Avec Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (l’IRIS), spécialiste de l'Iran
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##ON_DECRYPTE_LE_MONDE-2024-04-06##
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00:00 On en parle avec notre invité qu'on accueille avec plaisir sur Sud Radio. Thierry Coville, bonjour à vous.
00:05 Oui, bonjour.
00:07 Bienvenue. Vous êtes chercheur à l'Institut des Relations Internationales et Stratégiques.
00:11 C'est l'IRIS. Vous êtes en particulier spécialiste de l'Iran.
00:14 Cette semaine, Israël a frappé un consulat iranien en Syrie,
00:19 coûtant la vie à plus d'une dizaine de gardiens de la révolution iranien.
00:24 Colère dans les rues iraniennes.
00:26 D'abord, qui étaient ceux qui ont été tués par Israël ?
00:29 Est-ce qu'on le sait aujourd'hui ?
00:31 Oui, il y avait deux commandants de la force Al-Rhodes.
00:38 La force Al-Rhodes, c'est la force qui s'occupe des opérations extérieures des passes d'Aran.
00:43 Il faut savoir qu'en Iran, il y a deux armées.
00:44 L'armée traditionnelle et l'armée plus idéologique, qui c'est les passes d'Aran.
00:48 Et dans cette armée, il y a la force Al-Rhodes.
00:50 Qui est l'élite.
00:52 Et donc, on dit, ce qu'on entend en Iran, c'est que c'est quand même,
00:55 notamment Zahedi, je crois que c'était un commandant,
00:57 c'est la personnalité du niveau le plus élevé depuis la perte de l'Iran,
01:03 depuis la mort du général Soleimani il y a quatre ans.
01:05 Donc, c'est une perte significative pour l'Iran.
01:07 Alors, est-ce qu'il y a un risque ?
01:09 On a entendu la foule en Iran, scandée et appelée à la vengeance contre Israël.
01:15 Est-ce qu'il y a un risque de riposte tyrannienne contre Israël ?
01:18 Et si oui, sous quelle forme ?
01:20 Oui, alors il faut d'abord dire quand même que c'est un consulat qui a été touché.
01:24 Donc, je lisais CNN aujourd'hui, le département d'état américain,
01:27 quand un consulat ou une ambassade est attaquée, c'est comme le pays est attaqué.
01:31 Alors, pour répondre à votre question, jusqu'à présent,
01:34 vous auriez posé cette question il y a une semaine,
01:36 la stratégie iranienne, c'est de mettre la pression sur Israël
01:40 à travers ses alliés dans la région.
01:42 Le Hezbollah au Liban, les Houthis au Yémen.
01:44 Le Hezbollah, les milices en Syrie et en Irak.
01:47 Mais, de dire, attention, s'il n'y a pas un cessez-le-feu à Gaza,
01:52 il y a un risque d'extension du conflit dans la région.
01:55 Mais de ne pas franchir une ligne rouge pour ne pas rentrer en conflit direct avec Israël,
01:59 parce qu'il pense que ce sera un conflit avec les États-Unis.
02:01 Est-ce que la situation est en train de changer en Iran ?
02:04 Alors, honnêtement, il faut être modeste, parce que moi je suis à Paris.
02:07 Ce que j'entends de Téhéran, c'est à plusieurs éléments.
02:10 Alors, effectivement, il ne faut pas se tromper,
02:12 les gens qui manifestent en Iran, c'est vraiment les soutiens du régime.
02:16 C'est 20-30% de la population, etc., qui sont effectivement idéologiquement,
02:19 qui sont à fond derrière le régime.
02:21 Donc, il y a une colère des soutiens du régime.
02:24 J'entendais des déclarations à la télévision, ils disaient que ça commence à suffire,
02:26 parce que ce n'est pas la première attaque d'Israël contre des Hauts-Gradés,
02:31 des Pasdaran, notamment en Syrie.
