables
00:31:48avec lui, et j'ai beaucoup de peine ce matin.
00:31:50Jacques, on a évoqué un peu l'aspect
00:31:52politique, et ça vous touche, et je le disais,
00:31:54je ne sais pas si vous avez entendu le début de l'émission,
00:31:56mais il avait une vraie passion pour
00:31:58De Gaulle, et évidemment, en vertu de votre histoire,
00:32:00cette passion vous touche.
00:32:02Ça me touche
00:32:04parce qu'on a beaucoup échangé au téléphone,
00:32:06c'est vrai que
00:32:08il était très proche
00:32:10des idées du général De Gaulle,
00:32:12il allait régulièrement,
00:32:14je peux le dire maintenant, il allait régulièrement
00:32:16à Colombais, il parlait régulièrement
00:32:18avec la famille du général
00:32:20De Gaulle, il avait,
00:32:22je ne sais pas si on peut dire ça comme ça,
00:32:24mais il avait beaucoup de photos adouchies
00:32:26du général De Gaulle, c'est vrai que
00:32:28c'est quelqu'un qui
00:32:30aimait le général De Gaulle, qui se rapprochait
00:32:32beaucoup du général De Gaulle,
00:32:34et qui disait toujours,
00:32:36si le général De Gaulle était encore là,
00:32:38qu'est-ce qu'il dirait de notre situation ?
00:32:40C'était quelqu'un qui était
00:32:42d'une élégance incroyable,
00:32:44et moi, à mon niveau, je dis bien mon modeste
00:32:46niveau, par rapport à toute sa
00:32:48carrière, incroyable !
00:32:50Je veux dire, les contacts que j'ai eu avec lui,
00:32:52mais c'était, d'abord c'était
00:32:54très chaleureux, d'abord c'est quelqu'un
00:32:56qui aimait les autres, même s'il avait quelque part
00:32:58l'impression d'être un peu loin de tout le monde,
00:33:00que c'était, c'est une star mondiale !
00:33:02Et moi quand je l'ai appelé, modestement,
00:33:04pour lui dire voilà ce que je voudrais faire,
00:33:06il m'a dit oui tout de suite !
00:33:08Et puis, permettez-moi de penser à Thierry Roland,
00:33:10je veux dire, quand on allait à Douchy,
00:33:12faire des interviews, je veux dire, de Jean-Claude Boutier
00:33:14et d'Alain Delon, je veux dire,
00:33:16avant le championnat du monde, mais c'est comme
00:33:18si on allait chez un ami, un copain,
00:33:20je veux dire, c'était
00:33:22formidable ! Voilà, c'était, alors on va pas dire
00:33:24c'était mieux avant, mais vraiment, ce matin,
00:33:26j'ai beaucoup de peine, parce que nous avons passé
00:33:28avec quelques amis des moments
00:33:30exceptionnels, avec Alain Delon
00:33:32notamment en ce qui concerne le sport.
00:33:34Merci beaucoup Jacques
00:33:36pour ce témoignage
00:33:38et aborder cette facette
00:33:40d'Alain Delon et cette
00:33:42passion bien sûr de la boxe, mais
00:33:44pas que de la boxe, et vous l'avez
00:33:46évoqué très justement, une grande
00:33:48passion pour
00:33:50tous les sports. On va retrouver priorité
00:33:52au témoignage un très
00:33:54proche d'Alain Delon, Norbert
00:33:56Saada, producteur et
00:33:58ami avant toute chose d'Alain Delon.
00:34:00Merci Norbert d'être
00:34:02avec nous dans l'heure des
00:34:04pros. Quelle est votre réaction
00:34:06à la disparition de votre ami ?
00:34:08On s'attendait, hélas, à
00:34:10les proches, vous l'avez entouré jusqu'au
00:34:12bout, on s'attendait à la disparition
00:34:14d'Alain Delon.
00:34:16Je peux
00:34:18simplement vous dire que je suis effondré.
00:34:20On s'y attendait peut-être,
00:34:22mais même quand on s'y attend, c'est
00:34:24quand même un choc.
00:34:2665 années d'amitié,
00:34:28de...
00:34:30de joie,
00:34:32de peine, de difficulté,
00:34:34mais c'est un garçon
00:34:36exceptionnel. D'abord, avant d'être
00:34:38acteur, c'est un monsieur
00:34:40très très fidèle,
00:34:42sans jamais faillir, toujours
00:34:44fidèle dans tous les
00:34:46moments, quels que soient les moments de la vie.
00:34:48C'est pour moi, je le répète,
00:34:50le plus grand acteur de sa génération
00:34:52et
00:34:54ce dernier samouraï, ça me
00:34:56fait quand même beaucoup de peine
00:34:58et je suis
00:35:00très triste, voilà.
00:35:02Que retenez-vous de la
00:35:04carrière de votre ami Norbert ?
00:35:08Il y a tellement de choses à dire.
00:35:10Oui, c'est trop long de raconter
00:35:12toute sa vie, mais
00:35:14il a fait... Tu savais, quand on parle de la carrière
00:35:16de quelqu'un, il faut réfléchir
00:35:18et se dire qu'est-ce qui va rester de lui ?
00:35:20Eh bien, quand on a fait Monsieur Klein,
00:35:22quand on a fait Morgane Pourrie, quand on a
00:35:24fait Le Guépard, quand on a fait
00:35:26tous ses films, ils vont
00:35:28marquer l'histoire du cinéma, alors que
00:35:30il y a plein d'acteurs de la même génération
00:35:32qui ont fait des films dont on ne se rappellera pas
00:35:34dans 30 ans, dans 40 ans, voilà.
00:35:36Et puis,
00:35:38il a eu plein de choses,
00:35:40on a dit plein de choses sur lui,
00:35:42mais je peux vous dire, parce que moi je le connaissais aussi bien
00:35:44en tant qu'ami professionnel,
00:35:46c'est sur un plateau, c'était un garçon
00:35:48spécialement professionnel, qui arrivait
00:35:50toujours à l'heure, qui connaissait son texte
00:35:52et qui savait de quoi on parlait, voilà.
00:35:54Il a tourné,
00:35:56et c'est important, il a tourné avec
00:35:58les plus grands, Norbert, on l'a évoqué
00:36:00depuis le début de notre
00:36:02émission spéciale, Clément, Visconti,
00:36:04Melville, Antonioni, j'en passe,
00:36:06j'en passe et j'en passe et
00:36:08c'est l'une des
00:36:10dernières grandes stars
00:36:12du cinéma français.
00:36:14Oui, je pense
00:36:16que c'est la dernière star du cinéma français
00:36:18et d'ailleurs,
00:36:20je lui rends un hommage le 8 novembre au
00:36:22Pays des Congrès et on ne pourra pas me taxer
00:36:24d'opportunisme, parce que j'ai annoncé
00:36:26déjà il y a trois mois et depuis trois mois
00:36:28tout est en place pour cet hommage
00:36:30et j'espérais seulement qu'il soit vivant
00:36:32à l'époque et malheureusement
00:36:34il ne sera pas là, voilà, c'est tout.
00:36:36Mais il a tourné
00:36:38avec les plus grands et
00:36:40même s'il a fait des choix un peu
00:36:42difficiles à la fin de sa carrière,
00:36:44mais il ne faut
00:36:46pas y penser, parce que ce qui est important,
00:36:48c'est ce qu'il a fait,
00:36:50pas ce qu'il n'a pas fait, mais ce qu'il a fait.
00:36:52Et vous savez, quand j'ai tourné avec
00:36:54Lee Marvin, il avait fait une réflexion à
00:36:56un journaliste qui m'a resté gravé,
00:36:58il avait dit, vous avez fait
00:37:00beaucoup de films, vous avez fait beaucoup
00:37:02des bons et des mauvais,
00:37:04et Lee Marvin lui a répondu, qui était votre idole ?
00:37:06Il a dit, un frère Bogart.
00:37:08Il avait dit, combien de films de Bogart
00:37:10vous ont marqué ? Il a répondu, 5-6.
00:37:12Il a dit, l'important c'est ces 5-6,
00:37:14parce qu'il en a fait 78
00:37:16et c'est important, c'est que ça a fait ces 5-6.
00:37:18Et de long, il a fait
00:37:20une immense carrière, mais il fait plus que 5-6
00:37:22de films inoubliables dans le cinéma français.
00:37:24C'est un immense acteur,
00:37:26c'est quelqu'un de formidable
00:37:28et je suis très peiné
00:37:30et bouleversé.
00:37:32Vous pouvez rester quelques instants
00:37:34encore avec nous, Norbert ?
00:37:36Avec plaisir, oui.
00:37:38On va faire, parce qu'il y a un grand
00:37:40nombre d'hommages, évidemment, depuis
00:37:42ce matin, vous l'imaginez aisément,
00:37:44on va faire un petit tour d'horizon
00:37:46des nouvelles et des dernières
00:37:48déclarations avec vous, Adrien Spiterit.
00:37:50Et on va commencer avec Bruno Le Maire,
00:37:52le ministre de l'Economie et des Finances.
00:37:54Il a déclaré sur le réseau social
00:37:56X, il y a des samouraïs qui sont des princes
00:37:58et des acteurs qui sont un plein
00:38:00soleil. Merci Alain Delon
00:38:02pour cette immense vie de cinéma,
00:38:04une référence évidemment aux célèbres films
00:38:06plein soleil. Autre réaction
00:38:08politique, celle de Julien Odoul,
00:38:10député du Rassemblement National,
00:38:12a déclaré Alain Delon était un homme
00:38:14d'un autre temps, d'un autre siècle, d'une autre
00:38:16dimension, par son charme, son
00:38:18talent, son verbe, son irrévérence
00:38:20et sa liberté. Il incarnait la France
00:38:22que l'on aime, le guépard
00:38:24nous manquera énormément. Là encore, une référence
00:38:26à la cinématographie
00:38:28d'Alain Delon. Enfin, autre réaction, celle de François
00:38:30Asselineau, président de l'UPR.
