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Les débatteurs du jour sont l'économiste Thomas Piketty et le politologue Jérôme Fourquet. Thème du jour : "Comment votent les Français ?" Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-du-7-10/le-debat-du-7-10-du-jeudi-26-octobre-2023-9016679

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00:00 ce matin sur… Et quel débat ! Oui, quel débat, évidemment ! Ce matin sur deux essais
00:04 importants qui ont marqué la rentrée et le débat public ces dernières semaines.
00:08 Ils posent, au fond, je schématise, la même question en France, qui vote pour qui et pour
00:14 quelle raison ? Mais à cette question, ils apportent des réponses très différentes,
00:19 parfois diamétralement opposées.
00:21 On en parle ce matin avec leurs auteurs, qu'on avait reçus l'un et l'autre à 8h20.
00:26 Aujourd'hui, ils ont donc accepté de débattre, l'un est économiste, Thomas Piketty, on
00:31 vous avait reçu avec Julia Cagé pour cette somme, « Une histoire du conflit politique,
00:37 élections et inégalités sociales en France », 1789-2022, au seuil.
00:44 L'autre est politologue, directeur du département opinion à l'IFOP, Jérôme Fourquet, on
00:49 vous avait reçu pour le troisième tome de votre trilogie sur la France, intitulé « La
00:54 France d'après tableau politique », au seuil également, au moins vous avez un point
00:59 commun, la même maison d'édition !
01:01 Bonjour à tous les deux !
01:03 Bonjour !
01:04 Merci d'être là, je crois que c'est la première fois que vous débattez ensemble,
01:07 Jérôme Fourquet et Thomas Piketty.
01:08 Tout à fait !
01:09 C'est la première fois que vous vous voyez en vrai ?
01:10 Je crois, oui, oui, tout à fait !
01:12 Bon, très bien, on est content de réaliser cette rencontre.
01:15 On ne va pas revenir sur le fond de vos deux livres, on en a beaucoup parlé à l'un
01:18 et à l'autre, mais tout de suite sur le cœur de ce qui vous sépare.
01:21 Si vous êtes d'accord tous les deux pour dire que les questions économiques, le revenu,
01:24 le patrimoine sont essentielles pour comprendre le vote des Français.
01:27 Vous, Thomas Piketty, vous pensez que les questions identitaires et migratoires ne sont
01:31 que très marginales quand on dépose son bulletin dans l'urne.
01:34 Vous n'êtes pas d'accord avec ça, Jérôme Fourquet ?
01:38 Alors, j'ajouterais en point d'accord le fait également que le lieu de résidence
01:46 est un déterminant très important du vote aujourd'hui.
01:50 Donc le lieu de résidence va condenser énormément de choses.
01:53 Il y a le prix de l'immobilier, l'accessibilité aux services publics, le sentiment d'être
01:58 dans une France désirable ou une France reléguée.
02:01 Ce que Thomas Piketty et Julia Caget appellent la géoclasse, ça vous avez un point d'accord ?
02:06 La classe géosociale où ils agrègent, je pense de manière tout à fait intéressante,
02:11 les dimensions sociales et géographiques.
02:13 Donc moi j'adhère à tout ça, mais je pense au regard des chiffres qu'il faut aussi
02:19 intégrer d'autres paramètres qui sont notamment les questions d'insécurité,
02:25 les questions aussi liées à l'immigration dans notre société pour éclairer un certain
02:32 nombre de phénomènes.
02:34 Et Thomas Piketty et Julia Caget parlent à de nombreuses reprises dans leur livre
02:38 du caractère multidimensionnel du vote.
02:41 Je pense qu'on peut se retrouver là-dessus.
02:43 Après c'est une question de savoir est-ce qu'en dernière analyse, il y a quelque
02:47 chose qui va tout emporter ou pas.
02:49 Moi je considère qu'il faut intégrer dans le modèle aussi ce type de variables.
02:55 Des questions identitaires et d'immigration.
02:57 Et de sécurité.
02:58 Oui et de sécurité.
02:59 Qui joue forcément un rôle, qui joue évidemment un rôle.
03:01 C'est évident que les électeurs concrètement qui se déplacent aujourd'hui pour voter
03:05 pour le Rassemblement National, par rapport à tous ceux qui ne se déplacent pas, notamment
03:09 qui restent à la maison, ils ont en moyenne une attitude face à l'immigration qui n'est
03:13 pas la même.
