Avec Alain Houpert, sénateur de la Côte d’Or, membre de la commission des affaires étrangères, Frédéric Granier, journaliste et écrivain.
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00:00:00 [Musique]
00:00:02 Sud Radio Bercov dans tous ses états.
00:00:04 [Musique]
00:00:06 Nous sommes en guerre.
00:00:06 Nous allons donc provoquer l'effondrement de l'économie russe.
00:00:10 Ah, ça va me coûter combien ?
00:00:11 Nous vivons, et cela pas simplement depuis cet été, ces dernières années,
00:00:15 la fin de ce qui pouvait apparaître comme une abondance.
00:00:17 Nous sommes dans une guerre hybride.
00:00:18 Vous ne comprenez pas, maintenant vous circulez tous, s'il vous plaît.
00:00:21 Bonne soirée à tous, désolé pour la démocratie, allez !
00:00:23 Donc c'est bon !
00:00:24 Ah, il y a des casseroles là.
00:00:26 Il y a deux casseroles.
00:00:27 On va pouvoir les enlever madame.
00:00:28 Pourquoi on va enlever les casseroles, s'il vous plaît ?
00:00:30 Pour une raison.
00:00:31 [Cris de la foule]
00:00:45 C'est une révolte, Sire ?
00:00:47 Ou c'est une révolution ?
00:00:49 Ou c'est quoi ?
00:00:51 Ou c'est le chaos ?
00:00:52 Ou c'est ceci ?
00:00:53 On sait que une cellule d'urgence, bientôt, va se réunir.
00:00:57 À l'Elysée, est-ce que c'est pour proclamer les dernières urgences ou pas ?
00:01:02 On le saura assez vite.
00:01:04 En attendant, on va parler.
00:01:05 On va parler de ce qui se passe depuis trois jours,
00:01:08 et qui n'a rien à voir avec 2005, ni avec 2015.
00:01:11 Qu'est-ce qui se passe ?
00:01:12 Quelle France est en train de réagir, est en train de casser ?
00:01:17 Quelle France est en train de résister ?
00:01:19 De quoi s'agit-il ?
00:01:21 Archipélisation, partition, division.
00:01:24 On en parle avec Alain Houpert, sénateur de la Côte d'Or,
00:01:27 et membre de la Commission des Affaires étrangères,
00:01:29 mais là, il s'agit évidemment d'affaires françaises.
00:01:32 Voilà, et on va écouter Malek Bouti, l'ancien président de SOS Racisme,
00:01:35 c'est intéressant.
00:01:36 Et puis, voilà, le hijab a finalement été interdit dans les compétitions sportives,
00:01:42 avis du Conseil d'État.
00:01:44 Et la culture dans tous ces États, de 13 à 14 heures,
00:01:48 avec Céline Alonso, nous recevons Frédéric Gragnet.
00:01:53 Imagine, imagine, eh bien, les 12 chansons qui ont fait l'histoire.
00:01:58 C'est passionnant de San Francisco, imagine,
00:02:01 The Rising, We Are The World, etc.
00:02:04 Un livre passionnant sur la gestion de ces chansons
00:02:07 qui deviennent cultes et que le monde entier,
00:02:10 d'une manière ou d'une autre, sur tous les tons, sur tous les temps, entonne.
00:02:14 À tout de suite.
00:02:16 Sud Radio Bercov, dans tous ces États,
00:02:19 le fait du jour.
00:02:21 Quel carmagnol on danse au son du mortier.
00:02:26 2023 n'est certes pas 1789, ni 1848,
00:02:33 même pas 2005, même pas 2005.
00:02:35 Les choses ont changé.
00:02:37 Alors, on va pas vous faire tous les chiffres.
00:02:40 Avant-hier, c'était pas mal, terrifiant.
00:02:44 Hier, c'était encore plus.
00:02:46 Je rappelle 667 interpellations en France,
00:02:49 dont 307 personnes en Ile-de-France,
00:02:52 sur la préfecture de police de Paris.
00:02:54 249 policiers et gendarmes blessés.
00:02:57 Et surtout, et surtout, ça s'est généralisé partout.
00:03:00 Le Red est déployé à Trappes,
00:03:02 et l'Ancourt, Garches-des-Gonnes,
00:03:04 Bobigny, Nice, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Montpellier,
00:03:07 Rennes, Nancy, Lille, Strasbourg et Lyon.
00:03:10 Et évidemment Paris.
00:03:12 C'est rentré dans Paris,
00:03:14 avec le cortège de écoles,
00:03:18 mairies, n'en parlons pas,
00:03:20 commissariats de police,
00:03:22 trams, incendies,
00:03:24 bus, voitures,
00:03:26 les magasins,
00:03:28 open bar pour les magasins, effectivement.
00:03:30 Ça casse les prix.
00:03:32 Ça casse les prix à quel niveau ?
00:03:34 Au niveau qu'il n'y a plus de prix.
00:03:36 Qu'est-ce qui se passe ?
00:03:38 GIGN est là, le BRI est là,
00:03:40 le Red est mobilisé.
00:03:43 Est-ce qu'on est en quel état ?
00:03:47 Alain Houpert, bonjour.
00:03:49 - Bonjour.
00:03:51 - Alain Houpert, on vous a reçu souvent ici,
00:03:54 dans l'émission, à la suite radio avec plaisir.
00:03:56 Vous êtes sénateur de la Côte d'Or et membre de la commission des affaires étrangères,
00:03:59 mais là on va parler d'affaires intérieures, bien sûr.
00:04:03 Mais c'est à l'homme politique, aux citoyens,
00:04:06 que vous êtes, que je m'adresse.
00:04:08 Quatre jours après,
00:04:10 on a l'impression que ça se généralise,
00:04:12 on a l'impression que les policiers ont été augmentés
00:04:15 quatre fois plus de policiers,
00:04:17 hier qu'avant-hier,
00:04:19 et pourtant, ils sont obligés de se replier.
00:04:22 On a vu des voitures de police municipales
00:04:24 brûlées partout.
00:04:26 Qu'est-ce qu'à votre avis, ça signifie quoi,
00:04:29 dans cette France que nous vivons aujourd'hui ?
00:04:32 - Notre société ne tient qu'à un fil.
00:04:36 On est passé,
00:04:38 ça fait 30 ans que ça dure,
00:04:40 on est passé de guérilla urbaine
00:04:42 à pratiquement une guerre civile.
00:04:46 - Ah oui, vous dites, on peut appeler le mot de guerre civile pour vous.
00:04:49 - J'ai souvent parlé de guerre civile froide,
00:04:52 ou de guerre civile silencieuse,
00:04:54 dit Michel Enfray.
00:04:56 Oui, mais ça se rapproche de la guerre civile,
00:05:00 parce que ce sont des réactions qui sont certes intolérables,
00:05:04 mais c'est le résultat de 30 ans d'aporie politique
00:05:08 où on a mis beaucoup d'argent sur la ville,
00:05:10 beaucoup d'argent sur les villes, avec le plan Borloo,
00:05:12 vous vous souvenez, dans le plan de Montruch,
00:05:14 entre 2004 et 2020,
00:05:16 on a mis 50 millions d'euros
00:05:18 sur 600 villes et quartiers.
00:05:20 Entre 2014 et 2030,
00:05:23 on met encore 50 millions d'euros
00:05:25 sur 450 quartiers.
00:05:28 Est-ce qu'il faut mettre de l'argent ?
00:05:30 De toute façon, on est face à un sentiment
00:05:33 d'abandon de l'État,
00:05:35 d'abandon de l'État, de ces territoires
00:05:37 qui deviennent des territoires
00:05:39 hors droit de la République.
00:05:42 Des territoires perdus de la République,
00:05:44 dont on a beaucoup parlé, déjà, oui.
00:05:46 Avec, souvenez-vous,
00:05:48 M. Chevènement qui disait,
00:05:51 des sauvageons qui font la loi.
00:05:54 Donc je pense qu'il faut revenir à...
00:05:57 Mais à quoi, justement ?
00:05:59 Qu'est-ce qu'on peut faire, à la Houppert ?
00:06:01 Est-ce que l'argent amène tout ?
00:06:04 Non, je pense qu'il faut revoir
00:06:06 sur les principes.
00:06:08 Et on a beaucoup parlé, vous savez,
00:06:10 du ministre de l'Éducation, Pemdiay.
00:06:12 Il y a un problème d'éducation.
00:06:15 Il faut faire revenir tout le temps...
00:06:18 Ah, mais il est occupé avec l'éducation sexuelle,
00:06:20 cher Alain Houppert, vous savez.
00:06:22 Ça l'occupe beaucoup Pemdiay, en ce moment.
00:06:24 Je crois que c'est pour lui.
00:06:26 Enfin, je ne sais pas si c'est un problème principal ou pas,
00:06:28 mais voilà.
00:06:30 C'est un problème de société.
00:06:32 Et puis, la loi,
00:06:34 la loi sur les interventions policières
00:06:38 a changé en 2017,
00:06:40 vous vous souvenez, suite à des actes de terrorisme.
00:06:42 On a donné la possibilité en 2017
00:06:45 aux policiers de pouvoir tirer,
00:06:48 même s'ils n'étaient pas en état de légitime défense.
00:06:51 Donc, je pense que cette loi ne fait que
00:06:54 mettre de l'huile sur le feu,
00:06:57 et on le voit avec la réaction de la mort
00:06:59 de ce jeune enfant de Gilles.
00:07:01 Un enfant qui meurt à 17 ans,
00:07:06 c'est terrible.
00:07:09 Donc, quand on regarde
00:07:12 certains dire qu'il y a
00:07:15 de plus en plus de refus d'obtempérer.
00:07:18 Moi, je peux pas regarder
00:07:21 le nombre de morts sur les refus,
00:07:24 le nombre de tirs sur les refus d'obtempérer
00:07:27 en un an et demi,
00:07:32 nous avons eu 16 morts en France.
00:07:35 En Allemagne, la comparaison n'est pas raison,
00:07:38 mais en Allemagne, en 10 ans, ils ont eu 1 mort.
00:07:41 Donc, depuis cette loi de 2017,
00:07:45 face à une loi qui est
00:07:48 un protocole policier qui est
00:07:51 le plus agressif d'Europe,
00:07:54 et heureusement que nous ne sommes pas à la hauteur
00:07:57 des États-Unis, mais nous sommes dans un processus
00:08:00 agressif qui fait
00:08:03 que les violences,
00:08:06 au lieu d'apaiser les violences, elles se réveillent.
00:08:09 Souvenez-vous des gilets jaunes avec
00:08:12 les LBD, des réponses
00:08:15 importantes et exagérées.
00:08:18 - Disproportionnées, vous direz à l'époque.
00:08:21 - Il y a la politique de la carotte et du bâton.
00:08:24 Le gouvernement a fait la politique de la carotte avec l'ANRU
00:08:27 et l'EPNRU. Et le bâton, la repression
00:08:30 policière, je pense qu'il faut retrouver le dialogue
00:08:33 dans ces quartiers parce qu'on n'en sortira pas.
00:08:36 - Oui, mais non.
