Chaque semaine, le tour de l'actualité cinéphile avec des sujets inédits, des entretiens, des analyses de séquences, des archives, des montages et des nouvelles rubriques pour combler les amoureux du cinéma.
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00:00 ...
00:19 -Je ne sépare pas ce que j'ai fait toute ma vie,
00:22 c'est-à-dire l'enseignement, le journalisme,
00:25 et la critique spécialisée dans Positif,
00:28 ou les conférences. Je pense que tout cela,
00:31 c'est finalement une forme de goût de la transmission.
00:35 D'autres diront que c'est la pédagogie, et pourquoi pas ?
00:38 C'est-à-dire de vouloir communiquer.
00:40 Je me rends compte que le critique doit être sur la même longueur d'onde
00:43 que le cinéaste.
00:45 Le cinéaste, lui aussi,
00:46 pour moi, a des grands cinéastes et des cinéastes qui veulent transmettre.
00:50 -Le goût du partage et de l'éclectisme chevillé au corps,
00:53 Michel Ciment vient de nous quitter.
00:55 A la tête de la revue Positif, qu'il intégra dans les années 60,
00:58 ce grand critique était aussi professeur d'histoire
01:01 et de civilisation américaine à l'université
01:04 et auteur d'ouvrages de référence sur le cinéma,
01:06 comme cet indispensable Stanley Kubrick,
01:08 cinéaste dont il fut l'ami et l'infatigable défenseur.
01:12 Le regard et la plume de Michel Ciment vont nous manquer,
01:15 et manquer au cinéma que ce vivat lui soit dédié.
01:18 Au sommaire, également, une rencontre
01:21 autour du cinéaste Valerio Zurlini,
01:24 le rosebud d'Alfred Hitchcock,
01:26 la mélodie du bonheur de Clio
01:28 et le cinéma retrouvé de Denis Arcan.
01:30 Vous êtes prêts ? On y va.
01:32 Chef-d'oeuvre aussi beau que désespéré,
01:40 Le Professeur, 1972,
01:43 est l'avant-dernier film du discret cinéaste italien Valerio Zurlini.
01:47 Pour redécouvrir ce classique,
01:48 votre vivat a rencontré le spécialiste de Zurlini,
01:51 Jean-Christophe Ferrari,
01:53 ainsi que l'actrice principale du Professeur, Sonia Petrovna,
01:56 qui jouait aux côtés d'Alain Delon.
01:59 Tous deux nous emmènent déambuler dans ce Rimini hors-saison,
02:01 froid et triste.
02:03 Si quelqu'un a intérêt, allez-y.
02:05 Moi ?
02:06 Je veux voir tout.
02:08 C'est l'histoire d'un homme qui est désespéré
02:20 et qui rencontre une jeune fille aussi désespérée que lui.
02:24 Sans le savoir, il ne sait pas comment aller.
02:27 C'est une rencontre fulgurante
02:29 de deux êtres qui sont perdus et qui sont attirés par le vide.
02:34 Zurlini, c'est vraiment un cinéaste et un poète
02:37 de la déception existentielle.
02:40 Je dirais plus de la déception existentielle
02:44 que du tragique.
02:46 On a constamment des personnages déçus,
02:50 qui semblent aller chercher quelque chose
02:54 qu'ils ne trouveront pas.
02:56 Quand j'ai lu le scénario, j'étais absolument saisie
03:14 par ce sentiment, cette sensation de poison
03:20 qui court à travers le scénario, qui court à travers le film.
03:24 Ça m'a vraiment saisie.
03:27 Le personnage de Vanina m'a emmenée vers quelque chose
03:31 que je n'imaginais pas.
03:34 Et alors ?
03:36 Tu n'as jamais aimé moi ?
03:39 Jamais.
03:40 - Pas aussi à Venise ? - Non.
03:44 Tu m'as fait peur.
03:46 Et pendant 9 jours à Madrid ?
03:48 Tu parlais d'années, pas d'un jour.
03:51 Tu lui as raconté comment nous passions le temps ?
03:54 Tu peux l'imaginer.
03:56 Le film est emprunt d'une mélancolie,
04:00 voire d'un nihilisme très profond.
04:03 C'est d'abord celui de son réalisateur,
04:06 qu'il a exprimé dans d'autres films.
04:09 "Journal Intime", "Le désert des tartares",
04:12 mais aussi par Androïd, "Été violent",
04:16 et même "Une fille à la valise".
04:19 C'est une espèce d'anti-idéalisme.