03:14 C'est évident.
03:15 Ce sur quoi on insiste vraiment dans le livre avec Julia Cagé, c'est qu'il y a eu une
03:20 transformation très forte au cours du temps du vote FN-RN qui à partir de 2007-2012 est
03:26 devenu vraiment un vote rural et populaire.
03:29 Alors qu'il était avant un vote urbain et très fort dans des endroits où il y avait
03:32 une présence immigrée importante.
03:34 Il s'est complètement transformé et en particulier on insiste aujourd'hui sur la
03:38 dissociation complète entre un vote Le Pen-RN qui est donc rural populaire, un vote Zemmour
03:44 dont on pourrait croire qu'il lui ressemble par l'attitude anti-immigré mais qui lui
03:47 est très urbain et très favorisé, très bourgeois au sens où plus le revenu est élevé
03:51 dans la commune mais aussi au niveau individuel dans les enquêtes, plus il est important.
03:55 Et donc nous, ce sur quoi on insiste c'est que finalement dans ce paysage de tripartition
03:59 sur lequel on est tous d'accord qu'il y a une tripartition, nous on insiste sur l'instabilité
04:03 de cette situation et sur les incohérences.
04:06 Alors il y a des incohérences dans tous les blocs y compris à l'intérieur du bloc de
04:09 gauche mais le bloc de droite nationale, disons le bloc qui va du RN qui vous savez au législatif
04:16 n'a fait que 19% des voix donc pour s'étendre, pour avoir une majorité, il a besoin du vote
04:20 Reconquête, il a besoin d'une partie du vote LR et là c'est là qu'il y a une incohérence
04:25 énorme sur la question du libéralisme économique.
04:27 C'est-à-dire que le vote RN aujourd'hui, on l'explique notamment par le vote du non
04:32 au référendum de 2005 sur l'Europe et quand Nicolas Sarkozy essaye de récupérer cet
04:38 électorat en parlant de la racaille, du Karcher etc.
04:41 Ça marche pour une fraction de ce vote, la fraction la plus urbaine qui va voter aujourd'hui
04:45 pour Éric Zemmour mais le noyau rural populaire qui reste ensuite au FNRN, on ne peut pas
04:51 les attraper avec ce genre de rhétorique anti-immigrés parce que la question du libéralisme
04:57 économique et notamment la question de la ratification parlementaire du traité de 2005,
05:01 ça s'est vraiment resté en travers de la gorge.
05:03 On a eu un sentiment d'abandon notamment d'ouvriers, des bourgs et des villages qui
05:07 ont subi la désindustrialisation et qui demandent sur le terrain socio-économique des réponses.
05:12 Donc nous on insiste sur ce terrain-là pour bien montrer les incohérences de ce bloc
05:16 national.
05:17 Jérôme Forquet, oui.
05:18 Oui, alors j'adhère à ses propos notamment sur la distinction entre l'électorat zemmouriste
05:24 et l'électorat Le Pen.
05:26 Quand on a vu apparaître la carte du vote Zemmour, on était très intéressé parce
05:31 que c'était une nouvelle famille politique et donc on s'est rendu compte qu'elle
05:36 ressemblait en partie à la carte du vote RN avec des scores très élevés par exemple
05:40 sur le littoral méditerranéen, mais que tous les bastions RN du nord-est de la France,
05:45 ouvriers et populaires, manquaient à la pelle et que Éric Zemmour a donc capté seulement
05:51 la frange aisée ou bourgeoise de cet électorat.
05:54 Pour revenir sur le poids des considérations identitaires et sécuritaires, prenons pour
06:01 parler comme Julia Cagé et Thomas Piketty le haut de la distribution des revenus, prenons
06:05 par exemple les beaux quartiers parisiens ou franciliens et donc là on a un match entre
06:11 Zemmour et Macron sur des gens qui vont vivre dans des endroits où le mètre carré est
06:16 à peu près le même, qui vont avoir le même type de revenus et ce qui va faire la ligne
06:20 de partage des eaux.
06:21 C'est la question identitaire.
06:22 C'est la question identitaire.
06:23 Mais ça après ça fait pas un bloc majoritaire.
06:26 Non, non, mais c'est ça parce que nous on essaye de regarder ce qui dans le système
06:29 de tripartition actuel peut continuer et comment le système peut se reconfigurer.
