Sur France Inter, mercredi 8 novembre, Pierre-Henri Tavoillot, maître de conférences à Sorbonne Université, et le philosophe Michaël Foessel débattent de cette question : le RN est-il toujours un parti d’extrême-droite ?
Retrouvez le débat du 7/10 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-du-7-10
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00:00 Il est 9h07.
00:02 Le 7-10 d'Inter se poursuit dans un quart d'heure, Léa.
00:09 Deux invités pour une révélation, pour un scoop !
00:12 Qui représentera la France à l'Eurovision cette année ?
00:15 On vous dévoile en exclusivité, oui oui oui, en exclusivité sur Inter, son nom.
00:19 La patronne du divertissement de France Télé, Alexandra Raed-Amiel, sera là avec le ou la lauréat de...
00:26 Je sais pas comment...
00:28 Je vous rappelle que l'Eurovision passionne les jeunes et les moins jeunes dans le monde entier,
00:31 que c'est l'une des plus grosses audiences de France Télévision,
00:34 et que toute la communauté Eurovision partout en Europe est branchée en ce moment sur Inter
00:38 pour avoir le fameux nom, plus que 15 minutes à attendre.
00:42 Les éditos du jour, Média...
00:44 C'est le teaser le plus sexy que j'ai fait de ma vie.
00:46 J'ai mon chrono déclenché.
00:48 Les éditos, Média, Cyril Lacarrière sur la presse au défi de l'intelligence artificielle,
00:55 culture, foutons la paix à Arthur Rimbaud, c'est le coup de gueule d'Arnaud Vivian.
01:01 Et puis c'est une danseuse épique qui mélange les figures du krump américain
01:05 avec les techniques du buto japonais, Nash sera la nouvelle tête de Mathilde Serrel à 9h50,
01:09 mais tout de suite Nicolas.
01:10 Le débat du 7...
01:11 France Ofer, Léa Salamé, Nicolas Demorand, le 7-10.
01:17 Débat ce matin sur cette question, le RN, Rassemblement National, est-il toujours un parti d'extrême droite ?
01:24 Ce terme est récusé par Marine Le Pen, Jordan Bardella et tous les leaders du RN
01:31 qui aimeraient se débarrasser de cette étiquette pour parachever leur opération de dédiabolisation.
01:37 Que faut-il en penser ? Deux philosophes pour en parler,
01:40 Pierre-Henri Tavoyau, maître de conférence à la Sorbonne, président du Collège de Philosophie,
01:45 et Michael Fossel qui est professeur à l'école Polytechnique.
01:49 Bonjour à tous les deux, merci d'être là.
01:51 Michel Fossel, vous avez participé en octobre dernier à un dossier de la revue Esprit intitulé "Nommez l'extrême droite".
01:57 Vous y expliquez que l'extrême droite, puis particulièrement le RN, est en passe de ne plus être nommé du tout,
02:02 pour reprendre vos mots.
02:04 Parti populiste, souverainiste, illibéral, c'est ce qu'on entend de plus en plus.
02:08 Mais pour vous, il est important de rappeler que le RN reste un parti d'extrême droite.
02:13 Pourquoi ?
02:14 C'est important parce que pour décrire notre présent,
02:17 les mots qui comptent ou les mots qui l'épousent ou qui, d'une certaine manière, le décrivent, sont importants.
02:22 L'extrême droite, évidemment, c'est une formule qui est récusée par ceux que l'on accuse d'en relever,
02:27 parce qu'elle a une infamie historique, d'une certaine manière.
02:30 Elle a une histoire, si c'est le moins qu'on puisse dire, n'est pas glorieuse.
02:33 Mais c'est aussi une manière de décrire ce qui nous arrive, c'est-à-dire une manière de qualifier des idéologies.
02:38 On a trop tendance, me semble-t-il, à penser que nous sommes désormais dans un monde post-idéologique,
02:43 dans lequel, au fond, il n'y aurait plus ni droite ni gauche, peut-être on y reviendra,
02:46 parce qu'après tout, si on ne parle plus d'extrême droite, c'est d'abord aussi parce qu'on ne parle plus du clivage droite-gauche.
02:53 Il nous a semblé important, effectivement, de rappeler non seulement à l'histoire de ce mouvement politique,
02:58 mais aussi à ce qui caractérise encore aujourd'hui son idéologie, son programme.
