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Benjamin Morel et Olivier Besancenot étaient les invités de France Inter mardi 22 avril pour débattre du thème : Faut-il en finir avec les présidents ?

Retrouvez « Le débat du 7/10 » sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-du-7-10

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Transcription
00:00Et débat ce matin sur la figure centrale des institutions de la Vème République.
00:05J'ai nommé le président élu au suffrage universel direct,
00:09clé de voûte de notre vie politique,
00:12surtout quand il dispose d'une majorité au Parlement,
00:15ce qui n'est pas le cas en ce moment.
00:17Une figure de stabilité pour certains, mais pas pour tous.
00:20L'un de nos invités ce matin veut, dans un petit livre,
00:23en finir avec les présidents.
00:25Alors on va débattre du sujet avec son auteur, Olivier Besancenot.
00:29Bonjour, vous êtes ancien candidat à la présidentielle,
00:33fondateur et ancien porte-parole du nouveau parti anticapitaliste, le NPA.
00:38On finira avec les présidents et paru aux éditions du Seuil.
00:42Avec nous également Benjamin Morel, bonjour.
00:45Bonjour.
00:46Constitutionnaliste et maître de conférences en droit public
00:50à l'université Paris 1 Panthéon-Assas,
00:53le nouveau régime où l'impossible parlementarisme
00:57est le titre de votre dernier livre aux éditions Passé Composé.
01:01Bienvenue au micro d'Inter.
01:03Avant de parler des présidents, quelques mots sur la mort du pape.
01:07Pape des pauvres, entend-on ?
01:09Pape défenseur des migrants ?
01:12Pape critique de la mondialisation ?
01:15Pape écologiste ?
01:16Quels sentiments vous ont traversé Olivier Besancenot en apprenant sa mort hier ?
01:24C'est évidemment un événement extrêmement important
01:26qui fait que sa présence, quelles que soient les limites,
01:30parce que je ne l'égalise pas non plus,
01:31notamment sur les questions de contraception, de genre, de sexualité,
01:34mais qui n'était pas le pire des papes, on va dire.
01:36Et dans le nouveau monde dans lequel on est en train d'évoluer,
01:38ça va être aussi un événement politique de ce point de vue-là, son absence.
01:41Après, il y aurait beaucoup de choses à dire sur sa définition,
01:46mais ce n'est pas moi de le qualifier, mais c'est évidemment un événement.
01:48Pape de gauche, disent certains.
01:50Moi, je ne suis pas qualifié pour le dire.
01:53En plus, il y a une histoire, y compris dans la religion catholique,
01:57il y a eu des courants qui étaient pour le coup,
01:58des courants de la théologie de la libération nationale,
02:01en Amérique latine précisément, ce n'était pas tout à fait son parcours à lui,
02:04mais je pense par exemple à un évêque qui était un évêque brésilien
02:07qui s'appelait Haider Camara et qui avait une jolie formule, lui pour le coup,
02:10qui disait « quand je viens en aide à un pauvre, on dit que je suis un saint,
02:13et quand je demande simplement pourquoi le pauvre est pauvre, on dit que je suis un évêque rouge ».
02:16Ça, c'est une tradition politique qui n'était pas non plus tout à fait la sienne,
02:19mais une fois encore, on verra ce que l'avenir nous réserve.
02:22Benjamin Morel, le pape ne s'était pas rendu à la réouverture de Notre-Dame de Paris,
02:26mais plusieurs fois en France, trois fois.
02:29La dernière, c'était en Corse.
02:31Que reste-t-il de la France fille aînée de l'Église ?
02:35Est-ce qu'il y a encore quelque chose dans nos institutions qui reste à l'état de trace ou pas du tout ?
02:42Alors, dans les institutions, il ne reste pas grand-chose,
02:44parce qu'évidemment, la République est laïque, elle l'est depuis 1905,
02:47mais même avant en réalité, dès 1870,
02:50on a un courant républicain qui se construit en tentant de laïciser le rapport aux politiques,
02:57étant donné que vous avez un tournant relativement réactionnaire de l'Église dans les années 1860,
03:01qui apparaît contradictoire avec les Lumières sur lesquelles se fondent les républicains.
03:06Après, il reste quelques éléments symboliques.
03:07Le président de la République, Chanoine de Latran,
03:10vous avez également un rôle particulier de la France dans le gardiennage des lieux saints à Jérusalem.