00:38:32Alain Delon est mort. Plus qu'un acteur,
00:38:34Alain Delon était devenu un symbole
00:38:36en France et dans le monde entier.
00:38:38Il incarnait le séducteur français et la France
00:38:40élégante, puissante, rayonnante des années
00:38:421960-1970.
00:38:44Voilà pour quelques-unes des réactions tirées ce matin.
00:38:46Norbert,
00:38:48Alain Delon et
00:38:50la politique, on voit les réactions
00:38:52avec Adrien Spiteri depuis
00:38:54ce matin, elles viennent de tous les bords
00:38:56politiques.
00:38:58Norbert n'est
00:39:00plus avec nous. Bon,
00:39:02écoutez, on retrouvera peut-être Norbert dans quelques
00:39:04instants. Nathan,
00:39:06Alain Delon et la
00:39:08politique, on voit toutes ces réactions qui
00:39:10s'enchaînent depuis ce matin. Oui, bien sûr,
00:39:12parce qu'Alain Delon, il y avait quelque chose
00:39:14de mythique chez lui, bien sûr,
00:39:16mais j'aimerais revenir sur deux, trois
00:39:18choses qui ont été dites et qui, à mon avis, sont très
00:39:20importantes. La première, c'est qu'il est possible
00:39:22qu'Alain Delon soit la dernière star.
00:39:24Non seulement la dernière star de son époque,
00:39:26ça, c'est logique,
00:39:28mais même la dernière star tout court. Parce qu'Alain
00:39:30Delon, en dehors de ses qualités
00:39:32personnelles, il incarne
00:39:34aussi la manière
00:39:36dont, à une certaine époque,
00:39:38il était possible en France
00:39:40de faire du cinéma et
00:39:42d'avoir un rapport aussi entre
00:39:44les acteurs et le grand public.
00:39:46Une époque qui était
00:39:48prédisposée à construire
00:39:50des mythes autour d'individus
00:39:52pour plein de raisons, mais notamment
00:39:54parce que ce qui fait une star
00:39:56dans le cinéma et en musique aussi,
00:39:58c'est davantage l'opacité que
00:40:00la visibilité. Ce n'est pas tellement d'être mis
00:40:02sous les projecteurs et sous la lumière, c'est bien
00:40:04au contraire de rester, de passer sa vie
00:40:06dans une forme d'ombre,
00:40:08d'être caché, d'être tapis, adouchi
00:40:10ou ailleurs, et puis de temps en temps
00:40:12d'arriver de manière éclatante.
00:40:14Et c'était possible du temps d'Alain Delon,
00:40:16c'était aussi le cas, c'est toujours le cas bien sûr,
00:40:18mais je veux dire de quelqu'un comme Catherine Deneuve,
00:40:20etc. Je me souviens que Catherine Deneuve avait fait une fois cette réflexion
00:40:22de se dire, peut-être qu'après moi et
00:40:24aujourd'hui, il ne sera plus possible d'avoir
00:40:26des stars, qu'on aura des vedettes. Mais ce n'est pas
00:40:28la même chose. Ça c'est la première remarque. La deuxième remarque,
00:40:30c'est qu'Alain Delon, c'était quelqu'un
00:40:32qui n'avait pas fait de formation
00:40:34d'acteur.
00:40:36Il n'a pas fait d'école de théâtre
00:40:38à ma connaissance et
00:40:40qui était en quelque sorte un autodidacte.
00:40:42Mais en fait, même le mot autodidacte ne conviendrait pas
00:40:44parce qu'il ne travaillait pas.
00:40:46Il n'avait pas du tout un rapport scolaire à ses films.
00:40:48Et ça se voit dans tous ses films.
00:40:50Vous savez, Diderot, dans le paradoxe du comédien,
00:40:52il distingue deux types de comédiens.
00:40:54Les comédiens d'intellect et les comédiens d'âme.
00:40:56Les comédiens d'intellect, c'est ceux qui par exemple
00:40:58quand ils jouent un sentiment,
00:41:00ils jouent la peur, ils ne la ressentent pas.
00:41:02Ils ne l'éprouvent pas, mais donc ils ont appris
00:41:04dans une école de théâtre par exemple,
00:41:06à parfaitement simuler ce sentiment
00:41:08alors que juste après le tournage
00:41:10ou la pièce de théâtre, la représentation,
00:41:12ils rentreront chez eux,
00:41:14ils se feront une omelette, ils seront très contents,
00:41:16ils ne sont pas dans cette logique.
00:41:18Et les comédiens d'âme, ce sont ceux qui sont leur rôle.
00:41:20Un exemple parfait, c'est
00:41:22Romy Schneider dans La passante du sans-souci
00:41:24qui précisément est dans des malheurs
00:41:26indicibles et qui ne joue pas
00:41:28quelqu'un de malheureux puisque elle l'est.
00:41:30Et en effet, Alain Delon était un comédien d'âme
00:41:32mais en fait, lui-même
00:41:34disait d'ailleurs qu'il n'était même pas un comédien.
00:41:36Ça veut dire que lui, il ne jouait pas du tout.
00:41:38Il était ce qu'on voyait de lui
00:41:40et c'était ça son rapport au cinéma.
00:41:42Un rapport minimal en quelque sorte.
00:41:44Et puis la dernière chose, et qui est peut-être aussi
00:41:46une des grandes singularités non seulement de Delon mais d'une époque,
00:41:48c'est qu'Alain Delon, non seulement ne vient pas
00:41:50du monde du cinéma, mais il n'était pas
00:41:52du tout prédisposé à ça. Il est arrivé
00:41:54là-dedans par son sens de l'aventure.
00:41:56Il est arrivé à Paris,
00:41:58il a côtoyé des gens un peu
00:42:00du monde de la pègre,
00:42:02etc. Il s'est fait des amis
00:42:04et ce sens de l'aventure,
00:42:06en a fait aussi un personnage romanesque.
00:42:08Et ces trois singularités, c'est pas sûr qu'elles se retrouvent
00:42:10aujourd'hui pour d'autres.
00:42:12Et on va retrouver, merci Nathan, on a retrouvé Norbert
00:42:14Saada, je ne sais pas si vous avez écouté,
00:42:16Nathan Devers, qui disait qu'en fait,
00:42:18il n'était pas fait au départ pour le cinéma
00:42:20Alain Delon.
00:42:22C'est vrai que quand je l'ai connu,
00:42:24il n'y avait pas dans la tête
00:42:26de faire du cinéma.
00:42:28Et puis il a fait une rencontre à Saint-Germain
00:42:30avec Brigitte Aubert,
00:42:32qui était une actrice très connue à l'époque.
00:42:34Et puis par Brigitte Aubert, il a connu
00:42:36Alégré, la femme d'Alégré,
00:42:38qui lui a proposé
00:42:40de faire un film. Il ne voulait pas le faire.
00:42:42Il l'a fait par amie, par sympathie.
00:42:44Le frère d'Alégré
00:42:46lui a dit, viens moi aussi,
00:42:48je voudrais faire un film avec vous.
00:42:50Il en a fait un deuxième et puis ça s'est enchevêtré.
00:42:52Et puis voilà, c'est parti.
00:42:54Mais il n'était pas du tout prévu
00:42:56de faire du cinéma, pas du tout.
00:42:58Norbert, je ne sais pas
00:43:00si vous avez écouté
00:43:02Adrien Spiteri.
00:43:04Vous avez vu toutes les réactions
00:43:06politiques depuis ce matin
00:43:08qui se succèdent
00:43:10et des réactions, ce qui est frappant,
00:43:12de tout bord. Ça veut bien dire quelque chose
00:43:14Norbert Sahada ?
00:43:16Écoutez, quand
00:43:18on a un acteur
00:43:20ou un homme aussi important
00:43:22que lui qui disparaît,
00:43:24c'est normal qu'il y ait des réactions
00:43:26de tout bord.
00:43:28Même si on l'a souvent
00:43:30et beaucoup catalogué
00:43:32comme quelqu'un de droite,
00:43:34il n'empêche qu'il a toujours été
00:43:36droit dans ses bottes et toujours dit ce qu'il pensait.
00:43:38Je pense que quand on est respectable
00:43:40comme lui qui était d'abord avant tout un gaulliste,
00:43:42quand on est respectable comme lui,
00:43:44on ne peut pas dire
00:43:46du mal de lui gratuitement.
00:43:48C'est ça qui est important.
00:43:50C'est un vrai gaulliste. Je peux vous dire
00:43:52que moi qui ai beaucoup vu à une époque
00:43:54avec De Gaulle,
00:43:56c'était une chose sacrée pour lui.
00:43:58Voilà.
00:44:00Norbert Sahada, merci d'avoir accepté
00:44:02de témoigner dans l'heure des pros malgré
00:44:04votre immense peine.
00:44:06La France est triste, les Français sont tristes
00:44:08en ce dimanche.
00:44:10On est tous tristes.
00:44:12J'espère que
00:44:14les gens comprendront
00:44:16qu'Alain Delon,
00:44:18avant tout, c'était sûrement le plus
00:44:20grand acteur de sa génération et un homme
00:44:22formidable et fidèle.
00:44:24On vous embrasse tous.
00:44:26Merci, on vous embrasse aussi Norbert Sahada
00:44:28et merci d'avoir témoigné
00:44:30malgré votre immense peine.
00:44:32Alain Delon et les femmes,
00:44:34ça pourrait être un
00:44:36véritable scénario
00:44:38de film.
00:44:40Elles ont été nombreuses,
00:44:42elles ont marqué sa vie.
00:44:44On va voir tout cela et on poursuit
00:44:46cette édition spéciale dans l'heure des pros.
00:44:48Tout ce que je suis
00:44:50aujourd'hui, tout ce que je fais,
00:44:52tout ce que j'ai entrepris, je l'ai fait pour les femmes.
00:44:54Je n'étais pas prédestiné à faire ce métier,
00:44:56je ne voulais pas le faire.
00:44:58Une femme m'a aimé, elle m'a dit il faut que tu fasses ce film.
