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00:00 Les informés du matin, à vos côtés Jean-Rémi Baudot, bonjour.
00:05 Bonjour Julien.
00:06 Avec nous, Ania Nussbaum, correspondante Elysée pour Bloomberg, bonjour à vous.
00:10 Bonjour à tous.
00:11 Et Pablo Piovivien, rédacteur en chef de Regards, La Revue, le site internet.
00:15 Nathanaël Charbonnier, rédaction internationale de Radio France, va nous rejoindre dans un
00:18 deuxième temps puisque nous allons parler de la fin de la France atypique, répétée
00:22 par Emmanuel Macron en déplacement en ce moment.
00:25 Mais d'abord, Jean-Rémi Baudot, la hausse des prix, l'autre front social du gouvernement,
00:30 combien coûteront nos courses dans les semaines à venir ?
00:31 C'est la réponse à cette question, elle s'est jouée cette semaine avec les négociations
00:35 entre la grande distribution et les industriels.
00:38 Négociations tendues dans un contexte d'inflation, ça devrait être une hausse proche de 10%.
00:43 Écoutez Michel-Edouard Leclerc, patron du groupe du même nom, l'invité du 8.30
00:47 France Info.
00:48 On a bien travaillé, on est parti d'une moyenne de 15 à 25% de demande de hausse
00:55 sur l'épicerie, je pense qu'on va clôturer ce cycle à 10%.
00:59 Alors 10%, on est fier d'avoir fait notre job, c'est un peu dur en face, mais on a
01:04 fait notre job de négociation.
01:06 Mais en face, ça fait 10% qui vont se rajouter sur les produits alimentaires, aux 15% que
01:11 vous avez tous constatés.
01:12 Et donc ça fait 25% sur 18 mois quand même, ça fait pas mal.
01:15 Voilà, l'inflation, question économique, mais problème politique.
01:19 Et le gouvernement a-t-il encore les moyens de répondre à ce problème ? C'est évidemment
01:23 l'une des questions.
01:24 C'est le gouvernement qui a promis de casser les prix avec un dispositif annoncé d'ici
01:26 la mi-mars.
01:27 Peut-être le panier anti-inflation, on verra les contours de ce dispositif, mais les marges
01:31 de manœuvre sont réduites, c'est ce que disait Michel-Edouard Leclerc à Niagne-Nusbaum,
01:34 quand les grandes distributions font 2% de marge, il ne peut pas y avoir de miracle.
01:37 Est-ce que ça va être possible de casser les prix ?
01:39 Alors cette idée du panier inflation, on attend encore de voir.
01:42 C'est une idée de la ministre des PME, Olivia Grégoire, mais lorsqu'on parle aux autres
01:46 ministres, aux conseillers, on se constate que ce n'est pas encore tout à fait abouti.
01:49 A la base c'était d'avoir vraiment un panier pour pouvoir comparer les prix entre
01:52 enseignes, maintenant on est plutôt sur une liste de produits parce que les produits
01:55 ne sont pas forcément comparables d'une enseigne à l'autre.
01:57 Bref, il ne faut pas s'attendre à des miracles, même si les distributeurs sont évidemment
02:00 sous pression, pression du gouvernement, pression médiatique, pour proposer une liste
02:03 de produits à prix cassé.
02:05 Le gouvernement va devoir agir ?
02:07 Le gouvernement va devoir agir, ça fait longtemps que le gouvernement aurait dû agir, aurait
02:11 dû anticiper cette inflation dont on parle depuis quand même très longtemps.
02:15 Je sais que Bruno Le Maire, il y a six mois, nous disait "c'est bon, on est arrivé au
02:19 pic de l'inflation, maintenant on est sur un palier etc."
02:22 Ce n'était absolument pas le cas.
02:24 Là il nous a dit que ce ne serait pas un mars rouge, il a dit ça il n'y a pas longtemps,
02:28 il y a quelques jours.
02:29 Il y a quand même d'autres acteurs à commencer, par Michel-Edouard Leclerc qui commence à
02:32 nous dire que si ça va être un mars rouge et jusqu'au mois de juin l'inflation va
02:37 continuer d'augmenter.
