Vahina Giocante part pour la dernière fois à la rencontre d'enfants de criminels. Cette fois, elle tente de comprendre comment des proches ont réussi à maintenir le lien avec leurs parents emprisonnés. Elle se rend notamment à San Diego pour un entretien avec les enfants de Jeremy Stewart, condamné à 70 ans de prison. Elle retrouve aussi Sorida, la fille de Robin Ogdeb, condamnée à quatre ans de prison pour trafic de drogue. L'actrice s'envole ensuite pour San Francisco pour rencontrer Marianna, la fille d'un homme condamné à perpétuité pour un meurtre commis lors d'une altercation dans un bar.
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00:00 Comment peut-on vivre quand on est fils ou fille de criminels ?
00:05 - Je m'en ai beaucoup manqué, mais j'ai appris à grandir avec ce vide.
00:11 - Je ne voulais pas que quelqu'un pénètre chez moi.
00:13 J'avais toujours peur qu'une de mes copines subisse quelque chose.
00:17 Leurs pères ou leurs mères ont commis des crimes, des viols et même des génocides.
00:22 Leur nom est devenu impossible à porter.
00:28 - La plupart des enfants de meurtriers célèbres
00:33 ont probablement un tas de problèmes pour vivre une vie normale
00:39 et ne pas être identifiés comme un tueur potentiel.
00:42 Parce que c'est ce que la plupart des gens pensent.
00:45 Un enfant de tueur a le potentiel pour devenir tueur lui-même.
00:50 Vaina Gioconte a rencontré ses enfants de criminels.
00:56 Parfois, elle a dû aller très loin pour les retrouver.
00:58 Ils ont accepté de lui raconter leur calvaire.
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01:34 - Ils sont jeunes, mais ils garderont ce souvenir toute leur vie.
01:37 Ils n'oublieront jamais le jour où leur père ou leur mère est parti en prison.
01:42 Ils n'oublieront jamais l'absence,
01:44 les visites au parloir et la honte devant le regard des autres.
01:49 Comment peut-on grandir et se construire quand on est fils ou fille de criminel ?
01:56 (Musique)
01:59 David et Heatherly sont les enfants de Jeremy Stewart,
02:03 condamnés à 70 ans de prison.
02:05 - Heatherly n'était même pas née.
02:08 Quand la police est arrivée, Jeremy était en train de bercer David.
02:12 Il était malade ce jour-là.
02:15 Ils l'ont arraché de ses bras.
02:17 David a tout vu.
02:19 (Musique)
02:22 - Sorida est la fille de Robin Hogden, condamnée à 4 ans de prison.
02:27 - Quand ma mère est partie, j'étais seule, j'étais en mode survie.
02:32 Et du coup, j'ai vendu de la drogue, je me suis prostituée, j'ai volé.
02:38 J'ai tout fait.
02:40 - Mariana est la fille de Zachary Van Der Horst, condamnée à la prison à vie.
02:46 - Dans cet horrible endroit, on se dit que ce sont des animaux, des monstres,
02:51 mais ce sont des hommes avec des familles.
02:54 Depuis que je suis dans le ventre de ma mère, je vais en prison.
02:59 (Cri d'un chien)
03:02 - Vahina Giocante est actrice.
03:05 Marraine de l'association Asmae, fondée par soeur Emmanuelle,
03:09 elle consacre une partie de sa vie à la lutte contre l'enfance défavorisée.
03:13 - Tu veux un peu ? - Oui !
03:16 - A 33 ans, Vahina a déjà une longue carrière derrière elle.
03:21 99 francs, belle amie de Claude Chabrol ou secret défense.
03:27 Mais un jour, une rencontre marque sa vie.
03:31 A l'occasion du tournage de "Mon père, Francis le Belge",
03:34 elle rencontre Sylvie Borel, la fille du célèbre gangster.
03:38 Une rencontre qui lui donne l'envie d'en savoir plus
03:42 sur la vie de ses enfants de criminels.
03:45 C'est à San Diego, en Californie,
03:50 que Vahina va rencontrer les enfants d'un homme qui s'appelle Jeremy Stewart.
03:56 Le 11 mars 2010, Jeremy est arrêté.
04:00 C'est la 3e fois qu'il a affaire à la justice,
04:03 et aux Etats-Unis, la récidive est sévèrement punie.
04:07 C'est la loi "Three strikes and you are out",
04:11 un terme hérité des règles de baseball
04:14 et qui pourrait se traduire par "trois coups et vous êtes hors jeu".
04:18 Il est condamné à 70 ans de prison
04:21 sans aucune possibilité de libération conditionnelle.
04:25 - Entrez, entrez !
04:43 Désolée, les chiens sont excités.
04:45 Heureux de vous voir. J'espère que vous aimez les chiens.
04:49 Elisabeth est la mère de Jeremy Stewart.
04:52 C'est elle qui élève ses enfants.
04:54 - Ça, c'est Everly.
04:56 Elle a mis sa robe préférée.
04:58 Ça, c'est David. Il est un peu timide.
05:03 Jeremy a cambriolé une maison, mais c'était son 3e délit.
05:10 Il avait un casier.
05:12 Son propre frère avait appelé la police quand il a volé une carte de crédit.
05:16 Le 2e délit, c'est quand Jeremy est allé chercher son ami,
05:20 qui avait sa voiture en panne à 2h du matin.
05:23 Il ne savait pas que cet ami transportait des armes.
05:26 Du coup, quand ils l'ont arrêté, il était mort de trouille.
05:29 Les policiers lui ont dit que s'il ne coopérait pas,
05:32 ils allaient emmener sa fiancée enceinte,
05:35 qu'elle ferait de la prison et qu'elle perdrait son bébé.
05:38 Il a coopéré et a admis avoir été au courant pour les armes
05:41 et n'avoir rien dit à la police.