00:45:00Je lui ai dit je n'en ai pas envie mais si tu me le demandes
00:45:02pour te faire plaisir parce que je t'aime,
00:45:04je vais faire l'acteur et je suis devenu acteur par amour.
00:45:06Et ce premier film
00:45:08sorti en 1957
00:45:10porte un titre prédestiné
00:45:12Quand la femme s'en mêle d'Yves Allégret.
00:45:14C'est vrai que vous êtes la dactylo de maman ?
00:45:16Oui.
00:45:18Romy Schneider sera son premier grand amour.
00:45:20Il se rencontre en 1958
00:45:22sur le tournage du film Christine.
00:45:24J'ai une vie si compliquée.
00:45:26Leur idée,
00:45:28il va durer cinq ans,
00:45:30même après leur séparation,
00:45:32ils vont former à l'écran un couple mythique.
00:45:34Alain Delon, on le reconnaissait,
00:45:36il aimait les femmes.
00:45:38J'aime les femmes.
00:45:40Assez grandes,
00:45:42belles de toute façon et si possible intelligentes.
00:45:44Nathalie Delon est la seule
00:45:46à avoir épousé l'acteur.
00:45:48Ensemble, ils ont un fils, Anthony,
00:45:50qui suivra plus tard les traces de son père au cinéma.
00:45:52Mais après quatre ans de mariage,
00:45:54le couple divorce.
00:45:56Alain Delon a rencontré Mireille Dark
00:45:58sur le tournage du film Jeff.
00:46:02Mireille Dark va partager la vie d'Alain Delon
00:46:04pendant quinze ans.
00:46:06Ils vont vivre un amour fusionnel
00:46:08qui après leur séparation va se muer en amitié complice
00:46:10et indéfectible.
00:46:12Un grand projet en commun, c'est de vivre
00:46:14le plus longtemps possible tous les deux
00:46:16et de se voir le plus souvent possible.
00:46:20Avec Rosalie Van Bremen, mannequin néerlandais
00:46:22rencontrée en 1987,
00:46:24Alain Delon a deux enfants,
00:46:26Anoushka et Alain Fabien.
00:46:28L'acteur partage avec sa fille la même passion
00:46:30pour le cinéma.
00:46:32C'est avec elle qu'auront lieu ses dernières apparitions publiques.
00:46:34Il a eu à coeur de lui transmettre
00:46:36le flambeau avant de quitter
00:46:38définitivement la scène.
00:46:43Et priorité au témoignage
00:46:45dans cette édition spéciale
00:46:47de l'heure des pros consacrée
00:46:49à la disparition d'Alain Delon.
00:46:51On va retrouver tout de suite Christophe Carrière,
00:46:53grand reporter de Paris Match.
00:46:55On vient de diffuser un reportage
00:46:57d'Alain Delon et les femmes.
00:46:59Ça faisait partie de sa vie,
00:47:01Christophe Carrière.
00:47:03Vous avez montré la femme
00:47:05la plus importante à ses yeux,
00:47:07c'est sa fille, Anoushka.
00:47:09Tout le monde le sait,
00:47:12c'était la femme de sa vie,
00:47:14c'est sûr.
00:47:16Au-delà du séducteur,
00:47:18de l'amoureux,
00:47:20c'est comme tout le monde l'a déjà dit,
00:47:22c'est l'acteur.
00:47:24Ce mec était
00:47:26une légende vivante,
00:47:28au même titre que Belmondo l'était.
00:47:30On savait
00:47:32qu'après la mort de Belmondo,
00:47:34il ne restait plus que deux noms.
00:47:36Maintenant, il n'y a plus deux noms,
00:47:38il n'y a plus Belmondo.
00:47:40Quelle était votre réaction, Christophe,
00:47:42lorsque vous avez appris,
00:47:44tout ce matin,
00:47:46c'est un peu avant 8h,
00:47:48où cette dépêche de l'AFP
00:47:50est tombée suivie d'un communiqué
00:47:52des enfants d'Alain Delon,
00:47:54tous réunis.
00:47:56Ce qui est terrible,
00:47:58c'est qu'on s'y attendait tous.
00:48:00On le savait, on ne va pas se mentir.
00:48:02Et là, c'est concret.
00:48:04C'est concret, c'est tombé.
00:48:07Il faut toujours voir
00:48:09le verre à moitié plein.
00:48:11Ce qui restera,
00:48:13il nous laisse, je crois,
00:48:15la plus belle filmographie
00:48:17qu'un acteur français ait eue.
00:48:19Je ne vois pas quel autre acteur
00:48:21dans le cinéma français
00:48:23a fait autant
00:48:25de chefs-d'oeuvre
00:48:27et a tourné avec autant
00:48:29de tous les plus grands.
00:48:31Vous vous rendez compte,
00:48:33si on regarde sa filmographie
00:48:35jusqu'en 1983,
00:48:37jusqu'à Notre Histoire.
00:48:39Après, il était tellement dégoûté
00:48:41par l'insuccès
00:48:43de Notre Histoire
00:48:45que, du coup,
00:48:47sur le cinéma, il a baissé les bras.
00:48:49Il est revenu au théâtre
00:48:51avec Eric-Emmanuel Schmitt,
00:48:53Philippe Hersen,
00:48:55Eric Assous.
00:48:57Il est venu sur les planches,
00:48:59mais au cinéma,
00:49:01il avait un peu baissé les bras.
00:49:03Que retenez-vous,
00:49:05vous, personnellement,
00:49:07qu'il avait approché de sa carrière ?
00:49:09Quels sont les films
00:49:11qui vous ont marqués ?
00:49:13On l'a vu avec mes invités,
00:49:15en fonction de l'âge.
00:49:17On a tous un film
00:49:19qui nous a marqués,
00:49:21ou deux films, ou trois films.
00:49:23Il y en a beaucoup, bien évidemment.
00:49:25C'est dur comme question.
00:49:27Je me doutais que vous alliez poser
00:49:29cette question à tout le monde.
00:49:31Effectivement,
00:49:33je pense souvent à notre histoire
00:49:35de Bertrand Blier,
00:49:37parce que, pour moi,
00:49:39il s'est fait...
00:49:41Contrairement à ce que disait
00:49:43tout à l'heure Nathan,
00:49:45que j'ai trouvé très intéressant,
00:49:47quand il dit qu'il était
00:49:49ce qui jouait dans notre histoire,
00:49:51il n'est pas ce qui joue, justement.
00:49:53Là, il compose vraiment
00:49:55le rôle d'alcoolique
00:49:57qui se fait larguer,
00:49:59le loser, le loser absolu.
00:50:01C'est la première fois,
00:50:03à ma connaissance,
00:50:05ou peut-être dans Le Professeur
00:50:07de Valerio Giurini,
00:50:09où le personnage était faible.
00:50:11Mais là, dans notre histoire,
00:50:13il a vraiment poussé le curseur très loin.
00:50:15Et qu'il n'ait pas eu César,
00:50:17qu'il n'ait pas été sélectionné
00:50:19à Cannes et tout,
00:50:21j'avais trouvé ça déplorable.
00:50:23Après, dans les rôles
00:50:25qui m'ont marqué,
00:50:27il y a Mort d'un Pourri,
00:50:29qui est un film qu'on devrait revoir
00:50:31aujourd'hui, parce que ça dit
00:50:33énormément de choses
00:50:35sur la politique,
00:50:37sur le fonctionnement même de la finance.
00:50:39Vraiment, c'est un film
00:50:41à redécouvrir.
00:50:43Mort d'un Pourri de Lautner.
00:50:45Après, il y a tous les classiques,
00:50:47il y a...
00:50:49C'est l'émotion.
00:50:51Rocco et ses frères,
00:50:53à Borsalino,
00:50:55Mélodie au sous-sol,
00:50:57je pourrais tous vous les citer.
00:50:59Le Clan des Siciliens, évidemment.
00:51:01On peut en citer 13 à la douzaine.
00:51:03Le Djeipa, enfin bon.
00:51:05C'est une avalanche de films.
00:51:07Dans ceux qui m'ont marqué,
00:51:09oui, Monsieur Klein, qui était absolument merveilleux.
00:51:11Puis tous les Polars,
00:51:13les films policiers.
00:51:15Ce qu'il faut noter aussi,
00:51:17c'est, à la différence de Belmondo,
00:51:19c'est le nombre de films où Delon meurt à la fin.
00:51:21C'est ahurissant.
00:51:23Quand on voyait un film avec Delon,
00:51:25on se disait, à la fin, il va mourir.
00:51:27Et ça ne nous coupait pas.
00:51:298 fois sur 10, il mourra à la fin.
00:51:31Dans les années 70, je parle.
00:51:33Ou les années 60.
00:51:35Je le disais, Christophe,
00:51:37la vie d'Alain Delon,
00:51:39c'est un véritable scénario
00:51:41de film.
00:51:43Et à n'en pas douter,
00:51:45il y aura peut-être un jour un biopic
00:51:47sur la vie d'Alain Delon,
00:51:49tant il y a à raconter sa vie
00:51:51du début jusqu'à la fin,
00:51:53ses rencontres,
00:51:55ses fréquentations,
00:51:57ses femmes dont on a parlé,
00:51:59les affaires aussi.
00:52:01C'était un homme d'affaires.
00:52:03C'était une star internationale.
00:52:05Par exemple, au Japon,
00:52:07c'était une star incroyable.
00:52:09Attendez.
00:52:11N'en parlez même pas au passé.
00:52:13Au Japon, c'est un dieu vivant.
00:52:15D'ailleurs,
00:52:17je ne sais pas s'il y allait souvent.
00:52:19Au Japon, c'est un dieu vivant.
00:52:21Le gars,
00:52:23on ne se rend pas compte.
00:52:25On n'a pas du tout la même culture en France.
00:52:27Mais là-bas, Delon est vénéré au Japon.
00:52:31Effectivement,
00:52:33sa vie, c'est un roman.
00:52:35C'est un truc de fou.
00:52:37Il a tout traversé.
00:52:39Et surtout, il s'est fait tout seul.