02:38 La hausse va s'échelonner de manière régulière jusqu'au début de l'été.
02:40 Ça c'est une autre façon de le dire, mais en gros ça va augmenter jusqu'à l'été.
02:45 Donc il faut que le gouvernement fasse quelque chose.
02:48 Et en plus, le gouvernement, spécialement sur les questions de l'alimentation, l'exécutif
02:54 a du mal à prendre des décisions parce que ce n'est pas un champ de compétences naturelles.
02:59 Il n'y a pas de ministère de l'alimentation.
03:01 Vous avez un peu l'agriculture, il s'en occupe aussi un peu à Bercy, vous avez des conseillers
03:05 plus ou moins spécialisés à l'Elysée, mais il n'y a pas de compétence propre à
03:10 l'alimentation.
03:11 Et d'ailleurs il y a plusieurs acteurs qui commencent à le demander, à dire par exemple
03:14 qu'il faudrait créer une branche de la sécurité sociale de l'alimentation.
03:17 On a ce qu'on appelle un conseil national de l'alimentation qui est placé sous l'égide
03:21 de plusieurs ministères et qui avance des propositions qui ne sont pas très écoutées.
03:25 Il y a quand même eu cette volonté d'encadrer, de fixer un cadre pour les négociations commerciales
03:29 entre les industriels et les consommateurs.
03:30 Exactement, mais en fait vous voyez bien que là c'est mettre une rustine sur un système
03:34 qui prend complètement l'eau.
03:35 Ça fait longtemps en fait que les problèmes d'inflation, d'ailleurs c'est un problème
03:39 économique global, l'inflation n'est pas que sur les prix de l'alimentation, c'est
03:43 aussi sur le prix de l'énergie, c'est sur tous les prix de toutes les matières premières,
03:46 en gros tout augmente.
03:47 Donc en fait il faut adapter notre système économique, faire une proposition, avoir un
03:51 projet de changement global.
03:53 Parce qu'on parle de la France, mais nos voisins, les Allemands, ils ont aussi une
04:00 inflation qui commence à les embêter.
04:02 En Bretagne également.
04:03 Exactement, là ils commencent à se mobiliser.
04:05 Il y a des manifestations, des grandes manifestations qui sont organisées a priori début mars.
04:11 On voit justement qu'il y a des soubresauts politiques en Grande-Bretagne pour cette cause-là.
04:14 On va voir si la question se posera en France ou pas.
04:16 Ce sera juste après le Fil info, 9h10 Marie Maheu.
04:19 La gare de Larissa en Grèce perquisitionnée ce matin dans le cadre de l'enquête sur
04:25 la collision de deux trains qui a fait 57 morts.
04:27 Les cheminots sont en grève depuis hier pour dénoncer leurs conditions de travail et des
04:32 problèmes de sécurité.
04:33 Des chiffres records pour l'apprentissage en France.
04:36 L'année dernière, 837 000 contrats signés, c'est 14% de plus.
04:41 En un an serait joué sur France Info la ministre chargée de l'enseignement et de la formation
04:45 professionnelle.
04:46 Selon Carole Grandjean, 65% des apprentis sont embauchés à la fin de leur contrat.
04:51 Un grand plan de soutien à l'industrie agroalimentaire, 500 millions d'euros pour faire face à la
04:56 flambée des coûts de production, mais aussi moderniser le secteur.
05:00 La moitié viendra des caisses de l'Etat, l'autre de fonds privés.
05:04 La mort d'un jazzman de légende, l'américain Wayne Shorter à l'âge de 89 ans, saxophoniste
05:10 mais aussi l'un des compositeurs les plus influents de sa génération.
05:13 Il a joué avec Sully Rollins, John Coltrane ou encore Miles Davis.
05:17 Et nos informés ce matin, Ania Nussbaum, correspondante Elisée pour Bloomberg, Pablo
05:33 Piovivien, rédacteur en chef de la revue Regards.
05:37 L'une des questions dans ce débat c'est les réponses éventuelles que le gouvernement
05:42 pourrait apporter.
