BE SMART - Investir dans l’innovation santé

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Comment trouver une rentabilité dans les innovations de santé ? Pierre Courteille explique que les pouvoirs publics jouent toujours un rôle essentiel lorsque les profits ne sont pas assez importants pour investir dans une solution. Et selon lui, les Etats-Unis restent un marché directeur, où l’on peut trouver les capitaux nécessaires au développement des nouveaux produits de santé.

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Transcription
00:00 - Et donc c'est Pierre Courtel qui est avec nous pour démarrer.
00:07 Salut Pierre.
00:08 - Bonjour Stéphane.
00:09 - Co-fondateur.
00:10 Alors tu es toi-même cadre dirigeant...
00:12 - Voilà, dans une société qui s'appelle Abivax.
00:14 - Abivax.
00:15 Mais que je connais bien.
00:16 - Et voilà.
00:17 - Je connais bien parce que le patron fondateur d'Abivax, son nom va revenir.
00:21 - Philippe Pouletti.
00:22 - Et voilà, Philippe Pouletti.
00:23 Philippe Pouletti est venu le 1er, il y a 10 ans, m'expliquer l'économie des bibliothèques,
00:29 la nécessité d'amener beaucoup d'argent très vite parce que ça pompe beaucoup de
00:34 cash, il faut aller vite.
00:35 Ce qui s'est passé au moment du Covid où on a eu quand même, effectivement, on l'a
00:39 tous vu sur l'ARN, un truc assez dingue et ça a été peut-être une sorte de démonstration,
00:44 je pense qu'on va dire un tube à essai, une sorte de démonstration que oui, quand on
00:47 met un milliard quelque part et qu'on donne toutes les autorisations nécessaires...
00:51 - Ça va vite.
00:52 - Voilà.
00:53 - Ça va vite.
00:54 - Exactement.
00:55 - Derrière, est-ce qu'il n'y a pas un petit trou d'air ? J'ai vu la CUP Pfizer disait
00:57 "bon, on est obligé de faire un write-off sur pas mal de nos traitements Covid".
01:02 À la limite, je laisse ça de côté mais en fait, on s'attendait à un développement
01:05 très rapide de nouvelles solutions ARN.
01:07 C'est vrai qu'on se dit "bon, finalement, les choses ne sont pas si simples".
01:11 - Alors pour l'ARN, les choses ne sont pas si simples et ça continue, c'est-à-dire
01:14 qu'on est revenu sur des timelines qui sont, je veux dire, les standards.
01:19 Mais ce qu'il faut savoir, c'est que pendant le Covid, le secteur de la santé s'est bien
01:24 tenu puisqu'on a eu des investissements.
01:26 - Oui, oui, ça.
01:27 - Il y a eu des investisseurs, en plus des investisseurs généralistes qui sont arrivés.
01:29 Après le Covid, la situation est différente.
01:32 Pourquoi ? Parce qu'on a d'abord un problème économique qui est l'inflation et on a un
01:36 problème géopolitique, l'incertitude avec la guerre en Ukraine et aujourd'hui avec la
01:42 COP.
01:43 - Ça avait commencé avant, j'ai l'impression, le trou d'air.
01:45 - Ça avait commencé un petit peu avant.
01:46 - Laissons de côté, peut-être.
01:47 Mais pourquoi ? Je ne comprends pas bien en quoi la géopolitique, alors franchement,
01:50 Israël, c'est tout neuf, même l'Ukraine.
01:53 Je ne comprends pas bien en quoi ça peut effrayer des investisseurs.
01:56 Parce que c'est ça le sujet.
01:57 - Non, mais les deux facteurs cumulés, c'est-à-dire inflation plus incertitude, ont fait que
02:03 c'est très psychologique, les marchés, ont fait que les marchés...
02:06 - C'est la mer qui se retire.
02:08 - Il y avait une petite bulle du Covid et ça a fait exploser cette bulle.
02:13 Alors exploser, je ne dirais pas exploser, mais ça l'a fait doucement...
02:15 - Non, mais c'est ça l'image, c'est la mer qui se retire.
02:18 - Exactement.