00:08:39 Allez-y, allez-y. À là où perd juste un mot,
00:08:42 je vous pose la question. Vous montrez les responsabilités
00:08:45 effectivement d'une politique peut-être sévère
00:08:48 et sanctionnante par rapport à la police,
00:08:51 la loi 2017, mais d'un autre côté, est-ce que ça justifie
00:08:54 qu'on brûle des écoles ? Des écoles ?
00:08:57 Qu'on brûle
00:09:00 des tramways ? Qu'on brûle les voitures des gens
00:09:03 qui justement ont besoin de ces voitures pour aller au boulot ?
00:09:06 On brûle pas les grands châteaux ?
00:09:09 Alors, qu'est-ce qui se passe ?
00:09:12 - Les actes sont inacceptables
00:09:15 et ces actes sont faits par quelques-uns
00:09:18 et on va jeter l'opprobre
00:09:21 sur tous les quartiers.
00:09:24 Vous savez, dans ces quartiers, la majorité des gens sont des gens
00:09:27 pacifiques et il y a une minorité de gens
00:09:30 qui n'attendent qu'une chose, que ça s'embrase
00:09:33 pour aller sur les Champs-Elysées. On l'a vu
00:09:36 assez souvent, d'aller au Rue de Rivoli
00:09:39 comme hier pour manifester
00:09:42 sa haine, il est inadmissible
00:09:45 de brûler un trabeau français et ça s'est encore vu hier.
00:09:48 Il est inadmissible de casser
00:09:51 les vitrines de la Samaritaine, ça s'est vu hier.
00:09:54 C'est inqualifiable. Mais est-ce qu'on peut
00:09:57 répondre par une augmentation
00:10:00 du protocole policier ?
00:10:03 Non. Je pense que dans les forces de l'ordre, il y a
00:10:06 la police et la gendarmerie. Quand on regarde
00:10:09 l'augmentation du nombre de tirs
00:10:12 sur les refus d'entrepris,
00:10:15 il y a une inégalité entre la gendarmerie
00:10:18 qui a une formation de
00:10:21 militaires et la police
00:10:24 qui a beaucoup recruté et qui n'a pas le même
00:10:27 ancrage territorial que la gendarmerie. Il est vrai que la gendarmerie
00:10:30 n'est pas dans les zones polices dans les quartiers,
00:10:33 mais il y a autant de refus d'entrepris dans la gendarmerie
00:10:36 face à la police.
00:10:39 Il y a eu beaucoup de drames sur le front policier.
00:10:42 Je pense qu'il faut qu'on ait une réflexion
00:10:45 et qu'on aboutisse à la paix et à la sérénité
00:10:48 dans ce pays parce que ça inquiète tout le monde.
00:10:51 Plus on en parlera, et puis il faut sortir
00:10:54 du langage droite-gauche.
00:10:57 Quand vous dites qu'il y a trop
00:11:00 de refus d'obtempérer, ça veut dire
00:11:03 que vous êtes de droite. Et quand vous dites que
00:11:06 le refus d'obtempérer ne peut pas être
00:11:09 une condamnation à mort, ça veut dire que vous êtes de gauche.
00:11:12 Je pense que la politique doit refuser
00:11:15 les mi-plégiés. On n'est ni de droite ni de gauche.
00:11:18 On est français. Et on est français,
00:11:21 on doit condamner.
00:11:24 - Vous avez dit vous-même que
00:11:27 on sent, oui, certes, qu'on est français, mais quand vous avez des gens
00:11:30 de la socialité française qui brûlent des drapeaux français,
00:11:33 quand vous avez des gens qui attaquent à des écoles, etc.
00:11:36 Vous avez raison, il y a deux problèmes. D'abord, je voudrais qu'on reparle
00:11:39 de la formation de la police parce que vous l'avez esquissée.
00:11:42 Est-ce qu'il y a un problème de formation de la police ? C'est vrai qu'il faut en parler.
00:11:45 Mais d'un autre côté, juste, vous avez vu quand même que ça s'embrasse
00:11:48 partout. Par rapport à 2005, on est 18 ans
00:11:51 plus tard, il y a des petites villes, des petites villes,
00:11:54 des petites villes, enfin, vous en connaissez comme moi,
00:11:57 je pense à... Voilà, partout, partout,
00:12:00 on regardait la carte ce matin à Sud Radio,
00:12:03 vraiment, je ne dis pas que toute la France s'embrase,
00:12:06 ce serait totalement exagéré, mais quand même,
00:12:09 il y a quelque chose qui va très loin.
00:12:12 C'est quoi cette haine ou c'est quoi cette
00:12:15 volonté d'en vouloir un peu
00:12:18 à tout le monde et pas seulement à la police,
00:12:21 à l'État, on en veut à l'État, pour son impuissance,
00:12:24 pour sa négligence, pour sa lâcheté,
00:12:27 à votre avis ? - Je crois qu'il faut sortir
00:12:30 des amalgames.
00:12:33 Ne pas accuser ni les policiers
00:12:36 qui ont eu un acte, le policier a eu un acte
00:12:39 où le président a dit
00:12:43 d'impardonnable, je dirais inqualifiable,
00:12:46 et puis, non plus stigmatiser les territoires
00:12:49 comme le 93,
00:12:52 qui sont des territoires qu'on dit hors la République.
00:12:55 - Oui, perdus de la République.
00:12:58 - Ces actes ne sont pas
00:13:01 le fruit du résultat
00:13:04 de toute une population.
00:13:07 Les causes de ces problèmes
00:13:10 sont multifactorielles.
00:13:13 Je crois qu'il faut
00:13:16 vraiment faire un plan national de réconciliation.
00:13:19 Je vous parlais tout à l'heure de l'éducation.
00:13:22 L'éducation est importante, parce que ce n'est pas
00:13:25 avec les projets du ministre de l'Éducation actuelle
00:13:28 qu'on va s'en sortir.
00:13:31 Vous disiez tout à l'heure
00:13:34 que les Français brûlent le drapeau français.
00:13:37 C'est dramatique et c'est inqualifiable.
00:13:40 Mais souvenez-vous des valeurs, il y avait des valeurs
00:13:43 de la nation, c'est la terre où on en est,
00:13:46 la terre des pères.
00:13:49 Je ne veux pas être un gars en disant
00:13:52 l'éducation civique, mais l'éducation civique
00:13:55 était faite par des instituteurs.
00:13:58 C'était celui qui institue,
00:14:01 celui qui élève l'élève.
00:14:04 Il ne faut pas l'abaisser à la hauteur des parties.
00:14:07 C'est le carabin qui parle avec ces éducations sexuelles.
00:14:10 Il faut parler de choses qui sont importantes,
00:14:13 parler de ce qui nous rassemble.
00:14:16 Ce qui nous rassemble, c'est la France.
00:14:19 C'est la France, c'est nos territoires,
00:14:22 c'est notre façon de vivre.
00:14:25 Il faut que nos communautés...
00:14:28 Si on continue, on va aboutir à une libanisation de la société.
00:14:31 Vous connaissez le Liban.
00:14:34 C'est un pays où il y avait des communautés
00:14:37 qui se sont affrontées,
00:14:40 qui sont irréconciliables.
00:14:43 Il ne faut pas que la France, avec ses territoires, soit irréconciliable.
00:14:46 C'est ce qui est en train d'arriver.
00:14:49 J'ai peur qu'on passe de guérilla urbaine à une guerre civile.
00:14:52 - A votre avis, Alain Huppert,
00:14:55 est-ce que le gouvernement jusqu'ici,
00:14:58 évidemment que tous ces problèmes ne datent pas du gouvernement actuel,
00:15:01 ça date de des années,
00:15:04 vous l'avez dit, 30 ans,
00:15:07 fait ce qu'il faut, à votre avis ?
00:15:10 En tout cas, s'oriente, c'est pas en 48 heures qu'on règle le problème, bien sûr.
00:15:13 Mais est-ce que s'oriente vers la bonne direction ?
00:15:16 Alors on verra effectivement ce qu'ils vont décider, état d'urgence ou pas,
00:15:19 mais au-delà de ces décisions,
00:15:22 est-ce qu'il n'y a pas aujourd'hui, franchement,
00:15:25 Alain Huppert, vous êtes médecin, vous êtes radiologue,
00:15:28 vous êtes homme politique, et je m'adresse aux citoyens français,
00:15:31 de Bourgogne,
00:15:34 il y a une rupture qui devient de plus en plus rémédiable
00:15:37 entre plusieurs fractions de la population.
00:15:40 Et c'est pas une question, vous avez raison de redire,
00:15:43 la majorité des gens ne veulent pas de cela,
00:15:46 mais on a l'impression qu'il y a une poignée d'irréductibles organisées,
00:15:49 quand je dis une poignée, ils sont quand même très nombreux, on voit,
00:15:52 organisées, et on se dit, est-ce qu'il y a,
00:15:55 qu'est-ce qu'on peut faire, très franchement, qu'est-ce qu'on peut faire concrètement ?
00:15:58 - Cette poignée d'irréductibles,
00:16:01 le problème c'est qu'elle grossit,
00:16:04 elle grossit, et ces irréductibles, ce sont des gens
00:16:07 qui s'expriment avec 300 mots,
00:16:10 et quand on a peu
00:16:13 de mots pour s'exprimer,
00:16:16 on s'exprime par la colère, par la violence,
00:16:19 donc je crois qu'il y a un problème
00:16:22 de fond, philosophique,
00:16:25 les gens n'ont plus foi en la France,
00:16:28 certaines personnes n'ont plus foi en la France,
00:16:31 il faut faire que ces oubliés
00:16:34 de la République, ou ces gens qui veulent s'écarter
00:16:37 de la République, reviennent vers la France,
00:16:40 parce que de toute façon, ils sont condamnés à vivre en France,
00:16:43 et il faut qu'ils reviennent.
00:16:46 - Mais comment peuvent-ils revenir ? Enfin, quoi faire
00:16:49 pour les faire revenir ? Parce qu'apparemment, écoutez,
00:16:52 ça s'aggrave, depuis quelques années, on le sait,
00:16:55 on a l'impression, on parle de ça,
00:16:58 à l'imper, et puis on s'arrête et on dit "oui, mais alors,
00:17:01 qu'est-ce qu'il fait ?" et à chaque fois qu'il y a effectivement
00:17:04 un meurtre, meurtre d'un jeune qui n'aurait
00:17:07 jamais dû avoir lieu, mais comme vous le savez, il y a d'autres meurtres,
00:17:10 qui ne sont peut-être pas du fait de la police, vous savez très bien,
00:17:13 des massacres, des tabassages, de l'OLA à d'autres,
00:17:16 on a l'impression qu'une partie de la population
00:17:19 est, je dirais, presque sidérée,
00:17:22 et l'autre partie, en tout cas, dit "allez,
00:17:25 on va se venger, on va brûler". C'est quand même
00:17:28 assez dramatique et désolant.
00:17:31 - On aboutit à un partage
00:17:34 de la population en deux, un clivage,
00:17:37 le français,
00:17:40 c'est comme tous les français, les français qui souffrent,
00:17:43 et puis qui ne peuvent s'exprimer que par la violence,
00:17:46 et les français qui vivent dans des beaux quartiers,
00:17:49 qui regardent ça d'une manière un peu...