00:52:41C'est ça qui est fascinant.
00:52:43Là, franchement,
00:52:45il a su,
00:52:47il a serré...
00:52:49Il y avait Claude Miller,
00:52:51avec qui il n'a jamais tourné d'ailleurs,
00:52:53mais le réalisateur qui avait cette expression
00:52:55qui disait serrer sa chance.
00:52:57En fait, Alain Delon a serré
00:52:59énormément de chances.
00:53:01Il n'en a pas serré qu'une.
00:53:03Quand il voit
00:53:05Visconti,
00:53:07Verneuil, Henri Verneuil,
00:53:09quand il voit
00:53:11tous ces grands metteurs en scène,
00:53:13René Clément et tous les autres,
00:53:15normalement,
00:53:17il sait que c'est important.
00:53:19Quand il prend Plein Soleil,
00:53:21l'anecdote est connue,
00:53:23mais Plein Soleil, normalement,
00:53:25il devait avoir le rôle de Maurice René,
00:53:27tenu par Maurice René.
00:53:29Il devait avoir le rôle du jeune riche,
00:53:31pas du méchant.
00:53:33Et lui va se battre pour avoir le rôle du méchant,
00:53:35de l'arriviste, de l'opportuniste.
00:53:37On connaît la suite.
00:53:39On sait qui a été
00:53:41la vedette du film, finalement.
00:53:45Restez avec nous.
00:53:47Je le disais, Alain Delon avait accepté
00:53:49gentiment l'invitation de Pascal Praud
00:53:51dans l'heure des pros.
00:53:53Il évoquait justement son
00:53:55ami, je dirais son pote,
00:53:57c'était Belmondo.
00:53:59Écoutez ce qu'il disait
00:54:01à Pascal sur son ami,
00:54:03sur son pote Belmondo.
00:54:05Et chacun se demande la nature
00:54:07de la relation qui existait
00:54:09entre vous.
00:54:11C'était entre la rivalité, forcément,
00:54:13c'était pas forcément la réalité
00:54:15parce qu'il n'y avait que nous deux.
00:54:17On tenait le cinéma. Pendant des années,
00:54:19on a tenu le cinéma.
00:54:21Et j'ai dit souvent, je disais à Jean-Paul aussi,
00:54:23notre carrière, c'est un 100 mètres qu'on court tous les deux.
00:54:25Lui, c'est lui qui gagne. Un jour, c'est moi.
00:54:27Un jour, c'est l'autre.
00:54:29Et on a fait toute cette carrière et tout le cinéma français
00:54:31pendant des années, tous les deux.
00:54:33Au-delà de tout et au-dessus de tout le monde.
00:54:35Je le dis pas parce que c'est...
00:54:37Je le dis parce que c'est la vérité.
00:54:39Et on est encore là.
00:54:41Malgré ce qui lui est arrivé,
00:54:43qui m'a rendu malade,
00:54:45cet AVC qu'il a mis
00:54:47dans cet état, c'est affreux.
00:54:49Voilà.
00:54:51C'est fort ce que disait
00:54:53Alain Delon
00:54:55sur son ami Bel Bondo.
00:54:57On a tenu le cinéma
00:54:59tous les deux. Et c'est vrai.
00:55:01Force est de le reconnaître.
00:55:03Ouais, c'est simple. De toute façon,
00:55:05vous savez quand ils font Borsalino,
00:55:07que Delon produit. C'est pour ça que Delon
00:55:09avait...
00:55:11Son nom était marqué une fois de plus sur l'affiche
00:55:13que celui de Bel Bondo. Mais c'est normal.
00:55:15Delon était producteur.
00:55:17Et en fait, sur Borsalino,
00:55:19vous savez, il y a une bagarre entre les deux
00:55:21avant qu'ils deviennent copains, dans le film.
00:55:23Si vous regardez bien
00:55:25la bagarre,
00:55:27ils se donnent exactement le même
00:55:29nombre de coups de poing.
00:55:31Il n'y en a pas un qui en donne plus que l'autre.
00:55:33Et on se demande comment
00:55:35finir cette bagarre. Et en fait, cette bagarre,
00:55:37c'est un coup de poing commun.
00:55:39Les deux s'écroulent au sol.
00:55:41Et du coup, ils se tombent dans les bras.
00:55:43Et ça dit tout, en fait,
00:55:45de la relation
00:55:47entre les deux.
00:55:49C'était match nul.
00:55:51Et c'était des potes.
00:55:53Après, c'était des potes.
00:55:55Quand vous atteignez un tel niveau de notoriété,
00:55:57franchement,
00:55:59il n'y a pas de
00:56:01débat.
00:56:03Il n'y en a pas un qui est
00:56:05meilleur que l'autre. C'étaient deux personnalités
00:56:07totalement différentes.
00:56:09Effectivement, Belmondo,
00:56:11il était beaucoup
00:56:13plus accessible.
00:56:15Et Delon,
00:56:17il était plus froid, effectivement.
00:56:19On le sait.
00:56:21Mais c'était deux
00:56:23stars, effectivement. Il y a eu Delon, Belmondo,
00:56:25et sont arrivés
00:56:27dans la foulée, au milieu des
00:56:29années 70, sont arrivés Devers et Depardieu,
00:56:31qui étaient un
00:56:33nouveau genre de comédien.
00:56:35Voilà.
00:56:37Christian, je ne vais pas vous piéger. Est-ce qu'on sait
00:56:39le nombre de
00:56:41unes que
00:56:43Delon a pu faire
00:56:45chez vous à match
00:56:47tout au long de sa carrière ?
00:56:49Les unes seules ou accompagnées,
00:56:51est-ce qu'on en a ? Parce que ça doit être
00:56:53un nombre incroyable.
00:56:55Je suis désolé, je suppose qu'on n'ait peut-être pas vérifié.
00:56:57Mais j'imagine que c'était
00:56:59très conséquent.
00:57:01Non, honnêtement, je n'ai pas
00:57:03le chiffre, mais
00:57:05évidemment, il y en aura une de plus, là.
00:57:07Là, c'est sûr.
00:57:09Mais il en a fait beaucoup. C'est vrai qu'il en a fait
00:57:11beaucoup.
00:57:13Restez avec nous,
00:57:15si vous le pouvez, évidemment.
00:57:17On a une autre séquence à
00:57:19vous montrer. Il avait une
00:57:21grande amitié, Alain Delon,
00:57:23pour Dalida. Il l'avait
00:57:25évoquée très publiquement
00:57:27chez Pascal dans l'heure des pros.
00:57:29Tout à l'heure, on a écouté une première musique.
00:57:31On va écouter une deuxième
00:57:33chanson. Et sur cette
00:57:35chanson, il y a une jeune femme qui
00:57:37va nous rejoindre, que vous
00:57:39connaissez, qui présente le soir
00:57:41notre émission, entre
00:57:4322h et minuit. C'est Sonia
00:57:45Mabrouk. Une chanson, et Sonia
00:57:47Mabrouk qui rentre sur le plateau.
00:57:59Je te jure.
00:58:11Voilà mon destin,
00:58:13de parler, de parler
00:58:15comme la première fois.
00:58:21Ah, Dali, ça me bouleverse parce que
00:58:23j'ai aimé cette femme terriblement et
00:58:25j'ai tellement souffert quand elle s'est
00:58:27fait partir.
00:58:29Et j'aurais voulu être là
00:58:31pour l'empêcher de partir
00:58:33comme ça. Mais elle avait
00:58:35pris sa décision,
00:58:37elle ne voulait pas aller en arrière, elle voulait s'en aller.
00:58:39Elle est partie très vite.
00:58:41Et je sais pourquoi.
00:58:45Mais ça, c'est un grand souvenir, cette chanson
00:58:47avec elle. Elle a fait le tour du monde dans la chanson.
00:58:49Exceptionnelle chanson. Alors Alain Delon...
00:58:51Chanson italienne à la base.
00:58:53Sonia Mabrouk
00:58:55que vous écoutez. Je sais que vous l'écoutez tous les soirs,
00:58:57Sonia, entre 22h et minuit. Je vous l'ai reproché.
00:58:59Je lui ai dit, écoutez, il faut que j'attende
00:59:0122h pour vous voir. Et après,
00:59:03je ne peux pas me coucher avant minuit, alors quand même.
00:59:05Faites-la commencer plus tôt.
00:59:07Quelle pression.
00:59:0922h. Bonsoir à vous.
00:59:11Bonsoir. Sonia, vous êtes magnifique.
00:59:13Je vous remercie. Je vous le dis.
00:59:15Je vous retourne le compliment.
00:59:17Pour moi, vous êtes la femme du XXIe siècle.
00:59:21Quel personnage, Christophe
00:59:23Carrière. Moment d'émotion.
00:59:25On voit Alain Delon
00:59:27qui a beaucoup de mal à retenir
00:59:29ses larmes en évoquant son ami.
00:59:31Et puis la petite séquence avec
00:59:33Sonia Mabrouk.
00:59:35C'est tout Delon, tout ça, en fait.
00:59:39On a perdu Christophe.
00:59:41On va retrouver Christophe Carrière dans quelques
00:59:43instants. Je ne vous ai pas trop
00:59:45donné la parole, mes amis qui
00:59:47sont sur ce plateau. Maxime, par exemple,
00:59:49on a dit beaucoup de choses. On a évoqué
00:59:51différents aspects de la vie d'Alain Delon.
00:59:53Je le disais, c'est un
00:59:55excellent scénario pour un biopic.
00:59:57La vie de Delon.
00:59:59Il avait toujours le mot qu'il faut.
01:00:01Je ne savais pas cette séquence
01:00:03pour Sonia Mabrouk.
01:00:05C'est magnifique. Vous êtes la femme du XXIe siècle.
01:00:07Quelle classe, quelle élégance.
01:00:09Elle a dû être vraiment touchée.
01:00:11Il est en train de pleurer.
01:00:13Il est au bord des larmes en évoquant Dalida.
01:00:15Sonia arrive.
01:00:17Changement.