06:33 Et ce sur quoi on insiste vraiment beaucoup c'est que ce bloc national, anti-immigrés,
06:38 ethnocentrique qu'on peut appeler de différentes façons, il est complètement incohérent sur
06:41 le plan économique.
06:42 Et si il se retrouvait demain à gouverner, en fait il y aurait des déceptions considérables
06:47 et pour voter une loi sur les retraites, un budget, la transition écologique, les services
06:51 publics, les impôts, il serait d'accord sur à peu près rien.
06:54 Et donc par rapport à ça, le message, un des messages de notre livre, c'est que les
06:59 questions socio-économiques pour ensuite constituer une majorité gouvernée sont quand
07:04 même centrales.
07:05 Et de ce point de vue-là, le bloc de gauche a un socle populaire urbain qui va très au-delà
07:10 de la question des origines, c'est-à-dire qui regroupe notamment des employés à bas
07:14 revenus, des personnels dans le nettoyage, dans les soins, dans la restauration, dans
07:18 le commerce.
07:19 Donc ce socle populaire est plus important que ce qu'on entend trop souvent.
07:23 - Oui Thomas Piketty, sauf que vous dites vous Jérôme Fourquet qu'il faut que la gauche,
07:26 si elle veut revenir au pouvoir, réponde au questionnement de l'électorat populaire
07:31 et qu'il n'y réponde pas sur les questions migratoires et sécuritaires.
07:34 Et que pour l'instant, la gauche, c'est là où vous vous divergez.
07:38 Vous vous dites, soit la gauche, elle apporte des réponses, elle arrête de mettre les questions
07:42 migratoires et sécuritaires sous le tapis, soit elle ne reviendra pas au pouvoir.
07:44 Et là vous n'êtes pas d'accord.
07:45 Quand je dis pour parler à une partie de l'électorat populaire, notamment celui qui
07:50 habite dans la France périphérique.
07:53 Donc moi je pense, et typiquement prenons un candidat au législatif comme François
08:01 Ruffin.
08:02 François Ruffin dans un territoire très particulier, avec l'équation personnelle
08:05 qui est la sienne, sa circonscription dans la Somme mêle à la fois les quartiers nord
08:09 d'Amiens, quartiers de grands ensembles, et également toute la vallée de la Somme,
08:14 désindustrialisée jusqu'à Abbeville.
08:15 Et quand vous regardez les résultats des législatives, alors le niveau de participation
08:19 n'est pas celui de la présidentielle, Ruffin parvient le tour de force à réaliser à
08:23 peu près le même score dans les quartiers que celui de Jean-Luc Mélenchon deux mois
08:27 avant, mais il amplifie considérablement le score de Jean-Luc Mélenchon dans toute
08:31 la partie périurbaine et rurale, et désindustrialisée de sa circonscription.
08:36 Mais il ne vous a pas échappé que Ruffin sur toute une série de sujets, il ne parle
08:39 pas exactement comme Jean-Luc Mélenchon.
08:42 Est-ce que ce modèle est extrapolable au niveau national, c'est une vraie question,
08:47 parce qu'il y a aussi l'équation personnelle, François Ruffin est très implanté dans
08:49 sa circonscription.
08:50 Et donc il y a sa dernière...
08:52 Vous pensez que ces positions qui sont plus dures sur les questions des frontières, de
08:56 l'immigration...
08:57 C'est surtout le discours, moi je pense que c'est surtout le discours économique et social
09:01 pour le coup de François Ruffin, la question de la redistribution des richesses, de la
09:05 mise à contribution des plus favorisés, qui lui permet de cliver sur les questions
09:09 socio-économiques et effectivement d'aller vers un électorat populaire rural, qui dans
09:14 notre analyse est absolument central pour la gauche.
09:16 Et on insiste vraiment, parce que nous la spécificité de notre livre c'est qu'on
09:19 essaye de se placer dans une longue durée historique.
09:21 On a aujourd'hui une rupture entre les classes populaires urbaines et les classes populaires
09:25 rurales qu'on n'avait pas vue depuis la fin du XIXe siècle.
09:29 Et à l'époque c'était vraiment sur un enjeu, des enjeux notamment socio-économiques,
09:33 entre des classes paysannes, des classes ouvrières urbaines et un monde paysan qui ne se retrouvait
09:37 pas dans le discours des partis ouvriers urbains.