05:43 On peut se rendre compte que le gouvernement, quoiqu'on dise Pablo, il a fait des choses.
05:48 Il y a eu des chèques, il y a eu des aides.
05:51 Le problème, c'est qu'on est dans un contexte d'inflation, mais aussi dans un contexte de
05:54 hausse des taux et qu'en fait, la marge de manœuvre financière pour l'État, pour le
05:59 gouvernement se réduit beaucoup.
06:01 Rappelons que j'ai en tête le chiffre de 50 milliards qui a été dépensé pour compenser
06:07 la hausse des prix de l'énergie.
06:08 Et donc, avec cette hausse des taux d'intérêt, l'État ne peut plus vraiment se permettre
06:11 de distribuer des chèques, de distribuer des aides.
06:17 C'est aussi pour ça qu'on est passé d'une aide sur le carburant global, d'une
06:21 ristourne globale à des chèques ciblés.
06:24 Alors peut-être est-ce que c'est moins efficace, il y a moins de Français qui en
06:26 bénéficient, mais peut-être est-ce que ça touche plus ceux qui en ont peut-être
06:30 réellement besoin.
06:31 Et en fait, si on élargit la question, c'est de savoir face à une hausse des prix internationale
06:36 qui a des tas de facteurs, qui est multifactorielle, multisectorielle, est-ce que c'est à l'État,
06:41 est-ce que c'est au gouvernement de réellement compenser toutes les hausses des prix ? Je
06:44 vois que Pablo fait la tête, mais peut-être Agna a aussi une réponse là-dessus.
06:48 C'est-à-dire que ce sont aussi des modèles de société.
06:50 Est-ce que c'est à l'État de systématiquement compenser toutes les hausses ?
06:53 C'est une vraie question.
06:55 Et l'FI a en fait proposé à un moment de caper les prix du carburant.
06:59 C'est un peu cette idée-là qui est proposée peut-être.
07:01 Et même d'autres produits de grande consommation.
07:03 Absolument.
07:04 Qui est peut-être proposée aussi par...
07:05 Mais qui paye derrière ?
07:06 Qui paye derrière, c'est bien la question.
07:07 On atteint quand même 110%, 113% je crois du PIB en termes de dettes.
07:13 Et évidemment, pour l'instant, le problème du financement n'est pas vraiment un problème.
07:18 La France s'endette toujours à prix qui est tout à fait raisonnable sur les marchés.
07:21 Mais il n'est pas exclu qu'à un moment ou un autre, les investisseurs se réveillent,
07:25 paniquent et que les taux d'intérêt augmentent.
07:27 Le gouvernement ne peut pas ignorer cette possibilité.
07:29 Et puis pour rebondir sur ce que vous disiez, Pablo, effectivement, cette question de l'inflation,
07:33 en fait, elle a été...
07:34 Ça fait des mois qu'on en parle.
07:36 Je vous rappelle qu'en mai 2022, la Banque centrale américaine déjà parle d'augmenter
07:40 les taux, augmente les taux.
07:41 La BCE travaille en juillet 2022.
07:43 Il y a eu un déversement de liquidités par les banques centrales.
07:46 Le gouvernement aurait pu anticiper cette inflation.
07:48 Et ce qui d'ailleurs interroge sur le timing de la réforme des retraites.
07:50 Parce que les deux, en même temps, évidemment, ça suscite le mécontentement des Français.
07:56 Donc tout à fait la vraie question, effectivement, c'est qu'est-ce que peut faire le gouvernement ?
08:00 Et c'est assez limité.
08:01 On peut faire des boucliers tarifaires, Ad vitam aeternam, mais il y a un moment, la
08:04 question des finances publiques s'impose à nous.
08:05 Et le périmètre de la réponse, ce qu'a dit le gouvernement, même si on attend encore
08:09 les contours précis du dispositif à venir d'ici la mi-mars, nous dit-on, c'est qu'à
08:13 priori, il va concerner tous les Français.
08:14 Ce ne sera pas une aide ciblée.
08:15 Exactement.
08:16 Non mais en fait, moi, je comprends la volonté d'aider.