01:00:19Je trouve que cette séquence qui s'est produite
01:00:21dans l'émission de Pascal
01:00:23est le symbole de la personnalité.
01:00:25Parce que la beauté rayonne toujours.
01:00:27On évoquait Dalida à travers
01:00:29la nostalgie, à travers ce souvenir.
01:00:31Au même moment arrive Sonia Mabrouk.
01:00:33Tout de suite, il a un mot agréable pour Sonia.
01:00:35Parce que la vie, la beauté doit toujours rayonner dans l'esprit
01:00:37d'Alain Delon.
01:00:39Depuis tout à l'heure, on parle de sa personnalité.
01:00:41On parle de son âme.
01:00:43Nathan disait que c'est un acteur d'âme.
01:00:45C'est un gamin qui a tenu la guerre.
01:00:47Quand je dis gamin,
01:00:49c'est à propos. A 20 ans, il était en Indochine.
01:00:51Il a passé ses 20 ans dans une cellule.
01:00:53Parce que 2-3 jours avant, il avait fait une bêtise
01:00:55avec une Jeep.
01:00:57C'est cette génération de gens
01:00:59qui nous quittent aujourd'hui.
01:01:01Les anciens de la FNACA. On les connaît tous dans nos villages.
01:01:03Ceux qui ont fait la guerre d'Algérie.
01:01:05Ceux qui ont fait aussi la guerre d'Indochine.
01:01:07Et qui ont vécu une jeunesse
01:01:09difficile, dure.
01:01:11Parce qu'ils ont été embarqués à 20 ans
01:01:13pour aller faire la guerre en Tunisie, au Maroc,
01:01:15en Indochine. Ils ont connu des heures
01:01:17terribles après avoir vu leur père
01:01:19et leurs parents vivre la Seconde Guerre mondiale.
01:01:21Ils sont revenus en France
01:01:23dans les années 60.
01:01:25Ils avaient un besoin de vivre.
01:01:27Et en fait, c'est ce gars
01:01:29qui a connu la même vie qu'eux,
01:01:31à savoir Alain Delon, qui les a fait rêver
01:01:33à travers ses films.
01:01:35C'est pour ça qu'il n'est pas
01:01:37qu'un acteur du cinéma
01:01:39qu'on verrait de loin, comme le sont beaucoup d'acteurs.
01:01:41C'est un gars qui a vécu
01:01:43comme eux et qui a su offrir
01:01:45le bonheur à une génération qui en avait
01:01:47besoin après toutes les heures
01:01:49tragiques qu'elle a connues. Donc c'est sûr qu'aujourd'hui
01:01:51je pense à toute cette génération,
01:01:53celle de mon grand-père, qui a
01:01:55entre 85 et 95 ans et qui
01:01:57doit pleurer en regardant la télé parce qu'elle se dit
01:01:59voilà, il y a
01:02:01notre page qui se tourne.
01:02:03On fait un tour d'horizon des
01:02:05réactions et elles sont nombreuses.
01:02:07Vous l'imaginez aisément depuis
01:02:09ce matin. Alain Delon
01:02:11est mort. On l'a appris
01:02:13il y a un petit peu avant
01:02:158h ce matin par une simple dépêche
01:02:17de quelques mots de l'AFP
01:02:19suivi d'un communiqué
01:02:21des enfants d'Alain Delon. On fait un tour
01:02:23d'horizon des dernières déclarations,
01:02:25des dernières réactions avec vous Adrien Spiteri.
01:02:27Oui Thierry, les réactions à la politique
01:02:29se multiplient depuis ce matin. On va
01:02:31commencer avec Bruno Retailleau, le président
01:02:33du groupe Les Républicains au Sénat.
01:02:35Alain Delon aimait la France et les Français
01:02:37aimaient Alain Delon. Ils laissent
01:02:39pour toujours des chefs-d'oeuvre et le souvenir
01:02:41du dernier monstre sacré du cinéma.
01:02:43Autre réaction, celle de
01:02:45Florence Portelli, la vice-présidente
01:02:47de la région Île-de-France et des Républicains.
01:02:49Si je devais conseiller un film dans la filmographie
01:02:51incroyable d'Alain Delon,
01:02:53peut-être que le chef-d'oeuvre qu'il souligne
01:02:55le plus, sa complexité, son
01:02:57ambiguïté, son envie de jouer
01:02:59des anti-héros et son talent.
01:03:01Et Monsieur Klein, le génie, repose souvent
01:03:03sur des félures. Et on termine avec
01:03:05Florian Philippot, l'ancien député européen.
01:03:07Alain Delon est parti,
01:03:09un prince du cinéma français.
01:03:11Toutes mes condoléances à ses proches.
01:03:13Voici quelques-unes des réactions
01:03:15ce matin, Thierry.
01:03:16Merci beaucoup et on vous retrouve tout au long
01:03:18de cette émission pour suivre toutes ces réactions.
01:03:20Et nous sommes toujours avec Christophe Carrière.
01:03:22Christophe, j'aimerais vous faire réagir
01:03:24dans quelques instants sur toutes ces réactions
01:03:26politiques, quelles que soient. Mais je ne sais pas
01:03:28si vous avez pu voir
01:03:30la petite séquence
01:03:32chez Pascal,
01:03:34où on voit Delon
01:03:36en train de pleurer, évidemment,
01:03:38son ami, on le voit profondément
01:03:40touché. Et puis arrive
01:03:42Sonia Babrouk et
01:03:44Changement. Et je trouve que cette séquence
01:03:46c'est Delon.
01:03:48C'est totalement
01:03:50Delon.
01:03:52J'en profite parce qu'on a été
01:03:54coupé, ça c'est
01:03:56les aléas de la technologie moderne.
01:03:58Mais Marc Brincourt,
01:04:00photographe
01:04:02et historien, on va dire,
01:04:04de Paris Match, m'a envoyé un message
01:04:06là, 52 couvertures
01:04:08à Lundeland, 52.
01:04:10Une année complète. C'est pas mal quand même.
01:04:12C'est beaucoup.
01:04:14Vous vous rendez compte,
01:04:16ça fait une année, c'est comme si pendant
01:04:18chaque semaine pendant une année, on avait
01:04:20sorti une couve à Lundeland.
01:04:22Donc voilà, vous avez
01:04:24le chiffre, je ne l'avais pas. Merci, merci
01:04:26de cette précision.
01:04:28Votre réaction effectivement sur cette petite séquence
01:04:30chez Pascal. Moi j'adore
01:04:32parce que là, vous avez vu
01:04:34le changement d'attitude.
01:04:36C'est-à-dire, il est très ému.
01:04:38On lui parle
01:04:40d'Alida, tout ça, ok.
01:04:42Et d'un coup, c'est pas possible. Pardon, je suis désolé.
01:04:44On vous entend, ça va revenir.
01:04:46Voilà, pardon.
01:04:48Et d'un coup, il devient
01:04:50tout de suite
01:04:52irrésistible. Comment vous pouvez
01:04:54résister ? Vous avez vu comment
01:04:56il l'aborde, la plombe qu'il a ?
01:04:58Enfin, c'est
01:05:00Delon dans toute sa splendeur.
01:05:02Vraiment dans toute sa splendeur.
01:05:04Christophe, vous avez vu,
01:05:06on vous diffuse
01:05:08toutes les réactions politiques.
01:05:10Elles sont très nombreuses
01:05:12depuis ce matin
01:05:14et le fait marquant, c'est
01:05:16qu'elles deviennent de tous bords.
01:05:18De tous bords. Ça veut dire quelque chose.
01:05:20Ça a un sens.
01:05:22Excusez-moi, mais qui va oser
01:05:24aujourd'hui
01:05:26émettre des réserves
01:05:28sur Alain Delon ?
01:05:30Bon courage.
01:05:32Franchement, bon courage. Je sais pas
01:05:34qui va oser.
01:05:36Parce que franchement, politiquement,
01:05:38on sait qu'il est à droite.
01:05:40OK, donc il a eu
01:05:42effectivement...
01:05:44Il était toujours à droite, mais
01:05:46mais républicain. Profondément
01:05:48républicain.
01:05:50Bon, alors des fois, il a fait
01:05:52effectivement des sorties, mais
01:05:54c'est vrai qu'il a eu des sorties
01:05:56on va dire sociétales
01:05:58ou politiques qui étaient
01:06:00gênantes
01:06:02pour utiliser un doux euphémisme.
01:06:04Mais
01:06:06c'est un homme qui appartenait
01:06:08aux années 60-70.
01:06:10Donc il avait
01:06:12son... Comment dirais-je ?
01:06:14Son mode
01:06:16intellectuel, son raisonnement
01:06:18intellectuel était celui d'un homme des années
01:06:2060-70.
01:06:22Des vieilles valeurs
01:06:24pas forcément bonnes d'ailleurs
01:06:26mais dans l'absolu.
01:06:28Franchement, c'était un
01:06:30grand admirateur, on le sait, c'était
01:06:32un amoureux de Raymond Barre
01:06:34qui n'était pas...
01:06:36On peut pas dire que Raymond Barre
01:06:38était un mec
01:06:40d'extrême droite ou quoi. C'était vraiment
01:06:42un vrai républicain, Raymond Barre.
01:06:44Merci
01:06:46beaucoup d'avoir accepté
01:06:48notre invitation. Juste une
01:06:50petite dernière question. Quand
01:06:52il se faisait photographier, comment
01:06:54je suppose qu'il avait une exigence
01:06:56folle, évidemment,
01:06:58Alain Delon, donc il était
01:07:00très trop dans
01:07:02la démarche ? Ou
01:07:04est-ce qu'il était facile à photographier ?
01:07:06Écoutez, je n'ai jamais
01:07:08assisté à un shooting photo
01:07:10d'Alain Delon, donc je ne
01:07:12saurais vous dire comment il se comportait
01:07:14à ce moment-là. En revanche, je sais que...
01:07:18Et on vous a perdu.