04:23 C'est-à-dire que rien, finalement,
04:27 ne justifie vraiment l'existence,
04:31 sinon peut-être la mort,
04:33 d'où aussi le titre du film,
04:35 "La première nuit de tranquillité",
04:38 qui est une citation de Goethe.
04:42 C'est un nihilisme qui vient de ce sentiment
04:46 que de toute façon, tout est destiné
04:50 à mourir, mais aussi à échouer.
04:54 Les sentiments peuvent être très intenses,
04:58 mais sont condamnés à s'émietter,
05:01 se disperser avec le temps.
05:03 C'était une poésie des âmes en lambeaux,
05:07 complètement en lambeaux.
05:10 C'est cette sensation que j'ai eue.
05:12 Et quand j'ai vu le film,
05:14 la première fois, ça m'a encore plus frappée.
05:19 Quand est-ce que vous reviendrez ?
05:24 Une heure après, j'ai pris mon premier train.
05:27 Je me tiens à toi.
05:32 Ce qui reste, c'est l'intensité des sentiments vécus.
05:35 C'est elle qui intéresse Zurléni
05:37 dans l'histoire entre le professeur,
05:41 interprété par Anna Delon, et son élève.
05:44 C'est une histoire qui, pour plein de raisons,
05:47 n'a aucune chance d'aboutir,
05:49 mais l'intensité du lien, du rapport amoureux,
05:52 elle, est réelle,
05:54 et elle est vécue presque en dehors du monde,
05:57 dans cette villa, au bord de la plage.
05:59 Ce désespoir, c'est aussi chez Zurléni,
06:06 celui d'une jeunesse née tout juste après la guerre,
06:09 dans les ruines du fascisme.
06:11 Elle ne croit en rien.
06:13 Et ça, c'est terrible.
06:14 C'est terrible. La non-vie, il y a quelque chose d'épouvantable.
06:19 D'arriver si jeune à ça.
06:21 Que veux-tu faire à l'université ?
06:23 Rien. Je ne suis pas sûre de vouloir finir l'année.
06:26 C'est une jeunesse un petit peu...
06:29 exsangue,
06:31 sans projet, fatiguée,
06:34 sans ardeur.
06:36 Des jeunes gens qui ne savent pas vraiment
06:39 quoi faire de leur vie,
06:41 et qui passent leur temps en jeu de cartes,
06:45 soirées dans les boîtes de nuit.
06:49 C'est un regard sur la jeunesse,
06:50 mais aussi sur la bourgeoisie italienne.
06:54 Ce n'est pas du tout les jeunes prolétaires,
06:58 traversés par l'intensité vitale qu'on retrouve chez Pasolini.
07:02 Je suis là pour vous expliquer pourquoi un vers de Petrarca est beau.
07:06 Et je suppose que vous le savez.
07:08 Tout le reste me dérange, je vous le dis tout de suite.
07:11 Le personnage du professeur est très inspiré de Zurléni lui-même,
07:15 à la fois pétri de culture classique
07:17 et tourmenté face à la création,
07:19 lui qui n'aura réalisé que huit longs-métrages
07:21 en plus de 20 ans de carrière.
07:23 C'était curieux parce qu'il était extrêmement calme.
07:28 Il me parlait en français,
07:30 mais il appuyait sur chaque mot.
07:32 J'avais l'impression qu'il voulait vraiment que je comprenne.
07:35 C'était drôle.
07:37 Il était impressionnant avec ce grand manteau couleur camel
07:42 qu'Alain portera dans tout le film.
07:45 Il m'a fait une très belle impression.
07:47 De puissance, de calme.
07:50 Ça, c'était la première impression.
07:52 Mais quand je l'ai tourné le premier jour avec lui, à Rimini,
07:55 j'étais totalement différente.
07:57 Il me parlait comme ça, entre ses dents, il me prenait à part.
08:00 Il était extrêmement calme et doux,
08:03 mais à la fois angoissé
08:06 et terriblement tendu.
08:09 Et ça m'a surprise.
08:11 "Le travail de la réalisatrice"
08:14 "Au cours de la première édition"
08:18 Tous ceux qui l'ont vu travailler
08:20 racontent à quel point il était investi
08:23 de manière absolue, organique,
08:27 dans le travail et dans tous les paramètres
08:30 du travail de réalisateur,
08:31 que ce soit le travail sur le cadre,
08:34 chose qui l'intéressait le plus,
08:36 mais aussi sur la lumière, sur les acteurs, sur le récit.