00:17:52 Je pense qu'il faut qu'on se rassemble, qu'on se rappelle ensemble,
00:17:55 c'est urgent et
00:17:58 tout est symbole. Vous savez, hier, la rue de Rivolet
00:18:01 brûlait et on a vu sur les réseaux sociaux le président
00:18:04 de la République au concert en Elton John,
00:18:07 donc on parle d'état d'urgence,
00:18:10 on n'est pas loin d'un état de guerre civile,
00:18:13 il est important de montrer un président
00:18:16 qui soit près de son peuple. Là, je pense que le symbole
00:18:19 n'est pas bon et tous les symboles que donne
00:18:22 ce gouvernement ne sont pas bons.
00:18:25 Si on arrive
00:18:28 à ce niveau de violence, c'est qu'il y a des problèmes
00:18:31 et les problèmes, on ne peut pas les résoudre, c'est pas moi,
00:18:34 un loupeur, qui va les résoudre. Il faut se mettre autour d'une table,
00:18:37 faire un plan national,
00:18:40 autre que mettre de l'argent pour construire des immeubles,
00:18:43 pour construire des salles qui vont de toute façon être brûlées le lendemain,
00:18:46 il faut un plan national,
00:18:49 je dirais,
00:18:52 c'est autour de la sagesse et de la philosophie, rassembler les gens
00:18:55 et leur faire comprendre qu'on est tous en même bain.
00:18:58 - Et peut-être un peu d'autorité aussi Alain Huppert,
00:19:01 vous ne pensez pas ? - Il peut être auteur de sa vie,
00:19:04 mais est-ce que c'est de l'autorité ? On la voit avec
00:19:07 cette loi de 2017 qui est un modèle policier.
00:19:10 - Je comprends. - Et on voit que ça ne marche pas.
00:19:13 C'est pas que ça ne suffit pas, ça ne marche pas.
00:19:16 Donc il faut trouver un autre sujet.
00:19:19 C'est une cause nationale, il faut se mettre
00:19:22 tous autour de cette cause nationale et la réconciliation
00:19:25 de la France, parce que la France
00:19:28 c'est notre France,
00:19:31 et j'ai mal à la France en voyant ça, comme vous.
00:19:34 - C'est clair. Merci Alain Huppert, en tout cas c'est vrai que votre appel
00:19:37 à l'apaisement, parce qu'on ne fera rien
00:19:40 effectivement dans cette espèce de guerre
00:19:43 civile froide, en tout cas elle est de moins en moins froide.
00:19:46 J'espère qu'elle ne s'annonce pas,
00:19:49 mais comme vous effectivement, j'espère que
00:19:52 les princes qui nous gouvernent feront ce qu'il faut
00:19:55 et amèneront qui il faut autour de la table,
00:19:58 sinon... - Vous avez dit des princes,
00:20:01 et le problème c'est que les Français se sentent
00:20:04 comme si on n'est pas des princes, c'est ça.
00:20:07 - C'est ça le problème. - Et le peuple.
00:20:10 - Et le peuple. Merci beaucoup, merci Alain Huppert,
00:20:13 sénateur de la Côte d'Or,
00:20:16 et voilà, on va suivre ça bien sûr,
00:20:19 et on vous tiendra évidemment au courant, enfin vous êtes déjà
00:20:22 tous au courant, il y a vraiment le problème, ce n'est pas
00:20:25 la carmagnole, c'est de changer un peu
00:20:28 de logiciel, et puis que l'esprit critique,
00:20:31 et puis que un peu de sagesse et pas d'excitation
00:20:34 se retrouvent.
00:20:37 Sud Radio, Bercov dans tous ses états. - Vous avez reconnu
00:20:40 évidemment, vous avez reconnu,
00:20:43 c'est l'ère de la Ligue des champions,
00:20:46 la Ligue européenne des champions, de jouer un peu partout,
00:20:49 et bien écoutez, on vous avait parlé de ce problème du hijab,
00:20:52 vous savez qu'il y a le collectif des hijabeuses,
00:20:55 on avait parlé avec Florence Joub-Lacquer,
00:20:58 qui milite pour le droit de porter le voile
00:21:01 en compétition, avait déposé un recours contre l'article
00:21:04 1 du règlement de la Fédération française
00:21:07 de football. Alors que stipulait cet article ?
00:21:10 Que tout port de signes ou tenue manifestant
00:21:13 osensiblement une appartenance politique,
00:21:16 philosophique, religieuse ou syndicale était
00:21:19 interdite. C'est depuis 2016.
00:21:22 Et bien, il y a eu un recours au Conseil d'État par le collectif
00:21:25 des hijabeuses, et
00:21:28 le porte-parole d'ailleurs du Conseil d'État était
00:21:31 plutôt pour bien l'introduction
00:21:34 du hijab. Et bien le Conseil d'État a tranché,
00:21:37 l'interdiction édictée par la Fédération
00:21:40 française de football est adaptée
00:21:43 et proportionnelle. Mais écoutez,
00:21:46 la laïcité c'est quand même encore une fois,
00:21:49 liberté, égalité, fraternité, laïcité,
00:21:52 l'ADN de la France depuis déjà plus d'un siècle,
00:21:55 et bien je pense, et on est assez nombreux
00:21:58 à le penser, que ça doit le rester.
00:22:01 Sud Radio, la culture dans tous
00:22:04 ses états. André Bercoff, Céline Alonso.
00:22:07 *Musique*
00:22:34 - Allez, on va danser, Céline, arrêtez, parce qu'on va se mettre à danser
00:22:37 sur la table. - Waterloo, Waterloo, André Bercoff,
00:22:40 l'un des titres les plus connus effectivement du groupe ABBA,
00:22:43 qui fait référence à cette fameuse bataille, André, que
00:22:46 Napoléon a perdue en 1815. - Ah bon, il a perdu ?
00:22:49 Napoléon, oui, je ne savais pas. - Vous n'étiez pas à ses côtés,
00:22:52 c'est pour ça, effectivement. - Moi, je n'étais pas né encore, hélas.
00:22:55 - Les chansons, effectivement, ont toujours rythmé notre histoire, André Bercoff.
00:22:58 Certaines sont même devenues cultes, et dans un instant,
00:23:01 sur Sud Radio, avec le journaliste Frédéric Granier,
00:23:04 nous allons vous parler de celles de ses chansons,
00:23:07 de ses tubes planétaires, qui symbolisent les bouleversements
00:23:10 politiques et sociaux, majeurs des 60 dernières années, André.
00:23:13 - Eh oui, formidable, livre de Frédéric Granier,
00:23:16 effectivement, imagine, vous savez, c'est
00:23:19 la chanson culte de John Lennon, mais c'est vrai,
00:23:22 les chansons ont toujours fait l'histoire, et rappelez-vous,
00:23:25 la Carmagnole. - Alors, restez avec nous,
00:23:28 on se retrouve dans un instant sur Sud Radio, parlons vrai.
00:23:31 - Sud Radio, Bercoff, dans tous ses états.
00:23:34 Sud Radio, la culture, dans tous ses états,
00:23:37 André Bercoff, Céline Alonso.
00:23:40 - Des arbres du Sud portent un fruit étrange,
00:23:43 du sang sur les feuilles, du sang sur les racines.
00:23:46 Dans cette chanson, Billy Olyd et André Bercoff dénoncent
00:23:49 les exécutions des Noirs américains par lynchage
00:23:52 et pendaison aux arbres. C'était dans les états du Sud
00:23:55 à l'époque de la ségrégation, André Bercoff.
00:23:58 - Oui, ça dit bien ce que ça veut dire, vous savez,
00:24:01 en ce moment, on vit une époque pas simple,
00:24:04 y compris en France, en tout cas.
00:24:07 Et je ne sais pas si on danse la Carmagnole,
00:24:10 c'était déjà les chansons au son du canon, etc.
00:24:13 et ça ira, ça ira, ça ira.
00:24:16 C'est plus du tout le même ton, on n'est plus un,
00:24:19 deux siècles ont passé, il y en a un peu plus,
00:24:22 mais les chansons font toujours l'histoire.
00:24:25 Et c'est passionnant parce que justement, le livre de Frédéric Granier
00:24:28 que je vous recommande, paru aux éditions Perrin,
00:24:31 il fait l'inventaire de ces chansons, justement,
00:24:34 qui sont inséparables
00:24:37 de nos vies à nous, de nos vies intimes, quelques fois,
00:24:40 de nos vies personnelles et de nos vies collectives.
00:24:43 Parce que vous chantez une chanson quelque part dans un dîner ou ailleurs,
00:24:46 et bien tout de suite, les gens vont vous reprendre
00:24:49 au-delà des générations, etc.
00:24:52 Et c'est ça qui est très intéressant.
00:24:55 Alors, juste, je cite pas facilement, imagine, de John Lennon, bien sûr,
00:24:58 qui est encore dans les Marches Blanches, chanté dans les Marches Blanches.
00:25:01 "God Save the Queen", des Sex Pistols,
00:25:04 à l'époque punk, de Sid Vicious
00:25:07 et de Johnny Rotten, aux armes, etc.
00:25:10 "La Marseillaise" revue et corrigée par Gainsbourg.
00:25:13 "We are the World", évidemment, Quincy Jones dirigeant,
00:25:16 John Lennon, John Ritchie, tout ça. "Wonderworld",
00:25:19 "Oasis", bien sûr, et puis "The Rising" de Bruce Springsteen,
00:25:22 après les attentats du 11 septembre 2001.
00:25:25 C'est vrai, Céline, ces chansons-là
00:25:28 sont notre ADN. - Et oui, et comme disait
00:25:31 Victor Hugo, André Berkhoff, la musique, c'est du bruit qui pense.
00:25:34 Alors, les chansons, effectivement, font l'histoire.
00:25:37 On va en parler dans un instant avec notre invitée, Frédérique Grani.
00:25:40 Alors, restez avec nous, ça va roquer sur Sud Radio.
00:25:43 "Imagine" de John Lennon sur Sud Radio,
00:25:46 c'est le titre que vous avez choisi,
00:25:49 Frédérique Granier, pour, effectivement, éditer votre
00:25:52 livre qui vient de paraître chez Perrin. Bonjour à vous
00:25:55 et merci d'être avec nous sur Sud Radio. Alors, dans cet ouvrage,
00:25:58 vous relatez l'histoire méconnue de 12 chansons, 12 succès
00:26:01 planétaires, qui racontent donc les bouleversements politiques
00:26:04 et sociaux majeurs des 60 dernières années. Alors, la question
00:26:07 première qu'on se pose, c'est pourquoi 12 chansons, il y en a tellement ?
00:26:10 André rigole. - Oui, mais c'est vrai.
00:26:13 Pourquoi 12 ? Parce qu'il ne pouvait pas faire 400 000 pages.
00:26:16 - Au début, j'en avais 50 et puis je me dis que 12, c'était un peu un chiffre
00:26:19 magique. - Il y a 12 apôtres ?
00:26:22 - Oui, il y a de ça et puis surtout, 12,
00:26:25 moi, je suis très attaché au vinyle.