01:07:20Merci en tous les cas, Christophe
01:07:22Carrière. Autre témoignage,
01:07:24priorité au témoignage, vous le devinez
01:07:26aisément, on va retrouver tout de suite Isabelle
01:07:28Morini-Bosque. Bonjour
01:07:30Isabelle, merci d'avoir accepté...
01:07:32Merci d'avoir accepté notre invitation
01:07:34dans l'ordre et pro. Première
01:07:36question basique, quelle est votre
01:07:38réaction lorsque vous avez appris
01:07:40tôt ce matin la disparition
01:07:42d'Alain Delon, ma chère Isabelle ?
01:07:44Eh bien moi, ça me
01:07:46fait beaucoup de peine.
01:07:48Je ne suis pas complètement avec ce que Christophe
01:07:50vient de dire sur le plan politique,
01:07:52je ne pense pas du tout que c'était un homme des années 70,
01:07:54je pense que c'était un homme de tout temps
01:07:56et ensuite,
01:07:58ça me fait de la peine, notamment
01:08:00sur le plan humain, parce que je pense que profondément,
01:08:02souvent, on l'a
01:08:04mal jugé. Oui,
01:08:06beaucoup de choses qu'on a dites sur lui étaient vraies,
01:08:08le caractère ombrageux,
01:08:10le fait de rien
01:08:12laisser passer, mais c'était aussi un homme
01:08:14qui pouvait tellement avoir des
01:08:16gestes sensibles, quand Mireille
01:08:18d'Arc a perdu son deuxième mari, Pierre Barret,
01:08:20il s'est tout de suite précipité à son
01:08:22chevet, mais vraiment pour être auprès d'elle,
01:08:24c'est un homme qui venait d'être nommé patron de TF1 et qui est mort
01:08:26d'un cancer foulroyant. Il était là.
01:08:28Quand Mireille d'Arc, évidemment, il a
01:08:30toujours été là. Ensuite, même si leurs rapports
01:08:32ont été souvent mouleux,
01:08:34c'est Delon et c'est Mireille d'Arc.
01:08:36Et ensuite, quand Nathalie
01:08:38Delon a été atteinte
01:08:40d'un cancer et qu'elle a eu une fin
01:08:42douloureuse et très
01:08:44maligne, Anthony Delon
01:08:46était évidemment là, son fils, mais lui
01:08:48était là aussi, présent.
01:08:50D'abord parce qu'en tant qu'homme, c'était
01:08:52douloureux pour lui. En tant qu'ancien amant,
01:08:54c'était douloureux pour lui. Et puis aussi
01:08:56parce que c'est un homme profondément
01:08:58qui souffrait du temps,
01:09:00qui était sensible à la notion de temps
01:09:02qui passe et que
01:09:04ça a été triplement douloureux
01:09:06pour lui. Et c'est aussi
01:09:08un homme, on ne l'a pas beaucoup dit,
01:09:10qui prenait beaucoup de fourrure. Moi, j'en ai pris
01:09:12beaucoup avec lui. Ce n'était pas moi,
01:09:14évidemment, qu'il connaissait mieux.
01:09:16Mais on avait des liens de camaraderie
01:09:18et à un moment donné, on s'est beaucoup vus
01:09:20quand il était très ami, je crois qu'il l'est toujours
01:09:22d'ailleurs, avec le producteur Cyril Viguier.
01:09:24Et donc, on se voyait souvent tous les trois.
01:09:26On déjeunait ensemble assez souvent
01:09:28et il riait beaucoup. Et il riait
01:09:30aussi parfois de l'image
01:09:32qu'il donnait aux gens.
01:09:34Moi, je vous dis, un jour, je raconte souvent, mais
01:09:36il a eu un différent avec Christophe Fondelat sur RTL
01:09:38qui considérait, et je pense
01:09:40à juste titre, que Christophe l'avait
01:09:42diffamé en le traitant de raciste.
01:09:44Ce qu'il n'avait pas supporté.
01:09:46Lui qui a vécu avec une jeune femme noire.
01:09:48Donc, c'était totalement injuste.
01:09:50Il en avait pris ombrage. Il l'avait
01:09:52dit sur notre antenne en demandant
01:09:54à ce qu'on ne dise pas pourquoi il voulait intervenir.
01:09:56Et quand il est intervenu à l'antenne, il a fracassé
01:09:58onglet, s'en est ensuivi une brouille
01:10:00longue durée. Et un jour, il a accepté
01:10:02de venir, de revenir, au nom du pardon
01:10:04des offenses. Et il s'est tenu derrière
01:10:06Christophe, qui ne voyait pas ce qui se passait dans son
01:10:08dos et qui était très perturbé.
01:10:10Et d'un seul coup, Delon se penche vers lui et fait
01:10:12Boum ! Et là, Christophe a fait
01:10:14un bond de 5 mètres. Et Delon
01:10:16a dit, il n'a pas de grande offense
01:10:18qu'il ne se pardonne. Allez camarade, il va taper
01:10:20dans le dos. C'était fini. Et quand on est sorti,
01:10:22il m'a dit, j'ai été drôle. Non, il a été
01:10:24surpris. Vous qui l'avez vu en face,
01:10:26vous avez bien vu, il était surpris.
01:10:28Et il était aussi de geste de tendresse.
01:10:30Je vous dis, je l'ai raconté tout à l'heure, mais
01:10:32ça, on ne l'a pas beaucoup rappelé.
01:10:34Quand Vanessa Paradis s'est plantée au César
01:10:36en annonçant le mauvais lauréat
01:10:38du meilleur acteur cette année-là.
01:10:40Et Delon, il est allé après au Fouquet's.
01:10:42Elle était désespérée. Elle n'arrêtait
01:10:44pas de pleurer. Elle était inconsolable.
01:10:46Et lui, il était en train de discuter
01:10:48avec moi d'un différent qu'il avait
01:10:50avec quelqu'un et qu'il avait beaucoup amusé.
01:10:52Il dit, je lui fais peur et tout. Et là,
01:10:54il voit Vanessa Paradis en train de pleurer.
01:10:56Il dit, non, mais ce n'est pas possible de laisser cette petite
01:10:58dans ce milieu de requin. Et il va
01:11:00vers elle et il lui dit, mais Vanessa,
01:11:02on a tous dit des conneries. Moi-même, j'en ai dit beaucoup.
01:11:04Et donc, il a été vraiment très tendre
01:11:06avec elle et très paternel. Pour le coup,
01:11:08il n'y avait rien de dégueuillard.
01:11:10Isabelle, vous évoquez le fait
01:11:12qu'il se moquait
01:11:14de lui-même. Et Amine Elbaïe,
01:11:16qui est l'un de mes invités
01:11:18ce matin, nous rappelait que
01:11:20l'un de ses films favoris, c'était Astérix.
01:11:22Et dans cette scène, on se souvient de cette scène
01:11:24où ça résume parfaitement
01:11:26ce que vous venez de dire. Il jouait son
01:11:28propre rôle.
01:11:30Avez-moi ? Avez-moi, évidemment.
01:11:32César est grand. César, nan, nan, nan, nan.
01:11:34Avez-César. Avez-moi.
01:11:36Et donc, moi, là aussi,
01:11:38il m'en avait parlé. Il m'a dit, qu'est-ce que vous avez retenu
01:11:40du film Astérix ? Un film que je n'ai pas aimé, d'ailleurs, moi.
01:11:42Astérix, j'ai dit, ben moi, la scène
01:11:44avec vous, évidemment, c'est celle qui m'a fait
01:11:46le plus rire. Il m'a dit, ah, vous savez,
01:11:48vous avez bien entendu. Avez-moi.
01:11:50Quand je dis, avez-moi. Et on continuera à dire
01:11:52que Delon parle de Delon à la troisième
01:11:54personne, ce qui pouvait effectivement
01:11:56arriver, mais il avait des moments
01:11:58où il se comportait parfaitement normalement. Et vous avez
01:12:00dit à Christophe la question sur les
01:12:02shootings, les photos. Moi, je me
01:12:04souviens avoir tourné, a fait un petit déjeuner
01:12:06avec lui pour VSD et Michel Serrault,
01:12:08qui n'était pas le moins un déconneur de la bande,
01:12:10au Plaza Athénée.
01:12:12Et ils ont pris un fou rire,
01:12:14mais un fou rire et moi avec. On a fait tomber
01:12:16la nappe du petit déjeuner avec tout ce qui avait dessus.
01:12:18On n'arrivait pas à se relever. Et
01:12:20moi, j'ai éparu dans VSD
01:12:22toute une série de photos de ce
01:12:24moment-là, de cette anecdote, et
01:12:26où il est de profil, pas nécessairement
01:12:28avantagé et avantageux.
01:12:30Il n'a jamais dit ne passez pas ces photos.
01:12:32Il n'a jamais gueulé après parce qu'on les
01:12:34avait passées. Il pouvait appeler.
01:12:36Moi, il n'a jamais demandé à relire un papier, mais
01:12:38il pouvait appeler après quand un détail lui avait
01:12:40déplu. Mais là, ces photos-là
01:12:42où il riait de bon cœur et tout.
01:12:44Et après, on en avait rediscuté. Il m'a dit, vous ne m'avez pas
01:12:46demandé mon autorisation pour passer les photos. J'ai dit,
01:12:48mais vous ne m'avez pas dit qu'il ne fallait pas les passer.
01:12:50Et il m'a dit, non, mais c'était drôle.
01:12:52Vous avez vu, on rit. Les gens
01:12:54continueront à dire que je ne ris jamais.
01:12:56Pour moi, c'était ça essentiellement
01:12:58Alain Delon, même si
01:13:00moi, je ne sais plus ce qu'il m'a dit un jour.
01:13:02Moi, ce n'est pas du tout le genre
01:13:04de physique que j'aimais outre mesure.
01:13:06Mais il était,
01:13:08il pouvait douter, y compris
01:13:10de son physique. Je ne sais plus,
01:13:12quelqu'un m'a dit ce matin, mais il avait
01:13:14peur. Est-ce qu'il souffrait d'être
01:13:16beau ? Non, il ne souffrait pas d'être beau.