05:44 Et il a appris sa 2e peine de prison à ce moment-là.
05:48 Au final, il a reçu une peine de 25 ans par cambriolage,
05:52 avec une peine additionnelle de 10 ans pour chacun des 2 autres délits.
05:56 Mais ils ont ajouté les termes "jusqu'à perpétuité".
05:59 Lorsqu'on ajoute ces termes-là,
06:01 ça veut dire qu'ils peuvent le garder aussi longtemps qu'ils le veulent.
06:05 Difficile pour Elisabeth de concevoir que son fils soit emprisonné à vie
06:09 pour ce qu'elle considère comme des erreurs de jeunesse.
06:13 C'était que des cambriolages.
06:16 Enfin non, je sais qu'il a commis un délit.
06:19 Je crois en la justice et je pense qu'il doit faire de la prison.
06:23 Mais la perpétuité, c'est ridicule.
06:26 Mon fils sera en prison pendant 56 ans encore.
06:32 J'aurai 104 ans.
06:36 Heather Lee, elle, sera une femme.
06:39 Elle n'a que 2 ans.
06:41 Et pareil pour David.
06:43 Ils seront vieux avant que leur père sorte si cette loi ne change pas.
06:48 Ça me brise le coeur.
06:51 Donc les enfants n'ont rien connu d'autre en fait ?
06:55 Ils ont grandi dans cette situation ?
06:59 Oui, ils n'ont rien connu d'autre.
07:02 David avait 1 an, je crois, quand Jérémy est allé en prison.
07:07 D'ailleurs, quand ils sont venus l'arrêter, Jérémy tenait David dans ses bras.
07:12 L'arrestation de Jérémy a bouleversé la vie de toute la famille.
07:18 Rachel, sa femme, a sombré dans la main.
07:22 - C'est ton père ? - Oui.
07:25 Privées de leur père, les enfants gardent le lien avec des photos et quelques souvenirs.
07:31 - Où est le père ? - Là.
07:34 - Où est le père ? - Là.
07:37 - Où est le père ? - Là.
07:40 Tu vois ton père de temps en temps ?
07:43 - Tu vois ton père ? - Oui.
07:46 - Quand as-tu vu ton père la dernière fois ? - Dans la prison.
07:51 - Dans la prison ? - Oui.
07:54 - Quand est-ce que tu l'as vu la dernière fois ? - Il y a quelques mois.
07:58 - Il y a quelques mois ? - Le 30 mars.
08:01 David avait un an quand son père a été arrêté.
08:05 Quand la police est arrivée, Jérémy était en train de bercer David.
08:12 Il était malade ce jour-là. Ils l'ont arraché de ses bras. David a tout vu.
08:18 Quelques mois plus tard, Rachel a sombré dans la drogue.
08:24 Elle vient de sortir de cure de désintoxication.
08:28 J'étais très fière d'elle et j'avais la garde des enfants.
08:32 D'également, j'en suis responsable.
08:35 Si les enfants semblent avoir retrouvé le sourire, ce n'était pas le cas au début de l'incarcération de leur père.
08:55 Les premiers mois, je n'arrivais pas à les endormir. C'était terrible.
08:59 Les nuits étaient agitées, je ne pouvais pas les laisser seuls.
09:03 Même en allant travailler, ils étaient très angoissés que je ne revienne pas.
09:07 De grosses névroses d'abandon.
09:10 - Ils ont des cauchemars ? - Oui, beaucoup au début. Hein, David ?
09:16 - Ils rêvaient de quoi ?
09:22 - Ils rêvaient que la police venait le prendre aussi.
09:26 Mais ça va mieux. Il sait que sa grand-mère l'aime et s'occupe bien de lui.
09:31 N'est-ce pas, David ?
09:33 Aujourd'hui est un jour important dans quelques minutes.
09:38 Les enfants vont rendre visite à leur père derrière les barons.
09:42 Ils ne pourront pas les accompagner.
09:45 Quelques heures plus tard, retour à la maison.
09:50 Un retour toujours très difficile pour les enfants.
09:55 - Je veux voir mon père.
09:58 - Je veux voir mon père.
10:01 - On y va en une semaine, d'accord ?
10:04 - Non.
10:21 - C'est le repos. - Non.
10:24 - Oui. - Non !
10:26 - Ne vous en faites pas.
10:28 La petite aisorlée reste inconsolable.
10:31 C'est toujours très intimidant.
10:34 La fouille, les scanners...
10:37 Faire montant la queue avec les enfants...
10:40 Vous devez être là une demi-heure en avance.
10:43 Si vous arrivez en retard, pour peu que le garde soit de mauvaise humeur, il ne vous laissera pas rentrer.
10:49 David, l'autre fois, pour l'anniversaire de Jérémy, il la regardait en disant...
10:54 - Tu reviens quand ? Tu repars avec nous, cette fois-ci ?
10:58 Ils ne comprennent pas encore.
11:01 Le monde de la prison a profondément marqué David et Heatherley.
11:10 Jusque dans leur jeu, comme ici, dans l'escalier.
11:14 - Cette barrière a été enlevée il y a quelques mois.
11:17 - On l'a enlevée parce que les enfants ont grandi maintenant.
11:20 C'était une sécurité pour qu'ils ne montent pas à l'escalier.
11:23 Avec la barrière, ils jouaient à la prison.
11:26 David enfermait sa petite sœur en lui disant qu'elle était en prison.
11:29 Ça me fendait le cœur.
11:31 Les enfants s'y connaissent plus en cellule, en prison, en garde.
11:34 Ils peuvent vous donner les différents types de policiers.
11:37 Ceux qui mettent des contraventions et ceux qui vous empêchent de sortir de prison.
11:41 - OK, plus de barrière, on va s'en débarrasser.
11:44 - Pourquoi on va s'en débarrasser ?
11:47 - Parce que c'est vieux.