03:04 Donc, de ce point de vue-là, nommer l'extrême droite, ce n'est pas seulement la combattre,
03:07 c'est aussi comprendre ce qui arrive, puisqu'il faut tout de même rappeler qu'évidemment,
03:11 le fait de ne plus la nommer est lié aussi à son succès électoral.
03:14 Vous parlez aussi de mémoire des faits, ça veut dire quoi ?
03:17 La mémoire des faits, c'est la manière dont aujourd'hui le rappel des faits historiques
03:21 constitue en soi déjà quelque chose de problématique.
03:24 J'ai été frappé en particulier par le fait que quand Elisabeth Borne avait rappelé un fait historique
03:29 qui était l'origine de ce mouvement, à l'époque le Front National,
03:32 elle avait été recadrée par le Président de la République,
03:35 au prétexte que la morale ne serait plus efficace en la matière.
03:41 Là aussi, on peut en discuter, mais je remarque que depuis que le RN est dédiabolisé,
03:46 il est à 30%. Tant que la question était tout de même encore morale,
03:50 je pense qu'il y a un lien entre politique et morale, il plafonnait à 15%.
03:55 Alors Pierre-Henri Tavoye, vous n'êtes pas d'accord.
03:57 Vous dites que rien dans le programme du RN aujourd'hui n'est encore d'extrême droite.
04:02 En fait, il faut bien comprendre justement, si on décrit les choses,
04:05 il y a trois sens possibles du mot "extrême droite".
04:08 Il y a un sens institutionnel, c'est ceux qui sont à l'extrême droite de l'hémicycle.
04:14 De ce point de vue-là, le RN est toujours d'extrême droite.
04:17 Il y a un deuxième sens qui est historique.
04:19 Qu'est-ce qu'on qualifie en France d'extrême droite ?
04:21 Il y a trois traits caractéristiques, peut-être quatre.
04:23 L'anti-parlementarisme, une position qui n'est pas simplement conservatrice,
04:28 mais réactionnaire, on appelle ça même révolutionnaire-conservatrice.
04:32 C'est la phrase "pour que rien ne change, il faut que tout change",
04:35 et donc cette dimension.
04:36 Puis une troisième position qui est une position de pureté nationale,
04:39 qu'il faut défendre et protéger à la fois à l'égard des ennemis de l'intérieur
04:43 et des adversaires de l'extérieur.
04:45 Il y a une quatrième dimension qui est une dimension d'organisation.
04:47 C'est un parti qui s'organise souvent de manière un peu paramilitaire.
04:51 C'est ces quatre dimensions.
04:52 De ce point de vue-là, aujourd'hui, me semble-t-il,
04:54 le RN ne correspond plus à ce qu'a été l'extrême droite historique en France.
04:59 Il y a un troisième sens qui est très important,
05:01 si on prend dans "extrême droite" le mot "extrémisme".
05:03 Il y a un livre de Pierre-André Tailleve qui est très intéressant
05:05 qui s'appelle justement "Qu'est-ce qui est l'extrémisme ?"
05:07 L'extrémisme, c'est quoi ? C'est la légitimation de la violence.
05:10 Aujourd'hui, de ce point de vue-là, le RN, c'est plutôt la LFI qui est dans ce cadre-là.
05:15 Il y a l'intolérance et le sectarisme,
05:17 c'est-à-dire le fait de ne pas supporter le désaccord et de faire des purges.
05:21 De ce point de vue-là aussi, c'est la LFI qui représente davantage l'extrémisme.
05:24 Et puis il y a une troisième idée.
05:26 Honnêtement, aucun parti en France n'a ça.
05:28 C'est ce qu'on peut appeler le fanatisme.
05:30 C'est-à-dire qu'une cause justifie absolument tous les moyens disponibles.
05:35 Et de ce point de vue-là, la seule cause pour la LFI,
05:37 c'est aussi la cause de gagner les élections, comme pour le RN.
05:41 Donc on n'a plus cette idée de grande cause.
05:43 Et je reviens là-dessus.
05:45 Qui, effectivement, est une caractéristique des grandes idéologies.
05:48 Donc de ce point de vue-là, je pense qu'en effet,
05:50 aujourd'hui, le RN ne peut plus être qualifié d'extrême droite.
05:54 - Michael Fossel, pourquoi vous n'êtes pas d'accord avec lui ?
05:56 Quand on y reprend ses quatre critères, vous vous dites que ce n'est pas pertinent ?