03:15Ça reste des choses qui sont des héritages de l'histoire.
03:18Néanmoins, fondamentalement, là-dessus, une grande partie du lien est coupée.
03:22Alors, je ne sais pas s'il y a un élément de sacralité dans la personne du président de la République,
03:26mais vous pointez, Olivier Besancenot, la dimension monarchiste, bonapartiste.
03:32Vous voulez en finir avec lui.
03:34Pourquoi vous dites qu'il incarne, et j'imagine produit, la crise permanente, c'est-à-dire ?
03:42Que le présidentialisme, puisque c'est de la fonction dont j'essaie de parler,
03:45évidemment, fait partie du problème et pas de la solution.
03:48Voilà, c'est ça que j'essaie d'expliquer,
03:49si tant est qu'on essaye de renouer au-delà des sensibilités politiques
03:52avec une démocratie qui soit ascendante plutôt que le contraire,
03:55c'est-à-dire qui aille du haut vers le bas.
03:58La fonction sacralisée, dans le livre, j'en parle,
04:01j'ai eu l'occasion de redécouvrir un pamphlétaire qui était socialiste dans le XIXe siècle,
04:04qui s'appelait Félix Pia,
04:06qui a été constamment, durant le XIXe siècle, contre la fonction présidentielle,
04:10et qui disait que le sacre du suffrage universel sera autrement plus redoutable que l'huile de Reims,
04:15parce que précisément conféré par le suffrage universel.
04:17Et en fait, on souffre de ça, on souffre de ça à telle enseigne qu'aujourd'hui,
04:21en effet, le pouvoir politique est rassemblé entre les mains d'un seul.
04:24Et si on essaie de...
04:25Moi, je ne suis pas constitutionnaliste,
04:27c'est un essai, une réflexion politique,
04:29sans avoir la prétention d'avoir des réponses sur tout,
04:31mais se poser le problème du...
04:33Où est le législatif ? Où est l'exécutif ?
04:35Là aussi, c'est Félix Pia qui nous invite à penser à ça.
04:37Il dit que l'exécutif est au législatif, finalement,
04:40ce que le bras est à la tête.
04:41C'est-à-dire la tête pense, le bras exécute.
04:44Théoriquement, je dis bien théoriquement,
04:45le Parlement devrait être le législatif,
04:47donc le gouvernement devrait être issu
04:49de la représentation parlementaire.
04:51Ce n'est même pas le cas, puisque c'est le président
04:53qui, dans ce domaine-là aussi, décide de tout.
04:55Donc on a un problème qui est doublé d'autre chose, je crois.
04:59C'est que l'histoire de la Ve République,
05:01au-delà de la révolte qu'elle peut susciter
05:02dans une partie de la population par le bas,
05:05vue du haut, elle était censée garantir un minimum de stabilité.
05:08Et je crois que c'est de moins en moins le cas.
05:10Donc autant se poser à gauche,
05:12le problème de ce qu'on mettrait à la place.
05:13Alors, il y a plusieurs choses dans ce que vous dites,
05:15avec d'abord cette distinction entre président et présidentialisme.
05:21Benjamin Morel, il faut faire la séparation entre les deux
05:25ou elle est spécieuse ?
05:26Non, oui, il faut faire la séparation entre les deux.
05:28Je rejoins tout à fait ce qui a été dit concernant le présidentialisme.
05:30On a probablement aujourd'hui le chef d'État,
05:32quand il n'y a pas de perte de cohabitation ou d'instabilité,
05:34qui est le plus puissant du monde occidental.
05:36On dit souvent, la France est un régime semi-présidentiel.
05:39En fait, cette terminologie-là,
05:40elle est très fautive dans son système politique.
05:42Le président français a plus de pouvoir que son homologue américain dans le sien.
05:46Il n'y a pas de contre-pouvoir.
05:47On a en effet un présidentialisme dominant.
05:50En revanche, une figure de chef de l'État,
05:52une figure d'arbitre au-dessus des partis,
05:55qui a la possibilité d'activer certains leviers en cas de blocage politique,
05:59il y en a dans tous les pays occidentaux.
06:01Que ce soit un roi ou un président,
06:03on en a entre guillemets besoin.
06:05Je dirais, là-dessus, je renverserais peut-être le paradigme.
06:07Le problème, c'est qu'on n'a pas de président.
06:10C'est-à-dire que depuis 1958,
06:11on a un président qui joue les premiers ministres.