11:49 - Et pourquoi encore ?
11:51 - Qu'est-ce que tu faisais avec la barrière ?
11:54 - Tu jouais à quoi ?
11:56 - À la prison ?
11:58 - Et maintenant c'est fini.
12:01 - Plus de prison.
12:03 - Tu veux venir avec moi ?
12:13 - Tu veux me ramener à la maison ?
12:16 - Tu sais, c'est un très long vol en avion.
12:19 - Je te manquerais ?
12:21 - Non, je ne te manquerais pas.
12:24 - Tu penses pouvoir te débarrasser de ta grand-mère comme ça ?
12:27 - Je te kidnappe.
12:41 - Je te vois bientôt.
13:05 - C'était assez troublant et touchant de voir comme les enfants étaient très agités
13:13 dès que la grand-mère parlait de son fils.
13:18 C'est vraiment comme s'ils avaient trop entendu.
13:22 Elle ne voulait pas que je regarde les photos de son père ni de sa mère.
13:26 Il y avait vraiment quelque chose...
13:29 Ils étaient très agités.
13:32 C'était une espèce de douleur qui n'est pas du tout exprimée.
13:37 Ils sont super attachants ces enfants.
13:41 - Je suis ressortie de là.
13:44 Jusqu'ici, ça me travaille.
13:47 Vraiment.
13:49 C'est une situation, un cas d'une telle injustice.
13:54 C'est juste fou.
13:57 Ces enfants ont clairement besoin d'un soutien.
14:02 D'un soutien thérapeutique.
14:06 Je les ai trouvés toujours très agités quand on en parlait.
14:11 Même si ce sont des enfants qui sont pleins de vie.
14:15 Je ne me fais pas plus de soucis que ça.
14:20 Mais je me dis qu'il faut quand même...
14:24 Il faut quand même veiller, quoi.
14:28 Et ouais, je suis ressortie de là...
14:32 Un peu bouleversée, quoi.
14:35 - Vahina n'en a pas fini avec les émotions.
14:39 Elle a rendez-vous à Shaushila, à 250 km au sud de San Diego,
14:44 avec une jeune femme qui a connu la descente aux enfers
14:48 après l'incarcération de sa mère.
14:51 - Hello!
14:53 - Hi! You made it! Hi!
14:55 - Cette jeune femme s'appelle Sorida.
14:58 - Hi! - Nice to meet you.
15:00 - Ravie de vous rencontrer.
15:02 Tu peux fermer la porte, s'il te plaît?
15:05 - Thank you! - Merci.
15:07 - Sorida était encore une enfant quand sa mère a été arrêtée.
15:11 (Bouffement)
15:14 - Ma mère est allée en prison quand j'étais petite fille.
15:21 La première fois, j'avais 7 ou 8 ans.
15:24 Je m'en souviens parce que pour mes 8 ans,
15:27 elle m'avait envoyé une carte de vœux avec plein de numéros 8 dessus.
15:31 C'est à peu près tout ce dont je me souviens de cette époque, d'ailleurs.
15:36 La période qui m'a le plus affectée, c'était en 2003.
15:40 J'allais avoir 15 ans et elle est allée en prison.
15:44 C'était très difficile.
15:46 Son absence, devoir être avec nos beaux-pères,
15:49 qu'il ait en famille d'accueil.
15:52 La première fois, quand vous aviez 8 ans,
15:57 vous réalisiez ce que ça voulait dire?
16:02 - Non, pas du tout.
16:05 Je savais juste que ma mère était partie.
16:08 Mais quand j'allais la voir,
16:10 je comprenais mieux en voyant les grosses portes,
16:13 les officiers de police.
16:15 Quand j'ai vu tout ça de mes yeux, j'ai mieux compris.
16:19 - Elle vous parlait?
16:21 Elle vous expliquait?
16:23 - Non, non, pas du tout.
16:25 Elle disait seulement "maman a fait des bêtises,
16:28 elle reviendra bientôt et sois sage en attendant."
16:31 - Les bêtises dont parle sa mère, c'est un trafic de drogue
16:35 pour lequel elle est arrêtée et incarcérée une première fois en 1996
16:40 et une deuxième fois en 2012.
16:43 Elle va passer 4 ans en prison.
16:46 - La deuxième fois, vous étiez adolescente,
16:49 ça devait être...
16:51 - Oui, c'était très différent.
16:53 Je ne savais pas ce que c'était le sexe
16:56 ou ces choses-là de la vie.
16:59 J'ai dû lire tout ça dans les livres.
17:02 Beaucoup de choses que traversent les ados avec leur petite fille.
17:07 - Vous avez eu des enfants?
17:10 - Beaucoup de choses que traversent les ados avec leurs parents,
17:14 on n'a pas eu ça, même les engueulades.
17:17 Les choses de la vie, ça a commencé au moment où elle est partie.
17:21 C'était très dur.
17:23 - Cette fois-là, Sorida s'est vraiment rendue compte de la situation.
17:27 C'est à ce moment-là que sa descente aux enfers a commencé.
17:31 - Quand ma mère est partie, j'étais seule, j'étais en mode survie.
17:36 Et du coup, j'ai vendu de la drogue, je me suis prostituée, j'ai volé.
17:42 J'ai tout fait.
17:44 Quand je vous dis que j'étais en mode survie,
17:47 c'était littéralement de la survie.
17:50 J'étais en foyer, je n'avais pas d'habits, je n'avais pas de chaussures, rien.
17:54 On ne s'occupait pas de moi, je ne voyais pas de médecin.
17:57 Je me suis dit que je pouvais mieux m'occuper de moi-même que le système.
18:04 Les placements en foyer ne conviennent pas à Sorida.
18:07 Elle fugue et vit sa vie au jour le jour.
18:11 Mais ce qu'il lui manque le plus, c'est la présence de sa mère.