00:26:28 Et le vinyle, c'est quoi ? C'est 40, 45 minutes
00:26:31 d'écoute et c'est en général 12, 13 chansons.
00:26:34 Et 12, ben finalement, ça fait comme si
00:26:37 on écoutait un vinyle ou une sorte de playlist de l'histoire
00:26:40 qui déroulerait de 1967 à nos jours
00:26:43 une sorte de panorama
00:26:46 en chanson de tous les bouleversements
00:26:49 politiques, sociaux, culturels.
00:26:52 - Alors, vous consacrez le premier chapitre de votre livre à Imagine
00:26:55 qui a été et qui est le plus grand succès de la carrière
00:26:58 solo de Lennon. Il l'a sorti en octobre 71.
00:27:01 Ça faisait un an et demi que les Beatles s'étaient séparés, c'est ça ?
00:27:04 - Oui. Les Beatles se sont séparés en avril
00:27:07 70 et depuis, Lennon est un peu
00:27:10 perdu. Il se cherche, il fait cette sorte de thérapie
00:27:13 du cri primal où il faut
00:27:16 rentrer dans une salle et hurler son désespoir.
00:27:19 - Avec Yoko Ono, bien sûr. - Voilà, avec Yoko Ono, de manière à sortir
00:27:22 toutes ses angoisses et à renaître.
00:27:25 Il sort des disques qui sont très
00:27:28 estimés par la critique mais assez peu suivis par le public
00:27:31 et puis il voit ses anciens camarades progresser
00:27:34 Paul qui a un numéro 1 avec
00:27:37 Uncle Albert, George avec My Sweet Lord,
00:27:40 Ringo aussi, Carton aussi avec It Don't Come Easy
00:27:43 et puis il se dit "moi j'ai besoin d'un tube, mais comment faire pour
00:27:46 avoir un tube ?" et donc il va s'enfermer. - Il cherchait vraiment le succès,
00:27:49 enfin quelque chose qui le passait. - Je pense que Lennon c'était
00:27:52 quelqu'un qui était extrêmement partagé entre une facette
00:27:55 disons très avant-gardiste, un peu provocatrice,
00:27:58 l'air de pas vouloir
00:28:01 vraiment se mettre complètement dans le bain
00:28:04 et en même temps c'était un écorché vif, il avait besoin qu'on l'aime
00:28:07 et il avait besoin surtout de
00:28:10 se rattacher à un énorme succès commercial
00:28:13 et quand il a composé cette chanson, qu'il avait un peu en tête
00:28:16 depuis plusieurs années puisque les connaisseurs savent
00:28:19 qu'en 69, début 69, pendant les sessions de la
00:28:22 Get Back qui deviendra la Tidby,
00:28:25 il y avait déjà quelques accords de piano qui ressemblaient un petit peu à ça
00:28:28 et puis il va travailler cette chanson en s'inspirant
00:28:31 vaguement d'un poème, une sorte d'aïkū
00:28:34 de Yoko Ono et puis
00:28:37 il va appeler dans cette chanson, de ses vœux
00:28:40 une sorte de fraternité d'hommes, une sorte
00:28:43 de rêve utopique, d'un monde sans
00:28:46 concession, sans possession
00:28:49 où tout le monde se tiendrait la main
00:28:52 et où tout irait bien et il va l'inscrire, ça va devenir
00:28:55 la chanson-titre de son album qui va sortir fin 71
00:28:58 et il va réussir son coup puisque
00:29:01 ça va être un succès planétaire. - Mais on peut dire que cette chanson
00:29:04 est quand même paradoxale parce qu'elle ne correspond absolument pas
00:29:07 à l'image de Lennon quand elle sort. - Vous avez tout à fait raison.
00:29:10 C'est tout le paradoxe de cette chanson qui
00:29:13 finalement marque un peu
00:29:16 les derniers feux des utopies des années 60 alors qu'on est déjà
00:29:19 en 71. Et même Lennon... - L'ère hippie.
00:29:22 Lennon n'est plus du tout le barde
00:29:25 avec sa barbe qui
00:29:28 appelait justement à
00:29:31 résoudre les problèmes de manière pacifique.
00:29:34 Lennon, il est plutôt engagé
00:29:37 un peu sur tous les fronts. D'ailleurs il a un album
00:29:40 qui va sortir en 72 qui s'appelle "Sometime in New York City"
00:29:43 où il embrasse à peu près toutes les causes, le féminisme...
00:29:46 - Il est très révolutionnaire à l'époque. - Il devient même
00:29:49 une sorte de caricature de révolutionnaire avec le Béret Guévariste
00:29:52 le point levé, etc. Et d'ailleurs
00:29:55 quand la chanson "Imagine" sort, lui il est un peu embarrassé
00:29:58 parce que certes c'est un grand succès public
00:30:01 mais la frange la plus radicale des gauchistes
00:30:04 et des libérals américains trouvent que
00:30:07 bon, ils ne se mouillent pas trop. - Un peu pacifiste.
00:30:10 - C'est un peu la poésie de carte postale on va dire et qu'ils
00:30:13 mériteraient d'être un peu plus engagés. - Ce qui est extraordinaire
00:30:16 c'est qu'encore aujourd'hui quand il y a des marches
00:30:19 quand il y a des célébrations, même après des attentats, on chante
00:30:22 "Imagine". C'est la chanson qui continue
00:30:25 en France et ailleurs d'être chantée partout.
00:30:28 - Et oui c'est ça. En fait effectivement, vous le racontez bien dans votre livre
00:30:31 c'est-à-dire qu'on a gardé effectivement de Lennon son côté
00:30:34 pacifiste, utopiste alors que
00:30:37 effectivement on peut dire qu'il n'a pas été un saint
00:30:40 dans sa vie. - Non il n'a pas été un saint, mais parce que
00:30:43 heureusement. Quel homme est un saint ? Quel artiste est un saint ?
00:30:46 - Exactement. - Et heureusement, sauf qu'on est aussi dans
00:30:49 une période où on voudrait que nos icônes soient
00:30:52 complètement pures. Et je pense que c'est
00:30:55 alors, Lennon en avait un peu honte. Donc pour lui
00:30:58 il s'est un peu démarqué de cette chanson qui au début n'était pas
00:31:01 totalement un hymne. C'était un succès mais ce n'était pas un hymne. Et puis lui il disait
00:31:04 "Oui mais vous savez, c'est le manifeste du Parti communiste
00:31:07 mis en chanson et enrobé de sucre si vous voulez."
00:31:10 - Sauf que, pardon sur Imagine, il dit "No religion too".
00:31:13 - "No religion too", tout à fait. - Il dit "Supprimer les religions,
00:31:16 on fait en fille avec nos religions, il ne faut pas oublier parce que..."
00:31:19 - Il a eu quelques problèmes quand il a dit que les Beatles étaient plus populaires
00:31:22 que le Christ. - Que le Christ, oui oui. - Donc c'est peut-être une sorte de retour de bâton.
00:31:25 - Il a été maladroit quand il a sorti ça non ? - C'est provocateur.
00:31:28 - Est-ce qu'il n'avait pas eu raison en même temps ? Est-ce que
00:31:31 au milieu des années 60, les jeunes, la jeune génération, préféraient pas
00:31:34 écouter les Beatles plutôt que d'aller à la messe ?
00:31:37 Il n'a fait qu'affirmer un constat. Et d'ailleurs,
00:31:40 cette petite phrase est sortie en Angleterre, quand c'est
00:31:43 Maureen Cleave qui avait recueilli ça, en 66.
00:31:46 En Angleterre, on a l'habitude, les artistes un peu provoquent.
00:31:49 Par contre, c'est quand la phrase a été publiée aux Etats-Unis.
00:31:52 Alors là, à toller dans la même curiosité... - Oui c'est ça, ça fait un toller.
00:31:55 - Exactement. Mais est-ce que vous dites, c'est vrai,
00:31:58 mais pourquoi les nonnes ont l'associé aujourd'hui à Imagine ?
00:32:01 C'est parce qu'il a été assassiné en décembre 80.
00:32:04 Et à partir du moment où il a été assassiné,
00:32:07 c'est-à-dire que toutes les facettes de son œuvre
00:32:10 ont disparu derrière cette image
00:32:13 de Saint-Lénon, du chantre de la paix, finalement du martyr.
00:32:16 Et c'est ce qui est dommage, c'est qu'aujourd'hui, je trouve
00:32:19 qu'on a tendance à retenir Imagine
00:32:22 qui est devenu une sorte de chanson
00:32:25 de tube emblématique, on pourrait dire de marque déposée de Lénon.
00:32:28 Alors que c'est un peu l'arbre qui cache la forêt
00:32:31 et qui cache aussi toutes les facettes de Lénon. - Et il faut appeler
00:32:34 nos auditeurs, et je suis sûr que vous serez d'accord Frédéric Ragné,
00:32:37 à se rapper son livre, comment il s'appelle ?
00:32:40 "In his own words" - "In his own words", bien sûr.
00:32:43 En flagrant délire en français, on a appelé ça. - En flagrant délire, voilà.
00:32:46 C'était d'ailleurs une émission de radio, mais ça n'a rien à voir.
00:32:49 Mais il avait un humour, un humour ravageur. - Leur auxif.
00:32:52 Et puis c'était quelqu'un qui n'était pas un saint.
00:32:55 C'était quelqu'un qui a, dans "It's getting better",
00:32:58 qui raconte... - Il avait un petit côté voyou, non ?
00:33:01 - Qui tapait sa femme. Il avait un côté voyou, il a eu quelques problèmes
00:33:04 notamment lors de son fameux "Lost Weekend"
00:33:07 où il a fait un peu n'importe quoi avec ses copains à Los Angeles
00:33:10 en 1974. Mais c'était un écorché.
00:33:13 Et puis honnêtement, c'était aussi quelqu'un
00:33:16 que la politique intéressait assez peu. D'ailleurs c'est ce que
00:33:19 des gens comme Tariq Khali lui reprochaient beaucoup en anglo-terre.
00:33:22 En disant "mais pourquoi t'es pas là à manifester avec nous en 68 ?"
00:33:25 En 68, qu'est-ce qu'il faisait ? Il était en train de chercher de l'art
00:33:28 à la grande question, qui suis-je, où vais-je, etc.
00:33:31 Dans un ashram à Rishikesh en Inde. - Il était très mystique.
00:33:34 Sa quête spirituelle a été insatiable tout au long de sa vie, on peut dire.
00:33:37 - Il a eu une quête, alors il était mystique, mais il était à peu près tout.
00:33:40 Il a cherché à peu près dans la psychothérapie,
00:33:43 dans le cri primal. Il s'est toujours cherché un gourou.
00:33:46 Alors ce gourou, ça pouvait être Brian Epstein qui était le manager des Beatles au début.
00:33:49 Ça pouvait être...
00:33:52 - Le Maharishi après. - Le Maharishi, le docteur Janoff,
00:33:55 le créateur de cette théorie du cri primal.