08:39 Il était souvent co-scénariste de ses films.
08:42 C'était quelqu'un qui était vraiment imprégné
08:45 d'art pictural de manière très profonde.
08:48 D'ailleurs, on le retrouve dans ses films,
08:51 dans la manière de traiter les espaces urbains,
08:54 qui sont souvent des espaces picturaux, vides,
08:58 avec des couleurs comme ça, un petit peu passées.
09:02 En fait, il était plus en rapport avec des peintres
09:07 qu'avec d'autres cinéastes.
09:09 En 1460, la communauté de Monterchi
09:12 a ordonné à Piero cette madame.
09:14 Les auteurs de la commission n'étaient pas des papiers,
09:17 ni des princes, ni des banquiers.
09:19 Il peut se dire que Piero a pris le travail un peu sous les pieds.
09:23 Malgré tout ça.
09:25 Le miracle de cette petite vache adolescente
09:30 est comme la fille d'un roi.
09:32 Et puis, il avait chez lui cet amour de la littérature.
09:36 Il disait souvent qu'il était d'une nature tolstoyenne,
09:40 que Tolstoy était son grand exemple,
09:43 en particulier dans la manière de lier
09:46 les histoires privées à des histoires collectives.
09:51 Chose aussi qu'on retrouve chez Stendhal,
09:54 donc l'auteur de "Vanina, Vanini",
09:56 le livre que le personnage interprété par Alain Delon
10:00 offre à sa jeune élève.
10:03 Tiens, l'autre "Vanina".
10:05 C'est pour moi ?
10:07 C'est pour toi, mais tu dois l'écrire.
10:10 Bien sûr.
10:11 C'est une belle histoire.
10:13 Oui.
10:14 Elle est une princesse romaine et lui, un carbonaro fungesco.
10:18 Ils s'aiment.
10:19 Oui.
10:21 Béatit l'or.
10:22 Merci.
10:23 Si aujourd'hui le professeur est visible dans sa version intégrale,
10:28 il fut longtemps raccourci d'une demi-heure
10:30 à la demande d'Alain Delon, coproducteur du film,
10:33 qui le trouvait trop désespéré.
10:36 Ce film vous emmène vers quelque chose de profond,
10:39 vous fait réfléchir à toutes sortes de choses,
10:41 peut-être dans votre vie ou pas,
10:44 comme tous les chefs-d'oeuvre.
10:45 Il fait partie des choses qu'il faut voir,
10:48 qu'il faut ressentir, qu'il faut entendre,
10:50 qu'il faut analyser soi-même.
10:53 C'est un chemin à faire.
10:56 Retrouvez le professeur de Valerio Zurlini
10:59 actuellement sur Ciné+ Classique et sur MyKanal.
11:01 "Soupçons" 1941 est le quatrième film
11:12 tourné par Alfred Hitchcock aux Etats-Unis.
11:14 Un an après "Rebecca",
11:16 seul film du maître à avoir remporté l'Oscar du meilleur film,
11:20 il retrouve John Fonten dans le rôle de Lina,
11:22 alias "Monkey Face",
11:24 sobriquet dont Carrie Grant l'affuble avec Malice.
11:27 C'est bien.
11:29 Adapté du roman "Préméditation",
11:31 le scénario est écrit par la garde rapprochée d'Hitchcock.
11:34 John Harrison, ex-secrétaire de Sir Alfred,
11:37 devenu scénariste, puis productrice.
11:39 Alma Reville, Madame Hitchcock à la ville.
11:42 Et Samson Rafelson, fidèle collaborateur d'Ernst Lubitsch.
11:46 "Soupçons" a un ton unique.
11:49 Première des quatre collaborations d'Hitch avec Carrie Grant,
11:52 le film repose beaucoup sur son charme et son humour,
11:55 voyé plus tôt.
11:57 "Soupçons" a un ton unique. Première des quatre collaborations d'Ernst Lubitsch,
12:00 le film repose beaucoup sur son charme et son humour,
12:03 voyé plus tôt.
12:04 ...
12:29 -Very much.
12:30 ...
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13:51 "Soupçons" commence comme une comédie romantique,
13:54 puis bascule habilement vers le thriller.
13:56 Le charmant mais désargenté Johnny séduit Lina, l'épouse,
13:59 avant que celle-ci ne commence à douter.
14:02 Serait-il un manipulateur doublé d'un tueur
14:04 qui n'en voudrait qu'à son argent ?