01:13:18Il ne pouvait pas être con.
01:13:20Mais en revanche,
01:13:22il ne voulait pas, quand il a fait des films
01:13:24hors de sa zone de confort, c'est-à-dire où il n'était
01:13:26ni flic, ni voyou, et qu'il a joué, par
01:13:28exemple, Trotsky ou un garagiste bouclé
01:13:30et tout, il souffrait. Et moi, il m'a dit,
01:13:32vous voyez, on me reproche
01:13:34de jouer toujours les mêmes rôles. Mais quand je ne
01:13:36joue pas les mêmes rôles, on me refuse.
01:13:38On dit, qu'est-ce qui lui prend, Delon ?
01:13:40Il veut fuir son image.
01:13:42Donc, c'est vrai que de ce point de vue-là, il se sentait
01:13:44plutôt coincé.
01:13:46Et quand il a joué au théâtre, j'ai cherché une adhésion.
01:13:48On me disait, j'ai bien joué. Vous trouvez que j'ai bien joué ?
01:13:50Il m'a dit que oui, donc j'ai bien joué.
01:13:52Mais voilà.
01:13:54Isabelle, quel regard portait-il
01:13:56sur la nouvelle
01:13:58génération d'acteurs ?
01:14:00Parce qu'on a évoqué
01:14:02évidemment le lien indissociable
01:14:04Belmondo-Delon, Delon-Belmondo.
01:14:08On voyait, on passait un extrait
01:14:10d'une interview de Delon où il disait
01:14:12on tenait le cinéma,
01:14:14Belmondo et moi, on tenait le cinéma.
01:14:16Est-ce qu'il sentait
01:14:18un héritier,
01:14:20un de ses héritiers dans le cinéma
01:14:22français actuel ? Parce qu'il vous en a parlé,
01:14:24vous qui le connaissez bien.
01:14:26Moi, je l'ai moins vu sur la fin, honnêtement.
01:14:28Après la maladie, ce n'était pas quelqu'un qui cherchait
01:14:30beaucoup à se montrer. D'ailleurs, il l'a dit
01:14:32au César. C'est le premier
01:14:34hommage à titre posthume de mon vivant.
01:14:36Donc, ça le disait tout. Il l'avait
01:14:38un peu décroché. Je pense qu'il y a des gens comme
01:14:40Vincent Cassel et tout, qui l'admiraient.
01:14:42Je ne pense pas, je ne suis pas absolument
01:14:44certaine qu'il pensait qu'il avait un héritier,
01:14:46même s'il avait gardé sa capacité
01:14:48d'admirer. Et moi, j'ai eu le sentiment,
01:14:50mais ceux de la dernière époque pourraient vous le dire mieux que moi,
01:14:52j'ai eu le sentiment qu'il avait un peu
01:14:54décroché du cinéma français.
01:14:56Ce qui est certain, c'est que oui,
01:14:58il pensait que Belmondo et lui,
01:15:00c'étaient les deux derniers grands faubles.
01:15:02Je vous dis d'ailleurs, moi, un jour, dans une interview,
01:15:04il m'a dit que quand Belmondo partira,
01:15:06je me sentirais définitivement bien seule.
01:15:08C'est là qu'après Parussion,
01:15:10Belmondo m'a envoyé un petit bristol pour me dire
01:15:12« Vous remercierez Alain d'avoir donné l'ordre des départs. »
01:15:14Ce qu'il avait fait rire quand je l'avais fait remarquer.
01:15:16Mais quelque part, oui, je pense,
01:15:18et je pense surtout qu'il pensait que le cinéma
01:15:20avait été injuste avec eux.
01:15:22Et c'est vrai que vous parliez politique.
01:15:24C'est clair que...
01:15:26Christophe a parlé de Raymond Barre.
01:15:28Oui, c'est surtout, sans doute,
01:15:30qu'il était fou de Raymond Barre.
01:15:32C'est vrai que lui, il appréciait Raymond Barre
01:15:34comme beaucoup de gens du centre droit,
01:15:36mais c'est surtout le général de Gaulle
01:15:38qu'il avait viscéralement dans la tête
01:15:40et partout, d'où le film de René Clément.
01:15:42Mais je pense sincèrement
01:15:44qu'Élui et Belmondo ont souffert
01:15:46de l'attitude du cinéma
01:15:48français avec Élui
01:15:50encore plus que Jean-Paul,
01:15:52parce que Jean-Paul était social et sociable
01:15:54et qu'Alain était
01:15:56beaucoup plus ombrageux.
01:15:58Je pense que oui, ça, il en a souffert.
01:16:00Et quand on parlait de son absence de docilité,
01:16:02quand il admirait,
01:16:04il se laissait parfaitement conduire et diriger.
01:16:06La preuve avec Jacques Doré,
01:16:08Borsalino et La Piscine.
01:16:10C'est très bien expliqué pour des histoires d'égo
01:16:12sur Borsalino, la meuf de Jacques Doré,
01:16:14vous le direz mieux que moi.
01:16:16Et il avait vraiment une grande capacité d'admiration.
01:16:18Par exemple, avec Bardot,
01:16:20Pascal qui s'entend très bien
01:16:22avec Brigitte, c'est elle
01:16:24qui aime profondément Alain,
01:16:26elle aimait profondément Alain
01:16:28et c'est quelqu'un qui sait
01:16:30à quel point il pouvait être sensé
01:16:32et sensible. Et quand Christophe dit
01:16:34que c'est un homme des années 70,
01:16:36là pour le coup, j'adore Christophe,
01:16:38je pense que c'est un homme de tout temps.
01:16:40Mais effectivement,
01:16:42quand on est passéiste,
01:16:44quand on aime la grandeur de la France,
01:16:46quand on aime ça, on peut passer pour dater.
01:16:48C'est clair.
01:16:50Isabelle, j'ai deux questions
01:16:52à vous poser avant
01:16:54de vous libérer.
01:16:56Quelles sont, question piège évidemment,
01:16:58les 2-3 films
01:17:00qui vous ont marqué
01:17:02et quels sont les principaux traits de caractère
01:17:04que vous retenez d'Alain Delon ?
01:17:06Moi, le premier film,
01:17:08qui n'était pas né quand il est sorti,
01:17:10le film de Visconti,
01:17:12Le Guépard.
01:17:14Effectivement, c'est un guépard,
01:17:16plus un fuma qu'un guépard,
01:17:18mais lui, la bataille de testostérone
01:17:20entre lui et Burt Lancaster
01:17:22et Visconti quelque part, mais hors antenne.
01:17:24Et puis comme en plus,
01:17:26moi je suis comme lui, j'aime les reconstitutions
01:17:28historiques, ça m'a beaucoup plu.
01:17:30Un film dont j'ai oublié
01:17:32le titre, un western,
01:17:34Ursula André, je ne sais plus,
01:17:36qui m'avait beaucoup marqué,
01:17:38parce que le western, ça lui va très bien
01:17:40et que moi j'aime le western.
01:17:42J'ai oublié le titre, je l'avoue,
01:17:44et moi j'ai beaucoup aimé
01:17:46Rocco et ses frères, et j'ai beaucoup aimé
01:17:48tous les films où il a un amour des grands anciens,
01:17:50que ce soit Annie Gérardot,
01:17:52que ce soit Gabin,
01:17:54et j'ai adoré La Veuve Coudère.
01:17:56J'ai adoré La Veuve Coudère, l'amour entre cet homme
01:17:58jeune et cette dame
01:18:00qui a déjà un peu le corps alourdi,
01:18:02qui gère le quotidien et qui finit par
01:18:04le fasciner. Alors La Piscine,
01:18:06curieusement, non, pas du tout, c'est un film qui m'a gonflée.
01:18:08J'ai trouvé que long, pesant,
01:18:10chiant et tout, mais en revanche,
01:18:12l'amour entre Delon et, curieusement,
01:18:14Maurice Renet, parce que c'était
01:18:16vraiment deux très grands amis,
01:18:18et que pour moi, le fait
01:18:20qu'il ait imposé la distribution,
01:18:22Romy Schneider mais aussi Maurice Renet,
01:18:24ça c'est quelque chose que je trouvais très
01:18:26touchant sur Delon, ce sens de l'amitié.
01:18:28Si on ne le trahissait pas,
01:18:30des fois, il se trompait
01:18:32sur la notion de trahison. Des fois, ce n'était pas
01:18:34des trahisons, mais comme il prenait tout en grand,
01:18:36c'était pour lui une trahison
01:18:38et puis il finissait par se réconcilier.
01:18:40Mais ce n'est pas
01:18:42La Piscine, Borsalino, j'ai aimé parce que
01:18:44c'est vraiment un grand exercice d'acteur
01:18:46et qu'il y a la musique et qu'il y a tout. C'est une forme
01:18:48de perfection pour moi. Alors, ce n'était pas mon
01:18:50acteur préféré, je l'avais dit d'ailleurs.
01:18:52Quand je lis ce qu'il m'avait dit, j'ai dit non, mais moi,
01:18:54Delon n'est pas mon acteur préféré.
01:18:56Mais j'ai dit, mais j'aime beaucoup l'homme.
01:18:58Et il m'a dit, vous êtes gonflé,
01:19:00vous, quand même. Et donc,
01:19:02on ne se voyait pas
01:19:04beaucoup. On se voyait de loin en
01:19:06loin. À une période, on s'est plus vus qu'à
01:19:08d'autres. Puis après, il y a eu la maladie.
01:19:10Alors, c'est vrai qu'il a...
01:19:12Je comprends les reproches qu'on lui
01:19:14fait. Je pense que beaucoup de gens
01:19:16et que le cinéma français lui-même sont
01:19:18passés à côté de l'homme. Et l'absence
01:19:20totale au César, très souvent,
01:19:22le montre. C'est un milieu qui est assez...
01:19:24Le milieu du cinéma français,
01:19:26pardon, peut être très égocentré.
01:19:28Et lui, qu'on reprochait d'être égocentré,
01:19:30en a souvent été la victime.