18:15 - Vous avez réagi comment ?
18:18 Vous étiez en colère ?
18:20 Vous étiez frustrée de ne pas la voir à vos côtés ?
18:26 - J'étais très déprimée pendant plusieurs semaines.
18:30 - Vous ne pouviez pas la voir, lui téléphoner ?
18:33 - En tout, j'ai dû la voir 4 fois sur les 4 ans où elle est partie.
18:37 - Pourquoi ?
18:39 - Personne ne m'y emmenait.
18:41 Je devais appeler ma famille, puis la soeur de mon beau-père a bien voulu.
18:46 - Parce que c'était loin ?
18:50 - Déjà parce que c'était loin, mais je fuguais de mes foyers d'accueil.
18:55 En théorie, ils devaient appeler la police s'ils me voyaient,
19:00 donc ils ne voulaient pas dans le mur.
19:02 J'ai arrêté l'école.
19:05 Ma mère m'écrivait pour me dire "tu as intérêt à changer d'attitude,
19:10 sinon, moi quand je sors, c'est toi qui rentres".
19:13 Et c'est exactement ce qui s'est passé.
19:17 Elle est sortie le 28 décembre 2006.
19:22 Et je suis allée en prison un mois avant, alors je n'étais pas là à sa sortie.
19:29 À sa sortie de prison, un événement va bouleverser sa vie.
19:33 Serida tombe enceinte.
19:35 Elle met au monde un petit garçon et un an plus tard, une petite fille.
19:39 Pour la plus grande joie de sa mère.
19:42 - Quel est votre rapport avec votre mère aujourd'hui ?
19:45 - Pareil, on est toujours très proches.
19:49 On s'engueule toujours, mais c'est normal.
19:52 Il y a quelque chose de lourd si on passe 3 mois sans s'engueuler.
19:55 C'est là que quelque chose ne va pas.
19:57 C'est notre fonctionnement.
19:59 On se crie dessus pour les petites choses.
20:01 Si je ne gronde pas mes enfants par exemple.
20:04 On essaie de se maintenir à distance, mais on n'y arrive pas.
20:09 On doit s'appeler.
20:11 C'est parfait et j'aime qu'elle soit proche de ma fille aussi.
20:16 Ma fille lui a dit qu'elle aimerait bien que ce soit elle sa maman.
20:20 - Elle vit un peu ce qu'elle n'a pas pu vivre avec vous ?
20:25 - Oui, je pense complètement.
20:27 Elle veut tout bien faire avec elle.
20:30 Ce sont des vraies filles et moi, pas du tout.
20:34 C'est le paradis pour elles deux de se coiffer et de se faire les ongles.
20:39 La mère de Sorida la voilà.
20:42 Aujourd'hui, toute la famille est réunie.
20:45 - Je vais faire un smoothie.
20:47 - Tu peux en avoir ?
20:48 - Non.
20:49 - Pourquoi ?
20:50 - Parce que tu as mangé toutes les framboises.
20:52 Les 2 femmes sont en train de se réunir.
20:54 Les 2 femmes, la mère et la fille, en ont fini avec la justice.
20:58 Elles essayent de rattraper le temps perdu.
21:01 Ma fille a cette idée bizarre que nous devrions tout partager.
21:06 - Tu partages tout le temps d'habitude ?
21:23 - C'est votre fille ? Votre petite princesse ?
21:26 - Je dis que c'est mon adolescente parce qu'elle a 5 ans, mais on parait 15 parfois.
21:41 - Elle est trop mignonne.
21:46 - Et votre fils, il a quel âge ?
21:49 - Il a 3 ans.
21:51 - C'est le petit garçon que l'on a vu tout à l'heure ?
21:53 - Et ils sont aussi fous, l'un de l'autre.
21:59 - Dis salut.
22:06 - Il est timide ?
22:10 - Au début, après, il tchatche beaucoup.
22:13 - Vous les avez eus jeunes ? Vous êtes jeunes ?
22:15 - Oui, j'ai 25 ans.
22:19 - Oui, j'ai 25 ans, mais ça suffit. Un garçon, une fille, c'est parfait.
22:22 - Qu'aimeriez-vous pour vos enfants ?
22:30 - Qu'aimeriez-vous transmettre à vos enfants que vous n'avez pas reçus ?
22:36 - La chose la plus importante.
22:41 - Leur expliquer les choses de la vie. Comment on fait les bébés.
22:48 - Peut-être que si on me l'avait expliqué, je n'aurais pas eu celle-ci à 19 ans.
22:52 - Je repense à toutes ces choses que ma mère voulait pour moi,
22:59 - mais que je n'ai pas pu faire parce que j'avais des enfants.
23:02 - Je ne veux pas que les miens en aient avant au moins 25 ans.
23:07 - On a les compétitions de Pom Pom Girl, lui va sûrement vouloir jouer au foot.
23:14 - Et puis, il va éventuellement jouer au football.
23:16 - Tout ce qu'il veut faire, c'est courir.
23:18 - Qu'aimeriez-vous être quand vous serez grande ?
23:25 - Être princesse, c'est assez bien.
23:30 - Qu'aimeriez-vous être quand vous vous éveillerez ?
23:34 - Un végétarien.
23:39 - Vraiment ?
23:41 - Non, un vétérinaire.
23:43 - Un végétarien ?
23:47 - Oui, c'est un vétérinaire, pas un végétarien.
23:53 - Vous pouvez être les deux.
23:54 - Je veux être un vétérinaire aussi.
23:59 - Vous avez toujours été une femme.
24:01 - Oui, j'étais un peu...
24:05 - Je n'étais pas très à l'aise.
24:08 - Parce qu'on sent que c'est un bonhomme.
24:11 - C'est vrai, concrètement, c'est un bonhomme.
24:15 - Elle a un truc en elle.
24:17 - Et en même temps, elle a sa fille et son fils sur les genoux.