08:21 Parce que contrairement à ce que vous disiez, Jean-Rémi, l'État est obligé de faire quelque
08:24 chose.
08:25 Il ne va pas laisser sa population crever.
08:26 Donc il est obligé de, au bout d'un moment, débloquer des fonds.
08:29 Alors, la question, c'est est-ce que c'est à la hauteur ou pas ?
08:32 Le problème, c'est que c'est forcément circonscrit dans le temps.
08:36 Or, le problème, et je reviens en fait au problème macroéconomique de notre économie
08:40 qui marche sur la tête, la question de ce système qui ne marche pas n'est jamais résolue.
08:46 Donc, ce qu'avancent certains acteurs, c'est de dire, bon, en fait, il faut prendre tous
08:51 les acteurs de la filière, des producteurs jusqu'aux distributeurs, en passant par les
08:56 transformateurs évidemment, par tous ceux qui sont au milieu, et réfléchir ensemble
09:00 autour d'une table, comment est-ce qu'on assainit en fait le problème ?
09:04 Parce qu'effectivement, le problème, c'est qu'il y a énormément d'entrants.
09:08 J'écoutais hier un céréalier qui expliquait que lui, il était dépendant du cours de
09:14 l'azote et que le cours de l'azote ne faisait qu'augmenter.
09:16 Donc nécessairement, c'est un entrant, lui, dans la façon dont il organise ses cultures
09:22 et qu'après, ça se répercutait sur le prix, le cours de l'azote.
09:25 Et ça, j'avoue que, est-ce que l'État français peut aller faire bouger le cours
09:31 de l'azote ? C'est un peu compliqué.
09:33 Mais en revanche, ce qu'il peut faire, c'est essayer d'organiser des filières, notamment
09:37 des filières courtes, des filières françaises.
09:40 Je pense à la volaille, à tous les produits alimentaires de première nécessité, pas
09:45 forcément les produits transformés qui viennent de très loin.
09:47 Mais il y a plein de produits, notamment qui passent par Rungis, etc., sur lesquels on
09:53 pourrait avoir un impact et organiser une filière qui, économiquement, serait viable.
09:58 Mais encore une fois, les aides, vraiment, ça a ses limites.
10:01 L'échec, ça a ses limites.
10:02 Et je suis pour que l'État fasse un maximum pour sauver les gens, en gros, de la faim
10:08 et du froid lorsqu'on parle de l'énergie.
10:10 Mais ce ne sont pas des solutions à moyen ou à long terme.
10:14 Donc stratégie de long terme, ce que vous nous dites.
10:16 D'un point de vue peut-être plus politique, Ania Nussbaum, vous avez cité la réforme
10:20 des retraites en cours, évidemment.
10:22 Ça arrive au Sénat et vous l'avez rapproché de ce contexte d'inflation, des mesures à
10:26 prendre très concrètement pour les Français.
10:28 C'est vraiment un sujet de réflexion, de discussion, ça, du gouvernement, de l'exécutif
10:31 aujourd'hui ?
10:32 Un sujet d'inquiétude, Aminima.
10:33 En fait, il peut y avoir deux effets.
10:35 L'inflation, concrètement, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que votre revenu réel
10:39 baisse si les salaires ne se mettent pas à niveau.
10:41 Donc, évidemment, pour les gens, les Français qui souhaiteraient faire grève, ça peut poser
10:45 problème et ça peut être désincitatif.
10:47 On peut se dire, voilà, je ne vais pas aller faire grève parce que j'ai besoin de penser
10:49 à mon futur, à mes revenus, etc.
10:51 Mais ça peut aussi alimenter le mécontentement, la grogne sociale.
10:55 Et on peut aussi se dire à quoi bon travailler si longtemps pour si peu d'euros, si peu
10:59 d'argent.
11:00 Voilà.
11:01 Donc, c'est une inquiétude du gouvernement que les deux sources de mécontentement se
11:03 rejoignent.
11:04 Et on attend de voir la semaine prochaine, à partir du 7 mars, journée de mobilisation.
11:06 C'est là que ça va se jouer.
11:07 C'est là qu'on va pouvoir savoir quel chemin prend le mouvement social ?