02:34 Donc, il y a une idée, il y a un moment, on n'en peut plus, ça suffit, on ne fait rien, etc.
02:38 Il y a un autre, comment dire, type de…
02:41 Ce qu'on commence à entendre, c'est qu'il faut faire quelque chose
02:45 pour dire à Israël qu'il faut qu'il s'arrête.
02:47 Donc, effectivement, alors, une fois que j'ai dit ça, je ne sais pas si cette stratégie,
02:51 ce qu'on appelle en Iran de "passion stratégique", va changer,
02:54 mais c'est vrai qu'on est à un moment clé.
02:55 - Question, autre question.
02:57 Pourquoi Israël, cette semaine, a frappé un consulat iranien,
03:00 ce qui est en quelque sorte une escalade,
03:02 sinon pour susciter…
03:04 Est-ce qu'on peut dire que le gouvernement israélien cherche l'escalade lui-même avec l'Iran ?
03:08 - Alors, il faut d'abord reconnaître, moi j'ai assez de problèmes avec l'Iran,
03:11 je ne suis pas spécialiste d'Israël, donc je pense qu'il faudrait mieux
03:14 vous poser cette question d'Israël.
03:16 Ce qu'on entend dire, mais c'est du côté iranien,
03:19 vous savez, c'est un affrontement depuis longtemps entre Iran et Israël,
03:22 alors qui a raison, qui a tort, c'est compliqué,
03:24 mais ce qu'on entend dire du côté iranien, et ils le savent,
03:27 ils pensent que le gouvernement israélien, c'est un peu ce que vous dites,
03:30 fait tout pour entraîner l'Iran dans la guerre,
03:33 pour élagir le conflit de Gaza, et notamment de faire en sorte
03:37 qu'il y ait un conflit direct entre l'Iran et les États-Unis.
03:40 Ce qu'on entend dire aussi, c'est que les dirigeants iraniens,
03:43 ils en sont conscients de ça.
03:45 Donc on en revient à ce que je disais tout à l'heure,
03:47 comment réagir d'un autre côté sans tomber dans un affrontement direct,
03:51 notamment avec les États-Unis.
03:53 Sachant qu'il serait déplacé de faire passer le régime iranien
03:55 pour une victime dans cette affaire, dans la mesure où son appui,
03:58 notamment au Hamas, est documenté, ce depuis plusieurs décennies.
04:01 Thierry Covillet, ce sera ma dernière question.
04:03 Excusez-moi, je n'ai pas complètement entendu.
04:07 Est-ce qu'on peut dire que l'Iran continue de soutenir le Hamas
04:10 dans sa guerre contre Israël ?
04:12 Oui, mais écoutez, ce qui s'est passé le 7 octobre,
04:15 quelque part, il y a cet axe de résistance dont on parle beaucoup en Iran.
04:20 Sur le plan idéologique, il y a une opposition totale, militaire.
04:25 Il y a des attaques contre l'existence d'Israël
04:27 des dirigeants iraniens depuis la Révolution, ça c'est clair.
04:30 Ils ont construit patiemment cet axe de résistance qu'on découvre maintenant
04:34 avec l'idée d'une opposition radicale et d'un soutien radical aux Palestiniens.
04:40 Ils soutiennent, ils financent le Hamas, ils l'entraînent.
04:43 Ça, effectivement, vous avez raison, c'est documenté.
04:45 D'un autre côté, ce qu'on ne sait pas, parce que les services secrets,
04:47 même américains, israéliens, pour l'instant, moins dit qu'ils ne savaient pas.
04:51 On ne sait pas si l'Iran a été directement impliqué
04:56 dans la planification et l'exécution de l'attaque du 7 octobre.
04:59 Effectivement. Merci beaucoup pour cet éclairage, Thierry Covillet,
05:02 chercheur à l'Institut des Relations Internationales et Stratégiques Spécialistes de l'Iran.