00:33:58 Et ça a été évidemment Yoko Ono qui a été sa femme,
00:34:01 mais aussi son gourou. Et qui aujourd'hui est devenu
00:34:04 une sorte de grande prêtresse du culte lénonien,
00:34:07 on va dire. - C'est ça. - C'est normal, je veux dire.
00:34:10 C'est le fond. J'allais dire le fond de commerce,
00:34:13 mais ce serait pas très gentil. Mais peut-être qu'on devrait
00:34:16 passer à la Reine d'Angleterre. - On va écouter
00:34:19 effectivement un autre tube, effectivement planétaire,
00:34:22 cette hymne punk des années 70.
00:34:25 Et oui, les Sex Pigs Stull sur Sud Radio.
00:34:42 Cette chanson est sortie en 1977, c'est un pied de nez à la royauté.
00:34:45 Quelle est la jeunesse de ce titre, Frédéric Gragnet ?
00:34:48 - 77, c'est une année mythique.
00:34:51 Parce que c'est la naissance du punk.
00:34:54 En 77, là on sort des grandes célébrations à la fois du jubilé
00:34:57 de la Reine, et puis de la mort de la Reine,
00:35:00 qui ont créé une émotion terrible.
00:35:03 On a aujourd'hui un attachement assez important à la royauté.
00:35:08 En 77, c'est pas tout à fait ça. En 77, c'est les 25 ans
00:35:11 du couronnement de la Reine.
00:35:14 - L'Angleterre va mal. C'est James Callaghan
00:35:17 qui a succédé à Harold Wilson,
00:35:20 un travailliste un peu terne, qui d'ailleurs
00:35:23 à la fin de sa vie dira, je le cite, qu'il a été le
00:35:26 le pire Premier Ministre de toute l'histoire de l'Angleterre.
00:35:29 - Voilà, elle lucidera cette lucidité.
00:35:32 - C'est Thatcher qui a pris la suite après.
00:35:35 - En 79, tout à fait.
00:35:38 - Et alors, qu'est-ce qui se passe ? - Il a été obligé de quémander
00:35:41 des sous auprès du FMI pour sauver la livre Sterling.
00:35:44 Donc il y a cette image, on sait pas trop si on doit
00:35:47 célébrer les 25 ans parce qu'il y a plus d'argent.
00:35:51 Et derrière tout ça,
00:35:54 va se créer un mouvement
00:35:57 contestataire, mais pas seulement, une sorte de mouvement nihiliste
00:36:00 avec la naissance d'une génération qui est là
00:36:03 contre la génération, cette génération glorieuse du Blitz
00:36:06 qu'avait subie la Seconde Guerre mondiale.
00:36:09 - Churchill, enfin, etc. - Cette génération de Churchill.
00:36:12 - Mais eux, les punks, etc.
00:36:15 ils étaient anarchistes, on peut dire.
00:36:18 - Anticonformistes, nihilistes. - Je veux pas aller idéologiquement,
00:36:21 mais c'était quoi ? Parce que, pourquoi je vous parle de ça ?
00:36:24 Vous savez le grille Marcos Lipzig-Straessens
00:36:27 qui lit le mouvement punk
00:36:30 de Johnny Rotten Sex Pistols avec des situationnistes.
00:36:34 - Oui, c'est plus situationniste.
00:36:37 - Ils ont utilisé l'art comme une sorte de pied de nez
00:36:40 et comme une manière de déconstruire le capitalisme.
00:36:43 Malcom McLaren dira plus tard, qui était le manager des Sex Pistols
00:36:46 qu'il avait été très inspiré par les situationnistes.
00:36:49 Je trouve qu'il ne faut pas trop mettre non plus
00:36:52 d'idéologie dans ce qui est avant tout
00:36:55 un grand coup de pied dans la fourmilière.
00:36:58 Et les Sex Pistols, qui est ce groupe qui a été un peu
00:37:01 créé de toutes pièces par ce manager. - Malcom McLaren.
00:37:04 - Qui était le compagnon de Vivian Westwood
00:37:07 qui avait une boutique sex à Londres.
00:37:10 - Kings Road.
00:37:13 - Qui a décidé justement de perturber
00:37:16 le Jubilé de la Reine qui finalement a été organisé.
00:37:19 - Avec ce titre.
00:37:22 - En créant ce groupe et avec ce titre, God Save the Queen.
00:37:25 - Qui a fait scandale à sa sortie. Dans la presse, on a parlé
00:37:28 de haute trahison, de pendaison, c'est incroyable.
00:37:31 - Oui, parce que c'était vraiment, on s'attaquait
00:37:34 à une icône. D'ailleurs, on voit dans la pochette
00:37:37 du disque et puis les affiches, on voyait
00:37:40 les yeux, la bouche étaient complètement
00:37:43 arrachées. C'était un vrai crime
00:37:46 de lèse-majesté. - Et oui, dans cette chanson, ils disent
00:37:49 effectivement, le régime anglais, c'est un régime fasciste,
00:37:52 ils y vont. - Et après, Frédéric Ranier le traduit
00:37:55 en français, "Never mind the bollocks, here are the Sex Pistols".
00:37:58 Comment on traduit "Never mind the bollocks"?
00:38:01 - On s'en bat les couilles.
00:38:04 - On s'en bat les roubignoles, voici les Sex Pistols.
00:38:07 - Exactement, titre de leur album mythique.
00:38:10 Produit par Thomas,
00:38:13 qui était l'ancien producteur des Beatles, comme quoi, ils étaient pas
00:38:16 si éloignés de l'ancien monde, les Sex Pistols, quoi qu'ils en disent.
00:38:19 - Oui, donc on disait effectivement, la BBC
00:38:22 a même censuré ce titre. - La BBC l'a censuré.
00:38:25 - La BBC l'a censuré. Il est
00:38:28 possible qu'elle ait été... que John Peel, le DJ
00:38:31 mythique de la BBC, ait mis deux fois l'antenne,
00:38:34 il faudrait vérifier. Mais
00:38:37 ce qui est fou avec ce titre, c'est que ça a été,
00:38:40 malgré l'absence de promo, malgré l'interdiction d'antenne sur la BBC,
00:38:43 qui était vraiment incontournable à l'époque,
00:38:46 ça a quand même réussi à être numéro 2. Ça a été sûrement
00:38:49 numéro 1, mais il y a eu une magouille dans les charts, parce que
00:38:52 il y a eu une chanson de Rod Stewart qui était numéro 1 à cette époque,
00:38:55 complètement inoffensive, la chanson, et il y a eu sans doute
00:38:58 un arrêt de trafic. - Et ça a été un très gros succès. - Ça a été un très gros succès,
00:39:01 et puis surtout, je pense qu'au-delà
00:39:04 de l'aspect naissance du punk,
00:39:07 c'est vraiment un
00:39:10 pionnier, pas seulement à la reine, mais la naissance d'une génération.
00:39:13 Comme je vous disais, quand on dit "God Save the Queen",
00:39:16 un régime fasciste, c'est vraiment
00:39:19 un droit d'honneur
00:39:22 à l'encontre de cette génération du blitz qui s'est battue contre Hitler.
00:39:25 Plus finalement que s'attaquer à la reine,
00:39:28 parce qu'il disait d'ailleurs, la reine, on s'en fiche un peu,
00:39:31 il disait la reine, Johnny Rotten, le chanteur, que c'était une sorte
00:39:34 de carton qu'on déplaçait.
00:39:37 C'est un peu comme il inaugurait les chrysanthèmes pour nos présidents de la République
00:39:40 de la quatrième. - Ça me rappelle un autre qui était un peu punk,
00:39:43 on revient juste à un moment à John Lennon, vous savez ce qu'il a dit au Royal Albert Hall ?
00:39:46 Il a dit "Les gens d'en haut
00:39:49 applaudissez, les autres, muivez vos prologues".
00:39:52 - Mais revenons sur le fait qu'ils étaient
00:39:55 vraiment haïs à l'époque. Ils étaient tellement haïs qu'ils étaient obligés
00:39:58 de se produire incognito sous pseudonyme
00:40:01 et le Daily Mirror à l'époque, un député
00:40:04 travailliste avait lancé un appel pour punir les punks
00:40:07 et cet ordre a été suivi à la lettre
00:40:10 par certaines personnes, parce qu'ils ont été violemment agressés.
00:40:13 - Oui, dans les rues. - Par des skis, nous,
00:40:16 des militants d'extrême droite. Oui, oui, ça a été très dur.
00:40:19 On disait, c'était
00:40:22 le Daily Mirror qui appelait ça "le bruit
00:40:25 et la fureur". Quand ils avaient fait cette manchette.
00:40:28 Et les expistoles, quand ils se sont reformés
00:40:31 en 1996, en pied de nez au Daily Mirror,
00:40:34 ils avaient appelé leur tournée "The Filth and the Fury".
00:40:37 - Ah oui, mais ils n'ont pas survécu longtemps quand même, après cet été de la haine.
00:40:40 - Non, mais finalement, c'est ce qui fait
00:40:43 toute la poésie des expistoles, finalement.
00:40:46 Parce que c'était pas une aventure, c'était
00:40:49 une étoile filante qui devait exploser.
00:40:52 Et le fait qu'ils aient quelques chansons,
00:40:55 un album mythique, franchement, indépassable,
00:40:58 un totem du punk, a ajouté à leur légende, évidemment.
00:41:01 - Mais Frédéric, n'est-ce que pas quelqu'un qui a ajouté beaucoup à la légende,
00:41:04 on en parle beaucoup moins, c'est Sid Vicious.
00:41:07 Parce que, moi, j'ai gardé, vous voyez, dans le film de Malcolm McLaren,
00:41:10 quand il chantait "My Way", tout à sa manière,
00:41:13 c'est fabuleux, quoi. Sid Vicious entend "My Way",
00:41:16 alors qu'après Sinatra et compagnie, c'était pas lui
00:41:19 le vrai punk des expistoles,
00:41:22 il part d'Overnose. - C'était le punk par essence
00:41:25 parce que c'était vraiment le moins professionnel de tous.
00:41:28 C'est-à-dire que le premier bassiste
00:41:31 des expistoles a été viré sous prétexte
00:41:34 qu'il aimait McCartney et les Beatles, ça c'est la légende.
00:41:37 Et on l'a remplacé par Sid Vicious
00:41:40 qui faisait partie du cercle des suiveurs
00:41:43 des expistoles, je vais aller les voir tout le temps,
00:41:46 et qui était un type un peu perdu,
00:41:49 complètement cramé à l'héroïne, et incapable de tenir une basse aussi.
00:41:52 Et il représente un peu
00:41:55 cet ange noir du mouvement punk,
00:41:58 parce que contrairement à Johnny Rotten, Johnny Lydon,
00:42:01 qui aura une brillante carrière, notamment au sein de
00:42:04 Public Image Limited d'après,
00:42:07 Sid Vicious va mourir d'overdose
00:42:10 avec sa compagne Nancy Spuggan.
00:42:13 - C'est passionnant. - En tout cas dans votre livre, vous racontez que Gainsbourg,
00:42:16 Serge, s'est sans doute inspiré de l'exemple des sex-pistoles
00:42:19 qui avaient perturbé, on l'a dit, le Jubilé de la Reine un an avant la sortie
00:42:22 de sa marseillaise version
00:42:25 reggae. Alors, quelle est l'histoire de cette chanson ?