11:11 Oui, mais à la fois, c'est assez compliqué parce que le gouvernement regarde de très
11:16 près la mobilisation, l'ampleur de la mobilisation.
11:18 Mais de fait, est-ce un vrai marqueur du mécontentement social aujourd'hui ?
11:23 Ce n'est pas sûr parce qu'il y a beaucoup de gens qui sont mécontents, qui ne vont
11:26 pas manifester.
11:27 Parce qu'il y a aussi des problèmes.
11:28 C'est très compliqué de compter le nombre de manifestants.
11:30 Mais le sujet prix, pouvoir d'achat, ça peut être une réponse dans cette contestation
11:34 sur la réforme des retraites pour satisfaire une partie de l'opinion ou pas ?
11:36 Absolument.
11:37 Pour éviter en tout cas un mécontentement généralisé.
11:40 L'autre sujet du jour, Jean-Rémi Baudot, la visite d'Emmanuel Macron dans plusieurs
11:45 pays d'Afrique en ce moment.
11:47 Il poursuit d'ailleurs encore aujourd'hui et jusqu'à dimanche cette tournée dans
11:52 l'Afrique centrale.
11:53 Il poursuit même, il accélère trois capitales, pardon, trois capitales africaines dans la
11:57 journée après le Gabon.
11:58 Il va aller en Angola, au Congo-Brasaville et en République démocratique du Congo.
12:02 Une tournée pour rappeler un message.
12:05 La France-Afrique, c'est fini.
12:06 Écoutez Emmanuel Macron.
12:08 Notre histoire commune ici au Gabon, nous ne le cachons pas, c'est aussi celle de
12:12 la France-Afrique.
12:13 Et cet âge de la France-Afrique est bien révolu.
12:17 Mais j'ai parfois le sentiment que les mentalités n'évoluent pas au même rythme que nous.
12:21 Quand je lis, j'entends, je vois qu'on prête encore à la France des intentions
12:25 qu'elle n'a pas, qu'elle n'a plus.
12:27 On semble encore aussi attendre d'elle des positionnements qu'elle se refuse à
12:31 prendre.
12:32 Voilà, au moment où la France est de plus en plus contestée dans certains pays africains,
12:35 on pense évidemment au Mali et au Burkina Faso.
12:37 Emmanuel Macron prône l'humilité.
12:39 On rappelle qu'il a notamment annoncé une réduction de la présence militaire en Afrique
12:42 et de nouvelles restitutions d'œuvres d'art.
12:45 Claude Pio Vivien, il y avait lieu encore de rappeler une fois de plus que c'était
12:49 fini la France-Afrique ?
12:50 Comme vous dites, c'est vraiment une fois de plus.
12:52 Parce que depuis Nicolas Sarkozy, depuis François Hollande, Emmanuel Macron l'avait
12:57 déjà dit quand il est allé à Ouagadougou en 2017, la France-Afrique c'est fini.
13:01 Donc tout le monde dit la France-Afrique c'est fini.
13:03 Après qu'est-ce qu'ils font ? Ils font des espèces de grandes réunions où ils
13:07 n'appellent pas ça France-Afrique mais ils appellent ça Afrique-France.
13:10 Bon ben c'est super.
13:11 Ça veut peut-être dire que dans leur esprit, il y a le besoin de rappeler que la France-Afrique,
13:17 dans l'esprit des Français, c'est terminé ?
13:18 Oui, ça veut dire surtout que ça existe et qu'il faut y mettre fin.
13:23 Parce que pour l'instant, c'est assez drôle.
13:25 Quand vous dites que c'est fini, vous comprenez que ça dure encore ?
13:27 Exactement.
13:28 Parce qu'ils ont besoin de le rappeler systématiquement, président de la République après président
13:32 de la République.
13:33 Et c'est assez intéressant quand vous regardez la liste des gens qu'il a rencontrés depuis
13:37 sa tournée africaine.
13:38 Il a rencontré Mahamatis Idris Deby, il a rencontré Ali Bongo au Gabon, il a rencontré
13:43 Denis Sasou Ngosso du Congo qui est au pouvoir depuis 34 ans et il a rencontré Abiy Ahmed
13:49 qui est le Premier ministre éthiopien.