24:21 - C'est une maman.
24:25 - Mais elle, je sens qu'elle a...
24:28 - Elle, je sens qu'elle a connu les enfers.
24:31 - Vraiment. Je sens qu'elle y a plongé gaiement.
24:36 - Dans toutes les conneries qu'elle pouvait faire.
24:41 - Et qu'elle a certainement dû faire.
24:45 - C'est, je pense, une survivante.
24:47 - Je voudrais vous souhaiter la bienvenue, à vous le public.
24:54 - Pour cet événement sans précédent, dans notre prison pour femmes.
24:59 - C'est le but de notre administration de faire évoluer les politiques
25:03 - afin d'améliorer les conditions de détention pour ces mères incarcérées
25:07 - et de rendre cette période de détention pour elles et pour leurs familles
25:11 - la plus positive, constructive et efficace possible,
25:15 - comme vous l'espérez tous ici.
25:20 Améliorer le contact entre les mères emprisonnées et leurs enfants,
25:24 c'est ce que demande cette ancienne détenue,
25:27 qui tient à faire partager à l'assistance la souffrance d'être une mère incarcérée,
25:32 incapable d'élever ses enfants.
25:35 J'étais enceinte de 8 mois quand j'ai été arrêtée, le 11 novembre.
25:42 Et j'ai accouché le 15.
25:46 J'ai pu passer un jour avec mon enfant.
25:50 Je lui ai donné le sein,
25:54 je suis restée éveillée la nuit entière à le regarder pleurer.
25:58 Je me suis demandé, qu'est-ce qu'une mère ?
26:01 Suis-je une mère ?
26:04 Quand j'ai quitté l'hôpital, ils m'ont escortée jusqu'à la prison.
26:08 Je sentais que j'avais abandonné mes enfants pour une erreur stupide.
26:12 Tout ce que je voulais, c'était être avec eux.
26:16 Tous les jours, je pleurais.
26:19 Les mois ont passé et on m'a proposé un deal.
26:23 Six mois plus tard, j'ai pu rentrer à la maison voir mes enfants.
26:27 J'étais libre.
26:30 Mon fils a 6 ans.
26:33 Je l'aime chaque jour.
26:36 Mais je ne sais pas s'il se souvient de sa vie.
26:39 Mais je ne sais pas s'il se souvient de sa maman entourée de policiers.
26:43 Est-ce qu'il se souvient que je lui disais "je t'aime" à travers un petit glace ?
26:51 Les enfants n'oublient jamais.
26:55 Ils n'oublient jamais.
26:59 Dans l'assistance, deux jeunes filles, Alicia et Zoe,
27:03 elles connaissent la souffrance d'être séparées de leur mère, incarcérées.
27:07 Le plus difficile, c'est l'absence du parent.
27:11 De devoir traverser certaines étapes sans parent.
27:15 C'est difficile.
27:18 C'est difficile de savoir si tu es en mesure de te faire en sortie.
27:22 Le plus difficile, c'est l'absence du parent.
27:25 De devoir traverser certaines étapes sans parent.
27:29 Moi, par exemple, il n'y avait que moi et ma mère.
27:33 Et je n'ai pas eu de père.
27:36 Quand ma mère a été incarcérée, on m'a tout pris.
27:39 Alicia ne voit sa mère qu'une fois tous les 2 ou 3 mois, pendant très peu de temps.
27:46 C'est seulement des visites de 30 minutes, alors c'est toujours très intense.
27:50 On a traversé beaucoup de choses, mais c'est ma maman.
27:55 J'aimerais pouvoir la serrer, mais je la vois à travers la vitre.
28:03 C'est difficile.
28:06 On ne peut pas vraiment lui demander comment elle va ou poser plein de questions.
28:12 Je veux lui raconter ma vie sans lui donner l'impression qu'elle en est exclue.
28:26 Zoé a eu une expérience très différente.
28:29 J'avais 4 ans quand ma mère est allée en prison.
28:32 Ce qui est intéressant, c'est que j'étais super fière de ma mère.
28:37 Je n'ai jamais pensé qu'elle avait fait quelque chose de mal.
28:42 J'en parlais ouvertement aux gens.
28:45 Ça a resté ma mère malgré tout.
28:49 J'ai amené ma meilleure amie en visite.
28:52 J'ai amené mes professeurs. Je voulais que tout le monde la rencontre.
28:57 Les prisons existent pour une raison, mais ne remplissent pas leur rôle de réinsertion.
29:06 Ils créent des barrières entre les détenus et leur famille.
29:11 J'ai beaucoup milité pour tout ce qui touche aux visites.
29:14 Ça a pu changer les choses à ce niveau-là.
29:18 Ça a permis de rendre les salles de visite plus adaptées.
29:21 Ils n'avaient pas pensé au traumatisme que ça pouvait être pour un enfant d'être entouré de gens qui portaient une arme.
29:26 Ou de passer dans un détecteur de métaux.
29:34 Rosemir Karimi, le shérif de San Francisco,
29:37 tente de trouver des aménagements pour rendre supportable la séparation entre les détenus et leurs enfants.
29:43 Quand j'ai été élu shérif, il y a environ deux ans,
29:49 je voulais mettre l'accent sur les programmes que l'on pourrait mettre en œuvre
29:54 afin d'aider les familles et les enfants à conserver un lien avec leurs parents détenus.
30:00 Une loi veut qu'une détenue qui accouche soit séparée de son enfant au bout du troisième jour.
30:09 Il fallait que ça change.
30:16 La loi prive aussi le nouveau-né du lait maternel.
30:22 Nous avons installé des stations de tirage du lait maternel au sein des prisons
30:28 afin que la mère puisse tirer son lait et en faire bénéficier son enfant si elle le souhaite.
30:35 Nous aimerions instaurer plus de temps avec l'enfant afin de tisser des liens plus solides.