02:19 - On récupère du cash.
02:20 Ceux qui ont du pognon veulent récupérer du cash pour pouvoir agir très vite.
02:22 - Etre très souple.
02:23 - Exactement.
02:24 Alors les investisseurs généralistes sont partis, donc effectivement.
02:28 Et puis les investisseurs spécialistes, eux, sont beaucoup plus focalisés.
02:34 C'est-à-dire qu'ils soupoudrent beaucoup moins.
02:35 Ils sont beaucoup plus, ils passent beaucoup plus de temps à évaluer une société due
02:41 à cette incertitude.
02:42 Et donc ils mettent leur argent là où il leur semble que ça va être le mieux, tout
02:47 simplement.
02:48 Alors on cherche, moi c'est ça la question toujours qui est passionnante, c'est on cherche
02:54 aujourd'hui des rentabilités ou des solutions et des traitements qui sont encore manquants
03:02 aujourd'hui ?
03:03 Ce n'est pas forcément...
03:04 - Les deux.
03:05 - Oui, mais parfois ça ne va pas ensemble, voilà ce que je veux dire.
03:09 - Alors quand ça ne va pas ensemble, en fait le système public fait en sorte...
03:14 - Quand ça ne va pas ensemble, on pense par exemple à...
03:16 - Alzheimer.
03:17 - Alzheimer.
03:18 - Alzheimer, il n'y a pas de rentabilité pour aller essayer de...
03:20 - Il n'y avait pas de rentabilité jusqu'à ce que les Etats-Unis mettent des milliards
03:23 de dollars sur la table en disant on a un plan Alzheimer aujourd'hui, on veut que d'ici
03:27 20 ans on ait des médicaments qui traitent de façon efficace Alzheimer.
03:32 Les Etats-Unis ont fait la même chose avec le plan cancer dans le passé.
03:35 Pourquoi on a autant de molécules aujourd'hui dans le cancer ? Pourquoi on a autant de médicaments
03:39 aujourd'hui ? C'est juste parce que les Etats-Unis à un certain moment, leur service public
03:44 a mis des milliards de dollars sur la table et l'Europe a suivi après.
03:47 - Et donc c'est là qu'il y a eu l'immunothérapie et l'ensemble des techniques nouvelles qui
03:52 effectivement font avancer...
03:53 - Exactement, le secteur public est là pour pallier à ça justement.
03:56 Il est là lorsqu'il y a des problèmes de santé publique et lorsque l'industrie n'y
04:00 va pas, il est là pour justement pallier à ça et mettre de l'argent dans les tuyaux.
04:05 - Le problème c'est qu'il est ruiné le secteur public.
04:07 - En tout cas chez nous, je ne crois pas qu'ils soient en meilleure forme aux Etats-Unis même
04:12 s'ils trouvent de l'argent plus facilement.
04:14 - Non, les Etats-Unis continuent à investir.
04:16 Alors ils investissent moins, ça c'est clair par rapport à 10 ans, mais ils investissent
04:21 toujours de façon qui pour nous, pour l'Europe, est conséquente.
04:24 - Et donc tu dis la priorité du moment là pour les Américains c'est Alzheimer ?
04:27 - Oui, ils ont un plan Alzheimer qu'ils ont mis en place il y a quelques années.
04:31 - Et donc ça, ça veut dire du pognon, ça veut dire aussi...
04:33 Alors ça c'est Philippe qui m'avait expliqué ça, les dispositifs fast-track, c'est ça ?
04:37 Des dispositifs qui permettent de foncer, de faire sauter un certain nombre de garanties.
04:41 - On a aussi ça en Europe, ça existe.
04:43 En Europe on a ce système aussi, mais c'est vrai qu'aux Etats-Unis ça a été utilisé
04:48 en particulier pendant le Covid, effectivement d'aller plus vite.
04:51 Ce qui veut dire aussi qu'une fois que le produit est sur le marché, c'est pas fini,
04:54 il va falloir faire des études supplémentaires pour vraiment démontrer que ce qu'on a raconté
05:01 lors de ce fast-track est vrai.
05:02 Attention, c'est pas fini.