06:13On a un président qui joue les chefs de gouvernement.
06:15On a un président qui devient en fait une sorte de personnage omnipotent,
06:19là où justement, nous aurions besoin,
06:21comme sous les 3e et 4e républiques,
06:23d'un arbitre.
06:24On n'a pas de président, c'est ce que vous venez de dire.
06:26On n'a pas de président au sens fonctionnel du terme.
06:30C'est-à-dire qu'on a un président janus,
06:31qui est à la fois un arbitre, un garant de l'unité de la nation,
06:35et en même temps, un chef actif du gouvernement,
06:37donc fondamentalement clivant.
06:38Ça ne peut pas fonctionner.
06:39Ça ne peut évidemment qu'être instable.
06:41Et donc, à partir de là, on a une fragilité.
06:43Mais je terminerai là-dessus.
06:44Cette fragilité, et sans être un turiféraire de la 5e république,
06:47qui a plein de problèmes,
06:48elle n'est pas d'abord dans la Constitution.
06:50Le président de la 5e république, en droit,
06:52a en fait assez peu de pouvoirs.
06:53Il a des pouvoirs d'exception, la dissolution, etc.
06:55Mais sur la politique quotidienne,
06:58il a un pouvoir en fait très résiduel.
07:00S'il a du pouvoir, c'est à cause de deux choses.
07:01Un, parce qu'il a une majorité.
07:03Et deux, parce que nous y croyons.
07:05C'est-à-dire que quand on vote pour une présidentielle,
07:07on vote en fait pour un programme législatif.
07:09Et le problème vient de là.
07:11Olivier Besancenot,
07:12que répondez-vous à cela ?
07:16Non, il y a une différence de point de vue.
07:18C'est-à-dire pour moi, l'arbitrage,
07:19typiquement, en termes démocratiques,
07:21ça devrait être la population.
07:22C'est-à-dire, comment imaginer
07:22un système institutionnel
07:25avec un « i » le plus petit possible ?
07:27En tous les cas, moi, c'est comme ça
07:28que j'essaie de le voir,
07:28qui permettrait l'arbitrage collectif
07:30plutôt que l'arbitrage d'un seul.
07:32Alors, c'est en effet pas qu'une discussion constitutionnelle,
07:35même si je vous trouve un petit peu,
07:37comment dire, un petit peu large
07:39avec la fonction présidentielle.
07:41Parce que je rappelle quand même que
07:42si Emmanuel Macron demain se présente à nous
07:43en disant « j'ai les pleins pouvoirs »,
07:45constitutionnellement, il peut l'avoir.
07:46C'est l'article 16.
07:47Et on pourrait démultiplier les exemples
07:49de cet acabit.
07:50Donc, je pense que, moi,
07:51je l'ai découvert en me repenchant sur le sujet
07:53parce que, très sincèrement,
07:53c'est plutôt un angle mort,
07:55ces questions politiques-là,
07:56dans ma tradition politique.
07:57On pense que la politique,
07:58c'est plutôt le prolongement des luttes
07:59et on n'imagine pas autre chose.
08:02C'est aussi l'occasion de réfléchir à ça.
08:04Je focalisais un peu que sur l'histoire
08:05de la Ve République,
08:06puisque c'est vrai que
08:07la Ve République naît dans le cadre
08:09de l'histoire coloniale française,
08:11la guerre d'Algérie,
08:11avec une tentative de coup d'État
08:13le 13 mai 1958.
08:14De Gaulle arrive au pouvoir
08:16dans ce cadre-là
08:16et on lui taille une constitution sur mesure.
08:18C'est-à-dire où il a, en effet,
08:19les pleins pouvoirs.
08:20Mais je crois que c'est plus profond que ça
08:21et, en effet,
08:22c'est l'occasion de redéterrer,
08:23par exemple,
08:24le poids du bonapartisme,
08:25qui est aussi une histoire française.
08:26Mais il n'y a pas que cette histoire-là.
08:29Voilà.
08:29C'est-à-dire qu'il y a une autre histoire
08:30en France,
08:31qui est une histoire aussi
08:31plus de démocratie directe.
08:33Par exemple,
08:33la première expérience républicaine,
08:35après la Révolution française,
08:36personne ne pleure le roi.
08:38Personne n'est en manque
08:39d'une espèce de figure tutélaire
08:41en se disant
08:42« Faudra peut-être une version laïque
08:43de la royauté ».
