Céline Géraud, accompagnée de la rédaction d’Europe 1, propose chaque midi un point complet sur l’actualité suivi de débats entre invités et auditeurs.
Retrouvez "Europe 1 13h" sur : http://www.europe1.fr/emissions/europe-1-midi3
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00:00L'autre sujet que je voulais aborder avec vous aujourd'hui, ça fait bientôt dix jours que l'écrivain franco-algérien Boalem Sansal est en prison.
00:07Aucune communication officielle, à ce stade il risque la prison à vie du côté des autorités algériennes.
00:14On le rappelle, il lutte contre le fondamentalisme religieux et l'auto-ritarisme.
00:20Une émission a fait polémique hier sur France 5, c'est Politique, c'est le nom de cette émission.
00:25C'est ce qu'a dit, sur cette affaire, le docteur en sciences politiques Nejib Sidi Moussa.
00:30Il se trouve que Boalem Sansal, depuis quelques années, alimente un discours hostile à l'égard des immigrés, des musulmans et reprend tous les thèmes d'Éric Zemmour.
00:41Je ne dis pas que ça justifie un emprisonnement. Encore une fois, je répète, mes principes sont clairs là-dessus.
00:47Quand je vois que des militants des droits de l'homme, des militants antiracistes, des intellectuels du milieu culturel parisien,
00:52le présentent comme un homme des lumières, un homme qui défend les grandes causes, je suis désolé, mais il se trompe complètement.
00:59Ou alors ils sont aveugles, ou alors ils sont complices.
01:01Donc pour comprendre aussi le malaise qui est le mien, mais aussi celui de beaucoup de gens qui connaissent l'Algérie, qui connaissent la France,
01:06je pense qu'il faut rétablir les faits.
01:08Et encore une fois, ça ne justifie en aucune manière la répression de la part d'un État.
01:12Et je pense qu'il faut aussi respecter la vérité.
01:15Et écouter la réponse et la réaction de Philippe Valle ce matin sur Europe 1.
01:20Imaginons, par exemple, qu'Annie Ernaux se soit rendue à Rome, qu'elle ait été arrêtée à l'aéroport de Fiumicino par la police de Giordia Meloni,
01:30et qu'on n'en ait pas de nouvelles depuis trois jours.
01:33Toute la gauche derrière la France Insoumise hurlerait, à juste titre, son indignation,
01:38cafarnaum à l'Assemblée Nationale, interpellation du chef de l'État, numéro de libération spécial antifascisme,
01:46Une du Monde, pétition lancée par Télérama,
01:49et Edoui Plenel menacerait de se raser les moustaches et s'enchaînerait tout nu, place de la République.
01:55Voilà, Philippe Valle ce matin sur Europe 1, aux prises de position de la gauche sur cette affaire.
02:01Yves-Henri Haufolle, que vous inspire ce qu'on vient d'entendre ?
02:04Je ne suis pas du tout étonné, je me souviens par exemple du mot d'ordre de Jean-Paul Sartre disant
02:09« Tout anticommuniste est un chien ».
02:11C'est-à-dire qu'aujourd'hui vous avez une perméabilité, je l'ai évoqué tout à l'heure,
02:15une perméabilité de toute une partie de la gauche sur les idéologies totalitaires,
02:20que ce soit les idéologies maoïstes de l'époque communiste ou maintenant l'idéologie islamiste.
02:24Dans ce que l'on a vu hier soir, naturellement c'est tout à fait scandaleux,
02:27mais c'est dans la logique précisément de cet aveublement.
02:30Vous parlez effectivement de ce sociologue, je ne sais quoi, qui représente malgré tout,
02:35c'est pour ça qu'il faut l'entendre, qui représente malgré tout toute une partie d'une gauche
02:39qui trouve des justifications justement à cette révolte de ce qu'ils appellent eux des opprimés.
02:45Dans cette nouvelle dialectique, le musulman a remplacé le damné de la terre
02:49et donc il est amené lui aussi à appliquer sa dictature,
02:53après la dictature du prolétariat, la dictature de la charia.
02:55Donc vous avez tout un monde qui est maintenant façonné là-dessus,
02:58ce qui explique d'ailleurs qu'il y a très peu de réaction de l'extrême-gauche,
03:02voire même de la gauche, sauf la gauche républicaine,
03:05pour s'indigner du sort réservé à Boïlam Sansalle.
03:09Mais au-delà de cela, je trouve que le silence est quand même accablant,
03:12même de la part du gouvernement et même de la part des intellectuels.
03:15Vous avez quelques intellectuels qui font des petites pétitions
03:19pour faire comprendre qu'ils existent encore.
03:22Emmanuel Macron et Retailleau ont quand même réagi la semaine dernière.
03:25Dieu merci, Dieu merci.