14:06 Si le suspense cher à Hitchcock fonctionne si bien,
14:09 c'est qu'il est à la fois porté par la grâce de John Fonten,
14:12 par le charme de Cary Grant,
14:14 et transcendé par le génie hitchcockien.
14:16 Qui d'autre pour nous faire frémir avec un simple verre de lait ?
14:20 Il suffisait d'y penser,
14:22 éclairer ce blanc pur de l'intérieur du verre
14:25 pour le rendre inquiétant à souhait.
14:27 Hitchcock aimait faire la fine bouche
14:29 et dédaigner un peu Soupçon qu'il trouvait, dira-t-il à Truffaut,
14:33 trop luxueux comme Rebecca,
14:34 la faute à la reconstitution des paysages typiquement anglais
14:38 en Amérique.
14:39 Mais ne vous faites pas avoir par la malice du maître.
14:42 Plongez plutôt dans les délices de Soupçon 1941,
14:46 avec John Fonten,
14:47 un rôle qui lui vaudra l'Oscar de la meilleure actrice,
14:50 et un Cary Grant au sommet de sa forme,
14:52 très bientôt sur Ciné+ Classique et à tout moment sur My Canal.
14:56 Musique jazz
14:59 ...
15:01 -Clio est une chanteuse française qui a montré son amour pour le cinéma
15:05 et plus particulièrement la nouvelle vague
15:07 avec sa chanson "Éric Rohmer est mort".
15:09 A l'heure de son nouvel album, "Carambolage",
15:12 elle nous donne rendez-vous en studio pour partager
15:15 sa mélodie du bonheur, "Anna",
15:17 une comédie musicale réalisée par Pierre Coralnick.
15:19 Musique jazz
15:21 -Pas mal, pas mal du tout
15:23 ...
15:26 Pas mal, pas mal du tout
15:29 ...
15:32 Qui est, mon vieux ?
15:33 Cette fille-là est à moi ?
15:35 ...
15:37 Ouais ?
15:38 C'est comme si c'était fait.
15:40 -J'ai tout de suite pensé à ce film,
15:42 parce que c'est un film que j'ai découvert
15:45 quand j'avais une vingtaine d'années.
15:47 Rien que les noms sur le générique
15:51 ne peuvent que donner envie de voir ce film,
15:53 parce que c'est une B.O. de Gainsbourg qui joue dedans.
15:57 -Incurable.
15:58 -Les chansons sont interprétées en grande partie
16:01 par Anna Karina, par Brialy et par Gainsbourg.
16:04 Donc ça envoyait quand même un peu du rêve sur le papier.
16:08 C'est le cas, d'ailleurs.
16:09 -Comment c'était ?
16:11 ...
16:13 Si c'était là que j'étais.
16:15 Un poil pressé
16:20 Sous le tropique
16:23 -C'est dans ce film-là qu'il y a eu la chanson "Sous le soleil exactement",
16:27 qui est devenue très, très connue.
16:30 Je crois que c'est par ce film qu'elle est apparue la première fois,
16:33 chantée par Anna Karina.
16:34 -Sous le soleil exactement
16:37 ...
16:39 Pas à côté, pas n'importe où
16:43 Sous le soleil, sous le soleil
16:46 Exactement
16:48 Juste en dessous
16:51 -Ca revient à plusieurs moments.
16:53 Le montage du film est un peu particulier,
16:55 parce qu'il y a des choses qui reviennent,
16:58 on sait pas trop comment, pourquoi.
17:00 Mais cette séquence-là revient beaucoup.
17:02 C'est sans doute la plus marquante musicalement du film.
17:05 ...
17:07 -Les gars, là !
17:09 ...
17:13 -C'est un film où on en prend plein les yeux,
17:15 enfin, plein les yeux et plein les oreilles.
17:18 Il y a beaucoup de soin dans les décors, les couleurs, les chorégraphies.
17:22 Visuellement, il est très marquant,
17:24 un peu comme les films de Jacques Demy,
17:26 mais dans un style assez proche et différent.
17:28 Je sais pas si je l'ai aimé tant que ça,
17:30 mais il m'a beaucoup marquée,
17:32 notamment cette chanson, qui, pour le coup, j'ai beaucoup aimé.
17:35 Je vais chanter la chanson "Ne dis rien",
17:38 qui est un duo entre Anna Karina et Jean-Claude Brialy,
17:41 et que je vais chanter toute seule, malheureusement.
17:45 ...
17:48 -Ne dis rien,
17:50 surtout pas.
17:52 ...
17:53 Ne dis rien, suis-moi.
17:56 ...