00:42:28 Vous allez tout nous raconter dans un instant sur Sud Radio,
00:42:31 parce que cette chanson a vraiment fait scandale à l'époque.
00:42:34 On vous dit tout dans un instant, restez avec nous.
00:42:37 - Sud Radio, la culture dans tous ses états,
00:42:40 André Bercoff, Céline Alonso. - Frédéric Ragné,
00:42:43 alors dans quel contexte Gainsbourg a enregistré
00:42:46 cette version de la marseillaise ? Racontez-nous. C'était le 13 mars
00:42:49 1979. - Gainsbourg, il sort d'une décennie
00:42:52 compliquée pour lui, parce qu'il a eu beaucoup de succès
00:42:55 avec les chansons qu'il a fait interpréter par d'autres, notamment
00:42:58 Jane Birkin, mais sa carrière en solo,
00:43:01 on va dire, il a fait des
00:43:04 chefs-d'oeuvre, des albums concept, Melody Nelson,
00:43:07 même à la tête de chou, mais ça n'a pas bien marché.
00:43:10 Par contre, là, 78, qu'est-ce qu'il a eu ? Un tube, pour une fois
00:43:13 dans sa vie, Sex and Son,
00:43:16 tube disco, dont il a un peu honte, parce que
00:43:19 - C'est vraiment la chanson de plage. - C'est vraiment la chanson de plage.
00:43:22 Il a l'impression d'être comme toutes ces icônes niaillées, comme Sheila avec Spacer
00:43:25 ou Claude François avec Alexandre et Alexandra,
00:43:28 à faire du disco pour être à la mode, et il se dit "non, mais je veux faire autre chose,
00:43:31 je veux faire quelque chose de révolutionnaire", et il décide
00:43:34 sur les conseils de son manager de partir pour Kingston, en Jamaïque,
00:43:37 pour enregistrer avec des musiciens jamaïcains,
00:43:40 notamment Sly and Robbie, mythique
00:43:43 - Les musiciens de Bob Marley ! - Et ils ont
00:43:46 enregistré
00:43:49 tout un album, sur lequel Pierre Angulaire
00:43:52 savait être aux armes, etc., et qui va donner le titre
00:43:55 à l'album, et qui va être
00:43:58 une relecture littérale de La Marseillaise
00:44:01 de Rouget de Lis, qu'il avait composée en 1792,
00:44:04 et Gainsbourg, il est dans un état d'esprit où il veut
00:44:07 redonner ses vertus révolutionnaires
00:44:10 à un chant qui, jusqu'ici, était un peu
00:44:13 - à la fin du XIXe siècle, c'était plutôt
00:44:16 un chant de gauche, et puis dans les années 30, c'était plutôt quelque chose
00:44:19 d'un peu cocardier, et il veut vraiment
00:44:22 la débarrasser de tous ses oripeaux idéologiques
00:44:25 pour lui redonner un peu ses vertus universelles,
00:44:28 révolutionnaires. Il y a un peu de provoque, évidemment, il y a toujours un peu
00:44:31 de provoque chez Gainsbourg, mais je crois qu'il était sincère.
00:44:34 Et pour ce petit juif qui a été
00:44:37 qui a eu l'étoile jaune pendant la guerre, Lucien Ginzburg,
00:44:40 pour lui, c'était une manière
00:44:43 de prendre sa revanche sur l'histoire. - Et oui, et un torrent
00:44:46 de haine s'est abattu sur lui, c'est incroyable, la polémique
00:44:49 a éclaté dans le Figaro Magazine, c'était le 1er juin 1979,
00:44:52 soit trois mois après la commercialisation
00:44:55 du 45 Tours. Que raconte
00:44:58 le journaliste Michel Droit dans cette tribune ?
00:45:01 - Il va lancer les hostilités, et vous avez bien tout à fait raison
00:45:04 de rappeler que la tribune
00:45:07 du Figaro Magazine apparaît trois mois
00:45:10 après la chanson. Pendant trois mois, il ne s'est rien passé, ce qui veut dire
00:45:13 certainement que la polémique, elle ne vient pas de la chanson
00:45:16 de Gainsbourg, mais bien de la tribune de Michel Droit.
00:45:19 Et donc le Figaro Magazine, ce n'est pas le Figaro Magazine qu'on a aujourd'hui,
00:45:22 c'était à l'époque un peu le temple de la
00:45:25 Nouvelle Droite. - Louis Paul, elle, s'y dirigeait.
00:45:28 - Des figures comme Alain de Benoît,
00:45:31 et Michel Droit va faire
00:45:34 une théâtrie, une sorte d'article, de biais polémique
00:45:37 qui ne lui ressemble pas vraiment, parce que Michel Droit, c'était
00:45:40 l'interlocuteur privilégié du Charles de Gaulle
00:45:43 dans "Quelqu'un d'assez mesuré". - Il s'est énervé, là.
00:45:46 - Il s'est énervé, et qu'est-ce qu'il dit ?
00:45:49 Il dit "Chassieux, barbe de trois jours,
00:45:52 libre, dégoulinante, blouson savamment avachi,
00:45:55 main au fond des poches, bref, plus attentivement délabrée,
00:45:58 plus minutieusement débraillée, plus définitivement
00:46:01 crado que jamais". Voilà.
00:46:04 - Il va accuser, carrément, Gainsbourg aussi, de faire le jeu de l'antisémitisme
00:46:07 en disant que... - C'est très, très limite, hein, son...
00:46:10 - Ah non, mais c'était...
00:46:13 Il l'accuse de tourner la Marseillaise en dérision
00:46:16 pour en tirer commercialement profit, voilà.
00:46:19 Donc, vieille rengaine anti-juive. - Gainsbourg a été très blessé
00:46:22 par cette tribune. Il dira, à propos de ce journaliste,
00:46:25 justement, "il m'a remis l'étoile jaune une deuxième fois".
00:46:28 - Oui, mais il a été profondément blessé. Même si
00:46:31 on peut pas se mettre dans la tête de Gainsbourg, il y a toujours,
00:46:34 comme je disais tout à l'heure, une part de provoque. Après,
00:46:37 qu'est-ce qui est provocateur à part ? C'est pas le premier à avoir remis
00:46:40 la Marseillaise au goût du jour. Il y a des gens comme Django Reinhardt
00:46:43 qui l'avait interprétée à la guitare. - Tout à fait. - Vous vous rappelez de cette polémique
00:46:46 en 1974, quand Valéry Giscard d'Estaing avait voulu
00:46:49 ralentir un petit peu le rythme. Bon, déjà,
00:46:52 on avait crié, mais la Marseillaise, c'est
00:46:55 un hymne national, mais qu'on peut tout à fait
00:46:58 réadapter. - Et Frédéric, rappelez, parce que c'est très amusant, parce qu'on lui dit
00:47:01 "Pourquoi tu as mis etc. ?" - Etc.
00:47:04 Ça fait un peu partie de la provoque. C'est-à-dire que ça correspond
00:47:07 à cette image de Gainsbourg un peu nonchalante. Parce qu'en fait,
00:47:10 quand il écrivait, au lieu d'écrire "Adlib",
00:47:13 au lieu de toujours les paroles, il écrivait les couplets
00:47:16 et puis au moment du refrain, il mettait "Aux armes", etc.
00:47:19 Et ça donne cette impression que, finalement, "Aux armes",
00:47:22 j'ai un peu la flemme de raconter la suite. - Non, mais c'est juste un mot,
00:47:25 je ne sais pas si vous le savez, mais peut-être...
00:47:28 Vous savez que dans les livres, dans les livres
00:47:31 des manuels, certains manuels d'histoire, c'est décrit
00:47:34 "Aux armes", etc. - Ah, je ne savais pas ça. - Absolument. C'est-à-dire que c'est pas Gainsbourg
00:47:37 qui l'a inventé, ça. C'est-à-dire que dans certains manuels d'histoire,
00:47:40 vous aviez, parce que le type ne voulait pas répéter, donc il disait
00:47:43 "Aux armes, citoyens", on ne va pas répéter le refrain quatre fois,
00:47:46 et il mettait "Aux armes", etc. Moi, j'ai un manuel d'histoire
00:47:49 où il y a ça. - Mais comme quoi, on a accusé Gainsbourg
00:47:52 justement de nonchalance, alors que finalement, il a juste lu un livre d'histoire.
00:47:55 - Absolument. - En tout cas, à l'époque, Gainsbourg a été
00:47:58 inondé de courrières injurieuses, surtout parce qu'il avait répondu
00:48:01 à la tribune de droit dans le matin, dans une
00:48:04 tribune intitulée "L'étoile des braves".
00:48:07 Et à l'époque, il faut le rappeler, c'est que des associations d'anciens combattants
00:48:10 et de parachutistes ont mené des actions pour faire interdire les concerts.
00:48:13 Notamment, c'était à Strasbourg, le 4 janvier
00:48:16 1980. Racontez-nous ce qui s'est passé.
00:48:19 - Gainsbourg a voulu se produire. C'est effectivement
00:48:22 dans une période de tension terrible. C'était
00:48:25 une sorte de guerre entre Gainsbourg et les éditorialistes.
00:48:28 C'est l'époque où il disait "On n'a pas le
00:48:31 con d'être aussi droit". C'était sa formule.
00:48:34 Et face au...
00:48:37 Quand il a dû se produire à Strasbourg
00:48:40 avec ses musiciens jamaïcains,
00:48:43 il a été empêché par une
00:48:46 association de paramilitaires.
00:48:49 Et John Birkin, dans les coulisses, lui a dit
00:48:52 "Laisse tomber, ça sert à rien".
00:48:55 Et de rage, il est monté sur scène dans son habit
00:48:58 un peu... son habit militaire à lui.
00:49:01 Il a levé le bras et il a chanté sa Marseillaise.
00:49:04 - Il a chanté la Marseillaise ?
00:49:07 - Voilà, à capo. - À capella.
00:49:10 Et puis, étonnamment,
00:49:13 les paras qui étaient présents dans la salle
00:49:16 se sont mis à l'entonner aussi, parce qu'ils étaient
00:49:19 un peu obligés. Le concert n'a pas pu se faire.
00:49:22 Et puis, l'histoire a continué. Il a voulu
00:49:25 montrer qu'il était vraiment un patriote.
00:49:28 C'était un patriote, John Birkin le dit très bien d'ailleurs.
00:49:31 Et il a racheté un des exemplaires du manuscrit de Roger Delisle.
00:49:34 Mais je dirais que... - Mais ça a créé à nouveau
00:49:37 des tensions. On citait que Dominique Janet,
00:49:40 qui, effectivement, à ce propos, dans le quotidien de Paris, a dit
00:49:43 "Comment se fait-il qu'aucun patriote n'ait trouvé au fond de ses poches
00:49:46 135 000 francs pour empêcher un Rasta
00:49:49 de mettre ses sales pattes sur la Marseillaise ?"
00:49:52 - C'est dur. - C'est dur ? - Quand on lit ça, on est étonnés.
00:49:55 On a l'impression qu'on est en 33, en 34.