05:59 - Ses quatre critères sont certainement pertinents pour représenter
06:02 ou pour faire penser à ce qu'on entend le plus souvent par "extrême droite".
06:05 Et on a une tendance aussi, et ça, du point de vue historique, c'est important de le rappeler,
06:09 à identifier l'extrême droite à ce qu'il y a eu, si je puis dire, en elle, de pire, historiquement,
06:13 le fascisme, le nazisme.
06:14 Et de ce point de vue-là, je vous accorde qu'il n'y a pas,
06:16 et heureusement d'ailleurs, à l'horizon en France, de chemise brune, de chemise noire.
06:20 Mais l'extrême droite est plus, je dirais, diverse que cela.
06:23 Moi, ce qui me semble être caractéristique de ces mouvements,
06:26 qui, encore une fois, sont très divers, historiquement et dans le présent,
06:29 eh bien, c'est tout de même la manière dont ils insistent sur des inégalités qui ne sont pas rattrapables.
06:34 C'est-à-dire aux réalités qui veulent inscrire, par le fait d'être nées,
06:38 par le fait d'avoir une citoyenneté ou de ne pas l'avoir, des inégalités.
06:41 Or, le Fonds national, le Rassemblement national, actuellement,
06:44 continue à être fondé, dans son programme, sur la préférence nationale,
06:47 qu'il a d'ailleurs, je crois, rebaptisé la priorité nationale.
06:50 C'est-à-dire tout de même un principe de discrimination qui ne peut pas,
06:54 du point de vue de ceux qui souffrent ou qui sont mis un petit peu au bord du chemin,
06:58 qui ne peut pas être rattrapé par eux.
07:00 C'est ça qui le rend, je dirais, extrême droite.
07:02 C'est-à-dire pas simplement l'inégalité, mais on ne peut pas, au fond, donner à des citoyens...
07:06 Sur ce point-là, qui, et c'est vrai, est toujours dans le programme du Rassemblement national,
07:09 c'est-à-dire la priorité nationale, la préférence nationale,
07:12 l'inégalité de fait entre ceux qui sont français et ceux qui ne le sont pas,
07:16 pour vous, ça ne fait pas quelque chose d'extrême droite ?
07:19 Ce n'est pas simplement une inégalité de fait, c'est une égalité de droit.
07:21 C'est-à-dire qu'en l'occurrence, il y a une différence entre les français et ceux qui ne le sont pas.
07:24 Mais ce n'est pas le Rassemblement national qui prend de ça, c'est le droit français qui prend de ça.
07:29 Donc je trouve que là, il y a quand même...
07:31 Si on peut dire la trilogie qui consiste à dire identité nationale, souveraineté et sécurité,
07:38 ça c'est être Rassemblement national, c'est être d'extrême droite,
07:41 alors je suis personnellement d'extrême droite.
07:43 C'est-à-dire que je pense que l'identité nationale, ça veut dire quelque chose.
07:46 On peut penser une identité nationale qui ne soit pas étroite, qui ne soit pas exclusive,
07:51 qui ne soit pas xénophobe, c'est possible.
07:53 Souveraineté, je pense que la souveraineté c'est la démocratie, la souveraineté du peuple,
07:56 donc de ce point de vue-là, je me reconnais dans cette notion.
07:59 Et troisièmement, sécurité, la sécurité c'est la base du contrat social.
08:04 On donne un peu de liberté pour avoir de la sécurité.
08:08 Donc pour vous, c'est...
08:09 Je vais reprendre simplement une de vos formules, la souveraineté du peuple, bien sûr,
08:12 il n'y a pas de démocratie sans la souveraineté du peuple.
08:14 La question est de savoir quel peuple y a-t-il,
08:17 et c'est un peu à l'arrière-plan de tous les discours de l'extrême droite,
08:19 y compris du Rassemblement National, un bon peuple,
08:22 qui serait le peuple ici issu, je dirais, des Français, ou de souche, ou de fraîche souche,
08:28 mais tout de même qui sont reconnus comme de bons citoyens,
08:30 et puis un mauvais peuple, le peuple inassimilable,
08:33 le peuple dont on présuppose que pour des raisons religieuses ou de naissance,
08:36 il ne peut pas faire partie de la souveraineté.