17:58 Ne dis rien,
17:59 n'aie pas peur.
18:02 Ne crains rien de moi.
18:05 ...
18:06 Suis-moi jusqu'au bout de la nuit,
18:10 jusqu'au bout de ma folie.
18:13 ...
18:15 Laisse le temps,
18:17 oublie demain.
18:20 Oublie tout, ne pense plus à rien.
18:25 ...
18:26 -Cette chanson, on l'entend à un moment du film
18:30 qui est donc un moment de calme
18:33 où on est un peu mélangé entre...
18:36 On sait pas ce qui est de l'ordre du fantasme ou de la réalité
18:40 dans la tête du héros.
18:42 Et une fois de plus, on a l'impression
18:44 qu'il va peut-être réussir à retrouver son amoureuse
18:47 qu'il cherche partout.
18:49 Et c'est un moment visuellement très particulier
18:52 parce qu'ils sont dans les tunnels du métro,
18:54 sur les tapis roulants, et on sait pas s'ils vont se croiser,
18:57 s'ils sont sur le même, si tout est assez mélangé.
19:00 -Ne dis rien,
19:03 n'aie pas peur.
19:06 Ne crains rien de moi.
19:09 Suis-moi jusqu'au bout de la nuit,
19:14 jusqu'au bout de ma folie.
19:17 Laisse le temps,
19:20 oublie demain.
19:22 Oublie tout, ne pense plus à rien.
19:26 Oublie tout,
19:29 ne pense plus à rien.
19:32 ...
19:35 -Viva vous recommande de vous précipiter
19:37 dans les salles de cinéma pour découvrir Anna,
19:40 de Pierre Coralnick, qui ressort grâce aux Amis de Malavida,
19:44 et le quatrième album de Clio,
19:46 intitulé Carambolage, est disponible partout.
19:49 -Carambolage, tout à voler.
19:52 ...
19:54 Musique douce
19:57 ...
20:00 -Avant sa consécration sur la scène internationale
20:03 en 1986 avec le déclin de l'Empire américain,
20:06 le cinéaste québécois Denis Arcan, historien de formation,
20:10 avait réalisé plusieurs documentaires et courts-métrages.
20:13 Son premier long-métrage de fiction, La maudite galette, 1972,
20:17 un hommage caustique aux séries B américaines,
20:20 est longtemps resté invisible.
20:22 Ce film très singulier a refait surface en 2022
20:26 à l'occasion du Festival Lumière, où nous avions rencontré
20:29 Dominique Duga, directeur général
20:31 du Centre de l'histoire du cinéma québécois,
20:33 qui a restauré le film Cinéma retrouvé.
20:36 ...
20:47 -Denis Arcan a une formation d'historien.
20:49 Il étudie une histoire à l'Université de Montréal.
20:52 Il n'a jamais scénarisé de fiction.
20:54 Il demande à un de ses collègues de l'Université Jacques-Benoît,
20:58 qui est également romancier,
20:59 de lui proposer un sujet,
21:01 une histoire de vol qui tourne mal.
21:05 Arcan va...
21:07 va s'emparer de ce scénario-là, La maudite galette,
21:10 qui deviendra son premier film de fiction.
21:13 ...
21:18 Arcan va se tourner vers les classes populaires.
21:21 C'est un choix politique, d'abord et avant tout,
21:24 et...
21:26 mais dans une population qui est dans une pauvreté,
21:30 oui, économique, mais dans une pauvreté culturelle aussi,
21:33 on le sent bien dans leur façon de s'exprimer.
21:36 C'était la première fois
21:38 qu'un cinéaste de façon aussi assumée
21:42 va tourner une histoire dans les milieux populaires
21:45 et avec la langue...
21:47 la langue populaire, avec le joual.
21:49 -Vous dites qu'on est des menteurs ?
21:51 -30 piastres par semaine, faites-moi pas lire !
21:55 -Si Widen n'avait pas 50 piastres à lui,
21:56 si Renard avait rien que 30 piastres !
21:58 -Vous me montrez, vous, que c'est qu'il est menteur, et c'est tout !
22:01 Regardez ça, là.
22:04 C'est mon cahier de budget et mes comptes.
22:07 Vous allez voir ! -Bien, quand vous voulez.
22:08 -Regardez, là ! -Vous savez ce que je dis ?
22:10 J'ai pas besoin de regarder dans des affaires.
22:12 -Il s'agit d'un film noir qui rompt beaucoup
22:14 avec la tradition du cinéma québécois,
22:16 où on est dans le queue de comètes du cinéma direct,
22:19 documentaire.