13:51 C'est-à-dire vraiment les tenants de tout ce qu'il peut se faire de pire en matière
13:57 de France-Afrique sur le continent africain.
14:01 Et à ça, j'ajoute que comme par hasard, il s'agit des quatre qui sont considérés
14:05 par la diplomatie française, par le Quai d'Orsay, comme stables et francophiles.
14:09 En opposition avec d'autres, comme par exemple tout à l'heure vous avez cité Bamako.
14:16 Évidemment, le Mali en ce moment, ils ne sont pas considérés comme francophiles.
14:21 On a très peur que d'autres pays africains aillent voir du côté des Chinois, aillent
14:25 voir du côté des Russes.
14:26 Et là, ce que fait Emmanuel Macron, c'est qu'il est en train de se concentrer sur ses
14:32 alliés, les alliés de la France depuis toujours et depuis maintenant plusieurs dizaines d'années.
14:38 À qui parler, comment faire et pourquoi faire ? Autant de questions qu'on va vous poser.
14:42 Nathanaël Charbonnier, rédaction internationale de Radio France, plusieurs fois en déplacement
14:46 en Afrique, en reportage ces dernières semaines, vous allez nous répondre.
14:49 Ce sera juste après le Fil info, 9h20, Marie Mahut.
14:52 Vous les verrez à la sortie des supermarchés ce week-end.
14:56 Les bénévoles du Resto du Coeur comptent sur vos dons pour leur collecte annuelle.
15:00 160 000 personnes de plus ont fait appel à l'association en un an.
15:04 Dans ce contexte, le patron du groupe Leclerc annonce sur France Info que le carburant sera
15:08 vendu à prix coûtant dans ses stations ce week-end.
15:11 Une façon d'aider les Français pour Michel-Edouard Leclerc alors que les prix de l'alimentaire
15:16 doivent augmenter de 10% dans les prochains mois.
15:19 Un dispositif unique pour aider les victimes de violences conjugales généralisées d'ici
15:24 deux ans annonce de la ministre de l'égalité femme-homme Isabelle Rohm ce pack Nouveau
15:29 Départ.
15:30 Son nom permettra d'avoir un seul interlocuteur pour bénéficier d'un hébergement d'urgence,
15:34 de soins ou encore d'un retour à l'emploi.
15:36 Une nouvelle aide de Washington à l'Ukraine, surtout des munitions pour les systèmes déjà
15:41 déployés par Kiev.
15:42 La Maison Blanche doit l'annoncer aujourd'hui alors que le chancelier allemand Olaf Scholz
15:47 se rend sur place.
15:48 Les informés du matin à nos côtés Pablo Pio, Vivien, rédacteur en chef de la revue
16:05 Regards, Ania Nussbaum, correspondante Elysée à Bloomberg et Nathanaël Charbonnier, grand
16:09 reporter à la rédaction internationale de Radio France.
16:11 Et on a entendu Pablo il y a un instant dire que la France-Afrique selon lui ça n'était
16:15 pas terminé.
16:16 C'est juste un élément.
16:17 En 20 ans, la part de marché des entreprises françaises a été divisée par deux.
16:20 C'est la Chine qui a pris plutôt une bonne partie du business.
16:24 Nathanaël Charbonnier, quel est votre regard là-dessus ? Est-ce que vous avez l'impression
16:27 que les lignes sont malgré tout en train de bouger ?
16:29 Non, les lignes bougent, notamment déjà au Sahel.
16:31 On l'a vu puisque la France est partie avec Barkhane.
16:34 La France est partie avec les forces spéciales qui étaient au Burkina Faso.
16:37 Et on s'inquiète un petit peu de ce qui peut se passer, notamment au Niger, même
16:41 si pour l'instant la situation est assez calme.
16:43 Ce qu'il faut avoir en tête sont deux choses.
16:47 La première c'est qu'Emmanuel Macron ne veut plus apparaître comme… la France
16:52 ne veut plus apparaître comme le gendarme du secteur.