00:49:58 Alors qu'on est en 79.
00:50:01 Et 15 mois... Alors,
00:50:04 Michel Droit, entre la polémique
00:50:07 et cet épisode, il va entrer à l'Académie française,
00:50:10 donc il va éviter de remettre son nez là-dedans.
00:50:13 Mais effectivement, Dominique Janet reprend le flambeau.
00:50:16 C'est pas à son honneur, ça. Mais Gainsbourg
00:50:19 va être blessée. Et je suis persuadé
00:50:22 que l'évolution suivante de Gainsbourg,
00:50:25 c'est-à-dire que l'esthète un peu Germano-pratin,
00:50:28 le dandy à moque-assin,
00:50:31 va se transformer finalement en... - Gainsbarre.
00:50:34 - En Gainsbarre. Et en provocateur. De provoquer,
00:50:37 il est devenu provocateur. Et la provocation, qui n'était qu'une facette
00:50:40 de sa personnalité, a pris le dessus.
00:50:43 Et je crois que cette affaire, finalement,
00:50:46 elle a cru... - Oui, c'était le cas.
00:50:49 Tu disais quand Gainsbarre se bourre, Gainsbourg se barre.
00:50:52 Mais est-ce que vraiment... Alors justement, j'ai vu
00:50:55 ce que vous dites, mais au fond, Gainsbourg
00:50:58 n'a pas fait que ça, après. Parce que vous présentez...
00:51:01 Est-ce que ça a été vraiment une rupture ? Je vous pose la question.
00:51:04 Parce que... Est-ce qu'il n'a été que
00:51:07 je veux dire provocateur
00:51:10 après ça ? Alors c'est vrai que ça a accentué
00:51:13 le fait, mais est-ce qu'il n'était pas déjà, peut-être
00:51:16 la santé, la maladie n'a pas joué ? - Je sais pas.
00:51:19 Je sais pas. En tout cas,
00:51:22 ce qui est vrai, c'est que ça a marqué une rupture. Il y a quelques belles choses
00:51:25 sur l'album suivant, sur les Nouvelles des Etoiles,
00:51:28 notamment la Nostalgie Camarade.
00:51:31 Les albums suivants, pour moi, qui sont pratiquement des
00:51:34 albums de rap, je trouve qu'ils s'aventurent sur un terrain qui était
00:51:37 pas très bon. Love on the beat, pour moi,
00:51:40 passer de Je t'aime moi non plus à Love on the beat, c'est pas bien.
00:51:43 Et pour moi, je crois que
00:51:46 ce qui est dommage aujourd'hui, c'est que dans
00:51:49 les best-of télé, on rappelle essentiellement ça.
00:51:52 On rappelle l'histoire de la Marseillaise, et on met cette histoire de la Marseillaise
00:51:55 à côté de choses pas très glorieuses,
00:51:58 c'est-à-dire les billets de 500 francs brûlés,
00:52:01 ou alors à la provoque Whitney Houston, Jédrucare.
00:52:04 - Là, vous avez tout à fait raison. C'est vrai, on entend
00:52:07 beaucoup moins les Ronsard 58,
00:52:10 les Black Baudelaire magnifiques, etc.
00:52:13 - C'est toute la merveille des années 70.
00:52:16 Effectivement.
00:52:19 Et c'est dommage. Et je crois
00:52:22 que ce changement de paradigme,
00:52:25 Gainsbourg a pris le dessus,
00:52:28 sans doute parce qu'il s'est senti meurtrier et provoqué.
00:52:31 - Eh oui. - Ça a joué, oui.
00:52:34 - Alors, écoutons à présent cette chanson sublime qui symbolise la naissance
00:52:37 du Charity Business. Elle est sortie en 1984.
00:52:41 - There comes a time
00:52:44 When we heed a certain call
00:52:47 When the world must come together as one
00:52:50 There are people dying
00:52:53 Oh, when it's time
00:52:56 To lend a hand to life
00:52:59 The greatest gift of all
00:53:02 We are the world
00:53:05 Can you go on
00:53:08 Pretending day by day
00:53:11 That's the one
00:53:14 Somewhere we'll soon make a change
00:53:17 - Frédéric Ranier,
00:53:20 cette chanson a été co-écrite par
00:53:23 Michael Jackson et Lionel Richie, c'est ça ?
00:53:26 - Oui. C'était une chanson qui a été co-écrite fin 1984,
00:53:29 qui est sortie début 1985,
00:53:32 et qui marque la naissance de ce business humanitaire.
00:53:35 Jusque-là, le rock,
00:53:38 il y avait assez peu de manifestations caritatives
00:53:41 qui étaient organisées dans le monde du rock.
00:53:44 Il y avait eu ce concert pour le Bangladesh en 71
00:53:47 qui avait été mis en scène par George Harrison,
00:53:50 il y avait Dylan, Ringo Starr, mais là,
00:53:53 on passe vraiment à un cran supérieur.
00:53:56 À l'époque, on est en 83-84, il y a une famine terrible
00:53:59 qui touche l'Ethiopie, dans un pays qui est
00:54:02 10 ans après la mort des Lézé-Lazier,
00:54:05 il va y avoir des déplacements de population,
00:54:08 il va y avoir des récoltes catastrophiques,
00:54:11 et tout d'un coup, à la BBC,
00:54:14 on va avoir des images
00:54:17 de ces enfants en train de mourir,
00:54:20 de ces hommes et femmes en train de mourir,
00:54:23 et ça va créer une émotion. En Angleterre,
00:54:26 il va y avoir une chanson, puisque Bob Geldof,
00:54:29 il va faire cette chanson, et aux Etats-Unis,
00:54:32 ça va donner des idées à Harry Belafonte,
00:54:35 qui nous a quittés il n'y a pas très longtemps,
00:54:38 et qui va se dire "pourquoi on ne ferait pas la même chose aux Etats-Unis ?"
00:54:41 D'abord, il pense faire chanter ça par des artistes afro-américains,
00:54:44 et puis il se dit "non, finalement, cette famine,
00:54:47 elle nous touche tous, c'est l'universalisme,
00:54:50 c'est normal", et il va appeler
00:54:53 son copain Quincy Jones, qui a produit
00:54:56 les deux albums de Michael Jackson,
00:54:59 - Avec le succès qu'on sait ! - Ah oui, oui !
00:55:02 Deux disques assez obscurs, qui ont vendu quelques exemplaires,
00:55:05 "Thriller" et "Off the Wall", et il se dit
00:55:08 "bon, faites équipe avec Lionel Richie pour composer
00:55:11 un hymne", et Michael Jackson
00:55:14 va finalement, sans doute, composer la chanson
00:55:17 largement dans son coin, et arriver avec une démo,
00:55:20 avec cette chanson, cette balade, qui évoque
00:55:23 par exemple "Human Nature"
00:55:26 sur "Thriller", et qui est une sorte de chanson
00:55:29 de réconfort, qui est là pour montrer que... - "Nous sommes un monde,
00:55:32 nous sommes unis", et voilà, c'est cool ! - Exactement !
00:55:35 Et l'autre coup de génie de Quincy Jones, c'est que
00:55:38 début 1985, il va y avoir une grande
00:55:41 cérémonie,
00:55:44 les American Music Awards qui va être organisée... - Pardon, c'est lui
00:55:47 qui a réuni tous les... Qui a réuni ? - Oui ! C'est Quincy !
00:55:50 - C'est Quincy ! - C'est Quincy Jones ! C'est-à-dire, à l'occasion de ces
00:55:53 American Music Awards, où Lionel Richie, Michael Jackson,
00:55:56 Prince vont être en compétition pour le disque de l'année,
00:55:59 il va y avoir tout le gratin de la pop et du rock,
00:56:02 en ayant profité pour dire "Distribuez des cartons,
00:56:05 mettez votre égo à la porte, venez me voir dans les
00:56:08 studios d'Hollywood, et pendant toute une nuit, on va
00:56:11 chanter cet hymne qui va être destiné
00:56:14 à sauver l'Ethiopie,
00:56:17 sauver l'Afrique de l'Europe." - Quel casting incroyable ! - Mais le casting est incroyable !
00:56:20 Il y avait Bob Dylan, Tina Turner, Diana Ross, Ray Charles,
00:56:23 Stevie Wonder, Billy Joel... En revanche, il n'y avait
00:56:26 ni Prince ni Madonna, ce qui est quand même étonnant. Et leur présence
00:56:29 a été... Leur absence a été vraiment remarquée. - Madonna, c'est étonnant
00:56:32 parce que c'est vraiment... Y'a Cyndi Lauper qui est un peu son
00:56:35 succès d'année, on va dire, à l'époque.
00:56:38 Mais Madonna, son absence est étonnante,
00:56:41 et Prince, on saura des années plus tard
00:56:44 pourquoi. Alors lui, donner cette explication
00:56:47 comme quoi... Il a pas pu y aller, pourtant il était
00:56:50 à Los Angeles à l'époque. Il a pas pu y aller parce qu'il y avait eu
00:56:53 un problème avec ses gardes du corps...
00:56:56 Il se rattrapera en composant une chanson pour
00:56:59 le 33 tours, mais il est pas sûr, effectivement, sur le
00:57:02 45 tours. - Enfin, y'a déjà tellement de monde... - Oui, on parle
00:57:05 de rivalité entre lui et Jackson à l'époque, c'est ça ?
00:57:08 - C'est sans doute vrai, et surtout,
00:57:11 quand cette guitariste sortira sa biographie
00:57:14 25 ans plus tard, elle avouera que Prince n'avait pas voulu se rendre
00:57:17 ce soir-là dans les studios, parce qu'il ne voulait pas chanter
00:57:20 cette chanson pourrie parmi ses enfoirés.
00:57:23 - Ah, carrément ! - En tout cas, grâce à ce hymne,
00:57:26 plus de 63 millions de dollars ont été récoltés.
00:57:29 Alors, à l'époque, Reagan a soutenu cette lutte
00:57:32 contre la famine en Afrique, mais sous condition,
00:57:35 vous le rappelez dans votre livre, c'est très intéressant, racontez-nous. - Oui, c'est-à-dire
00:57:38 qu'on est en pleine phase du
00:57:41 réaganisme triomphant, et pour Reagan,
00:57:44 montrer... parce que le régime en Ethiopie,
00:57:47 c'est un régime rouge, c'est Mengistu,
00:57:50 qui tient les rênes 10 ans après Sélassié,
00:57:53 et qui... c'est une dictature
00:57:56 qui est soutenue, bon, un peu... une dictature rouge,
00:57:59 mais soutenue un peu du bout des lèvres par les soviétiques.
00:58:02 Et pour Reagan, c'est tout bénef
00:58:05 de montrer finalement que les Etats-Unis sont là pour aider
00:58:08 un régime qui est incapable de gérer ses affaires intérieures.
00:58:11 - Est-ce que juste parce que nous arrivons en fin du...
00:58:14 pas de l'émission, heureusement, mais du module, est-ce que ça a été
00:58:17 immédiatement un succès mondial ? Immédiatement ?