05:04 - Bon, est-ce que tu me dis aussi quand même, parce qu'il faut y venir là, donc le sommet
05:07 j'ai pas dit, donc la semaine prochaine, Health Take Innovation Days, voilà, donc ce sera...
05:12 - Oui, c'est ça, la semaine prochaine.
05:15 - La semaine pendant laquelle est diffusée cette émission, pardon, qui est enregistrée,
05:20 voilà, c'est le plus simple de donner les dates, 24 et 25.
05:22 Ça veut dire que c'est bien l'Amérique qui est le marché directeur ? Encore, toujours, aujourd'hui ?
05:28 - L'Amérique reste le marché directeur parce qu'ils ont une industrie qui est extrêmement performante.
05:34 Les prix sont élevés, donc ils financent aussi une partie de leurs recherches au travers
05:40 des prix élevés.
05:42 - Ça, c'est vrai.
05:43 - Et puis un financement.
05:45 Si je prends le chiffre, par exemple, de 2022, si je me souviens bien, entre les levées
05:51 de fonds qui sont IPO et puis Venture Capital, aux États-Unis, on se trouvait entre États-Unis
05:58 plus Europe, on était à 30 milliards d'euros et les États-Unis en prenaient 75%.
06:05 Donc il y a toujours un rapport, en moyenne, un rapport de 1 à 4 entre l'investissement
06:11 en Europe et l'investissement aux États-Unis.
06:13 - En Europe, c'est quoi les priorités, là, aujourd'hui ?
06:16 - Alors, les priorités en Europe.
06:17 Alors, on a des atouts en Europe, attention.
06:20 - Ah mais BioNTech nous a démontré qu'on pouvait être dans la course.
06:23 - On a des atouts, voilà.
06:24 - On est tout à fait d'accord.
06:25 - On a un prix Nobel de chimie, on a...
06:27 - Tout à fait d'accord.
06:28 - On a d'excellents chercheurs, on a d'excellents centres de recherche, le CNRS, l'INSEAM, le CEA.
06:35 Marx Plante en Allemagne et autres.
06:38 Donc on sort des choses.
06:41 Ensuite, on a d'excellents entrepreneurs qui arrivent et qui sont aidés par les États.
06:45 En particulier l'État français, si on reste sur la France.
06:48 On a l'ABPI qui joue un rôle déterminant au travers de prêts et d'aides financières.
06:56 On a le gouvernement qui nous aide au niveau du crédit d'impôt recherche.
07:01 - C'est marrant parce que...
07:01 - De la jeune entreprise...
07:02 - Philippe, quand il venait à votre place, il pleurait tout le temps.
07:05 Il disait tout le temps...
07:06 - Non, non, mais je n'ai pas fini.
07:07 - Il n'y a pas assez d'argent.
07:08 - Oui, mais je n'ai pas fini.
07:08 Je n'ai pas fini.
07:10 J'y arrive.
07:11 - Je me disais, c'est surprenant quand même.
07:13 - J'y arrive.
07:14 Donc on arrive à amener la molécule à un certain...
07:17 Ou le device.
07:19 - Oui, oui, oui.
07:20 Oui, oui, molécule, device.
07:22 L'un est aussi important.
07:23 - Je parle de la Ftech, mais la Ftech est quand même beaucoup plus cash incentive que demandeuse.
07:27 - Oui, oui, tout à fait.
07:29 Donc la molécule est plus cash incentive.
07:32 - On arrive à délever de 20 millions d'euros, entre 20 et 30 millions pour une phase 2.
07:36 Ça se fait encore.
07:37 Mais alors là, quand on rentre en phase 3, qu'est-ce qu'on fait ?
07:39 Parce qu'une phase 3, c'est quoi ?
07:41 Eh bien, si je prends l'exemple d'Abivax, c'est plus de 200 millions pour une indication dans l'immunologie.
07:50 200 millions.
07:51 Lever 200 millions en Europe aujourd'hui, c'est pratiquement impossible.
07:54 Il faut aller aux États-Unis parce que les capitaux sont là-bas.
07:57 On n'a pas le choix.
