Céline Géraud, accompagnée de la rédaction d’Europe 1, propose chaque midi un point complet sur l’actualité suivi de débats entre invités et auditeurs.
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00:0013h, 14h, Europe 1 13h. Europe 1 13h, la suite sur Europe 1, vous écoutez Céline Giraud et Céline, on vous retrouve avec vos deux chroniqueurs du jour,
00:07la journaliste et essayiste Laëtitia Schreus Bonnard et l'écrivain essayiste Paul Mulin.
00:11Et c'est une sale journée pour l'emploi en France, un mardi noir pour Michelin et Auchan qui ont annoncé coup sur coup de vastes coupures dans leurs effectifs.
00:21Alors on va commencer par Michelin qui va donc fermer ses usines de Cholet et de Vannes, 1254 postes supprimés.
00:30Pour le maire de Vannes, David Robaud qui était sur France Info, c'est une catastrophe.
00:34C'est une journée noire pour Vannes, c'est un séisme pour le territoire.
00:40Le territoire de Vannes est étroitement lié à l'arrivée de Michelin il y a 63 ans, à travers un quartier populaire qui a été construit, à travers une voie ferrée qui a été construite,
00:47une usine d'eau qui a été construite et ce matin j'entends les salariés qui sont anéantis, effectivement ils étaient très attachés à leur outil de travail.
00:56Moi j'appelle vraiment Michelin de mes voeux à ce qu'il y ait un suivi individuel très important de ces salariés.
01:03Voilà donc Michelin effectivement fleuron de l'industrie française, historique, c'était prévisible mais voilà la menace, ça y est le couperet est tombé.
01:14Oui apparemment les dirigeants de Michelin invoquent le problème de la hausse de l'énergie pour justifier leur fermeture,
01:20ça me rappelle vous savez il y a quelques mois il y a eu le sujet autour de Duralex qui fabriquait les verres de cantine, etc.
01:26Qui a trouvé repreneur et qui a réussi à se relancer.
01:29Qui a trouvé repreneur parce qu'ils se sont constitués aussi en scope mais qui subissait aussi ce problème de l'énergie associé pour le coup aussi à l'inflation.
01:36Là il y a la concurrence chinoise et le fait que le marché des voitures thermiques soit quand même en chute libre.
01:42Donc il y a un peu plusieurs raisons.
01:45Après de ce que j'ai lu et de ce que j'ai pu entendre dans les médias c'est qu'il semblerait que la direction de Michelin soit dans une logique relativement sociale, d'accompagnement.
01:55Et d'essayer d'aider à la mobilité interne, aux pré-retraites pour que les salariés ne restent pas sur le carreau.
02:01Ça c'est une première partie de la solution, après ce qui est vrai c'est que ce que dit le maire de Vannes est extrêmement cruel.
02:07Une commune comme celle-ci, une ville moyenne, lorsqu'elle perd un site industriel de cette envergure, avec les infrastructures qui ont été associées, logements, transports, c'est un col très dur qui peut dévaster jusqu'aux services publics, jusqu'aux équilibres sociaux de la commune.
02:25Donc c'est extrêmement problématique.
02:26Moi je pense qu'il aurait fallu déjà étudier toutes les solutions possibles jusqu'à présent, notamment en matière de baisse d'impôts sur les énergies qu'ils payent.
02:35Pour essayer de réfléchir peut-être avec l'État sur tout ce qui pouvait être mis en place pour éviter d'en arriver là.
02:41Parce qu'après on a beau jeu, si vous voulez, de parler du Made in France, de parler de florons industriels français.
02:48Donc il faut essayer quand même de tout faire pour éviter les fermetures de sites.
02:51Mais c'est compliqué aussi.
02:53Quand c'est inéluctable il faut surtout se préoccuper des salariés.
02:55Voilà c'est ça, parce que la concurrence des pneus chinois effectivement elle est compliquée.
02:58On entendait tout à l'heure Aurélien Floreau nous dire qu'il y a aussi également Continental, Goodyear, Bridgestone, des grandes marques de pneumatiques qui sont en souffrance.
03:06C'est la fin d'une embellie, d'une séquence un peu de réindustrialisation qui avait été impulsée par Emmanuel Macron ?
03:13Ça serait peut-être aller un peu vite que de concurrence.
03:17Ça dépend des industries en fait.
03:19La réindustrialisation elle se fait dans d'autres domaines.
03:21On a beaucoup parlé des usines, des méga usines de batterie.
03:25Oui mais là on est sur Michelin, c'est quelque chose d'historique.
03:27Symboliquement c'est très fort.
03:29Ce qui est compliqué c'est que parfois ce genre de scénario catastrophe a lieu parce que les décisions de fermeture sont prises trop tard.
03:37C'est un petit peu paradoxal au sens où les entreprises parfois essaient de tenir à bout de bras des filiales ou des usines qui devraient être fermées plus tôt.
03:47Ou dans d'autres cas ferment à tort certaines usines.