30:52 En Europe, certains pays tentent eux aussi d'améliorer les relations entre les détenus et leurs enfants.
31:00 A Mons, en Belgique, la Croix-Rouge vient en aide aux enfants qui ne peuvent pas rendre visite à leurs parents incarcérés.
31:09 Anne et Nadja sont bénévoles de la Croix-Rouge.
31:17 Aujourd'hui, elles vont amener deux jeunes filles de 10 et 14 ans jusqu'à la prison où est incarcérée leur père.
31:27 - Bonjour. - Bonjour.
31:29 - Les volontaires Croix-Rouge, on vient juste chez Mara et Caroline.
31:34 - Bonjour. - Bonjour.
31:36 - Bonjour, Caroline. - Bonjour.
31:38 - Bonjour. - Bonjour.
31:39 - Ça va ? - Ça va et vous ?
31:41 - Caroline, ça va ? - Oui, oui.
31:43 - Mara.
31:45 Les 2 sœurs ne voient leur père que 2 jours par mois. Grâce aux bénévoles de la Croix-Rouge, elles vont le voir plus souvent.
31:53 Entre les jeunes filles et les bénévoles, des liens se tissent.
31:57 - En effet, il y a un lien qui se crée. On peut se confier, on peut rigoler avec la personne qui nous accompagne.
32:02 Et puis, au fil du temps, le lien va être encore plus fort et on passera de bénévoles Croix-Rouge enfants à amis, d'une certaine manière.
32:14 Donc ça, c'est bien. Voilà.
32:17 - Donc, j'emmène la princesse.
32:21 - Vous êtes prêtes ? On va y aller ?
32:23 - Allez, allez.
32:30 - À tout à l'heure.
32:32 - Nous avons en Belgique près de 12 000 enfants qui sont dans le besoin.
32:42 Vous pouvez peut-être bien le savoir, un parent, lorsqu'il est incarcéré, c'est une désorganisation dans la vie pratique de la famille.
32:51 Et du coup, il peut y avoir des raisons. Les raisons peuvent être, par exemple, des raisons matérielles, des raisons financières, des raisons d'organisation de la famille.
32:58 Je prends l'exemple d'une maman qui travaille. Si maman travaille, rendre visite à son mari, accompagner les enfants pour rendre visite à son mari, ce n'est pas toujours évident.
33:07 Il peut aussi y avoir des raisons relationnelles. Je veux dire des raisons relationnelles dans le sens que, quand un parent est détenu,
33:14 parfois, il y a tout un conflit qui existe entre papa et maman, qui ne se voit plus.
33:24 Et du coup, maman n'a pas toujours la volonté de conduire les enfants rendre visite à leur papa.
33:31 Et ça, c'est un problème. C'est un réel problème.
33:33 Et du coup, nous, au sein de la Wallonie, nous avons près de 1 200 enfants à qui nous rendons service pour rendre visite à nos parents.
33:45 - La prison de Jamlouks est située dans la campagne, à une cinquantaine de kilomètres de Mons.
33:52 - Et voilà, on est parti. Professionnellement, je suis assistante sociale.
33:57 Et donc, on a rencontré pas mal d'enfants, quand même, qui étaient dans des difficultés majeures.
34:03 Bon, nous, on a eu des enfants. Ils ont eu beaucoup de chance. Il y en a qui en ont moins.
34:08 Donc, voilà, c'est important de pouvoir les aider. Et puis, les enfants, c'est leur avenir.
34:14 Et donc, si on peut les aider à améliorer leur quotidien, bah, ça en vaut vraiment la peine.
34:22 Leur mère travaille et elle n'a pas de voiture.
34:26 Pour les 2 filles, c'est un véritable soulagement de pouvoir compter sur ce service qui leur permet de rendre visite à leur père incarcéré depuis un an et demi.
34:35 - Oui, ceux qui sont postés là, c'est les filles. Après, ça va, ils sont gentils.
34:40 - Voilà. Vous avez bien vos cartes d'identité, les filles ? - Oui, je les ai.
34:49 Arrivé devant la prison, Anne et Nadja, les bénévoles, confient les 2 filles à la psychologue du relais parents-enfants, qui va organiser la visite à leur père.
35:00 - La route s'est bien passée ? - Oui, très bien. Pas de soucis.
35:05 - Je vous ai passé les cartes d'identité. - Très bien.
35:07 - Je vais peut-être la reprendre, puisqu'elle n'est pas nécessaire.
35:10 - Le relais enfants-parents est présent dans toute la communauté française avec une équipe de 13 personnes, dont 10 psychologues professionnels.
35:19 Nous sommes présents dans 11 prisons. Dans le cadre des visites collectives, ce sont donc plusieurs enfants qui vont voir plusieurs détenus.
35:27 Ça peut parfois aller jusqu'à 20-25 détenus et 20-25 enfants, donc c'est assez important.
35:34 À partir de là, nous essayons, dans le cadre de la prison, d'organiser un lieu qui soit un peu comme si on était à la maison,
35:42 puisque l'objectif est de maintenir le lien entre l'enfant et son parent détenu.
35:47 L'idéal, évidemment, serait qu'au moins tous les 15 jours, l'enfant puisse voir son papa ou sa maman.
35:53 Parfois, ça peut être 3 semaines, 1 mois, pendant 1h30 seulement, où ça se passera.
36:01 Nous nous occupons, à peu près dans les 11 prisons où nous sommes, de 1300 enfants pour 11 prisons et pour une population de 11 millions d'habitants.
36:12 Donc, on peut, en faisant des projections, partir à peu près du principe qu'il y a entre 13 000 et 15 000 enfants qui sont concernés par cette problématique.
36:21 Or, à ce niveau-là, c'est un élément qui, pour moi, quand même, est assez interpellant.