09:39 Et aujourd'hui à nouveau on a une rupture très forte qui se fait sur des inscriptions
09:44 dans le tissu territorial et productif qui sont différentes.
09:46 Donc la question de la voiture individuelle, la question du pavillon individuel sur lequel
09:49 beaucoup d'électeurs ruraux populaires se sentent regardés parfois un peu de haut
09:53 par les urbains et parfois par des urbains plus aisés qu'eux qui prennent l'avion
09:57 pour partir en week-end.
09:58 Et donc sur la question écologique, sur la question sociale, la gauche doit aller vers
10:02 cet électorat rural populaire.
10:03 Mais pas sur la question migratoire.
10:04 Sur la question sécuritaire.
10:05 Alors attendez, il faut déjà distinguer les choses.
10:08 Parce que vous savez, l'insécurité ça frappe d'abord et avant tout les habitants
10:11 des banlieues populaires.
10:12 Et nous on a regardé, alors vous regarderez, c'est dans le chapitre 14, c'est un peu
10:15 loin dans le livre, mais on regarde comment varie le vote dans les communes qui font face
10:23 à des taux de délinquance, un nombre de délits par habitant plus élevé que la moyenne.
10:27 Et ce qu'on constate c'est qu'en fait les communes qui sont encore plus soumises
10:30 à l'insécurité votent en fait encore plus fortement, notamment à gauche, notamment
10:34 pour Mélenchon et Roussel, et alors aussi un peu plus pour Le Pen et Zemmour, mais
10:38 moins que pour Mélenchon.
10:39 Parce que les habitants, notamment des quartiers populaires, oui veulent des réponses sur
10:43 l'insécurité, mais ça, ça demande des services publics, ça demande de payer des
10:47 policiers.
10:48 Parce que je rappelle que Nicolas Sarkozy, c'est le président qui a supprimé le plus
10:52 grand nombre de bombes de policiers.
10:53 Donc à un moment, il faut les payer, ces policiers et ces services publics.
10:56 Jérôme Forquet.
10:57 Alors j'ai apprécié notamment dans le livre de Thomas Piketty, de Julia Cagé, une référence
11:03 qui nous ramène loin dans le temps, mais c'est un des nombreux mérites du livre,
11:07 en 1849, où une presse locale de gauche se lamente du fait que les élites de gauche
11:17 qui sont dans les grandes villes, essentiellement parisiennes, ne parlent pas de la question
11:21 de l'accès aux forêts pour couper du bois, faire pêtre les animaux, etc.
11:25 Et cette presse locale de gauche dit "si on ne commence pas par ça, on s'alienne
11:29 automatiquement toute une partie du vote paysan qui pourrait sinon nous entendre".
11:34 Et de la même manière, aujourd'hui, si dans cette France périphérique, vous ne
11:38 parlez pas de la voiture, moi dans mon livre, je parle de Marine Le Pen et du peuple de
11:42 la route, les gens qui sont dépendants de la voiture.
11:43 Il y avait une note à la Fondation Jean Jaurès, qui s'était amusée, c'est pas
11:46 très amusant, à compter le nombre de fois où le terme de "voiture" était cité
11:50 dans les programmes des différents candidats.
11:52 Et c'était quasiment absent du programme des candidats de gauche.
11:55 Vous êtes disqualifiés.
11:57 Quand Marine Le Pen, dans son débat d'entre deux tours face à Emmanuel Macron, veut
12:00 illustrer sa mesure sur la baisse des taxes ou la suppression des taxes sur les produits
12:05 pétroliers, elle nous dit "prenons l'exemple d'une famille qui se chauffe au fioul".
12:09 La France qui se chauffe au fioul, c'est cette France-là.
12:12 Et elle n'est pas présente dans le programme de la gauche.
12:14 Ce que nous on voit aussi dans nos enquêtes qualitatives de l'IFOP, c'est que dans
12:16 un pays qui s'est dépolitisé, aujourd'hui, toute une partie de la population scanne
12:22 les candidats et regarde si le diagnostic que ces candidats portent sur l'état du
12:26 pays correspond à ce qu'ils ressentent, à ce qu'ils vivent.
12:28 Si ce diagnostic n'est pas partagé, alors ils ne vont pas plus loin.