08:44Personne n'imagine ça.
08:45Et j'ai relu, du coup,
08:46ce que je pensais,
08:47ce que je croyais connaître,
08:48alors qu'en réalité,
08:49en fait,
08:49je l'avais lu de manière très succincte.
08:51La Constitution de 1793,
08:53qui était probablement une usine à gaz
08:54par plein d'aspects,
08:55qui n'a jamais été appliquée
08:56vu le contexte de l'époque,
08:57mais qui essaye d'imaginer
08:58une démocratie d'assemblée.
09:00Et à ce moment-là,
09:01personne ne pense le pouvoir d'un seul.
09:03C'est une histoire
09:03qui va arriver,
09:04le présidentialisme,
09:05à partir de la Seconde République,
09:07dans le cadre du bonapartisme.
09:08Donc, pour moi,
09:08il y a deux histoires.
09:09Et la question,
09:09c'est avec laquelle,
09:10à gauche,
09:11on pourrait chercher à renouer.
09:12Parce que le présidentialisme,
09:14pour moi,
09:14fait beaucoup de dégâts,
09:15y compris à gauche.
09:17Y compris à gauche.
09:18Donc, c'est comment on pourrait
09:19essayer,
09:20au-delà des désaccords,
09:21à gauche,
09:22de suspendre la compétition électorale
09:2330 secondes
09:24pour essayer de réfléchir ensemble
09:25à ce que pourrait être autre chose
09:27qu'une démocratie
09:28qui fonctionnerait sur le présidentialisme.
09:29Parce que ce que vous décrivez autrement,
09:30Olivier Besancenot,
09:32c'est une vie politique
09:33qui se réveille une fois
09:34tous les cinq ans.
09:35C'est ça.
09:35Et point.
09:36Et pour le reste,
09:36on spécule,
09:37jeu de petits chevaux,
09:39etc.
09:39Ce n'était pas la culture politique
09:41commune à gauche.
09:42Enfin, quand même,
09:43la plus belle punchline,
09:44on dirait ça comme ça aujourd'hui,
09:45contre la Ve République,
09:46on la doit à un certain François Mitterrand,
09:47qui parlait d'un coup d'État permanent.
09:49Alors, je vous parle de François Mitterrand
09:50de 1962,
09:51pas de 1980,
09:52ça n'aurait échappé à personne.
09:54Mais il y avait quand même l'idée
09:55qu'il fallait sortir de ce cadre-là.
09:56Et souvent, à gauche,
10:00aborder les questions.
10:01Et du coup,
10:02je crois que la gauche,
10:04malheureusement,
10:05s'est rendue trop prisonnière
10:06du calendrier de la Ve République.
10:08Et comme vous le dites,
10:08en effet,
10:09on sort d'une élection présidentielle
10:10dans les cinq minutes qui suivent.
10:11On est déjà en train
10:12de préparer la suivante.
10:13Sur ce point-là,
10:14Benjamin Morel,
10:14certains disent qu'il faudrait
10:16apprendre en France
10:17à démocratiser la démocratie
10:19afin de la faire vivre
10:23entre les deux échéances électorales
10:25tous les cinq ans.
10:26Quel est votre point de vue ?
10:27Oui, absolument.
10:28C'est-à-dire qu'on a considéré
10:29que tous les cinq ans,
10:30on est allé lire
10:31Un Empereur.
10:32Et je rejoins tout à fait
10:33sur une culture bonapartiste,
10:34même si, attention,
10:35la notion de culture politique
10:36me hérisse un petit peu
10:37parce qu'on a l'impression
10:38qu'on aurait le présidentialisme
10:39dans les gènes.
10:39Je vous renvoie
10:40à des auteurs
10:41de la IVème République
10:41qui disaient aux gaullistes
10:42« Non mais attendez,
10:43vous plaisantez,
10:45un pouvoir présidentiel puissant,
10:47on a essayé une fois
10:48sous la IIème République,
10:49ça a fini en empire.
10:50Donc, ce n'est pas
10:50dans notre culture politique.
10:52Il n'y a pas de culture politique,
10:53il y a des structures.
10:53Et ces structures-là,
10:54ensuite,
10:55elles sont plus ou moins adaptées.
10:56La Constitution de la Vème République,
10:58là, je vous rejoins,
10:59a de vraies potentialités
11:01de dérive.