01:19:32Même quand il avait de bonnes intentions.
01:19:34Et je le disais, on n'a pas oublié, lorsqu'il reçoit
01:19:36cette palme avec sa fille
01:19:38Anoushka, où là, évidemment,
01:19:40il y a un moment d'échange
01:19:42formidable. Et Klissov disait
01:19:44très justement, sans doute, que la femme de
01:19:46sa vie, c'était sa fille Anoushka.
01:19:48Et personne n'a oublié ce moment d'émotion.
01:19:50Et peut-être que pour lui, évidemment,
01:19:52il souffrait de ne pas avoir été reconnu à sa juste
01:19:54valeur par son milieu, le monde du cinéma,
01:19:56comme vous l'avez très justement
01:19:58souligné. Deux-trois traits de caractère, une image
01:20:00peut-être, et je vous libère Isabelle.
01:20:02Que retenez-vous
01:20:04d'Alain, en deux-trois mots, évidemment ?
01:20:06Le sens de la formule.
01:20:08Le sens de la formule ?
01:20:10Le sens de la formule d'Alain Delon.
01:20:12On avait ri comme des bossus à une phrase de Dietrich,
01:20:14toute con, mais qui moi me fait rire, qui disait
01:20:16ce qui m'embête le plus, en fait, qui a piqué ma femme,
01:20:18c'est que maintenant il va voir de quoi je me contentais.
01:20:20Ça le faisait rire comme un bossu.
01:20:22Et il le raconte un jour devant moi
01:20:24à quelqu'un qui ne rit pas, qui ne percute pas,
01:20:26qui ne comprend pas, il me dit, ben voilà.
01:20:28Ça c'est la différence entre ceux qui ont de l'esprit
01:20:30et ceux qui n'en ont pas.
01:20:32Et sa phrase au César, dont vous venez justement
01:20:34de le citer, quand il dit
01:20:36je suis content de recevoir
01:20:38cet hommage posthume de mon vivant,
01:20:40c'est vrai qu'il y avait
01:20:42quelque chose de ça. Ne loupons pas Alain Delon
01:20:44avant qu'il soit trop tard,
01:20:46et donc il l'a pris pour ce que c'était
01:20:48tout en étant immensément ému,
01:20:50et il aimait beaucoup Thierry Frémaux,
01:20:52donc ça c'est le patron du Festival de Cannes,
01:20:54donc il était content,
01:20:56mais ça dit quand même bien ce que ça veut dire.
01:20:58Et moi, ce qu'on a très peu souligné,
01:21:00c'est effectivement son esprit
01:21:02et le sens de la formule,
01:21:04et ça, ça le prouvait.
01:21:06Allez, juste avant de vous quitter,
01:21:08redites-moi la phrase qu'il prononçait
01:21:10dans Astérix.
01:21:14Avez-moi !
01:21:16Voilà, merci.
01:21:18Merci d'avoir accepté
01:21:20notre invitation.
01:21:22Et vous savez que je suis
01:21:24à Evien, au bout il y a un antiquaire
01:21:26assez connu,
01:21:28mais juste des amateurs, pas célèbres,
01:21:30et Delon allait régulièrement traverser,
01:21:32régulièrement, pour y acheter des œuvres d'art.
01:21:34Voilà, c'est tout.
01:21:36Merci pour votre témoignage
01:21:38cher Isabelle, c'est toujours un plaisir
01:21:40de vous avoir en tous les cas.
01:21:42Prions été encore
01:21:44au témoignage, et je m'en excuse
01:21:46auprès de lui, Jean-Pierre Castaldi
01:21:48est avec nous, je crois, au téléphone.
01:21:50Bonjour
01:21:52Jean-Pierre Castaldi, merci encore
01:21:54une fois d'avoir accepté de témoigner
01:21:56dans l'heure des pros,
01:21:58et mes excuses pour ce retard, évidemment.
01:22:00Quelle est votre réaction, Jean-Pierre ?
01:22:06J'aimerais m'adresser
01:22:08à peu près tout ce que je pense.
01:22:10Moi, je rajouterais deux choses.
01:22:12Une grande fidélité en amitié.
01:22:14J'ai des souvenirs
01:22:16émouvants personnels, d'abord,
01:22:18elle a parlé de la veuve coudère,
01:22:20avec Simone Signoret qui est, comme chacun le sait,
01:22:22la grand-mère de mon fils Benjamin,
01:22:24et qui a toujours
01:22:26aimé énormément Alain Delon,
01:22:28vous voyez, même des gens
01:22:30d'opinions politiques différentes sont capables
01:22:32de s'entendre sur une chose sur le cinéma.
01:22:34Elle disait toujours que c'était un grand acteur,
01:22:36c'est un immense acteur,
01:22:38et elle a tout résumé, le métier a été un peu injuste
01:22:40avec lui, on n'a pas cité
01:22:42M. Klein, on n'a pas cité
01:22:44encore d'autres films un peu moins connus,
01:22:46où il est remarquable, quand même,
01:22:48et puis, le guépard, pas besoin de le dire,
01:22:50il avait une beauté animale,
01:22:52il avait
01:22:54une présence incroyable,
01:22:56c'était un grand,
01:22:58c'est vraiment un grand,
01:23:00et avec leur amitié,
01:23:02en réalité, on a mis
01:23:04des disputes entre eux, bon, c'est des histoires d'égo,
01:23:06peut-être, mais moi, je me souviendrais
01:23:08toujours d'une chose, c'est que quand Yves Allégret
01:23:10est mort,
01:23:12à 11h du soir,
01:23:14il est arrivé avec son chauffeur,
01:23:16il est resté une heure avec Yves Allégret,
01:23:18qui lui avait donné sa chance au cinéma,
01:23:20et vous voyez, donc, il avait une mémoire,
01:23:22il n'avait pas la mémoire courte,
01:23:24et quand il aimait les gens, il les aimait,
01:23:26s'il ne les aimait pas, c'est que, comme disait Isabelle,
01:23:28il n'aimait pas être trahi,
01:23:30c'est un homme de parole,
01:23:32c'est un homme de parole, un homme d'honneur,
01:23:34alors après, on n'aime pas la façon
01:23:36où il a mis son honneur, ça, ça regarde les gens,
01:23:38mais moi, je trouve qu'Alain Delon
01:23:40était, dans la vie,
01:23:42un monsieur
01:23:44très agréable, très sincère,
01:23:46très direct et très honnête, voilà.
01:23:48Depuis ce matin, les adjectifs
01:23:50se succèdent,
01:23:52c'est le dernier monstre sacré,
01:23:54Jean-Pierre, du cinéma français,
01:23:56qui a rejoint
01:23:58le monde des étoiles, ce matin ?
01:24:00Oui, comme disait Jean-Pierre,
01:24:02c'était un monstre sacré, je ne sais pas,
01:24:04beaucoup l'ont dit ce matin, peut-être que
01:24:06il en reste quelques-uns, une ou deux,
01:24:08quelques actrices comme ça, Sophie Marceau,
01:24:10qui restent comme ça,
01:24:12mais c'est vrai qu'ils appartiennent à une époque
01:24:14qui révolue, quoi, voilà.
01:24:16Il n'y a plus que chez les Américains,
01:24:18où on a encore des Brad Pitt, des gens comme ça,
01:24:20vous voyez ce que je veux dire, mais Alain Delon,
01:24:22c'est vrai que le cinéma
01:24:24l'a boudé, alors que ça n'a pas été
01:24:26très juste, quoi, voilà.
01:24:28Il a énormément marqué
01:24:30le cinéma,
01:24:32est-ce que j'ai retenu tout à l'heure, lorsqu'on diffusait
01:24:34un extrait d'interview
01:24:36chez Pascal Pro,
01:24:38il disait qu'avec
01:24:40son ami Belmondo,
01:24:42tous les deux, Delon, Belmondo, tenaient
01:24:44le cinéma français.
01:24:46Ils l'ont tenu pendant 15 ans, en tous les cas,
01:24:48ça c'est sûr, c'est grâce
01:24:50à eux qu'on travaillait, ils ont donné
01:24:52la chance à beaucoup de gens,
01:24:54dans les petits rôles, ils choisissaient
01:24:56les futurs acteurs,
01:24:58comme Gabin, d'ailleurs,
01:25:00comme tous ces gens-là, ils s'entouraient,
01:25:02ils essayaient de donner leur chance aux jeunes,
01:25:04et ils avaient la faculté de nous mettre
01:25:06à l'aise, parce que jouer devant Alain Delon,
01:25:08ou jouer devant Jean Gabin,
01:25:10c'était quand même
01:25:12impressionnant, quoi,
01:25:14vraiment, parce que c'était la perfection,
01:25:16l'exigence, le sérieux,
01:25:18et
01:25:20chasser le naturel et revient au galop,
01:25:22ils étaient un naturel époustouflant,
01:25:24époustouflant, ils jouaient
01:25:26plus la comédie, ils étaient la comédie.
01:25:28Que retenez-vous
01:25:30d'Alain Delon,
01:25:32Jean-Pierre ?
01:25:34Question difficile, évidemment,
01:25:36tant son œuvre est grande.
01:25:38Ce que je retiens,
01:25:40c'est qu'en France, très souvent,
01:25:42on découvre les gens une fois qu'ils sont morts,
01:25:46j'entends que des louanges,
01:25:48il y aurait peut-être son hommage
01:25:50au Festival de Cannes, ça me faisait penser
01:25:52à Annie Gérardot au César, quand elle a pleuré,
01:25:54le cinéma m'a
01:25:56quitté, mais moi je n'ai jamais
01:25:58cessé de l'aimer, il était un peu comme Gérardot,
01:26:00c'était des gens comme ça
01:26:02qui ont donné beaucoup
01:26:04au cinéma et on l'a un petit peu
01:26:06oublié. Et comment vous expliquez
01:26:08justement, je ne dirais pas ce
01:26:10manque d'intérêt, parce que ce n'est pas le terme,
01:26:12ce n'est pas la formulation exacte,

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