08:39 Alors de ce point de vue-là, évidemment, le fait que le Rassemblement National,
08:43 comme des autres partis politiques, utilise le discours, je dirais, de la démocratie,
08:47 à savoir par exemple la souveraineté du peuple,
08:49 ne suffit tout de même pas, à mon sens, à le valider comme un parti
08:52 qui fait partie désormais de l'arc républicain dont on le reconnaît.
08:55 Pour vous, Pierre-Henri Tavoyau, il fait totalement partie de l'arc républicain,
08:58 la dédiabolisation a totalement marché,
09:00 et aujourd'hui voter pour le Rassemblement National, c'est un acte banal ?
09:02 Non, ce n'est pas un acte banal, parce que je pense que justement,
09:04 si on veut éventuellement empêcher que le Rassemblement National arrive au pouvoir,
09:08 il faut comprendre ce que c'est.
09:10 Et je pense que l'argument moral...
09:11 C'est quoi pour vous ? Si ce n'est pas de l'extrême droite, c'est quoi ?
09:14 C'est une droite radicale, on va dire.
09:16 Une droite radicale qui relève d'une logique populiste.
09:19 Les mots ont un sens, ce populisme.
09:21 Quand on confond le populisme et le néofascisme,
09:23 le fascisme, c'est une logique autoritaire, élitiste, ultra-élitiste,
09:28 et basée sur une idéologie puissante.
09:30 Le populisme, c'est ultra-démocratique, ce n'est pas anti-démocratique,
09:34 c'est anti-élitaire, et avec une idéologie molle.
09:37 Là aussi, les mots ont un sens.
09:39 Le populisme n'est pas le néofascisme.
09:41 Moi, je pense que c'est une position qu'on appelle une position illibérale.
09:45 Et là aussi, le terme est intéressant.
09:47 Qu'est-ce que ça veut dire illibéral ?
09:48 Ça veut dire effectivement que dans le couple Demos et Kratos,
09:50 qui est difficile à concilier le peuple et le pouvoir,
09:53 l'illibéralisme considère qu'il faut booster le pouvoir
09:57 au détriment d'un certain nombre de libertés.
09:59 On peut prendre des libertés avec les libertés
10:01 pour assurer le bonheur du peuple et pour incarner davantage le peuple.
10:04 Voilà ce qu'est le Rassemblement National.
10:06 Et voilà, si on veut le combattre, voilà les arguments qu'on peut avoir.
10:10 C'est un parti dangereux ou pas, moralement ?
10:13 Alors vraiment, là, pour le coup...
10:15 Non mais, parce qu'il a parlé de morale.
10:16 Et bien justement, la position morale, pour moi,
10:18 est une position qui est véritablement dangereuse et contre-productive.
10:23 Ça veut dire qu'il y a 13 millions d'électeurs en France
10:27 qui sont soit des idiots, soit des salauds.
10:30 Soit des idiots parce qu'ils n'ont pas compris
10:32 que le Rassemblement National est un parti extrémiste
10:35 et fasciste et raciste.
10:37 Soit des salauds parce qu'ils sont eux-mêmes racistes et fascistes.
10:40 Je trouve que ce discours est contre-productif.
10:42 Illibéral, populisme plutôt que d'extrême droite,
10:45 Michael Fussell ?
10:46 Illibéral, c'est difficile à dire, c'est encore plus difficile à définir.
10:49 Et le populisme, c'est un concept qui me paraît tellement vague, lui aussi,
10:53 qu'on ne peut pas tellement l'utiliser.
10:55 Je vais m'expliquer.
10:56 En 2017, au fond, il y avait trois populismes qui se sont affrontés.
11:00 C'est-à-dire, il y avait le populisme revendiqué à l'époque de gauche par Mélenchon.
11:03 Il y avait le populisme de Marine Le Pen, revendiqué par elle.
11:07 Et puis, il y avait aussi un populisme, peut-être un peu plus, je dirais, raffiné,
11:11 qui était celui d'Emmanuel Macron, si on entend par populisme l'idée
11:14 d'en appeler, au fond, au peuple pour renverser les élites à l'époque,
11:18 dans le cas de Macron, les élites politiques des anciens partis.
11:22 Il y a des choses qu'il assumait d'ailleurs, Emmanuel Macron.
11:24 Il l'assumait, absolument.
11:25 Je ne sais pas publiquement, mais il disait, il faut outrepasser les corps intermédiaires,
11:29 les médias et tout ça.
11:30 Je parle directement au peuple.