03:51Je pense qu'on ne peut pas généraliser.
03:53Il y a quand même aujourd'hui en France, on a une difficulté à prendre ce genre de décision.
03:59Pour toutes les raisons dont on parle.
04:01Alors que parfois c'est mieux de les prendre assez tôt pour pouvoir ensuite gérer la suite et aider les personnes à s'adapter.
04:07Il y a toujours cette question du bon moment.
04:11Certains analystes estiment que Michelin a peut-être un peu trop attendu.
04:15On pense qu'on rend service aux gens en attendant mais en fait c'est le contraire.
04:21C'est très contre-intuitif ce que je vais dire mais on a tendance à parler beaucoup plus des usines qui ferment que des usines qui ouvrent.
04:29Il y en a deux qui vont fermer en Allemagne aussi.
04:31C'est rare qu'on fasse les gros titres avec les usines ouvrent tous les jours.
04:35C'est normal parce que le rôle des médias c'est aussi de parler des choses peut-être compliquées ou les choses négatives.
04:43On a peut-être tous le bien.
04:45C'est la violence des annonces qui sont concomitantes.
04:48Pour relativiser, je ne cherche pas à diminuer les conséquences de ce fait-là mais il faut forcément toujours mettre ce genre d'informations et de faits en perspective avec d'autres.
05:00On va parler d'une autre fermeture.
05:02Un vaste plan social dans le même temps a été annoncé chez Auchan.
05:06Cette fois on parle de 2389 emplois avec notamment la fermeture d'une dizaine de magasins pour tenter de se relancer.
05:12Gilles Martin, c'est le délégué central CFDT pour Auchan et pour lui ce plan social serait le résultat de plusieurs années d'errements stratégiques.
05:19Plus de 17 changements de présidence en 24 ans.
05:22Ce n'est pas comme ça qu'une entreprise peut tenir un cap.
05:25Des projets il y en a eu, des bons il y en a eu.
05:27Le problème c'est qu'il n'y a pas forcément le temps de les mettre en place.
05:29Mais pourquoi Auchan perd de l'argent ?
05:31Je vais vous faire un constat très clair.
05:33La mise en place des caisses automatiques depuis deux ans génère selon nous plus de 100 millions de démarques inconnues.
05:39On y met tout dedans, de la mauvaise gestion, du vol.
05:41A un moment donné les clients ne s'y retrouvent plus.
05:43Quand ils passent en caisse, j'ai eu moi-même le cas sur un site quand les caisses ont été mises en place.
05:48Les gros caddies, les clients me disaient on n'aura plus faire nos courses parce qu'on n'arrive plus à passer nos gros caddies donc on va ailleurs.
05:54Ça n'est qu'un des éléments mais c'est un élément révélateur.
05:58Voilà un élément révélateur et je rappelle aussi que cette enseigne, Auchan, a changé 17 fois de patron en 24 ans.
06:04C'est là que ce délégué syndical n'a pas tort.
06:07C'est-à-dire qu'au plan stratégique pour le coup Auchan n'est pas dans le trio tête aujourd'hui des hypermarchés en France.
06:13Ils représentent je crois 9%.
06:15Auchan a eu beaucoup de difficultés.
06:17Il y a eu des virages fondamentaux dans la grande distribution.
06:19Le retour dans les centres-villes avec plein de marques, je ne vais pas lister ici, mais plein de maisons qui se sont remises.
06:24Il y a trop de magasins Auchan aussi.
06:26Auchan, ils sont restés sur le modèle du grand hypermarché de périphérie
06:31avec tout ce qu'il avait de bénéfique pour la consommation de masse jusque dans les débuts des années 2000
06:36mais qui aujourd'hui est un peu ingène, qui ne marche plus.
06:39Donc ça ils n'ont pas pris, le virage de la caisse automatique.
06:41C'est très intéressant, moins de caissières, plus de caisses automatiques, plus de vols.
06:45Plus de vols.
06:46De penser que l'automatisation va pouvoir améliorer la consommation alors qu'en fait ça fait fuir beaucoup de gens qui préfèrent un contact humain avec des caisses syndicales.
06:55On n'est pas tout à fait sur le même sujet d'ailleurs que Michelin.
06:58Je partage d'ailleurs ce que disait Laëtitia sur le fait qu'ils ont repoussé cette décision
07:01mais elle était un peu inéluctable au vu, je vous le disais Céline, du marché mondial
07:05et de la hausse des prix de l'énergie.
07:07Or là, Auchan, ce n'est pas pareil.
07:09Auchan, ce n'est pas un manque d'anticipation, c'est un manque de vision.
07:12Alors il faudrait qu'ils réfléchissent, le groupe Muliez, pour essayer de s'en sortir mieux
07:16par rapport à un environnement qui quand même est hyper concurrentiel qu'est celui de la grande distribution.
07:21Eric qui nous appelle au standard 01 80 20 39 21. Bonjour Eric.
07:25Oui bonjour.