22:20 Donc, il y aura un certain réalisme, quand même,
22:23 dans la façon de filmer.
22:25 Mais dans les cas du film noir,
22:30 on est loin de comment les Québécois se perçoivent.
22:33 C'est plutôt vu comme quelque chose de très américain,
22:35 un film avec des fusils, avec le petit banditisme et tout ça.
22:39 -Ah, c'est bon !
22:40 -Il a du gâter, il a de la crissant.
22:42 -Ah non !
22:43 Pourquoi, moi ?
22:44 Hein ? Pourquoi, moi ?
22:45 Ah !
22:47 -Ah !
22:48 -Ah !
22:49 -Ah !
22:50 -Ah !
22:51 -Faites-le, là.
22:53 -Denis Harkin, le scénariste, va le faire à sa manière,
22:55 en plan-séquence.
22:56 Donc, il va jouer sur le film de genre,
22:58 mais il va en détourner les codes en le faisant
23:00 sur des plans-séquences, disait-il,
23:02 avec la caméra de Laurence d'Arabie,
23:04 donc avec un scope somptueux,
23:07 et d'en faire comme une fabuleuse façon
23:09 de présenter l'image comme une pièce de théâtre,
23:14 un cadre de théâtre où les comédiens vont remplir l'espace.
23:18 Il y a eu un véritable travail sur le temps,
23:21 dès les premiers plans, quand on voit le rythme
23:24 qu'il impose avec ce travailleur comme ça.
23:26 Tous ses plans, tous ses gestes,
23:28 tous ses moments de sa journée de travailleur
23:30 qui sont complètement découpés.
23:32 On sent qu'on est dans un temps particulier,
23:35 avec une façon aussi de faire discuter ses personnages,
23:40 de faire dialoguer ses personnages,
23:42 où parfois, on accepte de prendre une pause,
23:46 de prendre du temps aussi.
23:47 Il y a quelque chose de...
23:51 de dilaté, si on veut,
23:53 même à l'intérieur des conversations
23:55 que ces personnages ont là,
23:58 qui est très différent du Denis Marcan qu'on connaîtra après,
24:01 où ces dialogues seront rebondissants.
24:05 Il y a un cachet de la baie de feu.
24:07 Tout de même.
24:10 J'ai dit aussi qu'il y avait une petite maison parfaite pour les voleurs.
24:16 Tu continues ?
24:19 Je veux juste dire...
24:21 Qui viennent ?
24:23 Qui viennent, les crisses ?
24:25 Tu n'as pas vu le chien ?
24:33 Ah, il y a un chien. Je l'ai vu.
24:35 Tout était au texte, à la virgule près, écrit.
24:39 J'étais très étonné, parce que je pensais que certaines scènes,
24:41 comme quand le personnage principal va acheter une voiture et une fille,
24:47 je pensais qu'il y avait quelque chose d'un peu improvisé là-dedans.
24:51 Et non, ils m'assuraient que tout était...
24:53 Ils étaient particulièrement fiers de tous les dialogues
24:55 qu'ils avaient écrits dans cette scène-là, particulièrement.
24:59 20 000 ?
25:01 Un moins 20 000, je suis à la table.
25:03 Le char est à toi, et puis...
25:09 La plote avec.
25:11 On a peut-être occulté en se disant, c'est un film de genre,
25:30 c'est peut-être un film à part.
25:32 Même les trois premiers films d'Arcan sont marqués sous le signe du genre,
25:36 et pourtant, les trois sont exceptionnels.
25:40 Il y aura Réjean Padevani après, il y aura Gina.
25:43 La maudite galette était le premier film de cette trilogie,
25:48 le film qui amorçait la naissance d'un auteur important,
25:53 mais qui sera considéré comme plus important après.
25:56 Et on aura peut-être occulté ces trois premiers films.
25:59 Un peu trop vite.
26:00 La maudite galette 1972, premier film de Denis Arcan,
26:05 dont le dernier opus, intitulé Testament,
26:07 est actuellement dans vos salles, courez-y.
26:09 Et n'oubliez pas, votre Viva vous attend non pas chez le notaire,
26:13 mais à tout moment sur les réseaux sociaux de Ciné+ et sur MyKanal.
26:17 - Oh my God, est-ce qu'il y a des médias ? - J'en ai pas vu encore.
26:19 C'est bizarre, parce que d'habitude, la vermine arrive assez rapidement.
26:22 ...