07:59 - Rien n'a changé là-dessus depuis 20 ans.
08:01 - Alors, pour deux raisons.
08:03 La première raison, c'est que les États-Unis ont une puissance de feu qu'on n'a pas.
08:07 - Ça c'est clair.
08:08 - C'est tout à l'heure 25%, 75%.
08:12 Et ils ont un marché qui est le leader.
08:15 C'est le marché numéro 1 au monde.
08:17 - Alors marché quand même, tu le dis, parce que tu l'as dit d'un mot, je tiens à le préciser,
08:20 tu dis les prix élevés.
08:21 C'était le sujet de la précédente présidentielle aux États-Unis.
08:25 Ce sera le sujet de la présidentielle aux États-Unis.
08:28 Ce sujet des prix élevés.
08:29 Même Trump trouve que les prix sont élevés.
08:31 Ce sujet des prix élevés est un sujet aux États-Unis aujourd'hui.
08:34 Ça durera peut-être moins longtemps que les contributions.
08:36 - Je suis dans l'industrie pharma depuis 25 ans.
08:39 En 25 ans, on en parlait déjà.
08:40 - C'est vrai.
08:41 Avec cette intensité, parce que là, quand même, il y a une forte tension.
08:44 - On a toujours dit, les prix sont trop...
08:45 En Europe, on a toujours dit, les prix sont trop aux États-Unis.
08:48 Ça va baisser un jour.
08:49 Bon, il va y avoir, ce que je pense personnellement, c'est qu'il va y avoir un rééquilibrage
08:53 entre l'industrie, les centres de recherche, l'industrie et l'AFDA et le gouvernement.
09:03 Ils vont trouver un autre équilibre.
09:05 D'ailleurs, j'ai été aux États-Unis récemment parce que j'ai été invité par une grande société américaine.
09:10 Bien sûr, ils se battent contre les mesures IRA.
09:15 Mais d'un autre côté, ils s'adaptent très vite.
09:17 C'est-à-dire qu'ils ont, par exemple, dans cette société, ils ont déjà 15 lawyers,
09:21 15 personnes qui s'occupent de ça, qui sont directement en train de discuter.
09:24 - Bon, revenons chez nous.
09:26 On en revient toujours à cette histoire d'une espèce de Nasdaq européen.
09:30 C'est-à-dire, il faudrait une sorte de marché européen de l'innovation pour pouvoir lever les montants.
09:38 - Je pense que les États-Unis ont réussi à être leaders dans le domaine de la santé.
09:43 Et d'ailleurs, ils "driven" aujourd'hui l'innovation mondiale quelque part.
09:45 - Oui, oui, j'ai compris.
09:47 - C'est un écosystème.
09:50 - C'est pas un truc en particulier.
09:52 - D'accord.
09:54 - C'est un système extrêmement efficient.
09:56 Si on prend Boston, par exemple, ils ont su créer à Boston un écosystème qui est extrêmement performant.
10:04 - On peut le faire où, nous, Pierre ? Ce sera notre mot de la fin.
10:08 On peut le faire où ?
10:10 - Eh bien, justement, à HTID, quand j'étais avec Marie Vogniance à Boston, on a vu ça.
10:14 On s'est dit qu'il faut qu'on fasse quelque chose pour rassembler toutes les parties prenantes de la recherche fondamentale jusqu'aux patients dans un grand événement.
10:25 Et c'est pour ça qu'on a eu cette idée.
10:27 C'est pour ça qu'aujourd'hui, on a la 5e édition des HTID.
10:29 - Oui, mais ça fait deux jours.
10:31 C'est pas un cluster.
10:33 - Non, non, mais le premier pas.
10:35 Le premier pas.
10:37 De ramener tout le monde.
10:39 - Le premier pas vers une ré-émergence.
10:43 - On va dire ça comme ça.
10:45 De l'innovation de santé européenne.
10:47 Merci, Pierre.
10:49 Merci d'être venu nous voir.
10:51 Donc, Health Tech Innovation Days.
10:53 Voilà.
10:55 - Merci.
10:57 - A Paris, en ce moment.

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