36:26 C'est que le détenu purge sa peine. La société l'a décidé. Mais pour l'enfant lui-même, la peine, ce n'est pas sa peine à lui, mais c'est bien sa souffrance.
36:38 Et ça, c'est pas normal.
36:40 Caroline et sa sœur ont passé 3 heures dans la prison, un moment de joie partagé avec leur père malgré le stress de l'univers carcéral.
36:50 Vous avez reçu des photos aujourd'hui ? C'est génial. Ça s'est bien passé ?
36:57 Oui, ça s'est super bien passé.
36:59 Oh, c'est génial, elles sont super !
37:01 Oh, elles sont trop belles. Oui, protège-les. Comment ça a été, ma puce ?
37:06 Bien.
37:07 Ça s'est bien passé ?
37:08 Oui. Elles ont passé un bon moment.
37:10 Oui, ça s'est bien passé.
37:11 Merci, au revoir.
37:13 Oui, on va aller jusqu'à la maison. On va vous déposer et puis...
37:17 C'était sympa, alors, aujourd'hui.
37:20 C'est un maque-feu ?
37:22 Oui.
37:23 Elle jouait dans les... parce qu'ils avaient installé des... des... des genres de tapis pour se protéger, etc.
37:29 Il y avait des boudins, des tunnels.
37:31 Elle arrêtait pas de courir, son père, il n'en pouvait plus.
37:34 Elle a fait tirer ses chaussures, le père qui courait avec la chaussure.
37:40 À chaque fois, il devait mettre sa main sur les coins des tapis.
37:45 C'est comme ça.
37:47 Et là, vous avez pu faire des photos.
37:50 Photo ?
37:51 C'est quoi ? C'est la photo de père ?
37:53 Tu ressembles très fort à ton papa, Marat.
37:55 Sérieux ?
37:57 Ah oui, fais voir de près. Ah oui, pardon.
38:02 Il y en a deux, donc, comme ça.
38:04 Superbe photo. Que de beaux souvenirs.
38:06 Ah oui, c'est sûr.
38:08 Ils seront bien rangés.
38:10 Beaux souvenirs ?
38:11 Oui. Il faut que ce soit un beau souvenir.
38:13 Avec papa en prison, là ?
38:15 Oui, mais bon, ça, malheureusement...
38:17 On va dire que c'est un souvenir.
38:19 C'est un souvenir.
38:21 Un souvenir que Caroline et Marat garderont toute leur vie,
38:26 avec l'espoir que la douleur s'atténuera
38:29 lorsque leur père ne sera plus derrière les barreaux.
38:32 Nous voilà ici. Non plus, il n'y a pas de quoi s'abriter.
38:41 Ça a été ?
38:43 Ouais.
38:45 Allez, photo.
38:47 Là, elles sont belles.
38:57 J'aime bien, parce que Marat, là...
39:01 Là, elles sont belles.
39:05 Caroline et Marat reverront leur père dans plusieurs semaines.
39:10 Quand il sortira de prison,
39:12 Caroline et sa sœur retrouveront la vie normale
39:16 qu'elles connaissaient avant l'incarcération de leur père.
39:19 Mais certains enfants vivent toute leur vie
39:24 sans voir leur père en dehors d'une prison.
39:27 Retour à San Francisco.
39:31 Vahina va rencontrer Mariana.
39:34 Mariana a toujours vu son père à travers les barreaux de la prison.
39:39 Il est incarcéré depuis 40 ans.
39:41 Hello, hi. Nice to meet you.
39:45 Hello. Vahina ? Hello ?
39:51 En 1974, à San Francisco,
39:55 une altercation dégénère dans un bar.
39:58 Un homme est tué.
40:00 Zachary Van der Horst, présent sur les lieux,
40:03 est arrêté et reconnu coupable du meurtre.
40:06 Il est condamné à perpétuité.
40:09 Faube est tombée amoureuse de lui après son incarcération.
40:14 Elle a trois enfants, tous conçus en prison,
40:17 dont Mariana, la benjamine.
40:19 J'aimerais en savoir un petit peu plus de votre expérience.
40:28 Votre vie.
40:32 Ce que vous avez vécu enfant.
40:35 Si vous voulez bien partager ça avec moi.
40:38 Les cinq premières années de ma vie,
40:46 j'étais à la prison tous les week-ends.
40:49 Chaque vacances scolaires.
40:53 Tout mon temps libre, j'allais voir mon père.
40:56 C'était ça la vie.
40:59 C'était normal pour moi.
41:01 Je ne savais pas qu'il existait autre chose.
41:04 Je ne savais pas que c'était normal.
41:07 Je ne le savais pas.
41:09 C'était amusant.
41:11 C'était amusant et excitant de passer la journée là-bas.
41:14 C'était amusant d'aller à la prison,
41:21 d'être là tout le temps.
41:23 C'était excitant.
41:24 C'est aussi parce que votre mère vous a expliqué très tôt la situation ?
41:29 C'était aussi parce que votre mère vous a expliqué très tôt la situation ?
41:32 Depuis que vous étiez un bébé, vous êtes allé à la prison.
41:35 C'était ma vie.
41:37 C'était toute ma vie.
41:39 Il n'a jamais fallu expliquer.
41:41 C'était ma norme.
41:43 On se levait et on allait à la prison.
41:45 Quand avez-vous commencé à comprendre que c'était un peu différent ?
41:50 Probablement...
41:52 On n'a jamais eu de grandes discussions en famille sur le pourquoi du comment.
42:00 C'était juste notre deuxième maison.
42:03 Il nous arrivait de dormir là-bas, mais ça ne faisait rien.
42:07 Mariana n'a jamais connu d'autre vie.
42:13 Elle assume totalement sa situation de fille de condamnée.
42:17 Quand vous étiez à l'école, comment gériez-vous ça avec vos amis ?
42:26 Tout le monde le savait.