12:32 Et donc c'est un des grands enjeux pour la gauche de remettre dans son diagnostic
12:37 des éléments qui pourraient lui permettre de parler à cet électorat.
12:40 Ce que, en partie, fait François Ruffin.
12:41 On vous avait posé la question, Jérôme Fourquet, vous comparez dans votre livre l'évolution
12:47 des prénoms arabo-musulmans donnés en France avec l'évolution du vote Rassemblement
12:54 National.
12:55 Qu'avez-vous pensé du rapprochement de ces deux courbes statistiques, Thomas Piketty ?
13:01 Oui, alors, je vais vous dire la vérité, ce n'est pas la partie du livre de Jérôme
13:05 Fourquet que je préfère.
13:06 Parce que je pense qu'en fait, il faut faire attention qu'il y a beaucoup plus de phénomènes
13:10 de mélange en France que ce qu'on pourrait laisser entendre.
13:13 Par exemple, les prénoms féminins sont extrêmement mélangés et intéressent moins Jérôme
13:16 Fourquet.
13:17 Mais je pense que c'est important aussi les mélanges.
13:18 Et beaucoup des prénoms masculins qu'on va, par exemple, Yanis, qu'on va attribuer
13:23 parfois dans vos travaux à des origines arabo-musulmanes, en fait, sont des prénoms extrêmement mélangés
13:28 qu'on trouve avec des origines différentes.
13:30 Et de façon générale, ce que montrent les enquêtes, notamment l'enquête trajectoire
13:33 et origines de l'Inède, c'est qu'on n'est pas du tout dans la société de ségrégation
13:38 nord-américaine où les blancs et les noirs ont 2% de taux d'intermariage.
13:41 Si vous prenez toutes les personnes aujourd'hui en France qui ont un grand-parent né dans
13:47 les pays du Maghreb, vous en avez 80% qui ont au moins un autre grand-parent qui n'ont
13:52 aucune origine dans le Maghreb.
13:54 Autrement dit, vous avez en fait un niveau de mixité dans les origines.
13:56 Et je pense que la société française n'est pas dans la situation de la société états-unienne
14:01 à la sortie de la ségrégation.
14:02 Donc, si vous regardez les enquêtes d'opinion, alors c'est vrai, vous dites "Est-ce qu'il
14:06 y a trop d'immigrés ?" Vous avez encore une grande partie des gens qui disent qu'il
14:09 y a trop d'immigrés.
14:10 Mais si vous posez la question, des questions un peu plus subtiles sur "Est-ce que les personnes
14:13 d'origine étrangère sont une source d'enrichissement pour la société française ?" Vous avez
14:18 aujourd'hui 75% des gens qui répondent "oui", alors que dans les années 80-90, vous avez
14:22 30-40%.
14:23 Donc, il ne faut pas oublier le fait que la société française, dans son ensemble, est
14:27 en train de passer ce stade.
14:29 Et ce serait très dommage, vous savez, que les responsables politiques se focalisent
14:33 sur ces questions qui aient une facilité.
14:35 Parce qu'au moment de résoudre les problèmes de transport, je suis très heureux que vous
14:38 fassiez référence aux élections de 1848, les questions de logement, pour voter un budget
14:43 de transition écologique, pour voter une loi sur les retraites, il ne suffit pas d'être
14:46 énervé contre les immigrés.
14:48 Et donc c'est ça l'incohérence fondamentale du bloc national et aussi la force potentielle
14:52 du bloc de gauche si elle s'adresse à la classe populaire plurale.
14:56 - Un mot, Jérôme Faquet ?
14:57 - Oui, oui, alors, de facto, la société française est rentrée dans une configuration
15:03 multiculturelle du fait de l'immigration, donc les attitudes ont évolué.
15:09 Mais moi, le diagnostic que je fais, c'est que la dynamique du Rassemblement National
15:13 s'explique en partie comme une réaction.
15:16 Alors, qu'on juge à tort ou à raison, mais vis-à-vis de cette situation-là et que ça
15:21 continue d'être un carburant électoral important pour ce parti.
15:27 - Merci à tous les deux.
15:29 Merci Thomas Piquet.
15:30 - Merci à vous.
15:31 - Merci Jérôme Faquet.
15:32 - On vous réinvitera pour ces six cours.
15:35 - Ça méritait un bon quart d'heure supplémentaire, minimum.
15:39 Merci infiniment.

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