16:55 Parce qu'en étant le gendarme du secteur, il y a beaucoup de coups à prendre et pas
16:58 forcément grand-chose à gagner, notamment auprès des populations.
17:01 Ça c'est la première chose.
17:02 Et puis la deuxième chose, c'est qu'Emmanuel Macron a compris qu'il y avait un changement
17:09 générationnel dans ces pays et que les interlocuteurs du passé ne seront pas les interlocuteurs
17:13 de demain.
17:14 Et ça, ça change beaucoup de choses.
17:16 D'ailleurs quand on va sur place, je pense notamment au Burkina Faso, j'étais encore
17:19 il y a trois semaines, on vous dit quoi ? On vous dit que… bon on ne veut plus de la
17:27 France, que la France a toujours aidé les chefs d'État à rester au pouvoir dans
17:31 leur pays et que maintenant il faut parler avec cette nouvelle génération.
17:34 Et on la voit arriver cette nouvelle génération.
17:36 Premièrement parce que ceux qui ont pris le pouvoir au Burkina Faso sont des militaires
17:40 assez jeunes.
17:41 Et puis que cette jeunesse ne se reconnaît pas du tout dans la France d'aujourd'hui.
17:47 Elle n'a plus rien à faire de la France d'aujourd'hui.
17:49 Elle est même très critique avec ses aînés.
17:51 Elle dit "nos parents et nos grands-parents qui avaient beaucoup de respect pour la France,
17:57 nous c'est plus ça, on ne veut plus de ça aujourd'hui".
17:59 Donc il y a vraiment une césure au niveau des générations qui est importante.
18:02 On a aussi entendu dans des reportages sur France Info cette semaine notamment au Gabon
18:06 des jeunes dire que finalement la France Afrique, ce n'était pas dans leurs souvenirs.
18:10 Ils avaient grandi sans en quelque sorte.
18:12 Et que donc c'était pour le passé qu'ils se tournaient vers l'avenir sur les moyens
18:14 de coopérer avec la France.
18:16 Ça existe aussi ça ?
18:17 Ça existe.
18:18 Bien évidemment.
18:19 Il y a plusieurs choses à avoir en tête.
18:20 D'abord les smartphones.
18:21 La communication passe beaucoup par les réseaux sociaux en Afrique, par Facebook, par Twitter,
18:27 etc.
18:28 Ça c'est la première chose.
18:29 Et puis j'ai oublié mon idée mais elle va revenir.
18:32 Écoutez, on vous reçoit pas quand elle sera venue.
18:37 Oui et autre chose, ça fait dix ans, je pense notamment au Sahel, ça fait dix ans qu'il
18:41 n'y a pas d'école dans plein d'endroits.
18:42 Et ça c'est capital.
18:43 Parce qu'à cause de l'insécurité, il y a beaucoup d'écoles qui ont fermé ou qui
18:48 ne donnent pas cours aux enfants.
18:50 Et ces enfants sont élevés depuis des années et des années sans école.
18:54 Et ça veut dire qu'il n'y a plus ce lien de la francophonie aussi qui existe avec nous.
18:59 Et que le français est en train de partir tout doucement.
19:02 La langue française est en train de partir de ces pays.
19:05 Et ça va avoir une influence énorme dans les années à venir.
19:09 Parce que les seuls réseaux d'information, ce seront des informations qui passeront par
19:12 le net et par les réseaux sociaux et qui ne seront pas forcément en langue française.
19:15 On a même vu ces dernières semaines la création d'un observatoire de la langue russe.
19:18 Là aussi, terrain de concurrence entre la Russie et l'influence française en Afrique,
19:24 Jérémie.
19:25 La question qui se pose derrière tout ça, c'est est-ce que la France peut être un
19:30 partenaire comme un autre en Afrique ?
19:32 On voit bien qu'il y a effectivement un passé, un passif parfois.
19:35 Mais est-ce qu'elle peut être un interlocuteur comme un autre ?
19:38 C'est évidemment la thèse de l'Élysée à Dianusbom.
19:40 Oui, et à la fois, on sent toute la frustration d'Emmanuel Macron.