11:02Vous parliez de l'article 16.
11:03On est le seul régime occidental.
11:05L'article 16, c'est quoi ?
11:06C'est, en fait,
11:07une dictature à la Romaine.
11:08Un régime d'exception
11:09qui permet,
11:10en cas de crise,
11:10quand vous avez la Wehrmacht
11:11sur les Champs-Elysées,
11:13d'arriver à pallier la crise.
11:15Des régimes de dictature
11:16à la Romaine,
11:16il y en a dans tous les régimes.
11:18On est le seul pays
11:19où c'est le dictateur
11:20qui s'autoproclame,
11:21qui dit un matin
11:22« Écoutez, là,
11:23moi, je constate
11:23qu'il y a une crise. »
11:25C'est-à-dire que
11:26c'est une possibilité
11:27dans la Constitution.
11:28Il faut supprimer ça ?
11:29Il faut en tout cas le limiter.
11:30C'est-à-dire qu'on parle
11:31du dictateur à la Romaine.
11:32À Rome, c'est le Sénat
11:33qui proclame
11:34les pouvoirs d'exception.
11:35Dans la plupart des régimes,
11:36vous avez une proclamation
11:37en effet par le Parlement.
11:38Là, c'est l'appréciation
11:39souveraine du chef de l'État.
11:41Et ça, ça pose évidemment
11:42un problème.
11:43Il y a plein de voies
11:43vers le libéralisme
11:44dans le cadre
11:45de la Constitution
11:46de la Vème République
11:47qu'il faudrait pallier.
11:49En revanche,
11:50pour les pouvoirs
11:51dans la Constitution
11:52du Président de la République,
11:54prenez la Troisième République.
11:55Sous la Troisième République,
11:56qui peut déposer
11:57un projet de loi ?
11:58Le Président de la République
11:59sous la Vème,
11:59c'est le Premier ministre.
12:00Qui dispose des forces armées
12:02sous la Troisième République ?
12:03Le Président de la République
12:04sous la Vème,
12:05c'est le Premier ministre.
12:06Le domaine réservé,
12:07ce qui relèverait
12:08du chef de l'État
12:09en termes militaires
12:10et diplomatiques,
12:11ça n'existe pas.
12:12C'est une invention
12:13de Jacques Chaband-Helmas
12:14au congrès de l'UNR
12:15en 1961.
12:16Donc, là-dessus,
12:17le problème aujourd'hui
12:18n'est pas tant dans la Constitution,
12:20c'est dans nos représentations.
12:21Quand je vote
12:22pour un Président de la République
12:23qui me dit
12:23je vais faire une loi
12:24sur les retraites,
12:25une loi sur l'immigration,
12:26une loi sur l'accueillite des fraises,
12:27je ne vote pas
12:28pour les pouvoirs
12:28du chef de l'État.
12:29Je vote pour un programme législatif
12:31pariant sur le fait
12:32qu'il aurait une majorité.
12:33Si demain,
12:34il n'en a plus,
12:35on a un Président impotent.
12:36Si demain,
12:37il n'en a plus,
12:38on devra se déshabituer
12:40de ça.
12:41Le suffrage universel
12:42n'aide pas,
12:43mais des présidents
12:43liés au suffrage universel,
12:44on en a en Autriche,
12:45au Portugal,
12:46enfin en Londres.
12:47Comme vous avez la proportionnelle
12:48et pas de majorité derrière,
12:50les présidents sont,
12:51si ce n'est impotents,
12:52en tout cas,
12:53sont tenus à un rôle d'arbitre.
12:54La proportionnelle,
12:55Olivier Besancenot ?
12:56Oui, la proportionnelle,
12:57il faut de la proportionnelle,
12:58bien sûr.
12:58Ça permet de réduire
12:59la contradiction
13:00que vous décriviez tout à l'heure.
13:01Oui, mais qu'en partie seulement,
13:03parce que je crois
13:03qu'on a un problème
13:03plus substantiel.
13:04C'est là où se canalise
13:05le pouvoir
13:06de ce qui ne peut pas
13:06être décidé localement.
13:08Et là, je crois
13:09qu'on a besoin
13:09de tout remettre à plat.
13:11Ça, ça passe par un processus
13:12dit constituant.
13:13Ça paraît un terme
13:13un peu barbare.
13:14C'est là où je parle de politique.