07:26Merci d'être avec nous en direct dans Europe 1 13h.
07:29Vous nous écoutez en Rhône-Alpes, vous vouliez réagir sur ce plan social ?
07:32Sur Lyon, oui je voudrais réagir.
07:34Paul Molin a bien résumé la question, c'est-à-dire que c'est un marché qui est hyper concurrentiel.
07:39Le délégué syndical vient de le dire aussi, c'est-à-dire des erreurs stratégiques.
07:43Mais le problème de ces grands groupes, notamment en France, on y revient comme Michelin et tout ça,
07:48vous avez un problème dans la hiérarchie de ces groupes.
07:52Il y a déjà une masse salariale qui est énorme.
07:54Il y a des gens qui travaillent au siège de ces entreprises, dans le domaine marketing, il y a des directeurs.
08:00Vous allez dans ces entreprises, il y a 15 directeurs.
08:02C'est le problème de la technostructure.
08:04C'est ce qu'on a avec notre gouvernement actuellement.
08:06Vous avez une technostructure.
08:08Il faut remonter à la genèse de tout ça.
08:10La genèse de tout ça, c'est quoi ?
08:12De toute façon, depuis notre ami Giscard d'Estaing, une technostructure qui a été mise en place
08:20et qui a mis en délitement non seulement l'État français, c'est-à-dire les institutions,
08:26mais aussi les entreprises, parce que ça a débordé sur les entreprises.
08:29Alors, je n'ai rien contre les gens qui font des grandes études,
08:31mais effectivement, tous ces grands diplômés, tous ces gens qui sont Polytechnique, HEC, l'ENA,
08:37tous ces gens-là, quand ils ne peuvent pas aller dans les institutions au niveau des corps d'État,
08:41on les retrouve dans les grandes entreprises.
08:43Et dans ces grandes entreprises, ce qui se passe, c'est zéro stratégie,
08:47parce que ce sont des gens qui sont complètement déconnectés de la réalité.
08:50Et vous-même, vous fréquentez ces hypermarchés, ces supermarchés ?
08:55Bien sûr, bien sûr.
08:56Moi, je connais bien ces supermarchés, parce que je les fréquente régulièrement.
08:59Alors, effectivement, il y a deux choses qui sont bien précises,
09:03et ils n'ont pas pris la mesure.
09:05Comme je disais, ils sont restés à l'ancienne.
09:07Il y a la partie non-alimentaire.
09:09Par exemple, dans les hypermarchés russes, il y a une grande partie non-alimentaire.
09:13Et cette partie non-alimentaire, elle est hyper concurrencée par nos amis chinois.
09:17Aujourd'hui, nos amis chinois, qui sont très forts dans le e-commerce...
09:21Alors, bien évidemment, aujourd'hui, tout ce qui concerne l'électroménager, le textile et tout ça,
09:27vous avez des sites, aujourd'hui, je ne citerai pas les noms,
09:29mais qui sont très bien achalangés.
09:32On fait une commande, en Chine, ça arrive sous 4 jours ou 5 jours,
09:35alors que sur des sites européens ou des sites français,
09:38vous faites une commande, ça arrive dans deux semaines.
09:40Donc, tout ça, si vous voulez, c'est concurrentiel.
09:42Après, les produits alimentaires, effectivement, ils ont trop de références.
09:49Trop de références, mais c'était un des reproches qui a été fait, effectivement.
09:51En termes de stratégie, on en revient toujours à la même chose.
09:54Le problème, si vous voulez, la stratégie, elle est très simple.
09:57Moi, je vous écoute depuis longtemps.
09:59Paul Molin, tous ces intervenants qui interviennent sur CNOS et tout ça,
10:03ils le répètent à longueur de journée.
10:05C'est de la rhétorique.
10:06Effectivement, la technostructure, tous ces gens-là,
10:09qui sont aussi bien dans les grands corps d'État,
10:11mais dans les grandes entreprises,
10:13eh bien, voilà ce qui se passe.
10:14Aujourd'hui, vous avez Michelin.
10:16Vous l'avez cité, Michelin, c'est pareil.
10:18Alors, je ne vais pas jeter l'opropre sur les technocrates,
10:22mais voilà.
10:23Un peu quand même.
10:27Merci beaucoup, Éric.
10:28En tout cas, c'était très intéressant, votre témoignage
10:31et cette analyse.
10:32Voilà, Éric qui nous écoute en Rhône-Alpes
10:34et qu'on remercie de nous avoir appelés au 01 80 20 39 21 pour réagir.
10:38Et si vous souhaitez réagir sur le sujet suivant,
10:40eh bien, n'hésitez pas à nous appeler.
10:41On va parler, tiens, de cet ouvrage de Jordane Bardella
10:44qui paraît samedi, ce livre,
10:46ce que je cherche.
10:47Qui fait déjà beaucoup parler.
10:48Qui fait déjà beaucoup parler, avant même de sortir.
10:50On en parle, là, tout de suite.