03:27D'ailleurs, on peut comprendre qu'il y ait une certaine réserve pour l'instant,
03:30parce que j'imagine qu'il y a des relations diplomatiques
03:32et qu'il ne faut pas exacerber la susceptibilité extrême des autorités algériennes
03:37qui ont pris quand même un écrivain français en otage.
03:39C'est ceci, ça devrait révulser tout le monde.
03:43Or, cela révulse naturellement une partie de la droite.
03:46La gauche, je ne la vois pas se relaisser grand-chevaux
03:49et je ne vois pas que pour l'instant, mais encore une fois,
03:52le président de la République non plus a envie de casser les ponts avec l'Algérie
03:57parce que ce que l'on commence à bien faire,
03:58c'est que ce chantage d'algériens commence à devenir exaspérant.
04:01Olivier d'Artigolle, est-ce qu'on assiste à une forme de totalitarisme ?
04:04Moalem Sansal est un auteur, un écrivain, un intellectuel magnifique
04:09qui a produit des écrits d'une puissance inouïe sur la décennie noire en Algérie.
04:15Il a fait preuve d'un très grand courage retournant en Algérie
04:18alors que beaucoup de ses proches l'ont dissuadé.
04:22Il venait tout juste d'ailleurs de réfléchir à l'acquisition d'une maison en France pour se fixer.
04:26Et il venait aussi d'obtenir sa nationalité française.
04:29Ce qui est important de dire aujourd'hui,
04:30c'est que nous éprouvons une très grande inquiétude pour son avenir
04:35avec un régime algérien qui joue à bloc le sentiment anti-français.
04:39Ça ne date pas d'aujourd'hui.
04:41Mais concernant l'exécutif, puisque ça a été cité,
04:46moi je pense que dans un tel moment,
04:48très certainement que les voies diplomatiques,
04:50que le travail peut-être certainement fait par l'exécutif au plus haut niveau,
04:55peut-être par le ministère de la Culture, des Affaires étrangères,
04:59sont en train de trouver une solution, j'espère, avec les autorités algériennes.
05:04Donc je serai moins critique concernant le silence de l'exécutif
05:09parce que dans tel moment, ce n'est pas la communication qui compte,
05:12mais bien évidemment le travail de fond et souterrain qui est fait.
05:16En tout cas, ce n'est pas un charge médiatique interpelle.
05:19L'historien Benjamin Stora a déclaré que certaines positions de Boalem-Sonsal
05:23ont pu blesser le sentiment national algérien.
05:25Oui, c'est la même dialectique de soumission de toute une partie d'intellectuels de gauche
05:31qui encore une fois applaudissent, quoi qu'il arrive,
05:33à tout ce qui remettrait en cause une hégémonie occidentale.
05:36Mais je suis beaucoup plus sévère que Dartigold sur la position du gouvernement
05:41parce que, n'oubliez pas, malgré tout...
05:43T'es plus sévère en général, surtout.
05:45En général, surtout.
05:47C'est le président de la République lui-même qui a fait fleurir très récemment
05:51sur le carré des martyrs en Algérie, la tombe d'un chef FLN,
05:56l'abri Ben Midi, qui a été un des co-auteurs de l'attentat du Milk Bar en 1957
06:03qui allait ouvrir la guerre d'Algérie.
06:05Héros de la résistance pour les Algériens.
06:07Héros de la résistance pour les Algériens.
06:09C'est une affaire entendue, mais pas un héros français.
06:12Or, à chaque fois, vous vous rendez compte des compromissions de l'État français
06:16pour essayer d'acheter précisément la bienveillance de l'Algérie.
06:21Et plus l'État français lèche les babouches du régime FLN,
06:27et plus, effectivement, il se fait cracher à la figure.
06:29En quelques mots...
06:30Attention, c'est important de le dire,
06:32parce que moi j'ai une grande estime pour Benjamin Stora.
06:35On peut avoir un discours, parfois critique,
06:38sur certains éléments amenés par Boalem Sansal,
06:40dans le débat intellectuel.
06:42Ça c'est normal.
06:43On peut faire preuve d'altérité sur certaines choses qu'il a pu donner,
06:47mais on peut aussi contester certaines analyses.
06:49Ça c'est le débat, il est ouvert, il est libre.
06:51Par contre, personne ne peut,
06:53argant de différences d'appréciation avec Sansal,
06:57ne pas demander très clairement sa libération par le régime algérien.
07:02C'est important de reposer ça.
07:04Oui, vous avez raison Olivier Dertigold, Yvan Riofol.
07:06On va clore ce débat, on se retrouve dans quelques instants.
07:08On va parler d'un autre sujet,
07:09on va parler de la politique française cette fois,
07:11avec la semaine de tous les dangers pour Michel Barnier.
07:14La menace de la censure plane au-dessus de lui,
07:17et il a reçu Marine Le Pen ce matin,
07:19qui campe, vous allez l'entendre, sur ses positions.
07:21A tout de suite.
07:22Europe 1, il est 13h43, vous écoutez Céline Giraud.