13:15C'est-à-dire comment
13:16une convention démocratique
13:17serait élue
13:18au suffrage universel
13:19pour tenter
13:20de tout réinventer
13:21et pas simplement
13:22point par point
13:22de manière très resserrée.
13:25Parce qu'on a un problème
13:26permanent.
13:28La Ve République
13:30fait partie
13:30des éléments
13:31qui aggravent
13:32la crise politique.
13:33Même on prend
13:33l'affaire Le Pen
13:34d'un certain point de vue,
13:35c'est encore ça.
13:36Puisque l'argument,
13:37qui est d'ailleurs
13:37assez délirant
13:38du Rassemblement National,
13:39c'est de dire
13:39pourquoi il ne faut pas
13:42lui faire de mal ?
13:43C'est parce qu'en gros
13:43elle est en tête
13:44dans les sondages.
13:45C'est-à-dire que vous avez
13:45dans la Ve République
13:46l'immunité présidentielle,
13:48l'article 67 et 68
13:49qui fait que le président
13:50d'un point de vue pénal,
13:52administratif ou civil,
13:53s'il fait quelque chose,
13:54il ne lui arrivera rien
13:54le temps de la présidence.
13:56On verra éventuellement
13:56avec Nicolas Sarkozy.
13:58Mais là, on est en train
13:58quasiment d'inventer
13:59l'immunité avant
14:00même d'être élus.
14:01Quand sondagère.
14:02Sondagère, exactement.
14:03Mais parce que là aussi
14:05on est dans cette logique
14:06et le problème,
14:06c'est comment
14:07essayer de s'en extirper.
14:08Sixième République,
14:10vous dites dans un entretien
14:11au Nouvel Obs,
14:12Benjamin Morel
14:13qu'il suffit de changer
14:15deux articles
14:15dans une constitution
14:16pour en changer l'esprit
14:18et que si on veut appeler ça
14:20Sixième République,
14:21c'est du marketing.
14:22Pour moi,
14:22la Sixième République,
14:23c'est ni un totem
14:24ni un tabou.
14:25C'est quoi la Cinquième République ?
14:26La Cinquième,
14:26c'est une Quatrième qu'on a amendée.
14:28La Quatrième, c'est quoi ?
14:29C'est une Troisième
14:30qu'on a codifiée.
14:31Ce qui est certain,
14:32et pour avoir un point
14:33de désaccord,
14:33c'est que la Taboula Rasa
14:34d'un point de vue constitutionnel,
14:36ça ne marche pas.
14:37Parce qu'en règle générale,
14:38le droit constitutionnel,
14:39c'est une horlogerie assez fine
14:40et quand vous voulez écrire
14:41la constitution du paradis
14:42avec les meilleures intentions du monde,
14:44souvent vous ne connaissez pas
14:45les jeux d'interaction
14:45qui arriveront par la suite
14:46et dix ans plus tard,
14:47ça ne ressemble absolument pas
14:49à ce que vous avez voulu codifier.
14:51Donc, en la matière,
14:52on peut être extrêmement ambitieux
14:53en modifiant quelques éléments.
14:55On peut supprimer
14:55l'élection du suffrage universel
14:57du chef de l'État.
14:57On peut très largement
14:58élargir le champ du référendum.
15:00On peut revenir sur les questions
15:01d'immunité, etc.
15:02Mais tout ça,
15:04c'est des amendements à la marge.
15:05Ensuite, si jamais on veut
15:06appeler ça cinquième
15:07parce qu'on tient à la cinquième
15:08comme à son doudou
15:09parce qu'il y a le général de Gaulle,
15:10on peut.
15:11Si jamais on veut dire
15:12écoutez, c'est un nouveau vent,
15:13c'est une sixième république,
15:14on peut également.
15:15Mais la tabula rasa,
15:17vous savez, les juristes
15:17sont très conservateurs
15:18sur le texte,
15:19ce qui ne les empêche pas
15:20d'être très très ambitieux
15:21ensuite sur ce que l'on peut en faire
15:23et sur les changements.
15:24Mais malgré tout,
15:25il faut savoir les outils
15:26qu'on utilise
15:27pour savoir exactement où on va.
15:28Monsieur le constitutionnaliste
15:30Benjamin Morel, merci.
15:32Olivier Besancenot,
15:33merci également.
15:35Fondateur du Nouveau Parti Anticapitaliste.
15:38En finir avec les présidents,
15:40paru aux éditions du Seuil.

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