11:31 Tout à fait. Donc, cette tentation, je dirais, d'appeler au peuple,
11:34 directement par-delà les corps intermédiaires, elle existe dans la démocratie.
11:37 Elle est transpartisane.
11:38 Donc, à partir du moment où un concept peut être revendiqué par des candidats
11:43 sur le fond de leur programme, aussi opposé, il me semble qu'il n'est pas éclairant.
11:47 Parce que dans une démocratie, effectivement, l'appel au peuple fait partie
11:50 de la rhétorique la plus habituelle.
11:54 En réalité, on parle...
11:55 Dans une démocratie, l'appel au peuple fait partie des fondamentaux.
11:58 Je suis désolé.
11:59 Par conséquent, tout démocrate est quelque part un peu populiste.
12:02 Un peu populiste, absolument.
12:03 Par conséquent, ça ne permet pas de caractériser un parti politique.
12:06 Un peu populiste. Parce qu'on peut déterminer, je t'entraide le faire,
12:08 les traits caractéristiques du populisme. Ils sont précis.
12:10 Je suis d'accord. Mais en tout cas, quand on parle de populisme ou d'illibéralisme,
12:13 on renonce au clivage droite-gauche, donc par conséquent aussi à la différence
12:18 entre l'extrême droite et l'extrême gauche.
12:20 Pierre-Henri Tavoyau, si on ne dit plus que le Rassemblement National,
12:23 si on suit votre position qui est de dire que le Rassemblement National
12:26 n'est plus d'extrême droite, comment vous le combattez ?
12:28 Ou il ne faut pas le combattre ?
12:31 La question, chacun, chaque électeur le reprendra.
12:35 La question, pour moi, me semble-t-il, c'est que le Rassemblement National
12:38 qui arrive au pouvoir ne sera pas efficace.
12:40 Voilà. C'est la question de l'efficacité.
12:42 Pourquoi il ne sera pas efficace ?
12:44 Parce que, précisément, il suscitera tellement de désaccords et tellement de clivages
12:48 que son efficacité politique sera mise en doute.
12:51 Et deuxièmement, et donc ce qui est son fond de commerce,
12:55 je serai plus efficace, nous serons plus efficaces.
12:57 Et deuxièmement, la démocratie comporte un certain nombre de contre-pouvoirs,
13:01 et heureusement, et ces contre-pouvoirs, notamment juridiques,
13:04 mettront un frein à son action.
13:06 Donc voilà, moi, c'est ça.
13:07 Ce n'est pas un argument moral en disant "ce sont des salauds".
13:09 Sartre, je le rappelle, le disait, être de droite, c'est être salaud.
13:13 Et par ailleurs, j'insiste sur le fait que le terme de populisme,
13:16 on peut le définir. Effectivement, il est transpartisan.
13:18 C'est quoi ? C'est l'anti-élitisme, c'est la dénonciation de l'impuissance
13:23 et de l'insécurité sociale, politique, culturelle et économique.
13:28 C'est une idéologie molle, et puis aussi c'est un style.
13:32 - Michael Fossel ?
13:33 - Oui, sur cet argument selon lequel, bon, ils ne seront pas efficaces.
13:37 Bon, peut-être faut-il espérer d'ailleurs qu'ils ne le soient pas.
13:39 Mais c'est un argument qui me paraît quand même assez équivoque,
13:41 et on l'a déjà employé à propos de Mélanie au pouvoir en Italie.
13:43 Finalement, l'argument qu'on trouvait encore à opposer à l'extrême droite de Mélanie,
13:48 c'est "elle ne fait pas ce qu'elle promet".
13:50 Alors moi, j'ai une tendance peut-être un peu idéaliste, un philosophe,
13:52 que je juge plutôt sur les principes que sur les faits.
13:54 Donc, d'une certaine manière, lui reprocher simplement de ne pas pouvoir,
13:57 je parle de Mélanie ici, donc de l'extrême droite qui est au pouvoir,
14:00 de ne pas pouvoir mettre en œuvre sa politique xénophobe,
14:03 c'est tout de même un reproche un peu équivoque.
14:05 Parce qu'en réalité, on peut essayer aussi de prendre les choses au point de vue des principes.
14:09 Est-il simplement juste de considérer, du point de vue de la démocratie,
14:12 que la politique doit passer par une discrimination relative aux naissances ?
14:17 - Merci à tous les deux. - Merci.