19:44 Il répète souvent que lui, né en 77, il a 45 ans, il est le premier président post-empire
19:49 colonial français.
19:50 Et il a vraiment du mal, malgré tout, à s'extirper de ses relations.
19:55 Alors moi, je pense que la France-Afrique, c'est effectivement fini parce que les lignes
19:58 bougent, parce que les relations ont complètement changé, parce que pour plein de raisons,
20:02 c'est plus la France-Afrique qu'on connaissait avant.
20:04 Mais malgré tout, comme il le dit lui-même, en fait, il est toujours ramené à cette
20:07 réalité-là, à l'héritage colonial douloureux de la France.
20:10 La question, c'est qui le ramène là-dessus ?
20:11 Oui, tout à fait.
20:12 Et qui le ramène là-dessus ? C'est à la fois les populations locales, l'instrumentalisation
20:17 de cet héritage de la France-Afrique par des leaders politiques sur place et aussi
20:21 par les puissances qui arrivent en Afrique, que ce soit la Russie, que ce soit, à nouveau,
20:27 avec les liens commerciaux et économiques, la Turquie ou la Chine, et des intérêts
20:31 économiques qui ont peut-être intérêt à mettre de côté les entreprises françaises
20:36 et ce lien franco-africain.
20:38 Justement, intérêts économiques, Pablo Piovivian, est-ce que la France a raison, doit défendre
20:43 ses intérêts en Afrique ?
20:44 Il faut qu'elle le fasse avec énormément de pincettes.
20:49 Elle ne peut pas y aller comme…
20:51 Y compris quand il y a la concurrence chinoise, la concurrence russe, qui ne s'embarrasse
20:54 peut-être pas vraiment de pincettes.
20:55 En fait, la France doit être là pour aider au développement des pays africains.
20:59 Elle ne doit pas être là pour défendre strictement les intérêts de ces entreprises
21:02 en Afrique, d'ailleurs qui se débrouillent très bien toutes seules.
21:04 On sait les ravages qu'elles ont pu faire et qu'elles peuvent encore faire dans certains
21:09 pays africains, les entreprises françaises.
21:12 J'aimerais revenir à ce que vous avez dit, une nouvelle génération.
21:15 C'est intéressant de voir aussi les nouvelles générations.
21:18 Il y a une nouvelle génération dans les populations des pays.
21:21 Celle-là, effectivement, elle porte les aspirations dont vous avez parlé.
21:24 Mais vous avez aussi les nouvelles générations de leaders.
21:27 Et là, c'est intéressant.
21:28 Parce que vous voyez qu'Idriss Déby est le fils d'Idriss Déby.
21:31 Vous voyez qu'Ali Bongo est le fils d'Omar Bongo.
21:35 C'est-à-dire que vous avez des espèces de dynasties qui se créent avec des pérennisations
21:39 de la façon d'exercer le pouvoir.
21:41 Lorsqu'Emmanuel Macron, tout à l'heure vous avez dit "c'est fini la France-Afrique",
21:44 mais moi je me souviens de l'image qui était quand même assez choquante de voir juste
21:49 après le coup d'État au Tchad par Idriss Déby, parce que Idriss Déby était considéré
21:54 encore une fois par le Quai d'Orsay comme étant plutôt favorable aux intérêts français.
21:58 De voir le président Macron au premier rang dès le lendemain ou le surlendemain de ce
22:04 coup d'État à côté d'Idriss Déby, au même niveau qu'Idriss Déby.
22:08 Cette image est choquante et rappelle aux Français, mais aussi je pense aux Tchadiens,
22:14 les pires moments de la France-Afrique.
22:16 - On pose la question de la relève.
22:18 Aussi on aura largement l'occasion d'en reparler notamment avec vous Nathanel Charbonnier,
22:21 grand reporter à la rédaction internationale de Radio France, Ania Nussbaum, correspondante
22:25 Elysée, Paul Blumberg et Pablo Piovivien, rédacteur en chef de la revue, papier et
22:30 du site internet Regarde.
22:31 Merci à vous Jean-Yves Bordeaux.
22:33 Les informés reviennent ce soir autour de Jean-François Acky.
22:35 [Musique]