42:28 Je parlais de mon père à tout le monde.
42:31 Jusqu'à ce jour.
42:33 Je n'ai jamais eu honte de lui.
42:36 Comment a-t-il réagi ?
42:38 Ce n'est pas à cause de vous, c'est à cause de la réaction de la société.
42:43 Vous ne sentiez pas de jugement ?
42:46 Vous ne vous en faites pas compte ?
42:48 Mes amis, je suis devenue amie avec eux.
42:51 Depuis l'école et l'école de midi.
42:54 Mon père a été prisonnier, c'est probablement le...
42:58 Le lien de ce qu'ils se sont fait devoir de mon histoire.
43:02 Ils ont probablement pensé "Oh, ça fait sens !"
43:05 "Tout ça fait totalement sens que ton père soit en prison."
43:09 Mais je dirais que, en termes de travail,
43:13 je ne me suis pas fait confiance.
43:16 Je ne me suis pas fait confiance.
43:19 Mais dans le monde du travail, je ne le dirais pas, je pense.
43:23 C'est encore assez tabou.
43:39 Même si c'est ma vie.
43:47 Un tabou qui reste fort.
43:49 Le monde clos de la prison est un univers qui fascine.
43:52 Et qui fait peur.
43:54 Pour Mariana, c'est un univers familier.
43:57 Oui, il y a beaucoup de projections et de fantasmes.
44:02 Oui, on se dit que ces hommes sont des monstres.
44:10 Mais ce sont des hommes avec des familles, des enfants.
44:13 Des femmes qui veulent rentrer chez eux.
44:16 Certaines qui n'ont rien fait.
44:19 Depuis que je suis dans le ventre de ma mère, je suis allée à la prison.
44:23 Alors je sais de quoi il en est.
44:41 Oui, je pense qu'il y a eu des moments où j'avais besoin d'un père.
44:44 De sa présence.
44:46 Mon adolescence était mouvementée.
44:50 Je bougeais beaucoup.
44:54 Ma mère est devenue clean.
44:57 Je ne sentais pas vraiment de soutien autour.
45:01 Mais même en prison, c'était la voix de la raison au téléphone.
45:10 Il me consolait et me conseillait.
45:13 C'est comme s'il savait quand je n'allais pas bien.
45:18 Il m'appelait à ce moment-là.
45:21 Il me donnait plus que certains autres dans ma vie.
45:24 De manière consistante. Pas physique.
45:37 Cependant, il manquait un homme dans ma vie.
45:40 Ça, je vois que ça m'a affectée aujourd'hui.
45:46 Quand on est habitué à l'absence d'un homme, quand on est une petite fille, on transmet ça.
46:03 Depuis 2011, la Cour suprême des Etats-Unis a demandé à la Californie de libérer des milliers de prisonniers.
46:07 Dans l'objectif de soulager la surpopulation carcérale.
46:10 Les libérations se font au compte-goutte.
46:13 Mais Mariana espère voir son père revenir bientôt à la maison.
46:16 Je pense qu'il faut sortir pas mal de monde pour que ça se passe bien.
46:19 Je pense que c'est important de faire ça.
46:22 Je pense que c'est important de faire ça.
46:25 Je pense que c'est important de faire ça.
46:28 Je pense que c'est important de faire ça.
46:31 Je pense qu'il faut sortir pas mal de monde parmi les prisonniers à vie.
46:34 Mais il doit être libéré dans le cadre d'un programme.
46:40 Ou d'un foyer.
46:45 Alors nous on fait savoir au tribunal qu'il y a quelque part où aller.
46:48 Qu'on le soutiendra financièrement.
46:53 On veut juste qu'il sorte enfin.
47:00 Ce sera quand ? Vous savez ?
47:03 Avec un peu de chance cette année.
47:06 Je suis à la fois nerveuse et excitée.
47:12 Je ne veux pas me faire de faux espoirs.
47:17 Tout va être très différent pour lui dehors.
47:27 On le veut juste avec nous.
47:30 On se focalise sur ça.
47:33 Quelle est la première chose que vous voulez faire quand il sort ?
47:37 Ne pas le lâcher je pense.
47:42 Ne pas le lâcher je pense.
47:45 J'aimerais qu'il soit là tout le temps.
47:48 Je sais qu'il ne pourra pas rester tout le temps avec moi.
47:51 Mais je veux juste passer du temps avec lui.
47:54 Je ne me soucie pas de l'endroit où on va.
47:57 Je veux juste passer du temps avec lui sans aucun règle de prison.
48:00 Sans rien, sans accès à la maison, sans rien.
48:03 Où qu'il soit.
48:06 C'est mon cadeau.
48:09 J'ai pas eu le temps cette année.
48:15 Je vous donne un meilleur souvenir.
48:18 Merci. Au revoir.
48:21 Mariana est un rayon de soleil.
48:24 C'est une femme qui m'a déstabilisée.
48:27 Elle m'a beaucoup déstabilisée.
48:30 Parce qu'elle a un regard très franc.
48:33 Elle a un charisme extraordinaire.
48:36 Une espèce de force intérieure.
48:39 Qui est très impressionnante.
48:42 Tous les jours que j'ai envie de me faire un cadeau,
48:45 je me fais un cadeau.
48:48 Qui est très impressionnant.
48:51 Tous les jours que j'ai rencontré,
48:54 ils ont du cœur.
49:00 Ils ont des valeurs.
49:03 J'ai vraiment trouvé beaucoup de beauté.
49:06 Beaucoup de bonté.
49:09 Et de force. Indéniablement.
49:12 C'est pas aux enfants de payer.
49:15 Alors que j'ai l'impression que dans toutes les expériences que j'ai vues,
49:19 les enfants payent le prix fort aussi.
49:22 Les enfants payent le prix fort aussi.
49:25 Les enfants payent le prix fort aussi.
49:28 [Musique]