00:58:20 - Parce que CBS a fait pour, parce que
00:58:23 ça a été matraqué, et c'est l'ère du matraquage,
00:58:26 c'est-à-dire qu'il y a moins qu'un autre diffusion, et puis,
00:58:29 comment dire... c'était aussi la naissance... c'était un peu
00:58:32 inédit comme exercice. Et...
00:58:35 acheter un 45 Tours ou diffuser une chanson, c'est bien,
00:58:38 c'est un acte généreux, c'est aussi une manière de s'acheter une bonne conscience
00:58:41 à peu de frais, si vous voulez. Et donc, quand on achetait
00:58:44 ce 45 Tours... - On participait à un acte à la dictature.
00:58:47 - Voilà. Mais, voilà, je veux pas non plus être trop cynique.
00:58:50 Et cette chanson va quand même ouvrir la voie
00:58:53 à des chansons bientôt, je pense à Sun City, contre
00:58:56 l'apartheid, un an plus tard, ou il va y avoir des chansons...
00:58:59 - Gréceland aussi. - Voilà, ou des chansons contre le SIDA,
00:59:02 et puis... - Ça va ouvrir la voie
00:59:05 aux chansons grandes courses. - Le problème, c'est qu'il y a
00:59:08 certains artistes qui vont plonger là-dedans
00:59:11 et devenir oubliés qu'ils sont avant tout des chanteurs de rock
00:59:14 et qui vont s'inventer une sorte
00:59:17 de posture un peu christique.
00:59:20 Je pense à Michael Jackson avec les chansons dans les années 90,
00:59:23 "Heart Song" ou "Heal the World", où on a l'impression que
00:59:26 c'est l'avènement du Messie.
00:59:29 Ou Bono, par exemple. - C'est vrai,
00:59:32 Bono est devenu complètement là-dedans. Mais c'est dommage, juste un mot,
00:59:35 parce que vous avez sûrement dû voir les chansons de la répétition
00:59:38 de ce que devait faire Jackson avant de mourir.
00:59:41 Et là, il revenait aux origines. Il y avait un côté "back to the roots",
00:59:44 plus ou moins, mais assez fort. - Je pense que c'est
00:59:47 un des grands regrets de l'histoire du rock.
00:59:50 C'est troublant de savoir que finalement, il semblait si frêle
00:59:53 et en même temps, c'est dynamique à la fois.
00:59:56 On ne saura jamais. - Oui. Alors les artistes
00:59:59 effectivement, mais les politiques aussi, ont profité
01:00:02 certains d'un phénomène musical pour se faire élire
01:00:05 et diriger un pays. C'est le cas d'un grand politique
01:00:08 international. On va en parler dans un instant. On vous dira lequel.
01:00:11 A tout de suite.
01:00:14 Sud Radio, la culture dans tous ses états.
01:00:17 André Bercoff, Céline Alonso.
01:00:20 La suite emblématique du groupe Oasis a contribué à réinstaller
01:00:23 les travaillistes au pouvoir
01:00:26 en Angleterre en 1997.
01:00:29 Frédéric Gragnet. Alors, quelle a été la stratégie des conseillers
01:00:32 de Tony Blair pour y parvenir ?
01:00:35 Parce que l'exercice était périlleux, on peut dire, non ?
01:00:38 - Effectivement.
01:00:41 Ça a toujours été dans l'histoire,
01:00:44 on le voit encore parmi nos dirigeants, cette volonté
01:00:47 de s'associer à des artistes à la mode
01:00:50 pour pouvoir se faire élire. Je pense à Wilson en 1964
01:00:53 avec les Beatles, qui pourtant avait juré
01:00:56 de ne pas faire de politique, mais il a réussi à faire sa petite photo.
01:00:59 Tony Blair va être très très malin au début des années 90.
01:01:02 Il faut se souvenir, au début des années 90,
01:01:05 l'Angleterre s'ennuie, pour paraphraser le monde.
01:01:08 C'est-à-dire que
01:01:11 on n'entend à la radio que des chansons américaines,
01:01:14 tout ça. On a l'impression que la culture anglaise
01:01:17 est un peu mise de côté. Et puis tout d'un coup, il va y avoir
01:01:20 ce qu'on appelle la "Britpop", c'est-à-dire que c'est un courant musical
01:01:23 où tout d'un coup, on va rassembler des artistes anglais
01:01:26 autour de la bannière de l'Union Jack.
01:01:29 Et il va y avoir Blur, il va y avoir Pulp, et il va y avoir le premier
01:01:32 de ces groupes, qui est Oasis, et qui en 1995
01:01:35 va sortir son second album
01:01:38 et porté par cette chanson
01:01:41 "The Water Wall", qui est une sorte de balade de réconfort
01:01:44 qui évoque un peu ce que pouvaient produire les Beatles
01:01:47 au milieu des années 60. Donc une sorte de tube
01:01:50 qui est tout à fait calibré pour les radios.
01:01:53 À l'époque, c'est un groupe qui est incarné
01:01:56 par les frères Gallagher, qui se castagne, qui s'envoie
01:01:59 des invectives par médias interposés. On suit leur épopée
01:02:02 un peu comme on suivrait un soap opéra.
01:02:05 Et l'essor
01:02:08 d'Oasis, ça correspond à une sorte de renouveau
01:02:11 de la culture anglaise. Vous vous souvenez, c'est l'époque
01:02:14 de The Full Monty au cinéma, c'est l'époque
01:02:17 de... - Oui, c'est-à-dire qu'il y avait
01:02:20 toute l'époque punk, sex-piste,
01:02:23 enfin, Malcolm McLaren, Vivienne Westwood et compagnie
01:02:26 et puis ça avait sombré, et puis là...
01:02:29 - Alors justement, Tony Blair, en quoi était-il malin ?
01:02:32 Comment ses conseillers ont fait pour l'approcher ? C'était un musicien
01:02:35 Tony Blair, non ? - C'était un musicien, il jouait de la guitare
01:02:38 dans un groupe amateur quand il était jeune d'ailleurs, avec
01:02:41 un journaliste qui deviendra plus tard
01:02:44 le rédacteur en chef du magazine Q.
01:02:47 Il en a joué, surtout il est malin. C'est-à-dire que face à lui, qu'est-ce qu'il a ?
01:02:50 Déjà, il a... Quand on arrive en 97,
01:02:53 en 95, ça fait
01:02:56 16 ans que Tatcherisme est au pouvoir. Alors Tatcher est parti
01:02:59 au début de la décennie, mais elle a été remplacée par John Major
01:03:02 qui n'est pas le plus charismatique des dirigeants.
01:03:05 D'ailleurs, on se moque de lui tous les soirs dans "Speeding Image", l'équivalent
01:03:08 des guignols de l'info, en disant
01:03:11 que c'est un "grey man", il est complètement gris.
01:03:14 Il est littéralement grisâtre.
01:03:17 Et Tony Blair sait pertinemment que s'il veut gagner les élections,
01:03:20 il faut se mettre la jeunesse dans sa poche. Qu'est-ce qu'il va faire ?
01:03:23 Sous les conseils de ses "spin doctors", c'est
01:03:26 qu'il va répéter à l'envie dans les interviews
01:03:29 qu'il avait son petit groupe de rock,
01:03:32 qu'il adore Oasis. Pourquoi Oasis ?
01:03:35 Parce que c'est le groupe le plus successif du moment.
01:03:38 Et puis, il prend bien soin
01:03:41 de citer une chanson un peu obscure d'Oasis pour montrer
01:03:44 qu'il ne s'est pas contenté du tube, etc.
01:03:47 Et à cette époque, "Wonderwall",
01:03:50 quand ça sort en single fin 95,
01:03:53 ça balaye tout sur son passage. C'est-à-dire que
01:03:56 c'est un moment important où
01:03:59 un tube britannique va avoir du succès
01:04:02 pas seulement en Angleterre, mais en Europe et outre-Atlantique.
01:04:05 Et ça va faire espérer à toute l'industrie musicale
01:04:08 une sorte de nouvelle invasion britannique, comme on avait pu avoir
01:04:11 au début des années 60 avec les Beatles, les Stones, les Kings,
01:04:14 les Animals, etc. - En tout cas, le 1er mai 1997,
01:04:17 Tony Blair remportera les élections,
01:04:20 mais l'état de grâce où le raconter ne va pas durer.
01:04:23 - André Berkhoff, avant de rendre l'antenne, j'aimerais que l'on dise un mot
01:04:26 sur le festival de Correspondance qui aura lieu à Grignan
01:04:29 du 4 au 8 juillet cette année, c'est la 27e édition,
01:04:32 sur le thème "Lettre d'amour et de haine" et au programme
01:04:35 donc différents spectacles André. - Oui, d'ailleurs,
01:04:38 ils auraient pu franchement intituler et propendre d'hommage
01:04:41 à Gainsbourg en disant "Je t'aime, moi non plus". Ça aurait été plus fort.
01:04:44 Enfin, très très bien Grignan, si vous êtes dans les parages
01:04:47 et même si vous n'êtes pas dans les parages, allez-y, du 4 au 8 juillet,
01:04:50 Correspondance d'Antoine et Consuelo de Saint-Exupéry
01:04:53 avec Antoine Dulleri, Anne Pariot, énormément de comédiens
01:04:56 mais je cite juste les correspondances, Napoléon et Joséphine,
01:04:59 Catherine et Alain Robbier,
01:05:02 Cocteau, Amaré, Franz Kafka, Milena Jezinska,
01:05:05 et la haine est-elle vraiment
01:05:08 le contraire de l'amour ? Vaste question philosophique.
01:05:11 Mais j'aurais une dernière question à poser justement avant qu'on
01:05:14 rende l'antenne à Frédéric Ragné. Au fond,
01:05:17 les chansons, c'est vraiment
01:05:20 je dirais, c'est peut-être plus important que la politique
01:05:23 en tout cas pour les gens. - Écoutez, Lennon,
01:05:26 quand j'ai écrit une biographie des Beatles il y a
01:05:29 quelques années, il y a 3 ans maintenant, j'avais une citation
01:05:32 de Lennon qui disait "J'ai fait beaucoup plus
01:05:35 pour mettre fin à la guerre du Vietnam que
01:05:38 tous les diplomates du Congrès de Paris
01:05:41 en 73". J'ai trouvé ça ridicule, parce que bon, c'est pas le plus
01:05:44 humble des musiciens. Et en même temps,
01:05:47 qu'est-ce qui reste aujourd'hui ? Est-ce qu'il reste "Imagine" ?
01:05:50 Est-ce que finalement dans la psyché collective,
01:05:53 les figures de Kissinger, de Léducto sont pas en train
01:05:56 de disparaître ? Finalement, est-ce que
01:05:59 voilà, peut-être qu'une bonne chanson ça vaut tous les grands discours.
01:06:02 - En fait, c'est pas tout fini par des chansons, tout commence
01:06:05 par des chansons. - Exactement. Frédéric Ragné, merci d'être
01:06:08 venu sur Sud Radio. Je rappelle que votre livre "Imagine", 12 chansons
01:06:11 faits d'histoire, est paru aux éditions Perrin, de même que
01:06:14 votre biographie sur les Beatles qui vient d'être réédité
01:06:17 dans la collection Tempus.